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Date : 20170718


Dossier : IMM-3590-16

Référence : 2017 CF 688

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 18 juillet 2017

En présence de monsieur le juge Fothergill

ENTRE :

HASSAN ABOLORE GANIYU

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  Aperçu

[1]  M. Hassan Abolore Ganiyu sollicite le contrôle judiciaire de la décision par laquelle un agent d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada a rejeté la demande de résidence permanente qu’il avait présentée à titre de personne protégée.

[2]  Pour les motifs qui suivent, je conclus que l’agent d’immigration avait avisé de manière suffisante M. Ganiyu du fait que les documents qu’il avait produits pour établir son identité n’étaient pas adéquats. Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

II.  Le contexte

[3]  M. Ganiyu est entré au Canada le 22 août 2014 et a demandé l’asile peu après. Le 19 novembre 2014, la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié a conclu que M. Ganiyu était un réfugié au sens de la Convention.

[4]  En décembre 2014, M. Ganiyu a présenté une demande de résidence permanente à titre de personne protégée. Il a produit, comme preuve de son identité, un permis de conduire, un certificat de naissance, ainsi qu’un certificat d’origine. L’Agence des services frontaliers du Canada [l’ASFC] a par la suite établi que le permis de conduire était un faux et que le certificat de naissance ainsi que le certificat d’origine étaient « apocryphes ».

[5]  L’ASFC qualifie d’apocryphe un document à l’égard duquel il existe [traduction] « de sérieuses préoccupations à propos de son authenticité ou de la manière dont il a été obtenu. Lorsqu’un document est considéré comme apocryphe, il ne peut constituer une preuve crédible quant à l’identité du demandeur ».

[6]  Par lettre datée du 2 juin 2016 [la lettre d’équité], l’agent d’immigration a écrit à M. Ganiyu pour l’informer que les documents qu’il avait produits ont été déclarés [traduction] contrefaits et frauduleux, et qu’ils ne pouvaient pas être utilisés pour établir son identité. L’agent d’immigration lui a expliqué qu’un passeport, un document de voyage ou une carte d’identité émise par son pays d’origine, notamment, étaient des pièces adéquates pour établir son identité. Subsidiairement, M. Ganiyu pouvait produire certains autres documents, accompagnés de la déclaration solennelle d’un tiers. M. Ganiyu a répondu à cette demande en produisant un passeport nigérian.

III.  La décision visée par la demande de contrôle judiciaire

[7]  Le 11 août 2016, l’agent d’immigration a informé M. Ganiyu que le passeport nigérian qu’il avait produit avait aussi été déclaré « contrefait et frauduleux ». Sa demande de résidence permanente a donc été rejetée.

IV.  La question en litige

[8]  M. Ganiyu a initialement contesté la décision de l’agent d’immigration en se fondant sur un certain nombre d’autres motifs. Cependant, à l’instruction de la demande de contrôle judiciaire, il a choisi de circonscrire ces motifs autour d’une seule question, se rapportant à l’équité procédurale : la lettre d’équité lui donnait-elle un avis suffisant de la cause contre laquelle il devait se défendre?

V.  Analyse

[9]  Les questions relatives à l’équité procédurale sont susceptibles de contrôle par la Cour selon la norme de la décision correcte (Canada (Citoyenneté et Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12, au paragraphe 43).

[10]  M. Gayuni affirme que la lettre d’équité portait à confusion et qu’elle était trompeuse. Elle décrivait tous les documents d’identité de M. Gayuni comme étant [traduction« contrefaits et frauduleux » alors qu’en fait, elle avait déclaré qu’un seul des documents était une contrefaçon et que les deux autres avaient été déclarés apocryphes. M. Gayuni n’était pas représenté par un conseil à ce moment et affirme que la liste de documents de rechange qu’on lui avait proposée portait à confusion, étant donné qu’il avait auparavant produit des documents d’identité émis par son pays d’origine. En dernier lieu, et plus important encore, il affirme que la lettre d’équité aurait dû inclure les rapports d’analyse des documents rédigés par l’ASFC relativement aux documents d’identité qu’ils avaient produits.

[11]  Selon M. Ganiyu, si la lettre d’équité avait été accompagnée des rapports d’analyse des documents de l’ASFC, sa réponse aurait alors pu être différente. Il aurait su que deux des documents avaient été déclarés comme étant apocryphes, plutôt que contrefaits, et il aurait pu demander à obtenir des documents types afin de confirmer leur authenticité. Il aurait aussi pu demander à ce qu’une analyse indépendante des documents soit réalisée et produire les résultats de cette analyse.

[12]  Le défendeur prétend que l’agent d’immigration a donné suffisamment de renseignements à M. Ganiyu pour permettre à ce dernier de comprendre ce qu’il devait produire en réponse. L’agent d’immigration n’avait pas l’obligation de donner à M. Ganiyu une liste de résultats intermédiaires ou une possibilité supplémentaire de répondre à des préoccupations continues (renvoyant aux décisions Bhatti c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 186, au paragraphe 46, et Liao c Canada (Citoyenneté et Immigration), [2000] CAF no 1926, aux paragraphes 23 à 25).

[13]  Je suis convaincu que la lettre d’équité informait suffisamment M. Ganiyu du fait que l’agent d’immigration avait considéré les documents d’identité qu’il avait produits comme inadéquats. Le fait que ces documents aient été décrits comme étant contrefaits, frauduleux ou apocryphes n’est pas déterminant en l’espèce. Si M. Ganiyu croyait sincèrement que les documents étaient authentiques, il aurait pu produire une preuve en ce sens en réponse. Il a plutôt répondu au moyen d’un passeport nigérian, lequel l’ASFC a déclaré comme ayant été modifié par la substitution d’une nouvelle page biographique.

[14]  M. Ganiyu ne conteste pas le rapport d’analyse des documents rédigés relativement au passeport nigérian modifié, et, par conséquent, la demande de contrôle judiciaire doit être rejetée.

VI.  Conclusion

[15]  La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

[16]  M. Ganiyu a proposé qu’une question soit certifiée pour les besoins d’un appel en ce qui a trait au caractère suffisant de la lettre d’équité. Cependant, je ne suis pas convaincu que cela soulève une question grave de portée générale qui transcende les intérêts des parties (Lewis c Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2017 CAF 130, aux paragraphes 35-36). Les exigences de l’équité procédurale varieront selon les circonstances, et la question de savoir si elles ont été satisfaites dans un cas donné dépend habituellement des faits de celui‑ci.

[17]  L’avocat du défendeur demande que le procureur général du Canada soit nommé comme avocat inscrit au dossier, en remplacement du sous-procureur général du Canada, parce que ce dernier, dont le nom figure dans l’avis de comparution du défendeur, a récemment été nommé juge de la Cour. L’avocat de M. Ganiyu ne s’oppose pas à la demande, à laquelle je fais donc droit.


JUGEMENT

LA COUR STATUE que :

  1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

  2. Aucune question n’est certifiée aux fins d’un appel.

  3. Le procureur général du Canada est désigné comme avocat inscrit au dossier du défendeur.

« Simon Fothergill »

juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-3590-16

 

INTITULÉ :

HASSAN ABOLORE GANIYU c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Ottawa (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 10 JUILLET 2017

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE FOTHERGILL

 

DATE DU JUGEMENT ET DES MOTIFS :

LE 18 JUILLET 2017

 

COMPARUTIONS :

Richard A. Odeleye

POUR LE DEMANDEUR

 

 

Christopher Chrighton

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Richard Odeleye Law Firm

Avocat

North York (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

 

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

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