Dossier : T-1979-16
Référence : 2017 CF 645
[TRADUCTION FRANÇAISE]
Ottawa (Ontario), le 4 juillet 2017
En présence de madame la juge Strickland
ENTRE : |
TIELUN SU |
demandeur |
et |
LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA |
défendeur |
JUGEMENT ET MOTIFS
[1] Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision du 2 novembre 2016 du commissaire Robert W. Paulson (le « commissaire ») de la Gendarmerie royale du Canada (« GRC ») rejetant l’appel du demandeur interjeté à l’égard d’une ordonnance rendue en application du sous-alinéa 22(2)a)(ii) de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, LRC (1985), ch. R-10 (la « Loi sur la GRC ») mettant fin à sa solde et à ses indemnités au motif qu’il était absent de son poste sans permission (la « décision d’appel »).
Contexte
[2] Le demandeur est membre du personnel civil de la GRC depuis le 13 octobre 2009 et est affecté à la sous-direction des services techniques de protection de la division « E » comme technicien électronique et électromécanique. Un cancer du foie a été diagnostiqué au demandeur. Il a été absent du travail entre le 27 avril 2012 et le 28 octobre 2015 et pendant ce temps, l’entièreté de la solde et des indemnités auxquelles il avait droit en vertu de la politique de congé de maladie de la GRC lui a été versée. Il a été mis fin à la solde et aux indemnités du demandeur le 28 octobre 2015 après qu’une ordonnance prévoyant la cessation de la solde et des indemnités eut été rendue.
[3] Plusieurs communications ont eu lieu avant la suspension. Celles-ci comprenaient une lettre au demandeur, datée du 14 avril 2015, de l’inspecteur Kevin O’Blenis (« l’inspecteur »), à titre de chef du demandeur, lui demandant de communiquer avec lui pour discuter des mesures d’adaptations possibles ainsi que des autres systèmes d’aide aux employés accessibles pour faciliter le retour au travail du demandeur. Cette lettre notait également que le demandeur était en arrêt de travail depuis le 27 avril 2012, que son certificat médical le plus récent était daté du 29 janvier 2015 et qu’il recommandait un arrêt de travail de trois mois. Elle ajoute que la dernière divulgation de renseignements médicaux concernant l’incapacité médicale du demandeur avait été reçue le 30 janvier 2015, mais que celle-ci ne faisait état d’aucune restriction ou limitation applicable. En outre, le demandeur a quitté le pays sans d’abord en obtenir l’autorisation et la GRC a depuis été incapable de communiquer directement avec lui. La lettre réitérait l’engagement de la GRC à aider ses employés dans la situation du demandeur à retourner au travail au moyen de mesures d’adaptations et demandait au demandeur de communiquer avec l’inspecteur dans les sept jours suivant la réception de la lettre. Le demandeur n’a pas répondu à la lettre du 14 avril 2015.
[4] Le 21 avril 2015, à la demande de l’inspecteur, le sergent d’état-major Stephen Withworth (« sergent d’état-major ») s’est présenté au domicile du demandeur pour confirmer que la lettre du 14 avril 2015 avait bien été reçue et comprise. Dans un courriel du 22 avril 2015, le sergent d’état-major a avisé l’inspecteur que le demandeur a confirmé la réception de la lettre, mais qu’il était réticent à communiquer avec l’inspecteur avant de rencontrer son médecin de famille, rencontre qui devait avoir lieu au cours de la semaine du 26 avril 2015, et son médecin spécialiste pour subir une imagerie par résonance magnétique (IRM) à la mi-mai. Le sergent d’état-major a mentionné qu’il a expliqué au demandeur qu’après avoir reçu les renseignements médicaux, il était nécessaire de prendre une décision à propos du retour au travail ou de la retraite pour cause de maladie du demandeur.
[5] Le 1er mai 2015, l’inspecteur a de nouveau écrit au demandeur. Dans cette lettre, l’inspecteur a décrit l’état actuel de la situation, y compris le fait que le demandeur n’a pas déposé la formule de certificat médical 2135 mise à jour (« certificat médical »), qu’il était en congé sans justification et absent de son poste sans autorisation. La lettre exposait les obligations et exigences imposées au demandeur. La politique applicable à l’examen de la situation du demandeur y était jointe et l’inspecteur a attiré l’attention du demandeur sur une liste non exhaustive des exigences à respecter pour la suite des choses. Ces exigences prévoyaient que le demandeur devait fournir un certificat médical valide pour toute absence de plus de 40 heures consécutives de travail décrivant ses limitations et restrictions ainsi que la date prévue de la reprise des fonctions habituelles ou modifiées. Tout certificat médical prévoyant une date de retour au travail « indéterminée » ou toute autre formulation semblable était valide pour une durée maximale de 30 jours. L’autorisation écrite de l’inspecteur devait être obtenue pour tout voyage de plus de 24 heures à l’extérieur des limites de la région d’emploi ou de résidence, à l’exception des périodes usuelles de congé. Le demandeur devait également participer activement à tout plan de traitement prescrit et se montrer disponible pour tout contrôle et toute consultation recommandée par son médecin. Le demandeur devait maintenir la communication avec l’inspecteur et son gestionnaire de dossier d’invalidité et fournir tout renseignement supplémentaire demandé au besoin.
[6] La lettre précisait ensuite ce que le demandeur devait fournir et donnait des directives à cet égard, soit qu’il fasse parvenir à l’inspecteur avant le 8 mai 2015 un certificat médical valide faisant état des limitations et restrictions applicables ainsi que la date prévue de la reprise des fonctions habituelles ou modifiées. De plus, en application de la politique, la médecin-chef (MC) aura besoin du questionnaire d’évaluation d’invalidité (ou la « formule 4056 ») ainsi qu’une déclaration des capacités fonctionnelles. Ces formules devront être remplies par un médecin et indiquer les limitations et restrictions du demandeur. Ces formules seraient utilisées pour déterminer quelles fonctions et tâches pouvaient être effectuées par le demandeur et étaient essentielles pour permettre son retour au travail. Ces formules devaient être remplies dans les 14 jours de la rencontre du demandeur avec son médecin et envoyées directement au MC. De plus, le demandeur devait, avant le 8 mai 2015, fournir à l’inspecteur un moyen de communication fiable puisqu’il avait indiqué qu’il ne possédait pas de téléphone. La lettre du 1er mai 2015 mentionnait également les conséquences potentiellement graves du fait de ne pas se conformer à ces demandes, y compris la cessation possible du versement de sa solde et le risque d’être renvoyé de la GRC puisqu’il se trouverait en congé non justifié et donc qu’il serait absent du travail sans autorisation.
[7] Le 12 mai 2015, le sergent d’état-major et un traducteur se sont présentés à la résidence du demandeur pour lui donner en main propre la lettre de l’inspecteur du 1er mai 2015. Dans un courriel daté du même jour, le sergent d’état-major déclarait à l’inspecteur que le traducteur et lui-même étaient convaincus que le demandeur avait compris le contenu des documents, soit la lettre, le certificat médical (formule 2135), le questionnaire d’évaluation d’invalidité (formule 4056) et les copies des politiques applicables du manuel d’administration de la GRC, ce que le demandeur a confirmé. Le sergent d’état-major mentionnait que le demandeur avait affirmé avoir transmis le certificat médical, mais que son médecin refusait de remplir la formule 4056. Il ajoutait qu’il a été expliqué au demandeur qu’il devait retourner voir son médecin puisqu’il avait la responsabilité de s’assurer qu’il respectait les directives de l’inspecteur et qu’un non-respect de celles-ci pouvait entraîner la suspension du versement de son salaire. La possibilité pour le demandeur de prendre sa retraite pour cause de maladie a également été discutée et le demandeur a fourni un numéro de téléphone au sergent d’état-major.
[8] Le demandeur a répondu à la lettre de l’inspecteur du 1er mai 2015 par un courriel daté du 8 mai 2015. En réponse aux directives de l’inspecteur, il y déclarait que [traduction] « [...] mon nouveau médecin n’aime pas remplir la formule 4056. Selon lui, ce n’est pas de sa responsabilité [...] [J]e ne peux donc respecter votre exigence ». En outre, il ajoutait ceci : [traduction] « Je suis tout à fait d’accord pour divulguer en tout moment mes renseignements médicaux à la médecin-chef si celle-ci en fait la demande à mes médecins! Il s’agit du mieux que je peux faire pour la formule 4056 ». Le demandeur a également demandé que la médecin-chef envoie les formules 4056 et 3414 (Rapport sur les situations comportant des risques) à ses médecins. Je m’arrête ici pour expliquer que « MC » signifie médecin-chef. Il s’agit d’un médecin autorisé chargé de superviser et de coordonner la formulation des recommandations et des avis professionnels par les programmes des Services de santé, et de surveiller l’application appropriée des normes professionnelles de santé dans une ou plusieurs divisions de la GRC. La Dre Tania Fitzpatrick (la « Dre Fitzpatrick ») était la médecin-chef assignée au demandeur jusqu’à la fin du mois de juin 2015, date à laquelle la Dre Karen Hossack (la « Dre Hossack ») a hérité de la responsabilité d’examiner l’aptitude médicale au travail du demandeur.
[9] Le 6 juillet 2015, le demandeur a également envoyé un courriel à l’inspecteur et à Mme Alice Hsing, affirmant qu’il avait déjà expliqué pourquoi la formule 4056 n’avait pas été envoyée, mais ajoutant qu’il [traduction] « pensait pouvoir obtenir une évaluation après [son] rendez-vous avec [son] spécialiste ». Il affirmait dans ce courriel qu’il n’avait pas rencontré son spécialiste depuis son retour de Beijing, mais qu’il insistait auprès de son médecin de famille afin d’obtenir un rendez-vous. Il contestait également dans ce courriel une décision antérieure selon laquelle sa maladie n’était pas reliée au travail. Dans un courriel du 20 juillet 2015, le demandeur réitérait qu’il avait rempli la formule 4056 et qu’il attendait une réponse aux questions qu’il avait soulevées à propos de la formule 3414 (Rapport sur les situations comportant des risques).
[10] À la demande de l’inspecteur, la Dre Hossack a rédigé son opinion de l’état médical actuel du demandeur dans une note de service datée du 28 juillet 2015 afin d’aider l’inspecteur à décider s’il devait approuver, annuler ou rejeter le congé de maladie continu du demandeur. La Dre Hossack déclarait dans cette note qu’après avoir examiné tous les documents pertinents accessibles à la GRC et avoir effectué les consultations nécessaires pour formuler sa recommandation, en l’absence de nouvelle information, elle se trouvait dans l’impossibilité de recommander la poursuite du congé de maladie continu du demandeur signifiant une absence complète de son poste. Elle recommandait plutôt que le demandeur bénéficie d’un congé de maladie composé d’heures de travail réduites dans le cadre d’une entente de retour au travail. Elle déclarait également qu’elle avait demandé la divulgation des renseignements médicaux pertinents, qu’elle avait sollicité des clarifications aux fournisseurs de soins de santé du demandeur et qu’elle demeurait disponible pour rencontrer le demandeur s’il souhaitait discuter de son état de santé ou de ses limitations et de ses restrictions dans le cadre de son retour au travail.
[11] Le 29 juillet 2015, l’inspecteur a écrit une fois de plus au demandeur. Il a affirmé dans cette lettre que conformément à sa demande, le sergent d’état-major et un traducteur s’étaient présentés au domicile du demandeur afin de s’assurer qu’il comprenait sa lettre du 1er mai 2015, ce qu’ils ont confirmé. L’inspecteur a reconnu que le demandeur a fourni un certificat médical (la formule 2135) daté du 25 juin 2015, mais a affirmé que ce certificat était incomplet puisqu’il était muet à l’égard des limitations et restrictions du demandeur relativement au travail ainsi qu’à sa date prévue de reprise de ses fonctions, habituelles ou modifiées. L’inspecteur a affirmé qu’il était regrettable que le médecin du demandeur ait refusé de l’aider à remplir la formule 4056 (le questionnaire d’évaluation d’invalidité), mais que cette situation ne le libérait pas de ses obligations. De plus, l’inspecteur a ajouté qu’il a consulté la Dre Hossack, la médecin-chef du demandeur, et que cette dernière l’a avisé qu’en fonction des renseignements médicaux dont elle disposait, l’absence du demandeur de son poste en raison d’un congé de maladie n’était pas médicalement justifiée et qu’il était en mesure de retourner au travail d’une façon ou d’une autre. L’inspecteur a mentionné que la médecin-chef a sollicité des renseignements médicaux supplémentaires des fournisseurs de soins du demandeur, mais que celui-ci demeurait de sa responsabilité de fournir les renseignements médicaux exigés à l’appui de son arrêt de travail. Cette lettre avisait le demandeur que considérant son défaut continu de fournir un certificat médical dûment rempli et son absence continue du travail, l’inspecteur annulait son arrêt de travail pour cause de maladie. Par conséquent, il se trouvait désormais en congé non autorisé. La lettre offrait une dernière occasion au demandeur de fournir avant le 7 août 2015 un certificat médical dûment rempli ainsi que tout autre renseignement médical nécessaire devant être validé par la Dre Hossack. Elle affirmait que si le demandeur faisait défaut de fournir ces renseignements, l’inspecteur recommanderait la cessation du versement de la solde et des indemnités en vertu de l’alinéa 22(2)(i) de la Loi sur la GRC. Cela signifierait donc que la solde ainsi que les prestations d’assurance-maladie et d’assurance-maladie complémentaires ne seraient plus versées. La lettre incitait le demandeur à prendre cette affaire au sérieux et affirmait que la GRC souhaitait le voir retourner au travail, mais qu’il lui était également loisible de choisir l’option d’être libéré de consentement pour des raisons médicales.
[12] Le 3 août 2015, le demandeur a répondu par courriel, en précisant qu’il joignait au courriel un certificat médical mis à jour (formule 2135) et qu’il était désolé puisqu’en raison de sa négligence, ce certificat était incomplet, mais que [traduction] « le certificat complet [leur] serait envoyé plus tard ». En ce qui a trait à la formule 4056, il a noté qu’il en a fait mention dans ses courriels précédents et il a accepté de divulguer ses renseignements médicaux si la GRC faisait part de ses exigences à ses spécialistes et qu’il s’agissait du mieux qu’il pouvait faire. Il affirmait qu’il avait presque perdu la vie en raison de l’environnement de travail malsain de la GRC et que [traduction] « les faits mentionnés à ma formule 3414 sont clairs selon lesquels l’état de ma maladie est le résultat direct des mesures que j’ai subies au travail ». Il poursuivait en suggérant que l’affaire devrait être examinée sous l’angle de son retour sécuritaire au travail et que le problème relatif à la formule 3414 devrait être réglé avant que les détails de son retour au travail soient déterminés. Il ajoutait qu’il devait subir une IRM avec contraste puis rencontrer ensuite son spécialiste, qui pourrait avoir des suggestions supplémentaires relatives à la sécurité pour son retour au travail et mentionnait que ses résultats récents de prélèvements sanguins et d’échographie étaient joints au courriel aux fins d’examen.
[13] Dans un courriel daté du 20 août 2015, la Dre Hossack avisait l’inspecteur qu’elle n’avait pas eu de nouveaux contacts avec les médecins du demandeur, à l’exception de la réception d’un nouveau certificat médical (formule 2135) signé par le Dr Al-Jawadi. Elle affirmait qu’elle avait discuté avec le médecin principal et le médecin spécialiste du demandeur et qu’elle avait reçu des renseignements médicaux supplémentaires du demandeur (les examens de mai et juin), mais que ces renseignements ne modifiaient pas ses conclusions énoncées dans sa note de service précédente.
[14] Le 25 août 2015, le demandeur a envoyé un courriel à l’inspecteur, à Mme Hsing et à la Dre Hossack et y a joint un document qu’il a rédigé, intitulé [traduction] « Processus d’examen du congé de maladie » afin d’offrir à ces « nouveaux venus » un résumé plus détaillé de son congé de maladie. Le 27 août 2015, le demandeur a envoyé un nouveau courriel auquel était joint un certificat médical et déclarait que son médecin lui avait dit que [traduction] « remplir le champ “restrictions à l’exercice d’un emploi” de [son] certificat médical mis à jour se situait au-delà de [sa] compétence. Le spécialiste pourrait donner certains conseils à cet égard ». Il y mentionnait qu’il verrait son médecin spécialiste le 2 septembre 2016 et qu’il subirait l’IRM le 24 janvier 2016.
[15] L’inspecteur a préparé une « Recommandation de cessation de la solde et des indemnités » le 28 août 2015 par laquelle il recommandait la cessation de la solde et des indemnités versées au demandeur (la « recommandation ») en vertu du sous-alinéa 22(2)a)(ii) de la Loi sur la GRC. La recommandation décrivait en détail les faits sous-jacents et les diverses communications qui ont eu lieu. L’inspecteur y concluait qu’en date de la recommandation, le demandeur avait fait défaut de fournir le questionnaire d’évaluation d’invalidité dûment rempli (la formule 4056) telle qu’il avait été demandé le 1er mai 2015. Ce questionnaire détaillait les restrictions liées à l’emploi qui permettraient de décrire suffisamment les limitations et restrictions du demandeur à partir desquelles la GRC serait en mesure d’élaborer un plan de retour au travail comprenant les adaptations appropriées à l’incapacité du demandeur. En outre, le demandeur avait évité de prendre ses responsabilités afin de s’assurer que les renseignements médicaux pertinents soient envoyés au médecin-chef afin de lui permettre d’évaluer sa capacité au travail et de déterminer toute limitation et restriction dans le cadre du plan de retour au travail. L’inspecteur était d’avis que le demandeur avait bénéficié de nombreuses occasions pour fournir des renseignements médicaux décrivant ses limitations et restrictions afin que la GRC puisse prendre des mesures pour adapter son besoin de soutien dans le cadre de son retour au travail, mais que ce dernier avait ignoré les directives de l’inspecteur lui demandant de fournir les renseignements mentionnés en plus d’ignorer les demandes formulées par ses supérieurs immédiats et d’autres personnes. Le demandeur a délibérément continué de faire fi de ce qui lui était demandé en application de la politique de la GRC et du pouvoir discrétionnaire de l’inspecteur. De plus, la médecin-chef a exprimé l’avis que l’état du demandeur ne l’empêchait pas de retourner au travail et d’effectuer certaines tâches dans le cadre d’un plan de retour au travail.
[16] L’inspecteur a conclu donc que le demandeur s’est absenté du travail sans autorisation, malgré les mesures entreprises pour établir les motifs de son absence et la date de son retour prévu au travail. Par conséquent, l’inspecteur était d’avis que la solde et les indemnités du demandeur devaient être suspendues et qu’elles pourraient être rétablies lorsqu’il s’engagerait avec la médecin-chef dans un plan de retour au travail ou si la médecin-chef, après examen de nouveaux renseignements médicaux pertinents, changeait d’avis et appuyait le congé de maladie du demandeur et son absence complète du milieu de travail.
[17] Un avis d’intention de cessation de la solde et des indemnités daté du 2 septembre 2015 (l’« avis d’intention ») a été rendu par Mme Sharon Woodburn, commissaire adjointe, agente des ressources humaines (l’« ARH »). L’avis d’intention faisait état de l’intention de l’ARH de suspendre la solde et les indemnités du demandeur en raison de son absence de son poste sans autorisation. Il renvoyait à la recommandation et aux documents joints présentés à l’ARH comme faisant partie de la recommandation et qu’elle a utilisés pour forger son opinion. L’ARH a énuméré quatre motifs au soutien de son avis : le fait que le demandeur a fourni plusieurs certificats médicaux incomplets depuis le moment où il est parti en congé de maladie le 27 avril 2012, et ce, malgré de nombreuses demandes lui enjoignant de se conformer aux politiques et aux directives de l’inspecteur; les lettres de l’inspecteur datées du 14 avril 2015, du 1er mai 2015 et du 29 juillet 2015; la note de service du 28 juillet 2015 de la Dre Hossack et la décision de l’inspecteur datée du 29 juillet 2015 annulant le congé pour cause de maladie du demandeur, ce qui a eu pour conséquence que le demandeur se trouvait désormais en congé injustifié. L’ARH a conclu que pendant le temps où le demandeur a été en arrêt de travail pour cause de maladie, soit depuis le 27 avril 2012, il a continuellement fourni des certificats médicaux incomplets et a omis de déposer des renseignements médicaux suffisants qui auraient permis à sa médecin-chef de rendre une décision relative à sa capacité au travail. Malgré des demandes répétées et des directives écrites de son chef, l’inspecteur, le demandeur a continué d’ignorer les obligations et responsabilités prévues qui lui incombaient en vertu de la politique. Par conséquent, l’ARH était d’avis que le statut actuel du demandeur était « absent du travail sans autorisation » tel que prévu par l’alinéa 22(2)(ii) de la Loi sur la GRC. Le demandeur a eu droit à une période de 14 jours pour déposer une réponse écrite à cette décision. L’ARH a déclaré qu’elle prévoyait que la cessation de la solde et des indemnités demeure en vigueur jusqu’à ce que le demandeur se conforme à ce qui était exigé d’un membre absent du travail pour cause de maladie, exigences énoncées au chapitre 19.3 du manuel d’administration, et qu’il s’engage dans un retour au travail progressif tel qu’il est établi à la section II.36 du manuel d’administration.
[18] Le demandeur a déposé des observations le 7 septembre 2015 et y a joint une copie du certificat médical du 24 août 2015 (formule 2135). Il y demandait d’être avisé s’il avait incorrectement rempli la partie A afin qu’il puisse corriger la formule. Il ajoutait que si la GRC était d’avis que la partie B remplie par son médecin n’était pas adéquate, les médecins-chefs Dre Fitzpatrick et Dre Hossack devraient être consultées puisqu’elles avaient communiqué avec ses médecins à plusieurs reprises. En ce qui concerne la formule 4056, il a expliqué à de nombreuses occasions le problème posé par cette formule. Il a souligné également dans ses observations que personne ne l’a avisé que ces certificats médicaux étaient incomplets avant le 29 juillet 2015. Pour ce qui est de la Dre Hossack, il s’agissait d’une nouvelle médecin-chef et il n’a reçu qu’un courriel d’elle le 28 juillet 2015, dans lequel elle lui demandait de retourner au travail immédiatement, alors que [traduction] « ce n’est ni conforme à l’évaluation du risque en fonction de mes données médicales et diagnostiques récentes ni à l’avis récent de mes médecins spécialistes ». Le jour suivant, il a reçu un horaire de travail de Mme Alice Hsing et a répondu le lendemain par courriel en lui rappelant que [traduction] « la politique de la GRC pour les retours au travail repose sur le principe de la sécurité et du moment opportun ». Le demandeur a déclaré qu’en fonction du courriel et des lettres de l’inspecteur Brian Jarvis et de la Dre Hossack, il croyait qu’ils étaient [traduction] « des nouveaux venus dans [son] dossier ». Par conséquent, il s’est senti dans l’obligation de leur résumer son dossier et son état médical récent et leur a donc envoyé un document qu’il a créé intitulé « Processus d’examen du congé de maladie »; il en a d’ailleurs joint une copie à ses observations.
[19] Le demandeur a affirmé également qu’il n’avait pas reçu de réponses à son courriel, que ce soit de l’inspecteur, de la Dre Hossack ou de Mme Hsing, mais qu’il a plutôt reçu la recommandation et l’avis d’intention. Il conclut ainsi ses observations :
[traduction] En fonction des faits précités, il est clair qu’ils ont contrevenu à la politique de congé de maladie et de retour au travail de la GRC et qu’ils avaient le pouvoir de m’intimider et de me harceler arbitrairement. Ce n’est d’ailleurs pas la première fois que le médecin-chef contrevient à la politique de congé de maladie de la GRC pour me harceler. Vous avez à votre tour adopté les pseudo-propositions de M. Brian Jarvis, de M. Kevin O’Blenis et de la Dre Karen Hossack comme motifs pour exercer plus de pression sur un membre victime d’une maladie grave.
Vous avez de plus envoyé M. Whitworth chez moi, avec votre lettre et sans avis préalable, le 3 septembre 2015. Il a cogné fortement à la porte et s’est accroché à la fenêtre pour regarder à l’intérieur. Il s’agit de la troisième fois de ma vie que je subis ce type de harcèlement de la part de M. Whitworth depuis le mois de mai 2015.
Je vous prie d’arrêter ce harcèlement.
[20] Le demandeur a joint les documents mentionnés dans ses observations.
[21] Le 22 septembre 2015, l’ARH a demandé à la Dre Hossack de l’aviser si les résultats de l’IRM du demandeur pouvaient raisonnablement avoir une incidence sur son avis du 28 juillet 2015 et sur sa recommandation relative au congé de maladie.
[22] Le 6 octobre 2015, la Dre Hossack a avisé l’ARH que les résultats de l’IRM ne modifieraient pas son avis actuel et sa recommandation, qu’elle avait conscience de la nature du problème médical du demandeur et qu’elle demeurait incapable de soutenir d’un point de vue médical son absence complète du travail. À son avis, le retour graduel au travail du demandeur, dans la mesure de sa capacité, constituait une mesure adéquate.
[23] Le 29 octobre 2015, l’ARH a signé une ordonnance enjoignant la cessation de la solde et des indemnités, qui entrait en vigueur ce même jour (« l’ordonnance »). Cette ordonnance énonçait qu’après un examen complet des documents, y compris des observations écrites du demandeur datées du 7 septembre 2015, l’ARH a décidé d’ordonner la cessation de la solde et des indemnités du demandeur, conformément au paragraphe 22(2) de la Loi sur la GRC. L’ARH a conclu que le demandeur était absent du travail sans autorisation et qu’il n’exécutait pas ses fonctions de membre civil de la GRC. Elle mentionnait que la justification de sa décision était énoncée dans le registre de décision joint à l’ordonnance. Il y était également précisé que l’ordonnance demeurerait en vigueur jusqu’à ce que le demandeur remédie aux problèmes ayant mené à l’ordonnance ou jusqu’à ce qu’il en soit autrement décidé par l’ARH ou par un arbitre. La solde et les indemnités du demandeur pourraient être rétablies lorsque l’ARH serait d’avis que les motifs ayant mené à la cession de la solde et des indemnités prévues par le sous-alinéa 22(2)a)(ii) de la Loi sur la GRC n’étaient plus applicables en raison de la participation du demandeur à un plan de retour au travail ou, sur avis du médecin-chef, si son congé de maladie était justifié.
[24] Le 8 novembre 2015, le demandeur a interjeté appel à l’encontre de l’ordonnance en vertu de l’alinéa 20(1)e) des Consignes du commissaire (exigences d’emploi), DORS/2014-292 (les « Consignes du commissaire »). Son dossier a été attitré à M. Douglas Dewar, un gestionnaire de recours. Une correspondance s’en est suivie, comprenant notamment des clarifications relatives à la portée de l’appel du demandeur. Le demandeur a été avisé que les allégations de harcèlement contenues dans l’appel devaient être adressées au Bureau de coordination des plaintes de harcèlement. Le 16 décembre 2015, le demandeur a déposé une déclaration d’appel mise à jour. Il y alléguait que la décision de suspendre sa solde et ses indemnités était déraisonnable et injuste au plan procédural. Il faisait valoir qu’il ressortait clairement des faits que son absence du travail était autorisée selon le chapitre 19.3 (congé de maladie) du manuel d’administration de la GRC et qu’il avait déjà expliqué son dossier dans sa lettre du 7 septembre 2015 en réponse à l’avis d’intention. Il aurait dû être clair qu’il n’a rien fait pour contrevenir à la [traduction] « politique et à la discipline de la GRC ». Il a été étonné de recevoir cette décision et a allégué que l’ARH a ignoré la politique et les principales valeurs de la GRC, qu’elle a [traduction] « fait siennes à répétition les pseudo-propositions retrouvées dans le “REGISTRE DE DÉCISION” pour accuser faussement un membre civil honnête et discipliné et pour harceler de façon arbitraire un employé victime d’une maladie grave ». Il citait la Loi canadienne sur les droits de la personne et le chapitre 19.3 sur les congés de maladie du manuel d’administration de la GRC comme étant applicables à son appel et demandait réparation pour le préjudice mental et physique subit ainsi que pour les pertes financières subies en raison de la commission d’un acte répréhensible.
[25] Le demandeur a eu accès au dossier et a présenté des observations écrites au soutien de son appel. Dans ses observations, il alléguait que la cessation de sa solde était reliée au harcèlement incessant dont il a été victime dans son emploi pour la GRC. Il a également déposé une « note d’information » comportant sa version des faits. Il y répétait qu’il a répondu à l’avis d’intention et que l’ARH a utilisé dans le registre de décision des pseudo-propositions [traduction] « afin de blesser intentionnellement un membre civil gravement malade à l’aide de l’autorité qu’elle possède ». Il concluait que l’ordonnance constituait un incident prémédité contre un membre civil honnête et discipliné perpétré en contravention des politiques relatives aux congés de maladie et de retour au travail de la GRC et des lois canadiennes et qu’il s’agissait d’un incident visant à blesser intentionnellement un employé gravement malade. Il répétait sa demande de réparation, ajoutant qu’il demandait également la compensation de toutes les pertes financières subies en raison des actes répréhensibles commis à l’égard d’un membre civil honnête et discipliné.
[26] Le commissaire a rejeté l’appel dans une décision du 2 novembre 2016. Cette décision fait l’objet du présent contrôle judiciaire.
Décision faisant l’objet du contrôle
[27] La décision du commissaire est longue et détaillée. Elle décrit le contexte, les différentes communications qui ont eu lieu avant la cessation de la solde et des indemnités, l’historique des procédures, les renvois aux lois et politiques applicables et la position du demandeur dans l’appel interjeté devant le commissaire. Dans son analyse, le commissaire répond aux trois arguments soulevés par le demandeur en appel, soit que l’ordonnance a été rendue de manière injuste au plan procédural, que l’ordonnance était manifestement déraisonnable et qu’elle était entachée d’une erreur de droit.
[28] À l’égard de la première question en litige, le commissaire a noté que le Guide national de la GRC – Procédures d’appel explique que lors d’un appel, les principes d’équité procédurale prévoient que les parties disposent de certains droits, soit le droit d’être entendu, le droit d’obtenir une décision d’un arbitre impartial, le droit d’obtenir une décision de la personne qui a entendu l’appel et le droit que cette décision soit soutenue par des motifs. Le commissaire a ensuite détaillé la procédure devant être respectée pour la cessation de la solde et des indemnités d’un membre absent du travail sans autorisation, tel qu’il est prévu par l’article 4 des Consignes du commissaire. Le commissaire a conclu que dans la présente affaire, les faits démontrent que la procédure applicable a été respectée et que le demandeur n’a mis aucun élément de preuve de l’avant démontrant que l’ARH était partiale ou n’avait pas tenu compte de sa position et de sa preuve avant de rendre l’ordonnance. Le commissaire a conclu également que l’ordonnance a été rendue d’une façon équitable, ouverte et impartiale et que l’ARH a respecté la procédure appropriée et fourni des motifs suffisants au soutien de sa décision. L’ordonnance a par conséquent été rendue d’une manière équitable sur le plan procédural.
[29] En ce qui concerne la seconde question en litige, le commissaire a conclu que l’ordonnance était raisonnable. Il a souligné que selon les exigences prévues par l’article 2.9 du chapitre 19.3 (congé de maladie) du manuel d’administration, un certificat médical sera jugé complet s’il décrit les limitations et restrictions au travail du demandeur et prévoit une date anticipée pour la reprise des fonctions habituelles ou modifiées. Le commissaire a reconnu que le demandeur a présenté plusieurs explications du refus de son médecin de remplir adéquatement l’ensemble de la formule 2135, qu’il a fait valoir qu’il n’avait pas de contrôle sur l’intégralité des renseignements médicaux fournis par son médecin et qu’il ne devrait pas être tenu responsable si ses certificats médicaux étaient jugés incomplets. Le commissaire a cependant accordé peu de poids à ces arguments. En effet, bien que le demandeur ait expliqué en profondeur sa situation et son problème médical, l’ensemble de sa preuve était fondé sur sa propre opinion, qui n’était pas pertinente dans les circonstances. Le commissaire a affirmé que lorsqu’un membre est absent du travail pour des raisons de maladie, son absence doit être justifiée par l’avis d’un médecin. Selon la politique, le médecin doit faire valoir qu’il appuie l’absence du travailleur en remplissant un certificat médical (la formule 2135) tous les 30 jours. Ces formules sont utilisées par le médecin-chef pour déterminer la capacité d’un membre à effectuer ses tâches. Le commissaire déclare dans sa décision qu’il apprécie les efforts faits par le demandeur pour obtenir le soutien de son médecin général, mais que le fait que son médecin refuse de remplir les formules demandées ne le libère pas des exigences prévues par la politique.
[30] Le commissaire a conclu également que le demandeur n’a pas fourni le questionnaire d’évaluation d’invalidité (la formule 4056) complet, tel qu’il est requis par l’article 2.12 du paragraphe 19.3 (congé de maladie) du manuel d’administration, qui énonce clairement que le membre doit s’assurer que son médecin remplisse et renvoie les formules demandées par le médecin-chef. En outre, le demandeur a ignoré ses responsabilités prévues par la politique et sa position à l’égard de la formule 4056 non remplie manquait de crédibilité puisque ses explications sont demeurées les mêmes depuis la première demande visant à obtenir le questionnaire d’évaluation d’invalidité de la médecin-chef en mars 2014. Le commissaire était d’avis qu’il est douteux que sur une période de plus d’un an et demi, le médecin du demandeur ne se soit pas familiarisé avec le problème médical du demandeur considérant qu’il souffrait censément d’une maladie grave.
[31] Le commissaire a souligné le mandat de l’ARH, son rôle, les communications qu’elle a eues ainsi que l’avis qu’elle a émis avant de rendre l’ordonnance. Il a également décrit les observations du demandeur, qui affirme que la médecin-chef a omis d’effectuer une évaluation du risque, de consulter ses médecins et d’établir une entente de retour au travail avant de recommander que le demandeur retourne graduellement au travail. Le demandeur a ajouté qu’elle n’a été que récemment assignée à son dossier et ne pouvait donc avoir réellement connaissance de son état médical. Le commissaire a relevé les dix parties du chapitre 19.3 (congé de maladie) ainsi que le chapitre II.37 du manuel d’administration qui, selon le demandeur, ont été violés par la médecin-chef. Par conséquent, selon le demandeur, les recommandations de la médecin-chef ne devraient pas être suivies.
[32] Le commissaire a conclu qu’il n’y a rien dans la preuve qui indique que la médecin-chef n’a pas eu suffisamment de temps pour se familiariser avec le problème médical du demandeur ou qu’elle ne possédait pas les qualifications professionnelles nécessaires pour présenter des opinions bien fondées à l’inspecteur et à l’ARH. La médecin-chef a par ailleurs agi conformément aux politiques applicables. Par exemple, le demandeur a soutenu que la médecin-chef n’a pas établi d’entente de retour au travail avant de recommander ledit retour au travail, mais le paragraphe 7.5.7 du chapitre 19.3 (congé de maladie) du manuel d’administration n’exige pas la mise en place d’une telle entente. En ce qui a trait aux mentions du demandeur de la formule 3414 dans ses communications avec la médecin-chef et à ses réponses, le commissaire a conclu que le rapport sur les situations comportant des risques (la formule 3414) déposé par le demandeur n’est pas pertinent à l’appel. De plus, comme la médecin-chef l’a noté, la sous-direction de santé et sécurité au travail a avisé le demandeur en novembre 2014 qu’il n’avait pas fourni suffisamment de preuves pour démontrer que sa maladie était reliée au travail.
[33] En outre, bien que le demandeur ait déployé de nombreux efforts pour présenter ses antécédents médicaux et son avis personnel à l’égard de ses limitations et de ses restrictions, il n’a pas fourni de preuve convaincante permettant de réfuter les renseignements retrouvés aux lettres de la médecin-chef du 28 juillet 2015 et du 6 octobre 2015. En fonction des renseignements retrouvés au dossier, le demandeur a uniquement fait valoir son opinion personnelle à l’égard de sa capacité à retourner au travail. Cette opinion a peu de valeur puisqu’il devait plutôt fournir l’opinion de ses médecins. De même, les allégations du demandeur selon lesquelles l’opinion de la médecin-chef n’était pas soutenue par son médecin spécialiste et que son médecin de famille est d’avis que sa maladie appartient à la catégorie des maladies graves ne sont soutenues par aucun élément de preuve, malgré le fait qu’elles contredisent l’opinion de la médecin-chef, sur laquelle le demandeur savait que l’ARH se fonderait. Le commissaire a conclu, en fonction des renseignements qui lui ont été présentés, que la médecin-chef a suivi le protocole et que l’ARH a agi de manière raisonnable en se fondant sur l’opinion de la médecin-chef.
[34] Dans ces circonstances, l’ARH a respecté les exigences prévues à l’article 4 des Consignes du commissaire et a agi raisonnablement en concluant que le demandeur était absent du travail sans autorisation.
[35] En ce qui a trait à la dernière question en litige, le demandeur a allégué que la décision de rendre l’ordonnance est fondée sur une erreur de droit, mais n’a pas précisé de quelle erreur il s’agissait et n’a fourni aucune preuve au soutien de cet argument. Le commissaire a conclu qu’il n’y avait pas de preuve démontrant que l’ARH avait commis une erreur de droit. Au moment où elle a rendu son ordonnance, l’ARH possédait tous les renseignements inscrits au dossier. Rien n’indiquait que l’ARH aurait oublié ou mal interprété un des éléments de preuve avant d’en venir à sa conclusion ou n’en aurait pas tenu compte.
[36] Le commissaire a conclu que le demandeur n’a pas démontré que l’ordonnance contrevenait aux principes d’équité procédurale, qu’elle était manifestement déraisonnable ou qu’elle se fondait sur une erreur de droit. Par conséquent, l’appel a été rejeté.
Questions en litige et norme de contrôle
[37] Le demandeur se représente seul et n’a pas explicitement soulevé les questions en litige dans le cadre du contrôle judiciaire, mais fait plutôt valoir que l’ordonnance est fondée sur une erreur de droit, que les motifs de l’ordonnance sont manifestement déraisonnables et que la procédure suivie pour rendre l’ordonnance contrevient aux principes d’équité procédurale. Le défendeur fait valoir que cette demande de contrôle judiciaire soulève deux questions en litige, soit d’établir si la procédure d’appel était équitable et si la décision d’appel était raisonnable.
[38] À mon avis, les questions en litige sont les suivantes :
(a) A-t-on refusé l’équité procédurale au demandeur?
(b) La décision d’appel était-elle raisonnable?
[39] Le demandeur n’a présenté aucune observation à l’égard de la norme de contrôle. Le défendeur allègue qu’il est bien établi qu’il faut faire preuve de retenue envers les décisions des arbitres et du commissaire de la GRC et que ces décisions doivent donc être examinées en fonction de la norme de la décision raisonnable (Mousseau c. Canada (Procureur général), 2012 CF 1285, au paragraphe 15 (« Mousseau »); Canada (Procureur général) c. Boogaard, 2015 CAF 150, au paragraphe 33 (« Boogaard »). La Cour a insisté sur le fait qu’une grande déférence est due aux arbitres de la GRC considérant leur expertise spécialisée et leurs vastes pouvoirs, y compris sur les affaires concernant les politiques internes de la GRC (Mousseau, au paragraphe 15). En outre, dans l’arrêt Boogaard, la Cour d’appel fédérale a noté que le commissaire de la GRC possède une très grande marge d’appréciation en ce qui concerne les décisions qu’il rend en matière de promotions en regard du cadre législatif applicable et du fait que le commissaire doit se fonder sur son « expertise, son expérience et ses connaissances » pour déterminer les besoins du service policier (aux paragraphes 33 à 46). Le défendeur fait valoir que le même raisonnement s’applique aux décisions concernant le droit des membres de recevoir leur solde et leurs indemnités.
[40] Le défendeur soutient également que dans la mesure où les Consignes du commissaire ou le manuel d’administration sont visés par le litige, la retenue est de mise. Les Consignes du commissaire sont un règlement et le manuel d’administration fait partie de la politique interne de la GRC. Un contrôle judiciaire qui se fonderait sur une autre norme que celle de la décision raisonnable ne s’accorderait pas avec la jurisprudence, qui insiste sur l’importance de faire preuve de déférence à cet égard (Celgene Corp. c. Canada (Procureur général), 2011 CSC 1, aux paragraphes 11 à 13 et 33 à 34; Alberta (Information and Privacy Commissioner) c. Alberta Teachers’ Association, 2011 CSC 61, aux paragraphes 30 à 34, 37 à 39 et 48 (« Alberta Teachers’ »); Irvine c. Canada (Procureur général), 2012 CF 1370, aux paragraphes 26 à 28, conf. par 2013 CAF 286 (« Irvine »); Beaulieu c. Canada (Procureur général), 2015 CF 57, autorisation d’interjeter appel devant la Cour suprême du Canada refusée dans 2016 CarswellNat 3848 (WL) (« Beaulieu »).
[41] Il est clair que les questions d’équité procédurale sont susceptibles de révision selon la norme de la décision correcte (Établissement de Mission c. Khela, 2014 CSC 24, au paragraphe 79; Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Khosa, 2009 CSC 12, au paragraphe 43 (« Khosa »); Storozuk c. Canada (Procureur Général), 2017 CF 4, au paragraphe 28 (« Storozuk »)).
[42] Je suis d’accord avec le défendeur que la décision du commissaire est susceptible de révision selon la norme de la décision raisonnable. Les parties n’ont indiqué aucun jugement à l’égard de la norme de contrôle devant être appliquée à la décision du commissaire concernant un appel d’une ordonnance rendue en application du sous-alinéa 22(2)a)(ii) de la Loi sur la GRC, mais la Cour a conclu par le passé que la décision d’un arbitre ou du commissaire de la GRC devait recevoir une grande déférence en raison de leur expertise spécialisée et de leurs vastes pouvoirs, surtout lorsque la décision fait intervenir le processus interne de grief ou les politiques internes de la GRC (Mousseau, au paragraphe 15; Boogaard, aux paragraphes 32 et 33; voir également Storozuk, aux paragraphes 24 à 27; Schamborzki c. Canada (Procureur général), 2015 CF 1262, au paragraphe 30 et Camara c. Canada, 2015 CAF 43, aux paragraphes 6 et 19). Je suis également d’accord avec le défendeur que l’interprétation des Consignes du commissaire et du manuel d’administration doit être révisée en fonction de la norme de la décision raisonnable puisqu’il s’agit de l’interprétation par la GRC de ses propres politiques internes, pour lesquelles elle possède une certaine expertise (Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, au paragraphe 51 (« Dunsmuir »); Alberta Teachers’, aux paragraphes 30, 39 et 48; Beaulieu, aux paragraphes 41 à 44; Irvine, au paragraphe 27).
[43] Lorsque la Cour effectue le contrôle d’une décision selon la norme de la décision raisonnable, son analyse tient à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit (Dunsmuir, au paragraphe 47; Khosa, au paragraphe 59).
[44] Les lois et politiques de la GRC applicables sont jointes à l’annexe A des présents motifs.
Première question en litige : a-t-on refusé l’équité procédurale au demandeur?
Position du demandeur
[45] Il était prévu que la présente affaire soit entendue à Vancouver le 21 juin 2017 pour une durée de deux heures, et le 22 juin 2017, également pour une durée de deux heures. À la fin des deux heures d’audience le 21 juin 2017, le demandeur a déclaré à l’aide d’un traducteur qu’il ne se sentait pas bien et qu’il était incapable de poursuivre l’audition plus longuement ce jour-là. Il a jouté qu’il n’en était environ qu’au tiers de ses observations. Un peu plus tard ce même jour, le demandeur a avisé le greffe qu’il ne se sentait pas suffisamment bien pour poursuivre l’audience le lendemain et a demandé une remise. La remise a été accordée et l’audience a été reportée au 23 juin 2017. Le demandeur a fourni un certificat de son médecin de famille déclarant qu’il souffre de cirrhose et qu’il était incapable de se présenter le 22 ou le 23 juin 2017. Sous ma directive, le 22 juin 2017, l’affaire a été remise. À ce moment, les parties se sont également fait offrir l’option de procéder en fonction de leurs observations écrites, sans qu’il soit nécessaire qu’elles se présentent de nouveau devant la Cour. Le 23 juin 2017, le demandeur a choisi de poursuivre le recours de cette façon, ce que le défendeur a accepté. Par conséquent, la présente affaire a été tranchée en fonction des observations écrites des parties.
[46] Les observations écrites du demandeur sur la question du manquement à l’équité procédurale sont brèves. À son avis, l’ordonnance contrevient au principe d’équité procédurale, car la recommandation se fonde sur des faits déformés, est unilatérale et ne tient pas compte de la vérité alors que la preuve démontre clairement que le demandeur n’a pas contrevenu à la politique et à la discipline de la GRC.
Position du défendeur
[47] Le défendeur soutient que les arguments du demandeur sur cette question, soit que le décideur a [traduction] « déformé les faits » et qu’il a [traduction] « insisté sur un argument ne tenant compte que d’un côté de la médaille » ne sont pas des arguments faisant intervenir l’équité procédurale. Il s’agit plutôt d’argument portant sur le bien-fondé de la décision d’appel. Il ajoute que quoi qu’il en soit, le processus d’appel en l’espèce porte toutes les marques de l’équité procédurale. Plus précisément, le demandeur a reçu un avis de la décision devant être rendue à son égard, il a reçu la divulgation du dossier auquel il devait répondre et des documents dont le décideur tiendrait compte, il a eu l’occasion à plus d’une reprise de présenter des observations et d’être entendu. Il ressort clairement de la décision d’appel que le commissaire a entendu les arguments du demandeur et qu’il en a tenu compte. Enfin, la décision d’appel énonce des motifs exhaustifs qui ne montrent aucune apparence de partialité. Ainsi, le processus ayant mené à la décision d’appel était équitable.
Analyse
[48] À titre de remarque préliminaire, j’observe que la position générale du demandeur est que le commissaire, à titre d’arbitre de l’appel, a utilisé la même approche que celle appliquée par l’ARH en rendant son ordonnance et qu’il a donc fait fi de la vérité dans la présente affaire et n’a pas tenu compte des politiques de la GRC en rendant sa décision d’appel. Je comprends donc que bien qu’il conteste l’ordonnance dans ses observations, ce qu’il conteste réellement est plutôt la décision d’appel qui a maintenu l’ordonnance.
[49] Ceci étant dit, je suis d’accord avec le défendeur que les observations du demandeur sur cette question semblent faire fausse route. Le demandeur n’a pas contesté la procédure suivie par l’inspecteur et l’ARH menant à l’ordonnance ou la procédure d’appel ayant mené à la décision d’appel du commissaire. Il allègue plutôt que la décision d’appel est inéquitable puisqu’elle se fonde sur des faits déformés. Par conséquent, l’argument du demandeur attaque essentiellement le bien-fondé de la décision et ne s’inscrit pas dans le cadre d’une question d’équité procédurale.
[50] Quoi qu’il en soit, à mon avis, le processus décisionnel a été équitable.
[51] Le concept d’équité procédurale est variable; son contenu doit être déterminé dans le contexte spécifique de chaque cas et il doit tenir compte de toutes les circonstances : Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 RCS 817, aux paragraphes 21 et 22.
[52] En l’espèce, la procédure devant être suivie pour la cessation de la solde et des indemnités d’un membre qui est absent du travail sans autorisation est prévue à l’article 4 des Consignes du commissaire, auquel le commissaire renvoie directement dans sa décision d’appel. Le demandeur a également bénéficié des droits procéduraux auxquels il avait droit dans le cadre d’une procédure d’appel, comme le prévoit la partie 3 des Consignes du commissaire (griefs et appels), DORS/2014-289. Le « Résumé d’appel, numéro de dossier 2015335501 – Tielun Su » fait état des communications et des étapes procédurales qui ont eu lieu dans le cadre de l’appel et qui ont mené à la décision d’appel. Après examen du dossier devant moi, il est clair que le traitement accordé au demandeur par la GRC avant le prononcé de l’ordonnance et pendant le processus d’appel avait pour objectif d’aider le demandeur et de s’assurer qu’il comprenait le processus et qu’il s’y impliquait. Il ressort également clairement du dossier qu’il était difficile de communiquer avec le demandeur. Il limitait ses réponses à des courriels et refusait les appels ou les rencontres en personne. Ses réponses étaient au mieux souvent floues et, bien qu’elles étaient répétitives, il était fréquent qu’elles ne répondent pas aux questions soulevées, malgré les efforts du personnel de la GRC pour clarifier ce qui était attendu du demandeur.
[53] Le dossier devant moi ne démontre aucune irrégularité procédurale à une étape ou une autre des procédures qui justifierait l’intervention de la Cour. Les procédures suivies étaient définies par la politique, étaient équitables et ont été respectées.
[54] De plus, bien que le demandeur allègue que le processus décisionnel s’est fait de façon unilatérale, il n’a pas explicitement allégué ni démontré de comportement partial de la part de l’ARH ou du commissaire.
Deuxième question : la décision d’appel était-elle raisonnable?
Position du demandeur
[55] Dans ses observations écrites, le demandeur allègue avoir été victime de harcèlement et de discrimination avant et pendant son congé de maladie. Il soutient que ses traitements contre le cancer ont été entravés par la médecin-chef et par son superviseur immédiat, qui ont tardé à l’aviser qu’il n’y avait pas d’opposition formelle à ce qu’il quitte sa région de travail pour se rendre en Chine afin d’y obtenir des traitements, en contravention de la politique de congé de maladie de la GRC. Il fait valoir qu’il n’existait aucune exigence d’obtenir une approbation pour quitter sa région de travail afin de se rendre à l’étranger pour recevoir des traitements médicaux.
[56] Le demandeur allègue également qu’il a coopéré et participé activement au processus d’adaptation et de retour au travail, conformément aux politiques relatives aux congés de maladie et au retour au travail. Afin de retourner au travail de façon sécuritaire et en temps opportun conformément à la politique de la GRC, il a soulevé certaines questions dans ses communications avec son supérieur immédiat et a attendu des réponses. Il ajoute que l’avis d’intention était fondé sur une déformation de la vérité fournie par son superviseur immédiat. Le demandeur a mentionné clairement dans ses réponses qu’il n’avait rien fait en contravention des politiques et de la discipline de la GRC. Selon lui, il n’y a pas non plus de preuve soutenant la conclusion de l’ARH selon laquelle le demandeur a ignoré les politiques et la déclaration retrouvée au registre de décision et qu’entre le 27 avril 2012 et le 14 avril 2015, il a déposé à répétition des certificats médicaux incomplets et a fait défaut de fournir des renseignements médicaux suffisants. Le demandeur questionne également l’existence et le contenu d’une entente de retour au travail.
Position du défendeur
[57] Le défendeur soutient que la décision d’appel est bien fondée. Il ajoute que par ses arguments, le demandeur invite la Cour à peser de nouveau la preuve, ce qui n’est pas son rôle et fait valoir que les arguments du demandeur ne sont pas soutenus par le dossier. Ils semblent plutôt se centrer sur le désaccord du demandeur avec la conclusion du commissaire selon laquelle il était absent du travail sans autorisation. Plus précisément, le demandeur est d’avis que son absence était autorisée puisque selon sa compréhension des faits, son congé de maladie devait avoir été autorisé en vertu du chapitre 19.3 du manuel d’administration.
[58] Le défendeur allègue que le commissaire a raisonnablement conclu que le demandeur avait fait défaut de fournir des renseignements médicaux appropriés ou complets au soutien de son absence continue. Les articles 2.9, 3.3.1, 3.3.4.1, 3.3.5 et 3.3.6 du chapitre 19.3 (congé de maladie) du manuel d’administration sont clairs et disposent que les membres doivent fournir les documents médicaux exigés afin que leur congé de maladie soit autorisé. Il n’est pas contesté que le demandeur n’a pas fait parvenir la formule 4056, alors que le manuel d’administration précise clairement que les membres doivent s’assurer que les formules sont remplies et envoyées au besoin (articles 2.12 et 3.3.6). Le demandeur a expliqué qu’il ne pouvait pas faire parvenir la formule 4056, car son médecin ne connaissait pas suffisamment son dossier pour la remplir, mais cette explication a été donnée pour la première fois plus d’un an avant l’ordonnance. Malgré cela, le demandeur a constamment évoqué cette explication et l’a soulevée deux ans plus tard, lorsqu’il a entrepris l’appel. Le refus du commissaire de retenir cette explication s’inscrit directement dans son évaluation de la preuve, qui est de nature factuelle et a donc droit à une grande déférence. Le commissaire a expliqué qu’il ne retenait pas cette explication et qu’aucune nouvelle explication n’avait été fournie. Par conséquent, il n’y avait pas de justification apparente de l’inobservation du demandeur de la politique de congé de maladie.
[59] Le commissaire a également agi raisonnablement en concluant que les certificats médicaux du demandeur (formule 2135) étaient incomplets. Le libellé retrouvé au manuel d’administration prévoit clairement que les certificats médicaux doivent comprendre les limitations et restrictions applicables ainsi que la date prévue de la reprise des fonctions habituelles ou modifiées (article 2.9, chapitre 19.3).
[60] Bien qu’il y ait un certain flou à cet égard, le demandeur ne semble pas contester le fait que ses certificats médicaux ne comprenaient pas ces renseignements obligatoires. Il s’est excusé de ses certificats incomplets de différentes façons et a indiqué qu’un certificat complet serait fourni plus tard, mentionnant que son docteur était d’avis que ces questions se situaient [traduction] « au-delà de sa portée », mais qu’il croyait que son spécialiste pourrait être en mesure de fournir ces renseignements. Cependant, il a ensuite précisé qu’il ne verrait pas ce spécialiste avant plusieurs mois et a encouragé la médecin-chef à communiquer avec ses fournisseurs de soin afin d’obtenir les renseignements manquants.
[61] Comme le commissaire l’a à juste titre souligné, [traduction] « en fonction du contenu du dossier et des documents, [M. Su] n’a fourni aucun élément de preuve permettant de réfuter l’allégation selon laquelle il a omis de fournir des certificats médicaux complets ». Cette situation demeure la même dans la présente demande de contrôle judiciaire.
[62] Le défendeur fait également valoir que le commissaire et l’ARH se sont raisonnablement fiés à l’opinion de la médecin-chef selon laquelle le demandeur était capable de retourner graduellement au travail, en travaillant un nombre d’heures réduit. Le médecin-chef est un médecin autorisé responsable de la supervision et de la coordination de la production des opinions professionnelles et des recommandations rendues par les programmes des Services de santé et de veiller à l’application adéquate des normes professionnelles de santé en application de la politique. La GRC aurait d’ailleurs pu se fonder uniquement sur les manquements retrouvés dans la documentation du demandeur, ce qu’elle n’a pas fait. Elle a plutôt tenté, avec la permission du demandeur, d’obtenir les renseignements manquants en communiquant avec les médecins directement. La conclusion de la médecin-chef est fondée sur les discussions qu’elle a eues avec les médecins du demandeur et l’examen de son dossier médical.
[63] Il n’est pas clairement établi la raison pour laquelle, lorsqu’il a été confronté à l’opinion de la médecin-chef, le demandeur n’a pas à un certain moment du processus fourni des documents ou des preuves supplémentaires de ses médecins au soutien de sa demande de congé de maladie continu, pour contredire l’opinion du médecin-chef s’il était en désaccord avec sa recommandation. Le demandeur n’a pas non plus obtenu une copie de son dossier de santé de la GRC et ne s’est pas fondé sur ce dossier pour appuyer sa position.
[64] Le demandeur a indiqué que ses médecins spécialistes n’étaient pas d’accord avec cette position et que son médecin généraliste a affirmé que sa maladie était grave, mais il est le seul à avoir fait mention de ces renseignements. Le commissaire a spécifiquement noté l’absence de toute preuve appuyant la thèse du demandeur à cet égard. Par conséquent, l’opinion de la médecin-chef n’a pas été contredite et le commissaire s’est raisonnablement fié sur celle-ci pour ordonner la cessation de la solde.
[65] Le défendeur fait valoir que le congé de maladie continu du demandeur a été refusé et annulé. La politique de la GRC dispose précisément qu’un membre peut être réputé absent du travail sans autorisation s’il demeure absent du travail après le refus de sa demande de congé de maladie. Cette interprétation de la politique et de la disposition législative à laquelle elle renvoie est éminemment raisonnable. Un résultat contraire, où le congé de maladie ne serait pas approuvé, mais qu’il ne serait pas possible de cesser le versement de la solde même si le membre est absent du travail sans autorisation, serait absurde à la lumière du cadre applicable.
[66] Il est de plus important de noter que l’ordonnance suspendant la solde et les indemnités du demandeur n’est pas immuable à première vue. L’ordonnance prévoit clairement que la solde et les indemnités du demandeur pourront être rétablies s’il participe à un plan de retour au travail graduel ou s’il est en mesure de produire des renseignements pour appuyer son absence continue du travail et justifier son congé de maladie. Il ne s’agit pas d’un résultat pouvant être obtenu par le demandeur dans la présente demande de contrôle judiciaire, mais cela aurait pu être le cas s’il avait choisi de remplir une de ces conditions et s’il avait été en mesure de le faire. Bien que la situation du demandeur puisse être malheureuse, il n’a tout simplement pas démontré de fondement convaincant pour contester la décision du commissaire dans la présente demande de contrôle judiciaire.
Analyse
[67] Je soulignerai comme remarque préliminaire que les allégations de harcèlement du demandeur ne sont pas l’objet du contrôle judiciaire puisqu’elles ne sont pas pertinentes au caractère raisonnable de l’ordonnance et de la décision d’appel. Le demandeur a été avisé que les allégations de harcèlement contenues dans l’appel doivent être adressées au bureau de coordination des plaintes de harcèlement et a ajusté sa déclaration d’appel en conséquence.
[68] Je me pencherai à présent brièvement sur l’allégation du demandeur selon laquelle l’avis d’intention était fondé sur une distorsion de la vérité donnée par son supérieur immédiat (l’inspecteur). La seule explication donnée par le défendeur à l’égard de cette allégation est la référence aux pages 16 à 22 de la pièce D-7 de son affidavit assermenté le 9 décembre 2016 et déposé au soutien de sa demande de contrôle judiciaire. Cette pièce contient les communications intervenues entre l’inspecteur, d’autres membres de la GRC et le demandeur et débute avec la lettre du 14 avril 2015 de l’inspecteur décrite précédemment et se termine avec la lettre de l’inspecteur datée du 31 décembre 2015 et la réponse du demandeur du 10 janvier 2016. À mon avis, le renvoi du demandeur à cette correspondance n’appuie pas son allégation selon laquelle il y a eu distorsion de la vérité. Les communications démontrent essentiellement les efforts faits par la GRC afin que le demandeur réponde aux demandes d’information sur son état médical et, en réponse, la même réponse du demandeur, présentée sous diverses formes, décrivant l’état de sa maladie et ce qu’il affirme être l’avis de son médecin de famille et de ses spécialistes à propos de sa maladie et de sa capacité à retourner au travail. De même, selon le contenu de la même pièce, le demandeur allègue qu’il a coopéré et participé activement au processus d’adaptation et de retour au travail, conformément aux politiques de la GRC. À mon avis, ces communications n’appuient pas cette prétention et ne démontrent pas qu’il n’a pas reçu de réponses à ses communications, qui ont mené à l’ordonnance ou au processus d’appel.
[69] Le demandeur conteste également les déclarations du registre de décision et de l’ordonnance sous-jacente, soit que du 27 avril 2012 au 14 avril 2015, il a transmis à répétition des certificats médicaux incomplets et a omis de fournir des renseignements médicaux suffisants qui auraient permis à la médecin-chef de rendre une décision sur sa capacité à accomplir ses tâches. Il conteste également le fait que malgré les demandes répétées et les directives écrites de l’inspecteur, il a continué d’ignorer ses obligations et les exigences prévues par l’article 3.3 du chapitre 19.3 (congé de maladie) du manuel d’administration.
[70] Dans la décision d’appel, le commissaire reconnaît qu’entre le mois de juin 2012 et la date de l’ordonnance, 12 certificats médicaux ont été fournis, mais souligne que plusieurs mois n’ont pas fait l’objet de certificats. Toutefois, avant le mois d’avril 2015, il n’y a rien dans le dossier ou les documents présentés au commissaire permettant de démontrer que le demandeur a été avisé que ses certificats médicaux étaient incomplets ou qu’il ne s’était pas conformé au délai de 30 jours établi au chapitre 19.3 (congés de maladie) du manuel d’administration de la GRC. Malgré cela, l’ordonnance énonce spécifiquement qu’entre le 27 avril 2012 et le 14 avril 2015, le demandeur a fourni à répétition des certificats médicaux incomplets et a omis de fournir des renseignements médicaux suffisants qui auraient permis à la médecin-chef de rendre une décision sur sa capacité à accomplir ses tâches. Le commissaire conclut qu’en dépit de cette incohérence dans l’ordonnance et dans les dates énumérées, la preuve devant lui démontre qu’entre les mois d’avril et de novembre 2015, le demandeur n’a pas fourni de certificat médical adéquatement rempli, et ce, malgré les nombreuses demandes et les efforts faits par l’inspecteur et la médecin-chef en ce sens.
[71] Je suis d’accord avec cela et ne vois aucune erreur dans cette conclusion. Toutefois, le commissaire note un peu plus loin dans ses motifs que l’ordonnance et le dossier démontrent que le demandeur a omis pendant trois ans de fournir des certificats médicaux complets et qu’il n’a déposé aucune preuve permettant de réfuter cette allégation. Par conséquent, le commissaire n’avait aucun motif de douter de la conclusion de l’ARH à cet égard. Il pourrait cependant y avoir motif à douter de cette conclusion puisque selon la conclusion du commissaire, le demandeur n’a été avisé de cette situation que le 15 avril 2015. Le commissaire poursuit et est d’accord avec l’ARH que le demandeur a fait défaut à répétition de fournir un certificat médical complet, malgré les nombreuses demandes écrites envoyées par ses supérieurs. En fonction du dossier devant lui, il reconnaît que ces défauts ne constituaient aucune omission, mais plutôt [traduction] « une indifférence constante à l’égard de ses obligations et responsabilités prévues par la politique ». Considérant que le demandeur, comme l’a reconnu le commissaire, n’a pas été avisé que ses certificats médicaux étaient incomplets avant le 15 avril 2015 et en examinant le contexte de la décision du commissaire dans son ensemble, je ne peux en venir à la conclusion que le commissaire a commis une erreur puisque sa décision reflète les circonstances suivant les communications commençant le 15 avril 2015. Autrement dit, à mon avis, le commissaire ne s’est pas fondé sur le défaut du demandeur de fournir des certificats médicaux avant le 15 avril 2015 pour en venir à sa décision. Il n’y a pas d’erreur à cet égard.
[72] D’autre part, bien que le demandeur soulève le retard subit pour obtenir l’autorisation de quitter sa région de travail afin de se rendre en Chine pour y obtenir des traitements médicaux et allègue que ce retard contrevenait à la politique de la GRC qui n’exige pas d’autorisation dans ces circonstances, il ne s’agit pas d’un facteur sur lequel l’ordonnance est fondée.
[73] À mon avis, l’essence de la présente affaire repose sur le caractère raisonnable de l’annulation du congé de maladie du demandeur en raison du manque de renseignements médicaux appuyant ce congé et, par conséquent, sur la conclusion qui en découle que le demandeur s’est absenté du travail sans autorisation et sur l’ordonnance qui s’en est suivie et qui a été maintenue par la décision d’appel.
[74] J’observe que le dossier d’appel certifié ne comprend pas le dossier médical ou le dossier de soin de la GRC du demandeur. L’ordonnance et la décision d’appel concernent l’opinion de la médecin-chef et le fait que les certificats médicaux et formules qui devaient être fournis après le 14 avril 2015 sont soit incomplets soit manquants. Ceci est confirmé par le dossier d’appel certifié puisque, en réponse aux questions posées par le demandeur au cours du processus d’appel, il lui a été expliqué que les renseignements médicaux, y compris la plupart des courriels et des enregistrements des conversations téléphoniques entre la médecin-chef et le demandeur, s’inscrivent dans la portée du secret professionnel du médecin. Ces renseignements n’étaient donc pas accessibles à l’inspecteur et à l’ARH. Le demandeur avait l’option de lever son droit au secret professionnel, en tout ou en partie, à l’égard de ses renseignements médicaux et de les introduire en preuve pour qu’ils soient examinés. Puisque le demandeur ne l’a pas fait, l’ARH ne s’est pas fondé sur les détails de son dossier médical pour rendre sa décision prévoyant l’ordonnance, mais a plutôt examiné la période pertinente relative aux efforts de retour au travail déployés après le 14 avril 2015 ainsi que les communications qui ont eu lieu à cet égard.
[75] La correspondance versée au dossier d’appel certifié indique qu’avant la lettre de l’inspecteur du 14 avril 2015, le plus récent certificat médical (formule 2135) fourni par le demandeur a été transmis le 29 janvier 2015 et qu’il recommandait une prolongation de trois mois du congé de maladie. Sa dernière divulgation de renseignements médicaux à l’égard de son incapacité médicale a été reçue le 30 janvier 2015 et n’indiquait aucune limitation ou restriction applicable. Ainsi, en date du 14 avril 2015, il n’y avait aucun certificat médical en vigueur. La lettre de l’inspecteur du 29 juillet 2015 indique que le demandeur a fourni un certificat médical daté du 25 juin 2015, mais que celui-ci était incomplet et muet à l’égard de ses limitations et restrictions professionnelles et ne prévoyait aucune date de reprise des fonctions habituelles ou modifiées. Le demandeur semble avoir envoyé le certificat médical par courriel le 30 juin 2015. Toutefois, aucune copie n’est jointe au courriel retrouvé dans le dossier d’appel certifié ou dans le dossier du demandeur. Dans un courriel du 3 août 2015, le demandeur affirme qu’il y joint un certificat médical mis à jour. Cependant, une fois de plus, il n’y a pas de copie de ce certificat jointe au dossier d’appel certifié ou au dossier du demandeur. Le 7 septembre 2015, dans ses observations en réponse à la recommandation, le demandeur a fourni un certificat médical daté du 24 août 2015.
[76] Dans un courriel du 3 août 2015, le demandeur affirme qu’il a joint un certificat médical et s’excuse du fait qu’il n’est pas complet, soulignant qu’il en enverra un nouveau à jour un peu plus tard. Dans un courriel du 27 août 2015, le demandeur envoie un certificat médical daté du 24 août 2015 sur lequel la case « inapte au travail » est cochée pour les dates du 1er septembre 2015 au 30 septembre 2015. Les cases « apte au travail avec certaines restrictions » et « retour progressif au travail » n’étaient pas cochées. La section intitulée « restrictions à l’exercice d’un emploi » n’était pas non plus remplie. Dans ce courriel, le demandeur affirme que son médecin de famille l’a avisé que [traduction] « remplir le champ “restrictions à l’exercice d’un emploi” se situait au-delà de [sa] compétence », mais qu’il était d’avis qu’un [traduction] « spécialiste pourrait lui donner certains conseils à cet égard ».
[77] À cet égard, je note que le dossier d’appel certifié ne contient que le certificat médical du 24 août 2015. Le demandeur, à la pièce G de son affidavit déposé au soutien de sa demande de contrôle judiciaire, fournit des copies de ses certificats médicaux antérieurs ainsi que des certificats donnés en 2015 et datés du 27 avril, du 19 mai, du 25 juin, du 24 juillet, du 24 août et du 17 septembre. Ni le dossier d’appel certifié ni le dossier du demandeur ne précise que les certificats datés du 27 avril, du 19 mai et du 17 septembre 2015 ont été transmis à la GRC. Il n’est pas clairement indiqué pourquoi les certificats qui ont été fournis n’ont pas été inclus au dossier d’appel certifié.
[78] Il est vrai que le certificat médical du 24 août 2015 ne comprend aucune mention des limitations et restrictions applicables requises par l’article 2.9.1 du chapitre 19.3 du manuel d’administration. Il n’indique pas non plus de date prévue pour la reprise des fonctions habituelles ou modifiées. J’aurais pu m’interroger sur l’interprétation faite par le commissaire de l’article 2.9.1, considérant que le demandeur a été jugé inapte au travail pendant une période de temps précise par son médecin de famille et que cela soulève donc la question de savoir s’il y avait en fait des limitations et restrictions « applicables » en l’espèce; toutefois, le demandeur n’a pas soulevé cette question. Il n’a pas non plus contesté le fait que les certificats médicaux après le 15 avril 2015 étaient incomplets. Il a reçu les demandes de renseignements supplémentaires, qu’il a transmises à son médecin de famille. Ces renseignements n’ont pas été renvoyés par le médecin de famille ou le médecin spécialiste.
[79] Quoi qu’il en soit, rien dans le dossier d’appel certifié n’indique que le demandeur a transmis la formule 4056 (soit le questionnaire d’évaluation d’invalidité) remplie par son médecin alors que l’inspecteur le lui avait demandé le 1er mai 2015. Le demandeur s’est contenté de répéter à plusieurs reprises que son médecin de famille n’aimait pas remplir cette formule et ne croyait pas qu’il avait la responsabilité de le faire.
[80] Dans la décision d’appel, le commissaire a reconnu la prétention du demandeur selon laquelle il était incapable de fournir la formule dûment remplie puisque ses médecins ne voulaient pas la rédiger. À mon avis, le commissaire a raisonnablement conclu que cette situation ne libérait pas le demandeur des exigences de la politique et que son explication n’était pas crédible. Le demandeur affirme avoir une maladie. Il est déraisonnable que sur une période de plus d’un an et demi, son nouveau médecin de famille ne se soit pas suffisamment familiarisé avec l’état de son patient pour être en mesure de remplir la formule 4056.
[81] De plus, comme l’a fait valoir le défendeur et ce qui revêt une importance plus grande encore à mon avis, l’ARH ne s’est pas uniquement fondé sur les certificats médicaux incomplets et l’absence du questionnaire d’évaluation de l’incapacité pour en arriver à sa conclusion. L’ARH s’est en effet également fondé sur l’opinion de la médecin-chef, qui est un médecin autorisé responsable de la supervision et de la coordination de la production des opinions professionnelles et des recommandations rendues par les programmes des Services de santé et de veiller à l’application adéquate des normes professionnelles de santé en application de la politique. Comme il a été mentionné plus tôt, la Dre Hossack a formulé son opinion de l’état médical actuel du demandeur dans une note de service datée du 28 juillet 2015, afin d’aider l’inspecteur à décider s’il devait approuver, annuler ou rejeter le congé de maladie continu du demandeur. La Dre Hossack déclarait dans cette note qu’après avoir examiné tous les documents pertinents accessibles à la GRC et avoir effectué les consultations nécessaires pour formuler sa recommandation, en l’absence de nouvelle information, elle se trouvait dans l’impossibilité de recommander la poursuite du congé de maladie continu du demandeur signifiant une absence complète de son poste. Elle recommandait plutôt que le demandeur bénéficie d’un congé de maladie composé d’heures de travail réduites dans le cadre d’une entente de retour au travail. Elle déclarait également qu’elle avait demandé la divulgation des renseignements médicaux pertinents, qu’elle avait sollicité des clarifications aux fournisseurs de soins de santé du demandeur et qu’elle demeurait disponible pour rencontrer le demandeur s’il souhaitait discuter de son état de santé ou de ses limitations et de ses restrictions dans le cadre de son retour au travail.
[82] Dans un courriel daté du 20 août 2015, la Dre Hossack avise l’inspecteur qu’elle n’avait pas de nouveaux contacts avec les médecins du demandeur, à l’exception de la réception d’un nouveau certificat médical (formule 2135) signé par le Dr Al-Jawadi. Elle affirmait qu’elle avait discuté avec le médecin principal et le médecin spécialiste du demandeur et qu’elle avait reçu des renseignements médicaux supplémentaires du demandeur (les examens de mai et juin), mais que ces renseignements ne modifiaient pas ses conclusions énoncées dans sa note de service précédente.
[83] Le 22 septembre 2015, l’ARH a demandé à la Dre Hossack de l’aviser si les résultats de l’IRM du demandeur pouvaient raisonnablement avoir une incidence sur son avis du 28 juillet 2015 et sur sa recommandation relative au congé de maladie. Le 6 octobre 2015, la Dre Hossack a avisé l’ARH que les résultats de l’IRM ne modifieraient pas son avis actuel et sa recommandation, qu’elle avait conscience de la nature du problème médical du demandeur et qu’elle demeurait incapable de soutenir d’un point de vue médical son absence complète du travail. À son avis, le retour graduel au travail du demandeur, dans la mesure de sa capacité, constituait une mesure adéquate.
[84] Le dossier d’appel certifié ne contient aucun élément de preuve fourni par le demandeur permettant de soutenir son opinion selon laquelle la médecin-chef ne connaissait pas suffisamment son dossier pour évaluer son état ou pour infirmer son opinion médicale. Comme le commissaire l’a conclu, le demandeur a formulé de longues observations à plusieurs occasions, mais n’a fourni que sa propre interprétation de ce qu’il prétend être les opinions de son médecin de famille et de son médecin spécialiste. Il n’a présenté aucune preuve médicale pour appuyer sa thèse ou pour contester l’opinion de la médecin-chef, qui demeure donc non contredite par la preuve médicale. Par conséquent, à mon avis, le commissaire n’a pas commis d’erreur en concluant que l’inspecteur et l’ARH se sont raisonnablement fondés sur l’opinion de la médecin-chef.
[85] En résumé, je ne peux conclure en fonction du dossier devant moi que la décision du commissaire de maintenir l’ordonnance rendue par l’ARH déclarant le demandeur absent du travail sans autorisation est déraisonnable. En fait, selon le dossier devant moi, la GRC a déployé des efforts considérables, fait preuve d’une grande patience et a été juste et raisonnable dans ses rapports avec le demandeur.
[86] Sur une note finale, le demandeur allègue qu’une erreur de droit a été commise comme fondement à sa demande de contrôle judiciaire, mais ne précise pas de quelle erreur il s’agit. Il soutient que la politique prévue par le chapitre 19.3 (congé de maladie) du manuel d’administration a été ignorée, qu’il s’est conformé à cette politique et que le dossier démontre que son congé de maladie aurait dû être autorisé. On peut se demander si ce dernier point soulève l’argument que les politiques ont été déraisonnablement interprétées, mais si tel est le cas, je conclus que l’interprétation de la politique faite par le commissaire était raisonnable et, quoi qu’il en soit, que l’opinion médicale de la médecin-chef n’a pas été contredite.
[87] C’est une situation tout à fait regrettable. Le demandeur semble incapable de reconnaître que sa propre analyse de son état de santé est insuffisante. Le dossier d’appel certifié indique que le demandeur a toujours la possibilité de fournir des preuves médicales démontrant qu’il est incapable de retourner au travail de façon permanente, ou indiquant quand et en fonction de quelles modalités il sera en mesure de réintégrer le travail. Il est encouragé à transmettre cette preuve, à s’engager activement dans le processus de retour au travail initié par la GRC ou à explorer la possibilité de prendre sa retraite pour des raisons de santé.
[88] En ce qui a trait aux dépens, le défendeur a fait savoir qu’il abandonnait sa demande de dépens. Je conviens que cela est indiqué dans les circonstances.
JUGEMENT
LA COUR rejette la demande de contrôle judiciaire et aucuns dépens ne sont adjugés.
« Cecily Y. Strickland »
Juge
ANNEXE A
Législation et politiques |
Legislation and Policies |
i) Loi sur la Gendarmerie royale du Canada (LRC (1985), ch R-10) |
i) Royal Canadian Mounted Police Act, RSC, 1985, c R-10 |
Nomination |
Appointment |
5 (1) Le gouverneur en conseil peut nommer, à titre amovible, un officier appelé commissaire de la Gendarmerie royale du Canada, qui, sous la direction du ministre, a pleine autorité sur la Gendarmerie et tout ce qui s’y rapporte. |
5 (1) The Governor in Council may appoint an officer, to be known as the Commissioner of the Royal Canadian Mounted Police, to hold office during pleasure, who, under the direction of the Minister, has the control and management of the Force and all matters connected with the Force. |
Délégation |
Delegation |
(2) Le commissaire peut déléguer à tout membre, aux conditions qu’il fixe, les pouvoirs ou fonctions que lui attribue la présente loi, à l’exception du pouvoir de délégation que lui accorde le présent paragraphe, du pouvoir que lui accorde la présente loi d’établir des règles et des pouvoirs et fonctions visés aux paragraphes 45.4(5) et 45.41(10). |
(2) The Commissioner may delegate to any member, subject to any terms and conditions that the Commissioner directs, any of the Commissioner’s powers, duties or functions under this Act, except the power to delegate under this subsection, the power to make rules under this Act and the powers, duties or functions under subsections 45.4(5) and 45.41(10). |
Cessation de la solde et des indemnités |
Stoppage of pay and allowances |
22(2) Le commissaire peut exiger la cessation du versement de la solde et des indemnités d’un membre dans l’un ou l’autre des cas suivants : |
22(2) The Commissioner may direct that a member’s pay and allowances be stopped if |
a) selon le commissaire : |
(a) the Commissioner is of the opinion that the member |
(i) le membre ne peut s’acquitter de ses fonctions parce qu’il ne possède plus l’une des compétences de base établies dans les règles relativement à l’exercice des fonctions d’un membre, |
(i) is unable to perform their duties as the result of the loss of a basic requirement, as set out in the rules, for the carrying out of a member’s duties, |
(ii) il s’absente sans autorisation, |
(ii) is absent from duty without authorization, or |
(iii) il abandonne sans autorisation l’une quelconque des fonctions qui lui ont été assignées; |
(iii) has left any assigned duty without authorization; |
ii) Consignes du commissaire (exigences d’emploi) DORS/2014-292 |
ii) Commissioner’s Standing Orders (Employment Requirements), SOR/2014-292 |
Cessation du versement de la solde et des indemnités |
Stoppage of Pay and Allowances |
Définition de décideur |
Definition of decision maker |
3 Pour l’application de la présente partie, décideur s’entend du membre à qui le commissaire a délégué le pouvoir d’exiger la cessation du versement de la solde et des indemnités d’un membre en application des alinéas 22(2)a) ou c) de la Loi. |
3 For the purpose of this Part, “decision maker” means a member to whom the Commissioner has delegated the power to direct that a member’s pay and allowances be stopped under paragraph 22(2)(a) or (c) of the Act. |
Avis au décideur responsable |
Notice of decision maker |
4 (1) Si un membre ne possède plus l’une des compétences de base, s’absente sans autorisation ou abandonne sans autorisation l’une des fonctions qui lui ont été assignées, la personne qui a le commandement du détachement de ce membre en avise par écrit le décideur responsable dès que possible. |
4 (1) If a member loses a basic requirement, is absent from duty without authorization or has left any assigned duty without authorization, the person in command of the member’s detachment must notify the decision maker for the member in writing as soon as feasible. |
Recommandation de licenciement d’un membre |
Member recommended for discharge |
(2) La personne qui recommande le licenciement d’un membre en vertu des alinéas 20.2(1)d), f) ou j) de la Loi en avise immédiatement par écrit le décideur responsable. |
(2) If a member is recommended for discharge under paragraph 20.2(1)(d), (f) or (j) of the Act, the person making the recommendation must immediately notify the decision maker for the member in writing. |
Signification d’un avis d’intention |
Service of notice of intent |
(3) Sur réception d’un avis au titre des paragraphes (1) ou (2), si le décideur a l’intention d’exiger la cessation du versement de la solde et des indemnités du membre, il lui fait signifier un avis à cet effet. |
(3) If, on receiving a notification under subsection (1) or (2), the decision maker intends to direct that the member’s pay and allowances be stopped, they must cause to be served on the member a notice to that effect. |
Contenu de l’avis |
Contents of notice of intent |
(4) L’avis d’intention précise : |
(4) The notice of intent must |
a) les motifs sur lesquels le décideur a l’intention de fonder sa décision; b) la possibilité pour le membre, dans les quatorze jours suivant la date de la signification de l’avis : (i) de soumettre une réponse écrite, (ii) de demander par écrit la prorogation du délai pour soumettre une réponse écrite. |
(a) set out the grounds on which the decision maker intends to make the decision; and (b) state that the member may, within 14 days after the day on which the notice is served, (i) provide a written response, or (ii) request, in writing, an extension of time to provide a written response. |
Réponse écrite — prise de décision |
Consideration of response |
(5) Le décideur tient compte de toute réponse écrite avant de décider d’exiger la cessation du versement de la solde et des indemnités d’un membre. |
(5) The decision maker must consider any written response before deciding whether to direct that the member’s pay and allowances be stopped. |
Signification d’une ordonnance |
Service of direction |
(6) Le décideur qui exige par ordonnance la cessation du versement de la solde et des indemnités d’un membre le fait par écrit en lui faisant signifier copie de l’ordonnance motivée. |
(6) If the decision maker directs that a member’s pay and allowances be stopped, the decision maker must make the direction in writing and cause the member to be served with a copy of the direction and the reasons for it. |
Durée de l’ordonnance |
Duration |
(7) L’ordonnance entre en vigueur immédiatement et le demeure jusqu’à la date où le membre, selon le cas : |
(7) The direction takes effect immediately and remains in effect until the member |
a) possède à nouveau les compétences de base pour exercer ses fonctions, ne s’absente pas sans autorisation ou reprend les fonctions qui lui ont été assignées; |
(a) possesses the basic requirements for the carrying out of their duties, is no longer absent from duty without authorization or has returned to the assigned duty; or |
b) n’est plus visé par une recommandation de licenciement visée au paragraphe (2). |
(b) is no longer the subject of the recommendation for discharge referred to in subsection (2). |
Rétablissement du versement de la solde et des indemnités |
Date of reinstatement of pay and allowances |
(8) Le commissaire peut rétablir le versement de la solde et des indemnités d’un membre rétroactivement, au jour de la cessation du versement, si les motifs de la cessation n’existent plus et que les circonstances qui y ont donné lieu étaient exceptionnelles et indépendantes de la volonté du membre. |
(8) The Commissioner may reinstate the pay and allowances of a member to the date of the stoppage of pay and allowances if the grounds for the stoppage no longer apply and if the circumstances leading to the stoppage were exceptional and beyond the member’s control. |
Recours : certaines décisions écrites |
Redress for certain written decisions |
20 (1) Le membre à qui cause préjudice l’une des décisions écrites ci-après peut, à titre de recours, interjeter appel de la décision écrite conformément aux Consignes du commissaire (griefs et appels) : |
20 (1) A member who is aggrieved by one of the following written decisions may seek redress by means of an appeal of the decision in accordance with the Commissioner’s Standing Orders (Grievances and Appeals): |
e) la décision d’exiger la cessation du versement de sa solde et de ses indemnités en vertu des alinéas 22(2)a) ou c) de la Loi. |
(e) a written decision under paragraph 22(2)(a) or (c) of the Act to direct that a member’s pay and allowances be stopped. |
iii) Consignes du commissaire (griefs et appels) (DORS/2014-289) |
iii) Commissioner’s Standing Orders (Grievances and Appeals), SOR/2014-289
|
Appels (partie IV de la Loi) |
Appeals (Other than Part IV of the Act) |
Application |
Application |
37 La présente partie prévoit le processus pour l’appel : |
37 This Part provides the process for appeals |
c) des décisions écrites visées au paragraphe 20(1) des Consignes du commissaire (exigences d’emploi); |
(c) of the written decisions referred to in subsection 20(1) of the Commissioner’s Standing Orders (Employment Requirements); |
Déclaration d’appel |
Statement of appeal |
38 Pour l’application des dispositions visées à l’article 37, l’appel est fait dans les quatorze jours suivant la date de la signification au membre en cause d’une copie de la décision visée par l’appel par le dépôt auprès du BCGA d’une déclaration d’appel accompagnée d’une copie de la décision et des renseignements suivants : |
38 For the purpose of the provisions referred to in section 37, an appeal must be made by filing a statement of appeal with the OCGA within 14 days after the day on which a copy of the decision giving rise to the appeal is served on the member who is the subject of that decision. The statement must be accompanied by a copy of the decision that is being appealed and include the following information: |
a) le nom de l’appelant et son numéro d’employé; |
(a) the appellant’s name and employee number; |
b) un bref énoncé des motifs pour lesquels il estime que la décision contrevient aux principes d’équité procédurale, est entachée d’une erreur de droit ou est manifestement déraisonnable; |
(b) a concise statement of the reasons why the appellant is of the opinion that the decision that is the subject of the appeal contravenes the principles of procedural fairness, is based on an error of law or is clearly unreasonable; and |
c) le détail de la réparation demandée. |
(c) particulars concerning the redress requested. |
Dépôt obligatoire des éléments |
Obligation to file material |
39 L’intimé dépose au BCGA, dès que possible après avoir reçu signification de la déclaration d’appel, les éléments qui étaient en possession de l’auteur de la décision écrite qui fait l’objet de l’appel au moment où la décision a été rendue. |
39 The respondent must, as soon as feasible after being served with the statement of appeal, file with the OCGA the material that was before the person who rendered the written decision that is the subject of the appeal when that decision was rendered. |
Documents à l’appui de l’appel |
Supporting documents |
40 (1) Le BCGA accorde à l’appelant la possibilité de déposer des observations écrites et d’autres documents à l’appui de son appel. |
40 (1) The OCGA must provide the appellant with an opportunity to file written submissions and other documents in support of their appeal. |
Restriction |
Restriction |
(2) L’appelant ne peut : |
(2) The appellant is not entitled to |
a) déposer un document qui n’a pas été fourni à l’auteur de la décision qui fait l’objet de l’appel si le document était à la disposition de l’appelant au moment où la décision a été rendue; |
(a) file any document that was not provided to the person who rendered the decision that is the subject of the appeal if it was available to the appellant when the decision was rendered; or |
b) inclure dans ses observations écrites tout nouveau renseignement qui était connu ou aurait pu raisonnablement être connu de l’appelant au moment où la décision a été rendue. |
(b) include in their written submissions any new information that was known or could reasonably have been known by the appellant when the decision was rendered. |
Signification à l’autre partie |
Service of documents |
41 Le BCGA fait signifier à l’autre partie, dès réception, copie de la déclaration d’appel, des observations écrites ou de tous autres documents. |
41 After receiving the statement of appeal and any written submission or other document filed by a party, the OCGA must cause a copy of each one to be served on the other party. |
Décision de l’arbitre |
Adjudicator’s decision |
47 (1) L’arbitre qui dispose d’un appel peut rendre une décision : |
47 (1) An adjudicator may dispose of an appeal by rendering a decision |
a) le rejetant et confirmant la décision portée en appel; |
(a) dismissing the appeal and confirming the decision being appealed; or |
b) l’accueillant et : |
(b) allowing the appeal and |
(i) renvoyant l’affaire au décideur qui a rendu la décision ou à un autre décideur, avec des directives en vue d’une nouvelle décision, |
(i) remitting the matter, with directions for rendering a new decision to the decision maker who rendered the decision being appealed or to another decision maker, or |
(ii) ordonnant la réparation qui s’impose. |
(ii) directing any appropriate redress. |
Décision écrite |
Decision in writing |
(2) L’arbitre qui étudie l’appel rend, dès que possible, une décision écrite et motivée qui en dispose; sa décision est définitive et exécutoire. |
(2) An adjudicator considering an appeal must, as soon as feasible, render a decision in writing that disposes of the appeal and includes reasons for the decision. The decision is final and binding. |
Considérations |
Considerations |
(3) Lorsqu’il rend la décision, l’arbitre évalue si la décision qui fait l’objet de l’appel contrevient aux principes d’équité procédurale, est entachée d’une erreur de droit ou est manifestement déraisonnable. |
(3) An adjudicator, when rendering the decision, must consider whether the decision that is the subject of the appeal contravenes the principles of procedural fairness, is based on an error of law or is clearly unreasonable. |
(7) L’arbitre fait signifier copie de la décision aux parties. |
(7) The adjudicator must cause a copy of the decision to be served on the parties. |
iv) Manuel d’administration de la Gendarmerie royale du Canada
Chapitre 19.3 Congé de maladie
1. 1. 5. « médecin-chef » Médecin autorisé chargé de superviser et de coordonner la formulation des recommandations et des avis professionnels par les programmes des Services de santé, et de surveiller l’application appropriée des normes professionnelles de santé dans une ou plusieurs divisions de la GRC. Le médecin-chef relève de l’off. resp. régional des SSST.
1. 1. 14. « certificat médical » La formule 2135 dont les parties du membre et du praticien sont remplies ou un équivalent écrit clairement identifiable signé par le praticien, joint à la formule 2135, la partie du membre étant remplie et le nom et l’adresse du praticien y étant clairement indiqués;
2. Généralités
2. 4. Toutes les absences pour cause de maladie ou d’accident sont approuvées, annulées ou refusées par le chef ou son représentant.
2. 7. Le membre doit fournir un certificat médical :
2. 7. 3. pour toute période d’absence en raison de maladie ou d’accident qui dépasse 40 heures de travail consécutives;
2. 7. 4. à la demande du chef ou du médecin-chef.
2. 8. Le certificat médical ne doit être établi que par un praticien.
2. 8. 1. Les recommandations étayées par une note d’un membre d’une profession de la santé réglementée autre qu’un praticien sont étudiées par le médecin-chef, mais le membre doit quand même présenter un certificat médical d’un praticien lorsqu’il est exigé en vertu des présentes directives.
2. 9. Le certificat médical établi doit indiquer :
2. 9. 1. les limitations ou restrictions pertinentes;
2. 9. 2. la date prévue de la reprise des fonctions habituelles ou modifiées.
NOTA : Les SST considèrent tout certificat médical portant l’inscription « indéterminé » ou une inscription semblable comme date prévue du retour au travail, comme ayant une validité maximale de 30 jours civils.
2. 12. Lorsque le médecin-chef ou le RCI informe un membre que la formule 4056 (Questionnaire d’évaluation d’invalidité) est requise, le membre doit s’assurer que le praticien remplit la formule et la retourne au bureau divisionnaire des SST dans les meilleurs délais.
3. 3. Certificat médical
3.3.1. S’assurer qu’un certificat médical est fourni à son chef ou à son représentant dans les meilleurs délais.
3.3.4.1. Rester en communication avec le gestionnaire des cas d’invalidité désigné et répondre aux demandes de renseignements supplémentaires.
3.3.5. Le certificat médical est rempli par son praticien conformément aux instructions figurant sur le certificat médical.
3.3.6. Lorsqu’on apprend du médecin-chef ou du RCI que la formule 4056 est requise, demander à son praticien de remplir la formule et de la retourner au bureau divisionnaire des SST dans les meilleurs délais.
7. Personnel des Services de santé au travail
7.5. Le médecin-chef ou son représentant peut, en tout temps, dans le cadre du processus :
7.5.1. demander un certificat médical ou une formule 4056;
7.5.2. demander une copie du plan de traitement du membre, des dossiers médicaux ou des éclaircissements supplémentaires du praticien du membre;
7.5.3. proposer des modifications au plan de traitement, des restrictions ou limitations pertinentes, ou des recommandations de retour au travail, et en discuter avec le praticien du membre;
7.5.7. établir une entente de RT, qui peut être officielle ou consensuelle, selon les circonstances (établie au moyen d’une démarche multidisciplinaire, qui peut comporter la participation du praticien traitant, du personnel des SST, du facilitateur en matière de RT, du membre, du superviseur ou du chef ou du conseiller en perfectionnement et en renouvellement des ressources humaines).
7.6. Après avoir examiné tous les documents pertinents et effectué les consultations nécessaires, informer le chef de ses recommandations relatives au congé de maladie, aux limitations ou restrictions pertinentes et aux possibilités de retour au travail.
Chapitre 27.2 Cessation du versement de la solde et des indemnités
1. Politique
1.1 La présente politique établit la procédure à suivre pour la cessation du versement de la solde et des indemnités pour motif autre que la suspension pour une contravention au Code de déontologie, conformément aux sous-alinéas 22(2)a)(i), 22(2)a)(ii) et 22(2)a)(iii) ou au paragraphe 22c) de la Loi sur la GRC.
3. Cessation du versement de la solde et des indemnités
3. 1. En vertu de l’alinéa 22(2)a) de la Loi sur la GRC, un décideur peut ordonner la cessation du versement de la solde et des indemnités d’un membre s’il est d’avis que ce membre a perdu une compétence de base ou qu’il s’est absenté du poste qui lui a été assigné ou l’a quitté sans autorisation.
3. 1. 2. Un membre peut être réputé absent du poste sans autorisation qui lui a été assigné ou ayant quitté le poste qui lui a été assigné sans autorisation si :
3. 1. 2. 1 le membre n’a pas reçu l’autorisation de s’absenter pour la période en question, conformément au chap. II.5;
3. 1. 2. 2. Une demande de congé de maladie a été refusée conformément au chap. 19.3.
4. Rôles et responsabilités
4. 1 Chef de détachement
4. 1. 1. Surveiller les employés sous sa responsabilité afin d’assurer leur conformité continue aux exigences liées à leur poste.
4. 1. 2. Si un membre ne possède plus les compétences de base ou qu’il s’est absenté du poste qui lui a été assigné sans autorisation ou l’a quitté sans autorisation, évaluer la situation pour déterminer combien de temps pourrait durer la situation et prendre les mesures nécessaires pour déterminer les raisons pour lesquelles le membre a perdu une compétence de base ou s’est absenté du poste qui lui a été assigné ou l’a quitté sans autorisation, et la date à laquelle il devrait reprendre ses fonctions.
4. 1. 3. Si on estime que le membre ne sera pas en mesure de récupérer la compétence de base perdue dans un délai raisonnable, ou si on ne peut pas déterminer la raison pour laquelle le membre s’est absenté du poste qui lui a été assigné ou l’a quitté sans autorisation, ou si le membre demeure absent sans autorisation, nonobstant les mesures prises pour déterminer les motifs de l’absence et la date de retour prévue, informer le décideur de la situation par écrit. Préparer une Recommandation de cessation du versement de la solde et des indemnités qui sera présentée au décideur. Voir l’ann. 27-2-1.
4. 1. 3. 1. Dans l’avis présenté au décideur, inclure toute recommandation concernant la perte de la compétence de base ou l’absence du travail qui pourrait s’appliquer selon les circonstances, y compris toute raison justifiant la cessation du versement de la solde et des indemnités du membre.
4. 1. 4. Si possible, maintenir le contact avec le membre jusqu’à ce que la solde et les indemnités de ce dernier soient rétablies ou jusqu’à ce que soit terminé le processus relatif aux exigences en matière d’emploi dont fait l’objet le membre.
4. 1. 4. 1. S’il n’est pas possible de contacter le membre, continuer de prendre les mesures nécessaires pour déterminer les raisons pour lesquelles le membre a perdu une compétence de base ou s’est absenté du poste qui lui a été assigné ou l’a quitté sans autorisation, et la date à laquelle il devrait reprendre ses fonctions.
4. 3. Décideur
4. 3. 1. Si le décideur est d’avis que le membre répond à l’un des critères énumérés à l’alinéa 22(2)a) ou c) de la Loi sur la GRC, il peut ordonner la Cessation du versement de la solde et des indemnités du membre.
4. 3. 2. Si le décideur est d’avis que la cessation du versement de la solde et des indemnités d’un membre peuvent s’avérer prématurés, informer le chef par écrit, remettre les documents et l’information reçu du chef au chef, et joindre toutes recommandations concernant les mesures supplémentaires, selon le cas.
4. 3. 3. Si le décideur a l’intention d’exiger la cessation du versement de la solde et des indemnités d’un membre, le décideur doit alors signifier au membre un Avis d’intention d’ordonner la cessation du versement de la solde et des indemnités. Voir l’ann. 27-2-2.
4. 3. 4. L’Avis d’intention doit au moins inclure les éléments énumérés au paragraphe 4(4) des Consignes du commissaire (exigences en matière d’emploi).
4. 3. 5. S’il le juge approprié selon les circonstances, le décideur peut prolonger le délai prévu pour donner au membre plus de temps pour présenter des arguments écrits.
4. 3. 6. Le décideur doit examiner la réponse écrite du membre à l’Avis d’intention d’ordonner la cessation du versement de la solde et des indemnités avant de décider s’il va ordonner ou non la cessation du versement de la solde et des indemnités du membre.
4. 3. 6. 1. Si le membre ne fournit pas une réponse écrite à l’Avis d’intention après que le décideur lui ait signifié l’avis d’intention conformément à la procédure établie dans le Règlement de la GRC, le décideur peut alors rendre sa décision en l’absence d’une réponse écrite.
4. 3. 7. S’il détermine que la solde et les indemnités d’un membre doivent être suspendues, le décideur doit rédiger une Ordonnance de cessation du versement de la solde et des indemnités et signifier l’ordonnance au membre. Voir l’ann. 27-2-3.
4. 3. 7. 1. L’Ordonnance de cessation du versement de la solde et des indemnités doit :
4. 3. 7. 1. 1. être faite par écrit;
4. 3. 7. 1. 2. inclure les raisons sur lesquelles le décideur s’est appuyé pour rédiger l’ordonnance;
4. 3. 7. 1. 3. inclure un avis à l’intention du membre pour l’informer qu’il a été relevé de ses fonctions.
4. 3. 7. 2. Le décideur doit préparer un Registre de décision – Cessation du versement de la solde et des indemnités, qui devra être déposé dans le dossier et entré dans l’Outil de Gestion des Cas Administratifs (OGCA). Voir l’ann. 27-2-5.
4. 3. 8. Le décideur doit immédiatement envoyer une copie de l’ordonnance de cessation du versement de la solde et des indemnités aux Opérations nationales de la paye.
4. 3. 8. 1. La solde et les indemnités, y compris toute rémunération supplémentaire, cesseront le jour suivant la date d’entrée en vigueur de l’Ordonnance de cessation du versement de la solde et des indemnités. Voir le chap. II.4.
4. 3. 9. L’Ordonnance de cessation du versement de la solde et des indemnités :
4. 3. 9. 1. entre en vigueur le jour où le décideur a rendu sa décision, qu’elle ait été signifiée ou non au membre;
4. 3. 9. 2. demeurera en vigueur jusqu’à ce que le membre ait remédié à toutes les lacunes exposées dans l’ordonnance, selon les directives du décideur ou d’un arbitre.
4. 3. 10. Le décideur ordonnera le rétablissement de la solde et des indemnités d’un membre lorsqu’il est convaincu que les motifs de la cessation du versement de la solde et des indemnités, tels qu’ils sont présentés au sous-alinéa 22(1)(i), (ii) ou (iii) de la Loi sur la GRC ne s’appliquent plus, ou selon d’autres directives du décideur.
4. 3. 11. Immédiatement après avoir déterminé que le versement de la solde et les indemnités du membre doivent être rétablis, le décideur doit signifier un Avis de rétablissement du versement de la solde et des indemnités par écrit (voir l’ann. 27-2-4) au membre concerné et aux Opérations nationales de la paye.
4. 3. 12. Aux termes des Consignes du commissaire (griefs et appels), un arbitre peut ordonner le rétablissement du versement de la solde et des indemnités d’un membre.
4. 3. 13. Une ordonnance de rétablissement du versement de la solde et des indemnités entre en vigueur à la date à laquelle le décideur a déterminé que les motifs de la cessation du versement de la solde et des indemnités ne s’appliquent plus, ou à la date à laquelle un arbitre a ordonné le rétablissement de la solde et des indemnités du membre.
4. 4. Membre
4. 4. 1. Une demande de prolongation du délai pour la présentation d’une réponse écrite à l’avis d’intention d’ordonner la cessation du versement de la solde et des indemnités doit :
4. 4. 1. 1. être présentée par écrit dès que possible dans les 14 jours suivant la date à laquelle l’avis a été signifié au membre;
4. 4. 1. 2. inclure des raisons à l’appui;
4. 4. 2. Une décision d’ordonner la cessation du versement de la solde et des indemnités peut être portée en appel conformément aux Consignes du commissaire (exigences en matière d’emploi) et aux Consignes du commissaire (griefs et appels).
4. 4. 3. L’Ordonnance de cessation du versement de la solde et des indemnités n’est pas suspendue si le membre la porte en appel.
4. 4. 4. Un membre dont le versement de la solde et des indemnités a été suspendu en raison de la perte d’une compétence de base peut occuper un emploi secondaire légitime à l’extérieur de la GRC, sous réserve de la politique pertinente concernant les activités extérieures et de l’obtention de l’autorisation nécessaire. Voir le chap. XVII.1., art. 12.
EXCEPTION : Un membre dont le versement de la solde et des indemnités a été suspendu pour l’une des raisons énumérées au sous-alinéa 22(2(ii) (s’absente sans autorisation) ou (iii) (abandonne sans autorisation l’une quelconque des fonctions qui lui ont été assignées) de la Loi sur la GRC n’est pas autorisé à occuper un emploi secondaire à l’extérieur de la GRC jusqu’à ce qu’il ait repris ses fonctions ou obtenu l’autorisation de la GRC de s’absenter du travail.
4. 4. 6. Le chap. II.4 contient plus de renseignements au sujet des effets de l’ordonnance sur la solde et les indemnités d’un membre. Pour en savoir plus au sujet des pensions, veuillez consulter le site Web de la GRC sur les pensions. Pour obtenir de l’information sur la couverture d’assurance, veuillez consulter le site Web Morneau Shepell.
4. 4. 7. Un membre peut être admissible à une avance sur la solde en cas d’urgence à la suite du rétablissement de sa solde et de ses indemnités. Voir le chap. II.4, art. P.
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : |
Dossier : T-1979-16
|
INTITULÉ : |
TIELUN SU c. PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA
|
LIEU DE L’AUDIENCE : |
Vancouver (Colombie-Britannique)
|
DATE DE L’AUDIENCE : |
Le 21 juin 2017
|
JUGEMENT ET MOTIFS : |
LA JUGE STRICKLAND
|
DATE DES MOTIFS : |
Le 4 juillet 2017
|
COMPARUTIONS :
Tielun Su
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Pour le demandeur (POUR SON PROPRE COMPTE) |
Liliane Bantourakis
|
Pour le défendeur
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AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Nathalie G. Drouin Sous-procureure générale du Canada Vancouver (Colombie-Britannique)
|
Pour le défendeur
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