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Date : 20170609


Dossier : IMM-3198-16

Référence : 2017 CF 564

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Montréal (Québec), le 9 juin 2017

En présence de monsieur le juge Shore

ENTRE :

MÉDIATRICE UMWIZERWA

demanderesse

et

LE MINISTRE DE L’IMMIGRATION, DES RÉFUGIÉS ET DE LA CITOYENNETÉ

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  Aperçu

Il est fréquemment admis que l’on ne saurait s’attendre qu’une personne qui a été victime – ou dont la famille a été victime – de formes atroces de persécution accepte le rapatriement. Même s’il [y] a eu un changement de régime dans le pays, cela n’a pas nécessairement entraîné un changement complet dans l’attitude de la population ni, compte tenu de son expérience passée, dans les dispositions d’esprit du réfugié. [Non souligné dans l’original.]

(Cité dans Canada (Minister of Employment and Immigration) v Obstoj (FCA), [1992] 2 FC 739, [1992] FCJ No 422 [Obstoj], à titre d’extrait du Guide des procédures et critères à appliquer pour déterminer le statut de réfugié du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), au paragraphe 136.)

[1]  La Cour estime que l’agent d’immigration a commis une erreur en ne tenant pas compte du statut de réfugié accordé à la demanderesse et à son mari par le HCR et en n’admettant pas que les décès des membres de leur famille au Rwanda équivalaient à de la persécution passée. Ce faisant, l’agent n’a pas tiré de conclusion explicite au sujet de la persécution passée et a évité la question des raisons impérieuses.

[2]  La Cour estime que le jugement Obstoj de la Cour d’appel fédérale a déjà résolu la question dans les cas les plus exceptionnels, lesquels représentent, selon ce jugement, les raisons les plus exceptionnelles de ceux dont l’existence est telle qu’ils ne peuvent envisager de vivre à nouveau dans un pays où ils ont perdu leur famille, leur histoire et leur passé, et ce en raison de leur état psychologique exceptionnellement fragilisé. En l’espèce, la famille est demeurée dans un camp de réfugiés durant vingt ans plutôt que de retourner au lieu d’origine des événements.

II.  Nature de l’affaire

[3]  Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire présentée en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la LIPR), à l’encontre d’une décision rendue par un agent d’immigration (l’agent) basé au Haut-commissariat du Canada à Pretoria, en Afrique du Sud. Dans une lettre datée du 1er juin 2016, l’agent a rejeté la demande de résidence permanente de la demanderesse à titre de réfugié au sens de la Convention outre‑frontières ou de personne protégée à titre humanitaire outre‑frontières, présentée en vertu du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 (le RIPR).

III.  Contexte

[4]  La demanderesse (âgée de 32 ans) et son mari (âgé de 34 ans) sont des citoyens rwandais et ils vivent au camp de réfugiés Dzaleka au Malawi, avec leurs deux enfants (âgés de 9 ans et de 4 ans). Ils ont quitté le Rwanda à la suite du génocide de 1994 : la demanderesse a perdu ses parents et trois frères et sœurs qui ont souffert de dysenterie et les parents de son mari ont été tués. Ils se sont rencontrés au camp en 2005 et se sont mariés en 2006.

[5]  En 2014, la demanderesse et sa famille ont présenté une demande de résidence permanente au Canada dans la catégorie des réfugiés au sens de la Convention outre‑frontières. La demande était parrainée par le diocèse anglican de Montréal. La demanderesse espérait retrouver son frère et sa sœur, tous les deux maintenant établis au Canada.

[6]  Le 15 mars 2016, l’agent a interrogé la demanderesse et son mari au camp de réfugiés, avec l’aide d’un interprète.

IV.  Décision contestée

[7]  Dans une lettre datée du 1er juin 2016, l’agent a rejeté la demande de résidence permanente de la demanderesse à titre de réfugié au sens de la Convention outre‑frontières ou de personne protégée à titre humanitaire outre‑frontières.

[8]  L’agent a conclu que la demanderesse et son mari n’avaient pas qualité de réfugiés en vertu de l’article 96 de la LIPR. Compte tenu des changements positifs survenus au Rwanda depuis 1994, la demanderesse et son mari ne satisfaisaient pas aux exigences établies, n’ayant pu établir une crainte objective de persécution dans leur pays d’origine, fondée sur la race, la religion, la nationalité, l’appartenance à un groupe social particulier et les opinions politiques.

[9]  De plus, l’agent a conclu que la demanderesse et son mari n’étaient pas sérieusement et personnellement touchés par une guerre civile, un conflit armé ou une violation massive des droits de la personne dans le pays de leur nationalité, conformément à l’article 147 de la LIPR, malgré ce qui est arrivé à leur famille respective et malgré le fait qu’ils en aient tous les deux été touchés.

[10]  Par conséquent, l’agent n’a pas été convaincu que la demanderesse satisfaisait aux exigences de l’alinéa 139(1)e) de la LIPR.

V.  Questions en litige

[11]  Les parties soulèvent les questions suivantes :

  1. Est-ce que l’agent a commis une erreur en concluant que la demanderesse n’avait pas droit à un visa de résidente permanente au Canada en tant que membre de la catégorie des réfugiés au sens de la Convention outre‑frontières ou des personnes de pays d’accueil?

  2. Est-ce que l’agent a commis une erreur en ne cherchant pas à savoir si le paragraphe 108(4) de la LIPR pouvait s’appliquer?

VI.  Dispositions pertinentes

[12]  Les dispositions suivantes sont applicables en l’espèce :

article 96 de la LIPR :

Définition de réfugié

Convention refugee

96 A qualité de réfugié au sens de la Convention — le réfugié — la personne qui, craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques :

96 A Convention refugee is a person who, by reason of a well-founded fear of persecution for reasons of race, religion, nationality, membership in a particular social group or political opinion,

a) soit se trouve hors de tout pays dont elle a la nationalité et ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de chacun de ces pays;

(a) is outside each of their countries of nationality and is unable or, by reason of that fear, unwilling to avail themself of the protection of each of those countries; or

b) soit, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle, ne peut ni, du fait de cette crainte, ne veut y retourner.

(b) not having a country of nationality, is outside the country of their former habitual residence and is unable or, by reason of that fear, unwilling to return to that country.

alinéa 108(1)e) et paragraphe 108(4) de la LIPR :

Perte de l’asile

Cessation of Refugee Protection

Rejet

Rejection

108 (1) Est rejetée la demande d’asile et le demandeur n’a pas qualité de réfugié ou de personne à protéger dans tel des cas suivants :

108 (1) A claim for refugee protection shall be rejected, and a person is not a Convention refugee or a person in need of protection, in any of the following circumstances:

[…]

e) les raisons qui lui ont fait demander l’asile n’existent plus.

(e) the reasons for which the person sought refugee protection have ceased to exist.

[…]

Exception

Exception

(4) L’alinéa (1)e) ne s’applique pas si le demandeur prouve qu’il y a des raisons impérieuses, tenant à des persécutions, à la torture ou à des traitements ou peines antérieurs, de refuser de se réclamer de la protection du pays qu’il a quitté ou hors duquel il est demeuré.

(4) Paragraph (1)(e) does not apply to a person who establishes that there are compelling reasons arising out of previous persecution, torture, treatment or punishment for refusing to avail themselves of the protection of the country which they left, or outside of which they remained, due to such previous persecution, torture, treatment or punishment.

paragraphe 139(1) de la LIPR :

Exigences générales

General requirements

139 (1) Un visa de résident permanent est délivré à l’étranger qui a besoin de protection et aux membres de sa famille qui l’accompagnent si, à l’issue d’un contrôle, les éléments suivants sont établis :

139 (1) A permanent resident visa shall be issued to a foreign national in need of refugee protection, and their accompanying family members, if following an examination it is established that

a) l’étranger se trouve hors du Canada;

(a) the foreign national is outside Canada;

b) il a fait une demande de visa de résident permanent au titre de la présente section conformément aux alinéas 10(1)a) à c) et (2)c.1) à d) et aux articles 140.1 à 140.3;

(b) the foreign national has submitted an application for a permanent resident visa under this Division in accordance with paragraphs 10(1)(a) to (c) and (2)(c.1) to (d) and sections 140.1 to 140.3;

c) il cherche à entrer au Canada pour s’y établir en permanence;

(c) the foreign national is seeking to come to Canada to establish permanent residence;

d) aucune possibilité raisonnable de solution durable n’est, à son égard, réalisable dans un délai raisonnable dans un pays autre que le Canada, à savoir :

(d) the foreign national is a person in respect of whom there is no reasonable prospect, within a reasonable period, of a durable solution in a country other than Canada, namely

(i) soit le rapatriement volontaire ou la réinstallation dans le pays dont il a la nationalité ou dans lequel il avait sa résidence habituelle,

(i) voluntary repatriation or resettlement in their country of nationality or habitual residence, or

(ii) soit la réinstallation ou une offre de réinstallation dans un autre pays;

(ii) resettlement or an offer of resettlement in another country;

e) il fait partie d’une catégorie établie dans la présente section;

(e) the foreign national is a member of one of the classes prescribed by this Division;

f) selon le cas :

(f) one of the following is the case, namely

(i) la demande de parrainage du répondant à l’égard de l’étranger et des membres de sa famille visés par la demande de protection a été accueillie au titre du présent règlement,

(i) the sponsor’s sponsorship application for the foreign national and their family members included in the application for protection has been approved under these Regulations,

(ii) s’agissant de l’étranger qui appartient à la catégorie des réfugiés au sens de la Convention outre-frontières, une aide financière publique est disponible au Canada, au titre d’un programme d’aide, pour la réinstallation de l’étranger et des membres de sa famille visés par la demande de protection,

(ii) in the case of a member of the Convention refugee abroad class, financial assistance in the form of funds from a governmental resettlement assistance program is available in Canada for the foreign national and their family members included in the application for protection, or

(iii) il possède les ressources financières nécessaires pour subvenir à ses besoins et à ceux des membres de sa famille visés par la demande de protection, y compris leur logement et leur réinstallation au Canada;

(iii) the foreign national has sufficient financial resources to provide for the lodging, care and maintenance, and for the resettlement in Canada, of themself and their family members included in the application for protection;

g) dans le cas où l’étranger cherche à s’établir dans une province autre que la province de Québec, lui et les membres de sa famille visés par la demande de protection pourront réussir leur établissement au Canada, compte tenu des facteurs suivants :

(g) if the foreign national intends to reside in a province other than the Province of Quebec, the foreign national and their family members included in the application for protection will be able to become successfully established in Canada, taking into account the following factors:

(i) leur ingéniosité et autres qualités semblables pouvant les aider à s’intégrer à une nouvelle société,

(i) their resourcefulness and other similar qualities that assist in integration in a new society,

(ii) la présence, dans la collectivité de réinstallation prévue, de membres de leur parenté, y compris celle de l’époux ou du conjoint de fait de l’étranger, ou de leur répondant,

(ii) the presence of their relatives, including the relatives of a spouse or a common-law partner, or their sponsor in the expected community of resettlement,

(iii) leurs perspectives d’emploi au Canada vu leur niveau de scolarité, leurs antécédents professionnels et leurs compétences,

(iii) their potential for employment in Canada, given their education, work experience and skills, and

(iv) leur aptitude à apprendre à communiquer dans l’une des deux langues officielles du Canada;

(iv) their ability to learn to communicate in one of the official languages of Canada;

h) dans le cas où l’étranger cherche à s’établir dans la province de Québec, les autorités compétentes de cette province sont d’avis que celui-ci et les membres de sa famille visés par la demande de protection satisfont aux critères de sélection de cette province;

(h) if the foreign national intends to reside in the Province of Quebec, the competent authority of that Province is of the opinion that the foreign national and their family members included in the application for protection meet the selection criteria of the Province; and

i) sous réserve des paragraphes (3) et (4), ni lui ni les membres de sa famille visés par la demande de protection ne sont interdits de territoire.

(i) subject to subsections (3) and (4), the foreign national and their family members included in the application for protection are not inadmissible.

articles 145, 146 et 147 du RIPR :

Qualité

Member of Convention refugees abroad class

145 Est un réfugié au sens de la Convention outre-frontières et appartient à la catégorie des réfugiés au sens de cette convention l’étranger à qui un agent a reconnu la qualité de réfugié alors qu’il se trouvait hors du Canada.

145 A foreign national is a Convention refugee abroad and a member of the Convention refugees abroad class if the foreign national has been determined, outside Canada, by an officer to be a Convention refugee.

Personnes protégées à titre humanitaire outre-frontières

Humanitarian-protected Persons Abroad

Personne dans une situation semblable à celle d’un réfugié au sens de la Convention

Person in similar circumstances to those of a Convention refugee

146 (1) Pour l’application du paragraphe 12(3) de la Loi, la personne dans une situation semblable à celle d’un réfugié au sens de la Convention appartient à la catégorie de personnes de pays d’accueil.

146 (1) For the purposes of subsection 12(3) of the Act, a person in similar circumstances to those of a Convention refugee is a member of the country of asylum class.

Personnes protégées à titre humanitaire outre-frontières

Humanitarian-protected persons abroad

(2) La catégorie de personnes de pays d’accueil est une catégorie réglementaire de personnes protégées à titre humanitaire outre-frontières qui peuvent obtenir un visa de résident permanent sur le fondement des exigences prévues à la présente section.

(2) The country of asylum class is prescribed as a humanitarian-protected persons abroad class of persons who may be issued permanent resident visas on the basis of the requirements of this Division.

Catégorie de personnes de pays d’accueil

Member of country of asylum class

147 Appartient à la catégorie de personnes de pays d’accueil l’étranger considéré par un agent comme ayant besoin de se réinstaller en raison des circonstances suivantes :

147 A foreign national is a member of the country of asylum class if they have been determined by an officer to be in need of resettlement because

a) il se trouve hors de tout pays dont il a la nationalité ou dans lequel il avait sa résidence habituelle;

(a) they are outside all of their countries of nationality and habitual residence; and

b) une guerre civile, un conflit armé ou une violation massive des droits de la personne dans chacun des pays en cause ont eu et continuent d’avoir des conséquences graves et personnelles pour lui.

(b) they have been, and continue to be, seriously and personally affected by civil war, armed conflict or massive violation of human rights in each of those countries.

VII.  Analyse

A.  Est-ce que l’agent a commis une erreur en concluant que la demanderesse n’avait pas droit à un visa de résidente permanente au Canada en tant que membre de la catégorie des réfugiés au sens de la Convention outre‑frontières ou des personnes de pays d’accueil?

(1)  Arguments de la demanderesse

[13]  La demanderesse affirme que la décision de l’agent est viciée puisqu’il n’a pas tenu compte de la preuve et n’a pas justifié ses conclusions. La demanderesse et son mari, qui ont été reconnus comme réfugiés par le HCR, ont exprimé leur crainte de persécution et leur traumatisme, dans leur demande écrite et durant l’entrevue. Ils ont présenté des rapports objectifs indiquant que des violations graves et systémiques des droits humains avaient lieu au Rwanda. Selon la demanderesse, l’agent n’a pas précisé les éléments de preuve sur lesquels il fonde ses conclusions quant au changement de circonstances au Rwanda (Kanapathipillai c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 1998 CanLII 8195 (CF), IMM-5186-97, au paragraphe 5; Omoregbe c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 1189, IMM-6710-03, au paragraphe 26; Cepeda-Gutierrez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 1998 CanLII 8669 (CF), [1998] FCJ no 1425, aux paragraphes 16 et 17).

(2)  Arguments du défendeur

[14]  Le défendeur affirme que la conclusion de l’agent selon laquelle la demanderesse n’est pas une réfugiée au sens de la Convention ou une membre de la catégorie des personnes de pays d’accueil est raisonnable. La demanderesse a fourni des éléments de preuve subjectifs et hypothétiques concernant le risque prospectif auquel elle serait exposée au Rwanda et n’a pas contredit que la situation dans son pays d’origine avait grandement changé depuis le génocide de 1994. S’appuyant sur la décision Pushparasa c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 828, au paragraphe 27 [Pushparasa], le défendeur allègue en outre que même si le HCR a accordé à la demanderesse le statut de réfugié, il lui incombait toujours de prouver qu’elle était menacée.

(3)  Observations additionnelles du défendeur

[15]  Le défendeur affirme depuis le début que l’interprétation de l’exception relative à des raisons impérieuses n’est pas pertinente en l’espèce, puisque la seule question pertinente consiste à décider si l’agent aurait dû entreprendre une analyse au titre du paragraphe 108(4) de la LIPR. Pour que l’exception prévue à l’alinéa 108(1)e) de la LIPR soit prise en considération, la demanderesse doit établir : (i) que, à un moment donné, elle avait qualité de réfugié ou de personne à protéger; (ii) qu’elle n’a plus qualité de réfugié ou de personne à protéger en raison d’un changement de circonstances dans son pays (Jairo c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2014 CF 622, au paragraphe 26 [Jairo]; Yamba c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2000] ACF no 457, 2000 Can LII 15191, au paragraphe 6 [Yamba]). Puisque l’agent n’a jamais tiré de conclusion – explicite ou implicite – selon laquelle la demanderesse avait été persécutée dans le passé et que les conditions de l’alinéa 108(1)e) étaient satisfaites, aucune analyse au titre du paragraphe 108(4) de la LIPR n’était nécessaire et il n’y avait pas lieu d’établir si des raisons impérieuses étaient présentes. (Cela, même si la demanderesse et son mari ont perdu les membres de leur famille les plus proches.)

[16]  Le défendeur affirme que même lorsque la Cour a accepté une conclusion implicite dans différentes affaires, les faits de chaque affaire étaient évidents et menaient hors de tout doute à une conclusion de persécution passée (Jairo, précité; Cabdi c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 26 [Cabdi]; Buterwa c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 1181; Decka c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 822). La demanderesse et sa famille n’ont jamais été des victimes directes de persécution passée ou d’autres actes donnant lieu à un statut de personne à protéger.

(4)  Réponse de la demanderesse

[17]  La demanderesse prétend que le défendeur adopte une approche rigide et formaliste contraire à la Convention relative au statut des réfugiés et aux jugements de la Cour d’appel fédérale (Yamba, précité; Jairo, précité, au paragraphe 27; Obstoj, précité; Cabdi, précité, au paragraphe 33) quand il affirme qu’en l’absence d’une conclusion explicite selon laquelle la défenderesse a été une réfugiée dans le passé, il n’y pas lieu de se pencher sur le paragraphe 108(4) de la LIPR. Une interprétation aussi étroite du droit pourrait avoir des conséquences défavorables sur la protection des familles de réfugiés.

[18]  La demanderesse n’est pas d’accord avec l’argument du défendeur, selon lequel le statut de réfugié accordé précédemment par le HCR n’est pas suffisamment explicite d’une persécution passée. Elle affirme que l’argument du défendeur, selon lequel la persécution passée dont a souffert la demanderesse n’est pas suffisamment impérieuse parce qu’elle et sa famille n’ont pas été directement persécutés et n’ont pas été témoins de l’assassinat de leurs parents, constitue une interprétation restrictive et ne s’accorde pas avec le bon sens, ni avec les principes de la Convention relative au statut des réfugiés (Guide du HCR, au paragraphe 136). (Il est reconnu que le Guide du HCR a été utilisé précédemment dans la jurisprudence, comme dans l’arrêt Obstoj de la Cour d’appel fédérale.)

(5)  Analyse

[19]  Il est de jurisprudence constante que les décisions d’un agent d’immigration, quant à savoir si un demandeur satisfait aux exigences de la loi pour avoir qualité de réfugié au sens de la Convention ou de membre de la catégorie des personnes de pays d’accueil, soulèvent des questions mixtes de fait et de droit et doivent être analysées suivant la norme de la décision raisonnable (Pushparasa, précité, au paragraphe 19; Janvier c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 278, au paragraphe 21; Bakhtiari c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 1229, au paragraphe 22).

[20]  La Cour estime que la décision de l’agent manque de justification, de transparence et d’intelligibilité. Il faut souligner que la demanderesse et son mari ont été reconnus comme des réfugiés par le HCR et qu’ils ont été dans une situation prolongée en camp de réfugiés à Dzaleka pendant plus de vingt ans.

[21]  Comme le montrent les notes d’entrevue consignées dans le Système de traitement informatisé des dossiers d’immigration, quand l’agent leur a demandé d’expliquer de quelle manière ils risquaient d’être persécutés au Rwanda aujourd’hui, la demanderesse et son mari ont répondu qu’ils avaient quitté le Rwanda après que leurs familles eurent été décimées par la maladie et les tueries, qu’ils étaient traumatisés et qu’ils ne pouvaient imaginer retourner dans ce pays. Ils ont affirmé qu’ils n’avaient plus de famille au Rwanda et qu’ils avaient perdu leurs biens. Enfin, ils ont souligné que des personnes fuyaient toujours le Rwanda et qu’ils avaient peur de retourner là-bas (dossier de la demanderesse, aux pages 9 et 10).

[22]  La pertinence du paragraphe 136 du Guide du HCR doit être soulignée en l’espèce :

Le second alinéa de la cinquième clause est une exception au cas de cessation d’applicabilité prévu par le premier alinéa. Ce second alinéa prévoit le cas particulier d’une personne qui a fait l’objet de violentes persécutions dans le passé et qui, de ce fait, ne cesse pas d’être un réfugié même si un changement fondamental de circonstances intervient dans son pays d’origine. La référence au paragraphe 1 de la section A de l’article premier indique que cette exception s’applique aux « réfugiés statutaires ». Au moment où la Convention de 1951 a été élaborée, la majorité des réfugiés appartenait à cette catégorie. Néanmoins, l’exception procède d’un principe humanitaire assez général qui peut également être appliqué à des réfugiés autres que les réfugiés statutaires. Il est fréquemment admis que l’on ne saurait s’attendre qu’une personne qui a été victime – ou dont la famille a été victime – de formes atroces de persécution accepte le rapatriement. Même s’il [y] a eu un changement de régime dans le pays, cela n’a pas nécessairement entraîné un changement complet dans l’attitude de la population ni, compte tenu de son expérience passée, dans les dispositions d’esprit du réfugié. [Non souligné dans l’original.]

[23]  Dans Cabdi, précité, le juge Patrick Gleeson a conclu :

[33]  Selon la jurisprudence, il faut qu’il soit explicitement confirmé que le demandeur d’asile a eu antérieurement droit au statut de réfugié pour que cela commande l’application de l’exception des raisons impérieuses prévue au paragraphe 108(4) (par exemple, JNJ c Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2010 CF 1088, 194 ACWS (3d) 1225, au paragraphe 41). Il n’y a aucune confirmation explicite en l’espèce. Cependant, il ressort également de la jurisprudence que la conclusion peut se dégager des répercussions qui découlent du raisonnement énoncé dans la décision (Decka c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 822, aux paragraphes 11 à 15, 140 ACWS (3d) 354; Alharazim, au paragraphe 36; Kumarasamy, au paragraphe 10). Le fait d’exiger une confirmation explicite lorsque la conclusion de persécution passée, bien qu’elle soit implicite, est une répercussion nécessaire découlant du raisonnement énoncé dans la décision reviendrait, à mon avis, à accorder plus d’importance à la forme qu’au fond. J’estime que la SAR a tiré une conclusion implicite de persécution passée et respecte ainsi la première des deux conditions préalables. [Non souligné dans l’original.]

[24]  Dans Jairo, précité, le juge Yves de Montigny (anciennement juge à la Cour fédérale, maintenant juge à la Cour d’appel fédérale) a écrit pour notre Cour :

[27]  Je conviens avec l’avocat des demandeurs que lorsque des raisons impérieuses découlant d’une persécution passée entrent en jeu dans l’examen d’une demande d’asile, la disposition des raisons impérieuses doit être explicitement prise en compte, qu’elle ait été ou non soulevée par le demandeur d’asile. La Commission ne peut pas éviter la question des raisons impérieuses en ne tirant pas une conclusion expresse quant à la persécution passée : BTB c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 1181; Yamba c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2000] ACF no 457; Nagaratnam c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 1208; Rose c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 537. [Non souligné dans l’original.]

[25]  La Cour estime que l’agent d’immigration a commis une erreur en ne tenant pas compte du statut de réfugié accordé à la demanderesse et à son mari par le HCR et en n’admettant pas que les décès des membres de leur famille au Rwanda équivalaient à de la persécution passée. Ce faisant, l’agent n’a pas tiré de conclusion explicite au sujet de la persécution passée et a évité la question des raisons impérieuses.

B.  Est-ce que l’agent a commis une erreur en ne cherchant pas à savoir si le paragraphe 108(4) de la LIPR pouvait s’appliquer?

(1)  Arguments de la demanderesse

[26]  La demanderesse affirme que l’agent a commis une erreur en ne cherchant pas à savoir s’il existait des raisons impérieuses justifiant le statut de réfugié pour persécution passée en vertu du paragraphe 108(4) de la LIPR, compte tenu des persécutions dont ils ont été victimes durant la guerre civile génocidaire de 1994 au Rwanda (Rose c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 537; Kumarasamy c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 290; Cabdi, précité).

(2)  Arguments du défendeur

[27]  S’appuyant sur Jairo, précité, et Alfaka Alharazim c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CF 1044 [Alharazim], le défendeur soutient que l’agent n’a pas commis d’erreur en ne procédant pas à une analyse en vertu du paragraphe 108(4) de la LIPR : (1) la demanderesse n’a jamais fait une telle demande à l’agent; (2) l’agent a estimé que la demanderesse n’avait pas satisfait, à un moment dans le passé, à la définition de réfugié au sens de la Convention; (3) l’agent n’avait pas le devoir de tenir compte de manière proactive de l’exception relative à des raisons impérieuses puisque la preuve présentée par la demanderesse n’équivalait pas à une preuve prima facie « de persécution passée “épouvantable” ou “atroce” ».

(3)  Observations additionnelles du défendeur

[28]  Le défendeur répète que l’interprétation de l’exception relative à des raisons impérieuses évoquée au paragraphe 108(4) de la LIPR n’est pas pertinente en l’espèce.

[29]  Le défendeur s’appuie sur l’interprétation et l’application du paragraphe 108(4) de la LIPR faites dans Moya c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 315 [Moya], où la Cour a fait mention de deux courants jurisprudentiels. Le premier appuie l’idée que l’exception relative aux raisons impérieuses vise une catégorie spéciale et limitée de personnes, qui inclut celles qui ont souffert d’une persécution épouvantable (Moya, précité, aux paragraphes 103 et 104; voir aussi Obstoj, précité; Alharazim, précité), et le second rejette la notion selon laquelle la persécution passée doit être atroce et épouvantable, notant qu’un critère rigide basé sur le degré d’atrocité devrait être évité et que l’établissement des raisons impérieuses est une détermination factuelle fondée sur toutes les preuves (Suleiman c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2005] 2 RCF 26, 2004 CF 1125 [Suleiman]; Kotorri c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 1195). Dans Moya, précité, la Cour a conclu que même le second courant jurisprudentiel suivant Suleiman, précité, ne rejetait pas le principe selon lequel l’exception relative à des raisons impérieuses vise une « catégorie spéciale et limitée » et une « petite minorité » de demandeurs d’asile (Moya, précité, au paragraphe 123).

[30]  Le défendeur allègue que la demanderesse n’a pas présenté d’éléments de preuve montrant une persécution passée épouvantable et atroce, ni une situation applicable à une « petite minorité » de demandeurs d’asile, en dépit de la situation familiale respective de chacun. Une allégation vague et peu détaillée de traumatisme, la perte de membres de la famille et de biens, et une réticence à retourner dans le pays d’origine sont des faits qui ne sont pas exceptionnels puisqu’ils s’appliquent à presque tous les demandeurs d’asile.

(4)  Réponse de la demanderesse

[31]  La demanderesse soutient qu’il serait irrationnel d’exiger de demandeurs d’asile vivant dans des camps de réfugiés qu’ils invoquent des dispositions législatives comme le paragraphe 108(4) de la LIPR, et répète que l’agent avait l’obligation de se pencher sur la question de savoir si la preuve présentée établissait l’existence de raisons impérieuses (Yamba, précité, au paragraphe 6).

(5)  Analyse

[32]  L’applicabilité du paragraphe 108(4) relève de questions mixtes de fait et de droit, et sera examinée selon la norme de la décision raisonnable (Cabdi, précité, au paragraphe 18; Rajadurai c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 532, au paragraphe 23; Sow c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 1313, au paragraphe 21; Alharazim, précité, aux paragraphes 16 à 25).

[33]  La Cour estime que l’agent aurait dû analyser la question de savoir si la demanderesse avait établi l’existence de raisons impérieuses, en vertu du paragraphe 108(4) de la LIPR.

[34]  En l’espèce, comme l’agent a déterminé que les circonstances avaient changé au Rwanda, il avait l’obligation d’examiner la question de l’exception relative à des raisons impérieuses prévue par la loi, pour certains cas exceptionnels, qui empêchent certaines personnes d’envisager un retour. La persécution passée vécue par les membres de la famille les plus proches, qui en sont morts, ne fait aucun doute et la situation prolongée en camp de réfugiés de la demanderesse et de sa famille commande une analyse rigoureuse de l’exception prévue à l’alinéa 108(1)e) de la LIPR, compte tenu du fait que la demanderesse et sa famille ont préféré demeurer dans un camp de réfugiés durant vingt ans plutôt que de retourner dans un pays à l’origine de leur traumatisme personnel attribuable à des pertes de vie et à des souffrances.

[35]  Comme il est indiqué dans le jugement Yamba précité, au paragraphe 6 :

[6]  En bref, lorsqu’elle conclut qu’un demandeur de statut a déjà été persécuté, mais qu’il y a eu un changement de situation dans le pays en question conformément à l’alinéa 2(2)e), la Section du statut de réfugié a, en vertu du paragraphe 2(3), l’obligation de se demander si les éléments de preuve soumis établissent l’existence de « raisons impérieuses ». Elle est soumise à cette obligation, que le demandeur de statut invoque ou non expressément le paragraphe 2(3). Cela étant dit, il incombe toujours au demandeur de statut de présenter les éléments de preuve nécessaires pour établir qu’il est fondé à invoquer cette disposition.

[36]  Par conséquent, il était déraisonnable pour l’agent de ne pas se demander s’il existait des raisons impérieuses d’accorder le statut de réfugié en vertu du paragraphe 108(4) de la LIPR.

C.  Réflexions concernant de potentielles questions à certifier

[37]  Le défendeur soulève la question grave de portée générale à certifier qui suit :

Est-ce que le décideur doit expressément tirer une conclusion selon laquelle une personne a souffert d’une persécution passée pour que l’exception relative aux raisons impérieuses prévue au paragraphe 108(4) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés soit prise en considération?

[38]  Le défendeur fait référence aux réponses contradictoires à cette question dans la jurisprudence de la Cour fédérale et affirme qu’il serait profitable que l’interprétation du paragraphe 108(4) de la LIPR soit plus claire.

[39]  La demanderesse prétend que la question formulée par le défendeur a été résolue par la Cour d’appel fédérale dans Obstoj, précité, et la Cour est d’accord avec cette affirmation : [traduction]

[19]  Il ne fait aucun doute que ce faisant, le Parlement a outrepassé les exigences de la Convention. Le paragraphe 5 de la section C de l’article premier de ce document, qui a il est clair inspiré le paragraphe 2(3) de notre Loi, s’applique, selon son libellé, uniquement aux réfugiés « statutaires », c’est-à-dire aux personnes qui ont été reconnues comme réfugiés avant la date de la Convention. Quelle que soit l’interprétation du paragraphe 2(3), elle doit s’étendre à quiconque a été reconnu comme réfugié à un moment donné, même bien après la date de la Convention. Il n’est donc guère surprenant que ce paragraphe doive être interprété comme exigeant des autorités canadiennes qu’elles accordent la reconnaissance du statut de réfugié pour des raisons d’ordre humanitaire à cette catégorie spéciale et limitée de personnes, c’est-à-dire ceux qui ont souffert d’une persécution tellement épouvantable que leur seule expérience constitue une raison impérieuse pour ne pas les renvoyer, lors même qu’ils n’auraient plus aucune raison de craindre une nouvelle persécution. [Non souligné dans l’original.]

[20]  Les circonstances exceptionnelles envisagées par le paragraphe 2(3) doivent certes s’appliquer uniquement à une petite minorité de demandeurs actuels. Je ne vois aucune raison de principe, et l’avocat n’en a pu proposer aucune, pour laquelle le succès ou l’échec des demandes de ces personnes devrait dépendre seulement du fait purement fortuit de savoir si elles ont obtenu la reconnaissance du statut de réfugié avant ou après le changement de la situation dans leur pays d’origine. En fait, une interprétation qui produisait un tel résultat me semblerait à la fois répugnante et absurde. Elle rendrait également, ainsi qu’il a été noté, l’alinéa 69.1(5)b) tout à fait incompréhensible.

[40]  Le défendeur réplique que l’arrêt Obstoj ne porte pas sur la question soulevée, puisque la Cour d’appel fédérale cherchait alors à clarifier la question de savoir si l’exception relative aux raisons impérieuses, comme elle existait à ce moment, ne s’appliquait qu’aux demandeurs d’asile à qui la Section du statut de réfugié avait déjà accordé le statut de réfugiés au sens de la Convention. [traduction]

[14]  Il s’ensuit, à mon avis, que puisque la Section du statut de réfugié, quand elle tient une audience sur une demande de statut de réfugié, peut entendre des témoignages et examiner les questions soulevées par le paragraphe 2(3), le tribunal chargé de statuer sur le minimum de fondement d’une demande, lorsqu’il doit décider s’il existe des éléments de preuve crédibles et fiables qui pourraient permettre à la Section du statut de réfugié de pencher en faveur du demandeur, a les mêmes pouvoirs.

(Obstoj, précité.)

[41]  Le défendeur s’appuie sur Cabdi, précité, qui présente le débat comme se résumant à la question de savoir de quelle manière le décideur doit arriver à la conclusion de persécution passée :

[33]  Selon la jurisprudence, il faut qu’il soit explicitement confirmé que le demandeur d’asile a eu antérieurement droit au statut de réfugié pour que cela commande l’application de l’exception des raisons impérieuses prévue au paragraphe 108(4) (par exemple, JNJ c. Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2010 CF 1088, 194 ACWS (3d) 1225, au paragraphe 41). Il n’y a aucune confirmation explicite en l’espèce. Cependant, il ressort également de la jurisprudence que la conclusion peut se dégager des répercussions qui découlent du raisonnement énoncé dans la décision (Decka c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 822, aux paragraphes 11 à 15, 140 ACWS (3d) 354; Alharazim, au paragraphe 36; Kumarasamy, au paragraphe 10). [Non souligné dans l’original.]

[42]  La Cour précise que le jugement Obstoj de la Cour d’appel fédérale, dans son intégralité, doit être lu, reconnu, accepté et compris pour sa clarté dans son application dans l’affaire qui nous occupe.

[43]  La Cour estime que le jugement Obstoj de la Cour d’appel fédérale a déjà résolu la question dans les cas les plus exceptionnels, lesquels représentent, selon ce jugement, les raisons les plus exceptionnelles de ceux dont l’existence est telle qu’ils ne peuvent envisager de vivre à nouveau dans un pays où ils ont perdu leur famille, leur histoire et leur passé, et ce en raison de leur état psychologique exceptionnellement fragilisé. En l’espèce, la famille est demeurée dans un camp de réfugiés durant vingt ans plutôt que de retourner au lieu d’origine des événements.

VIII.  Conclusion

[44]  La demande de contrôle judiciaire est accueillie.


JUGEMENT DANS LE DOSSIER IMM-3198-16

LA COUR accueille la présente demande de contrôle judiciaire. L’affaire doit être examinée de nouveau par un décideur différent. Il n’y a aucune question grave de portée générale à certifier compte tenu de la jurisprudence déjà établie directement par la Cour d’appel fédérale sur le sujet.

« Michel M.J. Shore »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-3198-16

 

INTITULÉ :

MÉDIATRICE UMWIZERWA c. LE MINISTRE DE L’IMMIGRATION, DES RÉFUGIÉS ET DE LA CITOYENNETÉ

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 19 avril 2017

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE SHORE

 

DATE DES MOTIFS :

Le 9 juin 2017

 

COMPARUTIONS :

Mitchell Goldberg

 

Pour la demanderesse

 

Pavol Janura

 

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Mitchell Goldberg, avocat

Montréal (Québec)

 

Pour la demanderesse

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)

 

Pour le défendeur

 

 

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