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Date : 20170615


Dossier : T-2214-16

Référence : 2017 CF 586

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 15 juin 2017

En présence de monsieur le juge Fothergill

ENTRE :

LE CAPITAINE DE FRÉGATE HENRICK OUELLET

demandeur

et

CANADA (PROCUREUR GÉNÉRAL)

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.                   Aperçu

[1]               C’est la deuxième fois que le capitaine de frégate Henrick Ouellet demande le contrôle judiciaire d’une décision du comité d’appel de l’admissibilité [le comité d’appel] du Tribunal des anciens combattants [le Tribunal] aux termes de la Loi sur le Tribunal des anciens combattants (révision et appel), L.C. 1995, ch. 18 [la Loi sur le TACRA]. Le comité d’appel a conclu à deux reprises que le capitaine de frégate Ouellet n’est pas admissible à une indemnité d’invalidité sous le régime de l’article 45 de la Loi sur les mesures de réinsertion et d’indemnisation des militaires et vétérans des Forces canadiennes, L.C. 2005, ch. 21 [la Loi d’indemnisation].

[2]               La demande de contrôle judiciaire de la première décision du comité d’appel soumise par le capitaine de frégate Ouellet a été accordée par la juge Cecily Strickland le 31 mai 2016 (Ouellet c. Canada (Procureur général), 2016 CF 608 [Ouellet]). La juge Strickland a annulé la décision du comité d’appel et a renvoyé l’affaire à un  comité d’appel composé différemment pour un nouvel examen « en tenant compte des motifs de la présente décision ».

[3]               Le comité d’appel a rendu une deuxième décision le 14 septembre 2016 et conclu une fois de plus que le capitaine de frégate Ouellet n’était pas admissible à une indemnité d’invalidité sous le régime de l’article 45 de la Loi d’indemnisation. La capitaine de frégate Ouellet demande maintenant le contrôle judiciaire de cette décision, au motif que le comité d’appel s’est détaché de manière déraisonnable des constatations de faits et des conclusions de la juge Strickland dans Ouellet.

[4]               Dans Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Yansane, 2017 CAF 48, au paragraphe 25 [Yansane], la Cour fédérale a soutenu qu’un juge qui renvoie une question à un décideur administratif pour réexamen « conformément aux présents motifs » ne donne pas d’instructions au sens de l’alinéa 18.1(3)b) de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C (1985), ch. F-7. Ce type d’instruction générale ne lie pas le décideur administratif, à moins que cela soit explicitement indiqué dans le texte du jugement.

[5]               À la lumière des orientations fournies par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Yansane, la demande de contrôle judiciaire doit être rejetée.

II.                Contexte

[6]               Le contexte factuel de cette affaire a été résumé globalement par la juge Strickland dans Ouellet aux paragraphes 2 à 10.

[7]               En bref, le capitaine de frégate Ouellet était en bonne santé lorsqu’il s’est joint aux Forces armées canadiennes en 1988. En 2003, il a commencé à se plaindre d’essoufflement. Des radiographies ont montré une importante réaction pulmonaire interstitielle, fort probablement sarcoïdosique. Les résultats d’un tomodensitogramme ont été décrits comme correspondant à une sarcoïdose avancée. Des rapports médicaux ultérieurs sont parvenus à la même conclusion. Un rapport daté du 15 octobre 2009 comporte un diagnostic de sarcoïdose de stade 4.

[8]               L’élément déclencheur de cette sarcoïdose n’a pas été clairement établi. Le capitaine de frégate Ouellet affirme avoir été exposé à des particules en suspension dans l’air (p. ex. silice cristalline) pendant les périodes de travaux sur le NCSM Halifax alors qu’il était en service sur ce navire. Il est convaincu que sa maladie a été aggravée par une affectation subséquente à bord du NCSM Ville de Québec, de 2002 à 2005, pendant laquelle ce navire a fait l’objet de périodes de radoub semblables.

[9]               En accueillant la première demande de contrôle judiciaire du capitaine de frégate Ouellet, la juge Strickland a émis les commentaires suivants (Ouellet, aux paragraphes 52-56) :

Compte tenu des éléments de preuve factuels du demandeur, qui n’étaient pas contredits et que le comité d’appel a acceptés et jugés crédibles, les circonstances de l’affaire et tous les éléments de preuve présentés – en particulier les conclusions des études ci-dessus qui ont confirmé un risque accru de sarcoïdose dans certaines circonstances, notamment celles auxquelles le demandeur a été exposé – le comité d’appel aurait dû examiner si cela lui permettait de tirer une inférence raisonnable selon laquelle l’état du demandeur résultait de son service militaire. En outre, le comité d’appel aurait dû tenir compte de tous ces éléments de preuve en rendant sa conclusion. À la place, il a tout simplement rejeté l’appel au motif que, parce que la cause de la sarcoïdose n’était pas connue, les renseignements contenus dans les articles étaient spéculatifs. À mon avis, il incombait au comité d’appel d’adopter une vue globale des éléments de preuve dans le contexte de l’article 39 [de la loi sur le TACRA] et il a omis de le faire, rendant par conséquent sa décision déraisonnable.

[53] Le traitement accordé à la lettre du Dr Smith est vicié de la même façon. Le comité d’appel a trouvé que les conclusions du Dr Smith étaient subjectives et insuffisantes pour influer sur la prépondérance des probabilités nécessaire pour faire un lien entre l’état allégué et le service militaire du demandeur. Il a ensuite cité la déclaration suivante du Dr Smith : [traduction] « [m]alheureusement, parce que l’on ne connaît pas la cause de la sarcoïdose, il est difficile de dire dans quelle mesure elle est reliée à son service ».

[54] Le défendeur soutient qu’il était loisible pour le comité d’appel de ne pas interpréter cela comme confirmant que l’état du demandeur était, dans une certaine mesure, relié à son service. Il pouvait au contraire l’interpréter, comme il l’a fait, comme insuffisant pour influer sur la prépondérance des probabilités nécessaire pour établir un lien entre l’état allégué et le service militaire du demandeur. Cependant, à mon avis, un tel raisonnement ne semble pas correspondre à l’approche exigée par l’article 39. Plus particulièrement, comme le soutient également le défendeur, les éléments de preuve étaient insuffisants pour établir tout lien entre l’état du demandeur et son service militaire.

[55] La lettre du Dr Smith est franche et décrit raisonnablement les études qu’il a fournies. Il conclut que les recherches laissent effectivement entendre que des facteurs environnementaux ou professionnels peuvent accroître le risque de développer une sarcoïdose, y compris certains milieux navals. Ni ses éléments de preuve ni les études ne sont contredits, et le comité d’appel ne juge pas non plus qu’ils manquent de crédibilité. Il n’existe pas non plus d’autres éléments de preuve d’une autre cause pour l’état du demandeur.

[56] Une interprétation libérale et généreuse des éléments de preuve exigeait que le comité d’appel prenne en considération l’intégralité des circonstances (Canada (Procureur général) c. Frye, 2005 CAF 264, au paragraphe 33), le but étant de déterminer si l’état du demandeur présentait un lien de causalité suffisant avec son service militaire pour établir son admissibilité aux prestations d’invalidité. Comme l’a souligné la Cour d’appel fédérale dans la décision Cole [Cole c. Canada (Procureur général), 2015 CAF 119], une sorte de lien autre que direct ou immédiat suffirait (Cole, aux paragraphes 72 et 74). À la place, le comité d’appel a rejeté les éléments de preuve dans leur totalité comme étant spéculatifs pour le motif que la cause de la sarcoïdose n’est pas connue, et sans autre analyse.

[Souligné dans l’original.]

[10]           Le jugement de la juge Strickland dans l’affaire Ouellet se lit comme suit :

1. La présente demande de contrôle judiciaire est accueillie.

2. La décision du comité d’appel est annulée et l’affaire est renvoyée pour nouvel examen par un comité d’appel différent qui tiendra compte des motifs de la présente décision.

3. Le demandeur a droit à ses dépens.

III.             Décision faisant l’objet du contrôle

[11]           À la suite de la décision de la Cour dans l’affaire Ouellet, le comité d’appel a procédé à un nouvel examen de l’appel du capitaine de frégate Ouellet de la façon suivante :

Pour déterminer si le demandeur s’est acquitté du fardeau, le comité commence son analyse à la case départ. Il s’agit d’une nouvelle audience. Le comité n’est pas lié et ne s’est fié à aucune conclusion du ministère ou d’autres comités de ce Tribunal. Le comité ne tient pas compte des preuves qui ont été soumises antérieurement à tous les niveaux de décision ni au témoignage du demandeur, tel d’indiqué dans l’examen de la décision, lors de l’audience de révision.

[12]           Le comité d’appel a souligné que trois conditions doivent être respectées avant qu’une adjudication puisse être ordonnée sous le régime de l’article 45 de la Loi d’indemnisation : (a) il existe « un diagnostic valide, actuel, de l’état allégué »; (b) « l’état allégué constitue une invalidité permanente »; et (c) « le service militaire a causé l’état allégué, l’a aggravé ou y a contribué ».

[13]           Le comité d’appel estime que les deux premières conditions ont été respectées. L’appel portait désormais sur la question à savoir si le service militaire a causé l’état du capitaine de frégate Ouellet, l’a aggravé ou y a contribué.

[14]           Le comité d’appel a cherché à déterminer si le capitaine de frégate Ouellet pourrait tirer des avantages de l’article 50(g) du Règlement sur les mesures de réinsertion et d’indemnisation des militaires et vétérans des Forces canadiennes, DORS/2006-50 [le « Règlement »], qui prévoit qu’un vétéran est présumé démontrer, en l’absence de preuve contraire, qu’il souffre d’une invalidité causée soit par une blessure liée au service, soit par une blessure non liée au service dont l’aggravation est due au service, s’il est établi que la blessure, ou son aggravation, est survenue au cours « de l’exercice, par le militaire ou le vétéran, de fonctions qui l’ont exposé à des risques liés à l’environnement qui auraient raisonnablement pu causer la blessure ou la maladie, ou leur aggravation ».

[15]           Le comité d’appel a reconnu que le capitaine de frégate Ouellet a été exposé à la silice à bord de navires, mais a conclu qu’il n’avait pas réussi à établir qu’il avait été exposé à des « concentrations importantes ou potentiellement préjudiciables de silice ». Le comité d’appel a également déterminé que le capitaine de frégate Ouellet n’avait pas fourni d’éléments de preuve suffisants pour démontrer une relation de cause à effet entre son exposition à la silice et l’apparition de sa sarcoïdose : [traduction] « Bien qu’on ait fourni un certain nombre d’études portant sur la corrélation entre l’exposition alléguée à la silice et l’apparition de la sarcoïdose, aucune étude établissant l’exposition à la silice comme une cause de la sarcoïdose n’a été soumise au comité. » Le comité d’appel a donc conclu que le capitaine de frégate Ouellet ne pouvait bénéficier de la présomption énoncée à l’article 50(g) du Règlement.

[16]           Le comité d’appel a également cherché à déterminer si les preuves médicales soutenaient une conclusion « établissant une relation de cause importante entre la sarcoïdose et son service au sein de la Force régulière », établissant ce qui suit :

La prépondérance des éléments de preuve ne soutient pas avec crédibilité la conclusion selon laquelle le service militaire a été un facteur de causalité important dans l’apparition de la sarcoïdose. Par conséquent, le comité d’appel conclut que le demandeur ne s’est pas acquitté du fardeau de démontrer que son service militaire a causé sa sarcoïdose, l’a aggravé ou y a contribué.

IV.             Question en litige

[17]           Le capitaine de frégate Ouellet ne conteste pas que la deuxième décision du comité d’appel était raisonnable sur le fond. Il affirme seulement que le comité d’appel ne s’est pas conformé à la décision de la Cour dans l’affaire Ouellet.

V.                Analyse

[18]           Les décisions du comité d’appel en vertu de la Loi d’indemnisation portent sur des questions de fait et de droit et sont susceptibles de révision par notre Cour, selon la norme de la décision raisonnable (Ouellet, au paragraphe 24). Après une demande de contrôle judiciaire fructueuse, le comité d’appel est lié selon les principes du stare decisis et doit appliquer la loi selon la détermination de la Cour. Toutefois, lorsque l’affaire soumise pour nouvel examen porte sur des questions de fait et de droit, la décision du comité d’appel est une fois de plus susceptible de révision selon la norme de décision raisonnable (ABB Inc c. Hyundai Heavy Industries Co, Ltd, 2015 CAF 157, au paragraphe 27). La Cour interviendra uniquement si la décision n’appartient pas aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit (Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, au paragraphe 47).

[19]           La capitaine de frégate Ouellet fait valoir qu’il n’était pas loisible pour le comité d’appel de rejeter sa demande au motif que la cause de sa sarcoïdose est inconnue, à la lumière de la conclusion de la juge Strickland aux paragraphes 51 et 52 de Ouellet, selon laquelle la littérature médicale démontre « un risque accru de sarcoïdose lorsque les personnes sont exposées à certains facteurs environnementaux, notamment les particules provenant de l’enlèvement des revêtements antidérapants » et « un risque accru de sarcoïdose dans certaines circonstances, notamment celles auxquelles le demandeur a été exposé ».

[20]           Le capitaine de frégate Ouellet fait valoir qu’un grand nombre des conclusions du comité d’appel ne concordent pas avec les motifs de la juge Strickland dans Ouellet, dont les suivantes : (a) aucune étude soumise au comité d’appel n’établit que l’exposition à la silice cause la sarcoïdose; (b) aucun élément de preuve déposé devant le comité d’appel ne démontre une augmentation des cas de sarcoïdose chez les membres ou le personnel des Forces navales; (c) la preuve médicale a mené à des conclusions contradictoires; (d) une étude a démontré un risque de sarcoïdose moins élevé chez les membres ou le personnel des Forces navales par rapport à la population générale, ce qui signifie qu’il n’existe aucun lien entre l’état du capitaine de frégate Ouellet et son service militaire; (e) aucun élément de preuve ne démontre que le capitaine de frégate Ouellet a été exposé à des « niveaux dangereux » de silice; (f) aucun élément de preuve ne démontre que de l’équipement de protection était nécessaire pour effectuer le sablage au jet de ponts de navires produisant de la silice; et (g) pour que sa demande soit accueillie, il faudrait que le capitaine de frégate Ouellet démontre que l’inhalation de silice en suspension sans équipement de production pourrait être dangereuse et que la sarcoïdose pourrait résulter de l’inhalation de silice en suspension.

[21]           Le capitaine de frégate Ouellet a également affirmé que le comité d’appel ne pouvait conclure que son état n’était pas causé ni aggravé par son service militaire, à la lumière des conclusions de la juge Strickland dans Ouellet, au paragraphe 55, selon lesquelles « [la] lettre du Dr Smith est franche et décrit raisonnablement les études qu’il a fournies » et « [n]i ses éléments de preuve ni les études ne sont contredits, et le comité d’appel ne juge pas non plus qu’ils manquent de crédibilité. Il n’existe pas non plus d’autres éléments de preuve d’une autre cause pour l’état du demandeur ».

[22]           L’avocat du capitaine de frégate Ouellet a renvoyé la Cour à une récente décision de la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Yansane. Toutefois, cette décision ne semble pas soutenir la position de son client.

[23]           Dans l’arrêt Yansane, le juge Yves de Montigny a expliqué au paragraphe 15 qu’en général, le but du contrôle judiciaire n’est pas de substituer la décision de la Cour à celle du décideur administratif; le rôle de la Cour se limite à confirmer la légalité ou le caractère raisonnable de la décision rendue et à renvoyer l’affaire pour un réexamen si la décision semble incorrecte ou n’appartient pas aux issues possibles acceptables.

[24]           Dans des circonstances exceptionnelles, la Cour peut annuler une décision et renvoyer la question pour un réexamen, conformément aux instructions qu’elle estime appropriées (Loi sur les Cours fédérales, alinéa 18.1(3)b)). Ces instructions varient selon les circonstances et peuvent comprendre, par exemple, (a) fixer une date limite de réexamen; (b) limiter le réexamen à une question particulière et exiger que le décideur prenne certains éléments de preuve en considération; (c) exclure un élément de preuve; ou (d) prévenir un résultat précis Yansane au paragraphe 16).

[25]           Bien que la Cour puisse ordonner un verdict particulier, cette autorité n’est exercée que dans les cas les plus clairs, par exemple, lorsque l’interprétation appropriée de la loi ne permet qu’une seule issue (Yansane au paragraphe 17, citant Wihksne c. Canada (Procureur général), 2002 CAF 356). Souvent, comme en l’espèce, la Cour exige simplement que le réexamen soit effectué conformément à ses motifs.

[26]           La prudence est de mise pour toute directive ou instructions émise par une cour au moment d’autoriser une demande de contrôle judiciaire (Yansane, aux paragraphes 18 et 19) : [traduction]

[18] […] Nous ne devons jamais perdre de vue le fait que ces directives ou instructions s’écartent de la logique du contrôle judiciaire et que leur utilisation abusive ou injustifiée serait contraire à la volonté du législateur d’assigner aux organisations administratives spécialisées la responsabilité de trancher les questions qui, souvent, nécessitent une expertise faisant défaut aux comités de common law. Cela s’applique plus particulièrement à l’éligibilité et à l’appréciation de la preuve, qui sont au cœur du mandat des décideurs administratifs.

[19] Selon cette logique, j’estime qu’il est essentiel d’interpréter la possibilité d’émettre des directives ou des instructions de manière restrictive, afin que seules celles explicitement énoncées dans le jugement puissent lier le décideur administratif responsable du réexamen d’une affaire. Il doit en être ainsi, non seulement pour que la décision du législateur de ne pas accueillir l’appel soit respectée, mais également afin que la loi soit prévisible et guide adéquatement les personnes chargées du réexamen d’une question lorsque la première décision a été annulée. Par conséquent, j’estime que seules les instructions explicitement énoncées dans le jugement lient le décideur subséquent; autrement, les commentaires et les recommandations formulés par la Cour dans ses motifs seraient considérés comme de simples remarques incidentes, et le décideur serait avisé de les prendre en compte, mais non tenu de les respecter.

[27]           Comme la juge Mary Gleason a fait valoir dans Burton c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2014 CF 910, au paragraphe 30, une demande de contrôle judiciaire fructueuse a généralement pour effet d’annuler la décision du tribunal administratif et de l’infirmer à toutes fins utiles :

[30] La Cour a souvent émis des commentaires sur les conséquences des jugements ayant pour effet d’annuler des décisions administratives et a confirmé que ces jugements avaient pour conséquence d’annuler la décision qui est infirmée à toutes fins utiles. Par exemple, dans Hernandez Rodriguez c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 1331, mon collègue, le juge Luc Martineau, a indiqué au paragraphe 4 qu’une décision annulée ne peut soulever les principes du stare decisis ou de la chose jugée, puisqu’elle est annulée à toutes fins pratiques. De même, dans Zacarias c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 1155, [2012] ACF no 1252, j’ai noté, au paragraphe 3, que, dans le contexte du réexamen d’une demande de statut de réfugié, il était loisible à la SPR de tirer des conclusions différentes du premier membre sur la question de la crédibilité puisque la première décision a été annulée à toutes fins pratiques lorsqu’elle a été infirmée par une ordonnance de la Cour. (Voir aussi, au même effet, Miah c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 2005, [2007] ACF no 1439, au paragraphe 8, et Lee c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, 2003 CFPI 743, [2003] ACF no 977, au paragraphe 11).

[28]           En l’espèce, le jugement de la juge Strickland dans l’affaire Ouellet indiquait simplement que la question devrait être réexaminée par le comité d’appel conformément à ses motifs. Son jugement ne comportait aucune instruction ou directive explicite. Par conséquent, son jugement a eu pour effet d’annuler la décision du comité d’appel et de l’infirmer à toutes fins pratiques. Le comité d’appel subséquent était libre de tirer ses propres conclusions sur la base d’un nouvel examen de la preuve et des arguments présentés.

[29]           Le capitaine de frégate Ouellet ne conteste la deuxième décision du comité d’appel pour aucun autre motif que sa non-conformité alléguée avec le jugement rendu par la juge Strickland dans l’affaire Ouellet. Pour les motifs qui précèdent, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

VI.             Conclusion

[30]           La demande de contrôle judiciaire est rejetée. Le Procureur général n’a pas demandé de dépens et aucuns dépens ne sont accordés.


JUGEMENT

LA COUR rejette la demande de contrôle judiciaire, sans aucune adjudication des dépens.

« Simon Fothergill »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-2214-16

 

INTITULÉ :

CAPITAINE DE FRÉGATE HENRICK OUELLET c. CANADA (PROCUREUR GÉNÉRAL)

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Ottawa (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 29 mai 2017

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE FOTHERGILL

 

DATE DES MOTIFS :

Le 15 juin 2017

 

COMPARUTIONS :

Michel Drapeau

Joshua M. Juneau

Pour le demandeur

 

Zoe Oxaal

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Cabinet juridique Michel Drapeau

Avocats

Ottawa (Ontario)

 

Pour le demandeur

 

William F. Pentney, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

 

Pour le défendeur

 

 

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