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Date : 20170606


Dossier : T-1639-15

Référence : 2017 CF 554

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 6 juin 2017

En présence de madame la juge Elliott

ENTRE :

SYNDICAT CANADIEN DE LA FONCTION PUBLIQUE, COMPOSANTE D’AIR CANADA

demandeur

et

AIR CANADA

défenderesse

JUGEMENT ET MOTIFS

I.                   Aperçu et faits

[1]               La question en litige dans le présent contrôle judiciaire est de savoir si la présence de produits chimiques dans l’air par suite de la pyrolyse de l’huile moteur et du fluide hydraulique, en quantités non mesurées avec précision mais suffisantes pour produire une odeur distincte de « vieilles chaussettes », constituait un « danger » selon la définition donnée au paragraphe 122(1) du Code canadien du travail, LRC 1985, c L-2, dans la version publiée entre le 1er janvier 2010 et le 13 décembre 2012 (le Code).

[2]               Dans une décision datée du 27 août 2015, un agent des appels du Tribunal de santé et sécurité au travail Canada (le Tribunal) a rejeté les appels interjetés en vertu du paragraphe 129(7) du Code à l’encontre des décisions d’absence de danger rendues par deux agentes de santé et de sécurité (agentes de SST) : Diaz Delgado et al. c. Air Canada, 2015 TSSTC 15 [la décision]. Par suite de la décision, le refus de travailler de trois employés de l’unité de négociation des agents de bord (les employés) exercé en vertu de l’article 129 du Code n’a pas été accepté. L’agent de négociation des employés, le Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP), composante d’Air Canada, demande maintenant le contrôle judiciaire de la décision.

[3]               Au cours de la même audience ayant mené à la décision, le Tribunal a entendu deux appels parallèles interjetés par Air Canada concernant trois séries d’instructions émises par une agente de SST conformément au paragraphe 145(1) du Code, lequel autorise un agent de SST à donner des instructions à un employeur lorsqu’il estime que l’employeur a contrevenu à une disposition du Code portant sur la santé et la sécurité. Alors que le Tribunal a annulé une des instructions, il a confirmé deux autres instructions données au motif que Air Canada avait omis d’avertir ses employés d’un « risque connu ou prévisible pour la santé » ou d’enquêter selon les modalités réglementaires dans les cas où ses employés « peuvent être exposés à des substances dangereuses » : Air Canada c. Syndicat canadien de la fonction publique, 2015 TSSTC 14 [la décision connexe].

[4]               Air Canada n’a pas demandé de contrôle judiciaire de la décision connexe, mais la question de savoir si la même situation peut raisonnablement représenter un « risque connu ou prévisible pour la santé », mais pas un « danger » constitue un point de litige important entre les parties.

[5]               Pour les motifs établis ci-dessous, la présente demande est accueillie. Le Tribunal a reconnu que les faits sous-jacents de la décision et de la décision connexe sont identiques. Les conclusions du Tribunal découlent d’une analyse critique qui est contradictoire pour l’une et l’autre décision. Ainsi, il n’est pas possible de savoir si le même résultat prévaudrait si l’analyse avait été cohérente dans les deux décisions. C’est pourquoi la décision doit être examinée de nouveau, afin de corriger l’incohérence ou de clarifier et d’expliquer les raisons d’un apparent conflit.

[6]               Les faits et les témoignages d’experts dont disposait le Tribunal sont énoncés en détails dans la décision et la décision connexe, toutes deux publiées et disponibles en ligne. Par conséquent, je ne les résumerai ici que brièvement et ferai référence à des passages précis de ces décisions tout au long des présents motifs, selon ce qu’exige le contexte.

A.       Le refus de travailler sur l’avion Fin 415

[7]               Les refus de travailler en litige en l’espèce ont été exercés sur deux avions, le Fin 415 et le Fin 214. Le 23 juin 2011, le Fin 415 était affecté au vol AC 239 qui devait aller d’Edmonton à Vancouver, puis au vol AC 1162 qui devait aller de Vancouver à Toronto. Francisco Diaz Delgado devait agir comme directeur de service sur les deux vols, avec un équipage de deux autres agents de bord. La décision porte sur les refus de travailler sur le Fin 415.

[8]               Durant les 15 premières minutes du vol AC 239, M. Diaz Delgado a remarqué une odeur qu’il a décrite à diverses reprises comme une odeur de « fromage bleu », de « vieilles chaussettes » et de « sac de sport malodorant ». L’odeur s’est dissipée après ces 15 minutes, mais est revenue lors de l’approche et de l’atterrissage de l’avion. Après avoir vérifié le carnet de bord cabine, M. Diaz Delgado a lu qu’on avait déjà constaté une odeur dans la cabine les 18 et 19 juin. À Vancouver, il a exercé sur le vol AC 1162 son droit de refuser de travailler prévu par la loi en vertu du Code, tout comme l’ont fait les deux autres agentes de bord. Il a maintenu son refus de travailler, malgré l’avis du capitaine du vol et de l’équipe de maintenance que l’odeur ne représentait aucun danger.

[9]               Air Canada a fait venir des membres d’équipage de remplacement, dont Meng Liang comme directeur de service et deux autres agentes de bord. Ils ont entendu M. Diaz Delgado expliquer à la directrice de l’équipage et aux membres du comité en milieu de travail les raisons de son refus de travailler. M. Liang était inquiet du fait que les mécaniciens de l’avion n’avaient pas été en mesure de trouver la source et la raison de l’odeur. Ainsi, l’équipage de remplacement a également refusé de travailler sur le vol AC 1162. Après que le capitaine du vol eut expliqué que l’odeur serait présente uniquement pendant une courte période au décollage et à l’atterrissage, trois des membres d’équipage ayant refusé de travailler ont alors accepté de travailler sur le vol AC 1162, mais M. Diaz Delgado et M. Liang ont maintenu leur refus.

[10]           Les refus ont été signalés à une agente de SST. L’agente de SST a pris note que l’odeur avait été présente sur les vols des 18, 19, 22 et 23 juin, et que la maintenance avait trouvé des traces de fluide sur le logement de train le 24 juin, et a conclu que la fuite était fort probablement du Skydrol LD4 (Skydrol). Le Skydrol n’est pas une marchandise dangereuse, mais à l’état de vapeur ou de brume, il peut avoir des effets nocifs sur la santé. L’agente de SST a souligné que les concentrations des produits chimiques pouvant être à l’origine de l’odeur n’avaient pas été mesurées et que les membres d’équipage s’étaient uniquement plaints de l’odeur et non de symptômes ou de maladies. L’agente de SST a conclu à une absence de danger en vertu du Code.

B.        Le refus de travailler sur l’avion Fin 214

[11]           Le 4 janvier 2012, le Fin 214 était affecté au vol AC 119 qui devait aller de Toronto à Calgary, puis au vol AC 215 qui devait aller de Calgary à Vancouver. Hadin Blaize devait travailler comme agente de bord sur les deux vols. Le Fin 214 devait également effectuer une troisième étape, le vol AC 100, mais il n’était pas prévu que Mme Blaize travaille sur ce vol. Pendant le refoulement de l’avion, Mme Blaize a remarqué une odeur qu’elle a décrite comme une « odeur de vomis/forte odeur de pieds/chaussures ». Alors que l’avion se préparait au décollage, le directeur de service du vol a informé Mme Blaize qu’une entrée avait été faite dans le carnet des défectuosités cabine indiquant qu’un groupe de conditionnement d’air inopérant ou qu’une possible fuite d’huile avait été détecté et que la maintenance avait été reportée. L’odeur s’est dissipée durant le décollage ou peu de temps après. Toutefois, Mme Blaize a constaté que l’air dans la moitié arrière de l’avion était sec, lui causant une légère nausée.

[12]           À l’arrivée à Calgary, Mme Blaize a découvert que le Fin 214 allait servir pour le vol suivant. Elle a alors exercé son droit de refuser de travailler. Il n’était pas prévu que les autres membres d’équipage du vol AC 119 travaillent sur le vol AC 215. À ce moment, les symptômes de Mme Blaize avaient disparu et elle n’a pas cherché à consulter un médecin à Calgary. Toutefois, à la demande d’Air Canada pour qu’elle consulte un médecin, Mme Blaize a vu son médecin de famille le lendemain.

[13]           L’équipage du vol AC 215 n’a ressenti aucun symptôme, même si le directeur de service et une agente de bord assise à l’avant ont indiqué avoir détecté une légère odeur de « vieilles chaussettes ». Toutefois, sur le vol AC 100, l’ensemble de l’équipage a remarqué une forte odeur déplaisante. Le copilote s’est senti très mal et a vomi à de nombreuses reprises, et l’ensemble de l’équipage a ressenti des maux de tête. Une des agentes de bord a eu la nausée et s’est sentie étourdie, et à la fin du vol, elle avait un goût de métal ou d’huile dans la bouche et n’a pas pu dormir cette nuit-là à son hôtel.

[14]           Selon le carnet de maintenance du Fin 214, on a décrit une odeur déplaisante sur l’avion durant le décollage et l’atterrissage le 28 décembre 2011 et les 1er, 3 et 4 janvier 2012. Sur un vol précédent le 4 janvier, un des membres d’équipage a remarqué une odeur durant le décollage, mais également une brume sèche à l’arrière de l’avion.

[15]           Une agente de SST a fait enquête relativement au refus de travailler, et a estimé que l’odeur en question était probablement causée par du Mobil Jet Oil II (Jet Oil). Même si le Jet Oil ne devait pas avoir d’effets néfastes sur la santé si on l’utilisait normalement, il pouvait se décomposer à des températures élevées et provoquer des vapeurs pouvant causer une irritation ou être nocives. L’agente de SST a estimé qu’un faible seuil de vapeurs n’était pas nécessairement nocif, et qu’une odeur ne signifiait pas qu’il y avait un danger pour la santé. Par conséquent, l’agente de SST a conclu à une absence de danger en vertu du Code.

C.        Éléments de preuve des appels devant le Tribunal

[16]           Un exposé conjoint des faits a servi de base à l’instruction des appels des employés. Des témoignages d’expert ont également été présentés par les deux parties, et un autre expert a fourni un témoignage à l’invitation du Tribunal. Les mêmes éléments de preuve ont été utilisés pour la décision et la décision connexe. Les témoignages d’expert sont brièvement résumés ici, et inclus avec plus de détails lorsqu’ils sont pertinents aux arguments des parties.

(1)               David Supplee

[17]           Le Tribunal a invité David Supplee, ancien chef mécanicien breveté d’Airbus pour la U.S. Airways, à témoigner. Il a témoigné à propos du fonctionnement des systèmes de ventilation des avions concernés, de même que des possibles sources de contamination de l’air. Personne n’a mis en doute son témoignage. M. Supplee a expliqué que l’air extérieur entre dans les moteurs, où il est comprimé par des ventilateurs et atteint des températures élevées. Il est ensuite expulsé de chaque moteur par deux vannes et circule à travers des conduits de ventilation jusqu’à un système de « refroidissement préalable », puis dans les deux groupes de conditionnement d’air de l’avion, lesquels refroidissent l’air de prélèvement chaud.

[18]           En se fondant sur le témoignage de M. Supplee, le Tribunal a conclu que la source probable de contamination causant l’odeur était de l’huile qui avait filtré par des joints non étanches, ou encore par un compresseur dans les groupes de conditionnement d’air, jusque dans le moteur ou le groupe auxiliaire de bord (APU), une espèce de moteur miniature utilisé pour démarrer les moteurs d’avion. Comme l’« air soufflé » des moteurs est assez chaud, il aurait causé la vaporisation ou la pyrolyse de l’huile, puis se serait mélangé à l’air remis en circulation et aurait contaminé l’air dans la cabine.

[19]           De plus, une fois les moteurs refroidis, une partie de l’huile vaporisée se serait condensée en laissant des résidus tout le long du système de ventilation. Il était donc très difficile de repérer la source de la contamination; c’est pourquoi l’équipage ne pouvait arrêter la contamination en fermant un groupe de conditionnement d’air ou une vanne de prélèvement d’air d’un des moteurs. L’air soufflé chaud entrant dans le système aurait de nouveau vaporisé les résidus d’huile, et contaminé la cabine. M. Supplee a également témoigné que la production de fumée n’était pas nécessairement un indicateur d’une importante fuite d’huile. Il a affirmé qu’il suffisait d’une très petite quantité d’huile – quelques gouttes – pour produire de la fumée. Il a indiqué qu’une augmentation de la consommation d’huile par un moteur est un indicateur de fuite d’huile. Dans des conditions de fonctionnement normal, un moteur d’avion utilisera une à deux pintes d’huile par jour, mais un palier qui fuit fera tripler ou quadrupler la consommation d’huile quotidienne.

[20]           En se fondant sur le témoignage non contesté de M. Supplee, le Tribunal a conclu que les fumées en cause dans la présente demande avaient été produites par la fuite et la pyrolyse d’huile ou de fluide hydraulique dans l’air soufflé, et que cette pyrolyse avait entraîné la présence dans l’air de la cabine d’une concentration inconnue de produits chimiques potentiellement nocifs.

[21]           Les parties ne contestent pas cette conclusion en contrôle judiciaire, mais ne s’entendent pas sur l’interprétation du reste du témoignage de l’expert et sur la question de savoir si elle aurait dû mener à une conclusion de présence d’un danger.

(2)               Dr Clifford P. Weisel

[22]           Le Dr Weisel, qui a témoigné pour les employés, est reconnu comme un expert en sciences de l’exposition. En plus de témoigner relativement à la source de la contamination de l’air, il a nommé plusieurs composés potentiellement dangereux qui pourraient être libérés par la pyrolyse du Jet Oil ou du fluide hydraulique. Certains de ces composés peuvent produire une odeur rance, alors que d’autres n’auront aucune odeur. D’après les problèmes de qualité de l’air qui ont été documentés, le Dr Weisel a émis l’opinion que de l’huile avait fuit dans l’air de prélèvement de l’avion, et que l’odeur était causée par un mélange de produits chimiques, notamment l’huile moteur et des produits inconnus issus de la pyrolyse de l’huile. Il a indiqué que des incidents de fuite d’huile se produisent à une fréquence moyenne de 1 % des cycles de vol.

[23]           Le Dr Weisel a également témoigné au sujet de la quantité d’huile qui serait nécessaire pour atteindre les valeurs limites d’exposition (VLE), c’est-à-dire les concentrations d’un produit chimique auxquelles un travailleur peut être exposé sans qu’elles aient d’effets nocifs pour sa santé. Plus précisément, il s’est dit d’avis qu’un gramme d’huile pyrolysée produirait suffisamment de formaldéhyde dans l’air de la cabine pour atteindre la valeur VLE-C, soit la valeur plafond d’un produit chimique à ne pas dépasser, peu importe le temps d’exposition. Étant donné les taux de consommation d’huile des moteurs des avions, le Dr Weisel croit qu’une fuite d’huile qui ne serait pas détectée par l’entretien courant suffirait pour que l’air de la cabine atteigne la valeur VLE-C du formaldéhyde.

[24]           Le Dr Weisel a conclu qu’étant donné qu’il était documenté que les avions en cause avaient eu des problèmes de qualité de l’air associés à une fuite d’huile dans l’air de prélèvement, on pouvait vraisemblablement s’attendre à ce que l’équipage de cabine affecté à un vol subséquent à bord du même avion, sans que l’avion ait reçu un entretien adéquat visant à détecter et à réparer la fuite d’huile, soient exposés à un mélange de substances chimiques dangereuses, tout comme les autres membres d’équipage et les passagers. Ces produits chimiques auraient été composés d’huile moteur et de produits de pyrolyse de l’huile inconnus.

(3)               Dr Robert Harrison

[25]           Le Dr Harrison a également témoigné pour les employés. Il est reconnu comme un expert en médecine du travail et en toxicologie, bien qu’Air Canada ait émis des réserves sur son expertise en toxicologie. Le Dr Harrison a consulté plus de 50 membres d’équipage de cabine exposés à une contamination de l’air de prélèvement sur une période de 15 ans, et a écrit un guide à l’intention des praticiens de la santé sur l’exposition aux contaminants dans l’air de prélèvement.

[26]           Le Dr Harrison a estimé qu’après une exposition à l’air de prélèvement et à d’autres contaminants, on pouvait ressentir des symptômes aigus, comme de la toux, un essoufflement, des nausées, des douleurs thoraciques, des maux de tête, des étourdissements et de la confusion. Ces symptômes indiquent des effets toxiques aux systèmes respiratoire et nerveux central. Les examens physiques peuvent révéler une respiration sifflante ou un grésillement dans les poumons, tandis que les examens urologiques peuvent dévoiler une dégradation de l’équilibre, de la démarche et de la coordination. Des symptômes persistants pourraient révéler une fonction pulmonaire anormale et des troubles de concentration ou de mémoire ou d’autres anomalies cognitives.

[27]           Selon le Dr Harrison, qui affirme avoir suivi la méthodologie acceptée dans le domaine de la médecine du travail, les employés avaient des raisons valables de croire qu’ils étaient exposés à des aérocontaminants toxiques susceptibles de causer des maladies, aigües et potentiellement chroniques. Même s’il a souligné que les odeurs peuvent être utiles pour détecter la présence d’un gaz ou d’une vapeur en particulier, la relation variable du seuil olfactif et de la concentration minimale qui réduirait les effets toxiques fait que l’odeur n’est pas un indicateur de toxicité fiable. Toutefois, il pense que la présence d’odeurs associée aux composés toxiques, ajoutée aux symptômes de maladie que peuvent causer ces composés, indiquait que l’huile pyrolysée sur ces avions avait eu des effets sur la santé, une fois les autres causes possibles des symptômes éliminés.

(4)               Dr Richard Carl Pleus

[28]           Le Dr Pleus était le seul expert amené par Air Canada, et il a été qualifié d’expert en toxicologie. Selon le témoignage du Dr Pleus, une odeur n’est pas un indicateur d’un danger, puisque de nombreux composés odorants ne sont pas nocifs, alors que bon nombre de composés nocifs sont inodores. Il croit également qu’il n’y a pas de relation binaire entre les produits chimiques toxiques et non toxiques. Il pense plutôt que « le poison, c’est la dose ». La question est de savoir si, connaissant la composition du Jet Oil et du Skydrol, des quantités suffisantes de sous-produits pyrolysés auraient pu pénétrer dans la cabine suffisamment longtemps pour avoir des effets nocifs sur la santé. Selon le témoignage du Dr Pleus, pour atteindre des concentrations suffisantes pour causer une maladie chronique, il faudrait qu’il y ait suffisamment de contaminants dans le système de circulation de l’air pour créer une brume sèche visible dans la cabine. Comme ce sont uniquement des odeurs qui ont été signalées sur le Fin 415, et que des odeurs peuvent apparaître à des concentrations chimiques bien inférieures aux concentrations nocives, le Dr Pleus ne croit pas que les éléments de preuve établissaient un niveau nocif de contaminants dans la cabine. En outre, le Dr Pleus est d’avis qu’étant donné la très grande quantité d’air introduite dans la cabine, il y a une dilution constante et toute exposition à un agent chimique est nécessairement de courte durée.

[29]           Le Dr Pleus a également tenté d’expliquer pourquoi les membres de l’équipage avaient ressenti certains symptômes après avoir été exposés à l’odeur. Une possible explication vient d’une réponse physiologique à une odeur nauséabonde : autrement dit, une odeur suffisamment néfaste peut amener quelqu’un à vomir ou à connaître d’autres symptômes, même si l’odeur n’est pas attribuable à un produit chimique nocif. L’autre explication qu’il a offerte vient d’un phénomène de maladie psychogène, où des renseignements erronés ou mal compris peuvent causer suffisamment d’anxiété chez un patient pour provoquer de réels symptômes. Cette explication a été rejetée par le Tribunal.

II.                Les décisions du Tribunal

A.       La décision

[30]           Le Tribunal a retenu ce qu’il a appelé une question générale à trancher : au moment de leur refus de travailler, les employés étaient-ils exposés à un danger, selon la définition du Code? Après avoir examiné les éléments de preuve, le Tribunal a conclu que tous les refus provenaient d’employés qui ont soit senti une odeur soit en ont été informés, odeur qui a été décrite comme une odeur de « vieilles chaussettes » ou de « sac de sport malodorant ». Le Tribunal a ensuite indiqué que la question particulière à trancher était celle de savoir si ladite odeur a servi à signaler à ces employés l’existence d’un danger qui justifiait leur refus de travailler.

[31]           Pour trancher ces questions, le Tribunal a tenu compte de la définition de « danger » donnée au paragraphe 122(1) du Code :

« danger » Situation, tâche ou risque - existant ou éventuel - susceptible de causer des blessures à une personne qui y est exposée, ou de la rendre malade - même si ses effets sur l’intégrité physique ou la santé ne sont pas immédiats -, avant que, selon le cas, le risque soit écarté, la situation corrigée ou la tâche modifiée. Est notamment visée toute exposition à une substance dangereuse susceptible d’avoir des effets à long terme sur la santé ou le système reproducteur.

“danger” means any existing or potential hazard or condition or any current or future activity that could reasonably be expected to cause injury or illness to a person exposed to it before the hazard or condition can be corrected, or the activity altered, whether or not the injury or illness occurs immediately after the exposure to the hazard, condition or activity, and includes any exposure to a hazardous substance that is likely to result in a chronic illness, in disease or in damage to the reproductive system

[32]           Le Tribunal a également fait référence aux paragraphes 122.1 et 122.2 qui établissent l’objet de la partie II du Code, laquelle porte sur les questions de santé et de sécurité au travail :

122.1  La présente partie a pour objet de prévenir les accidents et les maladies liés à l’occupation d’un emploi régi par ses dispositions.

122.2  La prévention devrait consister avant tout dans l’élimination des risques, puis dans leur réduction, et enfin dans la fourniture de matériel, d’équipement, de dispositifs ou de vêtements de protection, en vue d’assurer la santé et la sécurité des employés.

122.1  The purpose of this Part is to prevent accidents and injury to health arising out of, linked with or occurring in the course of employment to which this Part applies.

122.2  Preventive measures should consist first of the elimination of hazards, then the reduction of hazards and finally, the provision of personal protective equipment, clothing, devices or materials, all with the goal of ensuring the health and safety of employees.

[33]           L’audition devant le Tribunal s’est déroulée sur plusieurs jours, et les trois experts des parties, en plus de l’expert appelé par le Tribunal, ont tous offert des témoignages de vive voix, en plus de leurs rapports écrits initiaux et de réfutation. Dans l’ensemble, l’exposé conjoint des faits, les rapports d’expert et les éléments de preuve à l’appui provenant de documents internes, les rapports et les études présentés au Tribunal font de 1 700 à 2 000 pages. Les motifs donnés par le Tribunal sont longs et détaillés. Le Tribunal a examiné les faits et les circonstances des refus de travailler, a examiné et commenté les divers rapports d’expert, a indiqué les questions à trancher, a examiné les observations des parties, les dispositions pertinentes des lois et la jurisprudence, et a tiré des conclusions de fait de même que des conclusions sur les questions.

[34]           La première étape pour le Tribunal a été de décider s’il y avait « un risque ou une situation existant ou éventuel » et d’évaluer si ce risque ou cette situation était susceptible de causer des blessures ou de rendre malade. Tandis qu’Air Canada alléguait qu’une odeur ne pouvait représenter un danger, le Tribunal a estimé que le danger faisant l’objet de la plainte n’était pas l’odeur, mais le Jet Oil ou le fluide hydraulique pyrolysé ayant causé l’odeur. La question était de savoir si les produits chimiques issus de la pyrolyse étaient susceptibles de causer des blessures à une personne qui y est exposée, ou de la rendre malade.

[35]           Le Tribunal a conclu qu’il n’y avait pas suffisamment d’éléments de preuve pour établir qu’un tel danger existait. Ce faisant, il s’est appuyé largement sur l’assertion du Dr Pleus, selon laquelle « le poison, c’est la dose ». Même si les produits chimiques dégagés par la pyrolyse pourraient, à certaines concentrations, causer des symptômes similaires à ceux qu’ont ressentis quelques-uns des employés, certains de ces mêmes produits chimiques sont souvent présents durant des vols de routine sans compromettre la santé. Le Tribunal a estimé qu’il n’y avait pas de lien entre la concentration de produits chimiques nécessaire pour produire une odeur et celle nécessaire pour poser un risque pour la santé. Il a conclu que l’odeur, en soi, pouvait prouver la présence des produits chimiques, mais pas qu’ils étaient suffisamment concentrés pour satisfaire à la définition de danger prévue par la loi.

[36]           Sur cette question, les employés ont affirmé qu’on pouvait déduire de la toxicité des produits chimiques dans la cabine d’après les symptômes. Si vous savez qu’un produit chimique cause certains symptômes en concentration suffisante, et que quelqu’un ressent ces symptômes dans un environnement où le produit chimique est présent, il est raisonnable d’établir que le produit chimique est la cause des symptômes. Selon l’analyse du Dr Harrison, le Tribunal aurait pu conclure que le Jet Oil ou le fluide hydraulique pyrolysé avait rendu les employés malades, et que par conséquent, il était raisonnable que les employés s’attendent à ce que l’huile et le fluide hydraulique les rendent à nouveau malades s’ils ne refusaient pas de travailler.

[37]           Le Tribunal n’a pas retenu cet argument. Même si les symptômes sont peut-être apparus après que les employés eurent été exposés à l’odeur, le Tribunal n’a pas été convaincu que les symptômes avaient été causés par la contamination chimique dans l’air. Alors que le Dr Harrison a été incapable de préciser quelles étaient les concentrations nécessaires pour menacer la santé, le Dr Pleus a montré qu’à des concentrations suffisamment grandes pour créer un risque pour la santé des employés, il y aurait eu une brume visible dans la cabine. Le Tribunal a également estimé que les études de cas sur lesquelles le Dr Harrison s’appuyait pour donner son opinion médicale étaient peu utiles, car on ne connaissait pas les circonstances des expositions dans ces autres affaires.

[38]           Le Tribunal semble avoir préféré le témoignage du Dr Pleus à celui du Dr Harrison notamment en raison des concessions faites par le Dr Harrison en contre-interrogatoire. Le Dr Harrison a admis qu’on ne pouvait établir une relation de cause à effet entre la contamination de l’air et les symptômes sans prendre en considération les antécédents médicaux de chaque personne, la preuve d’une exposition, et les renseignements toxicologiques sur le produit chimique auquel la personne a été exposée. En l’espèce, toutefois, le Dr Harrison a préparé son avis uniquement en fonction des renseignements que lui avait fournis le SCFP. Il n’a ni obtenu ni examiné les antécédents médicaux et professionnels des employés en cause, il n’a pas tenu compte des causes potentielles des symptômes non liées au milieu de travail et il n’a pas examiné les employés. Le Dr Harrison a admis que pour préparer son avis médical, il n’avait pas suivi la méthodologie mise au point dans son guide pour les fournisseurs de soins de santé qui ont à évaluer les effets sur la santé après une exposition à un air de prélèvement vicié.

[39]           Le Dr Harrison a conclu que l’odeur ou les examens mécaniques de l’avion constituaient une preuve suffisante pour amener les employés à croire que des contaminants toxiques avaient été libérés et pouvaient menacer la santé. Le Tribunal a estimé qu’on ne pouvait conclure que les employés avaient ressenti des symptômes parce qu’ils ont été exposés à une odeur de vieilles chaussettes; c’est la contamination qui devrait être évaluée pour déterminer si elle représentait une menace pour la santé, pas l’odeur. Le Tribunal a également estimé que le seul expert qui avait abordé la question des niveaux d’exposition était le Dr Pleus.

[40]           Le Tribunal a conclu qu’on ne l’avait pas convaincu que les symptômes dont se sont plaints les agents de bord découlaient directement de leur exposition à l’air vicié. Le Tribunal a affirmé qu’ « [i]l se pourrait que l’exposition à l’air de prélèvement vicié cause des blessures ou une maladie », en faisant remarquer que cela dépendait de facteurs comme la durée de l’exposition et la concentration et la toxicité des contaminants. La preuve indiquait qu’il était peu probable que des contaminants restent très longtemps dans l’air cabine du fait de la vaporisation. Il faudrait que certains composés soient présents en très grande quantité pour menacer la santé, ce qui est peu probable à bord de ces avions, étant donné la quantité d’huile utilisée par le moteur et l’entretien régulier des avions.

[41]           Enfin, le Tribunal a conclu que dans tous les cas où des situations liées à des émanations avaient été signalées, le personnel de maintenance avait pris les mesures qui convenaient pour corriger la situation. Il était donc encore moins probable que des blessures ou une maladie aient pu survenir avant que le risque n’ait pu être écarté.

[42]           Le Tribunal a maintenu que les agents de bord n’ont pas été exposés à un danger et la décision rendue par l’agente de SST a été confirmée.

B.        La décision connexe

[43]           Alors que les appels des employés interjetés à l’encontre de la décision d’absence de danger rendue par l’agente de SST ont été rejetés, les appels interjetés par Air Canada dans la décision connexe ont connu un succès partagé. Les appels d’Air Canada concernaient deux conclusions d’existence de danger ayant mené à l’émission d’instructions, mais le Tribunal a indiqué qu’il n’examinerait pas les conclusions d’existence de danger; il examinerait plutôt le bien-fondé des instructions elles-mêmes, puisque la validité des instructions ne dépendait pas de l’existence ou non d’un danger.

[44]           Le Tribunal a annulé une des instructions, mais a confirmé les deux autres. La première instruction confirmée concernait l’obligation qu’avait Air Canada en vertu de l’alinéa 125.1s) du Code de « veiller à ce que soient portés à l’attention de chaque employé les risques connus ou prévisibles que présente pour sa santé et sa sécurité l’endroit où il travaille ». Alors que la fiche signalétique (FS) du Mobil Jet Oil le décrivait comme une « substance non dangereuse », le texte indiquait également que cela valait dans des conditions normales d’utilisation, ce qui selon le Tribunal n’englobait pas la fuite d’huile et la pyrolyse.

[45]           La même FS indiquait également qu’à des températures élevées, le produit pouvait se décomposer et libérer des gaz/vapeurs/émanations irritants ou dommageables, entraînant des symptômes pouvant comprendre des maux de tête, des nausées et une irritation des yeux, du nez et de la gorge. Le Tribunal a conclu que cette description tirée de la FS satisfaisait à l’exigence de « risques prévisibles pour la santé » une fois l’huile pyrolysée détectable par une odeur dans la cabine. Le Code obligeait Air Canada à porter à l’attention des employés concernés le risque créé par le Jet Oil pyrolysé et Air Canada a manqué à cette obligation, ce qui fait que l’instruction donnée par l’agente de SST était justifiée.

[46]           La deuxième instruction confirmée par le Tribunal concernait l’interaction de l’alinéa 125.1f) du Code et de l’article 5.4 du Règlement sur la santé et la sécurité au travail (aéronefs), DORS/2011-87 (RSSTA). L’alinéa 125.1f) oblige l’employeur à enquêter selon les modalités réglementaires « dans les cas où les employés peuvent être exposés à des substances dangereuses ». L’article 5.4 du RSSTA précise les modalités réglementaires de l’enquête, mais indique que l’obligation ne doit être respectée que si « la santé ou la sécurité d’un employé risque d’être compromise par l’exposition à une substance dangereuse ».

[47]           Le Tribunal a estimé qu’il s’agissait là de seuils différents, et un scénario pourrait servir à déclencher l’application de l’alinéa 125.1f) du Code sans déclencher nécessairement l’application de l’article 5.4 du RSSTA. Toutefois, le scénario doit satisfaire aux deux dispositions pour créer une obligation pour l’employeur d’enquêter. Par conséquent, l’instruction d’enquêter ne pouvait être confirmée que si « la santé ou la sécurité d’un employé risqu[ait] d’être compromise par l’exposition » au Jet Oil pyrolysé dans l’air de la cabine.

[48]           Pour tenter de faire annuler l’instruction, Air Canada s’est appuyée sur les mêmes arguments que ceux utilisés pour expliquer pourquoi il n’y avait pas de danger pour les employés : même s’il y avait une exposition à une substance dangereuse, la santé ou la sécurité d’un employé devait risquer d’être compromise. Le témoignage d’expert du Dr Pleus était que les odeurs pouvaient être détectées à des concentrations non toxiques et que la dose détectée ayant donné lieu à l’instruction ne serait pas suffisante pour compromettre la santé et la sécurité des employés. De plus, dans la plainte de l’employé ayant mené à l’instruction, aucun symptôme n’a été associé à l’exposition.

[49]           Le Tribunal a rejeté cette argumentation, estimant que les symptômes de maladie n’étaient pas nécessaires. On ne recherchait pas une certitude mais une possibilité de danger suffisamment forte pour satisfaire au niveau de « risque ». Eu égard à la preuve et au fait que la seule obligation qui s’appliquait était d’enquêter, le Tribunal a conclu qu’il y avait un risque suffisant pour la santé pour déclencher l’obligation d’enquêter et a confirmé l’instruction.

III.             Questions en litige et norme de contrôle

[50]           Le Tribunal était appelé à trancher la question suivante : l’odeur de vieilles chaussettes représentait-elle ou indiquait-elle un danger qui justifiait le refus de travailler exercé par les employés? Bien que les parties aient chacune formulé les questions d’une manière quelque peu différente, elles s’entendent pour dire que la question dont est saisie la Cour est de savoir si la décision du Tribunal était raisonnable.

A.       Éléments d’une révision de la décision de ce Tribunal en fonction de la norme de la décision raisonnable

[51]           Il est établi que la norme de contrôle qui s’applique à une décision rendue par un agent des appels est la norme de la décision raisonnable. Cette norme s’applique aux conclusions de fait, à l’interprétation de la définition de « danger » prévue à la partie II du Code, et à l’application de cette interprétation aux faits constatés. Lorsqu’elle effectue une révision en fonction de la norme de la décision raisonnable, la Cour doit accorder une grande déférence aux décisions du Tribunal : P&O Ports inc. c. Syndicat international des débardeurs et des magasiniers (Section Locale 500), 2008 CF 846, au paragraphe 16.

[52]           La Cour d’appel fédérale a conclu qu’il n’appartient pas à la Cour de révision d’apprécier les éléments de preuve présentés au Tribunal, ou de tirer des conclusions sur la question de savoir si la preuve permettait de conclure que l’on pouvait raisonnablement s’attendre à ce que les employés soient blessés. Ces tâches incombent à l’agent des appels. La Cour de révision doit décider si le Tribunal a examiné les éléments de preuve pertinents et appliqué les dispositions pertinentes du Code à ces éléments de preuve : Martin c. Canada (Procureur général), 2005 CAF 156, au paragraphe 42 [Martin]. Le SCFP allègue que le Tribunal a fait défaut de tenir compte des éléments de preuve pertinents et qu’il a également tiré des conclusions en l’absence d’éléments de preuve.

[53]           En ce qui concerne l’interprétation faite par le Tribunal de la définition de danger prévue au Code, il convient de souligner que dans l’arrêt Martin, la Cour d’appel a suivi la décision de la Cour suprême du Canada, qui a conclu que « les cours de justice doivent faire preuve de circonspection et de retenue dans l’examen des décisions de tribunaux administratifs spécialisés comme la Commission du travail et que cette retenue s’étend à la fois à la constatation des faits et à l’interprétation de la loi et que ce n’est que lorsque l’interprétation donnée aux dispositions législatives est manifestement déraisonnable que la Cour peut intervenir » : Martin, au paragraphe 13. Naturellement, depuis l’arrêt Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9 [Dunsmuir], la norme de la décision manifestement déraisonnable a fusionné avec celle de la raisonnabilité ou de la décision raisonnable.

[54]           La Cour d’appel a expliqué les paramètres des critères pour conclure à la présence d’un danger : il faut déterminer dans quelles circonstances le risque éventuel est raisonnablement susceptible de causer des blessures, et établir que ces circonstances se présenteront dans l’avenir, non comme simple possibilité, mais comme possibilité raisonnable; il faut déterminer les probabilités que le scénario avancé se produise plus tard et il n’est pas nécessaire d’établir à quel moment précis le risque surviendra, ni qu’il survient chaque fois : Société canadienne des postes c. Pollard, 2008 CAF 305 [Pollard], au paragraphe 16.

[55]           Plus récemment, la juge Gleason a formulé autrement ce critère alors qu’elle était membre de cette Cour : pour qu’un « danger » existe, les circonstances doivent être telles qu’il existe une possibilité réaliste que des blessures surviennent effectivement : Martin-Ivie c. Canada (Procureur général), 2013 CF 772, au paragraphe 49.

[56]           Il y a à la fois un aspect subjectif et un aspect objectif à la question de savoir s’il y a présence d’un danger qui justifie un refus de travailler. Dans Laroche c. Canada (Procureur général), 2013 CF 797 [Laroche], le juge Roy a écrit ce qui suit au paragraphe 60 :

L’agente d’appel était appelée à tenir compte de tous les éléments de preuve pertinents pour déterminer s’il y avait danger au sens de la loi. S’il n’y a pas danger, il ne saurait y avoir refus de travailler valide, au sens de l’article 128 du Code. La notion de danger est tributaire de la possibilité qu’un risque se matérialise. Pour qu’un danger puisse faire l’objet d’un refus de travail, la possibilité doit être raisonnable, ce qui implique une mesure d’objectivité. La seule crainte subjective ne satisfera pas un tel standard. [...]..

[57]           Pour évaluer la formulation du critère utilisée par le Tribunal et son application aux éléments de preuve, je dois examiner la décision dans son ensemble, dans le contexte du dossier sous-jacent, afin de décider si elle était raisonnable : Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c. Terre-Neuve-et-Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62, au paragraphe 16.

IV.             La décision était-elle raisonnable?

A.          Thèses des parties

(1)               Conclusions incohérentes dans la décision et la décision connexe

[58]           Le SCFP affirme que le Tribunal a interprété et appliqué de manière déraisonnable la définition de « danger » prévue au Code lorsqu’il a tiré deux conclusions incohérentes : (1) dans la décision connexe, la santé et la sécurité d’un employé peuvent être menacées par une exposition à l’air vicié de la cabine; (2) dans la décision, ces mêmes faits ont été insuffisants pour établir un risque raisonnable de maladie.

[59]           Le SCFP affirme que la décision est inintelligible, parce que les mêmes faits mènent à des conclusions d’un risque « susceptible de menacer la santé » et « d’absence de danger », et qu’aucun élément de preuve ou raisonnement ne permet de distinguer les deux décisions l’une de l’autre. Au contraire, le Tribunal a reconnu que les circonstances sont les mêmes pour chaque appel. Le SCFP affirme que si un risque pour la santé est prévisible, il est probable que l’employé sera en danger.

[60]           Air Canada s’oppose à l’argument du SCFP selon lequel être « menacé » est la même chose qu’être en « danger ». Le SCFP réplique qu’un risque n’est pas nécessairement un danger, mais qu’un risque en milieu de travail auquel on ne peut échapper avant qu’il ne soit écarté est un danger. Le SCFP avance que le Tribunal a tenté de « diviser le bébé en deux » et ce faisant, a tiré une conclusion irrationnelle.

[61]           Air Canada affirme que la décision connexe n’aborde pas la question de « danger ». Même si les agentes de SST ont conclu à la présence d’un danger dans la décision connexe, elles n’ont pas donné des instructions en vertu du paragraphe 145(2) du Code, mais plutôt en vertu du paragraphe 145(1), lequel exige seulement une contravention au Code, peu importe que la contravention respecte ou non la définition de « danger ». Air Canada allègue qu’il n’y a pas d’incohérence entre les deux décisions, parce que la décision connexe indique seulement qu’il y a eu contravention au Code, et non que l’air vicié constituait un danger.

[62]           Air Canada souligne également que la définition de danger prévue au Code exige qu’il y ait une possibilité de blessure ou de maladie et que la blessure ou la maladie soit susceptible de survenir avant que le risque soit écarté ou la situation corrigée. Objectivement, il doit exister une possibilité raisonnable de blessure et non une simple possibilité ou une évaluation spéculative et subjective faite par les employés. Pour appuyer ces arguments, Air Canada fait référence à l’arrêt Martin et à la décision Verville c. Canada (Service correctionnel), 2004 CF 767.

[63]           Le SCFP s’appuie sur les mêmes affaires pour dire que pour conclure à un risque raisonnable de danger, il n’est pas nécessaire [traduction] « que l’on puisse raisonnablement s’attendre à ce que chaque fois que la situation ou la tâche se produira elle causera une blessure ».

B.           Analyse

[64]           Le rôle du Tribunal est d’évaluer la probabilité qu’un risque allégué se concrétise. Ce faisant, il doit apprécier les éléments de preuve pour déterminer les probabilités que ce qu’affirme un employé se produise plus tard : Martin, au paragraphe 37. Pour conclure à la présence d’un danger, le Tribunal doit d’abord déterminer dans quelles circonstances le risque éventuel est raisonnablement susceptible de causer des blessures, et établir une possibilité raisonnable que ces circonstances se présentent dans l’avenir : Pollard, au paragraphe 16.

[65]           Dans la décision connexe, le Tribunal a conclu que même si pour déterminer s’il y a eu ou non violation de l’alinéa 125(1)s) du Code il n’est pas nécessaire d’établir une prémisse de « danger », lorsque le Mobil Jet Oil pyrolysé entre dans le circuit de conditionnement d’air, il satisfait à l’exigence de « risques prévisibles pour la santé ». L’instruction donnée par l’agente de SST a été confirmée parce qu’Air Canada a omis de mettre l’employé au courant du risque prévisible pour la santé.

[66]           En ce qui concerne la deuxième instruction, laquelle a été donnée en vertu de l’alinéa 125.1f) du Code et de l’article 5.4 du RSSTA, le Tribunal a confirmé que « [l]a conduite de l’enquête conformément à l’article 5.4 du RSSTA dépend du risque que la santé soit compromise, qui, dans les circonstances d’un refus de travailler, s’applique à la santé de l’employé ou des employés qui refusent de travailler ». Le paragraphe 5.4(1) fait référence à la possibilité que la santé d’un employé soit compromise :

Enquêtes sur les risques

5.4 (1) Si la santé ou la sécurité d’un employé risque d’être compromise par l’exposition à une substance dangereuse, l’employeur, sans tarder :

a) nomme une personne qualifiée pour faire enquête sur la situation;

Hazard Investigation

5.4 (1) If there is a likelihood that the health or safety of an employee is or may be endangered by exposure to a hazardous substance, the employer shall, without delay,

(a) appoint a qualified person to carry out an investigation in that regard;

[67]           Pour arriver à la conclusion qu’une enquête était nécessaire, le Tribunal n’a pas admis l’argument d’Air Canada selon lequel il n’y avait de possibilité que la santé des employés soit compromise. L’alinéa 125.1f) exige que dans les cas où « les employés peuvent être exposés » à des substances dangereuses en milieu de travail, l’employeur enquête sur cette exposition et évalue ces substances dangereuses. Le Tribunal a reconnu qu’aucune substance pouvant expliquer l’odeur n’avait été déterminée de manière définitive. Il a conclu que cette détermination définitive n’était pas requise en vertu de l’alinéa 125.1f) du Code en raison de l’utilisation du terme « peuvent ». Il a également conclu qu’il n’était pas spéculatif de ne pas connaître la nature exacte des contaminants, qu’une telle allégation créerait un argument circulaire et que si un tel raisonnement était accepté, il n’y aurait jamais d’enquêtes conformément au Code, puisque, de par leur nature, les enquêtes sont des enquêtes sur des questions qui sont inconnues.

[68]           Même si les contaminants exacts n’étaient pas connus, le Tribunal a conclu que les odeurs étaient habituellement le signe d’une contamination par l’huile du circuit de conditionnement d’air. Le Tribunal a conclu que cela suffisait à réunir les conditions d’application de l’obligation d’enquêter prévue dans le RSSTA, même si les scénarios satisfaisant au critère de l’alinéa 125.1f) du Code ne répondraient pas nécessairement tous aux exigences plus rigoureuses pour déclencher une enquête prévues dans le RSSTA. Le Tribunal a estimé qu’il y avait un risque que la santé des employés soit compromise.

[69]           Dans la décision, le Tribunal a conclu que le risque auquel les employés faisaient face était l’air de prélèvement vicié. La contamination a été causée par la fuite du Jet Oil, du fluide hydraulique et d’autres contaminants, comme des composés pyrolysés, entraînant la présence d’un mélange inconnu de produits chimiques. Dans les deux décisions, le Tribunal a fait une distinction entre l’odeur et le contaminant, puisque les contaminants ont causé l’odeur.

[70]           Pour conclure qu’il n’y avait pas présence de danger pour les employés, le Tribunal a tiré deux conclusions importantes dans la décision. Au paragraphe 180, le Tribunal explique qu’il existe un important lien de cause à effet :

[...] La définition de danger énoncée dans le Code établit une relation de cause à effet entre un risque, une situation ou une tâche dans le lieu de travail et l’effet qu’il peut avoir sur la santé et la sécurité des employés.

[Non souligné dans l’original.]

[71]           À la phrase suivante, le Tribunal établit la nature des éléments de preuve nécessaires pour prouver cette relation de cause à effet :

Il s’ensuit que, pour que j’en arrive à une conclusion de danger dans un cas de contamination de l’air, il doit y avoir une preuve médicale ou scientifique qui établisse une relation de cause à effet entre les conditions environnementales dans le lieu de travail et la possibilité qu’un employé soit blessé ou tombe malade; à défaut d’une telle preuve, cette conclusion est tout simplement conjecturale.

[Non souligné dans l’original.]

[72]           Un des problèmes avec cette conclusion, c’est que le lien de causalité est établi en fonction de la prépondérance des probabilités; cette norme de preuve n’exige pas une certitude scientifique : Ediger c. Johnston, 2013 CSC 18, au paragraphe 36. L’expectative raisonnable qu’une maladie survienne peut être établie par des avis d’expert, ou au moyen d’une inférence découlant logiquement et raisonnablement des faits connus. L’autre problème, c’est que même si le Tribunal a fait état des facteurs qu’il utiliserait pour déterminer la possibilité qu’un risque cause une maladie avant que la situation puisse être corrigée, il existe peu d’éléments montrant qu’il a effectivement appliqué ces facteurs dans la portion analytique de ses motifs.

[73]           Il semble que le Tribunal pouvait tenir compte d’une inférence. Dans la décision connexe, pour conclure qu’il existait un risque prévisible pour la santé, le Tribunal s’est appuyé sur les déclarations de la FS pour le Jet Oil. Dans la décision, au paragraphe 107, le Tribunal a également examiné la FS :

La FS du Mobil Jet Oil II précise toutefois que les produits de décomposition peuvent être nocifs. Ces produits sont le monoxyde de carbone, l’anhydride phosphorique, l’aldéhyde, la fumée et les produits de combustion incomplète. À une température élevée et en combustion, l’huile peut se décomposer et produire des gaz, des vapeurs ou des émanations irritants ou nocifs. Les symptômes possibles d’une exposition aigüe à ces produits de décomposition dans un espace clos sont des maux de tête, des nausées et une irritation des yeux, du nez et de la gorge.

[Non souligné dans l’original.]

[74]           On ne sait pas avec certitude si le Tribunal a réellement tenu compte de ces facteurs pour décider s’il avait été prouvé qu’il existait un danger autorisant les employés à refuser de travailler. Au paragraphe 181 de la décision, le Tribunal a conclu que même si quelques-uns des employés s’étaient réellement sentis malades, les renseignements n’étaient pas suffisants pour prouver un lien de cause à effet :

[...] [D]es employés [ont] souffert d’un certain nombre de symptômes, comme des nausées, une irritation des yeux ou une sensation de gorge qui pique, et je ne prétends pas que ce n’était pas le cas. Le Dr Harrison décrit ces symptômes comme étant des maladies et, bien que la liste des maladies dans la littérature scientifique puisse servir à caractériser des états factuels comme étant des maladies, ce n’est pas suffisant dans le présent contexte pour arriver à une conclusion de danger, car on ne dispose pas de l’information nécessaire pour établir de relation de cause à effet entre ces symptômes et les conditions factuelles à bord des avions en cause. [...]..

[Non souligné dans l’original.]

[75]           Les symptômes ressentis par quelques-uns des employés sont identiques aux symptômes indiqués sur la FS du Jet Oil lorsqu’il est pyrolysé. Étant donné que le Tribunal devait établir un lien de cause à effet entre les contaminants dans l’air cabine et les effets sur la santé que craignaient les employés, il est troublant que ces faits pertinents n’aient pas été mentionnés ni analysés. Même si le Tribunal est présumé avoir évalué même les éléments de preuve dont il ne fait pas mention, un défaut de faire état d’éléments de preuve suffisamment importants peut amener la Cour à tirer une conclusion que des éléments ont été laissés de côté plutôt que rejetés : Cepeda-Gutierrez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1998), 157 FTR 35, au paragraphe 17. Dans la décision connexe, les effets sur la santé indiqués pour le Jet Oil pyrolysé constituaient des éléments de preuve suffisants pour que le Tribunal conclut à un risque que la santé d’un employé soit compromise même si l’employé n’a ressenti aucun symptôme, mais le Tribunal, dans sa décision, n’était pas disposé à inférer la cause des symptômes réels sans une preuve de concentrations de produits chimiques dans la cabine.

[76]           Tirer ou non une inférence relevait du pouvoir discrétionnaire du Tribunal, et l’expertise de l’agent des appels mérite une déférence importante. Si la décision connexe n’avait pas existé, le défaut du Tribunal de tirer une inférence de lien de causalité n’aurait pas rendu la décision déraisonnable. Toutefois, la Cour ne peut oublier que la décision et la décision connexe ont été rendues en fonction des mêmes éléments de preuve s’appliquant à deux dispositions réglementaires au libellé très similaire concernant la possibilité que la santé soit compromise. La Cour d’appel fédérale a dit qu’une des méthodes que peut utiliser une cour de révision pour évaluer le caractère raisonnable d’une décision administrative, c’est de rechercher les « traits distinctifs du caractère déraisonnable ». Un trait distinctif du caractère déraisonnable peut soulever une crainte de décision déraisonnable si elle n’est pas suffisamment expliquée par le décideur : Delios c. Canada (Procureur général), 2015 CAF 117, au paragraphe 27.

[77]           Dans les circonstances particulières en l’espèce, les conclusions contradictoires de la décision et de la décision connexe constituent un trait distinctif du caractère déraisonnable, et la contradiction n’a pas été suffisamment expliquée pour maintenir la transparence et l’intelligibilité de la décision. À première vue, il est difficile de rapprocher la décision et la décision connexe. Dans la décision connexe, on a conclu que la santé des employés était compromise, alors que dans la décision, on a conclu qu’il y avait absence de danger pour les employés. Le terme « danger » et l’expression « compromettre la santé » signifient la même chose, alors que dans un cas on utilise un nom et dans le second cas un verbe.

[78]           Le même risque — de l’huile pyrolysée dans l’air de prélèvement — était présent, dans les mêmes circonstances, dans les deux décisions. Le risque a été communiqué aux employés de la même façon dans chacune des décisions : par la présence de l’odeur de vieilles chaussettes dans l’aéronef, alors que les vols immédiatement précédents avaient aussi connu la même odeur. Il est connu dans l’industrie et la littérature que cette odeur est causée par la présence d’huile dans le circuit d’air de prélèvement. Comme les faits sont identiques, conclure à la présence d’un danger dans une décision et à l’absence de danger dans l’autre décision n’est pas intelligible, à moins qu’il y ait une explication claire de la différence entre les décisions. Ceci est tout particulièrement vrai étant donné que les refus de travailler ont eu lieu après que les employés eurent ressenti des symptômes correspondant à ceux décrits dans la FS, alors que dans la décision connexe, le Tribunal a conclu à un risque que la santé soit compromise malgré l’absence de symptômes.

[79]           Les deux décisions reposent sur des éléments de preuve identiques et des dispositions réglementaires au libellé très similaire. La principale différence entre elles, c’est que la décision connexe porte sur l’obligation d’enquêter relativement à la présence d’une substance dangereuse, alors que la décision porte sur un refus de travailler. Mais un décideur ne peut apprécier la preuve différemment selon les conséquences de la décision. Si le Tribunal croit qu’une expectative raisonnable de maladie requiert un seuil de preuve plus élevé qu’une possibilité que la santé soit comprise, alors il doit le dire explicitement. Autrement, les conclusions contradictoires de la décision et de la décision connexe apparaissent davantage comme le résultat d’une appréciation déraisonnable de la preuve que d’une interprétation divergente des lois.

[80]           Enfin, je souligne que le Tribunal a commencé son analyse dans la décision en soulignant que pour répondre à la question en litige, il devait tenir compte de la définition de danger prévue au paragraphe 122(1) du Code et de l’énoncé de l’objet du Code donné au paragraphe 122.1. Il a reconnu que le grand principe de l’objet préventif du Code devait guider son analyse dans le but de décider s’il y avait existence ou non d’un danger. Malheureusement, après avoir indiqué l’importance de l’objet du Code, le Tribunal n’a jamais expliqué comment cet objet était servi par les conclusions qu’il a tirées dans l’une ou l’autre des décisions. À cet égard, concernant la nouvelle détermination, il pourrait être nécessaire que le Tribunal indique comment l’objet du Code s’applique à la conclusion qu’il y avait à la fois une possibilité que la santé soit compromise et une absence de danger.

[81]           En tant que juge à la Cour de révision, il n’est pas de mon ressort de dire si la preuve permettait de conclure que l’on pouvait raisonnablement s’attendre à ce que les employés soient malades ou blessés, et je n’entends pas tirer une telle conclusion. Même si la décision est longue et détaillée, elle doit être annulée parce qu’elle manque de transparence et d’explications justifiant son incohérence avec la décision connexe. On ne sait pas non plus avec certitude si le Tribunal a appliqué une norme de preuve appropriée concernant le lien de causalité. Le Tribunal n’a pas parlé de l’objet du Code et semble avoir traité la FS de manière différente dans les deux décisions. Le Tribunal pourrait également avoir omis de tenir compte d’éléments de preuve pertinents qui auraient pu expliquer le lien de causalité qu’il recherchait. Il n’est pas possible de dire si le résultat aurait été le même si ces questions avaient été abordées. L’affaire doit donc être renvoyée pour une nouvelle détermination, si possible devant le même agent des appels.

[82]           Étant donné le temps et les sommes qu’il faudrait consacrer à une nouvelle audition de la preuve, de l’exposé conjoint des faits des parties et des longues transcriptions des contre-interrogatoires des experts, le dossier de preuve existant est plus que suffisant pour une nouvelle détermination juste par le même agent des appels ou un autre agent des appels. La nouvelle détermination sera par conséquent limitée à la preuve déposée à l’origine devant l’agent des appels et à la transcription de l’appel original, même si les parties pourraient faire des observations additionnelles lors de la nouvelle détermination.


JUGEMENT DANS LE DOSSIER T-1639-15

LA COUR REND LE JUGEMENT SUIVANT :

1.      La demande de contrôle judiciaire est accueillie avec dépens en faveur du SCFP.

2.      La décision de l’agent des appels est annulée.

3.      Si le même agent des appels est disponible, ce dernier devra se prononcer à nouveau sur l’appel des employés.

4.      Si le même agent des appels n’est pas disponible, l’appel sera renvoyé à un autre agent des appels pour une nouvelle détermination.

5.      Dans un cas comme dans l’autre, la nouvelle détermination devra être limitée à la preuve déposée à l’origine devant l’agent des appels et à la transcription de l’appel original, même si les parties pourraient faire des observations additionnelles lors de la nouvelle détermination.

« E. Susan Elliott »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


 

Dossier :

T-1639-15

 

 

INTITULÉ :

SYNDICAT CANADIEN DE LA FONCTION PUBLIQUE, COMPOSANTE D’AIR CANADA c. AIR CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 7 juin 2016

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE ELLIOTT

 

DATE DES MOTIFS :

Le 6 juin 2017

 

COMPARUTIONS :

James L. Robbins

 

Pour le demandeur

 

Rhonda R. Shirreff

 

Pour la défenderesse

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Cavalluzzo Shilton McIntyre Cornish LLP

Avocats

Toronto (Ontario)

 

Pour le demandeur

 

Norton Rose Fulbright

Canada LLP

Toronto (Ontario)

 

Pour la défenderesse

 

 

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