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Date : 20170510


Dossier : T-1477-16

Référence : 2017 CF 483

Ottawa (Ontario), le 10 mai 2017

En présence de madame la juge Gagné

ENTRE :

MICHAUD PETROLEUM INC.

Demanderesse

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

Défenderesse

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]               Michaud Petroleum Inc. demande le contrôle judiciaire d’une décision de la Division des appels de l’Agence du Revenu du Canada, rendue le 11 août 2016. Elle le fait même si l’Agence a accueilli en totalité son opposition et lui a remboursé un montant de 393 920 $ représentant la taxe d’accise payée sur l’achat, auprès de Le Groupe Harnois Inc., d’une certaine quantité de produits pétroliers destinés à être transformés et vendus.

[2]               L’Agence a conclu que puisque la demanderesse est un fabricant licencié au sens de l’alinéa 2(1)f) de la Loi sur la taxe d’accise, LRC 1985, c E-15 [LTA] et que les produits pétroliers achetés de Harnois ont été incorporés à des articles ou produits assujettis à un droit d’accise, elle est exemptée de payer la taxe en vertu du paragraphe 23(7) de la LTA. Puisque la taxe a été payée par erreur de faits ou de droit ou autrement, Michaud a droit au remboursement.

[3]               La demanderesse recherche plusieurs remèdes dont le principal est une ordonnance visant à forcer l’Agence à modifier sa décision sous étude pour que le remboursement de la taxe d’accise effectué par l’Agence le soit en vertu de l’article 68.2 de la LTA, plutôt qu’en vertu de son paragraphe 68(1).

[4]               La demanderesse recherche une telle conclusion au motif vague que la position de l’Agence à l’effet que l’article 68.2 de la LTA ne s’applique pas à la vente de produits pétroliers entre Harnois et Michaud et « nuit à la bonne marche des affaires de la compagnie et rend sans objet sa licence de fabricant […] puisque ses fournisseurs ne peuvent et ne pourront obtenir directement de l’agence du revenu du Canada le remboursement de la taxe s’accise » payée par eux (voir l’affidavit de M. Hermel Michaud aux para 19-20).

[5]               En d’autres termes et bien que la demanderesse ne l’exprime pas aussi clairement, elle demande à la Cour d’interpréter la LTA de telle sorte que son fournisseur Harnois soit exempté de payer la taxe d’accise, lorsqu’elle se porte acquéreur de produits pétroliers, alors même que la LTA ne lui accorde pas une telle exemption.

[6]               La défenderesse soulève un certain nombre de questions préliminaires à l’encontre de la demande de contrôle judiciaire de la demanderesse, dont je ne traiterai pas compte tenu de ma conclusion à l’effet que l’article 68.2 de la LTA ne s’applique pas à la vente de produits pétroliers entre Harnois et Michaud.

[7]               La demanderesse a fondé son opposition sur le paragraphe 81.33(1) de la LTA qui prévoit que lorsqu’un vendeur de marchandises a présenté une demande de remboursement en vertu de l’article 68.2 et que la demande a été rejetée en tout ou en partie et que par la suite le vendeur a fait l’objet d’une cotisation par le ministre, l’acheteur peut, en remplacement du vendeur, engager des procédures de recouvrement. La demanderesse plaide donc qu’elle exerce simplement les droits de recouvrement de Harnois.

[8]               Le paragraphe 68.2(1), quant à lui, prévoit ce qui suit :

68.2(1) Lorsque la taxe a été payée en vertu de la partie III ou VI à l’égard de marchandises et que subséquemment les marchandises sont vendues à un acheteur en des circonstances qui, à cause de la nature de cet acheteur ou de l’utilisation qui sera faite de ces marchandises ou de ces deux éléments, auraient rendu la vente à cet acheteur exempte ou exonérée de cette taxe aux termes du paragraphe 23(6), de l’alinéa 23(8)b) ou des paragraphes 50(5) ou 51(1) si les marchandises avaient été fabriquées au Canada et vendues à l’acheteur par leur fabricant ou producteur, une somme égale au montant de cette taxe doit, sous réserve des autres dispositions de la présente partie, être versée à la personne qui a vendu les marchandises à cet acheteur, si la personne qui a vendu les marchandises en fait la demande dans les deux ans qui suivent la vente.

[9]               Une des conditions pour que cette disposition s’applique à la vente de marchandise entre Harnois et Michaud est que Harnois ait été un marchand en gros titulaire de licence aux termes du paragraphe 23(6) de la LTA.

[10]           Or, elle ne l’est pas et c’est plutôt l’alinéa 23(7)a) de la LTA qui trouve ici application et qui rend la vente entre Harnois et Michaud exempte de taxe. Pour être exemptée aux termes de cette disposition, la vente de marchandise doit rencontrer trois conditions :

- Un fabricant titulaire de licence achète ou importe des marchandises aux termes de la partie III de la LTA;

- Il les incorpore « à un article ou produit assujetti à un droit d’accise prévu par la présente loi, et en former un élément ou un composant »;

- La taxe ne doit pas avoir été perçue.

[11]           Michaud est titulaire d’une licence de fabricant et elle achète les produits pour les transformer et les revendre à des tiers. Elle est exemptée de taxe à l’achat, mais lorsqu’elle revend les produits, cette vente est assujettie au droit d’accise.

[12]           C’est donc à bon droit que l’Agence a conclu que la vente de produits entre Harnois et Michaud était exempte de taxe en vertu de l’alinéa 23(7)a) de la LTA et que c’était par erreur que la taxe avait été payée.

[13]           Et c’est à tort que la demanderesse invoque la décision du Tribunal Canadien du Commerce Extérieur dans l’affaire Sani Métal Ltée c Canada (Revenu national), 1997 CanLII 11986 (CA TCCE). Outre le fait que cette décision émane d’un tribunal administratif et qu’elle ne s’impose pas à cette Cour, il y a lieu de distinguer les faits de cette affaire des faits de la présente cause. Sani Métal est un fabricant et distributeur de matériel utilisé dans la fabrication ou la production d’aliments ou de boisson et, par conséquent, est exempté de la taxe d’accise en application du paragraphe 51(1), auquel réfère l’article 68.2 de la LTA. Tel qu’indiqué plus haut, il s’agit là de la condition que la vente entre Harnois et Michaud ne rencontre pas.

[14]           Pour ce seul motif, la demande de contrôle judiciaire de la demanderesse sera rejetée, avec dépens.


JUGEMENT au dossier T-1477-16

LA COUR STATUE que :

1.      La demande de contrôle judiciaire est rejetée;

2.      Les dépens sont octroyés à la défenderesse.

« Jocelyne Gagné »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-1477-16

INTITULÉ :

MICHAUD PETROLEUM INC. c LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

LIEU DE L’AUDIENCE :

Ottawa (Ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 27 avril 2017

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE GAGNÉ

DATE DES MOTIFS :

LE 10 MAI 2017

COMPARUTIONS :

Tina R. Lagacé-Rivard

Pour LA DEMANDERESSE

Ian Demers

Pour LA DÉFENDERESSE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Cabinet juridique Lagacé-Rivard

Avocate - Notaire

Montréal (Québec)

Pour LA DEMANDERESSE

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)

Pour LA DÉFENDERESSE

 

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