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Date : 20170419


Dossiers : T-1150-16

T-1151-16

T-1153-16

Référence : 2017 CF 373

Ottawa (Ontario), le 19 avril 2017

En présence de monsieur le juge Martineau

Dossier : T-1150-16

ENTRE :

MICHELLE GAGNON

demanderesse

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA (LE MINISTÈRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION DU CANADA)

défendeur

Dossier : T-1151-16

ET ENTRE :

MICHELLE GAGNON

demanderesse

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA (LE MINISTÈRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION DU CANADA)

défendeur

Dossier : T-1153-16

ET ENTRE :

MICHELLE GAGNON

demanderesse

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA (LE MINISTÈRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION DU CANADA)

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]               Le 12 juillet 2016, la demanderesse a introduit trois demandes distinctes en contrôle judiciaire en mandamus afin que les griefs numéros 500357 (T-1151-16), 500360 (T‑1150‑16) et 501048 (T-1153-16) qui ont été respectivement déposés les 10 mai 2005, 28 juillet 2005 et 2 mai 2007, soient accueillis.

[2]               Les trois griefs en question font suite à la même situation de harcèlement psychologique dont la demanderesse dit avoir été victime dans son milieu de travail, alors qu’elle était à l’emploi du ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration [ministère]. Aujourd’hui, elle demande à la Cour de déclarer que l’employeur a fait défaut de respecter la Politique sur la prévention et le règlement du harcèlement au milieu de travail [Politique sur le harcèlement ou Politique].

[3]               Bien qu’une décision finale rejetant les trois griefs ait été rendue le 22 juillet 2016 par Mme Stefanie Beck, sous-ministre adjointe, Services ministériels [sous-ministre], la demanderesse – qui conteste subsidiairement la raisonnabilité de cette dernière décision – soutient que la sous-ministre avait l’obligation légale de donner suite à ses plaintes de harcèlement du 31 mars 2005 (T-1151-16), du 28 juin 2005 (T-1150-16) et du 2 mai 2007 (T‑1153-16).

[4]               Le défendeur soumet que la demanderesse ne peut indirectement contester le mérite de la décision rendue le 22 juillet 2016, tandis que les trois demandes de contrôle judiciaire sont autrement devenues académiques. Subsidiairement, la décision de la sous-ministre est à tous égards raisonnable. La demanderesse réplique que les présentes demandes de contrôle judiciaire ne sont pas académiques, qu’elle n’a pas besoin d’amender ses avis introductifs d’instance et qu’elle a droit aux déclarations sollicitées.

[5]               Pour les motifs qui suivent, les présentes demandes de contrôle judiciaire sont rejetées.

I.                   Cadre juridique

[6]               La demanderesse est à l’emploi de la fonction publique fédérale depuis le 24 février 1997. En 2005, elle occupait un poste de niveau PE-03 au sein du ministère à la division des ressources humaines et était exclue de l’unité de négociation. Cependant, elle jouissait en pratique des mêmes conditions de travail que les autres fonctionnaires de son niveau qui sont couverts par une convention collective.

[7]               Comme l’a reconnu cette Cour dans l’affaire Alliance de la fonction publique du Canada c Canada (Procureur général), 2014 CF 1066, [2015] 3 RCF 649 au para 29, « l’intimidation psychologique peut constituer au fil du temps une des pires formes de dommage qui puissent être infligées à une personne ». Or, en qualité d’employeur de la fonction publique fédérale, le Conseil du Trésor s’est engagé à fournir un milieu de travail dans lequel toutes les personnes qui œuvrent dans la fonction publique sont traitées avec respect et dignité. À ce chapitre, il incombe aux administrateurs généraux des divers ministères ou agences du gouvernement de favoriser un milieu de travail exempt de tout harcèlement.

[8]               De fait, à l’époque où les plaintes de harcèlement ont été faites par la demanderesse, le ministère devait se conformer à la Politique sur le harcèlement. Cette Politique a toutefois été remplacée le 30 septembre 2012 par la nouvelle politique du Conseil du Trésor dont des exigences obligatoires supplémentaires sont énoncées dans la Directive sur le processus de traitement des plaintes de harcèlement. Les changements majeurs avec cette nouvelle Politique se situent surtout au niveau de l’application sur les organismes de l’administration publique centrale, mais également au niveau des obligations qui pèsent sur le responsable désigné pour appliquer la Politique et le traitement des plaintes. En outre, la Directive prévoie que les étapes dans le traitement d’une plainte doivent être remplies dans l’espace de douze mois à moins de circonstances atténuantes (article 6.1.2).

[9]               La Politique sur le harcèlement permet à un employé de déposer une plainte auprès du gestionnaire délégué – qui est un cadre supérieur désigné par l’administrateur général du ministère comme responsable du processus de plainte en matière de harcèlement – dès qu’il devient évident que la résolution hâtive de la situation ou du conflit a échoué ou n’est pas jugée appropriée. La Politique définit le harcèlement « comme tout comportement inopportun et injurieux, d’une personne envers une ou d’autres personnes en milieu de travail, et dont l’auteur savait ou aurait raisonnablement dû savoir qu’un tel comportement pouvait offenser ou causer préjudice ». (À noter que dans la nouvelle Politique, la notion de harcèlement s’étend dorénavant à toute activité ou dans tout lieu associé au travail, et dont l’auteur savait ou aurait raisonnablement dû savoir qu’un tel comportement pouvait offenser ou causer préjudice.) Toujours selon la Politique sur le harcèlement, le harcèlement « comprend tout acte, propos ou exhibition qui diminue, rabaisse, humilie ou embarrasse une personne, ou tout acte d’intimidation ou de menace. » Le harcèlement comprend également le harcèlement au sens de la Loi canadienne sur les droits de la personne, LRC 1985, c H-6.

[10]           Selon la Politique sur le harcèlement (et la nouvelle Politique en vigueur), la plainte doit être déposée dans l’année qui suit le prétendu harcèlement et doit comporter les renseignements suivants : la nature des allégations; le nom du mis en cause; la relation entre le mis en cause et le plaignant (par exemple, superviseur ou collègue); la date du ou des incidents, leur description et, s’il y a lieu le nom des témoins. Si ces conditions sont respectées, le gestionnaire délégué avise le mis en cause qu’une plainte a été reçue et l’informe, par écrit, des éléments de la plainte, notamment des allégations. Si ces critères de recevabilité ne sont pas respectés, le gestionnaire délégué informe le plaignant, par écrit, du rejet de sa plainte.

[11]           Une fois qu’il a accepté la plainte, le gestionnaire délégué l'étudie et, au besoin, demande de l’information additionnelle pour déterminer si les allégations portent sur du harcèlement. La difficulté, c’est que la détermination de ce qui constitue du harcèlement peut se révéler un exercice fort complexe en pratique. En effet, ce qui peut être considéré comme un comportement convenable par une personne peut être perçu comme du harcèlement par une autre. Selon la Politique sur le harcèlement, un comportement convenable pour une personne, dans l’exercice de son autorité ou de ses responsabilités, ne constitue généralement pas du harcèlement.

[12]           La Politique sur le harcèlement prévoit que le gestionnaire délégué doit être impartial dans tout le processus de plainte auquel il participe. Si la plainte de harcèlement n’est pas résolue, le gestionnaire délégué doit proposer la médiation. Il doit séparer le plaignant et le mis en cause, au point de vue hiérarchique ou physiquement, ou les deux, pour la durée du processus de plainte, s’il le juge nécessaire. Il doit veiller à ce que les mesures correctives ou disciplinaires soient prises, s’il y a lieu. Si le gestionnaire délégué est convaincu qu’il a connaissance de tous les faits et que les parties ont été entendues, il peut décider de ne pas procéder à une enquête et décider des mesures à prendre. Il informe les parties, par écrit, de l’issue de l’enquête et s’assure que les mesures correctives ou disciplinaires sont prises, s’il y a lieu.

[13]           Selon la Politique sur le harcèlement, le gestionnaire délégué doit également s’assurer que la plainte de harcèlement soit traitée avec célérité. De façon générale, l’employé qui dépose une plainte auprès du gestionnaire délégué peut s’attendre à ce que toutes les étapes mentionnées dans la Politique sur le harcèlement (dépôt, évaluation préliminaire, étude au mérite, médiation, enquête et décision) soient complétées sans délai excessif, normalement en six mois ou moins. D’un autre côté, si une plainte sur la même question est ou a déjà été traitée en faisant appel à un autre mécanisme de recours, le processus de plainte sera interrompu et le dossier sera clos.

[14]           Selon la Politique sur le harcèlement, l’employé peut également porter un grief individuel ou déposer une plainte auprès de la Commission canadienne des droits de la personne si le harcèlement est motivé par des éléments de distinction illicite. En effet, la Loi canadienne sur les droits de la personne précise que toute personne en milieu de travail a le droit de ne pas subir de harcèlement en raison de sa race, son origine nationale ou ethnique, sa couleur, sa religion, son âge, son sexe, son orientation sexuelle, son état matrimonial, sa situation de famille, sa déficience et son état de personne graciée. Cela étant dit, il n’est pas question dans le présent dossier de harcèlement pour l’un ou l’autre de ces motifs de distinction illicites.

[15]           Si la médiation n’a pas permis d’obtenir une solution à la plainte ou s’il n’y a pas eu de médiation, le gestionnaire délégué lance une enquête et en informe toutes les parties concernées. En pareil cas, le gestionnaire délégué doit s’assurer que l’enquêteur satisfait aux critères du Profil de compétences pour enquêteurs internes et externes sur le harcèlement en ce qu’il est impartial, qu’il n’a pas de relations hiérarchiques avec les parties et qu’il n’est pas en situation de conflit d’intérêts. Pour sa part, l’enquêteur doit se conformer à son mandat et respecter les principes d’équité procédurale. Les parties concernées ont l’occasion de faire des représentations au sujet du rapport préliminaire. L’enquêteur doit remettre au gestionnaire délégué son rapport final, faisant état de ses constatations et de ses conclusions.

[16]           Les parties reconnaissent qu’en vertu de l’alinéa 208(1)b) de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, LC 2003, c 22, art 2 [LRTFP], la demanderesse avait le droit de déposer un grief individuel si elle s’estimait lésée par suite de tout fait portant atteinte à ses conditions d’emploi, ce qui pouvait inclure toute décision négative prise par le gestionnaire délégué à la suite d’une plainte de harcèlement (Chamberlain c Canada (Procureur général), 2015 CF 50, [2015] ACF no 22 au para 39 [Chamberlain CF 2015]). Toutefois, la Commission des relations de travail dans la fonction publique n’a pas compétence pour entendre un grief individuel en matière d’harcèlement psychologique, sauf s’il rentre dans l’une ou l’autre des catégories prévues au paragraphe 209(1) de la LRTFP, ce qui n’est pas le cas en l’espèce (Chamberlain c Canada (Procureur général), 2012 CF 1027, [2012] ACF no 1140; Chamberlain CF 2015 au para 40).

[17]           Selon l’article 18 de la Loi sur les Cours fédérales, LRC 1985, c F-7, cette Cour a compétence exclusive pour notamment émettre un bref de mandamus et prononcer un jugement déclaratoire impliquant un office fédéral (Canada (Procureur général) c Therriault (PG du Canada c Therriault), [2004] JQ no 10940 aux paras 4-5; Vaughan c Canada, 2005 CSC 11, [2005] 1 RCS 146 aux paras 29 et 39 [Vaughan]). Cela dit, le recours en mandamus permet d'exiger l’exécution d’une obligation légale à caractère public lorsqu’une autorité publique refuse ou néglige de remplir cette obligation même si elle a été dûment sommée de le faire (Dragan c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1re inst), 2003 CFPI 211, [2003] 4 CF 189 au para 38; Ministre de la Main-d'oeuvre et de l'Immigration c Tsiafakis, [1977] 2 CF 216 (CA)).

[18]           Dans l’affaire Apotex Inc c Canada (Procureur général), [1994] 1 CF 742 (CA), conf. par [1994] 3 RCS 1100, la Cour d'appel fédérale a énoncé les conditions suivantes qui doivent être respectées pour que la Cour délivre un bref de mandamus :

1)   Il doit exister une obligation légale d’agir à caractère public.

2)   L’obligation doit exister envers le requérant.

3)   Il existe un droit clair d'obtenir l’exécution de cette obligation, notamment:

a)   le requérant a rempli toutes les conditions préalables donnant naissance à cette obligation;

b)   il y a eu (i) une demande d'exécution de l’obligation, (ii) un délai raisonnable a été accordé pour permettre de donner suite à la demande à moins que celle-ci n'ait été rejetée sur-le-champ et (iii) il y a eu refus ultérieur, express ou implicite, par exemple un délai déraisonnable.

4)   Le requérant n’a aucun autre recours adéquat.

5)   L'ordonnance sollicitée aura une incidence sur le plan pratique.

6)   Dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire, le tribunal estime que, sur le plan de l’équité, rien n’empêche d’obtenir le redressement demandé.

7)   Compte tenu de la balance des inconvénients, une ordonnance de mandamus devrait être rendue.

[19]           D’un autre côté, toute décision finale prise au dernier palier de la procédure de grief par la sous-ministre est révisable selon la norme de la décision raisonnable (Tudor Price c Canada (Procureur général), 2015 CF 696, [2015] ACF no 689 au para 31; Spencer c Canada (Procureur général), 2010 CF 33, [2010] ACF no 29 aux paras 18-32; Girard c Canada (Ministère des Ressources humaines et du Développement des compétences), 2013 CF 489, [2013] ACF no 544 au para 16; Tibilla c Canada (Procureur général), 2011 CF 163, [2011] ACF no 207 aux paras 17-18; Hagel c Canada (Procureur général), 2009 CF 329, [2009] ACF no 417 aux paras 19-27 conf. par 2009 CAF 364, [2009] ACF no 1618; Backx c Canada (Agence canadienne d’inspection des aliments), 2013 CF 139, [2013] ACF no 145 au para 19; Marszowski c Canada (Procureur général), 2015 CF 271, [2015] ACF no 249 au para 37).

II.                Chronologie des faits et décisions relatives aux plaintes de harcèlement et aux griefs de la demanderesse

[20]           Le 31 mars 2005, alors qu’elle travaillait à la Direction générale des ressources humaines du ministère, la demanderesse a déposé une plainte écrite dans laquelle elle allègue avoir été victime de harcèlement psychologique de la part de deux superviseures, Mme Brenda Encarnacion et Mme Marita Somma [les mises en cause], et ce, en contravention de la Politique sur le harcèlement.

[21]           Plus particulièrement, la demanderesse allègue que les mises en cause ont posé des actes destinés à la rabaisser, à l’humilier et à l’intimider. Bien que la demanderesse ait dénoncé cette situation aux mises en cause, celles-ci refusent, négligent ou omettent toujours de cesser des porter des actes de harcèlement. À titre d’exemple, la demanderesse se réfère à une mesure disciplinaire qui lui a été imposée en juillet 2004, mais qui a été réduite de moitié par l’employeur. Elle déplore également le refus de lui octroyer une avance de congé maladie lors de son hospitalisation en octobre et novembre 2004 et relève certains commentaires dénigrants faits par Mme Somma en janvier et février 2005 sur la qualité de son travail. Enfin, la demanderesse souligne que, depuis quelques mois, son volume de travail est inférieur à la norme, alors qu’un processus de sélection a lieu pour combler des postes. Face à cette situation qu’elle considère insoutenable, la demanderesse demande instamment à la gestionnaire déléguée d’assurer le respect de la Politique sur le harcèlement, en ordonnant la tenue d’une enquête et, le cas échéant, en imposant des sanctions disciplinaires contre les mises en cause. La demanderesse exige également son retrait de son poste sous la supervision des mises en cause et une indemnisation pour les préjudices qu’elle dit subir.

[22]           La plainte de harcèlement de la demanderesse est traitée par la Directrice régionale intérimaire, Région du Québec, Mme Graziella Mousseau [la gestionnaire déléguée]. Le ou vers le 15 avril 2005, la gestionnaire déléguée écrit à la demanderesse pour lui demander sa collaboration et sa patience afin de pouvoir régler entièrement et efficacement sa plainte de harcèlement contre les mises en cause. À cet effet, la gestionnaire déléguée prie la demanderesse de lui fournir, d’ici le 29 avril 2005, des précisions au sujet des allégations de harcèlement. La gestionnaire déléguée propose également une médiation.

[23]           Le 28 avril 2005, le procureur de la demanderesse répond à la gestionnaire déléguée que l’ensemble des informations déjà fournies dans la plainte sont suffisantes pour justifier la tenue d’une enquête, que Mme Encarnacion a posé d’autres actes préjudiciables en avril 2005, alors que la demanderesse est prête à participer à une médiation.

[24]           Le 29 avril 2005, la demanderesse dépose trois griefs en rapport avec les allégations de harcèlement : le grief 500357 contestant le soi-disant refus de la gestionnaire déléguée de donner suite à sa plainte de harcèlement; le grief 500358 contestant la décision de la gestionnaire déléguée de ne pas séparer la demanderesse des mises en cause; et, le grief 500359 contestant la décision de Mme Encarnacion de ne pas lui octroyer du temps supplémentaire. À titre de mesures correctives, la demanderesse réclame l’application de la Politique sur le harcèlement et le versement d’une indemnité pour pertes financières et dommages moraux (grief 500357); la séparation de la demanderesse des mises en cause (grief 500358); et, trois heures de travail supplémentaire (grief 500359). La demanderesse demande d’être entendue au deuxième palier de la procédure de grief.

[25]           Le 9 mai 2005, la demanderesse est mise en arrêt de travail par son médecin.

[26]           Le 31 mai 2005, la gestionnaire déléguée quitte le ministère pour prendre sa retraite.

[27]           Le 28 juin 2005, la demanderesse fait directement parvenir à la sous-ministre de l’époque, Mme Janice Charette, une plainte adressée au gestionnaire délégué dans laquelle elle réitère les allégations de harcèlement formulées contre les mises en cause dans la plainte du 31 mars 2005 et se plaint de surcroît de la lenteur du processus d’examen de sa plainte et du comportement de la gestionnaire déléguée, Mme Mousseau. La demanderesse réclame le respect de la Politique sur le harcèlement et demande qu’une enquête soit instituée à l’égard du comportement et des abus de pouvoir de la gestionnaire déléguée, que des sanctions appropriées soient prises à l’égard de la gestionnaire déléguée, que l’on retire immédiatement la demanderesse de son milieu de travail et qu’on l’indemnise pour tout préjudice subi.

[28]           Le 5 juillet 2005, bien qu’elle conserve toujours son poste auprès du ministère, la demanderesse est mise en affectation temporaire dans un autre ministère suite à une entente de détachement. De fait, la demanderesse sera en détachement dans d’autres ministères jusqu’au moment de sa mutation, le 10 mai 2010, à Environnement Canada. Depuis cette dernière date, la demanderesse n’est plus une employée du ministère.

[29]           Entretemps, le 27 juillet 2005, la demanderesse dépose une première demande de contrôle judiciaire (T-1301-05) pour forcer la sous-ministre d’accomplir ce qu’elle a illégalement omis ou refusé d’accomplir ou dont elle a retardé l’exécution de manière déraisonnable. Plus précisément, la demanderesse désire que la Cour ordonne à la sous-ministre de nommer un enquêteur et/ou qu’elle renvoie la plainte de harcèlement à la sous-ministre pour qu’elle l’examine.

[30]           De manière parallèle, le 28 juillet 2005, la demanderesse dépose le grief 500360 contestant la décision de la sous-ministre de ne pas donner suite à sa plainte en matière de harcèlement du 28 juin 2005. La demanderesse réclame l’application de la Politique sur le harcèlement et demande le versement d’une indemnité pour pertes financières et dommages moraux.

[31]           Le 9 août 2005, Mme Janice Charrette, alors sous-ministre, avise le procureur de la demanderesse de son intention de désigner un enquêteur aux fins d’enquêter sur les allégations de harcèlement. Du même coup, elle informe cette dernière que l’employeur n’ouvrira pas d’enquête sur le fait que la gestionnaire déléguée ait pu tarder à donner suite à sa plainte de harcèlement du 31 mars 2005. Toutefois, la demanderesse pourra soulever la question des délais lors de l’enquête.

[32]           Le 31 août 2005, Mme Maryse Montminy [l’enquêteuse], du bureau des enquêtes en harcèlement au ministère de la Défense nationale, est désignée par Mme Sylvie Désilets, Gestionnaire intérimaire, pour faire enquête au sujet de la plainte de harcèlement.

[33]           Le 7 octobre 2005, Mme Manon Galipeau, Directrice par intérim, informe la Cour dans un affidavit produit par le défendeur que la sous-ministre a déjà procédé à la nomination d’un enquêteur en la personne de Mme Montminy.

[34]           Le 24 novembre 2005, avec le consentement du défendeur, la demanderesse se désiste sans frais de sa demande en contrôle judiciaire.

[35]           Le 30 novembre 2005, une rencontre a lieu entre l’enquêteuse, la demanderesse et son procureur.

[36]           Le 13 décembre 2005, l’enquêteuse se récuse à la demande de la demanderesse qui craint un risque de partialité suite à certains commentaires de l’enquêteuse lors de l’entrevue.

[37]           Le 18 janvier 2006, la demanderesse dépose le grief 500450 dans lequel la demanderesse allègue, entre autres, que la gestion a refusé de traiter des plaintes du 31 mars 2005 et du 28 juin 2005 et ne lui a pas soumis pour considération trois noms d’enquêteur.

[38]           Le 3 mars 2006, la demanderesse est avisée que M. Jean Filion [l’enquêteur], un consultant externe indépendant qui possède une quinzaine d’années d’expérience dans le domaine de la résolution de conflits et des enquêtes suite à des plaintes de harcèlement, a été sélectionné comme enquêteur suite à un appel d’offres au cours duquel plusieurs firmes ont été prises en considération.

[39]           Les 28 avril et 8 juin 2006, l’enquêteur rencontre la demanderesse.

[40]           Le 13 juillet 2006, une copie des allégations détaillées de harcèlement est envoyée aux mises en cause qui ont ensuite l’occasion d’y répondre. L’enquêteur rencontre ces dernières à deux reprises. Il contacte également 22 personnes. Toutes, sauf trois, répondent à sa demande d’entrevue et fournissent des témoignages concernant les faits rapportés par les parties.

[41]           Le 10 janvier 2007, une copie préliminaire du rapport d’enquête est transmise à la demanderesse. Le 19 février 2007, la demanderesse fournit ses commentaires à l’enquêteur.

[42]           En mars 2007, l’enquêteur produit son rapport final qui fait 56 pages. L’enquêteur note au passage qu’il n’est pas de son ressort de faire quelque commentaire que ce soit concernant la gestion de la plainte de harcèlement par le ministère puisqu’il s’agit de procédures administratives et non d’une question de harcèlement (point 8.1). Cela s’applique également aux griefs déposés par la demanderesse (point 8.2). Cela dit, l’enquêteur traite en détail des diverses allégations de harcèlement et des preuves au dossier à ce sujet (points 8.5 à 8.33).

[43]           L’enquêteur conclut que l’ensemble des allégations de la demanderesse sont non fondées. Outre le fait que l’enquêteur remette en question l’existence d’une plainte formelle de harcèlement en 2004 (courriel daté du 1er avril 2004), plusieurs évènements survenus en 2004 et 2005 sont examinés de manière minutieuse dans le rapport final. L’enquêteur constate que les relations entre la demanderesse et les mises en cause sont devenues tendues au point d’être dysfonctionnelles. L’enquêteur note par contre que ce n’est pas une situation nouvelle. En effet, la totalité des personnes interrogées ont mentionné qu’elles avaient eu des sérieuses difficultés relationnelles avec la demanderesse.

[44]           Bref, selon l’enquêteur, on n’a pas affaire du harcèlement :

Je dois aussi dire que tout aussi rigide les styles de gestion de Mme Somma et Mme Encarnacion puissent être, ces styles ne peuvent être la seule cause des « déboires » de Mme Gagnon. À la lecture des témoignages recueillis, il est évident que Mme Gagnon, de par ses comportements et de sa manière de voir les choses, s’est maintes fois placée dans des situations difficiles, conflictuelles et stressantes. Conséquemment, il est fort possible que certains événements rapportés par les parties se sont produits. Toutefois, l’intensité et les interprétations que les uns et les autres donnent à ces événements sont fort différents. Ceci dit, je suis d’avis que les actions des intimés lors des événements rapportés ne sont pas l’expression d’harcèlement. Elles sont plutôt l’expression d’un sévère manque de communication et d’écoute attentive tant de la part de Mesdames Somma et Encarnacion, que de la part de Mme Gagnon.

[45]           Le 26 mars 2007, le rapport final d’enquête est communiqué à la demanderesse par M. Albert Deschamps, Directeur général régional, Région du Québec [nouveau gestionnaire]. Le nouveau gestionnaire note que « [a]près étude du rapport, [il est] satisfait que toute l’information disponible a été prise en considération » et conclut qu’il est « en accord avec les conclusions de l’enquête ». Ce faisant, le nouveau gestionnaire rappelle à la demanderesse qu’elle peut « toujours recourir au service du Programme d’aide aux employés (PAE) disponible jour et nuit et toute l’année ».

[46]           Le 2 mai 2007, la demanderesse dépose le grief sous le numéro 501048 à l’effet que « les dispositions pertinentes de la convention collective applicable et des politiques et directives du Conseil du Trésor et du ministère relative [sic] à mon droit à un milieu de travail libre d’harcèlement n’ont pas été respectées et ne sont toujours pas respectées à la suite du dépôt de ma plainte de harcèlement datée du 31 mars 2005 et ne sont pas toujours respectées suite au dépôt du rapport d’enquête dont j’ai pris possession en date du 29 mars 2007. » La demanderesse demande à être entendue au deuxième palier. À titre de mesures correctives, la demanderesse réclame que les sanctions disciplinaires appropriées soient prises à l’égard de la personne ou des personnes fautives et qu’on lui accorde des dommages compensatoires relativement aux préjudices d’ordre moral et financier qu’elle dit avoir subis.

[47]           Le 23 avril 2008, une audition a lieu au deuxième palier devant le nouveau gestionnaire, relativement aux griefs 500357, 500358 et 500359 que la demanderesse a déposés le 29 avril 2005, ainsi qu’aux griefs 500360, 500450 et 501048 déposés respectivement les 28 juillet 2005, 18 janvier 2006 et 2 mai 2007.

[48]           Le 3 juillet 2008, les six griefs de la demanderesse sont refusés au deuxième palier par le nouveau gestionnaire (sauf le grief 500359 allouant à titre de mesure corrective trois heures de temps supplémentaire). Dans la lettre de refus, le nouveau gestionnaire constate notamment :

[…]

Dans le grief 500357, vous alléguez que Citoyenneté et Immigration Canada (CIC) a refusé de donner suite à votre plainte en matière de harcèlement du 30 mars 2005. La gestionnaire déléguée, madame Mousseau, n’a jamais refusé de traiter votre plainte, bien au contraire dans sa lettre du 15 avril 2005, la gestion tentait d’obtenir des informations additionnelles pour déterminer la meilleure approche dans le dossier.

[…]

Dans le grief 500358, vous contestez la décision de ne pas vous séparer des mises en causes. Étant donné que la gestionnaire déléguée tentait d’obtenir des informations supplémentaires sur les allégations de votre part, et sur la base des informations qu’elle avait en main à ce moment-là, elle a jugé que cela n’était pas justifié. De plus, la Politique sur la prévention et le règlement du harcèlement en milieu de travail du Conseil du Trésor indique que la séparation physique et/ou hiérarchique n’est pas obligatoire.

[…]

Dans le grief 500360, vous alléguez que la gestion n’a pas donné suite à votre plainte de harcèlement déposée le 28 juin 2005. Là encore la gestion n’a pas refusé de traiter votre plainte. La gestionnaire déléguée était sous l’impression que le processus informel allait de l’avant et comme cette dernière n’y était pas directement impliquée, elle n’avait que très peu d’informations à ce sujet. De plus, la lettre du 9 août 2005 de madame Charrette, indiquait que le Ministère ne lancerait pas une enquête uniquement pour cette plainte, puisque madame Mousseau avait pris sa retraite, mais que vous auriez l’opportunité de soulever toutes préoccupations dans le cadre de l’enquête sur votre plainte du 30 mars 2005.

Lors de la présentation, vous avez à plusieurs reprises affirmé que vous aviez dû recourir à une demande en contrôle judiciaire pour faire valoir vos droits en tant que fonctionnaire. Je tiens à préciser que ce n’est pas le cas. Au cours du mois de juillet 2005, vous avez envoyé trois correspondances à la sous-ministre de CIC, madame Charrette, dont les deux dernières, à un jour d’intervalle, soit les 28 et 29 juillet 2005. La réponse à votre lettre du 5 juillet 2005 avait été envoyée pour signature par la sous-ministre le 21 juillet 2005 vous informant qu’une enquête serait amorcée dans les meilleurs délais. Toutefois, avant même qu’elle ne soit signée, nous avons reçu votre grief le 28 juillet et votre demande en contrôle judiciaire, quelques jours plus tard. La réception de ces documents nous a obligés à revoir à deux reprises la lettre préparée, avec pour conséquences des délais additionnels.

Dans le grief 500450, vous alléguez, entre autres, que la gestion a refusé de traiter vos plaintes du 30 mars 2005 et du 28 juin 2005 et ne vous a pas soumis pour considération trois noms d’enquêteurs, tel qu’indiqué dans la politique du Conseil du Trésor. La Politique sur la prévention et le règlement du harcèlement en milieu de travail ne prescrit pas la façon dont le choix de l’enquêteur doit se faire. Le gestionnaire délégué s’est donc réservé le droit de choisir l’enquêteur sans consultation.

La gestion n’a pas refusé de traiter votre plainte. Le premier enquêteur a été choisi de bonne foi par la gestion et ce dernier était prêt à bouger rapidement dans le dossier. Le gestionnaire délégué a même encouru des frais de déplacement pour minimiser les détails pour vous rencontrer ainsi que votre représentant à Québec plutôt qu’à Montréal. Par ses actions, le gestionnaire délégué a démontré son engagement à faire avancer le dossier et minimiser, par le fait même, les impacts pour tous. Le désistement du premier enquêteur à la mi-décembre 2005 a inévitablement occasionné des délais. Un nouvel enquêteur était toutefois prêt à aller de l’avant un peu plus de deux mois après le désistement du premier, ce qui est plus que raisonnable considérant la période de l’année et les exigences pour établir un contrat.

Dans le grief 501048, vous alléguez que les dispositions de la convention collective ainsi que la Politique sur la prévention et le règlement du harcèlement en milieu de travail du Conseil du Trésor et celle du Ministère visant à vous offrir un milieu de travail libre de harcèlement ne sont toujours pas respectées suite au dépôt de votre plainte et du rapport. Étant donné que vous n’avez pas été supervisée par les mises en causes depuis mai 2005, il m’est difficile de concevoir que la gestion n’a pas respecté les politiques et la convention collective et ne vous a pas offert un milieu de travail libre de harcèlement. La gestion juge qu’elle vous a beaucoup aidée et soutenue en vous trouvant des détachements dans d’autres ministères et en assumant une partie des frais de salaires, de relocalisation même et ce, après le dépôt de votre plainte, voire après le dépôt du rapport dont la gestion a accepté les conclusions.

[49]           Suite à la décision négative prise au deuxième palier par le gestionnaire délégué, la demanderesse soumet les griefs 500357, 500358, 500360, 500450, 501047 et 501048 au dernier palier. Une audition des griefs devant la sous-ministre doit avoir lieu en décembre 2008, puis est reportée à une date ultérieure (en février ou en mars 2009) pouvant convenir aux parties. Toutefois, l’audition est suspendue du consentement des parties, et ce en raison semble-t-il, de l’épuisement moral de la demanderesse.

[50]           Aucune action n’est prise pendant près de sept ans par l’une ou l’autre des parties relativement aux griefs encore en suspens.

[51]           Le 7 juillet 2015, Mme Édith Bernard, conseillère principale en ressource humaines, contacte la demanderesse et l’informe que le ministère est disposé à procéder à l’audition de l’ensemble des griefs en suspens (dont les griefs 500357, 500360 et 501048 faisant l’objet des présentes procédures). La demanderesse informe alors la conseillère qu’elle entend faire des représentations à ce sujet.

[52]           Le 12 avril 2016, Mme Stefanie Beck, sous-ministre adjointe, Services ministériels [sous-ministre] procède à l’audition de l’ensemble des griefs en suspens, notamment les trois griefs faisant l’objet du présent litige. Par l’entremise de son procureur, la demanderesse fait valoir son point de vue et dépose de la jurisprudence. La demanderesse accepte toutefois de prolonger les délais pour permettre à l’employeur de répondre aux griefs. Le 30 mai 2016, le procureur de la demanderesse est avisé que l’employeur entend répondre aux griefs d’ici deux semaines, soit plus tard le 13 juin 2016.

[53]           Le 12 juillet 2016, l’employeur n’a toujours pas produit de réponse et la sous-ministre ne s’est toujours pas prononcée sur le mérite des griefs. Conséquemment, la demanderesse dépose les présentes demandes en contrôle judiciaire en mandamus aux fins que la Cour accueille les griefs numéros 500357 (T‑1151-16), 500360 (T‑1150‑16) et 501048 (T-1153-16) et déclare que le ministère avait l’obligation de donner suite aux plaintes du 31 mars et 28 juin 2005 et qu’il a fait défaut de respecter la Politique sur le harcèlement.

[54]           Le 22 juillet 2016 – soit dix jours après l’institution des présentes demandes en contrôle judiciaire en mandamus – la sous-ministre rend une décision finale rejetant l’ensemble des griefs. Elle note que les griefs sont tous reliés à la plainte de harcèlement du 31 mars 2005. Elle note que la demanderesse est en partie responsable des délais encourus dans l’enquête, notamment lorsqu’elle a refusé de donner des précisions à la gestionnaire déléguée (en avril 2005) ou encore lorsqu’elle a elle-même demandé (en décembre 2005) la récusation de la première enquêteuse. Ce n’est que le 5 juillet 2006 que la demanderesse a fourni des précisions au sujet des allégations contenues dans la plainte du 31 mars 2015. L’employeur n’a donc pas fait preuve de délais excessifs dans le cadre du processus d’enquête. La sous-ministre juge également que la décision de la gestionnaire déléguée (en avril 2005) de ne pas séparer la demanderesse des mises en cause était raisonnable à ce moment précis, vu son refus de fournir des précisions. De plus, la sous-ministre ne peut conclure que la demanderesse a été harcelée. Elle s’appuie en grande partie sur le rapport d’enquête qui indique que, bien que le style de gestion des deux mises en cause était pour le moins rigide, les comportements reprochés ne sont pas l’expression de harcèlement. De surcroît, le rapport d’enquête dénote que la demanderesse a contribué aux relations tendues présentes dans son milieu de travail. La sous-ministre rejette donc les allégations de préjudice et souligne au passage que la demanderesse n’a fait aucune démarche entre décembre 2008 et juillet 2015 pour s’enquérir de l’état des griefs.

III.             Mérite des trois demandes de contrôle judiciaire

[55]           La demanderesse – qui n’a pas modifié ses conclusions et qui n’a pas cherché, et encore moins obtenu, l’autorisation de la Cour pour amender les avis introductifs d’instance qui ont été déposés le 12 juillet 2016 – demande toujours à la Cour d’accueillir les griefs numéros 500360 (T-1150-16), 500357 (T‑1151-16) et 501048 (T-1153-16) et de déclarer que l’employeur a fait défaut de respecter la Politique sur le harcèlement. Même si la sous-ministre a examiné le mérite des plaintes de harcèlement, ainsi que les délais encourus dans leur traitement, et que, le 22 juillet 2016, elle a rendu une décision finale rejetant les trois griefs, la demanderesse soumet qu’il s’agit d’une instance où la Cour conserve une « compétence résiduelle », vu que la sous-ministre est en conflit d’intérêts, pour trancher les questions liées au secteur du travail qui découlent de l’article 208 (antérieurement l’article 91) de la LRTFP et qui ne peuvent faire l’objet de l’arbitrage prévu à l’article 209 de la LRTFP (antérieurement l’article 92). La demanderesse considère qu’il s’agit d’un cas semblable à la situation des fonctionnaires ayant dénoncé un acte répréhensible (Vaughan aux paras 2, 16-17, 21, 29, 39, 72 et 73). Or, la demanderesse soumet qu’elle n’a aucun recours efficace pour faire valoir ses prétentions de déclarer que l’employeur a fait défaut de respecter la Politique sur le harcèlement, ou encore que le régime actuel pour le règlement de différends au sein de la fonction publique est défectueux en matière de harcèlement. De surcroît, elle soutient que le présent litige met en jeu des droits de nature quasi-constitutionnelle. Subsidiairement, la décision de la sous-ministre est déraisonnable et doit être annulée par la Cour.

[56]           De son côté, le défendeur soumet que la Cour ne devrait pas entendre les présentes demandes en contrôle judiciaire en mandamus qui sont devenues académiques du fait que l’employeur s’est acquitté du devoir de faire enquête au sujet des plaintes de harcèlement, tandis que la sous-ministre a rendu une décision finale rejetant les griefs de la demanderesse. Il n’y a aucune atteinte à un droit de nature quasi-constitutionnelle, ni aucune comparaison possible avec le processus d’examen de plaintes et d’enquête en matière de divulgation d’actes répréhensibles et de représailles contre un fonctionnaire divulgateur que l’on retrouve dans la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles, LC 2005, c 46. De plus, la Cour n’a pas le pouvoir d’accueillir les griefs, que ce soit par le biais d’une déclaration judiciaire ou autrement. De toute façon, un bref de mandamus ne peut être émis pour forcer l’exercice d’un pouvoir discrétionnaire d’une façon particulière. Le seul recours disponible, c’est la présentation d’une demande de contrôle judiciaire pour faire réviser la décision finale de la sous-ministre. Le problème – celui-là d’ordre procédural – c’est que la demanderesse ne peut aujourd’hui convertir sa demande en mandamus en une demande d’annulation de la décision de la sous-ministre. Subsidiairement, la décision rendue est à tous égard raisonnable. Il n’empêche, même si la sous-ministre a commis une erreur révisable – ce qui est nié –, la Cour ne peut que casser la décision et retourner l’affaire à la sous-ministre pour redétermination.

[57]           Ayant considéré les critères mentionnés dans l’arrêt Borowski c Canada, 1989 CanLII 123 (CSC), [1989] 1 RCS 342, [1989] ACS no 14 au paragraphe 16 [Borowski], il y a lieu d’entendre les présentes demandes en contrôle judiciaire en mandamus et de rendre un jugement final disposant du mérite de l’affaire.

[58]           La question du caractère présumément théorique d’un recours en mandamus a été soulevée tardivement par le défendeur. Plusieurs mois se sont écoulés depuis que la sous-ministre a rendu une décision finale le 22 juillet 2016. Aucune requête en radiation n’a été présentée par le défendeur. Le 29 décembre 2016, deux jours d’audition ont été fixés par l’Administratrice judiciaire. Le 4 avril 2017, la Cour a effectivement entendu les représentations orales des procureurs concernant l’ensemble des questions soulevées par les parties dans leurs mémoires respectifs. Dans ses mémoires du 22 novembre 2016 et lors de l’audition du 4 avril 2017, le défendeur a continué d’exiger le rejet, avec dépens, des trois demandes de contrôle judiciaire, et ce n’est qu’au terme de la journée que la procureure du défendeur a finalement laissé la question des dépens à la discrétion de la Cour. Ne serait-ce que pour la question des dépens, les présentes demandes en contrôle judiciaire en mandamus ne sont pas académiques.

[59]           D’ailleurs, la demanderesse continue de soutenir qu’elle n’a pas besoin d’amender ses procédures et qu’elle a droit à l’émission d’un bref de mandamus ou à une déclaration judiciaire de la Cour accueillant les griefs. Subsidiairement, son procureur fait valoir que la conclusion dans les avis introductifs d’instance à l’effet de « RENDRE toute autre ordonnance que cette Cour pourrait juger opportun d’accorder » permet à la Cour d’annuler et de casser la décision du 22 juillet 2016, d’autant plus que le défendeur s’appuie sur celle-ci et plaide subsidiairement qu’il n’y a pas lieu d’intervenir parce que les conclusions de la sous-ministre s’appuient sur la preuve au dossier et sont raisonnables en l’espèce.

[60]           L’article 301 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106 [Règles], prévoit qu’une demande de contrôle judiciaire (ou autre type de demande) est introduite par un avis de demande qui contient notamment un énoncé complet et concis des motifs que le demandeur entend invoquer, ainsi que de la réparation demandée. Il ne s’agit pas d’une affaire où l’absence de la production du matériel en la possession (dossier certifié) de l’office fédéral – facultatif selon l’article 317 – rend impossible l’examen de la décision rendue le 22 juillet 2016. En l’espèce, les deux parties ont présenté des affidavits détaillés et de nombreux documents pertinents permettant à la Cour de rendre une décision éclairée sur leurs arguments respectifs, incluant la raisonnabilité de la décision de la sous-ministre de rejeter les griefs de la demanderesse. Le défendeur n’a pas démontré en quoi le non-respect des Règles lui a causé un préjudice quelconque. Le défendeur n’a pas présenté aucune preuve ou argument convaincant à l’effet qu’il a été pris par surprise ou que cela a nui à la préparation de son dossier ou de ses observations touchant le mérite des présentes demandes en contrôle judiciaire. Enfin, il serait contraire aux meilleurs intérêts de la justice de ne pas statuer aujourd’hui sur le mérite des arguments subsidiaires des parties au sujet de la raisonnabilité de la décision rendu en juillet 2016 par la sous-ministre au motif que la demanderesse aurait dû contester celle-ci dans une procédure judiciaire distincte.

[61]           Ayant considéré l’ensemble des arguments soulevés au mérite par les parties, la Cour conclut que la demanderesse n’a pas droit à l’émission d’un bref de mandamus, ni aux déclarations recherchées en l’espèce. Les prétentions subsidiaires de la demanderesse sont également non fondées. La décision finale rendue le 22 juillet 2016 par la sous-ministre est raisonnable. Il n’y a pas lieu d’ordonner la tenue d’une nouvelle enquête ou encore d’annuler la décision finale de la sous-ministre rejetant les griefs de la demanderesse.

[62]           D’une part, le recours en mandamus de la demanderesse ne rencontre pas toutes les conditions mentionnées dans Apotex. De fait, le 9 août 2005, l’employeur a effectivement donné suite à la demande d’enquête de la demanderesse (griefs 500357 et 500360). L’enquêteur a produit son rapport final en mars 2007. Il a interrogé 22 témoins en plus de la demanderesse et des mises en cause. Il serait abusif et impraticable aujourd’hui de tenir une nouvelle enquête.

[63]           D’autre part, plusieurs remèdes recherchés à l’époque par la demanderesse dans les griefs 500357 (T-1151-16), 500358 et 500359 du 29 avril 2005, le grief 500360 du 28 juillet 2005 (T‑1150-16), le grief 500450 du 18 janvier 2006, et finalement le grief 501048 du 2 mai 2007 (T‑1153-16) n’ont plus d’objet véritable ou pratique aujourd’hui.

[64]           Notamment, la demande de séparation de la demanderesse et des mises en cause durant la durée de l’enquête (grief 500358) est devenue académique après le 9 mai 2005, puisque la demanderesse n’est pas retournée dans son poste au ministère. Le départ à la retraite de la gestionnaire déléguée, Mme Mousseau, le 31 mai 2005, fait en sorte que les mesures disciplinaires réclamées par la demanderesse dans sa plainte du 28 juin 2005 ne peuvent pas être accordées par l’employeur (grief 500360), tandis qu’après douze ans (2005-2017), on peut légitimement se demander si les deux mises en cause, Mme Encarnacion et Mme Somma, sont encore à l’emploi du ministère (grief 501048).

[65]           De plus, la demanderesse n’a pas été supervisée par les mises en cause depuis le 9 mai 2005 et elle n’est plus à l’emploi du ministère depuis le 10 mai 2010. Par conséquent, toute déclaration à l’effet que les dispositions de la Politique sur le harcèlement visant à offrir un milieu de travail libre de harcèlement ne sont toujours pas respectés, suite au dépôt de la plainte mars 2005 et du rapport de l’enquêteur en mars 2007, n’a aucune raison d’être aujourd’hui (grief 501048).

[66]           Par ailleurs, la demanderesse n’a pas contesté devant la Cour l’impartialité de l’enquêteur, ni la légalité de la décision prise par l’employeur de nommer ce dernier, de sorte que tout grief contestant sa nomination est sans objet ou académique aujourd’hui (grief 500450).

[67]           Reste les questions d’ordre monétaire qui ont fait l’objet de griefs particuliers suite aux plaintes des 30 mars et 28 juin 2005. En l’occurrence, si l’employeur n’a pas respecté la Politique sur le harcèlement, la demanderesse avait possiblement une réclamation à faire valoir pour tout préjudice (matériel ou moral) directement relié à la situation de harcèlement dont elle dit avoir été l’objet et au retard conséquent de la gestion de prendre immédiatement action.

[68]           De fait, la plainte de harcèlement a été déposée le 31 mars 2005. Avant cette date, l’employeur n’avait aucune obligation en vertu de la Politique sur le harcèlement de faire enquête. De plus, la demanderesse devait fournir suffisamment de précisions dans sa plainte pour que le processus d’enquête soit enclenché. Or, la demanderesse a refusé en avril 2005 de fournir les précisions requises par la gestionnaire délégué et elle a été mise en arrêt de travail le 9 mai 2005, puis en juillet 2005, elle a accepté une affectation temporaire dans un autre ministère.

[69]           La réclamation pour les trois heures de temps supplémentaire non payées à l’époque où la demanderesse travaillait sous la supervision des mises en cause a été accordée au deuxième palier de grief le 3 juillet 2008, avec l’accueil du grief 500359. Pour ce qui est de la réclamation – non chiffrée par demanderesse devant la Cour – pour les préjudices financiers et moraux qu’elle dit avoir subis parce qu’une enquête n’a pas été menée avec célérité concernant les plaintes du 31 mars et 28 juin 2005 (griefs 500357, 500360 et 501048), celle-ci a été catégoriquement refusée au troisième palier le 22 juillet 2016.

[70]           En effet, la sous-ministre a déterminé que « [l]a gestionnaire déléguée, madame Mousseau, n’a jamais refusé de traiter [la] plainte [du 30 mars 2005], bien au contraire dans sa lettre du 15 avril 2015, la gestion tentait d’obtenir des informations additionnelles pour déterminer la meilleure approche dans le dossier » (grief 500357). La sous-ministre a en outre déterminé que « la gestion n’a pas refusé de traiter [la] plainte [du 28 juin 2005] », tandis que « [la] gestionnaire déléguée était sous l’impression que le processus informel allait de l’avant » (grief 500360). S’agissant de ce qui a pu arriver après le dépôt des plaintes du 31 mars et du 28 juin 2005, la sous-ministre note que la demanderesse « n’a pas été supervisée par les mises en cause depuis mai 2005 », de sorte qu’il lui « est difficile de concevoir que la gestion n’a pas respecté les politiques et la convention collective et [n’a pas offert à la demanderesse] un milieu de travail libre de harcèlement » (grief 501048).

[71]           La demanderesse voudrait maintenant que la Cour accueille les griefs 500357, 500360 et 501048. En somme, la demanderesse invite la Cour à ne pas tenir compte du fait qu’une décision finale de la sous-ministre a été rendue le 22 juillet 2016 sur le mérite des griefs en question. Je suis d’accord avec le défendeur qu’il n’y a ici aucune atteinte à un droit de nature quasi-constitutionnelle, ni aucune comparaison possible avec le processus d’examen de plaintes et d’enquête en matière de divulgation d’actes répréhensibles et de représailles contre un fonctionnaire divulgateur. La Cour n’a pas le pouvoir d’accueillir les griefs que ce soit par le biais d’une déclaration judiciaire ou autrement. Il n’appartient pas à la Cour de passer outre le système de règlement des griefs dans la fonction publique qui a été établi par le Parlement (Vaughan au para 39). Or, le mécanisme approprié pour examiner la légalité d’une décision rendue au troisième palier de la procédure de grief par la sous-ministre est la demande de contrôle judiciaire. Certes, la Cour peut contraindre un décideur à réétudier une affaire, mais celle-ci ne peut dicter le résultat d’un tel processus, sinon dans des cas exceptionnels où la mauvaise foi, l’esprit fermé ou le parti pris du décideur justifient un verdict dirigé (Canada (Ministre du développement des ressources humaines) c Rafuse, 2002 CAF 31, [2002] ACF no 91 au para 14; Freeman c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 1065, [2013] ACF no 1148 au para 78; Lebon c Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2012 CF 1500, [2012] ACF n1600 conf. 2013 CAF 55, [2013] ACF no 196; Canada (Citoyenneté et Immigration) c Yansane, 2017 CAF 48, [2017] ACF no 264 aux paras 16-17). Selon la preuve au dossier, ce n’est pas le cas en l’espèce.

[72]           Il y a effectivement eu une enquête sérieuse et complète par un enquêteur indépendant et impartial au sujet des allégations de harcèlement. Au risque de me répéter, en mars 2007, l’enquêteur a produit son rapport final qui fait 56 pages. L’enquêteur conclut que l’ensemble des allégations de la demanderesse sont non fondées. Outre le fait que l’enquêteur remette en question l’existence d’une plainte formelle de harcèlement en 2004 (courriel daté du 1er avril 2004), plusieurs évènements survenus en 2004 et 2005 sont examinés de manière minutieuse dans le rapport final. L’enquêteur constate que les relations entre la demanderesse et les mises en cause sont devenues tendues au point d’être dysfonctionnelles. L’enquêteur note que ce n’est pas une situation nouvelle. En effet, la totalité des personnes interrogées ont mentionné qu’elles avaient eu des sérieuses difficultés relationnelles avec la demanderesse. La demanderesse a eu l’occasion de faire valoir son point de vue et la qualité de l’enquête n’est pas en cause. Tout au plus, la demanderesse tire des conclusions différentes des mêmes faits rapportés par l’enquêteur.

[73]           La demanderesse n’a pas non plus attaqué la légalité de la décision rendue le 26 mars 2007 par le nouveau gestionnaire sous l’autorité de la Politique sur le harcèlement. Tel que déjà noté plus haut, le nouveau gestionnaire conclut que « [a]près étude du rapport, [il est] satisfait que toute l’information disponible a été prise en considération » et conclut qu’il est « en accord avec les conclusions de l’enquête ». Or, plutôt que de déposer une demande de contrôle judiciaire (voir Thomas c Canada (Procureur général), 2013 CF 292, [2013] ACF no 319), la demanderesse a choisi de contester la décision du nouveau gestionnaire par un grief déposé le 2 mai 2007 (grief 501048), en demandant que celui-ci soit référé au deuxième palier de la procédure de grief.

[74]           La demanderesse ne m’a pas convaincu qu’il y a lieu d’intervenir en l’espèce. Le 3 juillet 2008, au deuxième palier, le nouveau gestionnaire a refusé l’ensemble des griefs de la demanderesse faisant suite au traitement de sa plainte de harcèlement du 31 mars 2005, incluant les griefs 500357, 500360, 501048 et 500450. Le 22 juillet 2016, la sous-ministre s’est, à son tour, prononcée sur la question des délais dans le traitement de la plainte de harcèlement du 31 mars 2005. Elle s’est déclarée satisfaite du respect de la Politique sur le harcèlement. De fait, les extraits du rapport d’enquête produits à la Cour par la demanderesse appuient généralement les conclusions du nouveau gestionnaire (deuxième palier) et de la sous-ministre (troisième palier) à l’effet que les plaintes de harcèlement sont non fondées.

[75]           Faut-il le rappeler, la demanderesse a été rencontrée par l’enquêteur. Elle a eu l’occasion de fournir sa version des faits et de commenter le rapport d’enquête avant sa parution finale. Il était donc raisonnable pour la sous-ministre de rejeter au troisième palier les griefs de la demanderesse ayant trait au comportement des mises en cause, et ce, même en tenant compte du fait que selon l’enquêteur, le « style de gestion des répondantes [les mises en cause] était pour le moins rigide ».

[76]           La demanderesse prétend subsidiairement qu’« une lecture moindrement objective des conclusions de faits de l’enquêteur et des témoignages produits dans le cadre de cette enquête démontre clairement que [la] conclusion du défendeur est manifestement déraisonnable », en prenant comme exemple le fait que l’enquêteur ait noté dans son rapport :

Deux intervenants dans cette affaire ont aussi dit qu’à l’occasion Mme Somma et Mme Encarnacion ont possiblement manqué de discrétion et de tact lorsqu’elles discutaient de problèmes avec Mme Gagnon. Ces personnes citent par exemple des conversations entre ces personnes alors que leurs portes de bureaux étaient ouvertes.

[77]           La demanderesse fait une lecture sélective des observations de l’enquêteur. Il faut lire son rapport dans son ensemble. En dernière analyse, l’enquêteur est d’avis que ses allégations de harcèlement ne sont pas fondées, et ce, suite à une enquête exhaustive au niveau de chacune de ses 33 allégations mentionnées dans son rapport. Bien que certaines actions des mises en cause, prises isolément, pourraient être interprétées comme du harcèlement par la demanderesse, cela n’est pas suffisant en l’espèce pour que la Cour se substitue à l’enquêteur et à l’employeur.

[78]           Pour ces motifs, les demandes de contrôle judiciaire dans les dossiers T-1150-16, T‑1151-16 et T-1153-16 sont rejetées. Vu le résultat final, le défendeur a droit aux dépens. Toutefois, dans l’exercice de sa discrétion, la Cour est d’avis que l’octroi au défendeur d’un montant global de 1 500 $ est raisonnable, considérant la nature des procédures et les questions débattues, le comportement et la situation des parties, les délais en cause et les circonstances particulières de l’affaire.


JUGEMENT

LA COUR STATUE que les demandes de contrôle judiciaire dans les dossiers T‑1150‑16, T-1151-16 et T-1153-16 sont rejetées. Des dépens de 1 500 $ pour l’ensemble des trois dossiers sont accordés au défendeur.

« Luc Martineau »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-1150-16

 

INTITULÉ :

MICHELLE GAGNON c LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA (LE MINISTÈRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION DU CANADA)

 

ET DOSSIER :

T-1151-16

 

INTITULÉ :

MICHELLE GAGNON c LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA (LE MINISTÈRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION DU CANADA)

 

ET DOSSIER :

T-1153-16

 

INTITULÉ :

MICHELLE GAGNON c LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA (LE MINISTÈRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION DU CANADA)

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Québec (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 4 avril 2017

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE MARTINEAU

 

DATE DES MOTIFS :

LE 19 avril 2017

 

COMPARUTIONS :

Me Yves Picard

 

Pour la demanderesse

Me Zorica Guzina

 

Pour le défendeur


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Picard Sirard Poitras

Québec (Québec)

 

Pour la demanderesse

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

 

Pour le défendeur

 

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