Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20170502


Dossier : IMM-1321-16

Référence : 2017 CF 441

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Toronto (Ontario), le 2 mai 2017

En présence de madame la juge Heneghan

ENTRE :

MOHAMAD NOUREDDINE AL MOUSSAWI

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]  M. Mohamad Noureddine Al Moussawi (le demandeur) demande le contrôle judiciaire de la décision de la Section d’appel des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié rejetant son appel d’une décision de la Section de la protection des réfugiés refusant sa demande d’asile, en application de l’article 96 et du paragraphe 97(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27.

[2]  Le demandeur est un citoyen du Liban. Il est arrivé au Canada le 29 novembre 2013 et il a présenté une demande d’asile parce qu’il avait critiqué publiquement le Hezbollah. La Section de la protection des réfugiés a rejeté la demande pour des motifs liés à la crédibilité, plus précisément le défaut du demandeur d’avoir demandé l’asile en Europe.

[3]  De la même manière, la Section d’appel des réfugiés a rejeté l’appel du demandeur pour des motifs liés à la crédibilité, en indiquant que la preuve [traduction] « montre clairement que l’appelant a l’habitude de ne pas être sincère ou franc dans ses déclarations aux autorités d’un pays ».

[4]  En l’espèce, le demandeur affirme que la Section d’appel des réfugiés a commis une erreur dans son examen du rapport psychologique présenté à la Section de la protection des réfugiés. Le rapport traite de son incapacité à fournir un [traduction] « témoignage cohérent ». Ni la Section de la protection des réfugiés ni la Section d’appel des réfugiés n’ont tiré de conclusions explicites relativement à la crédibilité en s’appuyant sur ce rapport.

[5]  Le demandeur soutient que la Section d’appel des réfugiés aurait dû analyser sa crédibilité en tenant compte du contenu du rapport psychologique.

[6]  Le demandeur affirme également que la Section d’appel des réfugiés a tiré une conclusion de fait erronée lorsqu’elle a mentionné qu’il n’existait pas de demande de parrainage à titre de conjoint et il soutient que l’issue de la cause aurait été différente si cette erreur n’avait pas été commise.

[7]  Le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration (le défendeur) affirme que la Section d’appel des réfugiés a examiné le rapport psychologique et qu’elle n’a commis aucune erreur fatale quant au poids qu’elle lui a accordé.

[8]  Bien que la Section d’appel des réfugiés ait indiqué que la Section de la protection des réfugiés a commis une erreur en omettant d’examiner le rapport, le défendeur prétend que ladite erreur a été corrigée lorsque la Section d’appel des réfugiés a examiné le rapport.

[9]  Le défendeur s’oppose à l’inclusion par le demandeur de rapports psychologiques sur son état mental qui n’ont été présentés ni à la Section de la protection des réfugiés ni à la Section d’appel des réfugiés.

[10]  La première question à trancher est celle de la norme de contrôle applicable, en commençant par la norme de contrôle que la Cour doit appliquer à la décision de la Section d’appel des réfugiés.

[11]  La Cour d’appel fédérale a statué sur cette question dans l’arrêt Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Huruglica (2016), 396 DLR (4th) 527, au paragraphe 35, lorsqu’elle a indiqué que la norme de contrôle appropriée à appliquer par la Cour lors de l’examen d’une décision de la Section d’appel des réfugiés est la norme de la décision raisonnable. Conformément à la décision dans l’arrêt Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, [2008] 1 RCS 190, au paragraphe 47, une décision satisfait à cette norme lorsqu’elle est intelligible, transparente et justifiable et qu’elle appartient aux issues possibles et acceptables à l’égard des faits et du droit.

[12]  La deuxième question à trancher est celle de la norme de contrôle que la Section d’appel des réfugiés doit appliquer lorsqu’un appel d’une décision de la Section de la protection des réfugiés est interjeté devant elle.

[13]  Lors du contrôle judiciaire d’une décision de la Section d’appel des réfugiés, la cour réformatrice doit examiner la norme de contrôle que la Section d’appel des réfugiés a appliquée à la décision de la Section de la protection des réfugiés. Dans l’arrêt Huruglica, précité, la Cour d’appel fédérale a indiqué ce qui suit, au paragraphe 77 :

[...] Si je l’interprète en fonction du régime législatif et de ses objectifs, je ne trouve rien dans la LIPR qui justifie le recours à une norme du caractère raisonnable ou de l’erreur manifeste et dominante pour analyser les conclusions de fait, ou les conclusions mixtes de fait et de droit de la SAR.

[14]  Selon la décision rendue par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, précité, il n’y a habituellement que deux normes de contrôle, soit la norme de la décision raisonnable et celle de la décision correcte. Si la norme de la décision raisonnable ne s’applique pas, il ne reste que la norme de la décision correcte qui peut être appliquée par la Section d’appel des réfugiés lors de son examen de certaines questions soumises à la Section de la protection des réfugiés.

[15]  Au paragraphe 103 de l’arrêt Huruglica, précité, la Cour d’appel fédérale a conclu ce qui suit :

Au terme de mon analyse des dispositions législatives, je conclus que, concernant les conclusions de fait (ainsi que les conclusions mixtes de fait et de droit) comme celle dont il est question ici, laquelle ne soulève pas la question de la crédibilité des témoignages de vive voix, la SAR doit examiner les décisions de la SPR en appliquant la norme de la décision correcte. Ainsi, après examen attentif de la décision de la SPR, la SAR doit effectuer sa propre analyse du dossier afin de décider si la SPR a bel et bien commis l’erreur alléguée par l’appelant. Après cette étape, la SAR peut statuer sur l’affaire de manière définitive, soit en confirmant la décision de la SPR, soit en cassant celle-ci et en y substituant sa propre décision sur le fond de la demande d’asile. [...]

[16]  À mon avis, le paragraphe précité indique que la Section d’appel des réfugiés doit appliquer la norme de la décision correcte lorsqu’elle examine les décisions de la Section de la protection des réfugiés qui ne soulèvent pas la question de la crédibilité des témoignages de vive voix. Les questions relatives à la crédibilité sont susceptibles de faire l’objet d’un examen selon la norme de la décision raisonnable.

[17]  La question déterminante en l’espèce concerne les conclusions défavorables quant à la crédibilité tirées par la Section d’appel des réfugiés.

[18]  J’ai examiné le dossier certifié du tribunal et les arguments des parties, tant écrits qu’oraux.

[19]  Il était loisible à la Section d’appel des réfugiés de tirer une conclusion défavorable quant à la crédibilité. Cette conclusion appartient aux « issues acceptables ». Le rapport psychologique que la Section d’appel des réfugiés a examiné ne peut servir à mettre de côté les autres éléments de preuve, y compris le témoignage du demandeur. La décision satisfait à la norme de contrôle applicable, soit la norme de la décision raisonnable.

[20]  Par conséquent, la présente demande de contrôle judiciaire est rejetée sans aucune question à certifier.

 


JUGEMENT

LA COUR ORDONNE QUE la demande de contrôle judiciaire soit rejetée sans aucune question à certifier.

« E. Heneghan »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 12e jour d’août 2019

Lionbridge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-1321-16

 

INTITULÉ :

MOHAMAD NOUREDDINE AL MOUSSAWI c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

OTTAWA (ONTARIO)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 23 NOVEMBRE 2016

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE HENEGHAN

 

DATE DES MOTIFS :

LE 2 MAI 2017

 

COMPARUTIONS :

Jonathan Richard Lage

POUR LE DEMANDEUR

 

Abigail Martinez

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Jonathan Richard Lage

Avocat

Manotick (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

William F. Pentney, c.r.

Sous-procureur général du Canada

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.