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Date : 20170421


Dossier : IMM-3709-16

Référence : 2017 CF 389

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 21 avril 2017

En présence de monsieur le juge Russell

ENTRE :

NAVDEEP KAUR SRAN

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  INTRODUCTION

[1]  Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire présentée en application du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (Loi), à l’encontre de la décision rendue par la Section d’appel de l’immigration (SAI) de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada (CISR) le 5 août 2016 (la décision), qui rejetait l’appel interjeté par la demanderesse qui souhaitait parrainer la demande de résidence permanente au Canada de son père et de son frère à titre de membres de la catégorie du regroupement familial.

II.  RÉSUMÉ DES FAITS

[2]  La demanderesse est une citoyenne de l’Inde de 33 ans et résidente permanente du Canada depuis 2004. Elle est mariée et a trois enfants, nés en 2004, 2006 et 2013. Auparavant, elle était cosignataire de la demande de parrainage de son époux à l’égard des parents et du frère de ce dernier, de 2002 et 2012.

[3]  Le 5 juin 2008, la demanderesse a présenté une demande de parrainage pour son père et son frère de 17 ans. Au moment de sa demande, la famille de la demanderesse se composait d’elle-même, de son mari, de ses deux enfants, de ses beaux-parents, de son beau-frère, de son père et de son frère.

[4]  Avant l’examen de la demande, le Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 (Règlement) a été modifié et est entré en vigueur le 1er janvier 2014. Les modifications apportées au sous-alinéa 133(1)j)(i) du Règlement ont eu pour effet de hausser le revenu minimal requis (RMR) pour parrainer un parent ou un grand-parent, ce revenu devant désormais correspondre au seuil de faible revenu (SFR) plus 30 p. 100; le répondant devait également satisfaire à l’exigence relative au RMR durant chacune des trois années d’imposition consécutives précédant la date de dépôt de la demande. Le Règlement ne prévoyait aucune disposition transitoire.

[5]  Un agent des visas a refusé la demande le 3 juillet 2014 au motif que la demanderesse ne satisfaisait pas à l’exigence relative au RMR pour une famille de neuf, qui comprenait ses beaux-parents et son beau-frère. L’agent des visas a fondé le calcul financier sur le revenu combiné de la demanderesse et de son époux en 2007, l’année précédant la demande, qui était de 63 522 $. En d’autres termes, le revenu de la demanderesse était inférieur de 3 800 $ au RMR de 67 300 $.

[6]  La demanderesse a interjeté appel du refus devant la Section d’appel de l’immigration et l’affaire a été entendue le 21 juin 2016.

III.  DÉCISION FAISANT L’OBJET DU CONTRÔLE

[7]  Une décision rendue par un commissaire de la Section d’appel de l’immigration le 5 août 2016 a déterminé que le rejet de la demande était valide en droit et qu’une mesure spéciale n’était pas justifiée, vu les circonstances de l’affaire.

[8]  Dans son appréciation quant à savoir si le rejet était valide en droit, la Section d’appel de l’immigration a appliqué la décision dans Gill c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 1522 [Gill]. Dans Gill, le juge en chef Crampton a conclu que la demande de parrainage de la répondante ne pouvait pas être tranchée sous le régime de la version antérieure du Règlement, car les personnes qui présentent de telles demandes n’acquièrent aucun droit avant que n’aient été remplies toutes les conditions préalables à l’exercice du droit dont elles souhaitent se prévaloir par leur demande. Dans le contexte des audiences de la Section d’appel de l’immigration, qui sont de novo de par leur nature, le Règlement applicable à une décision dans un appel correspond à la version en vigueur au moment où les parties présentent leurs demandes à la Section d’appel de l’immigration ou, s’ils complètent leurs arguments écrits antérieurs par des témoignages au moment de l’audience, le Règlement en vigueur à ce moment-là.

[9]  La Section d’appel de l’immigration a également envisagé invoquer R c Dineley, 2012 CSC 58 [Dineley]; Patel c Le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, [2014] DSAI no 389 [B. Patel]; et le Bulletin opérationnel 561 [BO 561]. Même si la Section d’appel de l’immigration a choisi de ne pas appliquer la première décision, car elle faisait référence à une affaire criminelle, elle n’a pas appliqué non plus B. Patel et le BO 561 à la décision au motif que ni l’un ni l’autre n’avait force exécutoire pour la Section d’appel de l’immigration. La Section d’appel de l’immigration a confirmé le rejet.

[10]  La Section d’appel de l’immigration a ensuite examiné si une mesure spéciale était justifiée à la lumière des circonstances de l’affaire et a établi les facteurs qui seraient pris en considération, y compris les objectifs de la Loi.

[11]  La Section d’appel de l’immigration a indiqué que, au moment de l’évaluation en juillet 2014, la demanderesse n’était plus responsable du bien-être financier de ses beaux-parents et de son beau-frère; par conséquent, ces trois membres de la famille n’auraient pas dû faire partie du calcul financier. Cependant, la Section d’appel de l’immigration a conclu que la demanderesse n’aurait toujours pas satisfait au RMR pour les trois années précédant le calcul, car le revenu du ménage de la demanderesse était inférieur de 30 000 $ au RMR pour une famille de neuf en 2012 et inférieur de 16 400 $ au RMR pour une famille de sept en 2013. De plus, la Section d’appel de l’immigration a tenu compte du critère énoncé dans Jugpall c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1999] DSAI no 600 [Jugpall], mais a choisi d’appliquer le critère énoncé dans Chirwa c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1970] DCAI no 1 [Chirwa]; ce faisant, la Section d’appel de l’immigration a observé que le revenu du ménage de la demanderesse dépassait de 1 800 $ et de 3 200 $ le RMR pour une famille de sept en 2014 et en 2015, respectivement.

[12]  En tenant compte de la relation entre la demanderesse et les personnes parrainées, la Section d’appel de l’immigration a examiné l’intention de la demanderesse de parrainer son père lorsqu’elle a immigré au Canada en 2004 et son témoignage selon lequel elle avait besoin de son père et de son frère au Canada pour régler des problèmes qui étaient survenus dans la famille. Cependant, la Section d’appel de l’immigration a conclu que, malgré ses intentions, elle a immigré au Canada en sachant que l’immigration de sa famille n’était pas garantie. De plus, compte tenu du fait que la demanderesse communiquait avec son père et son frère trois ou quatre fois par semaine, la Section d’appel de l’immigration ne voyait pas en quoi leur présence effective serait requise pour entretenir leurs liens étroits.

[13]  L’intérêt supérieur des enfants constituait le deuxième élément à prendre en considération. La Section d’appel de l’immigration n’a relevé aucun élément de preuve qui indiquait que le bien-être émotionnel des enfants de la demanderesse dépendait de leur grand-père maternel ou de leur oncle maternel, ou que les enfants acquerraient une plus grande sensibilité culturelle du fait de leur présence au Canada, notamment parce que les grands-parents paternels et l’oncle paternel se trouvaient au Canada. En outre, les enfants ne dépendaient pas du soutien financier de leur grand-père maternel ou de leur oncle maternel.

[14]  La Section d’appel de l’immigration a ensuite évalué la situation du père et du frère de la demanderesse en Inde. La Section d’appel de l’immigration a tranché que le père n’éprouverait aucune difficulté découlant de la décision, car il était à l’aise financièrement et qu’il vivait dans la même ville que ses autres enfants et petits-enfants. De même, la Section d’appel de l’immigration a conclu que le frère n’éprouverait aucune difficulté en Inde, malgré la probabilité que sa sœur ne puisse pas le parrainer à l’avenir, car il avait plus de 18 ans. De plus, la Section d’appel de l’immigration n’a relevé aucun élément de preuve selon lequel le père et le frère de la demanderesse ne pourraient pas visiter le Canada à l’avenir ou présenter une demande de super visa.

[15]  La Section d’appel de l’immigration est arrivée à la conclusion que la demanderesse ne s’était pas acquittée du fardeau d’établir que des considérations d’ordre humanitaire (CH) justifiaient une mesure spéciale.

IV.  QUESTIONS EN LITIGE

[16]  La demanderesse soutient que les questions suivantes sont en litige dans la présente demande :

  • a) La Section d’appel de l’immigration a-t-elle commis une erreur de droit en appliquant le Règlement modifié qui est entré en vigueur le 1er janvier 2014, malgré le fait que la demande a été reçue le 5 juin 2008?

  • b) La Section d’appel de l’immigration a-t-elle commis une erreur de droit en omettant de prendre en considération tous les documents et en appliquant les exigences accrues en matière de revenu conformément au Règlement modifié dans son appréciation des facteurs d’ordre humanitaire?

[17]  Pour sa part, le défendeur soutient que les points en litige dans la présente demande s’énoncent comme suit :

  • a) La Section d’appel de l’immigration a-t-elle commis une erreur en appliquant la décision Gill, précitée, pour conclure que la division 133(1)j)(i)(B) actuelle du Règlement s’appliquait dans son appréciation du RMR? La Section d’appel de l’immigration a-t-elle commis une erreur en concluant que l’application du seuil inférieur dans Jugpall, précitée, devrait être orientée par le Règlement actuel?

  • b) La Section d’appel de l’immigration a-t-elle par ailleurs commis une erreur dans son appréciation de l’appel en matière de parrainage?

V.  NORME DE CONTRÔLE

[18]  Par l’arrêt Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9 (Dunsmuir), la Cour suprême du Canada a conclu qu’il n’est pas toujours nécessaire de se livrer à une analyse de la norme de contrôle. En effet, si la jurisprudence établit de manière satisfaisante la norme de contrôle applicable à une question particulière portée devant la cour de révision, celle-ci peut adopter cette norme. C’est uniquement lorsque cette démarche se révèle infructueuse ou que la jurisprudence semble incompatible avec l’évolution récente des principes de contrôle judiciaire en common law que la cour de révision doit procéder à une analyse des quatre facteurs de l’analyse relative à la norme de contrôle : arrêt Agraira c Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2013 CSC 36, au paragraphe 48.

[19]  En ce qui concerne le choix de la version du sous-alinéa 133(1)j)(i) qui s’applique à la décision de la Section d’appel de l’immigration dans les appels à l’encontre des décisions qui ont été prises avant le 1er janvier 2014, la Cour a conclu que la question soulève des préoccupations d’équité procédurale et commande l’application d’une norme de la décision correcte : Patel c Canada (Ministre de la Citoyenneté et Canada), 2016 CF 1221 [Patel], au paragraphe 18.

[20]  En ce qui concerne l’évaluation de la preuve par la Section d’appel de l’immigration et l’exercice de son pouvoir discrétionnaire en matière de CH, la norme est celle de la décision raisonnable : Patel, précitée, au paragraphe 19; Canada (Citoyenneté et Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12 [Khosa], au paragraphe 59.

[21]  Lorsqu’une décision est contrôlée selon la norme de la décision raisonnable, son analyse tient « à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit ». Voir l’arrêt Dunsmuir, précité, au paragraphe 47, et l’arrêt Khosa, précité. Autrement dit, la Cour devrait se garder d’intervenir si la décision contestée n’est pas déraisonnable, c’est-à-dire si elle appartient « aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit ».

VI.  DISPOSITIONS LÉGISLATIVES

[22]  Les dispositions suivantes de la Loi sont applicables en l’espèce :

Droit d’appel : visa

Right to appeal — visa refusal of family class

63 (1) Quiconque a déposé, conformément au règlement, une demande de parrainage au titre du regroupement familial peut interjeter appel du refus de délivrer le visa de résident permanent.

63 (1) A person who has filed in the prescribed manner an application to sponsor a foreign national as a member of the family class may appeal to the Immigration Appeal Division against a decision not to issue the foreign national a permanent resident visa.

Décision

Disposition

66 Il est statué sur l’appel comme il suit :

66 After considering the appeal of a decision, the Immigration Appeal Division shall

a) il y fait droit conformément à l’article 67;

(a) allow the appeal in accordance with section 67;

b) il est sursis à la mesure de renvoi conformément à l’article 68;

(b) stay the removal order in accordance with section 68; or

c) il est rejeté conformément à l’article 69.

(c) dismiss the appeal in accordance with section 69.

Fondement de l’appel

Appeal allowed

67 (1) Il est fait droit à l’appel sur preuve qu’au moment où il en est disposé :

67 (1) To allow an appeal, the Immigration Appeal Division must be satisfied that, at the time that the appeal is disposed of,

a) la décision attaquée est erronée en droit, en fait ou en droit et en fait;

(a) the decision appealed is wrong in law or fact or mixed law and fact;

b) il y a eu manquement à un principe de justice naturelle;

(b) a principle of natural justice has not been observed; or

c) sauf dans le cas de l’appel du ministre, il y a — compte tenu de l’intérêt supérieur de l’enfant directement touché — des motifs d’ordre humanitaire justifiant, vu les autres circonstances de l’affaire, la prise de mesures spéciales.

(c) other than in the case of an appeal by the Minister, taking into account the best interests of a child directly affected by the decision, sufficient humanitarian and compassionate considerations warrant special relief in light of all the circumstances of the case.

[23]  Les dispositions suivantes du Règlement qui était en vigueur le 1er janvier 2014 (le Règlement modifié) s’appliquent en l’espèce :

Définitions

Interpretation

2 Les définitions qui suivent s’appliquent au présent règlement.

2 The definitions in this section apply in these Regulations.

revenu vital minimum Le montant du revenu minimal nécessaire, dans les régions urbaines de 500 000 habitants et plus, selon la version la plus récente de la grille des seuils de faible revenu avant impôt, publiée annuellement par Statistique Canada au titre de la Loi sur la statistique, pour subvenir pendant un an aux besoins d’un groupe constitué dont le nombre correspond à celui de l’ensemble des personnes suivantes :

minimum necessary income means the amount identified, in the most recent edition of the publication concerning low income cut-offs that is published annually by Statistics Canada under the Statistics Act, for urban areas of residence of 500,000 persons or more as the minimum amount of before-tax annual income necessary to support a group of persons equal in number to the total number of the following persons:

a) le répondant et les membres de sa famille;

(a) a sponsor and their family members,

b) l’étranger parrainé et, qu’ils l’accompagnent ou non, les membres de sa famille;

(b) the sponsored foreign national, and their family members, whether they are accompanying the foreign national or not, and

c) toute autre personne — et les membres de sa famille — visée par :

(c) every other person, and their family members,

(i) un autre engagement en cours de validité que le répondant a pris ou cosigné,

(i) in respect of whom the sponsor has given or cosigned an undertaking that is still in effect, and

(ii) un autre engagement en cours de validité que l’époux ou le conjoint de fait du répondant a pris ou cosigné, si l’époux ou le conjoint de fait a cosigné l’engagement avec le répondant à l’égard de l’étranger visé à l’alinéa b).

(ii) in respect of whom the sponsor’s spouse or common-law partner has given or co-signed an undertaking that is still in effect, if the sponsor’s spouse or common-law partner has co-signed with the sponsor the undertaking in respect of the foreign national referred to in paragraph (b).

Regroupement familial

Member

117 (1) Appartiennent à la catégorie du regroupement familial du fait de la relation qu’ils ont avec le répondant les étrangers suivants :

117 (1) A foreign national is a member of the family class if, with respect to a sponsor, the foreign national is

a) son époux, conjoint de fait ou partenaire conjugal;

(a) the sponsor’s spouse, common-law partner or conjugal partner;

b) ses enfants à charge;

(b) a dependent child of the sponsor;

c) ses parents;

(c) the sponsor’s mother or father;

Parrainage

Approved sponsorship application

120 Pour l’application de la partie 5, l’engagement de parrainage doit être valide à l’égard de l’étranger qui présente une demande au titre de la catégorie du regroupement familial et à l’égard des membres de sa famille qui l’accompagnent, à la fois :

120 For the purposes of Part 5,

a) au moment où le visa est délivré;

(a) a permanent resident visa shall not be issued to a foreign national who makes an application as a member of the family class or to their accompanying family members unless a sponsorship undertaking in respect of the foreign national and those family members is in effect; and

b) au moment où l’étranger et les membres de sa famille qui l’accompagnent deviennent résidents permanents, à condition que le répondant qui s’est engagé satisfasse toujours aux exigences de l’article 133 et, le cas échéant, de l’article 137.

(b) a foreign national who makes an application as a member of the family class and their accompanying family members shall not become permanent residents unless a sponsorship undertaking in respect of the foreign national and those family members is in effect and the sponsor who gave that undertaking still meets the requirements of section 133 and, if applicable, section 137.

Engagement : durée

Undertaking — duration

132 (1) Sous réserve du paragraphe (2), le répondant s’engage à rembourser à Sa Majesté du chef du Canada ou de la province en cause les prestations fournies à titre d’assistance sociale à l’étranger parrainé, ou pour son compte, ou aux membres de la famille de celui-ci, ou pour leur compte :

132 (1) Subject to subsection (2), the sponsor’s undertaking obliges the sponsor to reimburse Her Majesty in right of Canada or a province for every benefit provided as social assistance to or on behalf of the sponsored foreign national and their family members during the period

a) à compter, selon le cas :

(a) beginning

(i) si l’étranger parrainé est entré au Canada muni d’un permis de séjour temporaire, du jour de son entrée,

(i) if the foreign national enters Canada with a temporary resident permit, on the day of that entry,

(ii) si l’étranger parrainé est déjà au Canada, du jour où il obtient un permis de séjour temporaire à la suite d’une demande de séjour au Canada à titre de résident permanent,

(ii) if the foreign national is in Canada, on the day on which the foreign national obtains a temporary resident permit following an application to remain in Canada as a permanent resident, and

(iii) dans tout autre cas, de la date à laquelle l’étranger devient résident permanent;

(iii) in any other case, on the day on which the foreign national becomes a permanent resident; and

Exigences : répondant

Requirements for sponsor

133 (1) L’agent n’accorde la demande de parrainage que sur preuve que, de la date du dépôt de la demande jusqu’à celle de la décision, le répondant, à la fois :

133 (1) A sponsorship application shall only be approved by an officer if, on the day on which the application was filed and from that day until the day a decision is made with respect to the application, there is evidence that the sponsor

j) dans le cas où il réside :

(j) if the sponsor resides

(i) dans une province autre qu’une province visée à l’alinéa 131b) :

(i) in a province other than a province referred to in paragraph 131(b),

(A) a un revenu total au moins égal à son revenu vital minimum, s’il a déposé une demande de parrainage à l’égard d’un étranger autre que l’un des étrangers visés à la division (B),

(A) has a total income that is at least equal to the minimum necessary income, if the sponsorship application was filed in respect of a foreign national other than a foreign national referred to in clause (B), or

(B) a un revenu total au moins égal à son revenu vital minimum, majoré de 30 %, pour chacune des trois années d’imposition consécutives précédant la date de dépôt de la demande de parrainage, s’il a déposé une demande de parrainage à l’égard de l’un des étrangers suivants :

(B) has a total income that is at least equal to the minimum necessary income, plus 30%, for each of the three consecutive taxation years immediately preceding the date of filing of the sponsorship application, if the sponsorship application was filed in respect of a foreign national who is

(I) l’un de ses parents,

(I) the sponsor’s mother or father,

(II) le parent de l’un ou l’autre de ses parents,

(II) the mother or father of the sponsor’s mother or father, or

(III) un membre de la famille qui accompagne l’étranger visé aux subdivisions (I) ou (II),

(III) an accompanying family member of the foreign national described in subclause (I) or (II), and

Règles de calcul du revenu

Income calculation rules

134 (1) Sous réserve du paragraphe (3) et pour l’application de la division 133(1)j)(i)(A), le revenu total du répondant est calculé selon les règles suivantes :

134 (1) Subject to subsection (3), for the purpose of clause 133(1)(j)(i)(A), the sponsor’s total income shall be calculated in accordance with the following rules:

a) le calcul du revenu se fait sur la base du dernier avis de cotisation qui lui a été délivré par le ministre du Revenu national avant la date de dépôt de la demande de parrainage, à l’égard de l’année d’imposition la plus récente, ou tout document équivalent délivré par celui-ci;

(a) the sponsor’s income shall be calculated on the basis of the last notice of assessment, or an equivalent document, issued by the Minister of National Revenue in respect of the most recent taxation year preceding the date of filing of the sponsorship application;

b) si le répondant produit un document visé à l’alinéa a), son revenu équivaut à la différence entre la somme indiquée sur ce document et les sommes visées aux sous-alinéas c)(i) à (v);

(b) if the sponsor produces a document referred to in paragraph (a), the sponsor’s income is the income earned as reported in that document less the amounts referred to in subparagraphs (c)(i) to (v);

c) si le répondant ne produit pas de document visé à l’alinéa a) ou si son revenu calculé conformément à l’alinéa b) est inférieur à son revenu vital minimum, son revenu correspond à l’ensemble de ses revenus canadiens gagnés au cours des douze mois précédant la date du dépôt de la demande de parrainage, exclusion faite de ce qui suit :

(c) if the sponsor does not produce a document referred to in paragraph (a), or if the sponsor’s income as calculated under paragraph (b) is less than their minimum necessary income, the sponsor’s Canadian income for the 12-month period preceding the date of filing of the sponsorship application is the income earned by the sponsor not including

(i) les allocations provinciales reçues au titre de tout programme d’éducation ou de formation,

(i) any provincial allowance received by the sponsor for a program of instruction or training,

(ii) toute somme reçue d’une province au titre de l’assistance sociale,

(ii) any social assistance received by the sponsor from a province,

(iii) toute somme reçue du gouvernement du Canada dans le cadre d’un programme d’aide pour la réinstallation,

(iii) any financial assistance received by the sponsor from the Government of Canada under a resettlement assistance program,

(iv) les sommes, autres que les prestations spéciales, reçues au titre de la Loi sur l’assurance-emploi,

(iv) any amounts paid to the sponsor under the Employment Insurance Act, other than special benefits,

(v) tout supplément de revenu mensuel garanti reçu au titre de la Loi sur la sécurité de la vieillesse,

(v) any monthly guaranteed income supplement paid to the sponsor under the Old Age Security Act, and

(vi) les allocations canadiennes pour enfants reçues au titre de la Loi de l’impôt sur le revenu;

(vi) any Canada child benefit paid to the sponsor under the Income Tax Act; and

d) le revenu du cosignataire, calculé conformément aux alinéas a) à c), avec les adaptations nécessaires, est, le cas échéant, inclus dans le calcul du revenu du répondant.

(d) if there is a co-signer, the income of the co-signer, as calculated in accordance with paragraphs (a) to (c), with any modifications that the circumstances require, shall be included in the calculation of the sponsor’s income.

[24]  Les dispositions suivantes du Règlement qui était en vigueur le 31 décembre 2013 (le Règlement de 2013) s’appliquent en l’espèce :

Exigences : répondant

Requirements for sponsor

133 (1) L’agent n’accorde la demande de parrainage que sur preuve que, de la date du dépôt de la demande jusqu’à celle de la décision, le répondant, à la fois :

133 (1) A sponsorship application shall only be approved by an officer if, on the day on which the application was filed and from that day until the day a decision is made with respect to the application, there is evidence that the sponsor

j) dans le cas où il réside :

(j) if the sponsor resides

(i) dans une province autre qu’une province visée à l’alinéa 131b), a eu un revenu total au moins égal à son revenu vital minimum,

(i) in a province other than a province referred to in paragraph 131(b), has a total income that is at least equal to the minimum necessary income, and

(ii) dans une province visée à l’alinéa 131b), a été en mesure, aux termes du droit provincial et de l’avis des autorités provinciales compétentes, de respecter l’engagement visé à cet alinéa;

(ii) in a province referred to in paragraph 131(b), is able, within the meaning of the laws of that province and as determined by the competent authority of that province, to fulfil the undertaking referred to in that paragraph; and

VII.  THÈSES DES PARTIES

A.  Demanderesse

1)  Application du Règlement

[25]  La demanderesse fait valoir que la Section d’appel de l’immigration a commis une erreur de droit en omettant d’analyser la validité du rejet par l’agent des visas.

[26]  L’agent des visas a rejeté la demande de parrainage de la demanderesse au motif qu’elle ne satisfaisait pas au RMR pour une famille de neuf. Toutefois, au moment de l’évaluation en 2014, la demanderesse n’était plus responsable du bien-être financier de ses beaux-parents et de son beau-frère; l’évaluation du RMR aurait dû porter sur une famille de sept. En 2014, le RMR pour une famille de sept était de 57 974 $ et le revenu du ménage de la demanderesse était de 66 530 $ en 2013; 83 200 $ en 2014; et 85 325 $. De plus, la Section d’appel de l’immigration a observé dans la décision que l’agent des visas aurait dû éliminer les beaux-parents et le beau-frère du calcul après 2012.

[27]  La demanderesse fait également valoir qu’il était injuste que l’agent des visas évalue son revenu de 2007. La demande était en traitement depuis cinq ans et aurait dû être évaluée en fonction du revenu récent.

2)  Évaluation CH

[28]  La demanderesse fait valoir que la Section d’appel de l’immigration a manqué à l’équité procédurale dans son examen des motifs CH pour l’octroi d’une mesure spéciale en omettant de prendre en considération tous les documents et d’appliquer le RMR majoré comme l’exige le Règlement modifié qui est entré en vigueur le 1er janvier 2014.

[29]  Pour étayer son argument, la demanderesse cite deux arrêts de la Cour suprême du Canada. Dans Colombie-Britannique c Imperial Tobacco Canada Ltée, 2005 CSC 49, au paragraphe 71, il est déclaré : « Il n’existe aussi aucune exigence générale que la législation ait une portée uniquement prospective, même si une loi rétrospective et rétroactive peut renverser des expectatives bien établies et être parfois perçue comme étant injuste. » Dans Dineley, précitée, au paragraphe 10, la juge Deschamps a déclaré : « Ainsi, une nouvelle mesure législative qui porte atteinte à de tels droits est présumée n’avoir d’effet que pour l’avenir, à moins qu’il soit possible de discerner une intention claire du législateur qu’elle s’applique rétrospectivement. »

[30]  La demanderesse s’appuie également sur l’article 43 de la Loi d’interprétation, LRC 1985, c I-21 (Loi d’interprétation) pour renforcer la présomption contre les effets rétroactifs et rétrospectifs des lois lorsqu’ils portent atteinte aux droits ou aux avantages acquis, aux obligations contractées ou aux responsabilités encourues sous le régime du texte abrogé. En outre, aucun libellé dans le Règlement ou dans le Résumé de l’étude d’impact de la réglementation (REIR) n’indique que le législateur avait l’intention d’appliquer l’alinéa 133(1)j) du Règlement modifié rétrospectivement aux demandes de parrainage produites avant le 1er janvier 2014.

[31]  Le 31 décembre 2013, le BO 561 a donné instruction aux agents des visas de traiter les demandes reçues avant novembre 2011 en fonction des exigences réglementaires qui étaient en vigueur avant le 1er janvier 2014. La première demande de parrainage de la demanderesse a été rejetée le 5 juin 2008. En conséquence, l’agent des visas était tenu d’appliquer uniquement les données du SFR, plutôt que le SFR plus 30 p. 100. Les guides de l’immigration contiennent des lignes directrices qui constituent des instructions sur lesquelles la Cour peut s’appuyer au moment de trancher le caractère raisonnable d’un exercice du pouvoir discrétionnaire en vertu de la Loi : Baker c Canada (Minister of Citizenship and Immigration), [1999] 2 SCR 817, au paragraphe 16. Il était injuste que la demanderesse ait à composer avec deux ensembles d’exigences à deux niveaux différents.

[32]  La demanderesse conteste aussi le choix de jurisprudence de la Section d’appel de l’immigration pour étayer la décision. En rejetant l’appel de la décision de l’agent des visas, la Section d’appel de l’immigration s’est fondée sur Gill, précitée, qui ne devrait pas s’appliquer, car cette affaire a été décidée avant la publication du BO 561 et traite du Règlement concernant le mariage plutôt que le revenu. La Section d’appel de l’immigration a également conclu que le BO 561 n’avait pas force exécutoire pour la Section d’appel de l’immigration, omettant ainsi de retenir les instructions dans Baker en ce qui a trait à la pertinence des lignes directrices. La demanderesse soutient également que la Section d’appel de l’immigration aurait dû suivre Jugpall, précitée, plutôt que Chirwa, précitée, dans son évaluation des facteurs d’ordre humanitaire.

[33]  Dans la décision, la Section d’appel de l’immigration a conclu que la demanderesse n’avait pas présenté d’éléments de preuve quant à savoir pourquoi son père et son frère ne pouvaient pas séjourner au Canada munis d’un visa ou d’un super visa. Cependant, la demanderesse fait valoir que de tels visas temporaires ne constituent pas une solution de rechange à l’immigration au Canada, car ils n’atteignent pas l’objectif de réunir en permanence les familles. De plus, le rejet d’une demande de résidence permanente réduit les chances qu’un visa de visiteur temporaire soit accordé.

[34]  La demanderesse fait valoir que la Section d’appel de l’immigration a omis de tenir compte de documents pertinents, par exemple les avis de cotisation des beaux-parents et du beau-frère de la demanderesse, qui démontrent qu’ils sont autosuffisants. La Section d’appel de l’immigration a également omis d’examiner les éléments de preuve selon lesquels la famille de la demanderesse a été employée de façon continue, a des épargnes de 37 000 $ et est propriétaire d’un bien immobilier.

[35]  La demanderesse est également en désaccord avec la conclusion de la Section d’appel de l’immigration selon laquelle la présence du père et du frère de la demanderesse au Canada n’est pas nécessaire parce que les enfants peuvent déjà compter sur la présence de leurs grands-parents paternels au Canada.

[36]  En dernier lieu, la demanderesse fait valoir qu’il était déraisonnable pour la Section d’appel de l’immigration d’appliquer le critère plus exigeant énoncé dans Chirwa, précitée, parce que le Règlement modifié qui exigeait le SFR plus 30 p. 100 n’existait pas en 2013, la seule année pour laquelle la demanderesse ne satisfaisait pas à la nouvelle exigence relative au RMR.

[37]  En outre, la demanderesse demande que la Cour fournisse des lignes directrices claires quant au Règlement qui devrait s’appliquer aux demandes produites avant le 1er janvier 2014, puisque la Section d’appel de l’immigration n’a pas fait preuve de constance dans ses décisions.

B.  Défendeur

1)  Application du Règlement

[38]  Le défendeur fait valoir qu’il n’y a aucune erreur dans la décision. Les audiences de la Section d’appel de l’immigration sont de novo de par leur nature et les appels relativement aux demandes de parrainage devraient être fondés sur les lois en vigueur au moment de la décision de la Section d’appel de l’immigration. La Section d’appel de l’immigration a correctement appliqué la décision Gill, précitée, en concluant qu’il n’y avait aucun droit acquis au moment où la demande de parrainage a été présentée. En conséquence, l’agent des visas et la Section d’appel de l’immigration ont été cohérents dans leur application de la version appropriée du Règlement à leurs évaluations.

[39]  Contrairement à l’argument de la demanderesse, la Section d’appel de l’immigration a procédé à sa propre évaluation des éléments de preuve sur le RMR dans la décision. La Section d’appel de l’immigration a observé que le revenu du ménage de la demanderesse ne satisfaisait pas au RMR pour une famille de neuf en 2007, ce qui était exact, puisque les beaux-parents et le beau-frère de la demanderesse étaient toujours parrainés en 2007. L’inclusion des trois membres de la belle-famille par l’agent des visas dans les calculs postérieurs à 2007 n’est pas pertinente, car le motif du rejet était le revenu de 2007. Le défendeur soutient également que la demanderesse elle-même a omis de consigner correctement le nombre de ses personnes à charge dans son document d’évaluation de la situation financière, qui a été consigné dans les entrées dans le Système mondial de gestion des cas.

[40]  Dans son évaluation, la Section d’appel de l’immigration a indiqué le bon nombre de membres de la famille pour les calculs relatifs à 2013 et à 2015, mais a conclu que la demanderesse ne satisfaisait toujours pas aux exigences énoncées à la division 133(1)j)(i)(B). Le revenu du ménage de la demanderesse ne satisfaisait ni au RMR pour une famille de neuf en 2012, le manque à gagner s’élevant à 30 000 $, ni au RMR pour une famille de sept en 2013, le manque à gagner s’élevant à 16 400 $. En conséquence, la Section d’appel de l’immigration a bien appliqué le droit aux faits.

[41]  En ce qui concerne la question de l’équité, le défendeur fait valoir que l’agent des visas n’a pas été inéquitable lorsqu’il a tenu compte du revenu de 2007 dans son évaluation. Le sous-alinéa 133(1)j)(i) du Règlement exigeait que la demanderesse ait un revenu égal au RMR pour l’année précédant la demande de parrainage; par conséquent, l’agent des visas avait raison d’évaluer le revenu de 2007 pour une demande produite en 2008.

[42]  En ce qui concerne l’application du BO 561, le défendeur fait valoir que de tels documents ne lient pas la Cour ou la Section d’appel de l’immigration : Kinsel c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2014 CAF 126, au paragraphe 80.

[43]  Le défendeur soutient également que l’article 43 de la Loi d’interprétation ne s’applique pas en l’espèce, puisqu’on a conclu dans Gill, précitée, qu’il n’y a aucun droit acquis à l’égard des demandes de parrainage, y compris les modifications réglementaires.

[44]  L’absence de libellé rétrospectif dans le Règlement modifié ou le REIR n’appuie pas non plus les arguments de la demanderesse. Au contraire, cela confirme la thèse du défendeur selon laquelle, en l’absence d’une loi qui dispose autrement, le Règlement modifié a été correctement appliqué par la Section d’appel de l’immigration. À titre subsidiaire, le REIR ne lie pas non plus la Cour ou la Section d’appel de l’immigration.

2)  Évaluation CH

[45]  Le défendeur soutient que la Section d’appel de l’immigration n’a commis aucune erreur dans sa décision de retenir la dispense pour des considérations d’ordre humanitaire. La Section d’appel de l’immigration a établi les facteurs qui seraient examinés, en mentionnant expressément l’alinéa 67(1)c) de la Loi.

[46]  Dans la décision, la Section d’appel de l’immigration a examiné l’ensemble de la preuve, y compris les éléments de preuve qui n’avaient pas été portés à la connaissance de l’agent des visas. Cependant, la Section d’appel de l’immigration a conclu que la demanderesse ne s’était pas acquittée de son fardeau d’établir qu’une mesure spéciale était justifiée en application de l’alinéa 67(1)c) de la Loi.

[47]  Le défendeur est en désaccord avec l’argument de la demanderesse qui affirme que la Section d’appel de l’immigration a appliqué le mauvais critère dans son évaluation CH. Les normes appropriées, déterminées dans Gill, précitée, et Chirwa, précitée, ont été recensées et appliquées. La demanderesse ne satisfaisait pas à la norme.

[48]  De plus, le défendeur soutient que la Section d’appel de l’immigration n’a pas écarté ou mal interprété la preuve en concluant que la preuve n’établissait pas que l’octroi d’une dispense pour des considérations d’ordre humanitaire était justifié.

[49]  En dernier lieu, le défendeur conteste l’argument de la demanderesse selon lequel des lignes directrices claires sont exigées de la Cour à l’égard de cette question, car une telle orientation a déjà été présentée par le juge en chef Crampton dans Gill, précitée.

C.  Réponse de la demanderesse

[50]  La demanderesse fait valoir que le rejet de la demande, sept ans plus tard, en fonction du revenu de 2007 constitue un manquement manifeste à l’équité. Si la demande avait été rejetée en 2008, alors l’appel aurait été entendu avant l’entrée en vigueur du Règlement modifié. En conséquence, il n’y aurait aucune question à savoir si le Règlement modifié s’applique. En résumé, la demanderesse souffre du délai du défendeur à rendre sa décision.

[51]  De plus, il est injuste que l’on attende de la défenderesse qu’elle satisfasse à la nouvelle exigence du Règlement modifié en 2013, compte tenu du fait que l’exigence n’existait pas en 2013.

[52]  La demanderesse fait également valoir que, conformément au paragraphe 67(1) de la Loi, l’appel aurait dû être accueilli, car l’agent des visas avait rendu une décision fondée sur un calcul qui ne comprenait pas le bon nombre de membres de la famille.

[53]  De plus, la Section d’appel de l’immigration a omis de prendre en considération les lignes directrices du BO 561 et du REIR. En vertu de ces lignes directrices, l’agent des visas avait une obligation d’appliquer le Règlement de 2013 aux demandes présentées avant novembre 2011. En outre, l’agent des visas n’avait aucune obligation de tenir compte du Règlement modifié au moment de son évaluation en 2014.

[54]  À la lumière de l’acceptation par la Section d’appel de l’immigration du fait que le revenu de la demanderesse était supérieur au RMR pour une famille de sept en 2014, le moment de l’évaluation, l’appel aurait dû être accueilli.

[55]  En ce qui concerne l’évaluation CH, la demanderesse fait valoir que la Section d’appel de l’immigration n’a pas tenu compte du fait que le revenu de la demanderesse était insuffisant seulement de 3 832 $ d’après le revenu de 2007 et que le revenu brut du cosignataire s’élevait à 152 159 $ et que le revenu net s’élevait à 31 814 $ au cours de la même période.

[56]  Enfin, la demanderesse soutient qu’elle a acquis le droit de parrainer son frère, car il était âgé de moins de 22 ans au moment où la demande a été déposée, car, selon les lignes directrices du Guide de l’immigration et McDoom c Canada (Ministre de la Main-d’œuvre et de l’Immigration), [1977] ACF no 148, il y a gel de l’âge des enfants à la date de réception des demandes.

D.  Arguments supplémentaires du défendeur

[57]  Dans Gill, précitée, le juge en chef Crampton a expressément reconnu que les personnes qui présentent des demandes de parrainage n’ont pas de droits acquis importants avant qu’une décision finale ne soit rendue à l’égard de leur demande. Par conséquent, l’article 43 de la Loi d’interprétation ne s’applique pas. En outre, d’après le raisonnement dans Gill, précitée, la Section d’appel de l’immigration a correctement appliqué le Règlement modifié dans son évaluation. Les observations de la demanderesse à la Section d’appel de l’immigration ont été présentées le 17 mars 2015 et la décision est datée du 5 août 2016; par conséquent, il n’y a aucune erreur.

[58]  Les arguments de la demanderesse ne soulèvent aucune erreur ni aucun problème en ce qui concerne le raisonnement du juge en chef quant aux droits acquis dans le contexte d’une demande de parrainage; ils sont plutôt fondés sur des documents qui ne lient ni la Cour ni la Section d’appel de l’immigration. Le fait que Gill, précitée, a été tranchée avant la publication du BO 561 ou du REIR ne signifie pas que la jurisprudence a été mal appliquée.

[59]  Dans l’éventualité où la Cour déciderait qu’elle doit se pencher sur l’intention législative en ce qui concerne l’espèce, le défendeur observe que la demanderesse n’a présenté qu’un extrait choisi du REIR. La portée complète des objectifs législatifs des modifications réglementaires tient compte de la préoccupation du Parlement en ce qui concerne la durabilité du programme de parrainage de parents et de grands-parents à long terme, ainsi que de la tentative de répondre aux préoccupations concernant la capacité continue des répondants de répondre adéquatement aux besoins de base des membres de leur famille parrainés de manière prospective.

VIII.  DISCUSSION

[60]  La présente demande soulève deux questions importantes qui sont liées entre elles :

  • a) La Section d’appel de l’immigration a-t-elle commis une erreur de droit lorsqu’elle appliqué le Règlement modifié qui est entré en vigueur le 1er janvier 2014, compte tenu du fait que la demande de parrainage de la demanderesse en vue d’obtenir la résidence permanente au nom de son père et de son frère a été reçue le 5 juin 2008?

  • b) La Section d’appel de l’immigration a-t-elle commis une erreur de droit en omettant d’examiner l’ensemble de la preuve et des documents, et en appliquant les exigences plus élevées du Règlement modifié lorsqu’elle a examiné les aspects d’ordre humanitaire de la demande de la demanderesse?

A.  Quel Règlement devrait s’appliquer?

[61]  Dans ses observations écrites, la demanderesse présente un résumé très succinct de la question en litige en l’espèce. En termes simples, la demanderesse fait valoir que la Section d’appel de l’immigration n’a pas appliqué la bonne loi, mais elle a également présenté un résumé du contentieux entre les parties sur la question suivante :

[traduction]

10.  En application du paragraphe 132(1) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, l’obligation du répondant de rembourser à Sa Majesté la Reine du chef du Canada ou de la province en cause les prestations d’assistance sociale fournies à titre d’assistance sociale à l’étranger parrainé, ou pour son compte, ou aux membres de la famille de celui-ci, ou pour leur compte, commence à compter de la date à laquelle l’étranger devient résident permanent du Canada.

11.  L’obligation de subvenir aux besoins des membres de la famille parrainés est prospective une fois que les parents parrainés arrivent au Canada. Le fait que, en 2014, l’agent des visas ait rejeté la demande en fonction du revenu de 2007 constitue un manquement à l’équité. De plus, dans l’appréciation des facteurs d’ordre humanitaire, la commissaire de la Section d’appel de l’immigration aurait dû examiner le fait que le revenu familial était insuffisant de 3 832 $ seulement, en fonction du revenu de 2007, mais le revenu brut du cosignataire pour 2007 s’élevait à 152 159 $ et le revenu net déclaré, à 31 814 $.

12.  Au paragraphe 16, la commissaire de la Section d’appel de l’immigration a fait les observations suivantes :

« Néanmoins, en 2014, au moment où le calcul a été fait, l’appelante ne possédait pas le RMR exigé durant les trois années précédant le calcul. »

13.  Lorsque l’agent des visas a pris une décision en 2014, il n’était pas tenu d’examiner le nouveau Règlement. Les lignes directrices présentées dans le Bulletin opérationnel 561 de l’immigration et le Résumé de l’étude d’impact de la réglementation sont claires : l’agent des visas a l’obligation d’appliquer l’ancien Règlement dans le cas des demandes de traitement en cours.

14.  Les audiences devant la Section d’appel de l’immigration sont de novo de par leur nature, la commissaire de la Section d’appel de l’immigration a commis une erreur de droit en appliquant les nouvelles exigences relatives au revenu trois ans avant la décision de l’agent des visas. (Page 10 du DCT)

15.  La commissaire de la Section d’appel de l’immigration a reconnu que la demanderesse avait gagné plus que le revenu requis pour une famille de sept personnes, qui était de 62 581 $; par conséquent, l’appel aurait dû être accueilli, car la décision de l’agent des visas n’était pas valide en droit (page 457 du DCT)

Gel de l’âge des demandeurs principaux ou des membres de la famille qui accompagnent :

16.  Dans le cas des enfants à charge, il y a gel de leur âge, conformément aux lignes directrices exposées au paragraphe 5.17 du chapitre IP 2 du Guide sur le traitement des demandes au Canada du Guide de l’immigration. La demanderesse a parrainé son père et son frère; par conséquent, la demanderesse bénéficie du droit acquis de parrainer son frère, car il n’avait pas 22 ans au moment de présenter la demande de parrainage.

17.  Dans McDoom c Ministre de la Main-d’œuvre et de l’Immigration, [1978] 1 CF 323, le juge Walsh a conclu que la demanderesse avait acquis le droit pour que son fils soit nommé en application de la version en vigueur du Règlement au moment de la demande.

18.  De la même façon, dans la présente demande, la demanderesse bénéficie du droit acquis de parrainer son frère à titre de personne à charge de son père à la date à laquelle elle a présenté la demande de parrainage.

19.  Vu ce qui précède, je soutiens que la présente demande doit être accueillie, car la commissaire de la Section d’appel de l’immigration a commis une erreur de droit en concluant que la décision de l’agent des visas était valide en droit, parce que l’agent n’a pas retiré trois des personnes déjà parrainées. Deuxièmement, la commissaire de la Section d’appel de l’immigration a reconnu qu’à l’époque de la décision de l’agent des visas en 2014, la demanderesse disposait du revenu requis. Troisièmement, les audiences devant la Section d’appel de l’immigration sont de novo, la commissaire de la Section d’appel de l’immigration a examiné le revenu des trois années précédant la décision de l’agent des visas, c.-à-d. 2012, 2013 et 2014.

[62]  Essentiellement, le contentieux consiste à trancher si la décision Gill, précitée, a été erronément appliquée en l’espèce. Compte tenu du REIR et du BO 561, la Section d’appel de l’immigration aurait-elle dû appliquer le Règlement qui était en vigueur avant le 1er janvier 2014? Étant donné que, dans Gill, il n’y avait aucune ligne directrice en place pour indiquer quel Règlement s’appliquait, l’existence des directives contenues dans le REIR et le BO 561 devrait-elle faire une différence quant à l’issue dans Gill?

[63]  Dans sa décision, la Section d’appel de l’immigration était bien au fait des questions en jeu dans le présent litige et a donné une réponse complète à la question de base quant à savoir quel Règlement devrait s’appliquer et la raison pour laquelle la décision dans Gill permettre de trancher cette question :

[6]  L’alinéa 133(1)j) du Règlement a été modifié et est entré en vigueur le 1er janvier 2014. Le revenu vital minimum requis pour parrainer un parent ou un grand-parent a été majoré. Il est passé du seuil de faible revenu (SFR) au SFR plus 30 p. 100. Le répondant doit satisfaire au seuil pour chacune des trois années d’imposition consécutives précédant la date de la demande. Le législateur n’a établi aucune disposition transitoire en ce qui concerne les modifications apportées à l’alinéa 133(1)j) du Règlement et la Cour fédérale n’a rendu aucune décision définitive quant à savoir si l’ancien Règlement ou le nouveau Règlement devrait s’appliquer aux demandes qui ont été présentées avant la modification à la loi, le 1er janvier 2014.

[7]  J’ai examiné la jurisprudence présentée par les deux parties, ce qui a été quelque peu instructif. J’estime que la décision rendue dans l’affaire Gill est la plus éclairante, car elle est actuelle et traite directement des changements législatifs liés aux demandes de parrainage. Je partage l’avis du conseil de l’appelante lorsqu’il souligne que l’affaire Gill porte spécifiquement sur les modifications législatives découlant du paragraphe 4(1) du Règlement, mais le juge en chef Crampton parle plus généralement de la question des droits acquis dans les demandes de parrainage.

[8]  Voici un extrait de l’affaire Gill :

[39]  Contrairement à ce qu’affirme Mme Kaur Gill, celle-ci n’a pas acquis le droit de voir sa demande de parrainage de son mari examinée sous le régime de la version du Règlement qui était en vigueur avant le 30 septembre 2010, et elle ne l’a pas acquis au moment où elle a présenté son avis d’appel à la SAI.

[40]  Il en est ainsi parce que les personnes qui présentent de telles demandes n’acquièrent aucun droit avant qu’aient été remplies toutes les conditions préalables à l’exercice du droit dont elles souhaitent se prévaloir par leur demande (R. c Puskas, 1998 CanLII 784 (CSC), [1998] 1 RCS 1207, au paragraphe 14; Apotex Inc c Canada (Procureur général), 1993 CanLII 3004 (CAF), [1994] 1 CF 742, aux paragraphes 56 à 63 (CA); Scott v College of Physicians & Surgeons of Saskatchewan [1992] SJ no 432, p. 718 (CA); Kazi c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CF 948, au paragraphe 19; Gustavson Drilling, précité). Tant qu’une décision définitive n’a pas été rendue au sujet de la demande, la demanderesse n’a que des droits éventuels futurs qui restent à déterminer (Bell Canada c Palmer [1974] 1 CF 186, aux paragraphes 12 à 15 (CA) [Palmer]; McAllister c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1996] 2 CF 190, aux paragraphes 53 et 54); Chu c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 893, aux paragraphes 67 et 68. Autrement dit, la demanderesse n’a rien de plus que l’espoir que sa demande sera fructueuse. Il ne peut être porté atteinte à aucun droit de façon rétroactive ou rétrospective par une modification du critère applicable aux demandes de parrainage d’un conjoint. Étant donné que la décision de la Cour, dans le jugement McDoom c Canada (Ministre de la Main-d’œuvre et de l’Immigration), [1978] 1 CF 323, qui traitait d’un régime législatif considérablement différent, va dans le sens contraire, je refuse avec égards d’adhérer à cette décision.

[41]  La situation de tels demandeurs contraste avec les situations dans lesquelles une partie à une procédure judiciaire acquiert un droit (au salaire égal par exemple) au moment où la partie a entamé la procédure judiciaire. Conformément à l’alinéa 43c) de la Loi d’interprétation, précitée, il ne peut être porté atteinte à de tels droits acquis par suite de l’abrogation partiale ou complète de la disposition qui confère ces droits (Palmer, précité, aux paragraphes 8 à 15).

[42]  À première vue, la thèse du défendeur selon laquelle la SAI doit appliquer la loi en vigueur au moment où la décision a été rendue semble correcte. La Cour a appuyé cette thèse dans Macdonald c Canada (Ministre de la Citoyenneté de l’Immigration, 2012 CF 978, aux paragraphes 22 à 25, et Wiesehahan c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 858, au paragraphe 54). Toutefois, dans ces cas, l’agent des visas et la SAI ont chacun déterminé que le demandeur n’avait pas satisfait aux deux critères énoncés à l’article 4. Par conséquent, le fait que le critère exposé à l’article 4 soit passé d’un critère conjonctif à un critère disjonctif entre le prononcé de la décision de l’agent des visas et le prononcé de la décision de la SAI ne revêt aucune importance particulière.

[43]  Un examen approfondi de la question s’impose en l’espèce. Au cours de cet examen, il convient de garder à l’esprit que les audiences devant la SAI sont de nouvelles audiences, et que les personnes qui présentent une demande de parrainage d’un conjoint de la catégorie du regroupement familial n’acquièrent aucun droit tant qu’une décision définitive n’a pas été rendue relativement à leur demande.

[44]  Dans un tel contexte, la version du Règlement qui s’applique à la décision rendue par la SAI dans le cadre d’un appel est celle qui était en vigueur au moment où les parties ont présenté leurs observations à la SAI. Toutefois, si les parties ont l’entière possibilité d’étoffer leurs observations écrites antérieures avec des arguments prononcés de vive voix au moment de l’audience devant la SAI, la version du Règlement qui doit être appliquée par la SAI est celle qui est en vigueur à ce moment-là. Je reconnais qu’il puisse y avoir des situations où une modification ultérieure au Règlement n’ait d’incidence sur aucune des observations présentées par les parties, et que dans de tels cas, il puisse avoir lieu pour la SAI d’appliquer la version modifiée du Règlement, c’est-à-dire la version qui était en vigueur au moment de sa décision.

[45]  Mme Kaur Gill a commencé à présenter ses éléments de preuve à la SAI au début de 2011, bien après l’entrée en vigueur de la version existante de l’article 4. Il ne semble pas qu’elle ait présenté d’observations écrites à la SAI. Cependant, elle a eu la possibilité de présenter de vive voix des arguments à l’audience devant la SAI le 18 mars 2011, lors de laquelle le défendeur a fait remarquer que la modification du libellé de l’article 4 pourrait constituer un problème, et le 25 octobre 2011.

[46]  Par conséquent, la SAI a justement déterminé que la version du Règlement applicable pour évaluer la demande de Mme Kaur Gill était la version actuellement en vigueur.

[47]  Je n’ai connaissance d’aucun principe d’équité procédurale, de l’application régulière de la loi ou de justice naturelle dans notre pays qui obligerait la SAI à appliquer la version du Règlement qui était en vigueur au moment où l’agent des visas a pris sa décision.

[9]  La décision rendue dans l’affaire Gill est clairement défavorable à l’acquisition de droits au moment de la présentation d’une demande de résidence permanente. Comme les demandeurs qui souhaitaient immigrer au Canada n’ont pas de droits acquis avant qu’une décision finale ait été rendue relativement à leur demande, les principes touchant les modifications substantielles de la loi, exposés dans l’arrêt R. c Dineley ne s’appliquent pas en l’espèce. De plus, l’arrêt Dineley portait sur une question de droit pénal, et je ne vois pas en quoi ses conclusions s’appliqueraient au droit de l’immigration. Le conseil a également présenté les lignes directrices du Bulletin opérationnel 561 et la décision rendue par la SAI dans l’affaire Buhpendrabhai Patel. Selon le bulletin opérationnel 561, « [t]outes les demandes de parrainage de parents et de grands-parents au titre de la catégorie du regroupement familial qui ont été reçues avant le début du moratoire sur les nouvelles demandes, en novembre 2011, seront traitées en fonction des exigences réglementaires qui étaient en vigueur avant le 1er janvier 2014. Cela inclut les demandes qui sont actuellement au CTD-M et celles qui se trouvent dans les bureaux des visas, y compris le Centre de traitement des demandes d’Ottawa (CTD‑O). » Or, la SAI n’est pas tenue de suivre le Bulletin opérationnel ni la décision rendue dans l’affaire Buhpendrabhai Patel. Suivant l’affaire Gill, j’estime que la version modifiée de l’alinéa 133(1)j) du Règlement, en vigueur au moment de l’appel (et de la décision finale), est la norme que doit respecter l’appelante pour que le critère de l’affaire Jugpall s’applique, à savoir le seuil de faible revenu plus 30 p. 100 pour les trois années précédant le moment où la décision finale est rendue.

[Renvois omis.]

[64]  Dans la décision récente dans l’affaire Patel, précitée, le juge Mosley a pleinement pris en compte les questions centrales dont je suis saisi dans la demande en l’espèce :

[22]  La position de la demanderesse selon laquelle l’ancienne version de l’alinéa devrait être appliquée est fondée principalement sur des facteurs temporels. L’ancien alinéa était en vigueur au moment où la demanderesse a rempli sa demande de parrainage en 2008, lorsqu’elle a été refusée en octobre 2013 et lorsque l’appel a été déposé devant la SAI en décembre 2013. Si l’appel avait été tranché à ce moment, c’est l’ancienne réglementation qui aurait été appliquée à sa demande. Elle soutient que la décision d’appliquer la nouvelle réglementation constitue une erreur de droit.

[23]  La demanderesse affirme que l’application de la nouvelle réglementation par la SAI en appel correspondant à une application rétrospective de la loi. Elle affirme que ses droits substantiels, et non procéduraux, ont été affectés puisque l’application visait la réunification de sa famille et touchait des intérêts humains importants : R c. Dineley, 2012 CSC 58, [2012] A.C.S. no 58, au paragraphe 10; voir également R c. Howard Smith Paper Mills, [1957] CSC 403. Ces droits substantifs étaient acquis lorsque l’alinéa a été modifié. Ainsi, la SAI n’a pu exercer son pouvoir discrétionnaire équitablement puisqu’elle a appliqué à tort un seuil plus élevé pour rendre une décision en vertu de l’affaire Chirwa, précitée, plutôt que le seuil plus faible qui figure dans Jugpall c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1999] LADD no 600.

[24]  À l’appui de sa position, la demanderesse se fonde sur un certain nombre de décisions antérieures de cette cour. Seules deux portaient sur un appel porté devant la SAI : Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) c. Lidder, [1992] 2 CF 621, [1992] A.C.F. no 212 (CA); Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Nikolova, [1995] A.C.F. no 1337. Ces deux décisions sont, à mon avis, distinctes de l’espèce.

[…]

[30]  La question sous-jacente dans cette affaire est de savoir si, en remplissant une demande de parrainage pour son père, la demanderesse a acquis les droits qui commandent la présomption dans l’arrêt Gustavson Drilling, (1964) Ltd c. Canada (MNR), [1977] 1 R.C.S. 271, à la p. 282, et étaient opérationnels au moment où son appel a été examiné par la SAI.

[31]  Une question similaire a été tranchée dans le contexte du parrainage d’un conjoint par le juge en chef Crampton dans l’arrêt Gill, précité, et par le juge MacDonald dans l’arrêt Burton, précité. Dans l’arrêt Gill, le juge en chef Crampton a déterminé, aux paragraphes 39 et 40, que la personne ayant déposé une demande de parrainage ne détenait pas de droit acquis à ce que sa demande soit examinée en fonction du droit en vigueur lorsqu’elle a soumis son avis d’appel. Il en est ainsi parce que les personnes qui présentent de telles demandes n’acquièrent aucun droit avant qu’aient été remplies toutes les conditions préalables à l’exercice du droit dont elles souhaitent se prévaloir par leur demande.

[32]  Le juge en chef Crampton a été guidé par la définition de la Cour suprême de ce qu’est un droit acquis (« acquired », « accrued » ou « accruing ») dans l’arrêt R c. Puskas; R c. Chatwell, [1998] 1 R.C.S. 1207, [1998] A.C.S. no 51, au paragraphe 14 :

À notre avis, il existe diverses raisons de statuer que la capacité de faire appel de plein droit à notre Cour n’est « acquise » (« acquired », « accrued » ou « accruing », suivant le texte anglais de l’article 43 de la Loi d’interprétation) qu’au moment où la Cour d’appel rend jugement. La première est une interprétation, fondée sur le sens commun, de ce que signifie le fait pour une personne d’« acquérir » un droit ou qu’un droit lui soit « acquis ». Un droit ne peut être considéré comme « acquis » que lorsque son titulaire peut vraiment l’exercer. Le mot anglais « accrue » est simplement une façon passive d’exprimer le même concept (une personne « acquiert » un droit; un droit est « acquis » à une personne). De même, quelque chose ne peut être considéré comme « accruing » que si, en bout de ligne, son acquisition est certaine et non tributaire d’événements futurs (Scott c. College of Physicians and Surgeons of Saskatchewan (1992), 95 D.L.R. (4th) 706 (C.A. Sask.), à la p. 719). En d’autres mots, un droit ne peut pas être acquis tant que toutes les conditions préalables à son exercice n’ont pas été remplies.

[33]  Le juge en chef Crampton a déterminé qu’aucun droit substantif n’a été acquis tant que toutes les conditions préalables à son exercice n’ont pas été remplies : Gill, au paragraphe 40. Tant qu’une décision définitive n’a pas été rendue au sujet de la demande, la demanderesse n’a que des droits éventuels futurs qui restent à déterminer. Il ne peut être porté atteinte à aucun droit de façon rétroactive ou rétrospective par une modification du critère applicable aux demandes de parrainage. Dans la mesure où l’affaire McDoom soutenait la position contraire, le juge en chef Crampton a refusé avec égards d’adhérer à cette décision, citant le régime législatif considérablement différent en vertu duquel la décision a été prise. Un autre facteur ayant contribué à l’issue est le fait que les audiences de la SAI constituent des audiences de novo : Gill, au paragraphe 43.

[34]  L’avocat de la défenderesse m’invite à conclure que le juge en chef et le juge MacDonald, dans l’arrêt Burton, ont commis des erreurs dans leur analyse et à ne pas me fier à leurs jugements. Bien que je ne sois pas lié par leurs décisions, dans l’intérêt de la courtoisie judiciaire, ma décision ne devait pas différer des leurs à moins a) que des décisions subséquentes aient invalidé le jugement mis en doute; b) qu’il ait été démontré qu’une autorité contraignante dans la jurisprudence et que la loi qui s’applique n’ont pas été pris en compte; ou c) que le jugement lui-même n’a pas été pris en compte, c’est-à-dire qu’il n’a pas été rendu lorsque les exigences commandaient une décision immédiate : Alfred c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 1134, [2005] A.C.F. no 1391, au paragraphe 15. Aucun de ces facteurs ne s’applique en l’espèce.

[35]  La demanderesse n’a pas établi qu’elle détenait un droit acquis à ce que sa demande soit examinée en fonction du droit en vigueur lorsqu’elle a soumis sa demande ou lorsqu’elle a été examinée par l’agent des visas. Aucune décision finale n’a été prise pour lui accorder des droits en fonction de la loi telle qu’elle était libellée antérieurement. Au mieux, elle avait le droit de déposer un appel, qui serait tranché selon la loi en vigueur au moment où il a été entendu et sa demande serait considérée de novo.

[65]  Comme le juge Mosley, je ne devrais pas m’éloigner de ces conclusions, à moins que la demanderesse n’ait établi que l’un des motifs de divergence s’applique. Aucun de ces motifs ne s’applique aux faits qui m’ont été présentés.

[66]  Tout ce que la demanderesse peut signaler, ce sont les directives contenues dans le REIR et le BO 561, mais ces directives n’ont pas force exécutoire pour la Section d’appel de l’immigration, alors que c’est le cas dans Gill. L’arrêt Gill ne laisse aucun doute : « Tant qu’une décision définitive n’a pas été rendue au sujet de la demande, la demanderesse n’a que des droits éventuels futurs qui restent à déterminer » et

Autrement dit, la demanderesse n’a rien de plus que l’espoir que sa demande sera fructueuse. Il ne peut être porté atteinte à aucun droit de façon rétroactive ou rétrospective par une modification du critère applicable aux demandes de parrainage d’un conjoint.

[67]  Une demande auprès de la Section d’appel de l’immigration est présentée de novo, de sorte qu’aucune décision définitive n’est rendue au sujet d’une demande tant que la Section d’appel de l’immigration n’a pas rendu sa décision.

[68]  Depuis l’arrêt Gill, la Cour a constamment maintenu que le droit de parrainer un membre de la famille n’est pas acquis tant qu’une décision affirmative n’a pas été rendue : Voir MacDonald, précitée; Dalumay c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 1179; Lukaj c Canada (Ministre de la Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 8; et Patel, précitée.

[69]  Je ne vois rien dans la demande en l’espèce qui la soustrairait au ratio de base de Gill ou qui l’en distinguerait. Le REIR et le BO 561 stipulent autrement, mais la demanderesse n’a pas démontré que, en l’absence de dispositions transitoires, le REIR et le BO 561 doivent s’appliquer à la situation.

[70]  Sur ce point, alors, la courtoisie judiciaire signifie que je suis tenu d’appliquer Gill et la décision du juge Mosley dans Patel, précitée, ce qui signifie, à mon avis, que la Section d’appel de l’immigration a rendu une décision raisonnable et correcte à l’égard du droit applicable à la demande dont elle était saisie.

[71]  La demanderesse tente d’amener cet aspect de la décision un peu plus loin et soutient que la Section d’appel de l’immigration s’est contentée d’adopter la décision de l’agent des visas, qu’elle n’a pas procédé à sa propre appréciation et qu’elle n’a pas indiqué le bon nombre de personnes à charge des répondants pour les périodes pertinentes. Elle affirme également qu’il était totalement injuste que l’agent des visas prenne en considération le revenu de 2007 dans son évaluation, que les bulletins opérationnels de CIC lient la Section d’appel de l’immigration et la Cour, et que l’article 43 de la Loi d’interprétation empêche les effets rétrospectifs de la loi lorsqu’ils portent atteinte aux droits. Ces arguments ne sont tout simplement pas corroborés par une lecture de la décision ou on ne peut pas y répondre par le fait que l’agent des visas et la Section d’appel de l’immigration appliquaient tout simplement la loi. Du point de vue de la demanderesse, cela peut sembler excessivement injuste, mais elle n’a aucun droit en vertu du droit canadien auquel le Règlement applicable peut porter atteinte. De manière générale, cela peut sembler injuste pour la demanderesse, mais l’agent des visas, la Section d’appel de l’immigration et la Cour ont appliqué le droit applicable et ce droit, de toute façon, comprend des dispositions plutôt souples en matière de considérations d’ordre humanitaire qui visent à atténuer l’application stricte des dispositions applicables en matière de qualification.

B.  Considérations d’ordre humanitaire – mesure spéciale

[72]  Conformément à l’alinéa 61(1)c) de la Loi, la Section d’appel de l’immigration était tenue d’examiner « compte tenu de l’intérêt supérieur de l’enfant directement touché, des motifs d’ordre humanitaire justifiant, vu les autres circonstances de l’affaire, la prise de mesures spéciales ».

[73]  Comme l’indique la décision, la Section d’appel de l’immigration a examiné une vaste gamme de facteurs sur cette question, mais a finalement conclu qu’une mesure spéciale n’était pas justifiée. La demanderesse a présenté un nombre important de raisons pour lesquelles cette conclusion est déraisonnable.

C.  Mauvais critère

[74]  La demanderesse affirme que la Section d’appel de l’immigration aurait dû appliquer le seuil dans Jugpall, précitée, plutôt que le critère énoncé dans Chirwa.

[75]  L’approche de la Section d’appel de l’immigration à l’égard de cette question est la suivante :

[17]  Le conseil de l’intimé soutient que l’appelante ne possédait pas le revenu nécessaire durant les trois années précédant l’audience et que, par conséquent, ce n’est pas le critère de l’affaire Jugpall qui devrait s’appliquer, mais plutôt la norme établie dans l’affaire Chirwa. À la lumière de la preuve documentaire qui m’a été soumise, particulièrement de l’avis de cotisation de l’Agence du revenu du Canada, le revenu dont disposait l’appelante en 2014 et en 2015 semble excéder le RMR pour sept personnes d’environ 1 800 $ et 3 200 $. Or, il en est ainsi pour deux ans seulement, alors que le Règlement prévoit trois ans Néanmoins, j’ai pris cela en considération.

[76]  Donc, en appliquant correctement Gill, la Section d’appel de l’immigration a adéquatement conclu que le Règlement en vigueur correspond à la norme à laquelle la demanderesse devait satisfaire pour que Jugpall s’applique. La norme correspond au SFR plus 30 p. 100 pour les trois années précédant le moment où la décision finale est rendue. La Section d’appel de l’immigration est arrivée à la conclusion que la demanderesse n’avait pas atteint ce seuil.

D.  Visites au Canada par le père et le frère

[77]  La demanderesse est également en désaccord avec le fait que la Section d’appel de l’immigration s’appuie sur des visites par son père et son frère :

[traduction]

22.  La Section d’appel de l’immigration a conclu au paragraphe 21 de ses motifs de la décision que la demanderesse n’avait présenté aucun élément de preuve pour expliquant pourquoi son frère et son père ne peuvent pas lui rendre visite munis d’un visa de visiteur ou d’un super visa. Premièrement, cela ne constitue pas une solution de rechange à la résidence permanente au Canada, la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés dispose expressément que l’un des objectifs est de réunir les familles. Un visa de visiteur ou le super visa permettent des périodes de visite temporaire plutôt que de réunir les familles en permanence. Deuxièmement, lorsque la demande de résidence permanente est rejetée, les chances sont très minces qu’un agent des visas leur permette de venir temporairement au Canada. (Page 14 du dossier de la demanderesse)

[78]  La Section d’appel de l’immigration ne laisse jamais entendre que des visites constituent une solution de rechange à la résidence permanente. La demanderesse souligne simplement un point en particulier dont tient compte la Section d’appel de l’immigration, parmi de nombreux autres. Je crois que l’on peut supposer sans crainte de se tromper que la Section d’appel de l’immigration est bien au fait que des visites ne peuvent être assimilées à la résidence permanente, mais que la possibilité d’effectuer des aller-retour devait être prise en considération à titre de l’une des circonstances de l’espèce dont il fallait tenir compte.

E.  Parents précédemment parrainés

[79]  La demanderesse souligne ce qui suit :

[traduction]

23.  En évaluant les facteurs d’ordre humanitaire, la commissaire de la Section d’appel de l’immigration a omis de tenir compte du fait que les parents précédemment parrainés sont autosuffisants. La commissaire de la Section d’appel de l’immigration disposait des avis d’évaluation des parents précédemment parrainés, mais n’en a pas tenu compte, ce qui est pertinent dans l’examen des motifs d’ordre humanitaire. (Pages 106 à 122 du dossier de la demanderesse)

24.  La demanderesse a également présenté des éléments de preuve selon lesquels elle, le cosignataire et les parents précédemment parrainés occupent un emploi permanent, que la famille avait des épargnes de 37 000 $ et qu’ils sont également propriétaires d’un bien immobilier. Les parents précédemment parrainés se sont également établis avec succès au Canada. (Pages 102,103 et 106 à 122 du dossier de la demanderesse)

[80]  La demanderesse affirme ce qui suit :

[traduction]

Les audiences devant la Section d’appel de l’immigration sont de novo de par leur nature, la commissaire de la Section d’appel de l’immigration aurait dû procéder à sa propre analyse du fait que lorsque la demande a été rejetée, la demanderesse et le cosignataire n’étaient pas responsables des parents précédemment parrainés.

[81]  Comme le paragraphe 16 de la décision l’indique clairement, c’est exactement ce qu’a fait la Section d’appel de l’immigration I. Les affirmations du contraire de la demanderesse sont incompréhensibles.

[82]  La demanderesse affirme également que la Section d’appel de l’immigration a omis de tenir compte du revenu de son beau-père, qui s’élevait à 32 677 $ en 2014 et à 37 869 $ en 2015, ainsi que du revenu de son beau-frère, qui était supérieur à 28 000 $ en 2012.

[83]  Comme l’énonce clairement la décision, la Section d’appel de l’immigration a examiné le dossier, les documents supplémentaires présentés par la demanderesse, le témoignage de la demanderesse et de son époux, ainsi que les plaidoiries des avocats de la demanderesse et du défendeur. Vu la vaste gamme des facteurs qui sont établis dans la décision, la Cour ne peut pas affirmer qu’un défaut de mentionner deux points particuliers au dossier signifie qu’ils ont été écartés. En fait, la Section d’appel de l’immigration, au paragraphe 16 de sa décision, indique expressément : « au moment de l’évaluation de juillet 2014, l’engagement signé pour subvenir aux besoins des parents et du frère de l’époux de la demanderesse n’était plus en vigueur » et, au paragraphe 23, la Section d’appel de l’immigration reconnaît que rien « ne montre non plus que l’appelante, son époux ou les membres de la famille qu’ils ont parrainés aient déjà été bénéficiaires de services sociaux au Canada ». La situation actuelle des parents précédemment parrainés n’est pas un fait qui s’applique à la situation actuelle de la demanderesse ou qui commandait une plus grande attention que celle accordée dans la décision.

[84]  La demanderesse soutient que la Section d’appel de l’immigration a omis de tenir compte du fait que les membres de la famille vivent ensemble dans une famille commune conformément à leur culture et qu’ils partagent les dépenses. La demanderesse s’appuie sur Canada (Minister of Citizenship and Immigration) v Seepall, [1995] ACF no 1580, en ce qui concerne la proposition voulant que le revenu d’un répondant ne constitue qu’un facteur et que, au moment d’examiner les motifs d’ordre humanitaire, la Section d’appel de l’immigration dispose d’un vaste pouvoir pour examiner d’autres facteurs, y compris tout soutien offert par des parents et la probabilité d’un emploi futur pour les personnes parrainées.

[85]  La Section d’appel de l’immigration indique clairement au paragraphe 19 de la décision qu’elle est pleinement consciente et qu’elle a tenu compte du fait que la demanderesse et son époux « vivent avec leurs enfants ainsi que la belle-mère et le beau-père de la demanderesse » et « qu’ils combinent leurs revenus et que l’appelante est titulaire d’un compte d’épargne ». De plus, la Section d’appel de l’immigration a reconnu que « la maison qu’ils habitent est au nom du beau-père de l’appelante ».

[86]  Vu l’étendue des arguments de la demanderesse à la Section d’appel de l’immigration sur cette question, je ne crois pas que la demanderesse puisse désormais faire valoir que la Section d’appel de l’immigration n’était pas consciente de l’importance des conditions de logement de la famille et du partage des revenus pour composer avec les dépenses et que ce facteur n’a pas été pris en considération ou qu’on ne lui a pas accordé un poids suffisant.

F.  Le besoin des enfants relativement au père et au frère de la demanderesse

[87]  La demanderesse affirme que la Section d’appel de l’immigration n’a pas tenu compte du facteur suivant :

[traduction]

25.  La demanderesse n’a personne de sa famille ici, au Canada. Sa mère est décédée et ses enfants sont très proches de son père et de son frère. La commissaire de la Section d’appel de l’immigration a conclu que, parce que les parents du cosignataire sont présents au Canada, il n’est pas nécessaire que les enfants bénéficient de la présence des grands-parents du côté de la demanderesse.

[88]  Il s’agit tout simplement d’une qualification inexacte de la discussion beaucoup plus complète de la Section d’appel de l’immigration sur cette question :

[22]  Les enfants de l’appelante ne dépendent pas des demandeurs pour le soutien financier. Ils vivent avec leurs parents et leurs grands-parents paternels. La proximité des demandeurs serait peut-être dans leur intérêt supérieur, mais je n’ai pas accordé beaucoup de poids à ce facteur, car les enfants vivent déjà avec des grands-parents au Canada et ont un oncle paternel au Canada. Rien n’a été soumis pour montrer que les enfants s’enrichiraient sur le plan culturel si les demandeurs demeuraient au Canada. Je constate également que l’appelante a en Inde une sœur mariée et des neveux qui sont aussi proches de leur grand-père maternel sur le plan affectif.

G.  Conclusions

[89]  Pour tirer ses conclusions, la Section d’appel de l’immigration a relevé les points saillants présentés par la demanderesse. Malgré toute la sympathie que j’éprouve pour la demanderesse et sa famille, je ne peux pas dire que la décision de ne pas accorder une mesure spéciale n’appartenait pas aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit. Pour ce motif, je ne peux pas intervenir à l’égard de la décision.

IX.  QUESTION À CERTIFIER

[90]  La demanderesse avait soulevé les questions à certifier suivantes :

Lorsqu’une modification est apportée au Règlement en vue de satisfaire à des exigences considérablement accrues en matière de revenu vital minimum et que la demande de parrainage a été produite avant l’entrée en vigueur du nouveau Règlement et que des directives précises ont été communiquées aux agents des visas conformément à un bulletin opérationnel et à un Résumé de l’étude d’impact de la réglementation d’évaluer les demandes conformément aux anciennes règles, à la SAI le Règlement révisé s’applique-t-il ou est-ce l’ancien [?]

[91]  Je crois que cette question serait mieux formulée ainsi :

Vu la modification apportée à l’alinéa 133(1)j) et à l’article 34 du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés et leur entrée en vigueur le 2 janvier 2014, la SAI aurait-elle dû appliquer rétroactivement la version modifiée du Règlement étant donné que la demande de parrainage de la demanderesse, dans le cadre d’une demande de résidence permanente au nom de son père et de son frère, a été reçue le 5 juin 2008?

[92]  Dans l’arrêt Mudrak c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CAF 178, la Cour d’appel fédérale a récemment confirmé les principes devant s’appliquer durant la certification de questions :

[15]  Notre Cour, dans l’arrêt Canada (ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Liyanagamage, [1994] A.C.F. no 1637 (QL) [Liyanagamage], énonce les principes à considérer lorsqu’il s’agit de décider s’il y a lieu de certifier une question :

[4]  Lorsqu’il certifie une question sous le régime du paragraphe 83(1), le juge des requêtes doit être d’avis que cette question transcende les intérêts des parties au litige et qu’elle aborde des éléments ayant des conséquences importantes ou qui sont de portée générale (voir l’excellente analyse de la notion d’« importance » qui est faite par le juge Catzman dans la décision Rankin c. McLeod, Young, Weir Ltd. et al. (1986), 57 O.R. (2d) 569 (H.C. de l’Ont.)) et qu’elle est aussi déterminante quant à l’issue de l’appel. Le processus de certification prévu à l’article 83 de la Loi sur l’immigration ne doit pas être assimilé au processus de renvoi prévu à l’article 18.3 de la Loi sur les Cours fédérales, ni être utilisé comme un moyen d’obtenir, de la cour d’appel, des jugements déclaratoires [à] l’égard de questions subtiles qu’il n’est pas nécessaire de trancher pour régler une affaire donnée.

[16]  Dans l’arrêt Zhang c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CAF 168, [2014] 4 R.C.F. 290 [Zhang], au paragraphe 9, notre Cour a réitéré ces critères. Il est de droit constant que, pour être certifiée, une question doit i) être déterminante quant à l’issue de l’appel, ii) transcender les intérêts des parties au litige et porter sur des questions ayant des conséquences importantes ou qui sont de portée générale. En corollaire, la question doit avoir été soulevée devant la cour d’instance inférieure, qui doit l’avoir examinée dans sa décision, et elle doit découler de l’affaire, et non des motifs du juge, au paragraphe 4; Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Zazai, 2004 CAF 89, [2004] A.C.F. no 368 (QL), par. 11-12; Varela, par. 28, 29 et 32).

[93]  À mon avis, la question exposée ci-dessus satisfait à ces principes et critères, et devrait être certifiée.


JUGEMENT

LA COUR REND LE JUGEMENT SUIVANT :

  1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

  2. La question suivante est certifiée aux fins d’appel :

Vu la modification apportée à l’alinéa 133(1)j) et à l’article 34 du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés et leur entrée en vigueur le 2 janvier 2014, la Section d’appel de l’immigration aurait-elle dû appliquer rétroactivement la version modifiée du Règlement étant donné que la demande de parrainage de la demanderesse, dans le cadre d’une demande de résidence permanente au nom de son père et de son frère, a été reçue le 5 juin 2008?

« James Russell »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 29e jour de juin 2020

Lionbridge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-3709-16

INTITULÉ :

NAVDEEP KAUR SRAN c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

LIEU DE L’AUDIENCE :

Calgary (Alberta)

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 26 JANVIER 2017

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE RUSSELL

DATE DES MOTIFS :

LE 21 AVRIL 2017

COMPARUTIONS :

Dalwinder Hayer

Pour la demanderesse

Maria Green

Pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Dalwinder S. Hayer

Avocat

Calgary (Alberta)

Pour la demanderesse

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Pour le défendeur

 

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