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Date : 20170418


Dossier : T-236-16

Référence : 2017 CF 370

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 18 avril 2017

En présence de monsieur le juge Gleeson

ENTRE :

WILLIAM A. JOHNSON

demandeur

et

LE COMMISSAIRE AUX SERVICES CORRECTIONNELS, REPRÉSENTÉ PAR LARRY MOTIUK, COMMISSAIRE ADJOINT DU SERVICE CORRECTIONNEL DU CANADA, SECTEUR DES POLITIQUES

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.                    Aperçu

[1]               Le demandeur, M. William Johnson, s’est représenté lui-même. Il purge une peine d’emprisonnement à l’établissement fédéral de Warkworth et réside dans l’unité 5 (aussi appelée l’unité des quatre-vingts hommes [EMU]).

[2]               En décembre 2013, M. Johnson a déposé une plainte concernant l’utilisation du tabac dans l’unité 5. Il se plaignait que les détenus qui avaient été pris à fumer n’ont pas fait l’objet de mesures disciplinaires, et ce, malgré le fait que l’établissement de Warkworth est officiellement sans fumée. Il faisait valoir que cette situation lui causait un préjudice grave puisqu’il souffre d’allergies et que l’exposition à la fumée secondaire a des effets négatifs sur sa santé et sa sécurité.

[3]               M. Johnson a suivi tout le processus de plaintes et griefs des délinquants de Service correctionnel du Canada [SCC] [plainte de 2013]. En août 2015, le commissaire adjoint, secteur des politiques [le commissaire] du SCC a rejeté la plainte de 2013 en concluant que la question soulevée avait été abordée dans un grief antérieur de niveau national [le grief de 2010]. Le grief de 2010 est actuellement devant la Cour et porte le numéro de dossier T-149-13.

[4]               Dans la présente demande de contrôle judiciaire, M. Johnson sollicite plusieurs déclarations et demande l’annulation de la décision et le renvoi de l’affaire pour nouvelle détermination par le commissaire. Il plaide qu’il avait l’attente légitime que les questions soulevées dans son grief de 2013 seraient examinées et fait valoir que le commissaire a commis une erreur en concluant que les questions avaient déjà été réglées par le grief de 2010. Le défendeur soutient pour sa part que la décision était raisonnable et allègue que la présente demande de contrôle judiciaire constitue un abus de procédure.

[5]               Après avoir examiné le dossier, notamment les observations écrites des parties, et avoir entendu leurs représentations par vidéoconférence, je ne suis pas convaincu que le commissaire a commis une erreur ou que sa décision est déraisonnable. Mes motifs au soutien du rejet de la présente demande sont les suivants.

II.                 Contexte

A.                 Généralités

[6]               M. Johnson allègue souffrir d’un problème de santé et affirme que la fumée a des conséquences importantes pour sa respiration. Il soutient qu’avant 2009, les détenus fédéraux pouvaient fumer dans les établissements correctionnels, mais que lui-même résidait dans une unité désignée sans fumée, soit l’unité 5, à l’établissement de Warkworth. Il affirme que l’interdiction de fumer était strictement appliquée à l’unité 5 avant 2009.

[7]               M. Johnson indique qu’en 2009 le SCC a mis en place une interdiction de fumer dans tous les établissements correctionnels fédéraux [l’interdiction de fumer]. Puisqu’après l’imposition de cette interdiction, tous les établissements sont devenus sans fumée, l’unité 5 n’était plus traitée comme un cas unique. M. Johnson allègue que le résultat de cette interdiction de fumer à l’établissement Warkworth et à l’unité 5 a été la création d’un « marché noir » de l’utilisation des produits du tabac, en contravention de la politique du SCC et que cet usage a eu des effets négatifs sur sa santé.

B.                 Le grief de 2010 et la procédure reliée T-149-13

[8]               En 2010, M. Johnson a déposé une plainte ou un grief, alléguant que la fumée engendrée par les cérémonies autochtones à l’unité 5 ou près de l’unité avait des conséquences sur sa santé. La plainte a été rejetée au premier palier et a été poursuivie jusqu’à la dernière instance du processus de règlement des griefs. Au second palier du processus, M. Johnson a allégué que les politiques du SCC permettant la tenue de cérémonies autochtones étaient discriminatoires. Il a également affirmé que les employés du SCC n’appliquaient pas l’interdiction de fumer dans l’unité 5, mais qu’ils protégeaient plutôt les détenus fumeurs.

[9]               En présentant son grief de 2010 au troisième palier, M. Johnson a fait état de son problème de santé en plaidant que l’interdiction de fumer avait augmenté la quantité de fumée secondaire retrouvée dans l’unité 5. Il a également précisé que sa plainte principale était reliée à la fumée secondaire et que sa prétention selon laquelle les politiques permettant la tenue de cérémonies autochtones sont discriminatoires était secondaire. Il a maintenu son allégation selon laquelle le personnel du SCC protégeait les détenus fumeurs. Le grief a été maintenu sur le volet des lacunes procédurales du processus de plainte relevé par M. Johnson, mais a été rejeté sur la question de la fumée secondaire générée par les cérémonies autochtones, de la discrimination et de la conduite inappropriée alléguée du personnel du SCC.

[10]           En janvier 2013, M. Johnson a demandé le contrôle judiciaire de la décision rejetant sa plainte (T-149-13). Dans le cadre de cette demande, M. Johnson a déposé de nouveaux renseignements et pièces. Dans une ordonnance datée du 9 juillet 2015, le juge chargé de la gestion de l’instance a converti la demande en recours afin [traduction] « (...) de s’assurer que les questions réelles en litige soient présentées à la Cour et d’éviter la multiplication des recours ». M. Johnson a ensuite signifié et déposé une demande introductive d’instance. Le dossier T-149-13 est en cours.

C.                 Le grief 2013

[11]           En décembre 2013, M. Johnson a entrepris le grief 2013 qui sous-tend la présente demande de contrôle judiciaire. Au troisième palier du grief 2013, le demandeur a soulevé les questions en litige suivantes : 1) l’interdiction de fumer a été mal conçue et a diminué la protection dont bénéficient les détenus ayant des problèmes de santés exacerbés par la fumée secondaire; 2) l’interdiction de fumer ne prévoit pas de vraies mesures de sécurité semblables à celles mises en place pour déceler la drogue et il y a un refus de mettre en place les mesures nécessaires; 3) le demandeur plaide la Charte canadienne des droits et libertés ainsi que le paragraphe 3a) de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (L.C. 1992, ch. 20) pour faire valoir que le SCC a l’obligation d’offrir un milieu de vie sécuritaire.

[12]           Dans le cadre de son grief de 2013, M. Johnson demande les réparations suivantes : 1) que les règles de l’unité 5 soient remises en place, soit qu’il y ait une entente signée par les détenus en fonction de laquelle une personne prise à fumer ou à créer de la fumée secondaire sera déplacée dans une autre unité; 2) que les directives du commissaire soient modifiées pour prévoir des outils de détection du tabac; 3) que les directives du commissaire soient modifiées pour protéger les détenus ayant des problèmes de santés exacerbés par la fumée secondaire provenant des cérémonies autochtones de fumigation; 4) que les occupants des unités hébergeant des détenus ayant des problèmes médicaux exacerbés par la fumée secondaire fassent l’objet de contrôles par analyse d’urine.

[13]           Dans sa réponse au grief de 2013, le commissaire a souligné les questions soulevées par M. Johnson et a fait ressortir les questions abordées dans le cadre du grief de 2010. Le commissaire y reproduit un extrait de l’article 5 de l’annexe C de la directive 081-1, Processus de règlement des plaintes et griefs des délinquants [directive 081-1], qui prévoit ce qui suit :

Une plainte ou un grief peut être rejeté dans les situations décrites ci-après.

[…]

5. La question en cause est en voie d’être traitée ou a déjà été traitée dans le cadre d’une plainte ou d’un grief distinct. Au cours de l’analyse d’une plainte ou d’un grief à quelque palier que ce soit, s’il est établi que la doléance est en voie d’être traitée ou a déjà été traitée en réponse à une plainte ou un grief distinct, la plainte ou le grief peut être rejeté. Toutefois, si une plainte ou un grief est rejeté pour ces raisons, on doit clairement établir que la doléance était identique et qu’elle a été traitée dans le cadre d’une plainte ou d’un grief distinct. La réponse doit également clairement énoncer les motifs du rejet de la plainte ou du grief ainsi que le numéro du ou des dossiers faisant déjà mention de cette question.

[14]           En se fondant sur la directive 081-1, le commissaire a conclu que les préoccupations de M. Johnson à l’égard de la fumée secondaire avaient été traitées dans le cadre du grief de 2010. Le grief de 2013 a été rejeté.

III.               Questions préliminaires

[15]           M. Johnson a soulevé deux questions préliminaires au début de l’audience : 1) le dossier du défendeur a été déposé en dehors du délai imparti par les Règles des Cours fédérales, DORS/98-106 et à sa connaissance, aucune ordonnance n’a été rendue par la Cour autorisant le dépôt tardif; 2) le dossier du défendeur contient des documents qui n’étaient pas en possession du commissaire et qui sont donc inadmissibles dans le cadre du contrôle judiciaire dont la Cour est saisie.

[16]           Un examen du dossier de la Cour pour la présente demande confirme que le protonotaire Kevin Alto a autorisé par directive orale la signification et le dépôt du dossier du défendeur le 23 juin 2016 ou avant cette date. Le dossier du défendeur a été signifié et déposé conformément à la directive du protonotaire Alto.

[17]           En se penchant maintenant sur l’objection à l’égard des documents retrouvés dans le dossier du défendeur, M. Johnson affirme que les documents suivants n’étaient pas en possession du commissaire : 1) le dossier certifié du tribunal relatif au grief de 2011; 2) l’affidavit de M. Johnson et les pièces déposées dans le dossier T-149-13; 3) l’ordonnance du juge chargé de la gestion de l’instance convertissant la demande du dossier T-149-13 en recours; 4) la demande introductive d’instance de M. Johnson pour le dossier T-149-13; 5) la correspondance du défendeur du 16 mars 2016, demandant la suspension des procédures au motif que la présente affaire constitue un dédoublement du recours T-149-13; 6) l’index du dossier en ligne de la Cour pour le dossier T-149-13.

[18]           Le défendeur soutient qu’il s’agit d’information contextuelle tirée des dossiers de la Cour et que la Cour a le pouvoir de prendre connaissance d’office de ses dossiers et d’en tenir compte afin d’éviter les abus de procédures. Le défendeur fait donc valoir que la Cour peut consulter le dossier de cour T-149-13 dans le cadre de sa requête et que l’examen de ces documents n’est pas inapproprié.

[19]           Un examen du dossier certifié du tribunal (DCT) de la présente demande révèle que certaines parties du grief de 2010, y compris la décision du dernier palier rendue en réponse au grief de 2010, étaient devant le commissaire dans le cadre du grief de 2013. Le DCT démontre également que les analystes ayant participé à la préparation et à l’examen du grief de 2013 aux fins d’examen par le commissaire connaissaient la demande de contrôle judiciaire de M. Johnson pour le grief de 2010 et qu’ils en ont demandé une copie.

[20]           Il est bien établi par la jurisprudence qu’à l’exception de certaines exceptions particulières qui ne s’appliquent pas en l’espèce, la Cour qui examine une décision doit le faire en fonction du dossier qui était en possession du décideur administratif. Je n’ai donc pas tenu compte des documents qui ne faisaient pas partie du DCT pour mon examen du fondement de la présente demande de contrôle judiciaire.

[21]           L’examen de la décision n’est toutefois pas la seule question soulevée par cette demande. Le défendeur a soulevé une objection préliminaire, faisant valoir que la demande de M. Johnson constitue un recours abusif et qu’il peut se fonder à juste titre sur les documents et les renseignements retrouvés au dossier de la Cour dans le recours T-149-13 pour le démontrer. Je suis d’accord avec cet argument. Il est bien établi que la Cour détient le pouvoir discrétionnaire nécessaire pour prévenir le mauvais usage de sa procédure et qu’elle peut mettre fin à tout recours qui devient inéquitable ou oppressif (Behn c. Moulton Contracting Ltd., 2013 CSC 26, aux paragraphes 39 et 40; Coombs c. Canada (Revenu national), 2015 CF 869, au paragraphe 28). La Cour tiendra compte des parties du dossier du défendeur qui ne faisaient pas partie du dossier devant le commissaire aux seules fins d’examiner les observations relatives au recours abusif et aux dépens. La Cour n’a pas tenu compte de ces parties du dossier dans son examen du fondement de la présente demande de contrôle judiciaire.

[22]           En tirant cette conclusion, je note que M. Johnson savait que les documents déposés dans le dossier T-149-13 avaient été soumis à la Cour. Il a eu l’occasion d’aborder cette preuve et s’en est prévalu. Il ne subit aucun préjudice de l’utilisation de ces documents aux strictes fins précitées.

[23]           L’argument du défendeur à l’égard du recours abusif sera traité subséquemment.

IV.              Questions en litige

[24]           Les parties soulèvent les questions en litige suivantes :

A.                 Le commissaire a-t-il raisonnablement conclu que les questions soulevées dans le grief de 2013 avaient déjà été traitées par un recours distinct?

B.                  La présente demande de contrôle judiciaire constitue-t-elle un recours abusif?

V.                 Norme de contrôle

[25]           M. Johnson fait valoir que ses attentes légitimes découlant de ce qui est maintenant l’article 2 de la Directive 081 du commissaire – plaintes et griefs des délinquants (2014-01-13) [Directive 081 du commissaire] ont été violées. L’article 2 de la Directive 081 du commissaire énonce ce qui suit :

2. Les décideurs de tous les paliers veilleront à ce que les plaignants reçoivent, dans les délais prescrits, une réponse complète, étayée et compréhensible à toutes les questions soulevées dans leur plainte ou leur grief initial.

[26]           M. Johnson fait valoir que le défaut du commissaire de traiter de façon distincte de chacune de ses plaintes soulevées dans ses observations présentées au troisième palier de grief fait intervenir une question d’équité procédurale qui doit être examiné en fonction de la norme de la décision correcte. Je ne suis pas de cet avis.

[27]           La question soulevée dans cette demande renvoie à l’interprétation du commissaire de l’article 5 de l’annexe C de la directive 081-1 et à l’application de cette directive aux faits telles que décrites dans le grief de 2013 de M. Johnson. La Cour de révision doit accorder une grande déférence aux décisions faisant intervenir l’interprétation par le commissaire des directives du SCC et la détermination de question de droit et de fait (Gallant c. Canada (Procureur général), 2011 CF 537, aux paragraphes 14 et 15, citant Bonamy c. Canada (Procureur général), 2010 CF 153; Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, aux paragraphes 47 à 49 [Dunsmuir]). La décision sera examinée selon la norme du caractère raisonnable.

VI.              Analyse

A.                 Le commissaire a-t-il raisonnablement conclu que les questions soulevées dans le grief de 2013 avaient déjà été traitées par un recours distinct?

[28]           M. Johnson se fonde sur l’article 2 de la Directive 081 du Commissaire pour plaider que le Commissaire avait l’obligation de répondre à chacune des questions soulevées dans le grief de 2013 et que le défaut de ce fait constitue une erreur susceptible de révision justifiant l’intervention de la Cour. Il soutient que les questions principales des deux griefs sont distinctes puisque le grief de 2010 avait pour objet la fumée secondaire engendrée par les cérémonies autochtones alors que le grief de 2013 vise l’application de l’interdiction et l’existence d’outils de détection. Après avoir examiné les arguments de M. Johnson, je ne suis pas convaincu de leur bien-fondé.

[29]           Le commissaire, dans sa décision du palier final, a résumé les questions soulevées par le grief de 2013. M. Johnson n’a pas contesté l’exactitude ou l’exhaustivité de ce résumé. Le commissaire a ensuite résumé la réponse reçue par M. Johnson au premier palier de grief et s’est fondé sur celle-ci pour rendre sa décision. Cette réponse confirme l’existence de l’interdiction de fumer dans les établissements correctionnels fédéraux; elle confirme également que la politique du SCC prévoit les outils nécessaires pour traiter les contraventions à cette politique et qu’elle est appliquée identiquement dans tout l’établissement de Warkworth. La réponse du premier palier souligne de plus l’absence de preuve permettant d’étayer l’allégation selon laquelle le personnel du SCC ignore ou protège activement les détenus qui contreviennent à la politique.

[30]           La décision du commissaire résume ensuite les questions soulevées par le grief de 2010. Ces questions comprenaient la fumée secondaire engendrée par les cérémonies autochtones de même que les questions de fond relatives à l’exposition de M. Johnson à la fumée secondaire. La décision examine ensuite la plainte de M. Johnson à l’égard de l’absence d’application de la politique et du manque d’outils de détection et déclare que [traduction] « (...) [l]a politique prévoit des outils et des mesures permettant d’intervenir relativement à tout détenu pris en train de fumer. La réponse [du premier palier] à la plainte répond suffisamment à vos préoccupations. Par ailleurs, vous n’avez fourni aucun élément de preuve supplémentaire permettant d’étayer vos allégations. En outre, vos préoccupations à l’égard de la fumée secondaire ont déjà été traitées au niveau national. »

[31]           Cette déclaration démontre que l’analyse du commissaire contenait plus qu’une simple déclaration selon laquelle les questions en litige avaient déjà été traitées au niveau national. Le commissaire en est venu à cette conclusion uniquement après avoir fait sienne la réponse donnée au premier palier et après avoir examiné ce que M. Johnson affirme être le seul volet du grief de 2013, soit la présence d’outils de détection et de mécanismes d’application. Il est possible que M. Johnson soit en désaccord avec les conclusions du commissaire à cet égard et qu’il ait préféré une réponse plus détaillée ou approfondie de sa part. Toutefois, aucune de ces préoccupations ne rend la décision du commissaire déraisonnable. Le commissaire n’avait pas l’obligation de traiter directement et explicitement de tous les arguments ou toutes les préoccupations soulevées par M. Johnson, comme ce dernier le prétend (Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c. Terre-Neuve-et-Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62, au paragraphe 16).

[32]           Le commissaire conclut donc que les questions en litige soulevées par le grief de 2013 de M. Johnson sont formulées de façon différente à celles du grief de 2010, mais que la question de fond demeure la même, soit celle de la présence de fumée secondaire dans l’unité 5 de l’établissement de Warkworth. Le commissaire a raisonnablement conclu que cette question a été traitée dans le cadre du grief de 2010, qui se trouve à présent devant la Cour dans le dossier T-149-13. Après examen du dossier, je suis convaincu que le commissaire pouvait raisonnablement rejeter le grief de 2013 en se fondant sur la directive 081-1. La décision est justifiée, transparente et intelligible et appartient aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit (Dunsmuir, au paragraphe 47).

B.                 La demande constitue-t-elle un recours abusif?

[33]           Puisque j’ai conclu que la décision du commissaire était raisonnable, il n’est pas nécessaire d’examiner la question du recours abusif. Le défendeur demande toutefois des « dépens indemnitaires substantiels » sur la demande, faisant valoir que M. Johnson n’est pas étranger à la Cour et qu’il a l’obligation de voir au déroulement efficace de son recours afin d’éviter le gaspillage des ressources judiciaires. En l’espèce, le défendeur allègue que les questions soulevées sont identiques à celles en litige dans le dossier T-149-13 en cours. Dans ses observations orales, le défendeur a affirmé que des dépens de 2 500 $ seraient appropriés.

[34]           Au soutien de sa position, il a mentionné à la Cour qu’il avait fait valoir par écrit ses préoccupations à l’égard de la nature redondante de la présente demande pendant les procédures de gestion de l’instance du dossier T-149-13 et a ajouté que le juge chargé de la gestion de l’instance a converti la demande T-149-13 en action afin notamment d’éviter le dédoublement des recours. M. Johnson ne s’est pas montré réceptif à la demande du défendeur de ne pas poursuivre la présente affaire.

[35]           Le demandeur conteste l’allégation selon laquelle la présente demande constitue un recours abusif. Il fait valoir qu’il croit qu’il était en droit d’obtenir une réponse à l’égard de chacune des questions soulevées et que la décision ne traitait pas directement de la question des méthodes de détection du tabac. Il a également avisé la Cour qu’il est sans emploi et qu’il n’a pas les moyens financiers de payer des dépens importants.

Les dépens font partie inhérente du pouvoir discrétionnaire de la Cour. Bien que je suis d’avis que le commissaire a raisonnablement conclu que les questions soulevées par le grief de 2013 de M. Johnson ont été traitées par le grief de 2010, il n’en demeure pas moins que M. Johnson a présenté ses arguments de façon efficace et que je suis convaincu qu’il a entrepris ce recours en croyant de bonne foi que le commissaire avait commis une erreur relativement au grief de 2013. Je suis également sensible aux circonstances financières de M. Johnson et prends acte de ses observations selon lesquelles il est actuellement sans emploi et n’est pas en mesure de payer les dépens demandés par le défendeur. Dans les circonstances, je suis d’avis que des dépens de 250 $ sont appropriés.


JUGEMENT

LA COUR rejette la présente demande. Des dépens de 250 $ sont adjugés au défendeur.

« Patrick Gleeson »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


 

Dossier :

T-236-16

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :

WILLIAM A. JOHNSON c. LE COMMISSAIRE AUX SERVICES CORRECTIONNELS, REPRÉSENTÉ PAR LARRY MOTIUK, COMMISSAIRE ADJOINT DU SERVICE CORRECTIONNEL DU CANADA, SECTEUR DES POLITIQUES

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

OTTAWA (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 5 octobre 2016

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE GLEESON

 

DATE :

Le 18 avril 2017

 

COMPARUTIONS :

William Johnson

 

Pour le demandeur

(POUR SON PROPRE COMPTE)

Ayesha Laldin

 

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

Pour le défendeur

 

 

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