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Date : 20170228


Dossier : IMM-3112-16

Référence : 2017 CF 243

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 28 février 2017

En présence de monsieur le juge Southcott

ENTRE :

WUFEI HUANG SU

(AUSSI CONNUE SOUS LE NOM DE WU FEI HUANG SU)

ERIC SU

SIMON SU

demandeurs

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  Aperçu

[1]  Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision de la Section d’appel des réfugiés datée du 28 juin 2016 dans laquelle la Section d’appel des réfugiés a confirmé la décision de la Section de la protection des réfugiés selon laquelle les demandeurs n’étaient pas des réfugiés au sens de la Convention en application de l’article 96 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (LIPR), ni des personnes à protéger aux termes de l’article 97 de la LIPR.

[2]  Pour les raisons expliquées plus en détail ci-dessous, la présente demande est rejetée parce que les arguments des demandeurs au sujet des conclusions tirées par la Section d’appel des réfugiés quant à la crédibilité et au lien ne constituent pas un motif pour que la Cour conclue que la décision de la Section d’appel des réfugiés était déraisonnable.

II.  Contexte

[3]  La demanderesse principale, Wufei Huang Su, est la mère des demandeurs mineurs, Eric et Simon Su. Tous les trois sont citoyens du Guyana d’origine chinoise et allèguent une crainte d’être persécutés au Guyana du fait de leur race. Mme Su a visité le Guyana en décembre 2000 et par la suite a rencontré son mari, qui est également un ressortissant chinois. Ils se sont mariés en février 2007, et ont eu leurs deux fils en 2009 et en 2011. En 2007, l’époux de Mme Su a ouvert un restaurant chinois à Georgetown relié à leur domicile. En mai 2011, les époux sont devenus citoyens naturalisés du Guyana.

[4]  En juin 2011, alors qu’elle était enceinte de son deuxième fils, Mme Su a été victime d’un vol par deux hommes guyaniens. Les demandeurs soutiennent que la violence au Guyana était à la hausse tout au long des années 2013 et 2014. Une station de lavage automobile située à l’arrière de leur propriété a été cambriolée et, en mars 2014, Mme Su a appris qu’un restaurant chinois avait été cambriolé et que son propriétaire était gravement blessé.

[5]  Le 6 août 2015, plusieurs hommes guyaniens sont entrés par effraction dans leur restaurant. Les demandeurs mineurs ont vu leur mère se faire battre jusqu’à ce qu’elle perde connaissance. Lorsqu’elle a repris connaissance, elle a constaté que son époux avait été tué. Mme Su a donné des renseignements à la police et ils ont enquêté, mais personne n’a été arrêté pour l’agression et le meurtre de son époux.

[6]  Après que la demanderesse principale eut obtenu son congé de l’hôpital, les demandeurs sont restés au domicile d’une amie, Mme Jian Ping Che, à Georgetown. Mme Su affirme que Mme Che l’a informée que deux hommes guyaniens noirs étaient venus chez elle et ont demandé si une femme chinoise et deux enfants y résidaient. Mme Che l’a nié et les hommes sont partis.

[7]  Mme Su a ensuite embauché un passeur de clandestins pour l’aider à fuir le Guyana avec ses enfants. Ils ont quitté le Guyana le 17 septembre 2015, et sont d’abord allés aux États-Unis avec des visas de transit avant d’arriver au Canada et de demander l’asile. Leur demande a été entendue le 8 janvier 2016 par la Section de la protection des réfugiés, qui a rendu une décision défavorable le 3 mars 2016, concluant que les demandeurs n’avaient pas établi une possibilité sérieuse de persécution au sens de la Convention, ou que, selon la prépondérance des probabilités, ils seraient personnellement exposés à un risque de torture, ou à une menace pour leur vie, ou à un risque de peines et de traitements cruels et inusités s’ils retournaient au Guyana. Les demandeurs ont interjeté appel de cette décision auprès de la Section d’appel des réfugiés, qui a confirmé les conclusions de la Section de la protection des réfugiés de la décision qui fait l’objet du contrôle judiciaire dans la présente demande.

III.  Question en litige

[8]  Les demandeurs soumettent à la Cour les questions suivantes aux fins d’examen :

  1. La Section d’appel des réfugiés a-t-elle commis une erreur en concluant que Mme Su n’était pas crédible en ce qui concerne la question de savoir si les deux hommes guyaniens noirs sont venus au domicile de son amie à sa recherche?

  2. La Section d’appel des réfugiés a-t-elle commis une erreur en concluant qu’il n’y avait pas de lien entre la race des demandeurs et la violence dont ils ont été témoins ou qu’ils ont subie?

IV.  Norme de contrôle

[9]  Le défendeur soutient que la norme de la décision raisonnable s’applique au contrôle judiciaire par la Cour des décisions de la Section d’appel des réfugiés. Les demandeurs ne se sont pas prononcés de façon particulière sur la norme de contrôle. Je suis d’accord pour dire que la Cour devrait appliquer la norme de la décision raisonnable aux questions soulevées dans la présente demande de contrôle judiciaire (voir Canada (Citoyenneté et Immigration) c Huruglica, 2016 CAF 93, au paragraphe 35).

V.  Discussion

A.  La Section d’appel des réfugiés a-t-elle commis une erreur en concluant que Mme Su n’était pas crédible en ce qui concerne la question de savoir si les deux hommes guyaniens noirs sont venus au domicile de son amie à sa recherche?

[10]  La Section d’appel des réfugiés a conclu que Mme Su était crédible en ce qui concerne les circonstances du vol, de l’agression et du meurtre du 6 août 2015. Toutefois, la Section d’appel des réfugiés a conclu qu’elle n’était pas crédible en ce qui concerne la preuve selon laquelle les deux hommes guyaniens noirs sont venus à sa recherche chez son amie, Mme Che, et a conclu, selon la prépondérance des probabilités, que cette visite par les auteurs allégués du crime n’a jamais eu lieu. Ses motifs concernant la conclusion défavorable sur la crédibilité comportent le fait que Mme Su n’a pas signalé cet incident à la police et n’a pas fait d’efforts pour déménager à un autre endroit avec sa famille.

[11]  Les demandeurs contestent le caractère raisonnable de l’analyse de la crédibilité effectuée par la Section d’appel des réfugiés et soutiennent également que la Section d’appel des réfugiés a omis d’admettre en preuve lors de l’appel une lettre de Mme Che, en date du 29 mars 2016, dans laquelle elle faisait allusion à la visite alléguée par les deux hommes noirs à son domicile et affirmait de plus les avoir vus ultérieurement dans un taxi stationné près de son domicile. La Section d’appel des réfugiés a accepté le fait que cette lettre satisfait au critère énoncé au paragraphe 110(4) de la LIPR concernant l’admission de nouveaux éléments de preuve en appel, étant donné qu’ils étaient postérieurs à la date de la décision de la Section de la protection des réfugiés du 3 mars 2016. Toutefois, s’appuyant sur l’analyse supplémentaire prescrite par la Cour d’appel fédérale dans Singh c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CAF 96, la Section d’appel des réfugiés n’a pas accepté la lettre en preuve en raison de préoccupations concernant sa crédibilité. Là encore, les demandeurs contestent l’analyse de la crédibilité effectuée par la Section d’appel des réfugiés.

[12]  Il n’est pas nécessaire que la Cour parvienne à une conclusion sur ces arguments concernant la crédibilité. La Section d’appel des réfugiés a conclu, selon la prépondérance des probabilités, que les allégations de Mme Su selon lesquelles elle était recherchée par les deux auteurs du meurtre de son époux n’étaient pas crédibles. Toutefois, la Section d’appel des réfugiés a également conclu que, même si elle avait jugé les allégations de Mme Su crédibles, il était spéculatif de sa part d’affirmer que les deux personnes qui étaient censément venues à sa recherche étaient les auteurs de ce crime.

[13]  Les observations écrites des demandeurs ne contestaient pas cette dernière conclusion. Toutefois, lorsque la question a été soulevée par la Cour à l’audition de la présente demande, les demandeurs ont mentionné le récit à l’appui du formulaire Fondement de la demande d’asile (FDA) de Mme Su, et plus précisément une modification où elle affirme que, alors qu’elle se cachait, son amie lui a dit que deux hommes guyaniens inconnus lui avaient demandé si une femme chinoise avec deux enfants résidait chez elle. Les demandeurs soutiennent que le fait que ces hommes connaissent la composition de sa famille et le fait qu’elle se cachait démontrent un lien entre le crime et le fait qu’ils sont à sa recherche.

[14]  Je ne peux conclure, au motif de cet argument, qu’il n’appartenait pas aux issues possibles et acceptables, et donc qu’il était déraisonnable pour la Section d’appel des réfugiés de conclure que Mme Su avait supposé que les deux personnes qui étaient censément à sa recherche étaient les auteurs du crime initial. Ainsi, même si les conclusions de la Section d’appel des réfugiés concernant la crédibilité étaient infirmées, cette conclusion de la Section d’appel des réfugiés demeurerait et minerait l’argument des demandeurs selon lequel le fait que les auteurs du crime étaient à la recherche de Mme Su, afin de se débarrasser de tout témoin, représente un risque personnalisé pour les demandeurs aux termes de l’analyse fondée sur l’article 97. Les arguments des demandeurs au sujet des conclusions de la Section d’appel des réfugiés concernant la crédibilité ne constituent donc pas un motif pour que la Cour conclue que la décision de la Section d’appel des réfugiés était déraisonnable.

B.  La Section d’appel des réfugiés a-t-elle commis une erreur en concluant qu’il n’y avait pas de lien entre la race des demandeurs et la violence dont ils ont été témoins ou qu’ils ont subie?

[15]  En effectuant l’analyse fondée sur l’article 96, la Section d’appel des réfugiés a conclu que le taux de criminalité à Georgetown, au Guyana, était extrêmement élevé, mais qu’il n’y avait pas de renseignements dans l’article présenté par les demandeurs qui laissaient entendre que les personnes d’origine chinoise étaient visées en raison de leur race. La Section d’appel des réfugiés a indiqué que les articles semblaient axés sur le fait que les personnes aisées financièrement étaient visées. La Section d’appel des réfugiés a conclu selon la prépondérance des probabilités que la communauté chinoise n’était pas visée en raison de son origine ethnique, mais qu’ils étaient plutôt visés à cause de leur situation financière.

[16]  Les demandeurs soutiennent que la Section d’appel des réfugiés s’est appuyée sur des décisions désuètes en renvoyant à Bacchus c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 821, et à Vickram c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2007 CF 457, pour étayer sa conclusion selon laquelle les personnes chinoises ne sont pas particulièrement visées au Guyana. Je suis d’accord avec la position des demandeurs pour dire que la situation régnant dans le pays peut changer et que chaque demande d’asile doit être évaluée en fonction de son propre fondement. Toutefois, je ne considère pas comme une erreur susceptible de révision le fait que la Section d’appel des réfugiés a renvoyé à ces décisions, étant donné qu’elle a aussi mené sa propre analyse des éléments de preuve documentaire.

[17]  Les demandeurs soutiennent également que la Section d’appel des réfugiés a commis une erreur en effectuant un examen sélectif de la preuve de la situation régnant au pays dont elle était saisie. Pour étayer cette position, les demandeurs s’appuient principalement sur deux articles qui ont été mis en preuve. Le premier, intitulé « Chinese Nationals being targeted; Police Patrols to increase – Rohee » (l’article Rohee), fait allusion à une augmentation subite des attaques criminelles à l’encontre de ressortissants chinois et leurs entreprises et indique que le ministre des Affaires intérieures, Clement Rohee, a tiré la conclusion que les gens d’affaires dans la communauté chinoise semblent être des cibles faciles étant donné qu’ils sont étrangers. Le second article, intitulé « Guyana’s new president should avoid being baited by Chinese investors, says author », rapporte les avis exprimés par un auteur, chercheur et journaliste né au Guyana qui décrit les investisseurs chinois au Guyana comme étant des exploitants commerciaux qui pillent le pays et propose que le président du Guyana ne les rencontre pas.

[18]  Je conclus que les arguments des demandeurs concernant les éléments de preuve documentaire sont sans fondement. C’est le même argument qui a été présenté à la Section d’appel des réfugiés dans le cadre de l’appel des demandeurs interjeté à l’encontre de la décision de la Section de la protection des réfugiés. La Section d’appel des réfugiés a expressément renvoyé aux deux articles susmentionnés et à l’argument des demandeurs selon lequel la Section de la protection des réfugiés a effectué un examen sélectif du contenu de ces articles. Toutefois, la Section d’appel des réfugiés avait conclu alors que la communauté chinoise était visée en raison de sa situation financière, et non à cause de l’origine ethnique. En ce qui concerne le deuxième article susmentionné, la Section d’appel des réfugiés a expressément indiqué que l’auteur est qualifié de [traduction] « parfois controversé » et que l’article représente ses opinions, et elle ne nie pas les documents concernant les activités criminelles en général à Georgetown et le fait que les propriétaires de petites entreprises sont visés. Les conclusions de la Section d’appel des réfugiés découlant de l’examen des éléments de preuve documentaire appartiennent aux issues possibles acceptables et ne justifient pas l’intervention de la Cour en ce qui concerne la décision.

[19]  Les demandeurs ont également présenté un argument s’appuyant sur Gonsalves c Canada (Procureur général), 2011 CF 648 [Gonsalves], qui a examiné la possibilité que la violence puisse être fondée sur des motifs mixtes. Dans cette décision, les demandeurs indo-guyaniens ont demandé l’asile en raison de leur crainte de violence du fait de leur origine ethnique aux mains des gangs criminels afro-guyaniens. Le juge Zinn a indiqué au paragraphe 29 que, lorsqu’il existe au moins un motif prévu par la Convention qui est fondé, on peut établir un lien. Étant donné qu’il y avait des éléments de preuve dont la Section de la protection des réfugiés était saisie dans cette décision-là concernant la possibilité de motifs mixtes, la Cour a conclu que la Section de la protection des réfugiés a commis une erreur en n’examinant pas s’il existait des motifs mixtes et, le cas échéant, si les motifs pouvaient constituer le lien exigé par la Convention.

[20]  Je conclus que Gonsalves n’aide pas les demandeurs à étayer leur thèse selon laquelle la décision de la Section d’appel des réfugiés était déraisonnable, étant donné que la preuve dont la Section de la protection des réfugiés est saisie dans cette décision, et le raisonnement de la Section de la protection des réfugiés qui a entraîné l’annulation de la décision, sont très différents de l’espèce. Dans Gonsalves, une preuve de remarques racistes contre les demandeurs pendant les incidents qu’ils alléguaient avait été présentée, à l’appui de la conclusion que le motif n’était pas purement économique. Il n’y a pas de tels éléments de preuve en l’espèce. Le juge Zinn a conclu que la conclusion de la Section de la protection des réfugiés que les incidents dans cette décision étaient fondés sur des motifs économiques et non racistes était déraisonnable, étant donné qu’elle abordait la question du motif comme une question fermée. La Section de la protection des réfugiés a fait allusion à la divergence des opinions concernant la question de savoir si les Indo-Guyaniens sont des cibles privilégiées des criminels en raison de leur situation économique ou raciale, puis a préféré l’explication de l’influence économique. En l’espèce, la Section d’appel des réfugiés n’a pas conclu qu’il y avait une divergence d’opinions sur les motifs pour ensuite en choisir un de façon inappropriée sans décider si l’autre pouvait également s’appliquer. Elle a plutôt examiné la preuve et conclu que le motif était de nature économique.

[21]  Enfin, les demandeurs ont soulevé, à l’audition de la présente demande, l’argument selon lequel la Section d’appel des réfugiés a omis d’envisager la possibilité que le lien exigé par la Convention découle de la complicité de la police fondée sur des motivations raciales dans les crimes commis contre les demandeurs ainsi que la communauté chinoise. Les demandeurs s’appuient sur la décision Cao c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 1393 [Cao], dans laquelle le juge Bell a conclu que la décision de la Section d’appel des réfugiés était déraisonnable, étant donné qu’elle n’avait pas abordé la question de savoir si les demandeurs dans cette cause étaient des cibles faciles en raison d’un racisme systémique de la part de la police contre les personnes d’origine chinoise.

[22]  Le défendeur a relevé que cet argument n’avait pas été soulevé avant l’audition de la présente demande de contrôle judiciaire, mais a néanmoins présenté des observations en réponse. Le défendeur a reconnu que les observations écrites des demandeurs devant la Section d’appel des réfugiés faisaient allusion au fait que la police ne portait pas suffisamment attention aux crimes contre les Guyaniens d’origine chinoise. Ces observations renvoient à l’article Rohee qui mentionne le fait que la police guyanienne n’avait pas porté son attention sur les crimes commis contre les Chinois, par conséquent, les Guyaniens chinois sont des cibles de crime particulièrement faciles. Les demandeurs ont soutenu que cela correspondait à leur expérience, à savoir que Mme Su avait signalé le meurtre de son époux à la police et a fait un suivi avec eux à trois reprises, mais elle n’a vu aucun indice qu’ils enquêtaient sur le meurtre.

[23]  Toutefois, le défendeur fait valoir que cette observation représente un seul paragraphe dans la totalité de l’argument des demandeurs et soutient qu’une distinction peut être faite avec la décision Cao, étant donné que cette décision comprenait des allégations précises et des éléments de preuve de racisme de la part de la police, qui avaient à plusieurs reprises fait des commentaires selon lesquels les familles chinoises causaient beaucoup de problèmes.

[24]  En réponse, les demandeurs renvoient au récit dans le FDA de Mme Su, où elle déclare qu’elle ne fait aucune confiance à la capacité de la police guyanienne de protéger les demandeurs. Comme il a été relevé par la Section d’appel des réfugiés, Mme Su est entrée en contact avec la police guyanienne trois fois avant de quitter le Guyana et trois autres fois après son arrivée au Canada. Les demandeurs soutiennent qu’il est compréhensible que lorsqu’on leur dit à plusieurs reprises tout simplement que la police est en train d’enquêter sur le crime ne leur inspire pas confiance dans la capacité de la police de leur offrir une protection. Les demandeurs font également allusion à un article des éléments de preuve documentaires qui décrit la fusillade ayant causé la mort d’un ressortissant chinois à Georgetown lors d’une tentative de vol. L’article communique la déception exprimée par un autre ressortissant chinois du fait que la police n’était pas sur la route avec ses effectifs habituels.

[25]  Je suis d’accord avec l’observation du défendeur pour dire que la preuve en l’espèce est sensiblement différente de celle présentée dans la décision Cao. Il n’y a rien dans la preuve de Mme Su concernant son expérience personnelle qui semble laisser entendre que la police guyanienne avait des motivations raciales pour ne pas enquêter sur le meurtre de son époux. Je n’interprète pas non plus l’article qui décrit la tentative de vol et la fusillade ayant causé la mort du ressortissant chinois comme appuyant la conclusion voulant que la police ait offert délibérément une protection inadéquate aux Chinois au Guyana. L’article Rohee, que les demandeurs citent dans leurs observations à la Section d’appel des réfugiés, n’étaye pas non plus une telle conclusion. L’article rapporte plutôt la déclaration du ministre Rohee qu’en réponse à l’augmentation subite des attaques contre les ressortissants chinois et leurs entreprises, la communauté des affaires chinoise a été rassurée par la police que les patrouilles seraient intensifiées dans la région de Georgetown.

[26]  Dans la décision Cao, le juge Bell a conclu que la Section d’appel des réfugiés avait confondu les principes de la protection de l’État et la persécution fondée sur la race, en concluant que la preuve de commentaires de la police qui laissaient croire à du racisme constituait une omission locale et n’appuyait pas la conclusion que le Guyana n’offrait pas une protection de l’État adéquate. Par conséquent, la Cour a annulé la décision de la Section d’appel des réfugiés étant donné qu’elle a omis d’évaluer la preuve du racisme dont aurait fait preuve la police en établissant un lien avec un motif prévu par la Convention. Compte tenu du dossier de la preuve dont la Section d’appel des réfugiés était saisie en l’espèce, je ne peux pas conclure que le fait que la Section d’appel des réfugiés n’a pas effectué ce type d’analyse, que le juge Bell a considéré comme nécessaire dans la décision Cao, rend déraisonnable la décision de la Section d’appel des réfugiés en l’espèce.

[27]  Puisque j’ai déterminé que la Section d’appel des réfugiés n’a commis aucune erreur susceptible de révision, la présente demande de contrôle judiciaire doit être rejetée. Aucune des parties n’a proposé de question aux fins de certification, et aucune question n’est mentionnée.


JUGEMENT

LA COUR rejette la présente demande de contrôle judiciaire. Aucune question n’est certifiée aux fins d’un appel.

« Richard F. Southcott »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 25e jour d’octobre 2019

Lionbridge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-3112-16

INTITULÉ :

WUFEI HUANG SU (AUSSI CONNUE SOUS LE NOM DE) WU FEI HUANG SU), ERIC SU, SIMON SU c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

TORONTO (Ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 14 février 2017

JUGEMENT ET MOTIFS :

Le juge Southcott

DATE DES MOTIFS :

Le 28 février 2017

COMPARUTIONS :

Stephanie Fung

POUR LES demandeurs

Manuel Mendlezon

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Lewis & Associates

Avocats

Toronto (Ontario)

POUR LES DEMANDEURS

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

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