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Date : 20170220


Dossier : IMM-2884-16

Référence : 2017 CF 203

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Toronto (Ontario), le 20 février 2017

En présence de madame la juge Strickland

ENTRE :

DEBBIE ANN ORBIZO

demanderesse

et

LE MINISTRE DE L’IMMIGRATION, DES RÉFUGIÉS ET DE LA CITOYENNETÉ

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]  Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision datée du 27 juin 2016 par laquelle une agente d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (l’agente) a refusé d’autoriser la demanderesse à présenter une demande de résidence permanente depuis le Canada fondée sur des motifs d’ordre humanitaire en vertu du paragraphe 25(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la Loi).

[2]  La demande de contrôle judiciaire est accueillie pour les motifs qui suivent.

Contexte

[3]  La demanderesse est une citoyenne des Philippines. Elle a présenté une demande de permis de travail dans le cadre du Programme concernant les aides familiaux résidants, permis qui a été délivré par le bureau des visas de Hong Kong le 2 mars 2009. Le 9 mars 2009, la demanderesse est arrivée au Canada et fait valider son permis de travail au point d’entrée.

[4]  Le 12 mai 2009, et peu après le début de son emploi comme aide familiale résidante (aide familiale) à Toronto en Ontario, la demanderesse a été admise à l’hôpital, souffrant d’hémoptysie et en raison de plusieurs problèmes médicaux. Elle a reçu un diagnostic de syndrome rénal pulmonaire. Par la suite, la demanderesse a reçu un diagnostic d’insuffisance rénale au stade terminal, ce qui nécessite une dialyse trois fois par semaine. Elle est une candidate potentielle à une greffe de rein. Une note rédigée par un médecin en date du 5 août 2015 indique également que la demanderesse doit subir une parathyroïdectomie en raison de son état.

[5]  Le 4 août 2009, la demanderesse a présenté une demande de fiche du visiteur puisqu’elle n’était plus en mesure de travailler comme aide familiale en raison de son état de santé. La fiche du visiteur a été accordée et était valide jusqu’au 30 novembre 2011. Le 2 décembre 2011, la demanderesse a présenté une demande de résidence permanente fondée sur des considérations d’ordre humanitaire (demande CH) et a présenté une demande de dérogation à une interdiction de territoire présumée pour motifs sanitaires. Le 23 décembre 2011, la demanderesse a présenté une deuxième demande de fiche du visiteur, laquelle a été accordée et était valide jusqu’au 4 août 2014. Le 31 mai 2012, la demanderesse fut déclarée interdite de territoire pour des raisons médicales et, le 9 septembre 2013, sa demande de résidence permanente pour des considérations d’ordre humanitaire a été rejetée. Le 27 décembre 2013, la demanderesse a déposé une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire de cette décision. Le 24 octobre 2014, elle a de nouveau présenté une demande de fiche du visiteur, laquelle a été accordée et était valide jusqu’au 22 février 2016.

[6]  Le 18 décembre 2014, l’autorisation a été accordée à l’égard de la demande de contrôle judiciaire, cependant, le 20 février 2015, la demande a été abandonnée puisque le ministre a accepté que l’affaire fasse l’objet d’un examen par un nouveau décideur. C’est la décision rendue à la suite de ce nouvel examen qui fait l’objet de la présente demande.

La décision visée par le contrôle judiciaire

[7]  L’agente a relaté les antécédents de la demanderesse en matière d’immigration, la conclusion d’interdiction de territoire pour des motifs sanitaires, ainsi que les préoccupations de l’agente à l’égard du représentant de la demanderesse concernant son entrée au Canada et si elle était entrée au pays de mauvaise foi. En ce qui a trait à ce point, l’agente a conclu que la demanderesse a peut-être obtenu son visa de travail de bonne foi, croyant être en mesure de travailler en tant qu’aide familiale, mais que finalement, elle n’a été en mesure de travailler que quelques semaines avant que son état de santé ne se détériore au point de nécessiter une hospitalisation.

[8]  L’agente a alors examiné certaines parties des observations faites par l’avocat de la demanderesse le 23 mars 2015, notamment que sa famille, son église et ses amis au Canada la soutiennent financièrement en ce qui a trait à ses frais médicaux et autres frais de subsistance; qu’elle est demeurée au Canada afin de recevoir des traitements de dialyse qui ne sont pas disponibles aux Philippines; qu’elle est incapable de travailler en raison de son état de santé, mais a trouvé des moyens de contribuer de façon significative à la société grâce au travail bénévole qu’elle accomplit à son église et en donnant des cours de musique; qu’elle est candidate à une greffe de rein et est sur une liste d’attente depuis 2010, mais n’est pas admissible à des soins prodigués dans le secteur privé parce qu’elle n’a pas les moyens de payer les frais, et elle n’est pas couverte par le programme d’assurance maladie de l’Ontario; et, qu’elle n’aurait pas le même genre de soutien communautaire essentiel aux Philippines.

[9]  Dans son analyse des considérations d’ordre humanitaire, l’agente a examiné son réseau familial et social au Canada en signalant qu’elle semble avoir un vaste réseau d’amis, surtout du fait de l’appartenance à son église. L’agente cite des parties d’une lettre de la tante de la demanderesse qui réside au Canada ainsi que des extraits d’autres lettres d’appui. L’agente déclare que, à son honneur, la demanderesse a travaillé très fort pour construire un réseau d’amis sur qui elle compte pour l’ensemble de ses besoins financiers. Le bénévolat et l’interaction avec les membres de son église semblent constituer l’essentiel de ses activités depuis qu’elle est au Canada. L’agente a également remarqué que le père de la demanderesse, peut-être sa mère, son frère et son mari résident aux Philippines.

[10]  En ce qui concerne la disponibilité des services de santé aux Philippines, l’agente a pris note de la preuve par affidavit souscrit par la demanderesse et les observations faites par son ancien avocat dans lesquelles il expliquait qu’il y a un programme d’assurance maladie aux Philippines, connu sous le nom de PhilHealth, mais qu’il est assujetti à un plafond des frais admissibles, ne comprend pas d’assurance-médicaments et fournit un nombre insuffisant de séances de dialyse. L’agente fait remarquer que l’avocat a reconnu que la demanderesse pourrait être en mesure d’accéder à des soins de santé grâce à un programme parrainé par le gouvernement (« Programme de parrainage ») offrant une couverture pour les personnes indigentes, bien qu’il risque de ne pas suffire à combler ses besoins de dialyse, à laquelle la demanderesse doit se soumettre trois fois par semaine, et qu’elle aurait à payer de sa poche les coûts associés aux soins supplémentaires et à tous les médicaments qui ne sont pas couverts. L’agente fait également remarquer que la greffe du rein est disponible aux Philippines. L’agente a fait des calculs et comparé le coût du traitement d’une maladie rénale au stade terminal au Canada et aux Philippines et souligne que le coût est beaucoup moins élevé aux Philippines.

[11]  Après avoir examiné ces facteurs, l’agente rend ensuite sa décision. Elle déclare d’abord que les considérations d’ordre humanitaire dont il convient généralement de tenir compte sont les liens familiaux au Canada, si la demanderesse est bien établie dans la communauté et si elle peut subvenir à ses propres besoins économiques, et à quelles difficultés la demanderesse ou les membres de sa famille pourraient faire face s’ils retournaient dans leur pays d’origine. Cette demande était cependant quelque peu différente, sa motivation principale semblant être l’accès au système de soins de santé canadien et à la liste de transplantation d’organes. L’agente note qu’au cours des sept dernières années, la demanderesse n’a pas travaillé et n’a pas eu droit à des soins de santé des réseaux provincial ou fédéral. L’agente constate que la demanderesse ne s’est pas établie au pays sur le plan économique et que la plus grande partie de sa famille, dont son mari, est aux Philippines.

[12]  L’agente constate également que la demanderesse s’est constitué un vaste réseau confessionnel de soutien gravitant autour de son église qui paie ses frais de subsistance et ses traitements médicaux coûteux. Les lettres d’appui ont démontré que les liens que la demanderesse entretient avec ses amis et sa tante sont très forts et ont franchi des continents dans le passé. L’agente déclare qu’il serait étonnant que ce groupe tissé serré ne continue pas à aider la demanderesse si elle devait retourner aux Philippines. La preuve a d’ailleurs démontré que la demanderesse devrait payer au moins une partie des traitements de dialyse aux Philippines. Cependant, même si l’État ne couvrait pas tous les coûts, la demanderesse, les amis de son église au Canada et sa famille aux Philippines auraient à assumer des coûts moindres que ce qui est actuellement nécessaire pour assumer les soins médicaux de la demanderesse au Canada.

[13]  L’agente mentionne que la situation de la demanderesse est regrettable, mais qu’étant donné que le traitement de sa maladie est disponible aux Philippines, il n’est pas nécessaire qu’elle demeure au Canada. Les liens de la demanderesse au Canada comparativement aux Philippines; le fait que des traitements sont disponibles aux Philippines; le fait que le rejet de sa demande de résidence permanente n’entraînerait pas l’interruption de l’accès à un régime d’assurance maladie subventionné auquel elle se serait habituée; tous ces facteurs considérés dans leur ensemble ont amené l’agente à conclure qu’il n’y avait pas suffisamment de considérations d’ordre humanitaire justifiant une exception à l’interdiction de territoire pour motifs sanitaires.

[14]  L’agente a également refusé d’accorder un permis de résidence temporaire, mais cette décision ne fait pas l’objet du présent contrôle judiciaire.

Questions en litige et norme de contrôle

[15]  À mon avis, les questions soulevées par la demanderesse relèvent toutes de la question de savoir si l’agente a rendu une décision raisonnable. Il a déjà été déterminé que la norme de contrôle applicable à la décision d’un agent chargé d’examiner une demande fondée sur des considérations d’ordre humanitaire est la norme de la décision raisonnable (Basaki c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 166, au paragraphe 18 [Basaki]; Richard c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 1420, au paragraphe 14).

Position de la demanderesse

[16]  La demanderesse soutient que l’agente a mal compris la preuve en ce qui concerne le système de soins de santé aux Philippines. Les Philippines ont un système de soins de santé fondé sur la contribution des patients, le Philippine Health Insurance Corporation ou « PhilHealth ». L’accès aux soins est limité à ceux qui ont versé des cotisations et il y a aussi un plafond annuel des coûts couverts. La demanderesse a d’abord soutenu que le plafond pour l’hémodialyse est de 45 jours par an, ce qui signifie que PhilHealth ne couvre que 45 traitements par an. Toutefois, dans les observations qu’elle a présentées à l’agente et lorsqu’elle a comparu en cour, elle a reconnu que le plafond de PhilHealth avait été haussé à 90 jours ou 90 traitements. PhilHealth a également créé un programme de parrainage qui permet à des individus considérés comme indigents de bénéficier de la couverture médicale, même s’ils n’ont pas contribué au programme. Une fois inscrites au Programme de parrainage, ces personnes ont accès à la même couverture que les membres contributeurs. La demanderesse serait très probablement classée dans cette catégorie, étant donné son incapacité à travailler et à contribuer à PhilHealth.

[17]  La demanderesse soutient qu’une lecture des motifs de l’agente laisse croire que l’agente avait l’impression que le fait d’être inscrit au Programme de parrainage signifie que l’on peut obtenir une subvention couvrant des soins dans une mesure allant au-delà de ce qui est assuré par l’habituelle couverture de PhilHealth. C’est cependant incorrect. À l’appui de cet argument, la demanderesse soutient que l’agente a mal compris un article qui mentionnait une couverture annuelle de 250 000 pesos philippins (P) pour les membres. Selon la demanderesse, l’agente a compris que cela signifiait que les membres avaient droit à ce montant en plus de la limite de 45 jours de dialyse, alors que ce montant représente uniquement la valeur monétaire de la limite de 45 jours de dialyse fixée par PhilHealth.

[18]  La demanderesse soutient également que la conclusion de l’agente quant au caractère adéquat de PhilHealth pour répondre à ses besoins fait fi de l’élément de preuve qu’elle a déposé démontrant qu’elle doit maintenant aussi subir une parathyroïdectomie. L’agente a omis de prendre en compte le coût de cette intervention chirurgicale ou, à titre subsidiaire, le coût des soins médicaux dont la demanderesse aura besoin si elle est incapable d’obtenir la chirurgie. L’agente n’a pas non plus évalué si la chirurgie dont la demanderesse a besoin serait couverte par PhilHealth étant donné que les traitements de dialyse à eux seuls excèdent la limite des soins auxquels elle a droit.

[19]  La demanderesse a également fait valoir que même si l’agente a conclu à juste titre qu’elle n’aurait besoin que de 12 300 $ par année pour couvrir ses besoins de dialyse, l’agente ne prend pas en considération les éléments de preuve de la demanderesse démontrant qu’elle ne peut travailler en raison de son état de santé et que les membres de sa famille n’ont pas les moyens de la soutenir.

[20]  La demanderesse soutient que l’hypothèse de l’agente voulant que les membres de la communauté de la demanderesse au Canada paie pour ses soins médicaux aux Philippines ne repose sur aucun élément de preuve. L’agente se fonde sur cette hypothèse pour appuyer la conclusion selon laquelle la demanderesse pourrait payer ses traitements aux Philippines. La demanderesse ajoute que la preuve indique que le soutien financier qu’elle reçoit n’est pas suffisant pour couvrir sa chirurgie.

[21]  La demanderesse soutient que l’agente a conclu que [traduction] « globalement, en prenant en compte...le fait qu’un rejet de sa demande de résidence permanente n’entraînerait pas d’interruption à un régime d’assurance maladie subventionné auquel elle se serait habituée » va à l’encontre de la façon dont les demandes CH doivent être considérées. Il est arbitraire de suggérer qu’un demandeur subirait un préjudice minime ou moins de difficultés simplement du fait qu’il est déjà « habitué » à de telles difficultés. Conformément à l’arrêt de la Cour suprême du Canada dans Kanthasamy c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CSC 61 [Kanthasamy], une demande CH doit adopter l’approche établie dans Chirwa c. Canada (Ministre de la Main-d'oeuvre et de l’Immigration) (1970), 4 A.I.A. 338 (Comm. d’appel de l’imm.) [Chirwa] où il a été soutenu que « la signification de l’expression motifs de pitié » doit donc être interprétée comme signifiant « des faits établis par la preuve, de nature à inciter tout homme raisonnable [sic] d’une société civilisée à soulager les malheurs d’une autre personne » (Kanthasamy, aux paragraphes 13 et 21; Chirwa, p. 350).

Position du défendeur

[22]  Le défendeur soutient que l’octroi d’une exemption en vertu de l’article 25 est de nature hautement discrétionnaire et qu’il incombe au demandeur de fournir la documentation sur laquelle la décision sera fondée (Bichari c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CF 127, au paragraphe 26 [Bichari]; Gomes c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2009 CF 98, aux paragraphes 10 à 13).

[23]  De plus, le fait même qu’une personne soit interdite de territoire pour motifs sanitaires ne peut constituer un motif d’ordre humanitaire justifiant d’accorder la mesure d’exception en question (Gonzalo c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 526, aux paragraphes 27 et 28 et 30 [Gonzalo]). Et, lorsque l’enjeu est la demande excessive à l’égard des services de santé au Canada, notre Cour a déterminé que le manque d’accès à des soins médicaux gratuits dans le pays d’origine n’est pas suffisant pour justifier l’octroi d’une exemption de l’interdiction de territoire (Bichari, au paragraphe 28). Notre Cour a également confirmé le refus d’accorder une exemption pour motifs sanitaires dans des circonstances similaires impliquant un demandeur des Philippines souffrant d’une maladie rénale et, bien que le traitement requis dans le cas de ce demandeur fût différent, il est significatif que cette décision ait été rendue avant que la couverture offerte par PhilHealth ne soit élargie aux indigents (Voluntad c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 1361, aux paragraphes 19 et 20 [Voluntad]).

[24]  Le défendeur soutient que, selon la preuve au dossier dont elle disposait, l’agente a raisonnablement conclu que la demanderesse avait accès à des traitements subventionnés par le programme national d’assurance-maladie aux Philippines, en combinaison avec d’autres programmes de santé. En outre, plusieurs éléments de preuve au dossier confirment que l’accès à l’hémodialyse est abordable et que PhilHealth a récemment mis en œuvre un forfait « exceptionnel » de soins pour les membres ayant besoin d’une transplantation rénale. Le forfait d’un coût de 600 000 P couvre une variété de frais associés aux transplantations rénales chez les patients à faible risque. Le défendeur fait en outre remarquer qu’un autre article indique que la couverture de la dialyse de PhilHealth a été étendue de 45 à 90 séances par année.

[25]  Le défendeur n’est pas d’accord avec l’argument de la demanderesse voulant que l’agente ait compris à tort que le Programme de parrainage constituait une couverture supplémentaire en plus de la couverture habituelle de PhilHealth et soutient que ce la décision n’étaye pas cette assertion. La décision reconnaît clairement que la couverture dont pourrait se prévaloir la demanderesse aux Philippines semble ne pas suffire à la fréquence de traitement dont elle a besoin et qu’elle aurait besoin de payer de sa poche les [traduction] « traitements et médicaments supplémentaires ».

[26]  Quant au coût de la parathyroïdectomie, le défendeur soutient qu’aucun élément de preuve n’a été présenté en ce qui concerne le coût de cette chirurgie et les modalités de sa couverture par PhilHealth. De plus, il n’y a aucune indication quant à l’urgence de la chirurgie. Compte tenu de la simple affirmation de la demanderesse que PhilHealth ne couvre pas la chirurgie et qu’il lui incombe d’en assumer les coûts, l’agente n’était pas tenue d’aborder cette observation.

[27]  Le défendeur fait également valoir que l’agente n’a pas erré en concluant que ce que ne couvre pas le réseau de santé philippin pourrait être payé par la famille de la demanderesse et ses amis de l’église. La demanderesse n’a pas travaillé au Canada depuis 2009, n’a reçu aucune aide financière du gouvernement pour ses traitements au Canada qui coûtent environ 83 000 $ par année, mais a néanmoins été en mesure de recevoir ses traitements pendant de nombreuses années. Elle fait valoir qu’elle [traduction] « est soutenue financièrement par sa famille, son église et ses amis pour payer ses factures de soins médicaux et autres frais de subsistance ». Aucun autre élément de preuve, notamment en ce qui concerne l’identité de la personne ou des personnes assurant le paiement de ces dépenses, n’a été fourni. Les lettres d’appui ne suggèrent pas non plus que la demanderesse perdrait l’appui financier de sa communauté d’amis et de sa famille si elle quittait le Canada. L’agente a conclu que le coût des traitements de la demanderesse aux Philippines représenterait environ un sixième du coût en vigueur au Canada.

[28]  Le défendeur souligne également que dans son témoignage sous serment en 2011, la demanderesse affirmait que son revenu familial était insuffisant pour absorber le coût des traitements aux Philippines. Cet élément de preuve doit cependant être considéré dans son contexte et en fonction du moment où la demanderesse a été assermentée, de la couverture disponible à l’époque et du fait que la demanderesse soutient encore maintenant qu’elle n’est admissible à aucune couverture. À ce titre, l’agente n’a pas erré en concluant que le réseau de soutien financier qui lui permet d’avoir accès à des traitements au Canada ne serait pas disponible pour l’appuyer dans son accès aux traitements subventionnés et moins coûteux aux Philippines.

Analyse

[29]  Le paragraphe 25(1) de la LIPR constitue un recours exceptionnel. Il permet aux ressortissants étrangers qui font une demande de résidence permanente au Canada, mais qui sont interdits de territoire, de voir leur situation examinée, et leur résidence permanente, ou une exemption de toute obligation ou critère applicable de la LIPR, accordée, si le ministre est d’avis que cela est justifié par des considérations d’ordre humanitaire. Cela soulage une telle personne du fardeau d’avoir à quitter le Canada, en raison des difficultés qu’elle doit affronter, pour présenter une demande de résidence permanente par la voie normale (Shrestha c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 1370, au paragraphe 11; Rocha c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 1070, au paragraphe 16; Basaki, au paragraphe 20). Dans cette affaire, la demanderesse demande une exemption du paragraphe 38(1) de la LIPR, étant donné que les ressortissants étrangers sont interdits de territoire pour des motifs sanitaires si leur état de santé risque d’entraîner un fardeau excessif pour les services sociaux ou de santé.

[30]  Son interdiction de territoire est décrite dans la déclaration médicale :

Cette demanderesse âgée de 30 ans souffre d’insuffisance rénale au stade terminal et son état requiert des traitements de dialyse trois fois par semaine. Elle est admissible à une transplantation rénale. Rapport médical rédigé par le Dr Tobe, néphrologue, daté du 1er mai 2012.

Cet état de santé est tel qu’il [sic] exige une évaluation continue et un suivi par un spécialiste dans le traitement des maladies du rein. Elle doit se soumettre à la dialyse pour survivre et éventuellement être candidate à la transplantation rénale. Ces services coûtent cher et certains sont très demandés. Après avoir consulté les résultats de cet examen médical et tous les rapports que j’ai reçus relativement à l’état de santé de la demanderesse, j’en conclus qu’elle souffre d’un problème de santé qui pourrait raisonnablement entraîner un fardeau excessif pour les services de santé du Canada. Plus précisément, on pourrait raisonnablement s’attendre à ce que cet état de santé requière des services de santé, dont les coûts excéderaient probablement la moyenne des coûts par personne du Canadien moyen sur cinq ans, et engorge les listes d’attente existantes et retarde ou empêche la prestation de ces services à ceux qui en ont besoin et y ont droit au Canada. Elle est par conséquent interdite de territoire au Canada en vertu de l’alinéa 38(1)c) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés.

[31]  Comme l’a énoncé la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Kanthasamy, l’obligation de quitter le Canada comporte inévitablement son lot de difficultés, mais cette seule réalité ne saurait généralement justifier une dispense pour considérations d’ordre humanitaire (au paragraphe 23). Ce qui justifie une dispense en vertu de l’article 25 dépend évidemment des faits et du contexte du dossier, mais l’agent appelé à se prononcer sur l’existence de considérations d’ordre humanitaire doit véritablement examiner tous les faits et les facteurs pertinents portés à sa connaissance et leur accorder du poids (Kanthasamy, aux paragraphes 25 et 33; Marshall c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 72, au paragraphe 33 [Marshall]). De plus, en examinant si une dispense doit être accordée, l’expression difficultés « inhabituelles et injustifiées » ou « démesurées » que l’on retrouve dans les lignes directrices (Citoyenneté et Immigration Canada, Traitement des demandes au Canada, « IP 5 : Demande présentée par des immigrants au Canada pour des motifs d’ordre humanitaire ») doit être lue de manière holistique, instructive et descriptive, et non d’une manière qui restreint sa faculté d’examiner et de soupeser toutes les considérations d’ordre humanitaire pertinentes. (Kanthasamy, aux paragraphes 23, 25, 31 et 33; Horvath c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 1261, aux paragraphes 33 à 35; Nguyen c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 27, aux paragraphes 27 et 28). La Cour suprême du Canada a également noté que l’approche de Chirwa emploie le libellé qui y figure comme s’il coexistait avec celui des Lignes directrices (Kanthasamy, aux paragraphes 30 et 31; Marshall, au paragraphe 27).

[32]  Il incombe au demandeur de fournir la documentation sur laquelle cette décision est fondée (Bichari, au paragraphe 26; Bruce c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 1049, au paragraphe 11 [Bruce]; Basaki, au paragraphe 20). La décision est hautement discrétionnaire et notre Cour a statué que les agents d’immigration disposent habituellement d’un vaste éventail d’issues (Gonzalo, au paragraphe 11; Bruce, au paragraphe 10).

[33]  En ce qui a trait à l’évaluation des éléments de preuve concernant l’accès aux traitements médicaux aux Philippines, aucun fondement n’étaye l’observation de la demanderesse voulant qu’une lecture des motifs de l’agente suggère qu’elle a, à tort, l’impression que le fait d’être admissible au Programme de parrainage signifie que l’on peut obtenir des soins dans une mesure allant au-delà du plafond annuel fixé à 250 000 P par PhilHealth.

[34]  La référence que fait l’agente au plafond annuel de 250 000 P renvoie à son calcul du coût des traitements de la demanderesse aux Philippines par rapport au Canada. À cet égard, l’agente cite un article du SunStar daté du 20 juin 2011. L’agente cite précisément et exactement la description faite dans l’article du coût mensuel des traitements pour ceux qui ont une insuffisance rénale de stade terminal et doivent se soumettre à la dialyse :

[traduction] Des experts des maladies du rein ont déclaré lundi que chaque patient atteint d’une insuffisance rénale de stade terminal qui doivent se soumettre à la dialyse doivent avoir au moins 57 600 P par mois pour survivre… chaque séance de dialyse coûterait de 1 800 à 3 500 P et le patient doit se soumettre à ce processus deux fois par semaine… et prendre un médicament injectable qui coûte généralement de 1 000 à 1 500 P, de même que des comprimés qui coûtent habituellement au moins de 200 à 500 P par jour.

L’agente a converti la projection mensuelle de 57 600 P à 1 600 dollars canadiens en utilisant le taux de conversion de la Banque du Canada en vigueur le 16 mai 2016, ce qui suggère un taux de conversion de 36 P pour un dollar. Elle a ensuite noté que la dialyse au Canada coûte environ 83 000 $ par patient par année, ou 6 916 $ par mois, concluant que le coût des traitements liés à l’insuffisance rénale de stade terminal semble être beaucoup moins élevé aux Philippines qu’au Canada.

[35]  L’agente a alors noté, comme discuté plus tôt dans ses motifs, que la demanderesse peut être en mesure de bénéficier de soins subventionnés. Encore une fois l’agente cite exactement le même article mentionnant que « chaque patient qui est membre de PhilHealth peut se prévaloir d’un montant de 250 000 P par année qui sera réparti en quatre trimestres ». L’agente indique qu’avec cette subvention, le coût annuel de la dialyse aux Philippines serait réduit de 691 200 P (c.-à-d., 57 600 P multiplié par 12 mois) à 331 200 P (c.-à-d., 691 200 P moins 250 000 P, cependant, comme l’a souligné le défendeur, c’est une erreur de typographie, puisque le montant aurait dû être de 441 200 P). L’agente affirme ensuite que cela équivaut à environ 12 300 $. Ce chiffre confirme l’erreur typographique puisqu’en utilisant le total exact des dépenses engagées de 441 200 P divisé par 36 P, on obtient 12 300 $. Les motifs ne contiennent rien qui pourrait indiquer que l’agente laisse entendre que les 45 séances de dialyse sont facturées en sus du plafond annuel de 250 000 P. Nulle part l’agente ne soulève même les 45 séances de dialyse dans ce calcul et il est évident que l’agente s’est livrée à cet exercice mathématique afin d’établir ce que le coût réel serait pour la demanderesse, avec ou sans assurance. Je ne vois aucun fondement sur lequel pourrait reposer l’allégation de malentendu de la demanderesse.

[36]  La demanderesse soutient également que l’agente a commis une erreur en omettant de tenir compte de son témoignage indiquant que son état requiert une parathyroïdectomie, comme décrit dans une lettre du Dr Naimark datée du 5 août 2015. Cette lettre précise que la demanderesse est atteinte d’une complication fréquente de l’insuffisance rénale de stade terminal, l’hyperparathyroïdie. Cette maladie peut être traitée à l’aide de médicaments, mais en cas d’échec, on recommande aux patients de subir la parathyroïdectomie. Le Dr Naimark précise que l’état de la demanderesse requiert la chirurgie. Elle ne peut cependant pas avoir accès à la chirurgie parce qu’elle n’a pas d’assurance maladie. Le but de sa lettre est mentionné et il est d’informer que le retard dans l’obtention de son statut d’immigrant ayant reçu le droit d’établissement retarde son admissibilité au régime d’assurance maladie et que cela a des conséquences importantes sur la santé de la demanderesse. Le Dr Naimark ne précise pas la nature de ces conséquences, mais souligne que sans parathyroïdectomie, la demanderesse est susceptible de fractures débilitantes et de complications vasculaires telles que l’accident vasculaire cérébral, l’infarctus du myocarde et les maladies vasculaires périphériques. En conséquence, il demande que son cas soit résolu sans délai.

[37]  Compte tenu de cet élément de preuve, je ne suis pas convaincu par l’argument du défendeur, selon lequel il n’y a aucune indication quant à l’urgence de la chirurgie. À mon avis, la remarque du Dr Naimark voulant que l’état de la demanderesse en est au point où la médication n’est d’aucun secours implique un degré d’urgence. Le défendeur signale cependant à juste titre que la demanderesse n’a fourni aucun élément de preuve démontrant que cette chirurgie n’est pas disponible aux Philippines, par PhilHealth ou autrement. À cet égard, un avis publié par PhilHealth en 2011 intitulé [traduction] « La politique de non-facturation de solde (NBB) vise les membres du Programme de parrainage admis dans les hôpitaux gouvernementaux », indique que le coût d’une « thyroïdectomie » serait couvert pour un membre parrainé jusqu’à concurrence de 31 000 P, ce qui suggère que la procédure est disponible et que son coût serait au moins partiellement couvert par PhilHealth.

[38]  En outre, dans ses motifs l’agente fait bien référence à l’observation de l’avocat de la demanderesse quant à l’éventualité d’une facturation d’une partie du coût de la parathyroïdectomie. Cette référence était toutefois limitée à affirmer que l’augmentation des séances de dialyse de 45 à 90 séances par année [traduction] « ne couvrirait pas le coût des traitements supplémentaires que l’état de Mme Orbizo requiert, notamment la parathyroïdectomie ».

[39]  À mon avis, puisque la demanderesse n’a pas établi que ses besoins médicaux ne peuvent pas être comblés aux Philippines, l’agente n’a pas erré dans sa conclusion à cet égard. La préoccupation de la demanderesse est en fait le coût de ces services qui, selon elle, représente une difficulté parce qu’elle n’a pas les moyens de se les payer. Elle est particulièrement préoccupée par le fait que le Programme de parrainage auquel elle pourrait être admissible ne couvrirait que les soins jusqu’à concurrence de 250 000 P par année, une allocation qui sera entièrement épuisée par deux séances de dialyse par semaine. Par conséquent, le coût des séances de dialyse supplémentaires, de la parathyroïdectomie ou de toute autre assistance médicale excédant ce montant sera à ses frais.

[40]  L’agente a reconnu que, même avec PhilHealth, la demanderesse aurait à assumer des dépenses personnelles pour ses soins médicaux aux Philippines, mais a conclu qu’elles seraient nettement moindres qu’au Canada. Je remarque qu’il a déjà été statué par notre Cour que, même si un demandeur était tenu de payer un prix subventionné pour des médicaments, cela ne constituerait pas le fondement pour juger qu’une décision relative à des considérations d’ordre humanitaire est déraisonnable. Il en est ainsi parce que la norme pour rendre une décision sur une demande fondée sur des circonstances d’ordre humanitaire « ne peut être de vérifier si les demandeurs obtiendraient des soins supérieurs ou plus abordables au Canada parce que, si tel était le cas, presque toutes les personnes interdites de territoire pour des raisons médicales auraient le droit de rester au pays » (Bichari, au paragraphe 28).

[41]  Cependant, au moment de l’examen de son manque de moyens pour combler ce déficit, l’agente a estimé qu’il serait surprenant que les membres de la communauté religieuse de la demanderesse au Canada ne continuent pas à l’aider si elle retournait aux Philippines, en particulier du fait que les frais médicaux annuels seraient nettement moins élevés là-bas. La demanderesse soutient que cette hypothèse ne repose sur aucun fondement. C’est vrai. Ce que l’on sait, c’est que cette communauté bienveillante et dévouée a eu le cœur et les moyens, pendant plus de 7 ans, d’assumer certains ou tous les frais de la demanderesse. À mon avis, la conclusion de l’agente selon laquelle les membres de la communauté religieuse de la demanderesse au Canada continueraient de la soutenir financièrement si elle retournait aux Philippines relève du domaine de la conjecture et ne repose sur aucun fondement (Nicayenzi c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2014 CF 595, aux paragraphes 34 et 35; Lopez Arteaga c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 778 , au paragraphe 28; Ukleina c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2009 CF 1292, au paragraphe 8). Le dossier ne contient aucun élément de preuve démontrant que les membres de la communauté religieuse de la demanderesse au Canada, ou que toute autre personne ou entité, continueraient à payer les frais médicaux de la demanderesse, frais que l’agente a estimés à 12 300 $ par année au minimum, si elle devait retourner aux Philippines. À mon avis, la conclusion déraisonnable de l’agente à cet égard suggère également que l’agente n’a peut-être pas tenu compte des considérations d’ordre humanitaire qui ont été soulevées dans un sens plus large, comme elle était tenue de le faire (Marshall, au paragraphe 33).

[42]  Dans ses affidavits du 20 mai 2011 et du 12 mai 2013, la demanderesse affirme que sa famille aux Philippines a peu d’argent et n’a pas de revenus suffisants pour payer sa dialyse. Dans son affidavit du 17 mars 2015, elle déclare que ni elle ni personne dans sa famille ne pouvait se permettre de payer sa dialyse et que son mari est à peine capable de subvenir à ses propres besoins comme conducteur de rickshaw.

[43]  Étant donné que l’agente a reconnu que les soins médicaux subventionnés disponibles ne suffiraient pas à combler les besoins médicaux de la demanderesse, que la preuve au dossier démontre que ni elle ni sa famille n’ont les moyens d’assumer les frais pour combler ce déficit, et que les conséquences potentielles pour la santé de la demanderesse qui pourraient découler de la conclusion déraisonnable voulant que ce coût puisse être payé par les membres de la communauté religieuse de la demanderesse au Canada, probablement pendant une période indéterminée, l’affaire doit être renvoyée pour réexamen.

[44]  Je note également que l’agente a conclu, en se fondant sur les observations écrites de l’avocat de la demanderesse, que les membres de la communauté religieuse de la demanderesse au Canada, ses amis et sa famille ont payé ses frais médicaux et ses frais de subsistance (la dialyse à elle seule s’élève à 83 000 $ par année). Il est cependant impossible d’apprécier, à la lecture du dossier, le coût exact de ses frais médicaux, et par qui et dans quelle proportion ils ont été payés. Il s’agit d’un aspect qui pourrait nécessiter plus de précisions dans le cadre d’un réexamen.

[45]  Compte tenu de ma conclusion ci-dessus, je n’ai pas besoin d’aborder les observations concernant l’évaluation par l’agente de l’établissement de la demanderesse au Canada, mais j’estime qu’elle était raisonnable.


JUGEMENT

LA COUR REND LE JUGEMENT SUIVANT :

  1. La demande de contrôle judiciaire est accueillie et l’affaire est renvoyée pour un nouvel examen par un autre agent.

  2. Aucune question de portée générale n’est proposée par les parties et aucune n’est soulevée.

  3. Aucuns dépens ne sont adjugés.

« Cecily Y. Strickland »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-2884-16

 

INTITULÉ :

DEBBIE ANN ORBIZO c. LE MINISTRE D’IMMIGRATION, RÉFUGIÉS ET CITOYENNETÉ CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 26 janvier 2017

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE STRICKLAND

 

DATE DES MOTIFS :

Le 20 février 2017

 

COMPARUTIONS :

Swathi Visalakshi Sekhar

 

Pour la demanderesse

 

Bernard Assan

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Swathi Visalakshi Sekhar

Avocats

Toronto (Ontario)

 

Pour la demanderesse

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

Pour le défendeur

 

 

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