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Date : 20170210


Dossier : T-2587-14

Référence : 2017 CF 167

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 10 février 2017

En présence de monsieur le juge Russell

ENTRE :

KELLY A. O’GRADY

demanderesse

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I. INTRODUCTION

[1] Il s’agit d’une demande présentée aux termes de l’article 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales, LRC (1985), c F-7 [Loi sur les Cours fédérales] en vue du contrôle judiciaire d’une décision du statisticien en chef datée du 7 janvier 2011 (lettre d’entente), par laquelle Statistique Canada a conclu une entente avec la faculté de médecine de l’Université McGill (McGill) pour mener une étude sur les résultats périnataux au Canada.

II. RÉSUMÉ DES FAITS

[2] Statistique Canada est un organisme de statistique ayant pour mandat de recueillir, d’analyser, de dépouiller et de publier des renseignements statistiques sur les activités sociales et générales des Canadiens et sur l’état de ceux-ci. Dans le cadre de ce mandat, un recensement de la population du Canada est effectué tous les cinq ans, au moyen d’un questionnaire obligatoire en version détaillée ou abrégée. Dans son analyse, Statistique Canada utilise des couplages d’enregistrements qui combinent deux ou plusieurs micro-enregistrements pour former un enregistrement composite. L’utilisation des couplages d’enregistrements est effectuée de manière à minimiser les intrusions dans la vie privée, nécessite l’approbation du Conseil de direction de Statistique Canada et exige que le public en soit informé.

[3] En 2011, Statistique Canada et McGill ont signé une lettre d’entente pour évaluer la mortalité infantile et la santé du nouveau-né en examinant les résultats périnataux au Canada selon les facteurs de risque liés à la situation socioéconomique, aux antécédents ethnoculturels et à l’exposition à l’environnement (l’étude). Dans le cadre de l’étude, on a utilisé des couplages d’enregistrements pour relier les renseignements de la base de données nationale des naissances et ceux des recensements de 1996 et de 2006. Afin de minimiser l’atteinte à la vie privée, les couplages d’enregistrements ont été effectués conformément à l’article 6 de la Loi sur la statistique, LRC (1985), c S-19 (Loi sur la statistique) par les employés de Statistique Canada ou les personnes réputées être employées. Les identifiants personnels directs ont été expurgés avant d’être rendus accessibles à McGill. Les enregistrements composites étaient également limités aux locaux de Statistique Canada. De plus, l’utilisation des couplages d’enregistrements a fait l’objet d’une publication sur le site Web de Statistique Canada.

[4] Les critères d’inclusion dans l’étude comprenaient les personnes nées entre 1985 et 2010 d’une mère canadienne, selon lesquels environ 9,5 millions de particuliers se sont qualifiés. Puisque la demanderesse a accouché en Ontario entre 1986 et 1996, ses données de recensement auraient pu être utilisées dans le cadre de l’étude. Cependant, il y a eu un problème lié à la qualité des données et les dossiers des naissances de l’Ontario entre 1994 et 1996, y compris ceux de la demanderesse, ont été exclus de l’étude.

[5] Le 24 mai 2012, la demanderesse a déposé une plainte auprès du commissaire à la protection de la vie privée alléguant que Statistique Canada avait enfreint les dispositions de la Loi sur la protection des renseignements personnels, LRC (1985), c P-21 (Loi sur la protection des renseignements personnels), car ses données de recensement avaient été liées à son dossier de naissance en vue d’être utilisées dans l’étude sans son consentement.

[6] Une décision envoyée par le commissaire à la protection de la vie privée à la demanderesse dans une lettre datée du 21 novembre 2014 a déterminé que les renseignements personnels de la demanderesse n’avaient pas été utilisés indûment par Statistique Canada.

[7] Le commissaire à la protection de la vie privée a convenu que les données de recensement de la demanderesse répondaient à la définition des renseignements personnels, telle qu’elle figure à l’article 3 de la Loi sur la statistique. De plus, le commissaire à la protection de la vie privée a conclu que l’utilisation des données de recensement dans l’étude dépassait la portée des objectifs pour lesquels elles ont été recueillies, ce qui est interdit aux termes de l’article 7 de la Loi sur la statistique. Cependant, rien n’indiquait que les renseignements de la demanderesse avaient effectivement été utilisés dans l’étude puisque ses renseignements avaient été exclus. De plus, même si les renseignements de la demanderesse avaient été utilisés, Statistique Canada avait le pouvoir de le faire aux termes de la Loi sur la statistique. Par conséquent, le commissaire à la protection de la vie privée a conclu que la plainte de la demanderesse n’était pas fondée.

III. DÉCISION FAISANT L’OBJET DU CONTRÔLE

[8] Statistique Canada a décidé de signer une lettre d’entente avec McGill pour évaluer la mortalité infantile et la santé du nouveau-né en examinant les résultats périnataux au Canada selon les facteurs de risque liés à la situation socioéconomique, aux antécédents ethnoculturels et à l’exposition environnementale. Selon l’entente, McGill verserait 380 000 $ à Statistique Canada pour effectuer des couplages d’enregistrements et analyser les données du recensement. Les couplages d’enregistrements impliqueraient l’utilisation de dossiers des naissances au cours des deux années précédant 1996 et 2006 et seraient effectués par des employés ou des personnes réputées être employées de Statistique Canada dans les locaux mêmes de Statistique Canada. La demanderesse sollicite le contrôle de cette entente.

IV. QUESTIONS EN LITIGE

[9] La demanderesse soutient que les questions suivantes sont en litige dans la présente demande :

  1. Quelle est la norme de contrôle applicable?

  2. Le décideur a-t-il exercé son pouvoir discrétionnaire d’une manière qui contrevient au paragraphe 18.1(2) de la Loi sur la statistique?

  3. La demanderesse a-t-elle qualité pour demander un contrôle judiciaire?

  4. Quel est le redressement approprié?

[10] Le défendeur soutient que, outre les questions en litige soumises par la demanderesse, ce qui suit est également en cause dans la présente demande :

  1. La Cour a-t-elle compétence?

  2. Dans l’affirmative, la conclusion non contraignante du commissaire à la protection de la vie privée était-elle raisonnable?

V. NORME DE CONTRÔLE

[11] Par l’arrêt Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9 [Dunsmuir], la Cour suprême du Canada a conclu qu’il n’est pas toujours nécessaire de se livrer à une analyse de la norme de contrôle. En effet, si la jurisprudence établit de manière satisfaisante la norme de contrôle applicable à une question particulière portée devant la cour de révision, celle-ci peut adopter cette norme. C’est uniquement lorsque cette démarche se révèle infructueuse ou que la jurisprudence semble incompatible avec l’évolution récente des principes de contrôle judiciaire en common law que la cour de révision doit procéder à une analyse des quatre facteurs de l’analyse relative à la norme de contrôle : Agraira c Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2013 CSC 36, au paragraphe 48.

[12] La demanderesse affirme que la norme de contrôle applicable est celle de la décision correcte. Elle soutient que la question centrale est de savoir si le décideur, un représentant du gouvernement rendant une décision administrative, a exercé son pouvoir discrétionnaire d’une manière qui contrevenait à la Loi sur la statistique et ne respectait pas la Loi sur la protection des renseignements personnels. Elle dit que ce sont des questions de droit qui devraient être examinées selon la norme de la décision correcte.

[13] Le défendeur soutient que, si le rapport de conclusions non contraignantes du commissaire à la protection de la vie privée est susceptible de contrôle, la norme devrait être celle de la décision raisonnable : Alberta (Information and Privacy Commissioner) c Alberta Teachers’ Association, 2011 CSC 61 [Alberta], aux paragraphes 48 à 55.

[14] La Cour ne se penche pas ici sur la décision du commissaire à la protection de la vie privée. Comme la demanderesse l’a clarifié et confirmé lors de l’audience devant moi, elle demande le contrôle de la décision du statisticien en chef de conclure l’entente avec McGill qui a donné lieu à l’étude. Cela soulève des questions de droit et de fait et est susceptible de révision selon la norme de la décision raisonnable.

[15] Lorsque la Cour effectue le contrôle d’une décision selon la norme de la décision raisonnable, son analyse tient « à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit ». Voir l’arrêt Dunsmuir, précité, au paragraphe 47 et l’arrêt Canada (Citoyenneté et Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12, au paragraphe 59. Autrement dit, la Cour ne devrait intervenir que si la décision est déraisonnable, dans la mesure où elle ne fait pas partie des « issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit ».

VI. DISPOSITIONS LÉGISLATIVES

[16] Les dispositions suivantes de la Loi sur les Cours fédérales s’appliquent en l’espèce :

Recours extraordinaires : offices fédéraux

Extraordinary remedies, federal tribunals

18 (1) Sous réserve de l’article 28, la Cour fédérale a compétence exclusive, en première instance, pour :

18 (1) Subject to section 28, the Federal Court has exclusive original jurisdiction

a) décerner une injonction, un bref de certiorari, de mandamus, de prohibition ou de quo warranto, ou pour rendre un jugement déclaratoire contre tout office fédéral;

(a) to issue an injunction, writ of certiorari, writ of prohibition, writ of mandamus or writ of quo warranto, or grant declaratory relief, against any federal board, commission or other tribunal; and

b) connaître de toute demande de réparation de la nature visée par l’alinéa a), et notamment de toute procédure engagée contre le procureur général du Canada afin d’obtenir réparation de la part d’un office fédéral.

(b) to hear and determine any application or other proceeding for relief in the nature of relief contemplated by paragraph (a), including any proceeding brought against the Attorney General of Canada, to obtain relief against a federal board, commission or other tribunal.

Pouvoirs de la Cour fédérale

Powers of Federal Court

18.1 (3) Sur présentation d’une demande de contrôle judiciaire, la Cour fédérale peut :

18.1 (3) On an application for judicial review, the Federal Court may

a) ordonner à l’office fédéral en cause d’accomplir tout acte qu’il a illégalement omis ou refusé d’accomplir ou dont il a retardé l’exécution de manière déraisonnable;

(a) order a federal board, commission or other tribunal to do any act or thing it has unlawfully failed or refused to do or has unreasonably delayed in doing; or

b) déclarer nul ou illégal, ou annuler, ou infirmer et renvoyer pour jugement conformément aux instructions qu’elle estime appropriées, ou prohiber ou encore restreindre toute décision, ordonnance, procédure ou tout autre acte de l’office fédéral.

(b) declare invalid or unlawful, or quash, set aside or set aside and refer back for determination in accordance with such directions as it considers to be appropriate, prohibit or restrain, a decision, order, act or proceeding of a federal board, commission or other tribunal.

[17] Les dispositions suivantes des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106, (Règles) sont pertinentes en l’espèce :

Limites

Limited to single order

302 Sauf ordonnance contraire de la Cour, la demande de contrôle judiciaire ne peut porter que sur une seule ordonnance pour laquelle une réparation est demandée.

302 Unless the Court orders otherwise, an application for judicial review shall be limited to a single order in respect of which relief is sought.

[18] Les dispositions suivantes de la Loi sur la statistique s’appliquent en l’espèce :

Serment professionnel

Oath of office

6 (1) Le statisticien en chef et toute personne employée ou réputée être employée en application de la présente loi, avant d’entrer en fonctions, prêtent le serment, ou font l’affirmation solennelle, qui suit :

6 (1) The Chief Statistician and every person employed or deemed to be employed pursuant to this Act shall, before entering on his duties, take and subscribe the following oath or solemn affirmation:

Je,, jure (ou affirme) solennellement que j’exercerai fidèlement et honnêtement mes fonctions d’employé de Statistique Canada en conformité avec les prescriptions de la Loi sur la statistique, ainsi que toutes règles et instructions établies sous son régime, et que je ne révélerai ni ne ferai connaître, sans y avoir été dûment autorisé(e), rien de ce qui parviendra à ma connaissance du fait de mon emploi.

I,, do solemnly swear (or affirm) that I will faithfully and honestly fulfil my duties as an employee of Statistics Canada in conformity with the requirements of the Statistics Act, and of all rules and instructions thereunder and that I will not without due authority in that behalf disclose or make known any matter or thing that comes to my knowledge by reason of my employment.

Attestation

Attestation

(2) Le serment ou l’affirmation solennelle énoncés au paragraphe (1) sont prêtés devant la personne que le ministre peut désigner, et rapportés et enregistrés de la manière que celui-ci peut prescrire.

(2) The oath or solemn affirmation set out in subsection (1) shall be taken before such person, and returned and recorded in such manner, as the Minister my direct.

Personnes morales parties à un contrat

Incorporated contractors

(3) Les dirigeants, notamment le premier dirigeant, ainsi que les employés et mandataires d’une personne morale retenue par contrat pour accomplir pour le ministre des services spéciaux en application de la présente loi, avant d’exercer les fonctions que prévoit ce contrat, prêtent le serment, ou font l’affirmation solennelle, qui suit :

(3) Where a person retained under contract to perform special services for the Minister pursuant to this Act is a body corporate, the chief executive officer thereof and such other officers, employees and agents thereof as are used to perform the special services shall, before entering on any of the duties required under the contract, take and subscribe the following oath or solemn affirmation:

Je,, jure (ou affirme) solennellement que j’exercerai fidèlement et honnêtement mes fonctions d’employé de (nom de la personne morale) en ce qui concerne les fonctions stipulées au (indiquer ici de quel contrat administratif il s’agit) en conformité avec les prescriptions de la Loi sur la statistique, ainsi que toutes règles et instructions établies sous son régime, et que je ne révélerai ni ne ferai connaître, sans y avoir été dûment autorisé(e), rien de ce qui parviendra à ma connaissance du fait de mon emploi.

I,, do solemnly swear (or affirm) that I will faithfully and honestly fulfil my duties as an employee of (name body corporate) in respect of my employment in carrying out (identify here contract with Minister) in conformity with the requirements of the Statistics Act, and of all rules and instructions thereunder and that I will not without due authority in that behalf disclose or make known any matter or thing that comes to my knowledge by reason of my employment as described herein.

Attestation

Attestation

(4) Le serment ou l’affirmation solennelle énoncés au paragraphe (3) sont prêtés devant la personne que le ministre peut désigner, et rapportés et enregistrés de la manière que celui-ci peut prescrire.

(4) The oath or solemn affirmation set out in subsection (3) shall be taken before such person, and returned and recorded in such manner, as the Minister may direct.

Protection des renseignements

Prohibition against divulging information

17 (1) Sous réserve des autres dispositions du présent article et sauf pour communiquer des renseignements conformément aux modalités des accords conclus en application des articles 11 ou 12 ou en cas de poursuites engagées en vertu de la présente loi :

17 (1) Except for the purpose of communicating information in accordance with any conditions of an agreement made under section 11 or 12 and except for the purposes of a prosecution under this Act but subject to this section,

b) aucune personne qui a été assermentée en vertu de l’article 6 ne peut révéler ni sciemment faire révéler, par quelque moyen que ce soit, des renseignements obtenus en vertu de la présente loi de telle manière qu’il soit possible, grâce à ces révélations, de rattacher à un particulier, à une entreprise ou à une organisation identifiables les détails obtenus dans un relevé qui les concerne exclusivement.

(b) no person who has been sworn under section 6 shall disclose or knowingly cause to be disclosed, by any means, any information obtained under this Act in such a manner that it is possible from the disclosure to relate the particulars obtained from any individual return to any identifiable individual person, business or organization.

Exception à l’interdiction

Exception to prohibition

17 (2) Le statisticien en chef peut, par arrêté, autoriser la révélation des renseignements suivants :

17 (2) The Chief Statistician may, by order, authorize the following information to be disclosed:

a) les renseignements recueillis par des personnes, des organisations ou des ministères, pour leur propre usage, et communiqués à Statistique Canada avant ou après le 1er mai 1971; toutefois, ces renseignements sont assujettis, lorsqu’ils ont été communiqués à Statistique Canada, aux prescriptions concernant le secret auxquelles ils étaient assujettis lorsqu’ils ont été recueillis et ils ne peuvent être révélés par Statistique Canada que de la manière et dans la mesure où en sont convenus ceux qui les ont recueillis et le statisticien en chef;

(a) information collected by persons, organizations or departments for their own purposes and communicated to Statistics Canada before or after May 1, 1971, but that information when communicated to Statistics Canada shall be subject to the same secrecy requirements to which it was subject when collected and may only be disclosed by Statistics Canada in the manner and to the extent agreed on by the collector thereof and the Chief Statistician;

b) les renseignements ayant trait à une personne ou à une organisation, lorsque cette personne ou organisation donne, par écrit, son consentement à leur révélation;

(b) information relating to a person or organization in respect of which disclosure is consented to in writing by the person or organization concerned;

c) les renseignements ayant trait à une entreprise, lorsque celui qui à ce moment-là en est le propriétaire donne, par écrit, son consentement à leur révélation;

(c) information relating to a business in respect of which disclosure is consented to in writing by the owner for the time being of the business;

d) les renseignements mis à la disposition du public en vertu d’une loi ou de toute autre règle de droit;

(d) information available to the public under any statutory or other law;

e) les renseignements ayant trait à un hôpital, un établissement pour malades mentaux, une bibliothèque, un établissement d’enseignement, un établissement d’assistance sociale ou autre établissement non commercial du même genre, à l’exception des détails présentés de telle façon qu’elle permettrait à n’importe qui de les rattacher à un malade, un pensionnaire ou une autre personne dont s’occupe un tel établissement;

(e) information relating to any hospital, mental institution, library, educational institution, welfare institution or other similar non-commercial institution except particulars arranged in such a manner that it is possible to relate the particulars to any individual patient, inmate or other person in the care of any such institution;

f) les renseignements revêtant la forme d’un index ou d’une liste, relativement à des établissements particuliers, ou des firmes ou entreprises particulières, indiquant l’un ou plusieurs des éléments suivants:

(f) information in the form of an index or list of individual establishments, firms or businesses, showing any, some or all of the following in relation to them:

(i) leurs noms et adresses,

(i) their names and addresses,

(ii) les numéros de téléphone où les joindre relativement à des données statistiques,

(ii) the telephone numbers at which they may be reached in relation to statistical matters,

(iii) la langue officielle qu’ils préfèrent utiliser relativement à des données statistiques,

(iii) the official language in which they prefer to be addressed in relation to statistical matters,

(iv) les produits obtenus, manufacturés, fabriqués, préparés, transportés, entreposés, achetés ou vendus par eux, ou les services qu’ils fournissent au cours de leurs activités,

(iv) the products they produce, manufacture, process, transport, store, purchase or sell, or the services they provide, in the course of their business, or

(v) s’ils se rangent dans des catégories déterminées quant au nombre des employés ou des personnes qu’ils engagent ou qui constituent leur main d’œuvre;

(v) whether they are within specific ranges of numbers of employees or persons engaged by them or constituting their work force; and

g) les renseignements ayant trait à un transporteur ou à une entreprise d’utilité publique.

(g) information relating to any carrier or public utility.

Renseignements protégés

Information is privileged

18 (1) Sauf dans des poursuites engagées en vertu de la présente loi, tout relevé transmis à Statistique Canada en application de la présente loi et toute copie du relevé se trouvant en la possession de l’intéressé, sont protégés et ne peuvent servir de preuve dans aucune procédure quelle qu’elle soit.

18 (1) Except for the purposes of a prosecution under this Act, any return made to Statistics Canada pursuant to this Act and any copy of the return in the possession of the respondent is privileged and shall not be used as evidence in any proceedings whatever.

(2) Aucune personne assermentée en vertu de l’article 6 ne peut être requise, par ordonnance d’un tribunal ou d’un autre organisme, dans quelque procédure que ce soit, de faire une déposition orale ni de produire un relevé, un document ou des archives ayant trait à des renseignements obtenus dans le cadre de l’application de la présente loi.

(2) No person sworn under section 6 shall by an order of any court, tribunal or other body be required in any proceedings whatever to give oral testimony or to produce any return, document or record with respect to any information obtained in the course of administering this Act.

(3) Le présent article s’applique à l’égard des renseignements que la présente loi interdit à Statistique Canada de révéler ou qui ne peuvent être révélés qu’en conformité avec une autorisation donnée en vertu du paragraphe 17(2).

(3) This section applies in respect of any information that Statistics Canada is prohibited by this Act from disclosing or that may only be disclosed pursuant to an authorization under subsection 17(2).

Recensements faits entre 1910 et 2005

Census taken between 1910 and 2005

18.1 (1) Les articles 17 et 18 cessent de s’appliquer aux renseignements contenus dans les relevés de tout recensement de la population fait entre 1910 et 2005 quatre-vingt-douze ans après la tenue du recensement.

18.1 (1) The information contained in the returns of each census of population taken between 1910 and 2005 is no longer subject to sections 17 and 18 ninety-two years after the census is taken.

Recensements faits à partir de 2006

Census in 2006 or later

(2) La même règle s’applique à l’égard de tout recensement de la population fait en 2006 ou par la suite, mais seulement si la personne visée par les renseignements consent, lors du recensement, à ce que ceux-ci cessent d’être protégés quatre-vingt-douze ans plus tard.

(2) The information contained in the returns of each census of population taken in 2006 or later is no longer subject to sections 17 and 18 ninety-two years after the census is taken, but only if the person to whom the information relates consents, at the time of the census, to the release of the information ninety-two years later.

Bibliothèque et Archives du Canada

Library and Archives of Canada

(3) Lorsque les articles 17 et 18 cessent de s’appliquer aux renseignements visés aux paragraphes (1) et (2), ceux-ci sont placés sous la garde et la responsabilité de Bibliothèque et Archives du Canada.

(3) When sections 17 and 18 cease to apply to information referred to in subsection (1) or (2), the information shall be placed under the care and control of the Library and Archives of Canada.

[19] Les dispositions suivantes de la Loi sur la protection des renseignements personnels s’appliquent en l’espèce :

3 Les définitions qui suivent s’appliquent à la présente loi.

3 In this Act,

renseignements personnels Les renseignements, quels que soient leur forme et leur support, concernant un individu identifiable, notamment :

personal information means information about an identifiable individual that is recorded in any form including, without restricting the generality of the foregoing,

a) les renseignements relatifs à sa race, à son origine nationale ou ethnique, à sa couleur, à sa religion, à son âge ou à sa situation de famille;

(a) information relating to the race, national or ethnic origin, colour, religion, age or marital status of the individual,

b) les renseignements relatifs à son éducation, à son dossier médical, à son casier judiciaire, à ses antécédents professionnels ou à des opérations financières auxquelles il a participé;

(b) information relating to the education or the medical, criminal or employment history of the individual or information relating to financial transactions in which the individual has been involved,

c) tout numéro ou symbole, ou toute autre indication identificatrice, qui lui est propre;

(c) any identifying number, symbol or other particular assigned to the individual,

d) son adresse, ses empreintes digitales ou son groupe sanguin;

(d) the address, fingerprints or blood type of the individual,

e) ses opinions ou ses idées personnelles, à l’exclusion de celles qui portent sur un autre individu ou sur une proposition de subvention, de récompense ou de prix à octroyer à un autre individu par une institution fédérale, ou subdivision de celle-ci visée par règlement;

(e) the personal opinions or views of the individual except where they are about another individual or about a proposal for a grant, an award or a prize to be made to another individual by a government institution or a part of a government institution specified in the regulations,

f) toute correspondance de nature, implicitement ou explicitement, privée ou confidentielle envoyée par lui à une institution fédérale, ainsi que les réponses de l’institution dans la mesure où elles révèlent le contenu de la correspondance de l’expéditeur;

(f) correspondence sent to a government institution by the individual that is implicitly or explicitly of a private or confidential nature, and replies to such correspondence that would reveal the contents of the original correspondence,

g) les idées ou opinions d’autrui sur lui;

(g) the views or opinions of another individual about the individual,

h) les idées ou opinions d’un autre individu qui portent sur une proposition de subvention, de récompense ou de prix à lui octroyer par une institution, ou subdivision de celle-ci, visée à l’alinéa e), à l’exclusion du nom de cet autre individu si ce nom est mentionné avec les idées ou opinions;

(h) the views or opinions of another individual about a proposal for a grant, an award or a prize to be made to the individual by an institution or a part of an institution referred to in paragraph (e), but excluding the name of the other individual where it appears with the views or opinions of the other individual, and

i) son nom lorsque celui-ci est mentionné avec d’autres renseignements personnels le concernant ou lorsque la seule divulgation du nom révélerait des renseignements à son sujet;

(i) the name of the individual where it appears with other personal information relating to the individual or where the disclosure of the name itself would reveal information about the individual,

toutefois, il demeure entendu que, pour l’application des articles 7, 8 et 26, et de l’article 19 de la Loi sur l’accès à l’information, les renseignements personnels ne comprennent pas les renseignements concernant :

but, for the purposes of sections 7, 8 and 26 and section 19 of the Access to Information Act, does not include

j) un cadre ou employé, actuel ou ancien, d’une institution fédérale et portant sur son poste ou ses fonctions, notamment :

(j) information about an individual who is or was an officer or employee of a government institution that relates to the position or functions of the individual including,

(i) le fait même qu’il est ou a été employé par l’institution,

(i) the fact that the individual is or was an officer or employee of the government institution,

(ii) son titre et les adresse et numéro de téléphone de son lieu de travail,

(ii) the title, business address and telephone number of the individual,

(iii) la classification, l’éventail des salaires et les attributions de son poste,

(iii) the classification, salary range and responsibilities of the position held by the individual,

(iv) son nom lorsque celui-ci figure sur un document qu’il a établi au cours de son emploi,

(iv) the name of the individual on a document prepared by the individual in the course of employment, and

(v) les idées et opinions personnelles qu’il a exprimées au cours de son emploi;

(v) the personal opinions or views of the individual given in the course of employment,

k) un individu qui, au titre d’un contrat, assure ou a assuré la prestation de services à une institution fédérale et portant sur la nature de la prestation, notamment les conditions du contrat, le nom de l’individu ainsi que les idées et opinions personnelles qu’il a exprimées au cours de la prestation;

(k) information about an individual who is or was performing services under contract for a government institution that relates to the services performed, including the terms of the contract, the name of the individual and the opinions or views of the individual given in the course of the performance of those services,

l) des avantages financiers facultatifs, notamment la délivrance d’un permis ou d’une licence accordés à un individu, y compris le nom de celui-ci et la nature précise de ces avantages;

(l) information relating to any discretionary benefit of a financial nature, including the granting of a licence or permit, conferred on an individual, including the name of the individual and the exact nature of the benefit, and

m) un individu décédé depuis plus de vingt ans.

(m) information about an individual who has been dead for more than twenty years;

Usage des renseignements personnels

Use of personal information

7 À défaut du consentement de l’individu concerné, les renseignements personnels relevant d’une institution fédérale ne peuvent servir à celle-ci :

7 Personal information under the control of a government institution shall not, without the consent of the individual to whom it relates, be used by the institution except

a) qu’aux fins auxquelles ils ont été recueillis ou pré- parés par l’institution de même que pour les usages qui sont compatibles avec ces fins;

(a) for the purpose for which the information was obtained or compiled by the institution or for a use consistent with that purpose; or

b) qu’aux fins auxquelles ils peuvent lui être communiqués en vertu du paragraphe 8(2).

(b) for a purpose for which the information may be disclosed to the institution under subsection 8(2).

Cas d’autorisation

Where personal information may be disclosed

8 (2) Sous réserve d’autres lois fédérales, la communication des renseignements personnels qui relèvent d’une institution fédérale est autorisée dans les cas suivants :

8 (2) Subject to any other Act of Parliament, personal information under the control of a government institution may be disclosed

a) communication aux fins auxquelles ils ont été recueillis ou préparés par l’institution ou pour les usages qui sont compatibles avec ces fins;

(a) for the purpose for which the information was obtained or compiled by the institution or for a use consistent with that purpose;

Publication du répertoire

Index of personal information

11 (1) Le ministre désigné fait publier, selon une périodicité au moins annuelle, un répertoire :

11 (1) The designated Minister shall cause to be published on a periodic basis not less frequently than once each year, an index of

a) d’une part, de tous les fichiers de renseignements personnels, donnant, pour chaque fichier, les indications suivantes :

(a) all personal information banks setting forth, in respect of each bank,

(iv) l’énumération des fins auxquelles les renseignements personnels qui y sont versés ont été recueillis ou préparés de même que l’énumération des usages, compatibles avec ces fins, auxquels les renseignements sont destinés ou pour lesquels ils sont communiqués,

(iv) a statement of the purposes for which personal information in the bank was obtained or compiled and a statement of the uses consistent with those purposes for which the information is used or disclosed,

Révision par la Cour fédérale dans les cas de refus de communication

Review by Federal Court where access refused

41 L’individu qui s’est vu refuser communication de renseignements personnels demandés en vertu du paragraphe 12(1) et qui a déposé ou fait déposer une plainte à ce sujet devant le Commissaire à la protection de la vie privée peut, dans un délai de quarante-cinq jours suivant le compte rendu du Commissaire prévu au paragraphe 35(2), exercer un recours en révision de la décision de refus devant la Cour. La Cour peut, avant ou après l’expiration du délai, le proroger ou en autoriser la prorogation.

41 Any individual who has been refused access to personal information requested under subsection 12(1) may, if a complaint has been made to the Privacy Commissioner in respect of the refusal, apply to the Court for a review of the matter within forty-five days after the time the results of an investigation of the complaint by the Privacy Commissioner are reported to the complainant under subsection 35(2) or within such further time as the Court may, either before or after the expiration of those forty five days, fix or allow.

VII. THÈSES DES PARTIES

A. Demanderesse

1) Violation de la Loi sur la statistique

[20] La demanderesse soutient que le statisticien en chef a exercé son pouvoir discrétionnaire d’une manière qui contrevenait au paragraphe 18.1(2) de la Loi sur la statistique.

[21] Elle dit que la Loi sur la statistique et la Loi sur la protection des renseignements personnels devraient être considérées ensemble, car elles comportent des responsabilités qui se chevauchent. L’article 18.1 de la Loi sur la statistique prévoit des règles sur la façon de partager les données de recensement, en établissant une distinction claire entre les données de recensement recueillies avant et après 2006. Aux termes de l’alinéa 8(2)a) de la Loi sur la protection des renseignements personnels, les institutions fédérales ne peuvent divulguer des renseignements personnels sans consentement qu’aux fins auxquelles ils ont été obtenus et préparés. Selon le rapport de conclusions du commissaire à la protection de la vie privée, l’utilisation du recensement de 2006 dans le cadre de l’étude [traduction] « dépassait la portée de ses objectifs initiaux ». Ainsi, en l’absence de consentement, la lettre d’entente enfreint la Loi sur la protection des renseignements personnels.

[22] La demanderesse soutient également que la méthode utilisée par Statistique Canada pour obtenir le consentement du public afin d’utiliser les données de recensement dans l’étude n’était pas conforme aux dispositions sur le consentement de la Loi sur la protection des renseignements personnels et de la Loi sur la statistique. Un résumé d’une page de l’étude sur le site Web de Statistique Canada est une méthode inadéquate pour informer le public, étant donné que les gens devaient d’abord être au courant de l’existence de l’étude et que c’était le seul moyen d’aviser le public.

[23] De plus, l’information fournie dans l’avis en ligne était insuffisante pour permettre aux membres du public de donner leur consentement. Premièrement, l’avis en ligne n’a pas réussi à fournir un exposé complet et pondéré pour permettre un jugement éclairé sur l’utilisation du couplage d’enregistrements, car il n’a pas été indiqué que les identificateurs indirects risquaient de révéler l’identité des participants. En l’espèce, l’information sur le code postal s’est retrouvée sur le produit couplé final, ce qui a permis d’identifier les participants individuels et les ménages. Deuxièmement, l’avis en ligne ne révélait pas que McGill avait reçu une permission exceptionnelle de coupler les renseignements directement identifiables des participants à d’autres données personnelles et sensibles, offrant ainsi à McGill un accès non filtré aux données personnelles et sensibles du recensement.

[24] Statistique Canada a justifié l’exemption de l’étude des engagements déontologiques et des exigences légales, au motif qu’il n’était pas possible d’obtenir le consentement de tous les participants et que le but de l’étude était de promouvoir le bien public. Cependant, la demanderesse soutient que Statistique Canada a commis une erreur en rationalisant la décision de ne pas obtenir le consentement fondé sur le bien public. Il aurait dû s’appuyer sur l’alinéa 8(2)a) de la Loi sur la protection des renseignements personnels pour décider si l’utilisation du recensement de 2006 constituait une utilisation incohérente et inappropriée. Statistique Canada a également négligé de tenir compte du conflit d’intérêts lié à la décision, puisque Statistique Canada et McGill ont tous deux bénéficié de la lettre d’entente. L’utilisation du couplage d’enregistrements du recensement de 2006 pour obtenir l’information utilisée dans l’étude plutôt que de recruter activement des participants a procuré des avantages substantiels à McGill. Premièrement, il y a eu des économies substantielles, car la collecte de nouvelles données aurait été [traduction] « pratiquement irréalisable ». Deuxièmement, l’utilisation d’ensembles de données existants a réduit la possibilité de partialité et amélioré la fiabilité de l’étude. De même, Statistique Canada a réalisé d’importantes économies de coûts sans avoir à communiquer avec tous les participants pour obtenir leur consentement.

[25] L’historique législatif de la Loi sur la statistique démontre que le législateur avait l’intention d’établir un équilibre entre le droit d’accès et le droit des particuliers de contrôler leurs renseignements personnels, le consentement éclairé étant considéré comme un principe clé en matière de protection des renseignements personnels. Cela ressort clairement de l’introduction de l’article 18.1 de la Loi sur la statistique, qui décrit l’utilisation autorisée des données de recensement et établit une distinction entre les recensements effectués entre 1910 et 2005 et ceux réalisés à partir de 2006. Par conséquent, Statistique Canada avait l’obligation d’administrer son programme de manière à permettre aux Canadiens de modifier leurs réponses à la question sur le consentement à n’importe quel moment au cours de la période de 92 ans. En exerçant son pouvoir discrétionnaire de déroger à la clause d’exemption relative au consentement prévue au paragraphe 18.1(2), Statistique Canada a commis une erreur de droit.

[26] Aux termes de l’alinéa 17(2)b) de la Loi sur la statistique, le statisticien en chef est autorisé à communiquer certains types de renseignements personnels identifiables si le consentement écrit est obtenu. Cependant, la demanderesse soutient que cette exemption ne remplace pas les protections prévues au paragraphe 18.1(2) sans consentement exprès, ce qui n’a pas été obtenu en l’espèce. La demanderesse et les autres participants au recensement de 2006 devraient être traités comme des personnes dont les données de recensement ne sont pas assujetties à l’exception prévue à l’alinéa 17(2)b), car rien dans la Loi sur la statistique ne permet à Statistique Canada d’être dispensé des exigences relatives au consentement obligatoire du paragraphe 18.1(2), même si les processus d’approbation prévus par la loi s’appliquent à l’étude. De plus, la Loi sur la protection des renseignements personnels n’autorise pas Statistique Canada à sous-traiter le consentement d’un particulier à communiquer des renseignements au statisticien en chef : voir la décision Amis de la Commission canadienne du blé c Canada (Ministre de l’Agriculture), 2011 CF 1432.

[27] Par ailleurs, la demanderesse cite le projet de loi C-626 à l’appui de l’intention du législateur de combler une lacune dans la réglementation en matière de garde et de responsabilité du recensement. Même si le projet de loi a été rejeté, il a défini le recensement détaillé comme étant « […] conforme, par la longueur et la portée et avec les modifications requises par les changements de circonstances – notamment les nouvelles sources de données ou pratiques de collecte de données – au questionnaire détaillé […] », ce qui laisse entendre qu’il existe une lacune dans la législation actuelle. De plus, puisque la Loi sur la statistique actuelle n’inclut pas de telles expressions, elle laisse entendre que la création d’un recensement longitudinal à des fins administratives n’était pas envisagée par le Parlement au moment de la dernière modification de la Loi sur la statistique. Finalement, le fait que le projet de loi C-626 ait été rejeté démontre que le gouvernement était favorable par principe à une issue favorable à la demanderesse.

2) Qualité pour agir

[28] La demanderesse soutient qu’elle a qualité pour demander le contrôle judiciaire de la lettre d’entente, et que la question de savoir si ses renseignements personnels du recensement de 2006 ont été inclus dans l’étude ne devrait pas servir de base à la détermination de la qualité pour agir.

[29] Le critère en trois volets portant sur la qualité pour agir dans l’intérêt public est respecté. La présente demande de contrôle judiciaire soulève des questions graves en ce qui a trait à l’interprétation législative en vertu de la Loi sur la statistique en se concentrant sur la bonne interprétation du paragraphe 18.1(2). Il existe également un dossier historique d’intérêt public sur tous les aspects du sujet invoqué dans la présente instance, comme en témoignent de nombreux débats parlementaires et projets de loi.

[30] La demanderesse a aussi un intérêt véritable à la résolution de l’affaire, car la preuve documentaire démontre qu’il était nécessaire dans le cadre de l’étude de compter sur tous les participants admissibles du recensement de 2006, ce qui laisse supposer que les renseignements personnels de la demanderesse ont été utilisés à un certain moment, étant donné que l’ensemble du recensement de 2006 a été nécessaire pour créer la base de données longitudinale et les fichiers connexes.

[31] Enfin, la demanderesse affirme qu’il n’existe aucune autre façon raisonnable et efficace de soumettre les questions juridiques en litige à la Cour. Les mesures de redressement prévues à l’article 41 de la Loi sur la protection des renseignements personnels et au paragraphe 18.1(3) de la Loi sur les Cours fédérales ne sont pas appropriées en l’espèce, notamment parce que la Cour a une compétence limitée aux termes de l’article 41 pour procéder à un contrôle judiciaire des conclusions et recommandations du commissaire à la protection de la vie privée. Bien qu’il y ait d’autres parties qui pourraient soulever une contestation, il s’agit d’une possibilité lointaine. Ni le commissaire à la protection de la vie privée ni le procureur général n’ont exercé leur prérogative de contester l’utilisation des données de recensement de 2006 et, bien qu’il y ait beaucoup de personnes directement concernées par la lettre d’entente, il est très peu probable qu’elles aient connaissance de l’existence de l’étude étant donné que l’avis en ligne était le seul moyen d’informer le public. Par conséquent, la demanderesse a le choix de demander que ses renseignements personnels soient retirés de la base de données longitudinale, bien que l’expérience démontre que cette approche est inefficace, ou de refuser d’effectuer de futurs recensements, ce qui constituerait une infraction à l’article 31 de la Loi sur la statistique.

[32] La demanderesse soutient également que l’ordonnance demandée, une déclaration établissant la qualité pour agir de la demanderesse, ne causerait aucun préjudice au défendeur. De plus, la demanderesse soutient que la preuve par affidavit de Jane Badets ne devrait pas être prise en considération, car elle refuse de fournir des détails critiques au sujet de l’étude.

3) Mesures de redressement

[33] La demanderesse affirme que la réparation appropriée est une ordonnance de la nature d’une déclaration selon laquelle la lettre d’entente est illégale, nulle et sans effet, parce qu’elle a été délivrée sans compétence. La demanderesse soutient que cela enverrait un message fort au ministre de l’Industrie et donnerait effet au sens ordinaire du mot « consentement » en vertu de la loi applicable.

[34] En ce qui concerne la question des dépens, la demanderesse affirme avoir soulevé un nouveau principe important relativement à l’interprétation du code d’« utilisation et de divulgation » de la Loi sur la protection des renseignements personnels, ce qui justifie une adjudication de frais en sa faveur. De plus, si le défendeur avait eu l’occasion de se pencher sur la question de compétence et les conséquences du non-respect de l’obligation de consentement prévue par la loi, cette question n’aurait pas dû faire l’objet d’une demande de contrôle judiciaire. L’adjudication de dépens atténuerait l’injustice découlant de la nécessité pour un plaideur de se représenter lui-même et qui a engagé des frais importants dans le but de faire valoir ses droits.

B. Défendeur

[35] À titre préliminaire, le défendeur soutient que la demanderesse contrevient à l’article 302 des Règles, qui limite une demande de contrôle judiciaire à une seule ordonnance. Même si l’avis de demande indiquait que la demande constituait un contrôle judiciaire du rapport de conclusions du commissaire à la protection de la vie privée, la demanderesse demande également le contrôle judiciaire de la lettre d’entente.

1) Qualité pour agir

[36] La demanderesse n’a pas qualité pour contester la lettre d’entente, car elle ne la concerne pas directement. La demanderesse n’était pas partie à la lettre d’entente et ses renseignements personnels ne faisaient pas partie des couplages d’enregistrements utilisés dans l’étude.

[37] En matière d’intérêt public, la Cour doit assurer un équilibre entre l’accès aux tribunaux et la préservation des ressources judiciaires. Le défendeur soutient qu’une contestation directe de la part de particuliers dont les données de recensement ont été utilisées dans l’étude permettrait de préserver au mieux les ressources judiciaires et de s’assurer que la Cour dispose de la meilleure preuve possible.

2) Compétence

[38] Aux termes de l’article 41 de la Loi sur la protection des renseignements personnels, le législateur a expressément limité le rôle de la Cour relativement aux plaintes déposées auprès du commissaire à la protection de la vie privée. Puisque cette demande ne relève pas de l’article 41, la Cour n’a pas compétence en l’espèce. Le rapport de conclusions non contraignant du commissaire à la protection de la vie privée publié aux termes de l’article 29 de la Loi sur la protection des renseignements personnels ne peut faire l’objet d’un contrôle judiciaire par la Cour.

[39] La demanderesse ne devrait pas être autorisée à utiliser la Loi pour obtenir un contrôle judiciaire puisque ni la lettre d’entente, ni l’étude, ni le rapport de conclusions ne satisfont aux exigences du paragraphe 18.1(1) de la Loi sur les Cours fédérales. On peut demander le contrôle judiciaire lorsque le comportement d’un organe administratif nuit aux droits d’une partie ou entraîne des conséquences juridiques, mais cela n’est pas toujours déclenché, en particulier lorsqu’un avis ou une déclaration n’ayant pas force exécutoire sans effet juridique contraignant est émis.

3) Caractère raisonnable de la décision

[40] Si la lettre d’entente et l’étude sont susceptibles de révision, le défendeur soutient que Statistique Canada s’est conformé à toutes les exigences législatives et que la décision était raisonnable et correcte.

[41] Si le rapport de conclusions est susceptible de révision, la norme de contrôle est celle de la décision raisonnable : voir l’arrêt Alberta, précité.

4) Rapport des conclusions

[42] Bien que le défendeur nie que le rapport de conclusions non contraignant du commissaire à la protection de la vie privée fasse l’objet d’un contrôle judiciaire, la Cour devrait le juger raisonnable au moment du contrôle. La plainte de la demanderesse a fait l’objet d’une enquête dans le cadre d’un examen des observations présentées par la demanderesse et par Statistique Canada et a été jugée non fondée pour deux raisons. Premièrement, il n’y avait aucune preuve que les renseignements personnels de la demanderesse tirés des recensements avaient été utilisés dans l’étude. Deuxièmement, même si les renseignements personnels de la demanderesse provenant des recensements avaient été utilisés, une telle utilisation était autorisée par la loi.

5) Lettre d’entente et violation du paragraphe 18.1(2) de la Loi sur la statistique

[43] L’utilisation des données de recensement dans l’étude était une utilisation constante aux termes de l’article 7 de la Loi sur la protection des renseignements personnels. Le critère de l’usage compatible, qui a été appliqué à l’alinéa 8(2)a) de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans l’arrêt Bernard c Canada (Procureur général), 2014 CSC 13 [arrêt Bernard], mais qui est également pertinent aux fins de l’article 7 exige un lien direct entre le but et l’utilisation proposée, de sorte qu’un particulier s’attende raisonnablement à ce que l’information puisse être utilisée de la manière proposée. Conformément au sous-alinéa 11(1)a)(iv), la base de données du Recensement de la population et de l’Enquête nationale auprès des ménages indique que les données recueillies par le recensement peuvent être utilisées aux fins de recherche et combinées à d’autres bases de données d’enquêtes approuvées à des fins statistiques. Ainsi, la lettre d’entente et l’étude constituaient une utilisation cohérente des données de recensement, puisque les données de recensement ont été combinées avec la base de données nationale de grossesse et de naissance pour rechercher des disparités en matière de santé périnatale. L’étude et l’utilisation des données de recensement cadraient également avec le mandat de Statistique Canada de recueillir, d’analyser et de publier des renseignements statistiques. Bien que l’étude n’ait pas pu être envisagée au moment des recensements de 1996 et de 2006, elle est directement liée à la fois à l’objectif du recensement et au mandat de Statistique Canada, satisfaisant ainsi au critère de l’usage compatible.

[44] L’invocation par la demanderesse de l’alinéa 8(2)a) de la Loi sur la protection des renseignements personnels est inappropriée, parce que cette disposition a trait à la divulgation de renseignements personnels; en l’espèce, aucune information personnelle n’a été divulguée dans le cadre de l’étude. Par conséquent, Statistique Canada n’était pas tenu d’obtenir le consentement des participants pour utiliser leurs renseignements dans les recensements de 1996 et de 2006 de l’étude. Aucune information n’a été divulguée contrairement à l’alinéa 17(1)b) de la Loi sur la statistique, puisque seuls les employés de Statistique Canada ont eu accès aux données brutes et ont effectué les couplages d’enregistrements. Une fois les couplages d’enregistrements terminés, le fichier composite contenait uniquement les données nécessaires à l’étude et les données couplées restaient dans les locaux de Statistique Canada, accessibles uniquement aux employés de Statistique Canada et aux personnes réputées être employées.

[45] De même, l’article 18.1 de la Loi sur la statistique, qui permet la divulgation publique des renseignements du recensement 92 ans après la date du recensement, est inapplicable à la présente affaire. Comme il n’y avait pas de divulgation publique de renseignements en dehors des données agrégées non confidentielles, il n’était pas nécessaire de donner son consentement pour que les données de recensement soient utilisées dans l’étude. Malgré cela, Statistique Canada a continué d’informer le public au sujet de l’étude et de l’utilisation des couplages d’enregistrements au moyen d’un avis en ligne sur son site Web.

6) Mesures de redressement

[46] Le défendeur soutient que la présente demande devrait être rejetée et la demanderesse n’a aucun recours.

[47] Subsidiairement, le redressement demandé par la demanderesse est irrégulier et ne peut également être invoqué en application de l’article 18 ou du paragraphe 18.1(3) de la Loi sur les Cours fédérales parce qu’il n’y a aucune raison de déclarer que la lettre d’entente est illégale et nulle et sans effet, car elle a été délivrée sans compétence. L’étude procure un avantage au public en permettant aux chercheurs de mieux comprendre les disparités en matière de santé périnatale et n’a aucun effet direct sur les particuliers puisqu’aucun renseignement personnel n’est divulgué. Comme il n’y a aucun but utile à atteindre si une telle déclaration est faite, une déclaration ne devrait pas être accordée. De plus, le commissaire à la protection de la vie privée a conclu que la lettre d’entente et l’étude étaient légales en réponse à la plainte de la demanderesse et que la demanderesse ne devrait pas pouvoir recourir à une attaque indirecte pour obtenir un recours auquel elle n’aurait autrement pas droit.

VIII. DISCUSSION

A. Qualité pour agir

[48] La demanderesse n’a pas directement qualité pour présenter cette demande. La preuve est claire que les enregistrements de la demanderesse n’ont pas été inclus dans l’étude. La demanderesse n’a pas donné naissance entre 2004 et 2006. La demanderesse a donné naissance entre 1994 et 1996 en Ontario. La preuve établit qu’aucune naissance survenue en Ontario entre 1994 et 1996 n’a été incluse dans le couplage effectué par Statistique Canada aux fins d’utilisation dans l’étude en raison de préoccupations au sujet de la qualité des données. La demanderesse n’a pas réfuté cette preuve. Cela signifie qu’aucun enregistrement relatif à la demanderesse n’a été inclus dans le couplage d’enregistrements effectué dans le cadre de l’étude ou dans l’étude elle-même.

[49] La demanderesse a maintenu son affirmation à l’audience devant moi selon laquelle la preuve soutenait que ses enregistrements avaient été utilisés. Cependant, lorsque la Cour lui a demandé d’établir une telle preuve, elle n’a pas pu le faire. D’un autre côté, le témoignage du défendeur sur ce point contenu dans l’affidavit de Mme Badets est clair et bien étayé. La demanderesse n’a fait aucune référence à cette preuve et s’attend simplement à ce que la Cour néglige de tenir compte d’une preuve claire et objective et accepte ses affirmations non étayées à l’effet contraire. La Cour ne peut pas faire cela. La preuve établit que les dossiers de la demanderesse n’ont pas été utilisés et qu’elle n’est pas directement concernée par l’affaire dont je suis saisi, ni même quelqu’un qui pourrait être directement touché à un moment donné dans l’avenir. Mme Badets a émis l’opinion suivante :

[traduction]

20. Les dossiers de la demanderesse ne faisaient pas partie des dossiers de naissance liés au recensement dans le cadre de l’étude. L’étude faisait le lien entre les naissances survenues entre 1994-1996 et 2004-2006 et les données du recensement. Seule la période 1994-1996 est pertinente, car, comme l’affirme la demanderesse dans son affidavit, elle n’a pas donné naissance entre 2004 et 2006. Comme la demanderesse l’affirme également dans son affidavit, elle a accouché en Ontario au cours de la période 1994-1996. Aucune naissance survenue en Ontario entre 1994 et 1996 n’a été incluse dans le couplage effectué par Statistique Canada en vue d’une utilisation dans l’étude en raison de préoccupations liées à la qualité des données. Par conséquent, aucun enregistrement relatif à la demanderesse n’a été inclus dans le couplage d’enregistrements effectué dans le cadre de l’étude ou dans l’étude elle-même.

21. Ce qui suit démontre qu’aucune naissance survenue en Ontario entre 1994 et 1996 n’a été incluse dans le couplage de données effectué dans le cadre de l’étude :

a) La demande de couplage d’enregistrements, dont une copie est jointe aux présentes en tant que pièce « E », montre que la décision de ne pas inclure les dossiers pour ce groupe particulier de personnes a été faite au stade de la planification de l’étude avant le couplage d’enregistrements. Cette demande a été approuvée par la suite, comme en fait foi la pièce « F »;

b) Il est indiqué dans la demande de recherche de 2010 de Kramer et coll. aux Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC) sous la rubrique B.3.1, dont une copie est jointe aux présentes en tant que pièce « J » :

Nous exclurons les naissances de l’Ontario pour le couplage de données au recensement de 1996, en raison d’erreurs dans le poids à la naissance et l’âge gestationnel (information clé pour nos résultats) au début et au milieu des années 1990. Ces erreurs ont cependant été corrigées dans les données récentes.

c) J’ai consulté mon collègue, Richard Trudeau, qui était chef de la section du couplage des dossiers de santé, Division de la statistique de la santé, au moment où le lien a été établi. À ce titre, M. Trudeau était responsable de l’équipe de Statistique Canada chargée du couplage entre la naissance et le décès des nourrissons ainsi que du couplage entre la naissance et la naissance qui étaient des préalables au couplage entre les naissances et le recensement. M. Trudeau m’a confirmé que les dossiers de la demanderesse ne faisaient pas partie du couplage de données effectué pour l’étude. Un extrait du code informatique qui a créé les fichiers utilisés dans le couplage entre les naissances et le recensement est joint aux présentes en tant que pièce « L ». La partie en surbrillance du code informatique indique les critères de sélection <CBDB_BIRTHPLAC IN « 910 », « 911 », « 912 », « 913 », « 924 », « 946 », « 947 », « 948 », « 959 », « 960 », « 961 »)>, ce qui signifie que seuls les enregistrements pour lesquels la valeur de la variable CBDB_BIRTHPLAC était égale à l’une des valeurs énumérées ont été extraits. CBDB_BIRTHPLAC est la variable de l’ensemble des données qui contiennent le lieu de naissance codé, à savoir la province ou le territoire où la naissance s’est produite. La liste n’inclut pas le code pour l’Ontario, qui est « 935 ». Par conséquent, ce code informatique démontre que lorsque le couplage a eu lieu, les enregistrements des naissances survenues en Ontario ont été exclus.

22. Avant les couplages d’enregistrements, Statistique Canada a accepté de retirer les données de la demanderesse de l’étude comme un geste de bonne volonté. Cependant, une fois qu’il est apparu que l’information de la demanderesse ne serait pas incluse dans le couplage en raison des questions sur la qualité des données en litige, il n’y avait aucune information à supprimer.

[Souligné dans l’original.]

[50] La demanderesse se présente devant la Cour pour demander un contrôle judiciaire aux termes du paragraphe 18.1(1) de la Loi sur les Cours fédérales. Toutefois, elle n’est pas « directement touchée par l’objet de la demande ». La demanderesse a un intérêt pour les questions liées à la protection des renseignements personnels, et elle peut avoir un intérêt dans les questions de même nature soulevées par l’étude, mais elle n’est pas « directement touchée » par l’étude parce que ses enregistrements n’ont pas été utilisés.

[51] La demanderesse a tenté de remédier à ce défaut en revendiquant une certaine forme d’intérêt public. La qualité d’intérêt public n’est pas accordée à tout le monde. Comme l’a précisé la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Canada (Procureur général) c Downtown Eastside Sex Workers United Against Violence Society, 2012 CSC 45 [Downtown Eastside Sex Workers], il y a plusieurs facteurs à prendre en compte :

[23] Dans les affaires de droit public, la Cour a adopté une approche téléologique pour l’élaboration des règles de droit applicables à la question de la qualité pour agir. Lorsqu’il s’agit de décider s’il est justifié de reconnaître cette qualité, les tribunaux doivent exercer leur pouvoir discrétionnaire et mettre en balance, d’une part, le raisonnement qui sous-tend les restrictions à cette reconnaissance et, d’autre part, le rôle important qu’ils jouent lorsqu’ils se prononcent sur la validité des mesures prises par le gouvernement. En somme, les règles de droit relatives à la qualité pour agir tirent leur origine de la nécessité d’établir un équilibre « entre l’accès aux tribunaux et la nécessité d’économiser les ressources judiciaires » : Conseil canadien des Églises, p. 252.

[…]

[25] C’est dans l’arrêt Finlay, aux p. 631-634, qu’on trouve l’examen le plus exhaustif du raisonnement qui sous-tend les restrictions à la reconnaissance de la qualité pour agir. En effet, la Cour y a décrit les préoccupations qui, traditionnellement, ont servi à expliquer ces restrictions : l’affectation appropriée des ressources judiciaires limitées et la nécessité d’écarter les trouble-fête; l’assurance que les tribunaux entendront les principaux intéressés faire valoir contradictoirement leurs points de vue; et la sauvegarde du rôle propre aux tribunaux et de leur relation constitutionnelle avec les autres branches du gouvernement. Quelques mots sont de mise concernant chacune de ces préoccupations traditionnelles.

[52] La demanderesse n’est pas directement touchée par la présente affaire et la preuve dont je dispose n’établit pas que d’autres personnes, dont les dossiers faisaient partie du couplage dans le cadre de l’étude et dans l’étude elle-même, ont des préoccupations juridiques concernant l’utilisation de leurs enregistrements. La situation de la demanderesse n’est pas représentative de toutes les personnes dont l’information a été utilisée. Les questions qu’elle soulève et fait valoir ne peuvent être réellement tranchées qu’en fonction d’un ensemble de faits incluant un ou plusieurs demandeurs qui ont été directement touchés ou qui pourraient être touchés par l’étude lorsqu’elle sera finalement publiée. À ce jour, il n’y a pas eu de divulgation de renseignements personnels, de sorte que, à ce stade, on ne sait pas très bien ce dont les personnes dont les enregistrements faisaient partie du couplage pourraient vouloir se plaindre. Pour autant que la Cour le sache, de telles personnes peuvent bien approuver l’étude et ne pas s’opposer à l’utilisation de leurs enregistrements, pour des raisons juridiques ou autres. Rien n’indique que la thèse de la demanderesse soit autre chose que sa position personnelle, née de ses intérêts scolaires et de son activisme social. La demanderesse n’a pas démontré que ses préoccupations sont partagées par une personne directement touchée ou qu’elle s’intéresse plus à l’étude que tout autre membre du grand public dont les enregistrements n’ont pas été utilisés. Il serait dangereux que la Cour tente de se prononcer sur des questions complexes en litige sans un dossier approprié pour le faire. Si la demanderesse croit que ceux dont les enregistrements ont été utilisés devraient avoir des inquiétudes, elle peut les alerter à l’égard des questions en litige et les laisser saisir la Cour s’ils sont d’accord avec elle et croient que la situation nécessite une intervention judiciaire. En ce qui concerne la jurisprudence, la demanderesse n’est rien d’autre qu’une simple « trouble-fête » qui a pu croire à un certain moment que ses enregistrements étaient utilisés, mais qui sait depuis un certain temps qu’ils ne l’ont pas été.

[53] Le jugement récent rendu dans la décision Lessard-Gauvin c Canada (Procureur général), 2016 CF 418 [Lessard] fournit un bon résumé des principes relatifs à l’intérêt public qui sont énoncés aux paragraphes 14 à 15 :

[14] La reconnaissance de la qualité d’agir dans l’intérêt public, qui relève du pouvoir discrétionnaire des tribunaux, requiert la présence de trois facteurs : (i) l’affaire portée devant la Cour doit soulever une question justiciable sérieuse; (ii) celui qui demande que lui soit reconnue cette qualité doit avoir un intérêt réel ou véritable dans l’issue de l’affaire; et (iii) l’affaire proposée doit constituer une manière raisonnable et efficace de soumettre la question en litige aux tribunaux (Canada (Procureur général) c Downtown Eastside Sex Workers United Against Violence Society, 2012 CSC 45, au para 20, [2012] 2 RCS 524 [Downtown Eastside Sex Workers]).

[15] Même si une approche téléologique est de mise dans l’appréciation de ces facteurs, la Cour suprême du Canada, dans Downtown Eastside Sex Workers, précité, nous rappelle que la nécessité de restreindre la qualité pour agir est reconnue depuis longtemps par les tribunaux et qu’en conséquence, « ce ne sont pas toutes les personnes voulant débattre d’une question, sans tenir compte du fait qu’elles soient touchées par l’issue du débat ou pas, qui devraient être autorisées à le faire » (Downtown Eastside Sex Workers, au para 22). Les considérations militant en faveur d’une telle approche sont liées (i) à l’affectation appropriée des ressources judiciaires limitées et la nécessité d’écarter les « trouble-fêtes » (« busy-body »); (ii) à l’assurance que les tribunaux entendront les principaux intéressés faire valoir leurs points de vue; et (iii) à la sauvegarde du rôle propre aux tribunaux et de leur relation constitutionnelle avec les autres branches du gouvernement (Downtown Eastside Sex Workers, au para 25). Ultimement, le tribunal doit chercher à établir un équilibre entre l’accès aux tribunaux et la nécessité d’économiser les ressources judiciaires (Downtown Eastside Sex Workers, au para 23).

[54] Le demandeur dans la décision Lessard a sollicité une déclaration selon laquelle les lois canadiennes sur les droits de la personne violaient la Charte canadienne des droits et libertés dans le cadre de ses études juridiques à l’université. En concluant que le demandeur n’avait pas d’intérêt public, la Cour a également observé ceci :

Bien évidemment, le demandeur a un intérêt scolaire à se voir reconnaître la qualité pour agir dans l’intérêt public mais cela n’est pas une justification valable.

[...]

D’une part, son intérêt dans ce volet de son recours est strictement théorique et semble s’inscrire d’abord et avant tout au cœur d’une démarche scolaire. De surcroît, ce volet du recours est dénué de toute assise factuelle, les législations en cause n’ayant jamais été mises à l’épreuve par le demandeur.

[...]

D’autre part, il existe d’autres manières réalistes de débattre de la question de la conformité à la Charte des lois provinciales et territoriales sur les droits de la personne, notamment par le biais de recours entrepris par ceux et celles qui, potentiellement, possèdent de plein droit, contrairement au demandeur, la qualité pour agir, et ce, de manière à favoriser, dans un contexte s’y prêtant davantage, une utilisation plus efficace et efficiente des ressources judiciaires. […] l’échec du recours entrepris par le demandeur, dans le contexte diffus et désincarné dans lequel il se présente, soit de nature à faire obstacle à des contestations ultérieures de la part de personnes ayant, elles, des plaintes précises fondées sur les faits. En d’autres mots, dans un cas comme celui-ci, l’affectation appropriée des ressources judiciaires, lesquelles sont limitées, doit privilégier ces personnes.

[55] De même, la demanderesse en l’espèce n’a qu’un intérêt scolaire et lié à l’activisme social à se voir accorder le statut d’intérêt public puisque le commissaire à la protection de la vie privée a conclu que ses renseignements n’avaient pas été détournés et qu’elle était incapable de démontrer le contraire. De plus, il y a d’autres parties, à savoir celles dont les données ont été utilisées dans l’étude, qui pourraient souhaiter saisir les tribunaux et soumettre une plainte particulière fondée sur des faits.

[56] En ce qui concerne les facteurs qui doivent être soupesés conformément à l’arrêt Downtown Eastside Sex Workers, la présente demande ne soulève pas de question justiciable sérieuse et la demanderesse n’a aucun enjeu réel dans l’issue de la plainte, parce que ses renseignements n’ont pas été utilisés dans le couplage aux fins de l’étude. Son intérêt n’est pas plus fort que l’intérêt de tout autre membre du public dont l’information n’a pas été utilisée. Elle affirme que d’autres ne seraient pas en mesure de découvrir ce qui s’est passé ou de prendre la peine d’intenter une action en justice s’ils l’avaient fait. Cependant, la demanderesse peut faire connaître ses préoccupations à d’autres personnes dont les enregistrements ont été utilisés dans le couplage de sorte qu’ils puissent décider d’introduire ou non une demande. Le véritable danger en l’espèce est que la Cour est utilisée par une activiste sociale qui, sans aucun doute, croit sincèrement qu’elle agit à bon escient, mais qui n’a aucun intérêt personnel dans la présente demande et qui peut créer des problèmes pour d’autres personnes qui ont un intérêt grâce à ses allégations préventives. Il est beaucoup plus sûr d’attendre et de voir. L’étude n’a pas encore été publiée.

B. Aucune divulgation de renseignements personnels

[57] Subsidiairement, même si la demanderesse avait qualité pour présenter la présente demande, le dossier dont je suis saisi est clair qu’aucun renseignement personnel n’a été divulgué en l’espèce, non seulement en ce qui concerne la demanderesse dont les enregistrements n’ont pas été utilisés, mais aussi en ce qui a trait aux personnes dont les enregistrements ont été utilisés.

[58] La preuve sur cette question se trouve dans l’affidavit de Jane Badets qui, du 12 octobre 2010 au 23 novembre 2014, a été la directrice générale, Direction des domaines spécialisés du recensement, de la statistique sociale et de la démographie, dont la preuve n’a pas été contestée par la demanderesse. Mme Badets était responsable de tous les centres de données de recherche (CDR) de Statistique Canada, y compris le CDR de l’Université McGill où les données en cause dans la présente demande ont été consultées. Mme Badets donne le compte rendu suivant de ce qui s’est passé en l’espèce :

[traduction]

9. L’étude a nécessité le couplage d’un échantillon d’enregistrements de naissances aux données du recensement parce que les renseignements statistiques existant antérieurement ne tenaient pas compte de l’interrelation entre les naissances successives d’une même mère et contenaient peu d’éléments, voire aucun, sur les risques liés à la santé socio-économiques, ethnoculturels et environnementaux des parents et les facteurs de protection connus pour avoir une incidence sur les résultats en matière de santé périnatale. En créant un couplage d’enregistrement pour un échantillon de naissances aux données du recensement, Statistique Canada a pu fournir à Kramer et coll. une grande partie des renseignements manquants, pour un échantillon raisonnablement important de naissances au cours de deux périodes récentes, tout en évitant la nécessité de recueillir des données supplémentaires. Une copie de la demande de couplage d’enregistrements présentée à l’appui de l’étude est jointe aux présentes en tant pièce « E ».

10. La demande de couplage d’enregistrements a été examinée et approuvée le 22 février 2012 par le conseil de gestion de Statistique Canada conformément à la Directive sur le couplage d’enregistrements, dont une copie se trouve à la pièce « C ». Le conseil de gestion est l’organe directeur suprême de Statistique Canada et comprend le statisticien en chef et les statisticiens en chef adjoints. Avant que l’approbation ne soit accordée, le conseil de gestion aurait examiné la demande pour s’assurer que les mesures de contrôle appropriées relatives à la protection des renseignements identifiables étaient en place, que l’étude était dans l’intérêt public et qu’il n’existait aucun autre moyen d’obtenir les mêmes renseignements. Une copie de la demande de couplage d’enregistrements approuvée est jointe aux présentes en tant que pièce « F ».

11. Les enregistrements de naissance liés au recensement dans le cadre de l’étude comprenaient un échantillon d’environ 20 % des naissances survenues au cours des deux années précédant le recensement de 1996, qui étaient liées au recensement de 1996, et survenues au cours des deux années précédant le recensement de 2006, qui étaient liées au recensement de 2006, ainsi que les enregistrements pour les naissances ultérieures de frères et de sœurs jusqu’à deux ans après chaque recensement et les enregistrements pour les naissances de frères et de sœurs antérieures provenant de la même mère. Les dossiers de naissance étaient auparavant liés aux décès infantiles correspondants survenant jusqu’à 12 mois après la naissance. Les données sur les issues de naissance incluses dans les fichiers couplés provenaient de données recueillies par les registres provinciaux et territoriaux des statistiques de l’état civil du Canada, qui ont été validées par Statistique Canada.

12. Les fichiers de données couplées ne contenaient que les éléments de données requis pour mener l’étude. Les noms ont été utilisés uniquement aux fins de couplage et ont ensuite été retirés des fichiers couplés avant que l’accès ne soit accordé à Kramer et coll. Une copie du résumé du couplage d’enregistrements dans le cadre de l’étude est jointe aux présentes en tant que pièce « G ».

13. Aucun couplage d’enregistrements n’a jamais été réalisé par Kramer et coll. en ce qui concerne les données de Statistique Canada utilisées dans le cadre de l’étude. Tous les couplages ont plutôt été effectués par des employés de Statistique Canada. Statistique Canada a commencé le couplage d’enregistrements de ces fichiers à l’automne 2012. Une fois ce processus terminé, l’accès aux fichiers d’analyse des micro-données couplées a été fourni à Kramer et coll. Les fichiers de données couplées ont été stockés au bureau principal de Statistique Canada et des copies pouvaient être consultées dans les CDR de l’Université McGill et de l’Université de Toronto. Les données couplées n’ont jamais quitté les locaux de Statistique Canada.

14. Les CDR sont des environnements sécurisés de Statistique Canada situés dans des milieux universitaires. Les CDR comprennent des employés de Statistique Canada en tout temps et sont régis par les dispositions de la Loi sur la statistique. L’accès aux fichiers de données couplées était réservé uniquement aux employés de Statistique Canada et aux personnes réputées être employées.

15. Certains membres de Kramer et coll. étaient réputés être des employés de Statistique Canada. Les personnes réputées être employées sont des personnes, des entrepreneurs ou des fonctionnaires fédéraux dont les services sont utilisés par le ministre de l’Industrie pour exercer des fonctions ou exécuter des travaux conformément aux articles 5 et 10 de la Loi sur la statistique. Les personnes réputées être employées doivent prêter serment en vertu de la Loi sur la statistique et sont assujetties aux mêmes sanctions prévues par cette loi que tous les employés de Statistique Canada. La Directive sur l’utilisation de personnes réputées être employées régit l’utilisation des personnes réputées être employées par Statistique Canada. Une copie de cette directive est jointe en tant que pièce « H ».

16. En tout temps, les fichiers de données couplées sont restés dans les locaux de Statistique Canada. L’accès aux données couplées était réservé uniquement au personnel de Statistique Canada et aux personnes réputées être employées dont les activités professionnelles exigeaient l’accès.

17. L’étude ne constituait pas la première fois que Statistique Canada donnait accès aux données du recensement aux personnes réputées être employées. La pièce « I » jointe aux présentes est une feuille de calcul qui montre d’autres cas où l’accès aux données du recensement a été fourni aux personnes réputées être employées.

18. Compte tenu de ma connaissance de ce dossier et des opérations de Statistique Canada et de mes discussions avec des collègues, je ne suis pas d’accord avec la déclaration de la demanderesse au paragraphe 18 de son affidavit selon laquelle Kramer et coll. ont recueilli de manière sélective des données personnelles parmi les quelque neuf millions de dossiers de la « base de données sur les naissances vivantes, la mortalité infantile et la mortinatalité au Canada ». Plutôt, Kramer et coll. a effectué une analyse uniquement sur la base de données qui avait été couplée par les employés de Statistique Canada.

[59] Le demandeur contredit cette preuve en affirmant que les « identificateurs indirects » donnent lieu à un « risque possible » que l’identité des participants individuels soit révélée, mais elle n’a pas démontré de façon convaincante comment cela pourrait se produire.

[60] Dans ses arguments devant moi, la demanderesse se fonde largement sur l’alinéa 17(1)b) et les paragraphes 17(2) et 18.1(1) de la Loi sur la statistique. Aucune de ces dispositions n’entre en jeu quant aux faits de l’espèce, que ce soit pour la demanderesse ou toute personne dont les enregistrements ont effectivement été utilisés.

[61] En effet, aucune information obtenue en vertu de la Loi sur la statistique n’a été divulguée à l’encontre de l’alinéa 17(1)b), de sorte que le paragraphe 17(2) n’entre pas en jeu. Comme l’indique clairement le témoignage de Mme Badets, seuls les employés et les personnes réputées être employées de Statistique Canada ayant besoin de savoir ont accès aux données brutes, et ce sont eux qui ont effectué les couplages d’enregistrements. Les données couplées ont ensuite été conservées dans les locaux de Statistique Canada et, là encore, seuls les employés de Statistique Canada ou les personnes réputées être employées pouvaient y avoir accès, et tous ont été assermentés aux termes de l’article 6 de la Loi sur la statistique. Tout ce que Kramer et coll. ont vu consiste en des données agrégées non confidentielles. La demanderesse n’a pas montré comment les données agrégées fournies à Kramer et coll. peuvent être couplées à un particulier. Elle a soutenu devant moi que Kramer et coll. recevront des codes postaux qui serviront, par exemple, à examiner le rôle que les facteurs environnementaux pourraient jouer dans les résultats périnataux. Elle dit que, une fois qu’un code postal est connu, il est alors possible d’identifier les particuliers et les familles en accédant à d’autres sites et renseignements connectifs. Là encore, cela reste une simple affirmation de la demanderesse. Elle n’a conduit la Cour à aucune preuve qui établirait comment cela pourrait se produire. De plus, aucune information personnelle, y compris les codes postaux, n’a encore été révélée à quiconque à l’extérieur de Statistique Canada et à ceux qui relèvent de l’article 6 :

6 (1) Le statisticien en chef et toute personne employée ou réputée être employée en application de la présente loi, avant d’entrer en fonctions, prêtent le serment, ou font l’affirmation solennelle, qui suit :

6 (1) The Chief Statistician and every person employed or deemed to be employed pursuant to this Act shall, before entering on his duties, take and subscribe the following oath or solemn affirmation:

Je,, jure (ou affirme) solennellement que j’exercerai fidèlement et honnêtement mes fonctions d’employé de Statistique Canada en conformité avec les prescriptions de la Loi sur la statistique, ainsi que toutes règles et instructions établies sous son régime, et que je ne révélerai ni ne ferai connaître, sans y avoir été dûment autorisé(e), rien de ce qui parviendra à ma connaissance du fait de mon emploi.

I,, do solemnly swear (or affirm) that I will faithfully and honestly fulfil my duties as an employee of Statistics Canada in conformity with the requirements of the Statistics Act, and of all rules and instructions thereunder and that I will not without due authority in that behalf disclose or make known any matter or thing that comes to my knowledge by reason of my employment.

(2) Le serment ou l’affirmation solennelle énoncés au paragraphe (1) sont prêtés devant la personne que le ministre peut désigner, et rapportés et enregistrés de la manière que celui-ci peut prescrire.

(2) The oath or solemn affirmation set out in subsection (1) shall be taken before such person, and returned and recorded in such manner, as the Minister my direct.

(3) Les dirigeants, notamment le premier dirigeant, ainsi que les employés et mandataires d’une personne morale retenue par contrat pour accomplir pour le ministre des services spéciaux en application de la présente loi, avant d’exercer les fonctions que prévoit ce contrat, prêtent le serment, ou font l’affirmation solennelle, qui suit :

(3) Where a person retained under contract to perform special services for the Minister pursuant to this Act is a body corporate, the chief executive officer thereof and such other officers, employees and agents thereof as are used to perform the special services shall, before entering on any of the duties required under the contract, take and subscribe the following oath or solemn affirmation:

Je,, jure (ou affirme) solennellement que j’exercerai fidèlement et honnêtement mes fonctions d’employé de (nom de la personne morale) en ce qui concerne les fonctions stipulées au (indiquer ici de quel contrat administratif il s’agit) en conformité avec les prescriptions de la Loi sur la statistique, ainsi que toutes règles et instructions établies sous son régime, et que je ne révélerai ni ne ferai connaître, sans y avoir été dûment autorisé(e), rien de ce qui parviendra à ma connaissance du fait de mon emploi.

I,, do solemnly swear (or affirm) that I will faithfully and honestly fulfil my duties as an employee of (name body corporate) in respect of my employment in carrying out (identify here contract with Minister) in conformity with the requirements of the Statistics Act, and of all rules and instructions thereunder and that I will not without due authority in that behalf disclose or make known any matter or thing that comes to my knowledge by reason of my employment as described herein.

(4) Le serment ou l’affirmation solennelle énoncés au paragraphe (3) sont prêtés devant la personne que le ministre peut désigner, et rapportés et enregistrés de la manière que celui-ci peut prescrire.

(4) The oath or solemn affirmation set out in subsection (3) shall be taken before such person, and returned and recorded in such manner, as the Minister may direct.

[62] La demanderesse fait également état de la demande de recherche de Kramer et coll. faite à Statistique Canada qui, selon elle, démontre que l’étude éventuelle sera utilisée pour traiter des particuliers. Bien entendu, l’étude ne serait d’aucune utilité si elle ne permettait pas aux particuliers de recevoir de meilleurs soins. C’est pourquoi le Canada dépense de l’argent pour de telles études. Cependant, le fait que les connaissances fournies par l’étude serviront à traiter des particuliers ne signifie pas que des renseignements personnels ont été utilisés en violation de la Loi sur la protection des renseignements personnels ou de la Loi sur la statistique.

[63] Selon l’application de recherche, les chercheurs prévoient d’atteindre les objectifs de l’étude en créant un fichier lié de manière interne et orienté longitudinalement, reliant les naissances successives à la même mère, ce qui permettra de déterminer les naissances multiples. Ce dossier permettra d’examiner systématiquement dans quelle mesure les issues successives d’une grossesse d’une femme ont tendance à se répéter et à permettre l’évaluation du risque d’issue défavorable de la grossesse en fonction des résultats de sa grossesse antérieure. Le lien fournit des renseignements supplémentaires qui peuvent être examinés, tels que la pollution de l’air ambiant, les caractéristiques de revenu et de logement de la famille, etc. Les tendances peuvent alors être utilisées pour alimenter la politique sociale; plus précisément, les tendances serviront à raffiner les normes canadiennes d’exposition à divers polluants atmosphériques et à contribuer à la formulation de lignes directrices cliniques fondées sur des données probantes et d’initiatives de santé publique visant à améliorer la santé périnatale.

[64] À mon avis, l’application de recherche semble indiquer que les ensembles de données seront utilisés pour révéler les tendances qui formeront la base des conseils/lignes directrices fournis au grand public au moyen de bulletins publiés par Santé Canada ou d’autres politiques gouvernementales. Par exemple, si l’étude démontre qu’une zone fortement polluée contient également un nombre disproportionné de mortinaissances, les autorités municipales peuvent choisir d’interdire le zonage résidentiel dans les zones fortement polluées ou les médecins peuvent conseiller à leurs patients dans les zones fortement polluées de réduire le temps qu’ils passent à l’extérieur ou de déménager pendant la durée de leur grossesse, ce qui permettrait d’atteindre l’objectif d’améliorer la santé publique. De cette manière, les renseignements personnels sur un particulier ne sont pas divulgués; ce sont plutôt de renseignements sur un groupe de 9,5 millions de personnes (ou 1,9 million puisque seulement 20 % des participants admissibles ont été utilisés dans l’étude) qui sont divulgués.

[65] Cette dernière divulgation ne permet pas l’identification des individus, c’est-à-dire, une affirmation comme « Une analyse des mères à faible revenu a démontré une tendance à la baisse du poids à la naissance » n’identifie pas un particulier au sens où l’on pourrait désigner une mère à faible revenu et déterminer que son enfant a un poids à la naissance inférieur à la moyenne.

[66] La demanderesse n’a pas non plus montré comment l’article 18.1 de la Loi sur la statistique s’applique de quelque manière que ce soit à la situation actuelle. Cet article traite de la divulgation publique de renseignements obtenus par un recensement 92 ans après qu’il a été tenu. Cet article n’entre pas en jeu en l’espèce parce que l’interdiction énoncée à l’alinéa 17(1)b) ne vise que « obtenus en vertu de la présente loi de telle manière qu’il soit possible, grâce à ces révélations, de rattacher à un particulier, à une entreprise ou à une organisation identifiables les renseignements ainsi obtenus qui les concernent exclusivement ». Selon les éléments de preuve dont je dispose, il n’est pas possible de relier les données globales divulguées à Kramer et coll. à tout particulier, entreprise ou organisation identifiable. Cela signifie que Statistique Canada n’était pas tenu d’obtenir le consentement pour la divulgation des données agrégées.

[67] Le fait que la demanderesse se fonde sur l’alinéa 8(2)a) de la Loi sur la protection des renseignements personnels est également déplacé, car aucun renseignement personnel n’a été divulgué dans l’étude. La seule façon de rendre la Loi sur la protection des renseignements personnels pertinente est d’appliquer l’alinéa 7a) :

Usage des renseignements personnels

Use of personal information

7 À défaut du consentement de l’individu concerné, les renseignements personnels relevant d’une institution fédérale ne peuvent servir à celle-ci :

7 Personal information under the control of a government institution shall not, without the consent of the individual to whom it relates, be used by the institution except

a) qu’aux fins auxquelles ils ont été recueillis ou pré- parés par l’institution de même que pour les usages qui sont compatibles avec ces fins;

(a) for the purpose for which the information was obtained or compiled by the institution or for a use consistent with that purpose; or

[68] Il ne fait aucun doute que les renseignements du recensement sont des renseignements personnels, de sorte que la question en l’espèce est de savoir s’ils ont été utilisés « pour un usage compatible » aux « fins auxquelles ils ont été recueillis ou préparés ».

[69] La Cour suprême du Canada a énoncé le critère de « l’usage compatible » dans l’arrêt Bernard, précité :

[31] Pour qu’il soit visé par l’al.8(2)a) de la Loi sur la protection des renseignements personnels, l’usage n’a pas à être identique aux fins auxquelles les renseignements ont été recueillis; il n’a qu’à être compatible avec celles-ci. Comme la Cour d’appel fédérale l’a affirmé, il suffit qu’il existe un lien suffisamment direct entre les fins et l’usage projeté de sorte qu’il serait raisonnable que l’employé s’attende à ce que les renseignements soient utilisés de la manière proposée.

[Italiques dans l’original]

[70] Il est clair que Statistique Canada n’aurait pas pu envisager l’étude au moment du recensement de 1996 ou du recensement de 2006. Par conséquent, les renseignements recueillis par ces recensements n’ont pas été obtenus exclusivement pour l’étude. Cependant, le but de l’étude est de compiler et d’analyser les statistiques relatives à la santé et au bien-être des Canadiens, afin qu’elles soient conformes à l’objectif des recensements et au mandat de Statistique Canada.

[71] Sur le recensement de 2006, l’objet est rédigé comme suit :

Les groupes communautaires, les entreprises et les gouvernements élaborent des programmes et des services, comme ceux liés à l’éducation et à la santé, ainsi que des programmes économiques et sociaux qui sont fondés sur les données du recensement. Les données sont très utilisées dans nos écoles afin d’aider les enfants à mieux connaître notre pays. Statistique Canada peut également s’en servir pour sélectionner des échantillons ou faire un suivi auprès des répondants pour certaines de ses enquêtes.

[Non souligné dans l’original.]

Puisque l’objectif de l’étude est d’analyser et de déterminer les tendances en matière de santé périnatale pour l’élaboration de politiques sociales et de santé, l’étude semble se conformer à l’objectif du recensement d’élaborer un programme ou un service de santé.

[72] De plus, le site Web de Statistique Canada décrit le recensement de 2006 comme suit :

Le recensement fournit également des renseignements sur les caractéristiques de la population et des logements dans de petites régions géographiques, ainsi que pour de petits groupes de population, afin d’appuyer les activités de planification, d’administration, d’élaboration des politiques et d’évaluation de toutes les échelles des administrations publiques. Les données sont également utilisées par le secteur privé.

Là encore, l’objectif de l’étude semble conforme à la description du recensement, à savoir soutenir l’élaboration de politiques par les gouvernements et les utilisateurs de données dans le secteur privé.

[73] Le but de l’étude est d’évaluer la mortalité infantile et la santé du nouveau-né en examinant les résultats périnataux au Canada en fonction des facteurs de risque liés à la situation socioéconomique, aux antécédents ethnoculturels et à l’exposition environnementale. Cela me semble être un usage compatible des renseignements du recensement. L’étude combine des données de recensement avec des couplages d’enregistrements (c.-à-d. les bases de données nationales sur les issues de grossesse et de naissance) pour fournir des renseignements et permettre de faire des recherches sur les disparités en matière de santé périnatale. Le mandat de Statistique Canada consiste à recueillir, analyser et publier des données statistiques, y compris des statistiques sur la santé des Canadiens, conformément aux alinéas 3a) et 22c) de la Loi sur la statistique.

[74] À mon avis, l’étude satisfait au critère de l’arrêt Bernard, précité, soit l’« usage compatible ». Cela signifie qu’elle est conforme à l’article 7 de la Loi sur la protection des renseignements personnels.

[75] À mon avis, la demanderesse n’a pas démontré un usage incompatible des renseignements du recensement ou une divulgation de renseignements personnels. Cela étant, la Loi sur la statistique n’exige pas le consentement. Aucun renseignement n’a été divulgué aux termes de l’alinéa 17(1)b) de la Loi sur la statistique par les personnes assermentées conformément à l’article 6 de la Loi.

[76] La preuve dont je dispose montre que seuls les employés et les personnes réputées être employées de Statistique Canada ayant besoin de savoir ont eu accès aux données provenant des couplages d’enregistrements et qu’ils ont été assermentés conformément à l’article 6 de la Loi sur la statistique. Ces données couplées demeurent dans les locaux de Statistique Canada. La demanderesse n’a pas démontré que tout autre élément que des données agrégées non confidentielles sera divulgué publiquement lorsque l’étude sera terminée.

[77] Afin de surmonter ces problèmes dans sa demande, la demanderesse a affirmé que, en fin de compte, il ne s’agissait pas de divulgation, mais de ce qu’elle appelait un « changement à la situation démocratique », tel qu’énoncé au paragraphe 18.1(2) de la Loi sur la statistique et dans les débats entourant le projet de loi S-18 au Parlement. Les extraits suivants semblent être pertinents à ce problème :

M. Lloyd St. Amand (Brant, Lib.) :

La Chambre conviendra sûrement que l’accès à ces relevés peut constituer un moyen précieux de mener des recherches familiales et historiques. [...] L’autre aspect clé du projet de loi [...] c’est qu’il permettrait aux Canadiens d’avoir clairement et catégoriquement leur mot à dire sur la façon dont ils voudraient que les renseignements les concernant dans les relevés de recensement soient utilisés à l’avenir. Les Canadiens auraient le choix d’autoriser, dans le questionnaire de recensement, la communication des renseignements qui les concernent.

[...]

À l’heure actuelle, le problème réside dans l’ambiguïté juridique quant au pouvoir du statisticien en chef du Canada de rendre publics les relevés du recensement de 1911. Le fait que ces relevés n’aient pas été encore rendus publics soulève un tollé et une grande consternation dans le milieu de la généalogie. [...] Le projet de loi ne s’attaque donc pas simplement à la question de l’accès aux recensements déjà effectués, mais il établit également le cadre de l’accès aux futurs relevés de recensement.

À compter du recensement de 2006 et par la suite, Statistique Canada demandera, dans le questionnaire, le consentement des Canadiens pour rendre publics les renseignements contenus dans leurs relevés de recensement, là encore 92 ans après chaque recensement. Les données de recensement d’une personne ne seraient divulguées que si ce consentement a été donné. Dans le cas contraire, les données de recensement de cette personne ne seraient jamais rendues publiques.

[...]

La possibilité de donner un consentement éclairé à l’égard de l’utilisation de renseignements personnels est un principe clé de la protection de la vie privée. Par conséquent, les Canadiens devraient pouvoir décider par eux-mêmes s’ils veulent que leurs renseignements personnels fournis dans le cadre des recensements soient rendus publics dans l’avenir. Le projet de loi S-18 donnerait aux Canadiens, pour la première fois, l’option d’autoriser la divulgation de leurs propres renseignements 92 ans après la tenue des recensements. Le questionnaire du prochain recensement, qui aura lieu en mai 2006, devrait contenir une question à ce sujet.

Les défenseurs de la protection de la vie privée et ceux qui les appuient de façon officielle ou non seront les premiers à convenir que la possibilité de donner un consentement éclairé à l’égard de l’utilisation de renseignements personnels est un principe clé de la protection de la vie privée. Pour plusieurs, c’est un droit dont tous disposent. Le projet de loi S-18 établit le fondement législatif pour que ce consentement puisse être donné et respecté.

Un troisième point tout aussi important du projet de loi S-18 est la tenue d’un examen parlementaire en 2014. Un comité de la Chambre, du Sénat ou des deux chambres passerait en revue l’application des dispositions sur le consentement éclairé. D’ici 2014, on aura demandé aux Canadiens la permission de divulguer leurs renseignements personnels dans deux recensements. Leurs réponses nous indiqueront comment ils perçoivent ce dossier et comment ils souhaitent que leur gouvernement respecte leurs souhaits.

[...]

Nous voici saisis du projet de loi S-18 qui, encore une fois, tente de régler la question qui se pose depuis 94 ans, à savoir quoi faire relativement à la diffusion des relevés des recensements de 1911 à 2001, et offre une solution aux questions de protection des renseignements personnels auxquelles les générations futures seront confrontées au moment de remplir leurs formulaires du recensement.

[Non souligné dans l’original.]

[78] Après avoir lu le débat dans son intégralité, il est clair que le législateur avait l’intention d’examiner si les dossiers de recensement peuvent être diffusés intégralement sans consentement après 92 ans. L’importance du consentement est évidente dans une telle situation parce que le dossier est personnellement identifiable. Cependant, dans la situation actuelle, où des parties de documents non identifiables personnellement sont diffusées, l’importance du consentement est moins claire. Les débats soulignent l’importance de permettre aux Canadiens de consentir à la divulgation de leurs renseignements personnels dans un contexte précis, à savoir, lorsque la divulgation des renseignements permet l’identification complète d’une personne jusqu’à son nom. Ce n’est pas le cas dans la situation actuelle et il ne découle pas des débats que le législateur a voulu que le consentement soit exigé dans la communication de documents partiels non identifiables.

[79] Ce que la demanderesse semble vouloir dire, c’est que la décision du statisticien en chef de conclure l’entente avec McGill et d’autoriser l’étude et ses usages sans revenir en arrière et obtenir le consentement des particuliers a changé l’équilibre fondamental entre la vie privée et le bien public qui sous-tend la Loi sur la statistique. En effet, elle dit que Statistique Canada a modifié l’équilibre fondamental établi par la Loi en utilisant des renseignements personnels sans consentement, ce qui mine le processus démocratique parce que ce n’était pas ce que le législateur voulait comme en témoignent les débats sur le projet de loi S-18.

[80] Mais la réponse à cela est que les études futures dans le domaine de la santé ne peuvent être déterminées au moment d’un recensement, et que le bien public n’exige pas, et le législateur n’a pas l’intention, que le consentement de toute la population visée par le recensement soit requis chaque fois qu’une nouvelle étude est proposée. Au lieu de cela, le législateur a intégré des garanties dans la législation afin de protéger les renseignements personnels et d’utiliser les renseignements du recensement pour le bien public. La Cour suprême du Canada a examiné la question du consentement dans l’arrêt Bernard et a proposé le concept d’« usage compatible » pour surmonter les difficultés évidentes qui surgiront au fil du temps pour décider si les personnes qui ont rempli un recensement donneraient leur consentement à un usage particulier qui se pose à l’avenir.

[81] La demanderesse ne peut pas dire en l’espèce qu’il y a eu, ou qu’il y aura, divulgation illégale de ses renseignements personnels. Ses renseignements personnels n’ont pas été utilisés. Elle n’a pas non plus établi que les renseignements personnels d’autrui ont été ou seront divulgués pour les raisons que j’ai données ci-dessus. Elle est donc renvoyée à l’allégation selon laquelle le statisticien en chef n’a pas obtenu le consentement dans un contexte où le consentement aurait dû être obtenu. Cette affirmation ne doit pas être maintenue compte tenu de ces faits. Le statisticien en chef n’a pas modifié la loi ni troublé l’équilibre que le législateur et la Cour suprême du Canada ont jugé nécessaire dans de telles situations. Le statisticien en chef a agi conformément au mandat de Statistique Canada et à la loi qui dispose qu’un consentement supplémentaire n’est pas requis pour un usage compatible. Selon les faits, il s’agissait d’un usage compatible dans lequel aucun renseignement personnel n’a été ou ne sera divulgué.

[82] En fin de compte, j’ai simplement tiré les mêmes conclusions que le commissaire à la protection de la vie privée. Le commissaire à la protection de la vie privée a clairement indiqué à la demanderesse que son enquête avait révélé que ses renseignements personnels n’avaient pas été utilisés aux fins de l’étude et que, même si l’étude allait au-delà des objectifs de recherche mentionnés dans le recensement, elle ne l’a fait que d’une manière autorisée par la Loi sur la statistique.

[83] Devant moi, la demanderesse a demandé à la Cour d’examiner ces mêmes questions en litige et de parvenir à une conclusion différente. Elle a continué à affirmer que ses renseignements personnels avaient été utilisés lorsque, selon la preuve, ils n’avaient manifestement pas été utilisés, et elle a soutenu une sorte de qualité d’intérêt public qu’elle n’a pas, parce qu’elle n’a pas démontré à la Cour que ses intérêts personnels et points de vue sont partagés par tous ceux dont les dossiers ont été couplés aux fins de l’étude. Dans ses observations écrites, elle ne se conforme pas aux dispositions législatives applicables et, à l’audience devant moi, elle s’est appuyée sur ce qu’elle a appelé une « approche contextuelle historique » qui, selon elle, est intégrée au paragraphe 18.1(2) de la Loi sur la statistique.

18.1 (1) Les articles 17 et 18 cessent de s’appliquer aux renseignements contenus dans les relevés de tout recensement de la population fait entre 1910 et 2005 quatre-vingt-douze ans après la tenue du recensement.

18.1 (1) The information contained in the returns of each census of population taken between 1910 and 2005 is no longer subject to sections 17 and 18 ninety-two years after the census is taken.

[84] Ce paragraphe traite seulement de ce qui arrivera à l’information 92 ans après le recensement. Il dispose qu’à ce moment-là, les articles 17 et 18 ne s’appliqueront que si la personne y consent.

[85] Dans la situation actuelle, aucun renseignement personnel n’a été divulgué au-delà des limites imposées par l’article 6 de la Loi sur la statistique, et la preuve n’établit pas que ces renseignements ne seront jamais divulgués sous une forme quelconque qui relève de « renseignements concernant un individu identifiable » telle que l’expression est définie par l’article 3 de la Loi sur la protection des renseignements personnels. Les renseignements fournis dans les recensements seront certainement utilisés, mais leur utilisation est un « usage compatible », pour reprendre l’expression définie par la jurisprudence applicable. La thèse de la demanderesse semble être que le consentement est toujours requis à moins que le recensement mentionne expressément qu’il n’est pas requis et qu’il y soit consenti. Ce n’est pas la loi et, en pratique, ce serait impraticable si c’était le cas. C’est pourquoi nous avons le concept d’« usage compatible ».

[86] Le véritable problème avec la présente demande est qu’elle est prématurée. L’étude n’a pas encore été publiée ou utilisée. La demanderesse soulève l’hypothèse que des renseignements personnels seront utilisés et divulgués, mais n’a produit aucune preuve convaincante à l’appui de cette position. Tout ce que j’ai dit dans la présente demande, qui repose uniquement sur le dossier dont je suis saisi, ne devrait pas empêcher quiconque dont les renseignements personnels sont utilisés ou divulgués de façon inappropriée de saisir la Cour à l’avenir.

[87] La demande doit être rejetée.

C. Dépens

[88] De brefs exposés sur les dépens ont été présentés par les deux parties à l’audience, mais je crois que, en toute justice, d’autres observations à cet égard devraient être présentées en fonction de mes conclusions. Par conséquent, les parties devraient soumettre, par écrit, des observations quant aux dépens assez détaillées et je traiterai des dépens dans une ordonnance complémentaire. Les observations du défendeur, y compris un projet de mémoire de frais, devraient être signifiées et déposées dans les dix jours de la date du présent jugement et la demanderesse devrait répondre dans les dix jours de la réception des observations du défendeur sur les dépens.


JUGEMENT

LA COUR REND LE JUGEMENT SUIVANT :

  1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

  2. Les parties présenteront à la Cour des observations quant aux dépens conformément au présent jugement et aux motifs par écrit et la Cour les traitera dans une ordonnance complémentaire.

« James Russell »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 27e jour de juillet 2020

Lionbridge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-2587-14

 

INTITULÉ :

KELLY A. O’GRADY c PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Ottawa (Ontario)

 

DATE DE L’AUDITION :

Le 15 novembre 2016

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE RUSSELL

 

DATE DES MOTIFS :

Le 10 février 2017

 

COMPARUTIONS :

Kelly A. O’Grady

POUR SON PROPRE COMPTE

 

Abigail Martinez

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

Pour le défendeur

 

 

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