Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20161208


Dossier : IMM-2621-16

Référence : 2016 CF 1354

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

St. John’s (Terre-Neuve-et-Labrador), le 8 décembre 2016

En présence de madame la juge Heneghan

ENTRE :

CHEDZA MUDONGO

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]  La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision d’un agent (l’agent) rejetant la demande d’examen des risques avant renvoi (ERAR) de Mme Chedza Mudongo (la demanderesse), présentée en application du paragraphe 112(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (la Loi).

[2]  La demanderesse, une citoyenne du Botswana, a présenté une demande d’asile au motif de mauvais traitements infligés par son mari, qu’elle a été, selon ses affirmations, contrainte d’épouser. Elle a demandé l’aide d’un certain M. Ademola Oladapo pour la préparation des observations à l’appui de sa demande d’ERAR, croyant qu’il s’agissait d’un avocat.

[3]  Il en est ressorti que M. Oladapo n’est ni un avocat ni un consultant en immigration dûment enregistré, et les observations qu’il a produites au nom de la demanderesse étaient erronées sur le plan factuel.

[4]  La question déterminante soulevée par la demanderesse dans la présente demande de contrôle judiciaire est qu’elle a été privée de son droit à une instruction équitable, puisque des observations factuelles erronées ont été présentées par le soi-disant « avocat » en son nom. Elle plaide qu’on a porté atteinte à son droit à l’équité procédurale.

[5]  Le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration (le défendeur) s’oppose à la demande et soutient que la demanderesse n’a pas réussi à établir une atteinte à l’équité procédurale et qu’elle est responsable du choix de son avocat. Il fait également valoir que, quoi qu’il en soit, la décision de l’agent est raisonnable.

[6]  La norme de contrôle pour les questions d’équité procédurale est celle de la décision correcte (voir Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Khosa, [2009] 1 RCS 339, au paragraphe 43). Le bien-fondé d’une décision d’ERAR est susceptible de contrôle selon la norme de la décision raisonnable; voir la décision dans Singh c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2014 CF 11, au paragraphe 20.

[7]  Dans les circonstances de l’espèce et après avoir examiné les observations de l’avocat, je suis convaincue que la demanderesse a été privée de son droit à une instruction équitable, en raison des actes commis par un imposteur qui s’est fait passer pour un avocat.

[8]  Puisque M. Oladapo n’est ni un avocat ni un consultant, ses actes ne sont pas susceptibles de contrôle selon les normes applicables aux avocats et aux consultants. Je renvoie à la décision Cove c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2001 CFPI 266, au paragraphe 10, où la Cour a affirmé ce qui suit :

10  Les particuliers qui se présentent à titre de personnes spécialisées en matière d’immigration et adoptent la désignation de « conseiller juridique », comme c’est de plus en plus souvent le cas, seront assujettis à la même norme que ceux qui se présentent régulièrement devant la Cour. Les conséquences découlant de l’inexécution de leurs obligations pour leurs clients seront les mêmes que dans le cas des clients des avocats spécialisés en matière d’immigration. Il n’y a aucune raison pour laquelle la Cour devrait protéger les consultants des allégations de négligence en fermant les yeux lorsqu’ils commettent des erreurs [...]

[9]  M. Oladapo a présenté un fondement factuel inexact pour l’ERAR de la demanderesse et, à mon avis, ce fait signifie que son allégation selon laquelle elle était exposée à un risque dans son pays d’origine n’avait pas fait l’objet d’une appréciation équitable.

[10]  Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire est accueillie, la décision de l’agent est annulée et l’affaire est renvoyée à un autre agent pour qu’il l’examine à nouveau.

[11]  L’avocat des demandeurs propose la question à certifier suivante :

Peu importe s’il y a une probabilité raisonnable de réussite, la préparation frauduleuse d’une demande d’examen des risques avant renvoi par un représentant qui prétend être un avocat constitue-t-elle une erreur judiciaire?

[12]  L’avocat du défendeur s’oppose à la certification de la question.

[13]  Je renvoie au critère pour la certification d’une question, tel qu’énoncé dans Zhang c. Canada (Citoyenneté et Immigration) [2014] 4 RCF 290 (CAF), au paragraphe 9. Une question devrait être certifiée uniquement lorsqu’il s’agit d’une question qui a des conséquences importantes et qui est déterminante quant à l’issue de l’appel.

[14]  À mon avis, la question proposée par l’avocat de la demanderesse ne satisfait pas à ce critère et aucune question ne sera certifiée.


JUGEMENT

LA COUR REND LE JUGEMENT SUIVANT : La demande de contrôle judiciaire est accueillie, la décision de l’agent est annulée et l’affaire est renvoyée à un autre agent pour qu’il l’examine à nouveau. Il n’y a aucune question à certifier.

« E. Heneghan »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 9e jour d’août 2019

Lionbridge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-2621-16

INTITULÉ :

CHEDZA MUDONGO c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

LIEU DE L’AUDIENCE :

OTTAWA (ONTARIO)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 22 novembre 2016

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE HENEGHAN

DATE DES MOTIFS :

Le 8 décembre 2016

COMPARUTIONS :

Seamus Murphy

Pour la demanderesse

Stephen Kurelek

Pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Gerami Law PC

Avocats

Ottawa (Ontario)

Pour la demanderesse

William F. Pentney, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

Pour le défendeur

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.