Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20170111


Dossier : IMM-259-16

Référence : 2017 CF 34

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 11 janvier 2017

En présence de madame la juge Simpson

ENTRE :

SVETLANA BOGDANOVA

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]               Svetlana Bogdanova (la demanderesse) a demandé le contrôle judiciaire d’une décision datée du 20 novembre 2015 (la décision), par laquelle un agent principal a rejeté sa demande pour obtenir un examen des risques avant renvoi (ERAR). La présente demande a été présentée en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27.

[2]               La demanderesse est une citoyenne russe âgée de 43 ans. Elle est arrivée au Canada le 26 janvier 2013 et elle a demandé l’asile à l’aéroport de Montréal. Sa revendication était fondée sur son orientation sexuelle. Elle affirme être lesbienne.

[3]               La demande d’asile de la demanderesse devait être entendue par la Section de la protection des réfugiés (la SPR) de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié le 2 avril 2013. Elle affirme qu’elle n’a pu se présenter pour raison de maladie. Une audience a eu lieu le 15 avril 2013, pour offrir à la demanderesse une chance de s’expliquer, mais la SPR a constaté que sa revendication avait été abandonnée. Il n’y a pas eu de demande de contrôle judiciaire de cette décision.

[4]               Le 7 avril 2015, la demanderesse a attiré l’attention de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) lorsque le service de police régional de York a été appelé à se rendre à son domicile au sujet d’une dispute conjugale avec un homme avec qui elle a avoué entretenir une relation hétérosexuelle. L’ASFC l’a décrit comme son [traduction] « petit ami » dans son avis d’arrestation. Ce jour-là, elle a été arrêtée pour défaut de fournir à l’ASFC une adresse domiciliaire exacte comme l’exigent ses conditions en matière de présentation de rapports.

[5]               Le 1er mai 2015, la demanderesse a présenté sa première demande d’ERAR (le premier ERAR). Elle disait qu’elle était lesbienne et qu’elle souffrirait d’un préjudice psychologique grave, présentant notamment un risque de suicide potentiel, si elle était renvoyée. Elle a également allégué qu’elle avait été agressée de nombreuses fois en Russie en raison de son orientation sexuelle.

[6]               Le 20 novembre 2015, un agent principal (l’agent) a rejeté la première demande d’ERAR (la première décision). La première décision a été communiquée à la demanderesse par messager le 4 janvier 2016. C’est cette décision qui fait l’objet du présent contrôle judiciaire.

[7]               Deux jours plus tard, le 6 janvier 2016, l’agent a reçu les documents additionnels énumérés ci-dessous (les autres documents) :

  • observations de l’avocat datées du 31 décembre 2015;
  • déclaration de la demanderesse datée du 3 janvier 2015;
  • rapports médicaux de l’unité de traumatologie de la clinique externe de la ville de Moscou datés du 14 septembre 2011 et du 21 septembre 2012;
  • rapport médical de l’hôpital de santé mentale de Moscou daté du 13 janvier 2012;
  • rapport de Natalie Riback, psychothérapeute, datée du 22 décembre 2015;
  • élément de preuve documentaire sur le traitement des membres de la communauté LGBT en Russie.

[8]               Comme ces autres documents n’étaient pas disponibles au moment où la première décision a été rendue, l’agent a préparé un addenda à la première décision. Cet addenda est daté du 6 février 2016 (l’addenda). Il n’y a rien cependant qui permette de penser qu’il a été remis à la demanderesse, et il ne fait pas partie de la première décision.

[9]               Le 12 janvier 2016, la demanderesse a présenté une deuxième demande d’ERAR (le deuxième ERAR), qui a été assignée à l’agent ayant rendu la première décision. L’agent a pris en considération les documents déposés avec le deuxième ERAR, de même que les autres documents décrits précédemment. L’agent a rejeté la deuxième demande d’ERAR le 15 avril 2016 (la deuxième décision).

[10]           La demanderesse a présenté une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire de cette deuxième décision le 30 juin 2016. Toutefois, le 22 août 2016, la demande a été rejetée, puisqu’elle n’avait pas été mise en état.

I.                    La première décision

[11]           La demanderesse a affirmé qu’en Russie, son amie et elle se sont faites crier après et ont été insultées alors qu’elles étaient assises dans un café, et que la « milice » était entrée par effraction dans l’appartement de sa petite amie. Elle a également affirmé qu’on les avait appelées « sales lesbiennes » et qu’elles avaient reçu des menaces de mort. À une occasion, elles ont été agressées alors qu’elles faisaient du magasinage.

[12]           L’agent a fait mention à la demanderesse du dossier de l’ASFC, lequel indiquait plusieurs interactions avec le service de police régional de York en raison de disputes conjugales avec son petit ami. L’agent a estimé qu’il n’y avait pas suffisamment d’éléments de preuve pour établir, selon la prépondérance des probabilités, que la demanderesse était lesbienne, ou qu’elle serait exposée à un risque en raison de son orientation sexuelle alléguée si elle retournait en Russie. L’agent a également estimé qu’il n’y avait pas suffisamment d’éléments de preuve pour corroborer les affirmations de la demanderesse selon lesquelles elle avait été agressée en Russie en raison de son orientation sexuelle.

[13]           L’agent a pris en considération la déclaration de la demanderesse, selon laquelle elle aurait reçu un diagnostic de schizophrénie, de même que la déclaration de l’avocat selon laquelle une lettre à ce sujet serait envoyée par la mère de la demanderesse. Cependant, la lettre n’est jamais arrivée et, compte tenu qu’il n’y avait aucun document médical portant sur la santé mentale de la demanderesse, l’agent a estimé qu’elle n’avait pas réussi à établir qu’elle serait exposée à un risque pour cette raison.

II.                 La question préliminaire

[14]           La question préliminaire consiste à savoir si la présente demande est théorique. Le défendeur affirme qu’étant donné que la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire de la deuxième décision a été rejetée, et que la deuxième décision comportait un examen de toute la documentation pertinente, la deuxième décision constitue une décision finale quant au risque auquel est exposé la demanderesse.

[15]           Je suis convaincue par cet argument. À mon avis, la présente demande est théorique parce que la deuxième décision est finale et porte sur des allégations de risque dans un dossier complet. Par conséquent, la présente demande sera rejetée.

III.               Question à certifier

[16]           Aucune question n’a été posée aux fins de certification.


JUGEMENT

LA COUR rejette la présente demande de contrôle judiciaire.

« Sandra J. Simpson »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-259-16

INTITULÉ :

SVETLANA BOGDANOVA c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 22 novembre 2016

JUGEMENT ET MOTIFS :

La juge SIMPSON

DATE DES MOTIFS :

Le 11 janvier 2017

COMPARUTIONS :

Dov Maierovitz

Pour la demanderesse

Gordon Lee

Pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

EME Professional Corporation

Avocats

Toronto (Ontario)

Pour la demanderesse

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

Pour le défendeur

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.