Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20170123


Dossier : IMM-97-16

Référence : 2017 CF 79

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Toronto (Ontario), le 23 janvier 2017

En présence de monsieur le juge O’Reilly

ENTRE :

SANDORNE BOTRAGYI, ATTILA HRANEK, VERONIKA RAMONA HORVATH et

SANDOR ERIK BOTRAGYI

demandeurs

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.                    Aperçu

[1]               En 2011, Mme Sandorne Botragyi et d’autres membres de sa famille ont présenté une demande d’asile, invoquant leur crainte d’être persécutés en Hongrie. Un tribunal de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié a rejeté leurs demandes. Ils ont obtenu l’autorisation de demander le contrôle judiciaire de cette décision, contrôle qui a ensuite été rejeté.

[2]               Les demandeurs ont ensuite demandé la tenue d’un examen des risques avant renvoi (ERAR) et ont fourni à l’agent d’ERAR des renseignements supplémentaires qui ne faisaient pas partie de leur demande d’asile initiale. Plus précisément, les demandeurs ont avisé l’agent qu’ils n’avaient pas été bien représentés par leur avocat pendant la poursuite de leurs demandes.

[3]               L’agent a refusé de tenir compte de la plupart des documents fournis par les demandeurs. Il a plus précisément refusé de tenir compte de l’information relative à la conduite de leur ancien avocat, car à son avis, tout problème relatif à l’incompétence de l’avocat a été résolu par l’autorisation d’obtenir un contrôle judiciaire de la décision de la Commission. Considérant que leur demande de contrôle judiciaire a été rejetée, cette question n’était plus pertinente selon l’agent.

[4]               Les demandeurs font valoir que l’agent a déraisonnablement omis de tenir compte de la nouvelle preuve. Ils allèguent que l’agent n’a pas tenu compte du fait qu’ils n’avaient pas d’autres choix que de présenter ce qui semblait être de la nouvelle preuve à l’agent puisque leur ancien avocat avait, par incompétence, omis de présenter de la preuve accessible à la Commission. Ils me demandent d’annuler la décision de l’agent et d’ordonner à un autre agent d’examiner à nouveau leur demande d’ERAR.

[5]               Je suis d’accord avec les demandeurs que l’agent n’a pas tenu compte du fait que les allégations relatives à l’incompétence de l’avocat n’ont pas uniquement eu des conséquences lors de l’audience devant la Commission, mais qu’elles devaient également être examinées pour décider si la preuve présentée à l’agent aurait raisonnablement pu être déposée plus tôt. Dans les circonstances, je fais droit à la demande de contrôle judiciaire.

[6]               Les demandeurs ont présenté plusieurs éléments de contestation de la décision de l’agent, mais je limiterai mes motifs à l’incompétence alléguée de l’avocat.

II.                 Décision de l’agent d’ERAR

[7]               Les demandeurs soutiennent que leur ancien avocat ne leur a donné que 20 minutes pour remplir leur récit écrit et ne les a pas conseillés sur les éléments à y inclure. L’avocat a ensuite fait traduire les récits. Les traductions étaient de piètre qualité et les demandeurs n’ont pas eu l’occasion de les réviser avant l’audition de leur demande d’asile. L’avocat ne les a rencontrés qu’une seule fois avant l’audition et ne leur a donné aucun conseil sur le type de preuve qu’ils devraient recueillir. Le même avocat a représenté les demandeurs lors de l’audition, de la demande d’autorisation de contrôle judiciaire et du contrôle judiciaire.

[8]               En fonction de ces circonstances, l’agent a conclu que toutes les questions relatives à la compétence de l’avocat avaient été résolues par l’obtention de l’autorisation de porter la décision en contrôle judiciaire et que ce contrôle a ensuite été rejeté.

III.               L’agent a-t-il commis une erreur?

[9]               À mon avis, oui.

[10]           En décidant d’admettre ou non de nouveaux éléments de preuve, l’agent devait d’abord examiner si cette preuve était raisonnablement accessible aux demandeurs au moment de leur audition devant la commission. L’agent devait ensuite examiner si, dans les circonstances, cette preuve aurait raisonnablement pu être présentée à la Commission (Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27, alinéa113a) – voir l’annexe).

[11]           En l’espèce, au moins une partie de la preuve présentée à l’agent était raisonnablement accessible au moment de l’audition devant la Commission. Toutefois, l’agent d’ERAR n’a pas poursuivi en examinant si cette preuve aurait raisonnablement pu être présentée à la Commission dans les circonstances. Selon moi, l’agent n’a pas tenu compte de la possibilité que les demandeurs n’ont pas eu d’occasion raisonnable de présenter leur preuve à la Commission en raison de la conduite de leur avocat.

[12]           Cela ne signifie pas que l’agent devait admettre les nouveaux éléments de preuve, mais plutôt qu’il aurait dû tenir compte de l’ensemble des circonstances avant de conclure que ces nouveaux éléments de preuve n’étaient pas admissibles. De ne pas l’avoir fait constitue une erreur de droit.

IV.              Conclusion et décision

[13]           L’agent d’ERAR a commis une erreur en excluant la preuve présentée par les demandeurs avant de déterminer si, dans les circonstances, l’occasion de présenter cette preuve à la Commission leur avait été refusée. Pour ce motif, j’accueille la demande de contrôle judiciaire. Aucune des parties n’a proposé de question de portée générale aux fins de certification, et aucune question n’est mentionnée.


JUGEMENT DANS LE DOSSIER IMM-97-16

LA COUR FAIT DROIT à la présente demande de contrôle judiciaire. Il n’y a aucune question grave de portée générale à certifier.

« James W. O’Reilly »

Juge


ANNEXE

Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, ch 27

Immigration and Refugee Protection Act, SC 2001, c 27

Examen de la demande

Consideration of application

113 Il est disposé de la demande comme il suit :

113 Consideration of an application for protection shall be as follows:

a) le demandeur d’asile débouté ne peut présenter que des éléments de preuve survenus depuis le rejet ou qui n’étaient alors pas normalement accessibles ou, s’ils l’étaient, qu’il n’était pas raisonnable, dans les circonstances, de s’attendre à ce qu’il les ait présentés au moment du rejet;

(a) an applicant whose claim to refugee protection has been rejected may present only new evidence that arose after the rejection or was not reasonably available, or that the applicant could not reasonably have been expected in the circumstances to have presented, at the time of the rejection;

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-97-16

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :

SANDORNE BOTRAGYI, ATTILA HRANEK, VERONIKA RAMONA HORVATH et SANDOR ERIK BOTRAGYI c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 3 novembre 2016

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE O’REILLY

 

DATE DU JUGEMENT :

Le 23 janvier 2017

COMPARUTIONS :

Rojan Malekzadeh

 

Pour les demandeurs

 

Alex Kam

 

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

RM Law Professional Corporation

Avocats

Toronto (Ontario)

 

Pour les demandeurs

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

Pour le défendeur

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.