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Date : 20161230


Dossier : T-381-16

Référence : 2016 CF 1417

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 30 décembre 2016

En présence de monsieur le juge Brown

ENTRE :

EL-SAYED MAGDY HUSSEIN

demandeur

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]               La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire présentée par El-Sayed Magdy Hussein [le demandeur], en application de l’article 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. (1985), ch. F-7, visant la décision [Décision du TSS‑DA], en date du 30 novembre 2015, par laquelle le Tribunal de la sécurité sociale – Division d’appel [TSS‑DA], se fondant sur l’article 58 de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, L.C. 2005, ch. 34 [LMEDS], a refusé au demandeur l’autorisation de faire appel de la décision par laquelle le Tribunal de la sécurité sociale – Division générale [TSS‑DG] a rejeté sa demande de versement rétroactif de sa pension d’invalidité du Régime de pensions du Canada [RPC] [Décision du TSS‑DG].

[2]               La demande est rejetée pour les motifs suivants.

I.                   Les faits

[3]               Le demandeur, qui a en l’espèce assuré sa propre représentation, est un père de famille âgé de 70 ans, qui éprouve des problèmes de santé mentale. À l’appui de sa demande de versement rétroactif de sa pension d’invalidité du RPC, il invoquait les paragraphes 60(8) à (10) de la Loi sur le Régime de pensions du Canada, L.R.C. (1985), ch. C‑8 [Loi sur le RPC]. Le demandeur touche une pension d’invalidité du RPC depuis juillet 2010. Il estime avoir rétroactivement droit à des prestations supplémentaires à partir de 2006, étant donné que, pendant toute cette période, il souffrait d’une grave maladie mentale.

[4]               Le demandeur est arrivé au Canada en 1997 en tant qu’immigrant reçu. Avant de venir au Canada, il a, pendant 20 ans, travaillé comme ingénieur en Égypte et dans les Émirats arabes unis. Les études qu’il a faites en Égypte sont l’équivalent d’un diplôme en ingénierie sanctionnant quatre années d’études dans une [traduction] « université canadienne de bonne réputation ».

[5]               Une fois arrivé au Canada, le demandeur n’a malheureusement pas pu retrouver un emploi d’ingénieur. Il a fini par se trouver un travail de nuit dans un dépanneur situé dans un [traduction] « quartier difficile ». Il a, de 2005 à 2010, travaillé, deux fois par semaine, de 23 h à 7 h du matin, soit un horaire hebdomadaire de 16 heures. Le demandeur affirme avoir, au dépanneur, souvent été victime de vols ou de tentatives de vol, et qu’à l’occasion d’une de ces tentatives de vol, il a été blessé. Il affirme, par ailleurs, que les troubles mentaux qu’il éprouve lui ont fait manquer de nombreuses journées de travail. D’après lui, s’il a pu obtenir et conserver cet emploi chez le dépanneur, c’est uniquement parce que le gérant du magasin était un de ses amis. Le 2 mars 2010, peu après que son ami a quitté son emploi, le demandeur a été licencié par le nouveau gérant.

[6]               En 2003, le demandeur a commencé à consulter un psychiatre. Dans une lettre d’avril 2005, concernant la demande de prestations du Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées [POSPH], le psychiatre indique avoir constaté, lors d’une visite remontant à mars 2005, que l’état de santé du demandeur avait empiré et qu’il relevait [traduction« les symptômes d’une profonde dépression, accompagnée de psychose » :

[traduction]
Il souffre d’insomnie, de dépression accompagnée d’hallucinations auditoires lui disant « Il n’y a pas d’espoir, tu vas devoir mourir ». Il manque d’appétit. Il est abattu et perturbé, et je lui attribuerais, sur l’échelle d’évaluation globale de fonctionnement, une cote inférieure à 50. J’estime que sa santé est gravement atteinte et que, compte tenu du caractère chronique et réfractaire de ses symptômes, il n’a que très peu de chances, voire aucune chance de pouvoir reprendre le travail dans un avenir prévisible.

[7]               D’après le rapport du psychiatre, le demandeur souffrait d’hallucinations auditoires et son pronostic était [traduction] « inquiétant ».

[8]               Le demandeur prenait déjà des médicaments antipsychotiques, mais ce n’est que vers la fin de 2010 qu’il s’est vu prescrire des médicaments permettant de contrôler les voix qu’il entendait. Avant cela, l’état de santé du demandeur fluctuait en permanence.

[9]               Le demandeur affirme ne pas avoir voulu dépendre d’un soutien au revenu ou de l’aide sociale, et avoir tout fait pour éviter d’avoir à y recourir. Il affirme que les voix qu’il entendait lui disaient que ce n’était pas bien de recourir à l’aide sociale. C’est pourquoi il a, au fil du temps, emprunté à un proche 48 000 $ pour arrondir le salaire que lui versait le dépanneur, et subvenir aux besoins de sa femme et de son enfant. Or, il voudrait maintenant rembourser ces prêts.

[10]           Bien qu’il ait beaucoup hésité à accepter l’aide sociale, le demandeur a, en 2005, fini par déposer une demande de prestations du POSPH, aidé dans sa démarche par les collaborateurs de son député provincial. Il prétend que la demande de prestation du POSPH a été déposée contre son gré. Sa demande du POSPH a, dans un premier temps, été rejetée, mais il a persisté et la demande a fini par être approuvée à compter du 10 juin 2005.

[11]           Le 23 février 2006, le demandeur s’est retiré du POSPH. Il affirme avoir été convaincu de s’en retirer par les voix qu’il entendait. D’après lui, ces voix lui disaient : [traduction] « Tu es ingénieur, et il est honteux de recourir à ce genre d’aide ».

[12]           Cependant, le 26 juin 2007, le demandeur a fait savoir au POSPH qu’il souhaitait déposer une nouvelle demande de prestations d’invalidité. On lui avait fixé un rendez-vous en août 2007, mais il l’annula.

[13]           Le 11 juillet 2011, après avoir déposé une demande prestations du RPC, le demandeur a, à nouveau, contacté le POSPH pour que l’on donne suite à sa demande. On lui fixa un rendez‑vous pour le 23 septembre 2011. Le demandeur s’est rendu ce jour-là aux bureaux du POSPH et rempli sa demande. On lui accorda des prestations d’invalidité à partir du 23 septembre 2011, au titre de la catégorie prescrite (en tant que personne touchant déjà une pension d’invalidité du RPC). Il déposa alors une demande de prestations d’assurance-emploi [AE], qu’il a touchées du 11 juillet 2010 au 29 juillet 2011. À partir de mars 2010, il a également touché une pension d’invalidité du RPC. Le demandeur a commencé à toucher cette pension en juillet 2010 compte tenu des quatre mois prévus par la loi. Entre-temps, il a également tenté de se trouver un emploi.

[14]           Selon le demandeur, la pension d’invalidité du RPC devrait lui être accordée rétroactivement au 23 février 2006, date à laquelle il s’est, de son plein gré, retiré du POSPH. Le 3 août 2011, il a donc sollicité le réexamen de son dossier, demandant que la date de commencement des versements soit reculée rétroactivement. Il a présenté, à l’appui de sa demande, une déclaration d’incapacité signée par son psychiatre.

[15]           Le 24 novembre 2011, sa demande de réexamen et de versement rétroactif de sa pension d’invalidité du RPC a été rejetée. Le demandeur a fait appel de cette décision au Bureau du Commissaire des tribunaux de révision, mais son appel n’ayant pas été entendu avant le 1er avril 2013, l’appel a été transféré au Tribunal de la sécurité sociale, conformément à l’article 257 de la Loi sur l’emploi, la croissance et la prospérité durables, L.C. 2012, ch. 19.

La décision du TSS‑DG (24 février 2015)

[16]           Le 12 février 2015, l’appel du demandeur devant le TSS‑DG a été entendu par vidéoconférence. Selon le TSS‑DG, aux termes des paragraphes 60(8) à (10) de la Loi sur le RPC, la demande ne pouvait pas être réputée avoir été faite plus tôt.

[17]           Avant de parvenir à cette conclusion, le TSS a relevé que le demandeur répondait aux critères conditionnant les prestations d’invalidité du RPC, et qu’il touchait, effectivement, une pension d’invalidité depuis mars 2010. Selon le Tribunal, la question était donc de savoir « Si la demande du demandeur pouvait être réputée avoir été déposée à une date antérieure en raison d’une incapacité de sa part de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de pension d’invalidité au titre du Régime ». Le TSS‑DG a relevé, par ailleurs, que le demandeur avait pu prendre part à de nombreuses activités, ce qui portait à penser que son incapacité n’était pas constante :

[traduction]
[30] Ainsi que le Tribunal en convient avec l’intimé, l’appelant affirme que son incapacité remonte à des années avant le dépôt de sa demande d’appel. Or, il a pu, à l’époque, signer et dater le questionnaire, la demande et la formule d’autorisation de RHDCC. Il a pu, au cours de cette période, consentir à divers traitements médicaux et continuer à travailler. Le témoignage livré par l’appelant est pénible à écouter, mais le Tribunal ne peut pas conclure, ainsi que l’affirme l’appelant, que son incapacité a duré plus de sept ans.

[18]           Le TSS‑DG a qualifié de [traduction] « minces » les preuves médicales fournies par le demandeur quant à sa santé mentale, et conclu que ces éléments ne lui permettaient pas de confirmer que, comme il le prétendait, le demandeur n’avait pas, pendant toute cette période, été en mesure de former la nécessaire intention. Je note, en particulier que :

[…] le Tribunal ne saurait conclure que ses problèmes mentaux ont été de longue durée et ont persisté pendant les quelque sept années et plus, ainsi que le soutien le [demandeur].

[19]           Le TSS‑DG a néanmoins reconnu que :

[traduction]
[…] le [demandeur] a affirmé avec raison que, pendant plus de sept ans, son état de santé mentale a fluctué et que les médicaments qu’il prend actuellement ont fait cesser les voix qu’il entendait. Le Tribunal se fonde en cela sur le comportement bizarre que le [demandeur] a manifesté lorsqu’il a déposé une demande d’aide auprès de la province, puis est revenu sur sa décision. Selon le Tribunal, cela montre bien que l’appelant était dans l’incapacité de prendre des décisions rationnelles.

[20]           Le TSS‑DG s’est penché sur l’état mental du demandeur, sur ses antécédents de travail et sur le fait qu’il avait demandé à un avocat de l’aide juridique de l’aider à obtenir des prestations du POSPH. Se fondant sur l’arrêt Slater c Canada (Procureur général), 2008 CAF 375 au par. 7 (« […] il était nécessaire de prendre en compte à la fois la preuve médicale et ‘les activités pertinentes de la personne en cause […] ce qui nous informe sur la capacité de cette personne pendant la période en question de « former ou d’exprimer » l’intention »), refus d’autorisation de pourvoi, CSC, dossier 33055 (21 mai 2009) [Slater], le TSS‑DG a conclu que :

[traduction]
[…]¨bien que l’appelant souffrait de maladie mentale durant cette période et que ses médicaments ne l’aidaient pas à composer avec ses problèmes, il a été capable de maintenir un certain type d’horaire de travail et était conscient de la capacité qu’il avait de présenter une demande de prestations du POSPH et de trouver un avocat de l’aide juridique pour l’aider dans ce processus. Il se peut que l’appelant ait été incapable, à un moment donné durant ces sept années, de former ou d’exprimer une intention, mais ces événements démontrent au Tribunal qu’il n’a pas été frappé d’incapacité durant toute cette période. Conformément au RPC, il faut que l’appelant ait été jugé incapable durant toute la période, et c’est pour ce motif que le Tribunal conclut que l’appelant n’était pas incapable au sens du RPC.

[21]           Le demandeur a sollicité l’autorisation de faire appel devant le TSS‑DA de la décision du TSS‑DG. Il a sollicité une prolongation des délais afin de pouvoir verser au dossier un certain nombre de documents complémentaires, y compris des lettres du psychiatre et de son député provincial. Le TSS‑DA lui a accordé cette prolongation.

II.                La décision

[22]           Le 30 novembre 2015, le TSS‑DA a rejeté sa demande d’autorisation. Le TSS‑DA avait à décider si l’appel ainsi envisagé avait une chance raisonnable d’aboutir.

[23]           Le TSS‑DA a résumé les dispositions pertinentes de la Loi sur le RPC ainsi que la jurisprudence portant sur la question. Selon le Tribunal, les paragraphes 60(8) à (10) sont « un domaine litigieux de la législation relative au Régime » :

[17] Le paragraphe 60(8) du RPC permet au ministre de réputer une demande avoir été faite à une date antérieure à la date à laquelle elle a effectivement été faite lorsqu’il est établi que le demandeur de la prestation était incapable de faire la demande à la date à laquelle la demande a été effectivement faite. La loi prévoit deux dates rétroactives possibles, soit le mois qui précède celui au cours duquel la prestation aurait pu commencer à être payable ou, s’il est postérieur, le mois au cours duquel, selon le ministre, la dernière période pertinente d’incapacité du demandeur a commencé.

[Souligné dans l’original.]

[24]           Selon le TSS‑DA, le TSS‑DG a correctement évalué le dossier médical du demandeur, les activités auxquelles il s’est livré au cours de sa période d’incapacité ainsi que le témoignage qu’il a livré. Le TSS‑DG avait en outre correctement appliqué aux circonstances du demandeur la jurisprudence pertinente. En conclusion, le TSS‑DA a jugé que :

[23] […] La division d’appel ne relève aucune erreur de la part de la division générale dans son application du droit aux faits de l’espèce. La division générale n’a ni mal interprété le droit applicable ni mal interprété les faits de l’espèce, pas plus qu’elle n’en est arrivée à sa décision sans tenir compte des faits portés à sa connaissance. Le facteur déterminant est de savoir si le demandeur n’avait pas la capacité de former l’intention de faire une demande de prestations d’invalidité au titre du Régime, et il ressort clairement de ces paragraphes de la décision que la division générale a abordé cette question dans le contexte de la totalité de la preuve relative aux circonstances du demandeur. Que la division générale en soit arrivée à une conclusion différente de celle que souhaitait le demandeur n’est pas en soi une indication que la division générale ait commis une quelconque erreur.

[24] En outre, les renseignements supplémentaires produits par le demandeur ne contribuent guère à modifier cette conclusion. Ils renferment certes une lettre du Dr Charles Chamberlaine, du London Health Sciences Centre, mais cette lettre du Dr Chamberlaine n’ajoute pas d’autres éléments aux renseignements que le demandeur avait déjà fournis. Elle ne fait que réitérer les renseignements que le demandeur avait fournis antérieurement et dont la division générale avait été saisie. Par conséquent, la division d’appel n’est pas convaincue que l’appel ait une chance raisonnable de succès.

[25]           C’est de cette décision-là que le demandeur sollicite le contrôle judiciaire.

III.             Les questions en litige

[26]           La seule question qui se pose en l’espèce est celle de savoir si le TSS‑DA pouvait raisonnablement décider que l’appel qu’envisageait d’interjeter le demandeur n’avait en fait aucune chance raisonnable d’aboutir. Le demandeur soutient par ailleurs que le TSS‑DA a manqué à son devoir d’équité procédurale en ne prenant pas en compte, dans sa décision, tous les arguments avancés par le demandeur. Cette allégation, cependant, bien qu’elle figure dans son avis de demande, n’a pas été reprise par la suite. Selon moi, l’argument d’un éventuel manquement à l’équité procédurale n’est pas fondé, et je considère que cette allégation s’explique par le fait que le demandeur a déposé un avis de demande « standard ». Je ne m’y arrêterai pas davantage.

IV.             La norme de contrôle

[27]           Dans l’arrêt Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, aux paragraphes 57, 62 [Dunsmuir], la Cour suprême du Canada a estimé qu’une analyse de la norme de contrôle applicable n’est pas nécessaire lorsque « la jurisprudence établit déjà, de manière satisfaisante, le degré de déférence correspondant à une catégorie de questions en particulier ». La Cour a déjà eu l’occasion de préciser qu’une décision du TSS‑DA accordant ou refusant l’autorisation de faire appel d’une décision du TSS‑DG relève de la norme de contrôle de la décision raisonnable : Tracey c Canada (Procureur général), 2015 CF 1300, au paragraphe 17; Canada (Procureur général) c O'keefe, 2016 CF 503 au paragraphe 17 [O'keefe]; Bergeron c Canada (Procureur général), 2016 CF 220 au paragraphe 6; Griffin c Canada (Procureur général), 2016 CF 874 au paragraphe 13. Ajoutons que dans ce genre d’affaire, la décision du TSS‑DA appelle une [traduction] « déférence considérable » : O'keefe au paragraphe. 17.

[28]           Dans l’arrêt Dunsmuir, la Cour suprême explique, au paragraphe 47, ce que doit faire une cour de révision statuant selon la norme de la décision raisonnable :

La cour de révision se demande dès lors si la décision et sa justification possèdent les attributs de la raisonnabilité.  Le caractère raisonnable tient principalement à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit.

V.                Dispositions pertinentes

[29]           Ainsi qu’en ont correctement décidé les deux divisions du TSS, pour que le TSS‑DA accorde l’autorisation de faire appel, il faut qu’il soit convaincu que l’appel a une chance raisonnable de succès : c’est en effet ce que le législateur a prévu au paragraphe 58(2) de la LMEDS. Selon la Cour d’appel fédérale, on entend par chance raisonnable de succès, le fait que la cause soit défendable : Canada (Développement des ressources humaines) c Hogervorst, 2007 CAF 41; Fancy c Canada (Procureur général), 2010 CAF 63. Il appartient donc à un demandeur de faire valoir l’existence d’un motif défendable de donner éventuellement gain de cause à l’appel : Kerth c Canada (Ministre du Développement des ressources humaines), [1999] ACF no 1252 (CF).

[30]           Or, aux termes du paragraphe 58(1) de la LMEDS, les seuls moyens d’appel pouvant être invoqués devant le TSS‑DA sont :

Moyens d’appel

Grounds of appeal

58 (1) Les seuls moyens d’appel sont les suivants :

58 (1) The only grounds of appeal are that

a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;

(a) the General Division failed to observe a principle of natural justice or otherwise acted beyond or refused to exercise its jurisdiction;

b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;

(b) the General Division erred in law in making its decision, whether or not the error appears on the face of the record; or

c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

(c) the General Division based its decision on an erroneous finding of fact that it made in a perverse or capricious manner or without regard for the material before it.

VI.             Analyse

[31]           Le demandeur affirme que sa pension d’invalidité du RPC devrait lui être versée rétroactivement à compter de février 2006, en raison de l’incapacité qu’il éprouvait à l’époque et qui le rendait incapable de décider en connaissance de cause (c’est‑à‑dire qu’il n’était pas à même de former ou d’exprimer l’intention de déposer une demande de prestations du RPC) au cours des années pendant lesquelles il s’est débattu avec ses problèmes de santé mentale avant de se voir accorder une pension en 2010. À l’appui de son argument, il invoque les paragraphes 60(8) à (10) de la Loi sur le RPC :

SECTION C

DIVISION C

Paiement des prestations : dispositions générales

Payment of Benefits : General Provisions

60 …

60 …

Incapacité

Incapacity

(8) Dans le cas où il est convaincu, sur preuve présentée par le demandeur ou en son nom, que celui-ci n’avait pas la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande le jour où celle-ci a été faite, le ministre peut réputer cette demande de prestation avoir été faite le mois qui précède celui au cours duquel la prestation aurait pu commencer à être payable ou, s’il est postérieur, le mois au cours duquel, selon le ministre, la dernière période pertinente d’incapacité du demandeur a commencé.

(8) Where an application for a benefit is made on behalf of a person and the Minister is satisfied, on the basis of evidence provided by or on behalf of that person, that the person had been incapable of forming or expressing an intention to make an application on the person’s own behalf on the day on which the application was actually made, the Minister may deem the application to have been made in the month preceding the first month in which the relevant benefit could have commenced to be paid or in the month that the Minister considers the person’s last relevant period of incapacity to have commenced, whichever is the later.

Note marginale : Idem

Marginal note : Idem

(9) Le ministre peut réputer une demande de prestation avoir été faite le mois qui précède le premier mois au cours duquel une prestation aurait pu commencer à être payable ou, s’il est postérieur, le mois au cours duquel, selon lui, la dernière période pertinente d’incapacité du demandeur a commencé, s’il est convaincu, sur preuve présentée par le demandeur :

(9) Where an application for a benefit is made by or on behalf of a person and the Minister is satisfied, on the basis of evidence provided by or on behalf of that person, that

a) que le demandeur n’avait pas la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande avant la date à laquelle celle-ci a réellement été faite;

(a) the person had been incapable of forming or expressing an intention to make an application before the day on which the application was actually made,

b) que la période d’incapacité du demandeur a cessé avant cette date;

(b) the person had ceased to be so incapable before that day, and

cessé avant cette date;

(c) the application was made

(i) au cours de la période — égale au nombre de jours de la période d’incapacité mais ne pouvant dépasser douze mois — débutant à la date où la période d’incapacité du demandeur a cessé,

(i) within the period that begins on the day on which that person had ceased to be so incapable and that comprises the same number of days, not exceeding twelve months, as in the period of incapacity, or

(ii) si la période décrite au sous-alinéa (i) est inférieure à trente jours, au cours du mois qui suit celui au cours duquel la période d’incapacité du demandeur a cessé.

(ii) where the period referred to in subparagraph (i) comprises fewer than thirty days, not more than one month after the month in which that person had ceased to be so incapable,

(EN BLANC/BLANK)

the Minister may deem the application to have been made in the month preceding the first month in which the relevant benefit could have commenced to be paid or in the month that the Minister considers the person’s last relevant period of incapacity to have commenced, whichever is the later.

Période d’incapacité

Marginal note : Period of incapacity

(10) Pour l’application des paragraphes (8) et (9), une période d’incapacité doit être continue à moins qu’il n’en soit prescrit autrement.

[soulignements ajoutés]

(10) For the purposes of subsections (8) and (9), a period of incapacity must be a continuous period except as otherwise prescribed.

[emphasis added]

[32]           La Cour d’appel fédérale a fourni un certain nombre de repères quant à l’interprétation du mot « capacité » aux fins de l’article 60. Le seuil n’est pas très élevé : « [i]l n’exige pas de prendre en compte la capacité de présenter, de préparer, de traiter ou de remplir une demande de prestations d’invalidité, mais seulement et tout simplement ‘la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande’ ». Canada (Procureur général) c Danielson, 2008 CAF 78 [Danielson]. Ajoutons que :

[…] La capacité de former l'intention de faire une demande de prestations n'est pas de nature différente de la capacité de former une intention relativement aux autres possibilités qui s'offrent au demandeur de prestations. Le fait que celui-ci n'ait pas l'idée d'exercer une faculté donnée en raison de sa vision du monde ne dénote pas chez lui une absence de capacité.

Sedrak c Canada (Ministre du Développement social), 2008 CAF 86

[33]           Ainsi que nous avons pu le voir, selon l’arrêt Slater, afin de décider si un demandeur n’avait effectivement pas la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande de prestations, il faut tenir compte à la fois des preuves médicales et des activités physiques pertinentes du demandeur.

[34]           J’estime, en toute déférence, que le TSS‑DA a formulé et appliqué de manière raisonnable les critères juridiques qui s’appliquent en l’espèce. Il avait à décider si l’appel avait une chance raisonnable d’aboutir au regard d’un des moyens prévus au paragraphe 58(1). Il a estimé que ce n’était pas le cas et sa décision était, selon moi, raisonnable.

[35]           Tout dépend en l’espèce des éléments de preuve produits. Pour obtenir gain de cause, le demandeur devait démontrer qu’un appel devant le TSS‑DA avait une chance raisonnable de succès. Il lui fallait pour cela démontrer que du mois de février 2006 jusqu’en 2010, date à laquelle il est devenu admissible aux prestations d’invalidité du RPC, il n’a jamais eu la capacité de former ou d’exprimer l’intention de déposer une demande de prestations d’invalidité du RPC. On ne lui demandait pas de démontrer qu’il n’était pas en mesure de remplir les formulaires exigés, mais de démontrer qu’il « n’avait pas la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande », et qu’il n’a jamais cessé d’en être ainsi pendant la période en question.

[36]           Les preuves produites par le demandeur démontrent qu’à certaines époques de la période allant du mois de février 2006 à 2010, il était effectivement incapable de former ou d’exprimer l’intention de présenter une demande, et le TSS‑DA pouvait donc raisonnablement conclure, ainsi qu’il l’a fait, qu’à d’autres époques, le demandeur ne se trouvait pas dans un tel état d’incapacité.

[37]           C’est ainsi, par exemple, que pendant toute cette période le demandeur a, chaque semaine, travaillé 16 heures au dépanneur. Il avait, au quotidien, à prendre toutes sortes de décisions. Rien n’indique qu’en matière financière il ait, en vertu d’une procuration, chargé quelqu’un d’autre de prendre les décisions à sa place, ou que celles-ci aient été prises par un curateur public. Sur la base du dossier qui lui était présenté, le TSS‑DG a raisonnablement relevé que le demandeur n’avait pas eu besoin de soins de longue durée ou d’un logement supervisé, et qu’au cours de la période en question, il avait consenti à divers traitements médicaux.

[38]           Le TSS‑DG disposait du témoignage du psychiatre, mais, et je dis cela en toute déférence, il convient de relever qu’il n’y a, dans les propos du psychiatre, qui soignait le demandeur depuis plus de 10 ans, rien touchant la question de savoir si le demandeur « n’avait pas la capacité de former ou d’exprimer l’intention de faire une demande ».

[39]           Le TSS‑DG a nettement reconnu que le demandeur éprouvait des troubles mentaux. Mais, ainsi que le dossier le démontre amplement, le Tribunal a estimé que [traduction] « l’état de santé du demandeur fluctuait » :

[traduction]
[30]      Ainsi que le Tribunal en convient avec l’intimé, l’appelant affirme que son incapacité remonte à des années avant le dépôt de sa demande d’appel. Or, il a pu, à l’époque, signer et dater le questionnaire, la demande et la formule d’autorisation de RHDCC. Il a pu, au cours de cette période, consentir à divers traitements médicaux et continuer à travailler. Le témoignage livré par l’appelant est pénible à écouter, mais le Tribunal ne peut pas conclure, ainsi que l’affirme l’appelant, que son incapacité a duré plus de sept ans.

[31]      Il ressort des preuves versées au dossier que, selon le diagnostic, l’appelant souffrait de troubles de l’humeur, accompagnés de traits psychotiques et de troubles obsessionnels compulsifs. L’appelant a également éprouvé des hallucinations auditoires et a dû, pendant plus de 10 ans, prendre des médicaments antipsychotiques. Il ressort également du dossier que pendant cinq ans, l’appelant a travaillé dans un dépanneur, mais seulement la nuit et une ou deux fois par semaine. Un examen de ses rentrées salariales indique qu’il a touché 4 969 $ en 2005; 4 823 $ en 2006; 5 142 $ en 2007; 6 223 $ en 2008 et 7 504 $ en 2009. Et, enfin, il ressort du dossier que l’appelant s’est livré à une curieuse démarche et demandé l’arrêt des prestations du POSPH, qui lui avaient été accordées en juin 2005 et retirées en février 2006. Selon le Tribunal, ces trois éléments de preuve donnent à penser que si l’appelant fonctionnait effectivement, comme l’affirme l’intimé, son fonctionnement n’était ni rationnel ni sain.

[32]      Devant le Tribunal, l’appelant a affirmé qu’au cours de cette période de sept ans, son psychiatre n’avait pas pu lui prescrire de médicaments capables d’atténuer ses troubles mentaux. Selon lui, ce n’est que vers la fin de 2010 que des médicaments ont réussi à faire à peu près faire taire les voix qu’il entendait. Le Tribunal s’est penché sur les minces preuves médicales concernant l’état mental de l’appelant, mais n’a pas pu confirmer, par des preuves médicales, le récit que l’appelant avait fait de son état de santé; le Tribunal est néanmoins persuadé que c’est avec raison que l’appelant a affirmé que pendant plus de sept ans son état mental était sujet à des fluctuations et que les médicaments qu’il prend actuellement ont fait taire les voix qu’il entendait auparavant. Le Tribunal se base en cela sur le comportement curieux qu’a eu l’appelant en sollicitant, dans un premier temps, l’aide de la province, puis en demandant l’arrêt de cette aide. Cela démontre, aux yeux du Tribunal, que l’appelant n’était pas en mesure de décider de manière rationnelle.

[33]      Bien que le Tribunal estime que l’appelant a effectivement eu quelques problèmes de santé mentale pendant une certaine période, le Tribunal ne saurait conclure que ses problèmes mentaux ont été de longue durée et ont persisté pendant les quelque sept années et plus, ainsi que le soutient l’appelant. L’appelant a été capable de travailler durant cette période et, même s’il devait cet emploi à la bienveillance d’un ami, ainsi qu’il l’a dit dans son témoignage, il demeure qu’il a été capable de gagner modestement sa vie durant cette période. La preuve présentée au Tribunal, qui provient tant du témoignage de l’appelant que du dossier, montre qu’on a affaire à une personne qui a assurément souffert d’une grave maladie mentale, mais qu’il n’y a aucune indication que l’appelant ait été frappé d’incapacité au point de devenir incapable de former ou d’exprimer une intention de faire une demande de prestations d’invalidité au titre du Régime.

[34]      La somme de travail accompli par l’appelant durant cette période était manifestement limitée, comme le montrent les dossiers financiers, mais le portrait qui est dressé de l’appelant ne le dépeint pas comme quelqu’un qui était devenu incapable. L’appelant a certes manifesté un comportement bizarre comme en témoigne l’exemple de sa décision de refuser de toucher des prestations du POSPH, lesquelles lui avaient été accordées en juin 2005 puis révoquées en février 2006, à sa demande, mais le Tribunal n’a pu trouver d’élément de preuve qui indiquerait une telle incapacité chez l’appelant.

[Non souligné dans l’original.]

[40]           Je souhaite souligner cette conclusion essentielle, selon laquelle « l’état mental [du demandeur] était sujet à des fluctuations ». Cela veut dire que, comme le dossier le démontre, au cours de la période en cause, l’état mental du demandeur changeait périodiquement. La décision du Tribunal aurait été autre si l’état de santé du demandeur avait été constant. Mais il n’était pas constant et, ainsi que le TSS‑DA a pu raisonnablement en conclure au vu des preuves qui lui étaient présentés, cet état de santé était sujet à des fluctuations. Cela étant, la DA a pu raisonnablement estimer que l’appel qu’envisageait d’interjeter l’appelant n’avait, faute de cause défendable, aucune chance de succès.

[41]           J’estime, en toute déférence, qu’en rejetant la demande d’autorisation d’interjeter appel, le TSS‑DA s’est par ailleurs fondé sur la jurisprudence applicable. La DA a en outre correctement examiné et évalué la décision du TSS‑DG, ainsi que le démontre le passage suivant :

[22]      Dans le cas qui nous occupe, le membre de la division générale a examiné les dossiers médicaux du demandeur, comme l’exigeait l’arrêt Slater. Le membre a aussi examiné les activités du demandeur durant la période prétendue d’incapacité, y compris sa décision de se retirer du POSPH. Ont aussi été pris en considération le témoignage oral du demandeur, qui parlait de sa situation d’emploi, de ses blessures, de ses antécédents d’emploi au Canada et de son trouble de santé mentale. La division d’appel estime que le membre de la division générale a correctement appliqué la jurisprudence citée plus haut. Les passages pertinents de la décision de la division générale sont les paragraphes 33 à 35 :

[…]

[35] […]

Pour en arriver à sa décision, le Tribunal a tenu compte de l’état mental de l’appelant, de ses antécédents d’emploi et du fait qu’il avait retenu les services d’un avocat de l’aide juridique pour l’aider à préparer son appel relatif aux prestations du POSPH. Le Tribunal considère que, bien que l’appelant souffrait de maladie mentale durant cette période et que ses médicaments ne l’aidaient pas à composer avec ses problèmes, il a été capable de maintenir un certain type d’horaire de travail et était conscient de la capacité qu’il avait de présenter une demande de prestations du POSPH et de trouver un avocat de l’aide juridique pour l’aider dans ce processus. Il se peut que l’appelant ait été incapable, à un moment donné durant ces sept années, de former ou d’exprimer une intention, mais ces événements démontrent au Tribunal qu’il n’a pas été frappé d’incapacité durant toute cette période. Conformément au RPC, il faut que l’appelant ait été jugé incapable durant toute la période, et c’est pour ce motif que le Tribunal conclut que l’appelant n’était pas incapable au sens du RPC.

[23]      La division d’appel ne relève aucune erreur de la part de la division générale dans son application du droit aux faits de l’espèce. La division générale n’a ni mal interprété le droit applicable ni mal interprété les faits de l’espèce, pas plus qu’elle n’en est arrivée à sa décision sans tenir compte des faits portés à sa connaissance. Le facteur déterminant est de savoir si le demandeur n’avait pas la capacité de former l’intention de faire une demande de prestations d’invalidité au titre du Régime, et il ressort clairement de ces paragraphes de la décision que la division générale a abordé cette question dans le contexte de la totalité de la preuve relative aux circonstances du demandeur. Que la division générale en soit arrivée à une conclusion différente de celle que souhaitait le demandeur n’est pas en soi une indication que la division générale ait commis une quelconque erreur.

[24]      En outre, les renseignements supplémentaires produits par le demandeur ne contribuent guère à modifier cette conclusion. Ils renferment certes une lettre du Dr Charles Chamberlaine, du London Health Sciences Centre, mais cette lettre du Dr Chamberlaine n’ajoute pas d’autres éléments aux renseignements que le demandeur avait déjà fournis. Elle ne fait que réitérer les renseignements que le demandeur avait fournis antérieurement et dont la division générale avait été saisie. Par conséquent, la division d’appel n’est pas convaincue que l’appel ait une chance raisonnable de succès.

[42]           Il convient de relever que le TSS‑DA a accordé au demandeur une prolongation des délais pour lui permettre de déposer des documents supplémentaires, prenant en compte, ainsi que permet de le constater le dernier paragraphe de ses motifs (le paragraphe 24) un nouveau rapport de son psychiatre. Le demandeur avait fait valoir à cet égard que [traduction] « Il y a d’autres faits et des éléments de preuves considérables à examiner ». Au sujet des [traduction] « preuves déterminantes » qu’il entendait produire, il avait écrit :

Je n’ai, en un mot, pas pu produire devant le Tribunal les preuves les plus déterminantes de ce que j’affirme et cela étant, le Tribunal n’a pas saisi l’ampleur de la situation. Je ne m’en suis aperçu qu’à la lecture détaillée de sa décision.

[43]           Le demandeur n’a pas, cependant, fourni de preuves considérables ou déterminantes. Le TSS‑DA n’a pas été convaincu par les nouvelles preuves psychiatriques, qu’il a, raisonnablement selon moi, rejetées, concluant que ces preuves ne faisaient que « réitérer les renseignements que le demandeur avait fournis antérieurement ». L’idée que le demandeur n’a [traduction] « pas pu » porter ces nouveaux éléments décisifs devant le TSS‑DA n’est pas fondée. De fait, sa demande a été acceptée, mais le Tribunal a estimé que les nouveaux éléments étaient insuffisants.

[44]           Le principal problème que présente le dossier de l’appelant est le manque de preuves produites à l’appui de sa réclamation. Une partie essentielle de la mission et des compétences du TSS‑DG consiste à évaluer les éléments de preuve et ses décisions appellent une déférence considérable. Cela est particulièrement vrai en l’espèce, étant donné que le TSS‑DG a tenu une audience au cours de laquelle l’appelant a pu livrer son témoignage.

[45]           Je comprends fort bien que le demandeur ne soit d’accord ni avec la manière dont le TSS‑DG a évalué les éléments de preuve qu’il avait versés au dossier, ni avec la manière dont le TSS‑DA a examiné la décision initiale, mais ce n’est pas une question sur laquelle la Cour puisse revenir. Il appartient simplement à la Cour de dire si la décision du TSS‑DA est ou non raisonnable.

[46]           En l’espèce, pour évaluer le caractère raisonnable de la décision rendue par TSS‑DA, il y a lieu de se demander s’il était, de la part du TSS‑DA, raisonnable de conclure que l’appel envisagé par le demandeur n’avait aucune chance raisonnable de succès. En cela le Tribunal a agi raisonnablement, car, faute de cause défendable, l’appel envisagé n’avait effectivement aucune chance raisonnable de succès. Ajoutons que les motifs du TSS‑DA répondent aux critères dégagés dans l’arrêt Dunsmuir : ils sont transparents, intelligibles et se justifient. Ils font partie des issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit. Cela étant, ils sont raisonnables et la demande de contrôle judiciaire doit, en conséquence, être rejetée.

VII.          Le dossier

[47]           À l’audience, le défendeur a demandé à la Cour de supprimer du dossier du demandeur la pièce C‑15, une lettre en date du 2 novembre 2012, du Comparative Education Service, de l’Université de Toronto. Ce document n’avait été produit ni devant le TSS‑DG ni devant le TSS‑DA. Il est fait droit à la requête, conformément aux règles interdisant d’avancer de nouveaux moyens dans le cadre d’une demande de contrôle judiciaire, Association des universités et collèges du Canada c Copyright Licensing Agency, 2012 CAF 22.

VIII.       Les dépens

[48]           Ni l’une ni l’autre des parties ne demande que lui soient adjugés les dépens.

IX.             La conclusion

[49]           En conséquence, la demande de contrôle judiciaire est rejetée sans adjudication des dépens.


JUGEMENT

LA COUR ORDONNE :

  1. La pièce C‑15 du dossier du demandeur, en l’occurrence une lettre en date du 2 novembre 2012 du Comparative Education Service, de l’Université de Toronto, est radiée du dossier du demandeur.
  2. La présente demande de contrôle judiciaire est rejetée.
  3. Il n’y a pas d’adjudication des dépens.

« Henry S. Brown »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-381-16

 

INTITULÉ :

EL-SAYED MAGDY HUSSEIN c LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 7 NOVEMBRE 2016

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE BROWN

 

DATE DES MOTIFS :

LE 30 DÉCEMBRE 2016

 

COMPARUTIONS :

El-Sayed Magdy Hussein

(assurant sa propre représentation)

POUR le demandeur

 

Laura C. Dalloo

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

En son nom propre

POUR le demandeur

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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