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Date : 20161208


Dossier : IMM-4624-15

Référence : 2016 CF 1351

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 8 décembre 2016

En présence de monsieur le juge Russell

ENTRE :

MARVIN DONOVAN MCINTYRE

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.                   INTRODUCTION

[1]               Il s’agit d’une demande en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la Loi) de contrôle judiciaire d’une décision de la Section d’appel de l’immigration (SAI) de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada datée du 10 septembre 2015 (la décision), qui a rejeté l’appel d’une mesure de renvoi du demandeur.

II.                CONTEXTE

[2]               Le demandeur est un résident permanent du Canada âgé de 53 ans. Il est originaire de la Jamaïque et est arrivé au Canada en 2000, parrainé par son épouse d’alors. Le demandeur a deux enfants et deux petits-enfants.

[3]               Le demandeur a fait l’objet d’une mesure de renvoi après avoir été reconnu être une personne visée par l’alinéa 36(1)a) de la Loi, ayant été déclaré coupable d’une infraction pour laquelle un emprisonnement de plus de six mois a été infligé ou pour laquelle un emprisonnement de dix ans ou plus aurait pu être infligé. Il a interjeté appel de la mesure de renvoi pour des raisons d’ordre humanitaire et il conteste le rejet de l’appel par la SAI dans le cadre du présent contrôle judiciaire.

III.             DÉCISION FAISANT L’OBJET DU CONTRÔLE

[4]               Après avoir pris en compte le témoignage du demandeur et ses documents, la SAI a rejeté l’appel du demandeur pour les motifs que le demandeur n’a pas établi qu’une mesure spéciale était justifiée. La SAI (qui se compose d’un tribunal d’une personne) a fondé sa prise de décision sur les facteurs exposés dans la décision Ribic : Ribic c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1985] IABD no 4 [Ribic]; Chieu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CSC 3 [Chieu]; Al Sagban c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CSC 4.

[5]               La SAI a d’abord examiné comment le demandeur avait obtenu le statut de résident permanent. La SAI a estimé le témoignage du demandeur non crédible et a conclu qu’il a obtenu frauduleusement le statut de résident permanent au Canada et que son témoignage n’était pas véridique. Le fait que le demandeur ait obtenu son établissement dans le cadre d’une fraude orchestrée a joué contre la prise de mesures spéciales en sa faveur.

[6]               Ensuite, la SAI a tenu compte de la gravité de l’infraction. Il a été souligné que le demandeur avait fait l’objet d’une condamnation semblable, qui avait été renversée, avant l’infraction qui a déclenché le processus. En outre, le comportement du demandeur n’était pas un incident isolé ou le résultat d’une déficience; la conduite irrégulière a été planifiée et faisait partie d’un type de comportement organisé, répétitif et à long terme de caractère sexuel et qui visait des victimes vulnérables d’âge mineur. Ces facteurs ont joué contre la prise de mesures spéciales à son endroit.

[7]               La SAI a discuté de la possibilité de réadaptation, indiquant que le demandeur avait suivi une thérapie et que son psychiatre l’avait décrit par la suite comme [traduction] « un faible risque de récidive ». Cependant, étant donné les années de comportement prédateur, la SAI n’a pas accepté que le demandeur soit complètement réadapté, seulement qu’il a été établi qu’il y avait une possibilité de réadaptation et que le demandeur s’était engagé à ne plus commettre d’actes criminels. Néanmoins, ce facteur a été réputé favorable à l’octroi d’un sursis à la mesure de renvoi.

[8]               Le facteur suivant à être évalué était le degré d’établissement du demandeur au Canada. La SAI a fait état du piètre rendement économique et des perspectives d’avenir du demandeur ainsi que du fait que le demandeur a grandi, étudié et occupé un emploi dans son pays d’origine avant d’immigrer au Canada à l’âge de 39 ans. Il a été décidé que le facteur d’établissement ne favorisait pas la prise de mesures spéciales.

[9]               La SAI a ensuite pris en considération le soutien que reçoit le demandeur dans la collectivité et la famille. Le demandeur a fourni une lettre de soutien financier de sa belle-sœur, deux lettres de soutien de ses enfants et une lettre de son église au sujet de son bénévolat. Bien que la SAI ait conclu que le soutien familial du demandeur au Canada favorisait la prise de mesures spéciales, les éléments de preuve ont été jugés minimes et, par conséquent, ce facteur n’a pas reçu un poids favorable important.

[10]           En discutant de l’incidence qu’aurait sur ses amis et sa famille le renvoi du demandeur du Canada, la SAI a conclu que ce facteur ne favorisait pas la prise de mesures spéciales parce qu’il n’y avait aucun élément de preuve selon lequel quiconque souffrirait de son renvoi.

[11]           Se tournant ensuite vers les difficultés possibles d’un retour en Jamaïque, la SAI a pris en considération le fait que le demandeur avait passé la grande majorité de sa vie en Jamaïque et qu’il n’y avait aucune barrière linguistique ou culturelle à sa rentrée. Même si le demandeur a soutenu qu’il ne pourrait pas avoir accès aux ressources psychiatriques qu’exige son état en Jamaïque, la SAI a fait remarquer que le demandeur ne suivait pas actuellement une thérapie et ne prévoyait pas en entreprendre une. Finalement, la SAI a fait remarquer que la persécution à laquelle le demandeur pourrait être confronté en tant qu’homosexuel en Jamaïque aurait pu être un facteur impératif; cependant, aucun élément de preuve concernant la situation dans le pays n’a été présenté. Étant donné qu’il incombe au demandeur d’établir la situation en Jamaïque concernant les hommes homosexuels, la SAI n’en a pas pris connaissance d’office. Ainsi, ce facteur n’a pas joué en faveur de la prise de mesures spéciales.

[12]           Pour ce qui est des intérêts de l’enfant, seuls les intérêts des deux petits-enfants canadiens du demandeur et des enfants de son frère ont été évalués. La SAI a conclu qu’il n’existait aucun élément de preuve selon lequel l’un des enfants comptait sur le demandeur. Il lui était également interdit de se trouver seul avec une personne de moins de 16 ans en raison de sa condamnation. Par conséquent, ce facteur n’a pas joué en faveur de la prise de mesures spéciales.

[13]           Après avoir pris en considération tous les facteurs exposés dans la décision Ribic, la SAI a conclu que les éléments positifs de l’appel ne l’emportaient pas sur les aspects négatifs et a rejeté l’appel.

IV.             QUESTIONS EN LITIGE

[14]           Le demandeur avance que ce qui suit est en litige dans la présente demande :

1.    Quelle est la norme de contrôle?

2.    Le demandeur a-t-il été privé de l’équité procédurale en raison de la négligence de son ancien représentant?

3.    La SAI a-t-elle omis d’examiner pourquoi un sursis à la mesure de renvoi n’était pas justifié au lieu de rejeter l’appel, conformément aux dispositions du paragraphe 68(1) de la Loi?

4.    L’évaluation par la SAI de l’établissement du demandeur et des difficultés était-elle déraisonnable, compte tenu des éléments de preuve selon lesquels il avait deux enfants adultes au Canada et une expérience de travail régulier?

V.                NORME DE CONTRÔLE

[15]           La Cour suprême du Canada dans l’arrêt Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9 [Dunsmuir] a décidé que l’analyse de la norme de contrôle n’a pas besoin d’être menée dans tous les cas. Lorsque la norme de contrôle applicable à une question particulière dont la Cour est saisie est bien établie par la jurisprudence, la cour de révision peut plutôt adopter cette norme. Ce n’est que lorsque cette démarche se révèle infructueuse ou que la jurisprudence semble être devenue incompatible avec l’évolution récente des principes de common law concernant le contrôle judiciaire que la cour de révision procédera à l’examen des quatre facteurs de l’analyse relative à la norme de contrôle : Agraira c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2013 CSC 36, au paragraphe 48.

[16]           La première question en litige concerne le droit du demandeur à un processus équitable, y compris une représentation compétente. L’équité procédurale étant en cause, la norme de la décision correcte est celle qui s’applique : Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Khosa, 2009 CSC 12, au paragraphe 43 [Khosa]; Établissement de Mission c. Khela, 2014 CSC 24, au paragraphe 79; Galyas c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 250, au paragraphe 27.

[17]           La deuxième question en litige étant de savoir si la SAI a incorrectement omis d’examiner le sursis à une mesure de renvoi, la norme de la décision correcte est celle qui s’applique : Li c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 998, au paragraphe16 [Li]; Lewis c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] ACF no 1227 [Lewis].

[18]           La troisième question en litige a trait au caractère raisonnable global de la décision de la SAI.

[19]           Lorsque la norme de contrôle de la décision raisonnable s’applique, l’analyse doit tenir compte de critères tenant « à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit ». Voir Dunsmir, précité, au paragraphe 47, et Khosa, précité, au paragraphe 59. Autrement dit, la Cour ne devrait intervenir que si la décision contestée est déraisonnable en ce sens qu’elle n’appartient pas « aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit ».

VI.             DISPOSITIONS LÉGISLATIVES

[20]           Les dispositions suivantes de la Loi sont applicables en l’espèce :

Grande criminalité

Serious criminality

36 (1) Emportent interdiction de territoire pour grande criminalité les faits suivants :

36 (1) A permanent resident or a foreign national is inadmissible on grounds of serious criminality for

(a) être déclaré coupable au Canada d’une infraction à une loi fédérale punissable d’un emprisonnement maximal d’au moins dix ans ou d’une infraction à une loi fédérale pour laquelle un emprisonnement de plus de six mois est infligé;

(a) having been convicted in Canada of an offence under an Act of Parliament punishable by a maximum term of imprisonment of at least 10 years, or of an offence under an Act of Parliament for which a term of imprisonment of more than six months has been imposed;

Sursis

Removal order stayed

68 (1) Il est sursis à la mesure de renvoi sur preuve qu’il y a — compte tenu de l’intérêt supérieur de l’enfant directement touché — des motifs d’ordre humanitaire justifiant, vu les autres circonstances de l’affaire, la prise de mesures spéciales.

68 (1) To stay a removal order, the Immigration Appeal Division must be satisfied, taking into account the best interests of a child directly affected by the decision, that sufficient humanitarian and compassionate considerations warrant special relief in light of all the circumstances of the case.

VII.          ARGUMENTS

A.                Demandeur

(1)               Négligence professionnelle

[21]           Le demandeur dit que le critère pour déterminer si l’incompétence de l’avocat équivaut à une violation des principes d’équité procédurale est exposé dans R c. B (GD), 2000 CSC 22. Dans cette affaire, la Cour suprême du Canada a dit au paragraphe 26 : « il faut démontrer, dans un premier temps, que les actes ou les omissions de l’avocat relevaient de l’incompétence, et, dans un deuxième temps, qu’une erreur judiciaire en a résulté. »

[22]           Dans la décision, la SAI a fait observer qu’il n’existait aucun élément de preuve objectif au sujet de la situation en Jamaïque concernant la population lesbienne, gaie, bisexuelle et transsexuelle (LGBT) et que cela aurait pu être [traduction] « l’aspect le plus impératif » en rapport avec l’analyse des difficultés possibles à l’étranger, démontrant ainsi l’importance que ces éléments de preuve ont eue sur la décision. Le demandeur soutient que son ancien représentant a agi de façon négligente en omettant de présenter des éléments de preuve au sujet de la situation pour la population LGBT en Jamaïque. En conséquence, le droit du demandeur de présenter leur meilleur dossier possible le concernant a subi un préjudice du fait de l’omission de son ancien représentant de fournir des éléments de preuve objectifs qui indiquaient qu’il était à risque en Jamaïque en tant que homme gai. Le demandeur a signifié par écrit à son ancien représentant de demander une explication des raisons pour lesquelles les rapports sur la situation dans le pays n’ont pas été remis en appui à l’appel du demandeur. Par conséquent, le demandeur a démontré qu’il satisfaisait au critère de l’incompétence de l’avocat en l’espèce.

[23]           La jurisprudence permet à la Cour d’admettre de nouveaux éléments de preuve lorsque des questions sont soulevées en rapport à l’équité procédurale. Le demandeur présente de nouveaux éléments de preuve, à savoir de récents rapports sur la situation au pays, qui montrent que l’homosexualité est illégale en Jamaïque et que des violations des droits de la personne allant d’agressions violentes contre la communauté à la perte d’emploi des personnes LGBT dont l’orientation sexuelle est découverte, existent au sein d’une « culture d’homophobie ». La communication de ces éléments de preuve aurait pu avoir une incidence sur le résultat de la décision et le fait que l’appel ait été tranché sans une évaluation appropriée des difficultés auxquelles le demandeur serait confronté en Jamaïque en tant qu’homosexuel constitue une erreur judiciaire.

(2)               Motifs pour un sursis à la mesure de renvoi

[24]           Dans certaines circonstances, la SAI est tenue de parler de la nécessité de traiter du sursis dans ses motifs écrits : voir Lewis, précité, au paragraphe 14. Si un demandeur demande explicitement un sursis à une mesure de renvoi et si les faits portent à croire qu’un sursis doit être envisagé, le demandeur a le droit de savoir pour quelles raisons un sursis à une mesure de renvoi n’est pas ordonné au lieu de rejeter l’appel : voir Li, précité, aux paragraphes 25 et 26. Le demandeur ne soulève pas l’insuffisance des motifs comme étant un motif suffisant à lui seul, puisqu’il y a deux autres erreurs qui sont soulignées.

[25]           Le demandeur soutient que les faits exigent une explication des raisons pour lesquelles sa demande de sursis à une mesure de renvoi n’a pas été accordée. Le psychiatre du demandeur a indiqué que le demandeur était à « faible risque » de récidive et la SAI a aussi fait observer qu’il était « trop tôt » pour dire si le demandeur était en mesure d’éviter de commettre d’autres actes criminels. L’analyse du potentiel de réadaptation du demandeur a aussi joué un rôle favorable dans l’octroi d’un sursis à une mesure de renvoi, et pourtant la SAI n’a pas expliqué pourquoi elle a choisi de ne pas accorder de sursis. Le demandeur soutient que la SAI a commis une erreur en omettant de lui fournir les raisons pour lesquelles un sursis à la mesure de renvoi n’était pas justifié pour le demandeur.

(3)               Caractère raisonnable de l’évaluation

[26]           Le demandeur conteste le caractère raisonnable de l’évaluation par la SAI de son établissement au Canada, y compris les liens familiaux, ainsi que les difficultés qui l’attendent en Jamaïque. La décision ne mentionne pas les quelque dix années d’emploi du demandeur en tant que transporteur dans un hôpital et d’autres postes qu’il a occupés. Le demandeur soutient qu’il était déraisonnable pour la SAI de conclure que ses antécédents professionnels sont [traduction] « très médiocres » et a omis de même renvoyer à quelque période d’emploi que ce soit du demandeur au Canada avant que des conditions lui soient imposées et limitent sa capacité d’obtenir un emploi.

[27]           La SAI a aussi été déraisonnable dans son évaluation des difficultés auxquelles la famille du demandeur serait confrontée s’il était renvoyé du Canada. Dans son témoignage, le demandeur a parlé de la force des rapports qu’il entretient avec sa fille et son fils, âgés de 21 et de 26 ans respectivement, qui ont remis des lettres de soutien dans le cadre de son appel. Le fils du demandeur, son neveu et sa belle-sœur ont également assisté à son audience pour l’appuyer. Le demandeur soutient que l’analyse des difficultés auxquelles sa famille serait confrontée est superficielle et n’évalue pas la force des liens qui les unissent; à la place, l’analyse n’a tenu compte que du fait que sa famille ne comptait pas sur lui financièrement.

B.                 Le défendeur

(1)               Négligence professionnelle

[28]           Bien que le demandeur ait signifié un avis formel en vertu du protocole à l’ancien avocat concernant les allégations, il reste un différend à régler concernant les allégations. En outre, le défendeur soutient que le demandeur fait erreur quand il interprète la décision comme disant [traduction] « le facteur le plus impératif de l’évaluation des difficultés auxquelles serait confronté le demandeur est de savoir s’il serait persécuté en tant que homme gai en Jamaïque. » En réalité, la décision dit [traduction] « ce qui aurait pu être l’aspect le plus impératif de ce facteur est la persécution à laquelle il pourrait être confronté en tant qu’homme homosexuel en Jamaïque. » Ainsi, le demandeur n’a pas établi que, n’eût été la conduite alléguée, il existe une probabilité raisonnable que l’issue de l’audience initiale ait été différente.

(2)               Motifs pour un sursis à la mesure de renvoi

[29]           Le défendeur soutient que l’arrêt Lewis, précité, ne s’applique pas en l’espèce. Premièrement, l’arrêt Lewis concernait une affaire inhabituelle, comme l’a fait remarquer la juge Simpson. Deuxièmement, après l’arrêt Lewis, l’insuffisance n’est plus un motif qui justifie à lui seul un contrôle et fait partie plutôt de l’analyse raisonnable. Finalement, la SAI a compris qu’un sursis était demandé et a rejeté l’appel.

(3)               Caractère raisonnable de l’évaluation

[30]           Étant donné que la norme de contrôle d’une décision discrétionnaire faite par la SAI est celle de la décision raisonnable, il faut accorder une grande retenue judiciaire aux décisions de la SAI et aux décisions fondées sur l’évaluation et la pondération des éléments de preuve dont elle est saisie : voir Khosa, précité, aux paragraphes 58 à 60.

VIII.       ANALYSE

[31]           Le demandeur a soulevé trois questions importantes aux fins d’examen et je vais les traiter dans l’ordre.

A.                Manquement à l’équité procédurale

[32]           Le demandeur dit que son représentant devant la SAI n’a pas fourni de rapport sur la situation dans le pays relativement aux risques auxquels sont confrontés les hommes gais en Jamaïque. Il dit que cela équivaut à de la négligence professionnelle entraînant un manquement à l’équité procédurale parce que la SAI a indiqué elle-même dans sa décision « aurait pu être l’aspect le plus impératif » des difficultés à l’étranger auxquelles il serait confronté s’il retournait en Jamaïque. Cependant, parce qu’aucun élément de preuve concernant les risques auxquels sont confrontés les hommes gais en Jamaïque n’a été présenté à la SAI, ce facteur potentiellement impératif n’a pas été pris en considération puisque la SAI a refusé de prendre connaissance d’office de la situation des hommes homosexuels en Jamaïque de sorte que le demandeur [traduction] « n’a pas établi que des difficultés particulières pourraient l’attendre en raison de son orientation sexuelle. »

[33]           Je suis d’accord avec le défendeur.

9.         L’incompétence de l’avocat ne constituera un manquement à la justice naturelle que dans des « circonstances exceptionnelles ». L’incompétence doit être suffisamment précise et clairement étayée par les éléments de preuve.

10.       Pour établir que l’incompétence du conseil a donné lieu à un manquement à l’équité procédurale, il incombe au demandeur d’établir le critère à trois volets suivant :

1)   les actes ou omissions allégués du représentant relèvent de l’incompétence;

2)   il y a eu déni de justice dans le sens où, n’eût été la conduite alléguée, il existe une probabilité raisonnable que l’issue de l’audience initiale ait été différente;

3)   le représentant doit être avisé et doit bénéficier d’une occasion raisonnable de répondre.

11.       Avant que la Cour accorde une dispense pour le motif de la négligence de l’avocat, il faut respecter un seuil élevé qui régit les circonstances et les critères probatoires.

12.       La Cour suprême a aussi confirmé que c’est au demandeur qu’il incombe d’établir que l’incompétence découlait des faits ou omissions reprochés au conseil et que « la sagesse rétrospective n’a pas sa place dans cette appréciation ».

13.       En ce qui concerne le volet « examen du travail », l’incompétence ou la négligence du représentant doit ressortir de la preuve de façon suffisamment claire et précise.

14.       Quant au volet « appréciation du préjudice », la Cour doit être convaincue qu’une erreur judiciaire en a résulté, ce qui doit « prendre la forme d’un manquement à l’équité procédurale, la fiabilité de l’issue du procès ayant été compromise, ou toute autre forme évidente. »

15.       Il doit être établi qu’un préjudice substantiel découle des actes de l’avocat incompétent ou en est la conséquence. Le demandeur doit aussi établir qu’il existe une probabilité raisonnable que le résultat aurait été différent, n’eût été l’incompétence du représentant.

16.       Lorsque le demandeur ne peut pas satisfaire au volet « appréciation du préjudice » du critère, alors il n’est pas souhaitable pour la Cour d’envisager le volet « examen du travail » de l’analyse. L’objectif d’une allégation de représentation non effective n’est pas de classer le travail ou la conduite professionnelle de l’avocat; il est préférable de laisser ce dernier aspect à l’organisme de réglementation de la profession.

[Renvois omis.]

[34]           En l’espèce, je crois qu’il existe des circonstances spéciales et exceptionnelles qui ont entraîné un manquement à l’équité procédurale. Le demandeur a avisé le conseil précédent (un expert-conseil en immigration), et, même si l’expert-conseil n’est pas nécessairement d’accord qu’il a été négligent, il ne fait aucun doute, dans mon esprit, que le défaut de présenter les documents sur le pays quant aux risques auxquels sont confrontés les hommes gais en Jamaïque a fait en sorte que la SAI n’a pas été saisie d’éléments de preuve de grande importance pour le dossier du demandeur. Il existe des éléments de preuve conflictuels entre le demandeur et l’expert-conseil quant au moment où le demandeur a soulevé la question de son homosexualité, mais il ne fait aucun doute qu’elle a été avancée comme point en litige devant la SAI et que l’expert-conseil a omis de présenter les éléments de preuve objectifs habituels sur les risques pour les homosexuels en Jamaïque alors qu’il avait amplement l’occasion de le faire, même après l’audience. L’expert-conseil n’offre aucune explication sur ce point crucial.

[35]           Cette affaire est exceptionnelle dans le sens que la SAI va aussi loin qu’elle le peut pour indiquer que « [c]e qui aurait pu être l’aspect le plus impératif de ce facteur est la persécution à laquelle il pourrait être confronté en tant qu’homme homosexuel en Jamaïque. » La SAI pouvait uniquement dire cela parce qu’elle est sait pertinemment bien ce qui attend les hommes homosexuels en Jamaïque. Je suis également convaincu que la SAI, en disant ce qu’elle a dit, indique que des éléments de preuve d’une grande importance qui auraient pu avoir une incidence sur sa décision ne lui ont pas été présentés.

[36]           Les rapports sur le pays concernant la Jamaïque démontrent un niveau élevé de risques pour la communauté LGBT en Jamaïque, et les hommes gais plus particulièrement. Quiconque prétend représenter les intérêts de clients jamaïcains dans le contexte de l’immigration le sait; le défaut de l’expert-conseil de ne pas présenter des éléments de preuve à ce sujet laisse donc entendre un niveau élevé d’incompétence. Le rapport de Human Rights Watch Report du 21 octobre 2014, intitulé « Not Safe at Home » est typique dans sa description de la façon dont la société homophobe jamaïcaine est, et que même la police commet souvent des actes de violence contre la population LGBT. Le rapport décrit des violations généralisées des droits de la personne contre les personnes dont on découvre l’homosexualité, ce qui comprend souvent de la violence physique. Les rapports qui font autorité parlent souvent de violence homophobe généralisée incontrôlée en Jamaïque. Le rapport du département d’État des États-Unis pour 2014 précise ce qui suit :

[traduction] Actes de violence, discrimination et autres abus fondés sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre

La loi interdit des « actes de grossière indécence » (interprétés généralement comme toute espèce d’intimité physique) entre des personnes du même sexe, en public ou en privé, punissables de deux ans d’emprisonnement. Il existe aussi une loi « anti-sodomie » qui interdit tout comportement homosexuel consensuel entre les hommes, ce qui est punissable de 10 ans d’emprisonnement au maximum, mais cette loi n’a pas été appliquée au cours de l’année. L’homophobie était généralisée dans le pays, perpétuée par la culture du dancehall du pays à travers les chansons et le comportement de certains musiciens. Les personnes lesbiennes, gaies, bisexuelles et transsexuelles (LGBT) faisaient l’objet de violence, de harcèlement et de discrimination.

En juillet, un représentant de J-FLAG, une éminente organisation non gouvernementale LGBT, a retiré la pétition contestant la loi anti-sodomie qu’il avait déposée auprès de la Cour suprême en 2013. En abandonnant la poursuite, le pétitionnaire a cité des menaces contre lui et sa famille.

[...]

Des organisations non gouvernementales ont continué de signaler les abus graves des droits de la personne, notamment des agressions à main armée, des « viols correctifs » de femmes accusées d’être lesbiennes, des détentions arbitraires, des agressions collectives, des attaques à coups de couteau, le harcèlement de patients gais et de patientes lesbiennes par le personnel des hôpitaux et des prisons, des fusillades ciblées de telles personnes. La stigmatisation et l’intimidation étaient des facteurs probables pour empêcher les victimes de signaler les incidents de discrimination dans l’emploi et l’hébergement. Même si des agents de police ont exprimé individuellement de la sympathie à l’endroit de la communauté LGBT et se sont employés à empêcher et résoudre les cas d’abus, les organisations non gouvernementales ont signalé que les corps policiers en général ne reconnaissaient pas l’ampleur et la gravité de l’intimidation et de la violence à l’endroit des membres de la communauté LGBT et ont omis de mener des enquêtes sur ces incidents.

Les gardiens de prison gardaient les prisonniers de sexe masculin considérés gais dans une installation distincte pour leur protection. La méthode utilisée pour déterminer leur orientation sexuelle était subjective et non réglementée par le système carcéral, mais des prisonniers auraient confirmé leur orientation sexuelle pour leur propre sécurité. Il y a eu des incidents de violence contre les prisonniers gais, perpétrés par les gardiens et par d’autres prisonniers, mais peu de prisonniers ont cherché des recours auprès du système carcéral.

J-FLAG, en collaboration avec le ministère de la Santé, a formé quelque 60 travailleurs de la santé pour les sensibiliser aux patients LGBT. La plupart des travailleurs de la santé n’étaient pas au courant des préoccupations et enjeux en matière de santé de leurs patients LGBT, résultant en un manque de traitements et de soins adéquats. Même si pays offre un régime universel de soins de santé, les membres de la communauté LGBT comptent principalement sur la clinique Jamaica AIDS Support for Life, alléguant que le personnel du système de santé du gouvernement ne comprenait pas leurs besoins et qu’ils n’étaient pas les bienvenus. Des programmes de formation comme ceux offerts par J-FLAG, la sensibilisation du public par le biais de diverses organisations non gouvernementales et de donneurs internationaux, et un accent accru de la part du gouvernement sur la question de santé publique du VIH/SIDA ont permis de faire augmenter le nombre de personnes LGBT qui ont accès aux installations régulières de soins de santé du secteur public.

[37]           Compte tenu de tels éléments de preuve, il est facile de voir pourquoi la SAI a tout fait pour faire valoir que ce qui aurait pu être le facteur de difficulté le plus impératif n’était étayé par aucun élément de preuve. La SAI n’aurait pas envoyé ce message si elle n’avait pas estimé qu’une omission grave s’était produite dans ce cas.

[38]           Le défendeur dit qu’on ne peut pas dire que l’expert-conseil n’a présenté aucun élément de preuve relativement au degré de difficultés au retour, et a sollicité des éléments de preuve de vive voix du demandeur lui-même. S’il y a eu des éléments de preuve de vive voix concernant le risque, la SAI a omis d’y donner suite de sorte qu’il se pourrait fort bien qu’il s’agisse d’une erreur susceptible de révision. Cependant, la SAI montre elle-même le véritable problème. Des éléments de preuve de vive voix ne constituent pas des éléments de preuve objectifs, qui font autorité sur la situation dans le pays, ce qui manquait selon la SAI. Aucun conseil compétent n’omettrait de présenter les rapports habituels sur la Jamaïque dans cette situation pour démontrer la violence homophobe incontrôlée qui prévaut là-bas.

[39]           Comme il est indiqué dans l’arrêt Chieu, précité, au paragraphe 40, la SAI doit examiner toutes les circonstances pour rendre une décision, et cela ne s’est pas fait en l’espèce parce que l’expert-conseil a omis de présenter les rapports habituels qui font autorité sur la question de violence à l’encontre des hommes gais en Jamaïque.

[40]           Dans ces circonstances exceptionnelles, je suis prêt à accepter que le risque de difficultés pour le demandeur en Jamaïque n’a pas été évalué en raison de l’incompétence de l’expert-conseil qui a contrevenu au droit du demandeur à un processus équitable devant la SAI. Puisque les éléments de preuve objectifs ont été exclus, je pense que la décision aurait été autre n’eût été le manquement à l’équité procédurale.

B.                 Défaut d’examiner le sursis à la mesure de renvoi

[41]           Dans les observations écrites, le représentant du demandeur devant la SAI a aussi demandé explicitement un sursis à la mesure de renvoi. Le représentant a justifié ainsi la demande de sursis : la nécessité de démontrer à la SAI qu’avec le recul du temps le demandeur était totalement réadapté. La demande de sursis n’était pas sans fondement ni déraisonnable parce que le psychiatre traitant du demandeur a fourni des éléments de preuve selon lesquels le demandeur représentait un faible risque de récidive et la SAI a fait observer elle-même qu’il était trop tôt pour déterminer si le demandeur était totalement réadapté et pourrait éviter les activités criminelles à l’avenir. De fait, la SAI a conclu que les progrès du demandeur vers la réadaptation ont joué en faveur de l’octroi d’un sursis, mais elle n’a pas expliqué directement pourquoi un sursis ne devrait pas être accordé en l’espèce.

[42]           Comme l’arrêt Lewis, précité, le dit clairement, un appelant a le droit de savoir pourquoi un sursis est refusé. Dans l’affaire récente de Li, précité, la Cour a conclu que lorsqu’un demandeur demande explicitement un sursis à une mesure de renvoi, et s’il existe des faits pour étayer d’envisager un sursis, le demandeur a le droit de savoir pourquoi sa demande est rejetée plutôt que d’accorder un sursis.

[43]           Le défendeur convient qu’il n’y a aucun refus précis d’un sursis dans la décision, mais il signale que l’agent renvoie à la demande de sursis dans toute la décision et que le refus est expliqué dans la conclusion générale des paragraphes 52 et 53 :

[traduction] [52]     L’appelant est venu au Canada en employant un moyen frauduleux; il était un adulte pleinement mûr et il a commis des délits graves à l’encontre d’enfants. Il est un prestataire de l’aide sociale, n’a aucune perspective apparente d’emploi et je ne suis pas convaincu que personne ne subira de difficultés importantes s’il est renvoyé du Canada. Il n’a pas été établi qu’il serait dans les intérêts d’un enfant d’accorder une mesure spéciale et les éléments de preuve relativement à d’éventuelles difficultés pour l’appelant étaient minimes.

[traduction] [53]     Bien que l’appelant ait démontré des progrès importants pour ce qui est de sa réadaptation et j’accepte que son risque de récidive soit maintenant faible, cet élément positif ne suffit pas à l’emporter sur les aspects négatifs du présent appel.

[44]           Le juge Mosley a traité de cette question dans Rajagopal c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2007 CF 523 :

2. Évaluation de l’opportunité d’accorder un sursis

[30]      Le demandeur soutient que, s’il réclame un sursis, comme c’est le cas en l’espèce, la SAI doit examiner sa demande et invoquer de « solides » raisons pour étayer son refus. Ainsi qu’il est précisé au paragraphe 14 du jugement Lewis c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] A.C.F. 1227 (C.F. 1re inst.)(QL) : « lorsqu’un sursis est demandé et que les faits montrent qu’il y a lieu d’envisager un sursis conditionnel, si des motifs sont donnés conformément au paragraphe 69.4(5) de la Loi, le demandeur a le droit de savoir pourquoi le sursis est refusé ».

[31]      Le demandeur affirme qu’en l’espèce, la SAI n’a pas formulé d’analyse ou invoqué de motifs sérieux pour justifier son refus d’accorder le sursis demandé, se contentant d’une conclusion à l’emporte-pièce. Ainsi que la Cour l’a signalé dans le jugement Archibald c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1995] A.C.F. no 747 (C.F. 1re inst.)(QL), au paragraphe 11 : « L’évaluation du risque de récidive, c’est-à-dire la possibilité que le requérant commette d’autres infractions criminelles, est l’un des facteurs importants à prendre en considération pour décider s’il faut surseoir à une ordonnance d’expulsion ». Dans le cas qui nous occupe, le demandeur affirme que la seule conclusion tirée par la SAI à cet égard reposait sur son autre conclusion que le demandeur n’éprouvait pas de remords, laquelle conclusion était également fondée sur son interprétation erronée du constat de police. La SAI n’a par conséquent pas tenu compte de tous les éléments de preuve tendant à démontrer que le demandeur ne récidiverait probablement pas.

[32]      Pour sa part, le défendeur affirme que la SAI n’a pas commis d’erreur en refusant d’accorder le sursis et il ajoute que la SAI a clairement motivé son refus. Suivant le défendeur, les tribunaux reconnaissent au demandeur le droit de savoir pourquoi la SAI a refusé de lui accorder le sursis demandé sans aller toutefois jusqu’à lui reconnaître le droit d’exiger de la SAI qu’elle formule des motifs complémentaires ou spéciaux à cet égard.

[33]      Sur la question de savoir s’il y a lieu ou non d’accorder un sursis, la SAI a expliqué que « [l]e sursis à l’exécution d’une mesure d’expulsion est, de par sa nature, une mesure spéciale. Toutefois, comme je l’ai conclu, les motifs d’ordre humanitaire en l’espèce ne justifient pas la prise d’une mesure spéciale. Par conséquent, il n’est pas indiqué que j’accorde en l’espèce un sursis à l’exécution de la mesure d’expulsion. » La SAI a poursuivi en faisant observer ce qui suit : « Pour les motifs qui précèdent, je conclus qu’il n’est pas justifié en l’espèce de prendre une mesure spéciale suivant l’alinéa 67(1)c) ou le paragraphe 68(1) » de la Loi.

[34]      Il est évident que l’analyse de la SAI était censée s’appliquer de façon globale aux décisions qu’elle rend en vertu de l’alinéa 67(1)c) et du paragraphe 68(1) de la Loi. La SAI ne se contentait pas d’énoncer une conclusion relativement à la question du sursis.

[45]           En l’espèce, je ne sais trop comment l’analyse de la SAI dans son ensemble est censée s’appliquer à la demande d’un sursis. Quoi qu’il en soit, cette analyse est désormais viciée pour les motifs d’équité procédurale que j’ai mentionnés plus haut, de sorte que la présente affaire doit être renvoyée pour réexamen.

C.                 Évaluation déraisonnable de l’établissement et des difficultés

[46]           Le demandeur a soulevé le caractère déraisonnable comme motif de contrôle supplémentaire, mais il ne sert à rien que j’aborde cette question puisque, sur la base de mes conclusions exposées ci-dessus, cette affaire doit être renvoyée pour réexamen.

D.                Questions à certifier

[47]           Les avocats conviennent qu’il n’y a aucune question à certifier et je suis d’accord.

 


JUGEMENT

LA COUR REND LE JUGEMENT suivant :

1.      La demande est accueillie. La décision est annulée et l’affaire est renvoyée pour réexamen par un tribunal constitué différemment.

2.      Aucune question n’est soumise pour être certifiée.

« James Russell »

Juge

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-4624-15

 

INTITULÉ :

MARVIN DONOVAN MCINTYRE c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 22 septembre 2016

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE RUSSEL

 

DATE DES MOTIFS :

Le 8 décembre 2016

 

COMPARUTIONS :

Adrienne Smith

Pour le demandeur

 

Kareena R. Wilding

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Jordan Battista LLP

Avocat

Toronto (Ontario)

 

Pour le demandeur

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

Pour le défendeur

 

 

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