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Date : 20161006


Dossier : T-1814-15

Référence : 2016 CF 1122

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 6 octobre 2016

En présence de madame la juge McDonald

ENTRE :

MAXWELL REALTY INC.

demanderesse

et

OMAX REALTY LTD.

défenderesse

JUGEMENT ET MOTIFS

I.                   Introduction

[1]               La Cour est saisie d’une requête ex parte présentée par la demanderesse, Maxwell Realty Inc. (Maxwell), en vertu de l’article 369 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106, qui sollicite un jugement par défaut contre la défenderesse, Omax Realty Ltd., pour contrefaçon de marque de commerce au sens des articles 19 et 20 de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. (1985), ch. T-13 [la « Loi »].

[2]               Maxwell est la propriétaire inscrite de la marque de commerce MAXWELL, qui utilise le mot MAXWELL dans un ovale. La marque de commerce est utilisée en association avec l’exploitation d’une agence immobilière.

[3]               La déclaration de Maxwell a été signifiée à la défenderesse le 6 novembre 2015 et de nouveau le 12 décembre 2015. La défenderesse n’a pas déposé ou signifié de défense, comme l’exige l’article 204 des Règles des Cours fédérales.

[4]               En vertu de l’article 210 des Règles des Cours fédérales, lorsqu’une partie ne signifie ni ne dépose sa défense dans le délai prévu, la demanderesse peut demander un jugement par défaut.

[5]               Dans sa requête en jugement par défaut, Maxwell demande les mesures suivantes :

1.                  un jugement par défaut en vertu de l’article 210 des Règles des Cours fédérales;

2.                  une injonction permanente interdisant à la défenderesse, individuellement ou par l’entremise de ses préposés, agents ou employés :

a)                  de contrefaire la marque enregistrée;

b)                  de déprécier l’achalandage attaché à la marque de commerce de la demanderesse, en contravention de l’article 22 de la Loi;

c)                  d’attirer l’attention du public sur ses services ou ses activités commerciales de manière à causer ou à être susceptible de causer de la confusion entre les services ou les activités commerciales de la défenderesse et ceux de la demanderesse ou de ses titulaires de licences;

d)                 de faire passer ses marchandises et ses services pour ceux de la demanderesse ou une licence de la marque de commerce de la demanderesse;

3.                  une ordonnance prévoyant la destruction ou toute autre aliénation de toute étiquette incriminée et de tout matériel publicitaire portant une marque de commerce ou un nom identique à la marque de commerce enregistrée de la demanderesse ou suffisamment similaire pour semer la confusion, en vertu de l’article 53.2 de la Loi;

4.                  des dommages-intérêts fixes de 15 000 $ ou tout autre montant que la Cour jugera approprié;

5.                  à titre subsidiaire, une ordonnance :

a)                  ordonnant un renvoi afin de déterminer les profits de la défenderesse;

b)                  ordonnant que cette affaire soit instruite sous forme d’instance à gestion spéciale;

c)                  ordonnant la production de documents par la défenderesse et son interrogatoire préalable;

6.                  les frais et dépens sur une base avocat-client, ou l’adjudication d’un montant forfaitaire, ou toute autre base jugée juste par la Cour, avec les taxes applicables.

II.                Contexte

[6]               En appui à sa requête en jugement par défaut, la demanderesse a déposé un affidavit de Johnny Alain, assermenté le 25 mai 2016. Selon l’affidavit de M. Alain, Maxwell est une société constituée en vertu des lois fédérales dont le siège social est situé à Calgary, en Alberta. Maxwell exploite une agence immobilière offrant tous les services de courtage qui compte plusieurs centaines d’agents exerçant leurs activités sous la marque de commerce Maxwell dans 18 bureaux en Alberta et en Colombie-Britannique.

[7]               La marque de commerce Maxwell a été enregistrée en 1999 (numéro d’enregistrement TMA621803) et est utilisée depuis ce temps. De plus, Maxwell a accordé des franchises à d’autres personnes pour l’utilisation de la marque de commerce dans le secteur immobilier.

[8]               En mai 2015, la demanderesse a pour la première fois appris que la défenderesse utilisait le terme Maxwell en lien avec des services immobiliers à l’occasion d’une recherche sur Internet. M. Alain affirme qu’il a fait une recherche du mot « Maxwell » sur le site Web de l’Association canadienne de l’immeuble et qu’il a découvert des agents associés à une entreprise appelée Omaxwell Realty en Colombie-Britannique. Des recherches plus poussées ont indiqué qu’Omaxwell Realty était associée à la défenderesse.

[9]               Le 8 juin 2015, Maxwell a fait parvenir une lettre de mise en demeure à la défenderesse. Un représentant de la défenderesse a répondu en s’informant des possibilités de franchisage offertes par Maxwell.

[10]           En octobre 2015, M. Alain a effectué de nouvelles recherches sur Internet et constaté que la défenderesse avait une présence en ligne sous le nom « Omaxwell Realty » et s’annonçait comme agence immobilière.

[11]           M. Alain déclare que d’autres recherches sur des sites de courtage immobilier populaires avec le nom « Maxwell » ont fourni le résultat « Omaxwell Realty ».

[12]           Après la signification de la déclaration, les recherches en ligne de M. Alain ont indiqué que la défenderesse était désormais associée à la franchise Coldwell Banker. Cependant, le nom Omaxwell Realty reste utilisé et semble être utilisé de concert avec le nom de domaine omaxwellrealty.com.

[13]           M. Alain affirme que l’utilisation du nom Omaxwell vise à créer de la confusion chez les clients du marché immobilier et à permettre à la défenderesse de profiter de l’achalandage établi de la demanderesse.

[14]           Il existe des preuves qu’un certain nombre d’agents immobiliers associés à la défenderesse ont fait ou font présentement l’objet de sanctions pour des manquements à l’éthique. La demanderesse affirme que ceci pourrait nuire à sa réputation en cas d’association réputée.

[15]           Par conséquent, Maxwell sollicite une injonction permanente interdisant à la défenderesse d’utiliser le mot « Omaxwell » ou l’expression « Omaxwell Realty » en association avec la prestation de services de courtage immobilier, puisqu’ils sont suffisamment similaires avec la marque de commerce enregistrée « Maxwell » de la demanderesse pour semer la confusion.

III.             Les questions en litige

[16]           Les questions à trancher sont les suivantes :

A.                Les activités de la défenderesse constituaient-elles une contrefaçon de la marque de commerce enregistrée de la demanderesse, en contravention des articles 19 et 20 de la Loi?

B.                 La défenderesse a-t-elle attiré l’attention du public sur ses services d’une manière susceptible de causer de la confusion, en contravention de l’alinéa 7b) de la Loi?

C.                 La défenderesse a-t-elle utilisé la marque de commerce de la demanderesse d’une manière susceptible de déprécier la valeur de l’achalandage attaché à la marque de commerce, en contravention du paragraphe 22(1) de la Loi?

D.                La demanderesse a-t-elle droit à des dommages-intérêts et aux dépens?

IV.             Analyse

A.                Les activités de la défenderesse constituaient-elles une contrefaçon de la marque de commerce enregistrée de la demanderesse, en contravention des articles 19 et 20 de la Loi?

[17]           L’enregistrement d’une marque de commerce confère au propriétaire le droit exclusif d’utiliser sa marque au Canada, à l’égard des services associés à la marque. La marque de commerce Maxwell est enregistrée depuis 1999 pour des services immobiliers. C’est la demanderesse qui détient le droit exclusif d’utiliser ce nom en association avec des services immobiliers.

[18]           Les droits du propriétaire d’une marque de commerce sont réputés violés si une personne, qui n’est pas autorisée à utiliser la marque, annonce ses services en association avec une marque de commerce causant la confusion.

[19]           En l’espèce, la défenderesse annonce en ligne des services immobiliers sous le nom « Omaxwell », qui diffère de la marque de commerce par une seule lettre. Les éléments de preuve indiquent que cette activité a commencé début 2015 et se poursuit toujours.

[20]           Le critère qui doit être appliqué pour établir la présence de confusion est de savoir si « un consommateur ordinaire plutôt pressé » qui voit le nom commercial de la défenderesse considérerait que les services de la défenderesse sont de la même catégorie et de la même qualité que ceux offerts par la demanderesse (Masterpiece Inc. c. Alavida Lifestyles Inc., 2011 CSC 27, aux paragraphes 39 et 40).

[21]           Il faut pour cela tenir compte des cinq facteurs énumérés au paragraphe 6(5) de la Loi, qui se résument comme suit :

a)                  le caractère distinctif inhérent de la marque de commerce ou du nom commercial;

b)                  la période pendant laquelle la marque de commerce ou le nom commercial ont été en usage;

c)                  le genre de services;

d)                 la nature du commerce;

e)                  le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux dans la présentation ou le son.

[22]           En l’espèce, la marque de commerce est utilisée par la demanderesse depuis 1999 en association avec des services de courtage immobilier. La défenderesse semble n’avoir commencé à utiliser le nom Omaxwell qu’en 2015. De toute évidence, comme la demanderesse et la défenderesse sont toutes les deux actives dans le secteur immobilier principalement dans l’Ouest du Canada, le risque de confusion est élevé.

[23]           Enfin, le degré de ressemblance entre les noms dans leur présentation et surtout dans leur son ajoute à la possibilité de confusion.

[24]           Je suis convaincue qu’un consommateur de services de courtage immobilier serait confus, puisque Maxwell est le mot prédominant dans la marque de commerce. Malgré l’ajout par la défenderesse de la lettre « O » devant le mot « Maxwell », le mot « Maxwell » demeure quand même la caractéristique prédominante.

B.                 La défenderesse a-t-elle attiré l’attention du public sur ses services d’une manière susceptible de causer de la confusion, en contravention des alinéas 7b) et 7c) de la Loi?

[25]           La présence en ligne de la défenderesse avec l’utilisation prédominante du mot « Maxwell » précédé uniquement de la lettre « O » constitue, dans le secteur concurrentiel des services immobiliers, une tentative par la défenderesse de faire passer ses services immobiliers pour ceux de la demanderesse. Cette activité contrevient à la Loi.

C.                 La défenderesse a-t-elle utilisé la marque de commerce de la demanderesse d’une manière susceptible de déprécier la valeur de l’achalandage attaché à la marque de commerce, en contravention du paragraphe 22(1) de la Loi?

[26]           La demanderesse a présenté des preuves de sanctions professionnelles contre des agents immobiliers individuels associés à la défenderesse. Bien que la demanderesse n’ait pas présenté de preuves directes de pertes d’achalandage, des dommages-intérêts peuvent être accordés en tout état de cause (Oakley Inc. c. Mme Unetelle, [2000] A.C.F. no 1388, au paragraphe 10).

D.                La demanderesse a-t-elle droit à des dommages-intérêts et aux dépens?

[27]           La demanderesse a établi que la défenderesse avait contrefait sa marque de commerce et a par conséquent droit à des dommages-intérêts. Des dommages-intérêts peuvent être adjugés sans preuve de dommages réels (Oakley, Inc., précitée, au paragraphe 10).

[28]           Dans les circonstances, j’accorde à la demanderesse des dommages-intérêts compensatoires de 10 000 $ pour la contrefaçon (Decommodification LLC c. Burn BC Arts Cooperative, 2015 CF 42; Teavana Corp c. Teayama Inc, 2014 CF 372).

[29]           Une somme de 5 000 $ est également adjugée à la demanderesse à titre de dépens.


JUGEMENT

LA COUR REND LE JUGEMENT SUIVANT :

1.                  La défenderesse, Omax Realty Ltd., a contrefait la marque de commerce de la demanderesse, Maxwell Realty Ltd (numéro d’enregistrement TMA621803), en contravention de l’article 20 de la Loi sur les marques de commerce.

2.                  La défenderesse, ses dirigeants, administrateurs, employés, agents, entrepreneurs, préposés, travailleurs et autres personnes sous sa direction et son contrôle devront s’abstenir :

a)                  d’annoncer, de promouvoir, d’afficher, de distribuer, de fournir, de livrer, d’offrir à la vente ou à l’utilisation, de vendre ou d’utiliser autrement des biens et des services en association avec les noms commerciaux ou les marques de commerce OMAXWELL REALTY, OMAXWELL, ou tout autre nom commercial ou marque de commerce causant la confusion ou susceptible de causer la confusion avec la marque de commerce enregistrée de la demanderesse;

b)                  de faire passer les produits de la défenderesse pour ceux de la demanderesse ou d’attirer autrement l’attention du public sur les produits de la défenderesse de manière à causer de la confusion ou d’une manière susceptible de causer de la confusion entre les produits, les services ou les entreprises de la défenderesse et les produits, les services ou les entreprises de la demanderesse;

c)                  d’utiliser toute marque de commerce ou tout nom commercial d’une manière susceptible de déprécier la valeur de l’achalandage lié à la marque de commerce enregistrée de la demanderesse, en contravention du paragraphe 22(1) de la Loi.

3.                  La défenderesse devra payer à la demanderesse :

a)                  des dommages-intérêts de 10 000 $ pour la contrefaçon de la marque de commerce;

b)                  les dépens en lien avec la présente poursuite, établis à 5 000 $.

« Ann Marie McDonald »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-1814-15

INTITULÉ :

MAXWELL REALTY INC. c. OMAX REALTY LTD.

REQUÊTE ÉCRITE EXAMINÉE À OTTAWA (ONTARIO) EN VERTU DE L’ARTICLE 369 DES RÈGLES DES COURS FÉDÉRALES

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE MCDONALD

DATE DES MOTIFS :

Le 6 octobre 2016

OBSERVATIONS ÉCRITES :

Andrea Sam

Pour la demanderesse

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Burnet, Duckworth & Palmer LLP

Avocats

Calgary (Alberta)

Pour la demanderesse

 

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