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Date : 20160504


Dossier : T-1827-15

Référence : 2016 CF 503

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 4 mai 2016

En présence de monsieur le juge Manson

ENTRE :

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

demandeur

et

ROBERT O’KEEFE

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS :

[1]               Il s’agit d’une demande contrôle judiciaire déposée par la Couronne d’une décision de la division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale [DA-TSS] accordant au défendeur la permission d’en appeler d’une décision de la division générale du Tribunal de la sécurité sociale [DG-TSS] en vertu de l’article 58 de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, L.C. 2005, ch. 34 [LMEDS].

I.                   Faits et procédures

[2]               M. Robert O’Keefe [le défendeur] a commencé à recevoir sa pension de retraite en vertu du Régime de pensions du Canada, L.R.C. (1985), ch. C-8 [RPC], en juin 2012, à l’âge de 60 ans. Entre mai 2012 et le 24 août 2012, il était travailleur saisonnier pour une compagnie de récupération d’automobiles.

[3]               À partir du mois de septembre 2012, le défendeur a reçu des prestations régulières d’assurance-emploi.

[4]               Le 13 novembre 2012, il a été hospitalisé en raison d’essoufflement et d’enflure de ses membres inférieurs, état qui s’était déclaré environ une semaine plus tôt. Il a depuis reçu un diagnostic d’insuffisance cardiaque congestive.

[5]               Le défendeur a présenté une demande de pension d’invalidité en vertu du RPC, indiquant qu’il avait cessé de travailler en raison de son insuffisance cardiaque congestive. Le ministère de l’Emploi et du Développement social du Canada a rejeté sa demande initiale et a maintenu son refus après révision au motif qu’en vertu du RPC, une personne pouvait remplacer sa pension de retraite uniquement si elle est réputée être invalide avant le mois au cours duquel il a commencé à toucher sa pension de retraite, période appelée la période minimale d’admissibilité [PMA] (RPC, au paragraphe 42(2), à l’article 44 et au paragraphe 66.1(1.1)). Une « invalidité » est définie comme étant une invalidité physique ou mentale « grave » (c’est-à-dire qui rend la personne incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice) et « prolongée » (en ce sens que l’invalidité durera vraisemblablement pendant une période longue, continue et indéfinie ou devoir entraîner vraisemblablement le décès) (RPC, à l’alinéa 42(2)a)).

[6]               Par conséquent, le défendeur devait démontrer qu’il était atteint d’une invalidité grave et prolongée avant le 31 mai 2012 (la PMA du défendeur). Les décisions initiale et en révision ont conclu que les renseignements fournis ne démontraient pas que le défendeur était incapable d’effectuer un certain type de travail depuis le mois de mai 2012 en raison de son invalidité, puisqu’il a travaillé jusqu’au mois d’août 2012, qu’il a reçu des prestations régulières d’assurance emploi par la suite et qu’il n’a développé les premiers symptômes d’insuffisance cardiaque congestive et reçu des traitements pour cette maladie qu’à partir du mois de novembre 2012.

[7]               Le défendeur a interjeté appel de cette décision à la DG-TSS. Sa demande, d’abord incomplète, a été complétée et déposée hors délai. Le 30 octobre 2014, le défendeur a déposé des explications écrites énonçant les raisons pour lesquelles une prorogation de délai devait lui être accordée.

[8]               Le 31 juillet 2015, la DG-TSS a refusé la demande de prorogation de délai du défendeur. Pour décider si elle devait accorder la prorogation de délai pour interjeter appel, la DG-TSS a examiné les quatre critères établis dans la décision Canada (Ministre du Développement des Ressources Humaines) c. Gattellaro, 2005 CF 883. Trois de ces quatre critères, soit l’intention persistante de poursuivre l’appel, l’explication raisonnable du retard et l’absence de préjudice causé à l’autre partie par la prorogation du délai, étaient en faveur du défendeur. La DG-TSS a néanmoins conclu que le critère déterminant, qui excluait toute chance que l’appel soit accueilli, était l’absence d’une cause défendable. Puisque l’invalidité du défendeur a commencé après le début du paiement de sa pension de retraite anticipée, la DG-TSS a conclu qu’il n’était pas admissible à recevoir une pension d’invalidité.

[9]               Le défendeur a demandé la permission d’en appeler de cette décision.

[10]           Le 28 septembre 2015, la division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale avait accordé au demandeur la permission d’en appeler, concluant que l’appel s’inscrivait parmi les moyens d’appel énumérés à l’article 58 de la LMEDS et que l’appel avait une chance raisonnable de succès.

[11]           La DA-TSS a d’abord conclu que l’argument du défendeur selon lequel la division générale a commis une erreur en ne tenant pas compte de ses cotisations de retraite en 2012 n’a révélé aucun moyen d’appel. Elle mentionne que la DG-TSS n’a pas commis d’erreur en n’abordant pas expressément les cotisations de 2011 ou de 2012 puisque le défendeur recevait une pension de retraite au titre du RPC lorsqu’il a déposé sa demande de pension d’invalidité.

[12]           Deuxièmement, la DA-TSS a conclu que la DG-TSS a estimé à juste titre que l’appel du défendeur avait été déposé tardivement. En effet, bien que le défendeur ait déposé son appel le 3 mars 2014, cette demande est demeurée incomplète jusqu’au 29 mai 2014, soit plus de 90 jours après la communication de la décision de la DG-TSS au défendeur, qui a eu lieu le 16 janvier 2014.

[13]           Troisièmement, la DA-TSS a conclu que la DG-TSS a énoncé correctement le droit applicable à l’octroi d’une prorogation de délai pour déposer un avis d’appel complet. En concluant que le défendeur avait une intention constante de poursuivre l’appel, une explication raisonnable justifiant le retard et que si l’affaire devait procéder, cela ne causerait aucun préjudice à la partie opposée, la DG-TSS n’a pas commis d’erreur.

[14]           Toutefois, la DA-TSS a affirmé que la DG-TSS « pourrait » avoir erré en droit en concluant que le défendeur n’a pas présenté de cause défendable, puisque ce n’est qu’après qu’il a touché sa pension de retraite qu’il a commencé à recevoir des soins pour son problème de santé, ce qui indique qu’il avait une capacité de travailler au moment considéré. La DA-TSS invoque la décision Stanziano c. Ministre du Développement des Ressources humaines, 26 novembre 2002, CP17926 (Commission d’appel des pensions), comme confirmant le principe qu’un demandeur de pension d’invalidité travaillait après la date marquant la fin de sa période minimale d’admissibilité n’empêche pas automatiquement qu’il puisse être admissible à une pension d’invalidité .

[15]           La DA-TSS a donc accordé la permission d’interjeter appel, concluant que « [c]ela pourrait constituer une erreur de droit de la part de la division générale », ce qui constitue un moyen d’appel qui pourrait présenter une chance raisonnable de succès en appel en vertu de l’alinéa 58(1)b) de la LMEDS.

II.                Les questions en litige

[16]           Les questions en litige sont les suivantes :

A.    Le contrôle judiciaire est-il prématuré?

B.     La décision de la DA-TSS accordant la permission d’en appeler est-elle raisonnable?

III.             La norme de contrôle

[17]           La norme de contrôle applicable à la révision de la décision de la DA-TSS d’accorder ou de refuser la permission d’en appeler est celle de la décision raisonnable, en faisant preuve de grande retenue envers la DA-TSS (Canada (Procureur général) c. Hines, 2016 CF 112, au paragraphe 28 [Hines]; Canada (Procureur général) c. Hoffman, 2015 CF 1348, aux paragraphes 26 et 27 [Hoffman]; Tracey c. Canada (Procureur général), 2015 CF 1300, au paragraphe 17 [Tracey]).

IV.             L’analyse

[18]           Les dispositions pertinentes de la législation applicable sont jointes à l’annexe A.

[19]           Pour les motifs suivants, j’accueille la présente demande.

A.                Le contrôle judiciaire est-il prématuré?

[20]           Le défendeur n’a formulé aucune observation à l’égard de la présente demande. L’avocat du demandeur a toutefois porté la question du caractère prématuré de la demande à l’attention de notre Cour.

[21]           Le demandeur fait valoir que le présent contrôle de la décision de la DA-TSS est définitif, qu’il n’est pas interlocutoire et qu’il n’est donc pas prématuré. Si je devais en arriver à une conclusion différente, le demandeur fait valoir que notre Cour devrait néanmoins exercer son pouvoir discrétionnaire et entendre la demande.

[22]           Cette question ressort de plusieurs décisions de la Cour fédérale qui ont par le passé qualifié d’interlocutoires les décisions accordant la permission d’en appeler rendues par la Commission d’appel des pensions [CAP], le tribunal antérieur à la DA-TSS, ou comme ayant [traduction] « l’apparence d’une décision interlocutoire » (voir Layden c. Canada (Ressources humaines et Développement social), 2008 CF 619, aux paragraphes 24 à 26; Mrak c. Canada (Ressources humaines et du Développement des compétences), 2007 CF 672, au paragraphe 36; Canada (Procureur général) c. Landry, 2008 CF 810, au paragraphe 21; McDonald c. Canada (Ressources humaines et Développement des compétences), 2009 CF 1074, au paragraphe 16). Dans ces décisions, la Cour s’est généralement déclarée compétente pour effectuer le contrôle judiciaire des décisions d’un membre désigné de la CAP accordant ou refusant une permission d’en appeler.

[23]           La règle générale veut « [qu’]à défaut de circonstances exceptionnelles, les tribunaux ne peuvent intervenir dans un processus administratif tant que celui‑ci n’a pas été mené à terme ou tant que les recours efficaces qui sont ouverts ne sont pas épuisés » et que « très peu de circonstances peuvent être qualifiées d’“exceptionnelles” et que le critère minimal permettant de qualifier des circonstances d’exceptionnelles est élevé » (Canada (Agence des services frontaliers) c. C.B. Powell Limited, 2010 CAF 61, aux paragraphes 30 à 33).

[24]           Toutefois, je suis d’avis qu’une analyse téléologique et contextuelle du régime législatif régissant le processus d’appel en vertu de la Loi indique que la décision de ce tribunal accordant la permission d’en appeler est définitive puisqu’elle est finale et déterminante par rapport aux droits des parties.

[25]           La finalité de cette décision est définie à l’article 68 de la Loi, qui prescrit que

la « décision du Tribunal à l’égard d’une demande présentée sous le régime de la présente loi est définitive et sans appel; elle peut cependant faire l’objet d’un contrôle judiciaire aux termes de la Loi sur les Cours fédérales ».

[26]           La Loi ne confère pas à la DA-TSS le pouvoir légal de porter en appel ou de réviser ses propres décisions finales et exécutoires concernant une demande de permission d’en appeler ni par l’entremise d’un autre mécanisme d’appel existant. En décidant d’accorder ou de refuser la permission d’en appeler, la DA-TSS se trouve dessaisie à l’égard de cette décision en vertu de l’article 58 de la LMEDS.

[27]           De plus, le paragraphe 28g) de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. (1985), ch. F-7 [la Loi], confère à la Cour d’appel fédérale le pouvoir de connaître des décisions rendues par la DA‑TSS, mais exclut expressément les décisions rendues entre autres en vertu du paragraphe 57(2) (autorisation de proroger le délai pour présenter une demande de permission d’en appeler) et de l’article 58 (moyens d’appel et permission d’en appeler) de la LMEDS. En vertu de l’alinéa 18(1)b) et l’article 26 de la Loi, les Cours fédérales ont compétence exclusive sur les décisions des offices fédéraux, comprenant notamment les décisions de la DA-TSS expressément exclues en vertu de l’article 28. À mon avis, une interprétation téléologique des dispositions pertinentes justifie l’intervention de la Cour fédérale par voie de contrôle judiciaire.

[28]           De plus, le régime législatif régissant la DA-TSS se distingue de celui de l’ancienne CAP et des décisions qui ont été rendues dans le cadre de celui-ci qui considérait qu’il s’agissait de décisions interlocutoires. Le critère pour obtenir la permission d’en appeler et la nature même de l’appel ont changé en vertu des articles 55 et 58 de la LMEDS. À la différence d’un appel présenté devant l’ancienne CAP, qui était une audience de novo, un appel devant la DA-TSS n’autorise pas le dépôt de nouveaux éléments de preuve et se limite aux trois moyens d’appel énumérés à l’article 58. De plus, le paragraphe 58(5) dispose que lorsqu’une permission est accordée, la demande de permission est assimilée à un avis d’appel. En outre, la décision de permettre d’en appeler rendue par la DA-TSS délimite les questions en appel qui ont une chance raisonnable de succès (Belo-Alves c. Canada (Procureur général), 2014 CF 1100, aux paragraphes 71 à 73).

[29]           Il ressort clairement de la LMEDS que l’intention du législateur est de permettre à la DA‑TSS d’entendre uniquement les appels reposant sur un moyen d’appel et qui ont une chance raisonnable de succès. La LMEDS n’attribue pas un large pouvoir discrétionnaire à la DA-TSS pour décider d’une permission d’en appeler. Si la DA-TSS accorde une permission d’en appeler dans des cas autres que ceux prévus à l’article 58, elle s’écarte du pouvoir délégué qui lui est conféré par sa loi constitutive.

[30]           Je comprends que l’intervention judiciaire dans un processus administratif est indésirable pour de nombreuses raisons, dont le fractionnement du processus administratif, l’augmentation des frais et des délais et le risque que la question devienne théorique en raison de la décision du tribunal sur d’autres éléments des procédures, mais aucun de ces éléments n’est préoccupant en l’espèce.

[31]           Il n’y a pas d’inquiétude à avoir à l’égard du fractionnement du processus puisque les exigences relatives à la permission d’en appeler prévues aux articles 55 à 58 de la LMEDS sont des étapes perceptibles dans le processus d’appel qui aboutit à une décision définitive.

[32]           De plus, le refus d’entendre la présente demande en raison du principe de non‑intervention n’aurait pas pour effet de diminuer les frais et les délais, mais irait plutôt à l’encontre des principes d’efficacité et d’économie des ressources judiciaires. Les faits non contestés de l’espèce, en plus du fait qu’une prorogation des délais et une audition complète au fond de l’appel ne donneraient pas lieu à un résultat différent, justifient l’intervention de notre Cour à ce moment. Les mêmes arguments seraient entendus par la DA-TSS, puis une fois de plus lors d’un contrôle judiciaire subséquent, gaspillant temps et ressources sur un appel qui n’a pas de chance de succès d’après ces faits, comme il est expliqué plus loin.

[33]           Notre Cour a exercé sa compétence pour effectuer le contrôle judiciaire de décisions de la DA-TSS accordant la permission d’en appeler (Hoffman, précité, Hines, précité) et a également contrôlé des décisions refusant une permission d’en appeler dans ce contexte (Tracey, précité, Bellefeuille c. Canada (Procureur général), 2014 CF 963, aux paragraphes 11 et 12). Les préoccupations relatives à l’intervention prématurée de notre Cour en raison de l’expertise et du pouvoir délégué de la DA-TSS pour rendre des décisions sur une demande de permission d’en appeler s’appliquent également aux contrôles des décisions rejetant les demandes de permission, qui sont susceptibles de contrôle.

[34]           Sans un mécanisme de contrôle judiciaire, il n’y aurait aucun moyen de contester les décisions accordant une permission d’en appeler, qui, par conséquent, ne seraient assujetties à aucune surveillance judiciaire. Dans une affaire comme celle en l’espèce, où l’appel n’a aucune chance de succès et où la décision de la DA-TSS d’accorder la permission d’en appeler était non seulement non fondée à la lumière des faits qui lui ont été présentés, mais également injustifiée selon l’article 58 de la LMEDS, la surveillance judiciaire est assurée et importante afin d’offrir un guide pour les futures décisions en matière de permission d’en appeler devant être rendues conformément à la loi.

B.                 La décision de la DA-TSS accordant la permission d’en appeler est-elle raisonnable?

[35]           Bien que je sois sensible au diagnostic médical du défendeur, je suis d’accord avec le demandeur que selon les faits présentés à la DA-TSS, la décision à laquelle elle est parvenue est déraisonnable.

[36]           La permission d’en appeler d’une décision de la DG-TSS ne peut être accordée que lorsqu’un demandeur la convainc que son appel a « une chance raisonnable de succès », sur l’un des trois moyens d’appel établis au paragraphe 58(1) de la LMEDS, soit : a) un manquement à un principe de justice naturelle; b) une erreur de droit; c) une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance. Aucun autre moyen d’appel ne peut être pris en considération (Belo-Alves, précité, aux paragraphes 71 à 73).

[37]           Le paragraphe 58(2) dispose que « [l]a division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès ».

[38]           Une personne recevant une pension de retraite peut l’annuler en faveur d’une pension d’invalidité seulement si elle est réputée avoir été invalide avant sa PMA (RPC, au paragraphe 42(2), à l’article 44 et au paragraphe 66.1(1.1)). Il n’y a simplement pas de preuve dans le dossier présenté à la DA-TSS selon laquelle le défendeur souffrait d’une invalidité physique ou mentale grave et prolongée qui l’aurait rendu incapable de détenir régulièrement une occupation véritablement rémunératrice avant le mois au cours duquel il a reçu sa première pension de retraite au titre du RPC. Les rapports médicaux au dossier démontrent que le défendeur a développé des symptômes reliés à sa maladie en novembre 2012 et qu’il a manifesté des signes d’insuffisance cardiaque congestive en novembre 2013. Ces dates surviennent après la date du début de sa retraite et la loi lui interdit donc de recevoir une pension d’invalidité dans ces circonstances.

[39]           La décision est également déraisonnable étant donné que la décision sur laquelle la DA‑TSS s’est fondée pour accorder la permission d’en appeler exige manifestement que le demandeur ait été invalide avant sa PMA. Une fois de plus, il n’existe aucun élément de preuve à cet égard en l’espèce.

[40]           En concluant que la demande de permission d’en appeler du défendeur peut avoir une chance raisonnable de succès, la DA-TSS doit également avoir conclu qu’il existe des éléments de preuve démontrant que l’invalidité du défendeur est survenue avant l’échéance de sa PMA. La décision de la DA-TSS n’explique pas les motifs sur lesquels elle s’est fondée pour croire que cette invalidité existait et n’a pas établi de preuve de cette invalidité antérieure à la PMA lui permettant d’en venir à cette décision. La preuve démontre que l’état de santé du défendeur s’est manifesté la première fois en novembre 2012, ce que le défendeur n’a pas démenti.

[41]           La décision de la DA-TSS n’appartient pas aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit et les motifs pour lesquels elle a accordé la permission d’en appeler sur le fondement que l’appel pouvait avoir une chance raisonnable de succès (c’est‑à-dire qu’il existait des éléments de preuve suggérant que le défendeur était invalide au sens du paragraphe 42(2) du RPC avant sa PMA du 31 mai 2012) ne présentent pas la transparence, l’intelligibilité ou la justification nécessaires pour satisfaire à la norme de la décision raisonnable.


JUGEMENT

LA COUR REND LE JUGEMENT SUIVANT :

1.                  La demande est accueillie, la décision de la DA-TSS est annulée et l’affaire est renvoyée à un autre membre de la DA-TSS pour réexamen, compte tenu des motifs de la présente décision.

« Michael D. Manson »

Juge


ANNEXE A

Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, (L.C. 2005, ch. 34)

Division d’appel

Appel

55 Toute décision de la division générale peut être portée en appel devant la division d’appel par toute personne qui fait l’objet de la décision et toute autre personne visée par règlement.

Appeal Division

Appeal

55 Any decision of the General Division may be appealed to the Appeal Division by any person who is the subject of the decision and any other prescribed person.

Autorisation du Tribunal

56 (1) Il ne peut être interjeté d’appel à la division d’appel sans permission.

Exception

(2) Toutefois, il n’est pas nécessaire d’obtenir une permission dans le cas d’un appel interjeté au titre du paragraphe 53(3).

Leave

56 (1) An appeal to the Appeal Division may only be brought if leave to appeal is granted.

Exception

(2) Despite subsection (1), no leave is necessary in the case of an appeal brought under subsection 53(3).

Modalités de présentation

57 (1) La demande de permission d’en appeler est présentée à la division d’appel selon les modalités prévues par règlement et dans le délai suivant :

a) dans le cas d’une décision rendue par la section de l’assurance-emploi, dans les trente jours suivant la date où l’appelant reçoit communication de la décision;

b) dans le cas d’une décision rendue par la section de la sécurité du revenu, dans les quatre-vingt-dix jours suivant la date où l’appelant reçoit communication de la décision.

Délai supplémentaire

(2) La division d’appel peut proroger d’au plus un an le délai pour présenter la demande de permission d’en appeler.

Appeal — time limit

57 (1) An application for leave to appeal must be made to the Appeal Division in the prescribed form and manner and within,

(a) in the case of a decision made by the Employment Insurance Section, 30 days after the day on which it is communicated to the appellant; and

(b) in the case of a decision made by the Income Security Section, 90 days after the day on which the decision is communicated to the appellant.

Extension

(2) The Appeal Division may allow further time within which an application for leave to appeal is to be made, but in no case may an application be made more than one year after the day on which the decision is communicated to the appellant.

Moyens d’appel

58 (1) Les seuls moyens d’appel sont les suivants :

a) la division générale n’a pas observé un principe de justice naturelle ou a autrement excédé ou refusé d’exercer sa compétence;

b) elle a rendu une décision entachée d’une erreur de droit, que l’erreur ressorte ou non à la lecture du dossier;

c) elle a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments portés à sa connaissance.

Critère

(2) La division d’appel rejette la demande de permission d’en appeler si elle est convaincue que l’appel n’a aucune chance raisonnable de succès.

Décision

(3) Elle accorde ou refuse cette permission.

Motifs

(4) Elle rend une décision motivée par écrit et en fait parvenir une copie à l’appelant et à toute autre partie.

Permission accordée

(5) Dans les cas où la permission est accordée, la demande de permission est assimilée à un avis d’appel et celui-ci est réputé avoir été déposé à la date du dépôt de la demande de permission.

Grounds of appeal

58 (1) The only grounds of appeal are that

(a) the General Division failed to observe a principle of natural justice or otherwise acted beyond or refused to exercise its jurisdiction;

(b) the General Division erred in law in making its decision, whether or not the error appears on the face of the record; or

(c) the General Division based its decision on an erroneous finding of fact that it made in a perverse or capricious manner or without regard for the material before it.

Criteria

(2) Leave to appeal is refused if the Appeal Division is satisfied that the appeal has no reasonable chance of success.

Decision

(3) The Appeal Division must either grant or refuse leave to appeal.

Reasons

(4) The Appeal Division must give written reasons for its decision to grant or refuse leave and send copies to the appellant and any other party.

Leave granted

(5) If leave to appeal is granted, the application for leave to appeal becomes the notice of appeal and is deemed to have been filed on the day on which the application for leave to appeal was filed.

Décisions

59 (1) La division d’appel peut rejeter l’appel, rendre la décision que la division générale aurait dû rendre, renvoyer l’affaire à la division générale pour réexamen conformément aux directives qu’elle juge indiquées, ou confirmer, infirmer ou modifier totalement ou partiellement la décision de la division générale.

Motifs

(2) Elle rend une décision motivée par écrit et en fait parvenir une copie à l’appelant et à toute autre partie.

Decision

59 (1) The Appeal Division may dismiss the appeal, give the decision that the General Division should have given, refer the matter back to the General Division for reconsideration in accordance with any directions that the Appeal Division considers appropriate or confirm, rescind or vary the decision of the General Division in whole or in part.

Reasons

(2) The Appeal Division must give written reasons for its decision and send copies to the appellant and any other party.

Décision définitive

68 La décision du Tribunal à l’égard d’une demande présentée sous le régime de la présente loi est définitive et sans appel; elle peut cependant faire l’objet d’un contrôle judiciaire aux termes de la Loi sur les Cours fédérales.

Decision final

68 The decision of the Tribunal on any application made under this Act is final and, except for judicial review under the Federal Courts Act, is not subject to appeal to or review by any court.

Régime de pensions du Canada, (L.R.C. 1985, ch. C-8)

Pensions et prestations supplémentaires

Définitions et interprétation

Définitions

Personne déclarée invalide

(2) Pour l’application de la présente loi :

a) une personne n’est considérée comme invalide que si elle est déclarée, de la manière prescrite, atteinte d’une invalidité physique ou mentale grave et prolongée, et pour l’application du présent alinéa :

(i) une invalidité n’est grave que si elle rend la personne à laquelle se rapporte la déclaration régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice,

(ii) une invalidité n’est prolongée que si elle est déclarée, de la manière prescrite, devoir vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou devoir entraîner vraisemblablement le décès;

b) une personne est réputée être devenue ou avoir cessé d’être invalide à la date qui est déterminée, de la manière prescrite, être celle où elle est devenue ou a cessé d’être, selon le cas, invalide, mais en aucun cas une personne — notamment le cotisant visé au sous-alinéa 44(1)b)(ii) — n’est réputée être devenue invalide à une date antérieure de plus de quinze mois à la date de la présentation d’une demande à l’égard de laquelle la détermination a été faite.

Pensions and Supplementary Benefits

Interpretation

Definitions

When person deemed disabled

42 (2) For the purposes of this Act,

(a) a person shall be considered to be disabled only if he is determined in prescribed manner to have a severe and prolonged mental or physical disability, and for the purposes of this paragraph,

(i) a disability is severe only if by reason thereof the person in respect of whom the determination is made is incapable regularly of pursuing any substantially gainful occupation, and

(ii) a disability is prolonged only if it is determined in prescribed manner that the disability is likely to be long continued and of indefinite duration or is likely to result in death; and

(b) a person is deemed to have become or to have ceased to be disabled at the time that is determined in the prescribed manner to be the time when the person became or ceased to be, as the case may be, disabled, but in no case shall a person — including a contributor referred to in subparagraph 44(1)(b)(ii) — be deemed to have become disabled earlier than fifteen months before the time of the making of any application in respect of which the determination is made.

Prestations payables

Prestations payables

44 (1) Sous réserve des autres dispositions de la présente partie :

a) une pension de retraite doit être payée à un cotisant qui a atteint l’âge de soixante ans;

b) une pension d’invalidité doit être payée à un cotisant qui n’a pas atteint l’âge de soixante-cinq ans, à qui aucune pension de retraite n’est payable, qui est invalide et qui :

(i) soit a versé des cotisations pendant au moins la période minimale d’admissibilité,

(ii) soit est un cotisant à qui une pension d’invalidité aurait été payable au moment où il est réputé être devenu invalide, si une demande de pension d’invalidité avait été reçue avant le moment où elle l’a effectivement été,

(iii) soit est un cotisant à qui une pension d’invalidité aurait été payable au moment où il est réputé être devenu invalide, si un partage des gains non ajustés ouvrant droit à pension n’avait pas été effectué en application des articles 55 et 55.1;

Benefits Payable

Benefits payable

44 (1) Subject to this Part,

(a) a retirement pension shall be paid to a contributor who has reached sixty years of age;

(b) a disability pension shall be paid to a contributor who has not reached sixty-five years of age, to whom no retirement pension is payable, who is disabled and who

(i) has made contributions for not less than the minimum qualifying period,

(ii) is a contributor to whom a disability pension would have been payable at the time the contributor is deemed to have become disabled if an application for a disability pension had been received before the contributor’s application for a disability pension was actually received, or

(iii) is a contributor to whom a disability pension would have been payable at the time the contributor is deemed to have become disabled if a division of unadjusted pensionable earnings that was made under section 55 or 55.1 had not been made;

Demande de cessation de prestation

66.1 (1) Un bénéficiaire peut demander la cessation d’une prestation s’il le fait de la manière prescrite et, après que le paiement de la prestation a commencé, durant la période de temps prescrite à cet égard.

Exception

(1.1) Toutefois, le bénéficiaire d’une prestation de retraite ne peut remplacer cette prestation par une prestation d’invalidité si le requérant est réputé être devenu invalide, en vertu de la présente loi ou aux termes d’un régime provincial de pensions, au cours du mois où il a commencé à toucher sa prestation de retraite ou par la suite.

Request to cancel benefit

66.1 (1) A beneficiary may, in prescribed manner and within the prescribed time interval after payment of a benefit has commenced, request cancellation of that benefit.

Exception

(1.1) Subsection (1) does not apply to the cancellation of a retirement pension in favour of a disability benefit where an applicant for a disability benefit under this Act or under a provincial pension plan is in receipt of a retirement pension and the applicant is deemed to have become disabled for the purposes of entitlement to the disability benefit in or after the month for which the retirement pension first became payable.

Loi sur les Cours fédérales, (L.R.C. (1985), ch. F-7) :

Recours extraordinaires : offices fédéraux

18 (1) Sous réserve de l’article 28, la Cour fédérale a compétence exclusive, en première instance, pour :

a) décerner une injonction, un bref de certiorari, de mandamus, de prohibition ou de quo warranto, ou pour rendre un jugement déclaratoire contre tout office fédéral;

b) connaître de toute demande de réparation de la nature visée par l’alinéa a), et notamment de toute procédure engagée contre le procureur général du Canada afin d’obtenir réparation de la part d’un office fédéral.

Extraordinary remedies, federal tribunals

18 (1) Subject to section 28, the Federal Court has exclusive original jurisdiction

(a) to issue an injunction, writ of certiorari, writ of prohibition, writ of mandamus or writ of quo warranto, or grant declaratory relief, against any federal board, commission or other tribunal; and

(b) to hear and determine any application or other proceeding for relief in the nature of relief contemplated by paragraph (a), including any proceeding brought against the Attorney General of Canada, to obtain relief against a federal board, commission or other tribunal.

Tribunal de droit commun

26 La Cour fédérale a compétence, en première instance, pour toute question ressortissant aux termes d’une loi fédérale à la Cour d’appel fédérale, à la Cour fédérale, à la Cour fédérale du Canada ou à la Cour de l’Échiquier du Canada, à l’exception des questions expressément réservées à la Cour d’appel fédérale.

General original jurisdiction

26 The Federal Court has original jurisdiction in respect of any matter, not allocated specifically to the Federal Court of Appeal, in respect of which jurisdiction has been conferred by an Act of Parliament on the Federal Court of Appeal, the Federal Court, the Federal Court of Canada or the Exchequer Court of Canada.

Contrôle judiciaire

28 (1) La Cour d’appel fédérale a compétence pour connaître des demandes de contrôle judiciaire visant les offices fédéraux suivants :

g) la division d’appel du Tribunal de la sécurité sociale, constitué par l’article 44 de la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social, sauf dans le cas d’une décision qui est rendue au titre du paragraphe 57(2) ou de l’article 58 de cette loi ou qui vise soit un appel interjeté au titre du paragraphe 53(3) de cette loi, soit un appel concernant une décision relative au délai supplémentaire visée au paragraphe 52(2) de cette loi, à l’article 81 du Régime de pensions du Canada, à l’article 27.1 de la Loi sur la sécurité de la vieillesse ou à l’article 112 de la Loi sur l’assurance-emploi;

Judicial review

28 (1) The Federal Court of Appeal has jurisdiction to hear and determine applications for judicial review made in respect of any of the following federal boards, commissions or other tribunals:

(g) the Appeal Division of the Social Security Tribunal established under section 44 of the Department of Employment and Social Development Act, unless the decision is made under subsection 57(2) or section 58 of that Act or relates to an appeal brought under subsection 53(3) of that Act or an appeal respecting a decision relating to further time to make a request under subsection 52(2) of that Act, section 81 of the Canada Pension Plan, section 27.1 of the Old Age Security Act or section 112 of the Employment Insurance Act;

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-1827-15

 

INTITULÉ :

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA c. ROBERT O’KEEFE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Ottawa (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 27 avril 2016

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE MANSON

 

DATE DES MOTIFS :

Le 4 mai 2016

COMPARUTIONS :

Nancy Luitwieler

Pour le demandeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Gatineau (Québec)

Pour le demandeur

 

Robert O’Keefe

PLAIDANT POUR LUI-MÊME

 

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