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Date : 20160506


Dossier : IMM-1971-15

Référence : 2016 CF 512

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Toronto (Ontario), le 6 mai 2016

En présence de monsieur le juge O’Reilly

ENTRE :

ABLA CHAAR

ET RACHELE AYOUB

demanderesses

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ, DE L’IMMIGRATION ET DU MULTICULTURALISME

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.                   Aperçu

[1]               Mme Abla Chaar, une citoyenne du Liban, est devenue une résidente permanente du Canada en 2006. Après seulement deux mois au Canada, elle est retournée au Liban avec ses enfants afin de régler ses affaires dans ce pays. Alors qu’elle était au Liban, la fille de Mme Chaar, Rachele, a amorcé des études universitaires. En 2009, la famille est revenue au Canada afin que la mère de Mme Chaar puisse recevoir des soins médicaux ici. Malheureusement, elle est décédée au cours d’une opération chirurgicale.

[2]               Pendant qu’elle était au Canada, Rachele s’est informée pour savoir si elle pouvait transférer dans une université canadienne les crédits universitaires qu’elle avait obtenus au Liban. On lui a indiqué qu’elle aurait à recommencer ses études universitaires au Canada, et qu’elle perdrait ainsi deux années de crédits. Elle est retournée au Liban pour terminer ses études dans ce pays. Mme Chaar est retournée là-bas avec elle. Elles étaient restées seulement dix jours au Canada.

[3]               Les demanderesses sont revenues au Canada encore une fois en 2011, mais seulement pour quelques semaines. Lorsqu’elle est retournée au Liban, Mme Chaar s’est mariée avec un homme qu’elle décrit comme étant violent. Elle a fui au Canada en 2013 pour lui échapper. Rachele est revenue au Canada en 2012.

[4]               Après que les demanderesses aient fait l’objet d’une ordonnance de renvoi du Canada en raison de leur incapacité de satisfaire aux exigences de résidence pour les résidents permanents, elles ont interjeté appel de cette ordonnance auprès de la Section d’appel de l’immigration (SAI) pour des motifs d’ordre humanitaire. La SAI a rejeté leur appel pour insuffisance d’éléments de preuve. Les demanderesses font valoir que la décision de la SAI était déraisonnable parce qu’elle ne tenait pas compte d’éléments de preuve importants à l’appui de leur appel. Elles me demandent d’annuler la décision de la SAI et de demander à un autre tribunal de réexaminer l’appel.

[5]               Je ne trouve aucun fondement pour infirmer la décision de la SAI. Cette décision était étayée par les éléments de preuve soumis à la SAI. Par conséquent, je dois rejeter la présente demande de contrôle judiciaire.

[6]               La seule question à trancher est de savoir si la décision de la SAI était déraisonnable.

II.                La décision de la SAI

[7]               La SAI a examiné sept facteurs qui étaient pertinents à la demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire.

1.      Ampleur de la non-conformité : Les demanderesses devaient passer 730 jours au Canada sur une période de cinq ans. Mme Chaar et Rachele n’ont passé respectivement que 163 jours et 122 jours au Canada.

2.      Établissement au Canada : Les demanderesses ne se sont établies au Canada qu’en 2012, soit six ans après avoir obtenu leur statut de résidentes permanentes.

3.      Motifs de l’absence : Mme Chaar est demeurée au Liban pour régler des questions familiales, participer à une procédure judiciaire et prendre soin de sa mère malade. Cependant, ces activités ne demandaient pas qu’elle soit au Liban à temps plein. Rachele est demeurée au Liban pour poursuivre ses études universitaires, même si on lui avait dit que ses crédits ne seraient pas reconnus au Canada.

4.      Liens avec le Canada : Tous les membres de la famille immédiate des demanderesses vivent au Canada.

5.      Difficultés auxquelles font face les demanderesses : Si elles retournaient au Liban, les demanderesses auraient à faire face à des difficultés. Cependant, elles sont habituées aux conditions instables de ce pays.

6.      Difficultés auxquelles font face les membres de la famille au Canada : Les demanderesses sont proches des membres de leur famille résidant au Canada, mais ont également vécu de longues périodes de temps séparées de ceux-ci.

7.      Intérêt supérieur de l’enfant : Le plus jeune enfant de Mme Chaar est un adulte qui vit de manière autonome par rapport aux demanderesses.

[8]               En tenant compte de ces facteurs, la SAI a conclu que les demanderesses n’avaient pas été en mesure de présenter suffisamment de facteurs impérieux justifiant leurs absences prolongées du Canada. Par conséquent, il n’y avait pas assez d’éléments de preuve appuyant leur demande de dispense pour des considérations d’ordre humanitaire.

III.             La décision de la SAI était-elle déraisonnable?

[9]               Les demanderesses soutiennent que la décision de la SAI était déraisonnable parce qu’elle n’a pas pris en considération un certain nombre de facteurs importants. Plus particulièrement, elles soutiennent que la SAI n’a pas tenu compte du fait qu’une mesure de renvoi entraînerait la séparation de Rachele d’avec son mari, a rejeté des éléments de preuve associés aux conditions difficiles qui prévalent au Liban, particulièrement pour les femmes, et a fait peu de cas du danger auquel est exposé Mme Chaar par rapport à son mari, dont elle est séparée et qui vit au Liban. Rachele soutient également que la SAI a semblé mal comprendre ses motifs pour poursuivre ses études au Liban plutôt qu’au Canada.

[10]           Je suis en désaccord avec les affirmations des demanderesses. Dans l’ensemble, l’analyse des éléments de preuve par la SAI était adéquate et les conclusions qu’elle a tirées n’étaient pas déraisonnables.

[11]           La SAI était clairement consciente de l’existence du mari de Rachele puisqu’il est mentionné deux fois dans les motifs. Cependant, la SAI n’a pas fait précisément mention de lui dans ses discussions concernant les difficultés touchant les membres de la famille au Canada. Par ailleurs, aucun élément n’a été présenté à la SAI pour démontrer une difficulté pouvant découler de la séparation entre les époux.

[12]           En ce qui a trait aux circonstances au Liban, les demanderesses ont soumis très peu de renseignements à la SAI à ce sujet. Les éléments de preuve qu’elles ont soumis étaient désuets et généraux.

[13]           Pour ce qui est du mari dont Mme Chaar est séparée, elle a affirmé qu’il n’avait pas été violent physiquement avec elle, mais elle craint qu’il lui fasse des menaces si elle retourne au Liban. À mon point de vue, la preuve soumise n’a pas démontré qu’il existe un risque important. Mme Chaar a fourni des éléments de preuve additionnels dans sa demande de contrôle judiciaire, mais ces éléments n’ont pas été soumis à la SAI.

[14]           Rachele a affirmé lors de son témoignage devant la SAI qu’elle croyait que son diplôme au Liban pourrait être reconnu au Canada, et ce, même si ses crédits ne l’étaient pas. La SAI n’a peut-être pas été en mesure d’évaluer correctement cette distinction, mais cette question est un élément mineur dans la cause présentée devant la SAI.

[15]           Les observations formulées par les demanderesses ne me convainquent pas que l’analyse de la SAI était inadéquate ou que les conclusions qu’elle a tirées étaient déraisonnables.

IV.             Conclusion et dispositif

[16]           Les conclusions de la SAI sont justifiables en matière de faits et de droit. Par conséquent, je dois rejeter la présente demande de contrôle judiciaire. Aucune des parties n’a proposé de question de portée générale aux fins de certification, et aucune question n’est mentionnée.


JUGEMENT

LA COUR REND LE JUGEMENT SUIVANT :

1.    La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

2.    Aucune question de portée générale n’est mentionnée.

« James W. O’Reilly »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-1971-15

 

INTITULÉ :

ABLA CHAAR AND RACHELE AYOUB c. MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ, DE L’IMMIGRATION ET DU MULTICULTURALISME

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Halifax (Nouvelle-Écosse)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 12 novembre 2015

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE O’REILLY

 

DATE DES MOTIFS :

Le 6 mai 2016

 

COMPARUTIONS :

M Lee Cohen, Q.C.

 

Pour les demanderesses

 

Melissa Chan

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

M Lee Cohen, Q.C.

Avocat

Halifax (Nouvelle-Écosse)

 

Pour les demanderesses

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Halifax (Nouvelle-Écosse)

 

Pour le défendeur

 

 

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