Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20160321


Dossier : IMM-3081-15

Référence : 2016 CF 338

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 21 mars 2016

En présence de madame la juge Heneghan

ENTRE :

MINHAJ BEGUM RAJ GAFFUR

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]               Mme Minhaj Begum Raj Gaffur (la « demanderesse ») sollicite le contrôle judiciaire d’une décision d’un agent des visas (l’« agent ») qui a déterminé que la demanderesse ne satisfaisait pas aux exigences lui permettant d’obtenir un visa d’étudiant canadien.

[2]               Les faits ci­après exposés sont consignés dans le dossier certifié du tribunal.

[3]               La demanderesse est citoyenne de l’Inde. Elle est née le 2 septembre 1983. Elle s’est mariée le 23 novembre 2005. Son premier enfant est né le 28 août 2006, et son deuxième, le 2 décembre 2009.

[4]               La demanderesse a fréquenté un collège en Inde de juin 2000 à avril 2005 et a obtenu un baccalauréat en littérature anglaise. En décembre 2012, elle a obtenu un baccalauréat en éducation.

[5]               La demanderesse a travaillé en tant que directrice adjointe de restaurant en Inde de septembre 2014 à décembre 2014. Sa demande de permis d’études actuelle est datée du 1er décembre 2014, et elle a présenté cette demande afin de s’inscrire au programme d’hôtellerie et de restauration du collège Fleming à Peterborough, en Ontario, et ce, du 1er décembre 2015 au 30 avril 2016.

[6]               L’agent a refusé la demande au motif que la demanderesse ne répondait pas aux exigences de la Loi sur l’Immigration et la protection des réfugiés, L.C., 2001, ch. 27 (la « Loi ») et du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002­227 (le « Règlement »).  Le refus, énoncé dans une lettre en date du 11 juin 2015, mentionnait [traduction] « d’autres raisons », particulièrement [traduction] « les études que vous proposez ne sont pas raisonnables compte tenu de vos qualifications, vos études antérieures, l’écart entre vos études, vos emplois ou vos perspectives et plans d’avenir ».

[7]               Les notes du Système mondial de gestion des cas (« SMGC »), en date du 11 juin 2015, précisent ce qui suit :

[traduction]

...J’ai examiné les observations quant aux motifs pour le refus antérieur : toutefois, ils n’écartent pas mes préoccupations concernant les études proposées. D’après les renseignements dont je dispose, compte tenu de l’écart entre les études et l’emploi, ainsi que les liens familiaux importants au Canada, je ne suis pas convaincu que les études proposées sont raisonnables en raison des antécédents académiques et professionnels de la DP. La DP n’a pas établi qu’elle est véritablement une étudiante et résidente temporaire qui quitterait le Canada à la fin de son séjour autorisé, en vertu de l’alinéa 216(1)b) du Règlement afférent à la LIPR.
Refusé

[8]               La décision en question, touchant l’appréciation de la preuve par rapport aux critères prévus par la Loi, y compris les critères établis dans le Règlement, soulève une question mixte de fait et de droit, et est susceptible de contrôle selon la norme de la décision raisonnable; voir Lin c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004, 245 F.T.R. 103, aux paragraphes 20 et 21.

[9]               La norme de la décision raisonnable exige qu’une décision soit transparente, justifiable et intelligible; voir Dunsmuir c. Nouveau­Brunswick, 2008, 1 R.C.S. 190, au paragraphe 47.

[10]           Le dossier certifié du tribunal ne contient aucune information au sujet du motif du refus antérieur. Dans ces circonstances, à mon avis, les observations de l’agent, reproduites ci­dessus, ne satisfont pas la norme de la décision raisonnable.

[11]           Le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration (le « défendeur ») soutient que la décision est raisonnable, mais que de toute façon, la Cour ne devrait pas exercer son pouvoir discrétionnaire pour entendre la présente demande, car elle est théorique. Le défendeur soutient que la période pour laquelle la demanderesse voulait un permis d’études est maintenant échue; voilà sur ce qu’il fonde son argument du caractère théorique.

[12]           Je ne puis être d’accord avec ces arguments et me réfère à la décision Chhetri c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011, 2 Imm. L.R. (4th) 326, au paragraphe 4, lorsque le juge Rennie, tel était alors son titre, a affirmé : 

À mon avis, les demandes existantes ne sont pas théoriques. Le second refus n’isolait pas la première décision d’un contrôle. Il subsiste un litige actuel entre les parties quant au caractère approprié des motifs pour lesquels la demande a été rejetée. Il continue d’y avoir un différend entre les parties et il est un fait que la présente décision pourrait avoir un effet pratique. La requête a donc été rejetée et la demande instruite sur le fond.

[13]           Je suis d’accord avec son raisonnement et j’adopte le même en l’espèce. La demande de contrôle judiciaire de la demanderesse n’est pas théorique, et la décision de l’agent ne respecte pas la norme jurisprudentielle de la raisonnabilité. Par conséquent, la présente demande de contrôle judiciaire est accueillie, la décision de l’agent est annulée et l’affaire est renvoyée à un autre agent pour nouvel examen. Cet agent doit tenir dûment compte de l’ensemble de la preuve dont dispose le défendeur relativement à la demande d’un permis d’études de la demanderesse.


JUGEMENT

LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire est accueillie, la décision est infirmée et l’affaire est renvoyée à un agent différent pour nouvel examen. Il n’y a aucune question à certifier.

« E. Heneghan »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-3081-15

INTITULÉ :

MINHAJ BEGUM RAJ GAFFUR c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 10 mars 2016

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE HENEGHAN

DATE DES MOTIFS :

LE 21 MARS 2016

COMPARUTIONS :

Lev Abramovich

pour la demanderesse

Brad Bechard

pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Ali M. Amini

Avocat­procureur

Toronto (Ontario)

Pour la demanderesse

William F. Pentney

Sous­procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

Pour le défendeur

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.