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Date : 20160307


Dossier : IMM-2913-15

Référence : 2016 CF 267

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 7 mars 2016

En présence de monsieur le juge Southcott

ENTRE :

OSATO OSAKPAMWAN,

(BARRY) EGUAKUN ERHARUY JOHNSON

(BEATRICE) EGUAKUN OGHOSA JOHNSON

demandeurs

et

LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire à l’encontre d’une décision rendue le 20 juin 2015 par l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC), décision dans laquelle un agent d’exécution de la loi dans les bureaux intérieurs (l’agent) a refusé la demande des demandeurs visant le report de leur renvoi du Canada au Nigeria.

[2]               Du fait de son caractère théorique, la présente demande est rejetée pour les motifs qui suivent.

I.                   Contexte

[3]               Les demandeurs sont entrés au Canada le 5 mars 2013. La demanderesse principale, Osato Osakpamwan, est citoyenne du Nigeria et a été déclarée résidente permanente de l’Italie en 2004. Ses deux enfants, les demandeurs mineurs, sont nés en 2001 et en 2007, respectivement. Le 25 mars 2013, les demandeurs ont présenté une demande de statut de réfugié au sens de la Convention sur les réfugiés, laquelle demande a été rejetée le 13 novembre 2013 par la Section de la protection des réfugiés (SPR) de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié puisqu’ils ont été exclus en vertu de l’alinéa 1e) de la Convention en raison de leur statut de résident permanent de l’Italie. Le 29 janvier 2014, la Section d’appel des réfugiés (SAR) a rejeté leur appel, et l’autorisation de contester cette décision par voie de contrôle judiciaire leur a par la suite été refusée par la Cour fédérale. Les demandeurs affirment que, depuis leur audience devant la SPR, leur statut de résident permanent en Italie a expiré.

[4]               Par la suite, les demandeurs ont présenté une demande d’examen des risques avant renvoi (ERAR). Le 10 mars 2015, ils se sont vu accorder un report de renvoi de 60 jours afin de permettre le traitement accéléré d’une demande de parrainage conjugal de la demanderesse principale. Cette demande a été rejetée le 26 mars 2015 et a été contestée par voie de contrôle judiciaire.

[5]               Le 18 juin 2015, les demandeurs ont présenté une demande de nouvel ERAR au motif que le risque que présentait leur retour au Nigeria n’avait jamais été évalué, puisque la SPR, la SAR et l’agent responsable de l’ERAR n’avaient tenu compte que du risque que présentait leur retour en Italie. Les demandeurs ont également demandé que soit reporté leur renvoi au Nigeria afin que leur demande de contrôle judiciaire puisse être traitée, afin de permettre un nouvel ERAR et dans l’intérêt supérieur des enfants qui ont vécu leurs années formatrices au Canada.

[6]               Le 19 juin 2015, l’agent a rendu la décision quant au rejet de la demande de report. Le 22 juin 2015, les demandeurs ont présenté une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire, demandant à la Cour le sursis de leur renvoi. Cependant, l’ASFC a par la suite annulé leur renvoi au Nigeria; les demandeurs ont donc continué à vivre au Canada. Le contrôle judiciaire concernant la décision liée à la demande de parrainage conjugal a également été résolu, et la demande de parrainage est actuellement soumise à un nouvel examen. Aucune des parties n’a de renseignements au sujet du statut de la demande des demandeurs relativement au nouvel ERAR.

II.                Décision contestée

[7]               L’agent a souligné que la demande de contrôle judiciaire en traitement concernant le parrainage conjugal n’empêchait pas l’exécution d’une ordonnance de renvoi. Les demandeurs n’ont présenté aucun élément de preuve indiquant qu’il leur serait impossible de donner suite à leur demande de contrôle judiciaire de l’extérieur du Canada suivant l’exécution de l’ordonnance de renvoi. De plus, ils n’ont présenté aucun élément de preuve démontrant que Citoyenneté et Immigration Canada avait accepté de réviser l’ERAR et qu’une décision était imminente.

[8]               Enfin, l’agent a précisé que présenter une demande de report de renvoi à un agent d’exécution de la loi dans les bureaux intérieurs ne constituait pas la procédure appropriée pour faire des allégations quant au risque qui pourrait raisonnablement avoir été soulevé auprès de la SPR et au cours du processus d’ERAR, en l’occurrence le risque auquel pourraient être exposés les demandeurs au Nigeria. Les éléments de preuve présentés après que la décision relative à l’ERAR eut été rendue n’ont pas suffi à convaincre l’agent que les demandeurs seraient exposés, au Nigeria, à un risque justifiant le report de leur renvoi.

[9]               L’agent a également indiqué qu’il était réceptif et sensible à l’intérêt supérieur des demandeurs mineurs, mais il a souligné que la demanderesse principale avait pris des dispositions pour voyager avec ses enfants et que rien n’indiquait qu’en tant que parent ayant la garde exclusive, elle ne serait pas en mesure de veiller à leur intérêt supérieur.

[10]           Après avoir examiné tous les éléments de preuve présentés, l’agent a déterminé qu’ils ne suffisaient pas à établir la nature exceptionnelle de l’affaire et qu’ils ne justifiaient pas le report du renvoi du Canada.

III.             Questions en litige et norme de contrôle

[11]           Les demandeurs soumettent à la Cour les questions suivantes aux fins d’examen :

A.                L’agent a­t­il commis une erreur en rejetant la demande de report des demandeurs alors que le renvoi de ceux­ci les exposera à un danger de mort, des sanctions extrêmes ou un traitement inhumain?

B.                 L’agent a­t­il omis de tenir compte d’éléments de preuve pertinents ou les a­t­il mal interprétés?

C.                 L’agent a­t­il commis une erreur en ne se montrant pas réceptif, attentif et sensible à l’intérêt supérieur à court terme du fils de la demanderesse principale?

D.                L’agent a­t­il commis une erreur en ne tenant pas compte des nouveaux risques soulevés par les demandeurs à la suite du premier ERAR, lesquels risques justifiaient un nouvel examen?

E.                 L’agent a­t­il effectué une analyse raisonnable de la justification de la décision, ainsi que de la transparence et de l’intelligibilité du processus de prise de décision, et sa décision devrait­elle être maintenue?

F.               Les erreurs cumulatives faites par l’agent rendent­elles sa décision injuste ou constituent­elles des erreurs fondamentales relativement aux questions soulevées en l’espèce et, par conséquent, justifient­elles qu’un nouvel examen soit effectué par un autre agent?

[12]           La norme de contrôle applicable dans le cadre de la présente demande est la norme de la décision raisonnable (Dunsmuir c. Nouveau­Brunswick [Conseil de gestion], 2008 RCS 9, au paragraphe 47).

[13]           Selon les arguments énoncés ci­dessous, je conclus que les questions à examiner en l’espèce sont les suivantes :

A.                La demande est­elle de nature théorique?

B.                 La décision de l’agent était­elle raisonnable?

IV.             Observations des parties

(1)               La demande est­elle de nature théorique?

A.                 Position du défendeur

[14]           Le défendeur souligne que le renvoi des demandeurs a été annulé par l’ASFC et qu’ils continuent de vivre au Canada en attendant l’issue de l’ERAR et de la demande de parrainage de la demanderesse principale. Ainsi, le principal résultat que souhaitaient obtenir les demandeurs en s’adressant à la Cour, soit le report de leur renvoi, a été obtenu, rendant ainsi théorique la demande de contrôle judiciaire. Le défendeur se fonde sur l’arrêt Borowski c. Canada (Procureur général), [1989] 1 RCS 342 [Borowski].

B.         Position des demandeurs

[15]           Pour étayer leur position selon laquelle la Cour devrait tout de même entendre la présente demande et statuer sur celle­ci malgré l’annulation de leur renvoi, les demandeurs soutiennent qu’un rapport d’opposition demeure entre les parties quant aux circonstances dans lesquelles les demandeurs pourraient être renvoyés du Canada. Il reste à déterminer si les demandeurs peuvent être renvoyés du Canada vers le Nigeria avant que soit réalisé l’examen du risque que présente leur retour au Nigeria.

[16]           Sur le plan de l’économie des ressources judiciaires, les demandeurs font valoir que les deux parties ont déjà consacré des ressources importantes à la demande et, compte tenu du fait que le défendeur n’a pas indiqué qu’il n’était pas prévu de les renvoyer avant la réalisation du deuxième ERAR, les questions soulevées en l’espèce risquent de l’être de nouveau dans un litige subséquent si l’on tente de nouveau de les renvoyer.

[17]           Enfin, les demandeurs soutiennent que le fait, pour la Cour, de statuer sur les questions soulevées en l’espèce ne signifierait pas qu’elle empiète sur la fonction législative.

(2)               La décision de l’agent était­elle raisonnable?

A.                 Position des demandeurs

[18]           Les demandeurs soutiennent qu’ils ne sont pas dans une situation où il serait possible de remédier aux conséquences négatives d’un renvoi en les admettant de nouveau au Canada. L’agent aurait plutôt dû tenir compte du nouvel élément de preuve fourni par les demandeurs dans leur demande de report présentée à la suite de la décision rendue lors du premier ERAR, lequel élément de preuve indiquait qu’ils seraient exposés à un risque de préjudice personnel grave s’ils devaient retourner au Nigeria. Les demandeurs soulignent que seul le risque que présentait leur retour en Italie a été évalué. L’agent aurait donc dû reporter le renvoi jusqu’à ce que l’Unité des ERAR ait eu l’occasion de réévaluer les risques à la lumière des nouveaux renseignements précisant que le pays visé par le renvoi est le Nigeria. Les demandeurs s’appuient sur l’arrêt Canada (Sécurité publique et Protection civile) c. Shpati, 2011 CAF 286, au paragraphe 52, ainsi que sur le jugement Etienne c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2015 CF 415, aux paragraphes 53 à 55.

[19]           Enfin, les demandeurs soutiennent que l’agent a commis une erreur an évaluant l’intérêt supérieur des enfants touchés par la décision.

B.                 Position du défendeur

[20]           Le défendeur soutient que l’agent a examiné l’affaire et qu’il a déterminé que les éléments de preuve ne suffisaient pas à conclure que les demandeurs seraient exposés à un risque réel au Nigeria.

[21]           L’agent a également fait remarquer qu’aucun élément de preuve n’avait été présenté pour indiquer que la demande d’ERAR des demandeurs serait réévaluée. Compte tenu du fait que la simple présentation d’une demande à la Cour n’a pas nécessairement d’incidence sur le processus normal d’immigration et n’empêche pas le défendeur de faire exécuter une ordonnance de renvoi, il était raisonnable pour l’agent de ne pas reporter le renvoi.

[22]           Le défendeur soutient également qu’il n’est pas du ressort de l’agent d’effectuer une évaluation complète des considérations d’ordre humanitaire. Le défendeur fait valoir que les demandeurs n’ont pas présenté de demande d’évaluation des considérations d’ordre humanitaire durant leur séjour au Canada et il soutient qu’ils n’ont pas présenté suffisamment d’éléments de preuve démontrant qu’il existait des circonstances pressantes concernant les demandeurs mineurs.

V.                Analyse

[23]           Ma décision est de rejeter la demande en raison de son caractère théorique. Les parties font toutes deux références à l’arrêt Borowski en ce qui concerne les principes régissant l’analyse du caractère théorique par la Cour. Dans la décision rendue récemment dans le jugement Harvan c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 1026, le juge Diner a succinctement décrit les principes applicables tirés de l’arrêt Borowski :

[7]        Le critère du caractère théorique comporte une analyse en deux temps. Dans un premier temps, il faut déterminer si la décision de la Cour aurait un effet pratique qui permettrait de résoudre un litige actuel entre les parties : la Cour se demande si les questions sont devenues purement théoriques et si le différend a disparu, auquel cas le débat est devenu théorique. Dans un deuxième temps, si le critère de la première étape est rempli, la Cour décide si elle doit – malgré le fait que l’affaire est théorique – exercer son pouvoir discrétionnaire d’entendre l’affaire. Dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire à la seconde étape, la Cour doit être guidée par les trois assises de la doctrine du caractère théorique :

i. l’existence d’un débat contradictoire;

ii. le souci d’économie des ressources judiciaires;

iii. la question de savoir si la Cour empiéterait sur la fonction législative plutôt que d’exercer sa fonction juridictionnelle au sein du gouvernement.

[Voir l’arrêt Borowski c. Canada (Procureur général), [1989] 1 RCS 342, aux paragraphes 15 à 17 et 29 à 40 (Borowski).]

[24]           Les demandeurs reconnaissent que la présente demande a un caractère théorique aux fins de la première étape de l’analyse du critère établi dans l’arrêt Borowski. Je suis d’accord avec la position des demandeurs, leur renvoi du Canada ayant été reporté. Par conséquent, une décision à savoir si l’agent avait précédemment commis une erreur en refusant de reporter leur renvoi ne peut avoir aucun effet pratique qui permettrait de résoudre un litige actuel entre les parties.

[25]           Je dois donc passer maintenant à la deuxième étape de l’analyse du critère énoncé dans l’arrêt Borowski, c’est­à­dire exercer mon pouvoir discrétionnaire de statuer sur l’affaire, nonobstant le caractère théorique de celle­ci. La première assise de la doctrine du caractère théorique consiste à déterminer s’il existe un débat contradictoire entre les parties. Les demandeurs font remarquer qu’aucune décision n’a été rendue relativement à leur demande de nouvel ERAR; ils ne savent pas si un nouvel examen sera effectué. Ils ne savent pas non plus quelle sera l’issue de la demande de parrainage conjugal. Ils craignent de se retrouver éventuellement dans la même situation qu’au moment où la décision contestée a été rendue et de faire l’objet d’une ordonnance de renvoi. Ils soutiennent qu’il s’agit là d’un débat contradictoire aux termes de l’arrêt Borowski.

[26]           Pour examiner cette question, je m’appuie sur la décision rendue dans le jugement Azhaev c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2014 CF 219 (Azhaev), dans lequel le juge Manson a conclu ce qui suit quant à l’assise de la doctrine relative à l’existence d’un débat contradictoire dans le contexte d’une décision de report devenue théorique :

[22]      Bien que la Cour ait le pouvoir discrétionnaire de statuer sur le bien­fondé de la présente demande, selon les principes énoncés dans l’arrêt Borowski, je ne suis pas d’accord avec le demandeur sur l’existence d’un contexte contradictoire dans la présente affaire. Dans l’arrêt Borowski, la Cour suprême a décrit le contexte contradictoire comme un contexte où surviennent des « conséquences accessoires » dans des instances connexes. Par exemple, si le règlement d’une question dans le cadre d’une affaire qui serait devenue théorique pouvait éventuellement donner lieu à un recours en responsabilité ou à une poursuite dans une instance connexe entre les parties, cela signifie que le contexte contradictoire existe toujours entre les parties. Dans la présente affaire, aucune conséquence accessoire ne découlera de la décision de savoir si l’agent a fait erreur.

[27]           En l’espèce, je ne considère pas que les demandeurs peuvent établir que des conséquences accessoires découleront de la décision de savoir si l’agent a commis une erreur en rendant la décision de report contestée. Comme le fait valoir le défendeur, les demandeurs vivent actuellement au Canada et leur renvoi n’est pas prévu. L’issue de la demande de parrainage et de la demande de nouvel ERAR est inconnue. Même si les demandeurs pourraient éventuellement faire l’objet d’une nouvelle ordonnance de renvoi, une telle situation demeure tout à fait hypothétique pour le moment. En outre, la Cour ignore quel est l’état ou quelle sera l’issue de la demande de parrainage et de l’ERAR. Elle ignore également quelles pourraient être les circonstances pertinentes si une nouvelle ordonnance de renvoi devait être rendue.

[28]           Actuellement, rien ne permet de conclure que les demandeurs font l’objet de conséquences accessoires découlant des erreurs qui auraient été commises dans la décision de report contestée. Si, à l’avenir, les demandeurs font l’objet d’une nouvelle ordonnance de renvoi et qu’ils présentent une demande de report, l’agent d’exécution de la loi chargé de l’examen de la demande devra tenir compte des circonstances existantes à ce moment, et si le report est refusé, toute contestation de ce refus devrait être faite dans le contexte de ces circonstances et des motifs de ce refus en particulier. Puisque ces événements futurs ne sont actuellement qu’hypothétiques, je considère que l’assise relative à l’existence d’un débat contradictoire, établie dans l’arrêt Borowski, ne s’applique pas en l’espèce.

[29]           En ce qui concerne la deuxième assise de la doctrine établie dans l’arrêt Borowski, soit le souci d’économie des ressources judiciaires, les demandeurs soutiennent que les parties et la Cour ont déjà consacré des ressources considérables à la préparation et à l’audition de la demande. Une fois de plus, il est utile de tenir compte de l’analyse de ce facteur faite par la Cour dans le jugement Azhaev. Aux paragraphes 23 et 24 de ce jugement, le juge Manson a déclaré ce qui suit :

[23]      Le deuxième facteur énoncé dans l’arrêt Borowski, à savoir l’économie des ressources judiciaires, est aussi défavorable au demandeur. Dans un sens, le souci des ressources judiciaires exige qu’on évite de gaspiller des ressources judiciaires limitées si la question est purement théorique (arrêt Borowski, au paragraphe 34). Ce facteur n’est pas pertinent en l’espèce étant donné que les ressources judiciaires ont déjà été consacrées à la présente affaire. Toutefois, dans l’arrêt Borowski, le juge estime qu’il est justifié d’affecter des ressources judiciaires pour résoudre tout flou dans la loi afin de favoriser la prompte résolution de litiges semblables éventuels (arrêt Borowski, au paragraphe 35). L’argument qu’a présenté le demandeur à la Cour en faveur de l’exercice du pouvoir discrétionnaire est essentiellement fondé sur ce principe. Il soutient qu’il sera utile aux futurs plaideurs, lui­même y compris, de clarifier la jurisprudence relative aux « circonstances personnelles impérieuses » qui justifient le sursis d’une mesure de renvoi. Cependant, la Cour suprême dans l’arrêt Borowski a précisément fait une mise en garde contre l’application de ce facteur de la manière préconisée par le demandeur, au paragraphe 36 :

Le simple fait, cependant, que la même question puisse se présenter de nouveau, et même fréquemment, ne justifie pas à lui seul l’audition de l’appel s’il est devenu théorique. Il est préférable d’attendre et de trancher la question dans un véritable contexte contradictoire, à moins qu’il ressorte des circonstances que le différend aura toujours disparu avant d’être résolu.

[24]      J’estime que ce facteur milite également contre l’audition de la présente demande.

[30]           Tout comme dans le jugement Azhaev, les ressources de la Cour ont déjà été consacrées à l’audition de la demande. Pour ce motif, le juge Manson a estimé que le facteur concernant l’économie des ressources judiciaires n’était pas pertinent. Toutefois, il a également examiné ce facteur du point de vue avancé par le demandeur dans cette affaire, à savoir que statuer sur la question théorique pourrait favoriser la prompte résolution de litiges semblables éventuels, qu’il touche le demandeur lui­même ou d’autres plaideurs. D’une certaine façon, il s’agit du même argument que celui avancé par les demandeurs en l’espèce, pas parce qu’il serait utile de clarifier la jurisprudence dans l’intérêt des plaideurs en général, mais parce qu’une décision rendue à l’égard des erreurs qui auraient été commises dans la décision de report aiderait les demandeurs s’ils devaient de nouveau faire l’objet d’une ordonnance de renvoi à l’avenir.

[31]           J’en arrive à la même conclusion que la Cour dans le jugement Azhaev. Rien n’indique qu’il s’agit du type de différend qui aura toujours disparu avant d’être résolu. Il est donc préférable d’attendre et de trancher les questions soulevées par les demandeurs dans un véritable contexte contradictoire si elles surviennent de nouveau.

[32]           Je suis d’accord avec les demandeurs sur le fait que la troisième assise de la doctrine établie dans l’arrêt Borowski, soit l’intervention dans la fonction législative, ne s’applique pas en l’espèce même s’il serait sans doute en faveur des demandeurs. Cependant, les deux premiers facteurs sont défavorables aux demandeurs et, après examen des trois facteurs, je ne considère pas que la Cour devrait exercer son pouvoir discrétionnaire et statuer sur la demande, nonobstant son caractère théorique.

[33]           Aucune des parties n’a proposé de question de portée générale aux fins de certification en vue d’un appel.


JUGEMENT

LA COUR STATUE que la présente demande est rejetée. Aucune question n’est certifiée aux fins d’appel.

« Richard F. Southcott »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-2913-15

INTITULÉ :

OSATO OSAKPAMWAN, (BARRY) EGUAKUN ERHARUY JOHNSON ET (BEATRICE) EGUAKUN OGHOSA JOHNSON c. LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

LIEU DE L’AUDIENCE :

TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L’AUDIENCE :

le 18 février 2016

JUGEMENT ET MOTIFS :

Le juge Southcott

DATE DES MOTIFS :

Le 7 mars 2016

COMPARUTIONS :

Don Maierovitz

Pour les demandeurs

Laoura Christodoulides

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Don Maierovitz

Avocat­procureur

Toronto (Ontario)

Pour les demandeurs

William F. Pentney

Sous­procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

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