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Date : 20160114


Dossier : T-474-15

Référence : 2016 CF 41

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 14 janvier 2016

En présence de monsieur le juge O’Keefe

ENTRE :

WING KAI LEUNG

MAN KI LEUNG

demandeurs

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

[1]               Le demandeur, Wing Kai Leung (le demandeur principal) et sa femme, Wan Chun Kon, demandent à la Cour d’annuler la décision du premier secrétaire (Immigration) à l’ambassade du Canada à Beijing, en Chine, en date du 9 février 2015, qui a rejeté la demande de citoyenneté canadienne pour la fille du demandeur principal, Man Ki Leung (Man Ki), en vertu de l’article 5.1 de la Loi sur la citoyenneté, L.R.C. 1985, ch. C­29, version modifiée (la Loi).

I.                   Faits

[2]               Le demandeur principal est un citoyen de Hong Kong et du Canada. Sa femme est citoyenne de la Chine. Le demandeur principal a deux enfants : un fils biologique et une fille adoptée. Le 18 septembre 2012, le demandeur principal a présenté une demande de citoyenneté canadienne pour une personne adoptée par un citoyen canadien au nom de sa fille, Man Ki. Ils souhaitent s’installer au Canada et prétendent que la demande de citoyenneté vise à faciliter ce processus.

[3]               Le demandeur principal allègue que sa femme et lui ont adopté leur fille après qu’elle a été trouvée, bébé, abandonnée à l’extérieur d’un foyer pour personnes âgées à Jiujiang, en Chine, au début de 2007. La femme du demandeur principal a appris l’existence du bébé par l’amie de sa sœur aînée, Chen Ai Zhen, qui travaillait au foyer pour personnes âgées. Au début, Man Ki est restée avec la sœur aînée de la femme du demandeur principal à Jiujiang, mais est ensuite allée vivre avec la femme du demandeur principal à Shenzhen. À l’époque, le demandeur principal travaillait à Hong Kong la semaine et retournait auprès de sa famille la fin de semaine.

[4]               Après avoir suivi les procédures requises, le demandeur principal a reçu un certificat d’adoption de la République de Chine en date du 12 juillet 2010.

[5]               Les faits concernant le processus de vérification, mené par l’agent, des faits susmentionnés sont comptabilisés sous la rubrique Décision.

II.                Décision

[6]               Dans une décision datée du 9 février 2015, l’agent a rejeté la demande du demandeur principal.

[7]               L’agent a expliqué que le demandeur principal, sa femme et sa fille avaient été interrogés le 18 avril 2014. Le défendeur fait remarquer que l’entrevue a soulevé certaines incohérences entre les demandeurs et des lacunes de la preuve, en particulier les suivantes : le demandeur principal connaissait peu de détails sur le processus d’adoption; la femme du demandeur principal confondait les dates concernant l’adoption de sa fille; et le demandeur principal et sa femme ont fourni des éléments de preuve incompatibles quant à savoir si l’enfant vivait à l’institut de protection de l’enfance, comme cela est indiqué sur le formulaire de demande.

[8]               Afin de confirmer les déclarations du demandeur principal, l’agent a expliqué que le foyer pour personnes âgées où la fille aurait été trouvée avait été contacté. Le directeur du foyer a d’abord déclaré qu’il y travaillait en 2007, que le foyer accueillait des personnes âgées, et non pas des orphelins, et qu’il ne se souvenait pas d’une petite fille abandonnée en 2007. Lorsqu’on lui a posé la question au sujet de Chen Ai Zhen, le directeur a répondu qu’il n’avait jamais entendu ce nom.

[9]               Toutefois, lorsque le directeur a appris que le but de l’appel était le statut d’immigration de la petite fille au Canada, il a déclaré qu’il ne travaillait pas au foyer en 2007 et qu’il s’adresserait à l’ancien directeur.

[10]           L’ancien directeur déclara qu’il travaillait dans l’établissement en 2007. Il demanda si la petite fille se prénommait « Liang » et déclara que Chen Ai Zhen, une infirmière qui travaillait à temps partiel au foyer en 2007, avait recueilli la petite fille en 2007. Il fit remarquer que la petite fille n’était restée au foyer qu’une demi­journée environ et que des bébés étaient souvent abandonnés à l’extérieur de l’établissement, lequel se trouve à proximité d’une université. À la question de savoir qui avait emmené la petite fille, il répondit qu’il lui semblait que c’était une « personne responsable » à Shenzen, qui était de Jiujiang. Lorsqu’on lui demanda comment cette personne avait été mise au courant de l’existence du bébé, l’ancien directeur répondit qu’il avait quelque chose d’urgent à faire et raccrocha.

[11]           L’agent a déclaré que grâce à une recherche effectuée sur Internet, son bureau a pu communiquer avec une consultante au sein du foyer pour personnes âgées. La consultante déclara qu’elle travaillait au foyer pour personnes âgées en 2007 et avant de raccrocher, elle indiqua qu’aucune petite fille n’avait été abandonnée en 2007.

[12]           L’agent a noté ses préoccupations à la suite de l’entrevue et de vérifications par téléphone, lesquelles portent sur les aspects suivants : l’adoption est dans l’intérêt supérieur de l’enfant; l’adoption visait principalement l’acquisition d’un statut ou d’un privilège relatifs à l’immigration ou à la citoyenneté; les parents de l’enfant ont donné leur consentement libre et éclairé à l’adoption avant l’adoption; et l’adoption avait pour objet la traite de l’enfant ou la réalisation d’un gain indu au sens de la Convention de La Haye sur l’adoption. Il a expliqué avoir fait part de ces préoccupations au demandeur principal le 2 juin 2014 et avoir donné à ce dernier l’occasion de présenter des arguments.

[13]           En guise de réponse, le demandeur principal fournit une déclaration. Il fit remarquer que des bébés étaient fréquemment abandonnés en Chine et que souvent, aucun processus officiel n’était appliqué. Il déclara que l’adoption devait être officialisée aux fins d’obtention du statut de résidence à Hong Kong et des avantages fiscaux pour sa fille. Il déclara qu’il ne savait pas comment sa femme avait géré l’adoption, mais qu’elle avait « démêlé » les différentes procédures d’adoption officielle. Il expliqua qu’il avait eu de la difficulté à remplir la section relative à la résidence du formulaire de demande parce que sa fille était officiellement placée sous la responsabilité du foyer pour personnes âgées, mais que cette organisation l’avait à peine recueillie. Il expliqua également que la sœur de sa femme avait aidé à prendre soin du bébé jusqu’à ses deux ans environ.

[14]           L’agent expliqua que les arguments des demandeurs n’avaient pas permis de répondre à ses préoccupations. L’agent a estimé que l’enfant du demandeur principal ne répondait pas aux exigences des alinéas 5.1(1)a) et d) de la Loi.

[15]           Les notes du Système mondial de gestion des cas expliquent par ailleurs que compte tenu du fait que l’adoption est un événement exceptionnel dans la vie d’une personne, l’agent a estimé que l’explication du demandeur principal en ce qui concerne la provenance de son enfant était invraisemblable et qu’il ignorait les détails entourant l’adoption de sa fille. Compte tenu des réponses évasives données par le demandeur principal lors de l’entrevue, des résultats de la vérification téléphonique, des contradictions dans les déclarations de l’épouse du demandeur principal durant l’entrevue et dans la déclaration du demandeur principal en réponse à la lettre d’équité procédurale, il n’y avait pas suffisamment de preuves pour démontrer que l’adoption était dans l’intérêt supérieur de l’enfant, que l’adoption ne visait pas principalement l’acquisition d’un statut ou d’un privilège relatifs à la citoyenneté ou à l’immigration, et que, avant l’adoption, les parents de l’enfant avaient donné leur consentement libre et éclairé à l’adoption. L’agent a également conclu que rien ne prouvait que l’adoption n’avait pas pour objet la traite de l’enfant ou la réalisation d’un gain indu.

III.             Questions en litige

[16]           Les demandeurs déclarent que la décision est déraisonnable pour les raisons suivantes :

1.                  Aucune question n’a été soulevée quant à la légalité de l’adoption, mais des préoccupations ont été soulevées relativement à la « provenance » de la fille du demandeur principal;

2.                  Le critère d’une adoption de complaisance n’est pas rencontré;

3.                  La conclusion concernant l’intérêt supérieur de l’enfant n’est pas raisonnable;

4.                  La conclusion concernant le consentement des parents biologiques ne tient pas compte de la preuve; et

5.                  La conclusion concernant la traite de l’enfant et la réalisation d’un gain indu n’est pas raisonnable.

IV.             Observations écrites des demandeurs

A.                Légalité de l’adoption

[17]           Les demandeurs soutiennent que l’agent n’a pas rejeté la demande sur la base de l’alinéa 5.1(1)c) de la Loi. L’agent était apparemment convaincu que l’adoption était juridiquement valable. Toutefois, l’agent a soulevé des préoccupations quant à la « provenance » de la fille du demandeur principal. Étant donné que le gouvernement de la Chine était convaincu que l’adoption était légitime et que le demandeur principal et son épouse étaient admissibles à l’adopter, les préoccupations de l’agent en ce qui concerne la provenance de la fille du demandeur principal étaient déraisonnables.

B.                 Critère de l’adoption de complaisance

[18]           Les demandeurs soutiennent que la décision n’explique pas la conclusion selon laquelle l’adoption est une adoption de complaisance ni comment cette conclusion ressort de la preuve. Les demandeurs prétendent que le critère d’une adoption de complaisance n’est rencontré que dans les cas les plus clairs. Young c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2015 CF 316 [Young] stipule que le seuil à franchir pour pouvoir conclure qu’une adoption visait principalement l’acquisition d’un avantage en matière d’immigration ou de citoyenneté est élevé. La Cour d’appel fédérale a fait remarquer dans Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Dufour, 2014 CAF 81 [Dufour] qu’une adoption de complaisance ne vise généralement que la situation où les parties n’ont pas une véritable intention de créer un lien de filiation (aux paragraphes 55 et 56).

[19]           Les demandeurs soutiennent que l’agent n’a pas justifié la conclusion selon laquelle il n’y avait pas de véritable intention de créer un lien de filiation et n’a pas révélé de problèmes relativement au lien de filiation.

[20]           Les demandeurs prétendent que la section 11.10 du guide CP14 [guide CP14] de Citoyenneté et Immigration Canada [CIC] fournit une liste des facteurs qui peuvent être pris en compte dans l’identification des adoptions de complaisance. Les demandeurs affirment qu’aucun de ces facteurs n’a été évalué par l’agent. Bien qu’ils n’aient pas force de loi, les facteurs sont importants et leur importance a été reconnue par la Cour d’appel fédérale dans Dufour (au paragraphe 57).

[21]           D’après les demandeurs, le dossier appuie le fait que le demandeur principal et son épouse ont une autorité complète et totale sur leur fille, qu’ils sont ses parents légaux et que c’est le cas depuis 2007.

[22]           En outre, les demandeurs font valoir que pour conclure qu’une adoption est une adoption de complaisance, il faut inférer une intention malveillante, sur la base des faits dûment prouvés et non pas de spéculations, de la part des parents (Dufour, au paragraphe 60).

[23]           Les demandeurs soutiennent que le processus de vérification par téléphone utilisé par l’agent ne respecte pas la norme requise pour conclure qu’il s’agit d’une adoption de complaisance. Il semble que le représentant de CIC ne se soit pas présenté dès le début de l’appel téléphonique, ce qui aurait pu raisonnablement faire en sorte que les employés du foyer pour personnes âgées soient réticents à admettre qu’ils ont logé un enfant abandonné. Lorsque le représentant de CIC s’est présenté, il fut mis en relation avec l’ancien directeur, qui a vérifié les déclarations du demandeur principal et de la femme de ce dernier.

[24]           De plus, les demandeurs soutiennent qu’il ressort clairement de l’entretien que le demandeur principal ne savait pas grand­chose du processus d’adoption parce qu’il travaillait à Hong Kong au moment de l’adoption.

[25]           Les demandeurs prétendent que le fait de tirer une inférence d’une contradiction dans la preuve, à savoir que l’adoption était une adoption de complaisance, s’apparente à de la spéculation (Young, aux paragraphes 21 et 22). L’agent n’a pas tenu compte des motifs de l’adoption autre que l’acquisition d’un statut ou d’un privilège au Canada (Smith c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2014 CF 929, aux paragraphes 62 à 65 [Smith]). Les demandeurs font valoir qu’il n’y a aucune preuve pour étayer qu’il s’agissait d’une adoption de complaisance et l’agent n’aborde pas la raison logique qui explique l’adoption; permettre à Man Ki de venir rejoindre sa famille au Canada.

C.                 Intérêt supérieur de l’enfant

[26]           Les demandeurs soutiennent que la décision n’explique pas la conclusion tirée par l’agent, à savoir en quoi l’adoption n’est pas dans l’intérieur supérieur de l’enfant et comment cette conclusion ressort de la preuve.

[27]           En outre, les demandeurs prétendent que l’adoption est dans l’intérêt supérieur de Man Ki et que l’agent n’a pas vu cet aspect­là. La preuve étaye le fait que Man Ki est heureuse, que l’on s’occupe bien d’elle et qu’elle désigne le demandeur et sa femme comme ses parents.

D.                Consentement des parents biologiques

[28]           Les demandeurs affirment que la preuve démontre que les parents biologiques de Man Ki ont été recherchés et qu’ils étaient introuvables. Ils ont fourni l’annonce qui est parue dans les journaux au sujet des parents de Man Ki, le certificat d’adoption qui stipule que les parents étaient introuvables et le demandeur a expliqué dans deux lettres à l’agent que les parents étaient introuvables.

[29]           Les demandeurs soutiennent que la décision de l’agent est déraisonnable du fait que ce dernier n’a pas tenu compte de la preuve susmentionnée, ce qui contredit la conclusion établie.

E.                 Traite de l’enfant et gain indu

[30]           Les demandeurs prétendent que, contrairement à la section 12.9 du guide CP14, l’agent n’a cité aucune preuve voulant que Man Ki ait été enlevée, vendue ou qu’elle ait fait l’objet d’un gain financier indu. Compte tenu de la gravité d’une conclusion au titre de l’alinéa 5.1(1)d) de la Loi, cette erreur était grave. En outre, contrairement à la section 12.9 du guide CP14, il ne semble pas que l’Examen des cas de citoyenneté de la Direction générale du règlement des cas ait été contacté, ce qui constitue également une erreur.

V.                Observations écrites du défendeur

A.                Légalité de l’adoption

[31]           Le défendeur soutient que le pouvoir discrétionnaire de l’agent ne doit pas être entravé par l’existence de documents d’adoption valides. Il était raisonnable que l’agent remette en question les origines de la fille du demandeur principal et qu’il juge que son adoption ne répondait pas aux exigences de la Loi. En outre, le défendeur déclare que même si l’adoption était juridiquement valable, elle devait aussi être dans l’intérêt supérieur de l’enfant.

B.                 Critère de l’adoption de complaisance

[32]           Le défendeur soutient que la décision ne reposait pas sur des spéculations. Compte tenu du caractère vague et contradictoire de la preuve et à la suite de la procédure de vérification par téléphone, l’agent n’était pas convaincu que l’adoption ne visait pas principalement l’immigration.

[33]           Le défendeur soutient que dans Dufour, la Cour d’appel fédérale a statué que parce que la preuve directe de la fraude était rare, l’agent devait souvent inférer une intention malveillante de toutes les circonstances pertinentes. Il était raisonnable pour l’agent de déduire qu’il pourrait s’agir d’une adoption de complaisance sur la base de la preuve et du processus de vérification par téléphone. Le défendeur avance que l’agent n’a pas fondé cette conclusion uniquement sur les documents au dossier (comme dans Dufour) ou sur l’entrevue (comme dans Young), mais plutôt sur les entrevues, les éléments de preuve, le processus de vérification par téléphone et le manque d’explications raisonnables fournies par le demandeur principal et sa femme pour les incohérences qui ont été révélées.

[34]           Le défendeur soutient que le fait que les demandeurs aient invoqué Dufour pour la proposition selon laquelle il doit y avoir des preuves claires d’une adoption de complaisance est déplacée, car cette décision était fondée sur le paragraphe 5.1(3) de la Loi et, dans ce cas, la Cour a jugé il y avait un véritable lien de filiation et que l’adoption était dans l’intérêt supérieur de l’enfant. Étant donné que ces constatations n’ont pas été faites en l’espèce et que la décision reposait sur le paragraphe 5.1(1), une approche moins stricte à l’égard d’une constatation d’adoption de complaisance est raisonnable.

C.                 Intérêt supérieur de l’enfant

[35]           Le défendeur fait valoir que l’agent a conclu que les demandeurs n’avaient pas démontré que l’adoption était dans l’intérêt supérieur de l’enfant en raison des éléments de preuve vagues et incohérents fournis par le demandeur principal et sa femme au sujet des origines de leur fille et du processus d’adoption. Notamment :

1.                  Le demandeur principal a donné peu de détails sur l’adoption;

2.                  La femme du demandeur principal a confondu les dates concernant l’adoption de sa fille;

3.                  Le demandeur principal a fourni des éléments de preuve incompatibles quant à savoir si l’enfant vivait à l’institut de protection de l’enfance, comme cela est indiqué sur le formulaire de demande;

4.                  Le demandeur principal ignorait que la sœur de sa femme avait trouvé le bébé.

[36]           La vérification téléphonique n’a pas permis de résoudre les préoccupations de l’agent suscitées par la preuve. Elle a révélé des réponses contradictoires au sujet de l’abandon présumé de l’enfant.

[37]           Les arguments des demandeurs en réponse à la lettre d’équité de l’agent n’ont pas résolu les préoccupations. Ces réponses n’ont pas résolu les incohérences révélées par le processus de vérification par téléphone et on ne sait toujours pas comment la fille du demandeur principal a été trouvée et adoptée. Le demandeur principal a simplement expliqué que sa femme et la sœur de celle­ci avaient « démêlé les différentes procédures d’adoption officielle » et avait dû chercher une organisation reconnaissant le bébé abandonné pour pouvoir procéder à l’adoption. Le demandeur principal a expliqué qu’étant de Hong Kong, il ne connaissait pas la procédure et avait donc eu de la difficulté à remplir la section portant sur l’historique de résidence de sa fille, étant donné qu’elle était officiellement sous la responsabilité du foyer pour personnes âgées, mais que cette organisation l’avait à peine recueillie.

[38]           Le défendeur soutient que l’explication donnée maintenant par les demandeurs, à savoir que les employés du foyer pour personnes âgées seraient réticents à admettre qu’ils avaient remis un enfant abandonné en 2007 à une personne inconnue, ne figurait pas dans les arguments avancés en réponse à la lettre d’équité et ne règle pas les préoccupations de l’agent. Elle ne tient pas compte du fait que la consultante qui avait été contactée n’avait pas non plus eu connaissance d’un bébé abandonné au foyer en 2007.

D.                Consentement des parents biologiques

[39]           Le défendeur affirme que les arguments du demandeur sur ce point s’apparentent à une demande pour que la Cour réexamine les éléments de preuve. L’agent n’est pas tenu d’énumérer chaque élément de preuve. Les éléments de preuve cités par les demandeurs n’ont pas été suffisants pour surmonter les doutes de l’agent quant aux éléments de preuve contradictoires découlant de l’entrevue du demandeur principal et de sa femme et de la vérification téléphonique.

E.                 Traite de l’enfant et gain indu

[40]           Le défendeur soutient que l’agent ne pouvait pas être convaincu que l’adoption n’avait pas pour objet la traite de l’enfant ou la réalisation d’un gain indu compte tenu des renseignements incohérents qui découlaient de l’entrevue et de la vérification téléphonique.

[41]           Le défendeur soutient également que l’agent n’était pas obligé de communiquer avec l’Examen des cas de citoyenneté étant donné que la section 12.9 du guide CP14 ne s’applique que lorsque les agents ont des preuves que l’enfant a été enlevé ou qu’il y a eu fraude. En l’espèce, l’agent ne s’est pas fondé sur de telles preuves.

VI.             Analyse et décision

(1)        Aucune question n’a été soulevée quant à la légalité de l’adoption, mais des préoccupations ont été soulevées relativement à la « provenance » de la fille du demandeur principal.

[42]           L’agent ne semble pas avoir eu de préoccupations quant à la légalité de l’adoption, car cette question n’a pas été évoquée dans la décision comme un motif de refus de la demande. L’agent n’a pas mentionné de préoccupations au sujet de la « provenance » de l’enfant adoptif, mais il n’a pas fourni d’autres détails et n’a pas mentionné ce point dans la décision. Par conséquent, rien ne prouve que l’adoption n’était pas légale.

(2)        Le critère d’une adoption de complaisance n’est pas rencontré.

[43]           En ce qui concerne la conclusion selon laquelle l’adoption était une « adoption de complaisance », je suis d’accord avec le défendeur pour dire que la décision dans Dufour a été prise dans le cadre d’une autre section de la Loi et dans le contexte de conclusions positives au sujet de l’intérêt supérieur de l’enfant et d’un véritable lien de filiation.

[44]           Cependant, à mon avis, les déclarations au sujet de la preuve requise s’appliquent encore dans les circonstances actuelles. Il est stipulé dans Dufour :

55        Une adoption de complaisance ne vise que la situation où les parties (l’adopté ou l’adoptant) n’ont pas une véritable intention de créer un lien de filiation. C’est celle où la réalité ne correspond pas aux apparences. C’est un stratagème dont le but est de contourner les exigences de la Loi ou de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27.

56        Si une véritable intention de créer une relation père­fils existe et ce, dans le meilleur intérêt de l’enfant mineur, on ne peut normalement conclure que l’adoption vise principalement à créer un statut ou un privilège relatif à l’immigration ou la citoyenneté.

57        Même dans les cas où il n’y a pas de jugement d’une cour canadienne sanctionnant le caractère légitime de l’adoption, il faut des preuves claires à l’effet qu’il s’agit d’une adoption de complaisance. C’est pour cette raison que les circonstances pertinentes à considérer énumérées à la section 11.10 du guide CP14 (liste non­exhaustive) indiquent au décideur qu’il doit prendre en compte un ensemble de considérations contemporaines à l’adoption de même que la situation de l’enfant avant et après l’adoption et ce, même si l’intention recherchée est celle des parties au moment de l’adoption. En effet, comme l’indique ledit guide, ce sont tous les facteurs pris ensemble qui permettent au décideur de conclure que les parties avaient une intention particulière contraire à l’alinéa 5.1(3)b) au moment de l’adoption. Il est étonnant de noter par ailleurs que l’agente en l’espèce ne réfère jamais à ces critères dans son analyse et dans son affidavit, et que la section 11.10 du guide CP14 ne fait pas partie des extraits de guides produits dans le dossier d’appel (voir pièce B à l’affidavit de Nicole Campbell (pages 77 et suivantes du D.A.) et particulièrement, pages 321 et 322 du D.A.).

58        Il est rare d’avoir une preuve directe qu’une des parties voulait frauder l’autre ou que les deux parties visaient principalement à obtenir un statut ou privilège relatifs à l’immigration sur la base d’une relation familiale qui ne correspond pas à la réalité de leur situation. Certes, on peut imaginer des scénarios tel, par exemple, le cas où une ou les deux parties étaient membre(s) ou avai(en)t utilisé un réseau dont l’objectif est de fournir un statut ou un privilège relatifs à l’immigration ou la citoyenneté à l’étranger.

59        Dans la grande majorité des cas, le décideur administratif doit inférer l’intention malveillante de l’ensemble des circonstances pertinentes.

60        Pour inférer une intention, il faut d’abord que les faits sur lesquels on veut appuyer son raisonnement ou sa déduction logique aient été convenablement établis. On ne peut inférer une intention d’un fait qui n’est rien d’autre qu’une hypothèse parmi d’autres, car une telle approche relève de la pure spéculation, plutôt que d’un raisonnement logique.

61        Pour conclure que l’alinéa 5.1(3)b) n’est pas respecté, l’agente ne pouvait donc pas spéculer sur l’intention de l’intimé et M. Dufour.

[45]           Les déclarations de la Cour d’appel fédérale au paragraphe 57 et aux paragraphes suivants visent une situation différente où le jugement d’une cour canadienne n’établit pas de véritable lien de filiation et l’intérêt supérieur de l’enfant. Par conséquent, le fait que l’agent n’a pas constaté d’intérêt supérieur de l’enfant et de véritable lien de filiation dans la présente affaire ne porte pas atteinte à l’applicabilité des déclarations de Dufour voulant que la conclusion d’intention frauduleuse ne puisse pas être tirée de la spéculation et qu’elle doive reposer sur un raisonnement logique.

[46]           En outre, les déclarations de Dufour ont été appliquées dans le contexte du paragraphe 5.1(1) dans Young :

18        Le seuil à franchir pour pouvoir conclure qu’une adoption visait principalement l’acquisition d’un avantage en matière d’immigration ou de citoyenneté est élevé. Lorsqu’une adoption a été approuvée par un tribunal canadien, il faut établir que le jugement a été obtenu suite à une fraude au système judiciaire : Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Dufour, 2014 CAF 81. Cette approche donne effet à l’intention du législateur lorsqu’il a adopté l’article 5.1; à savoir, faciliter l’obtention de la citoyenneté canadienne pour les enfants adoptés à l’étranger par des citoyens canadiens : Dufour, au paragraphe 53. Dans les cas où il n’y a pas de jugement d’une cour canadienne sanctionnant le caractère légitime de l’adoption, comme en l’espèce, il faut « des preuves claires à l’effet qu’il s’agit d’une adoption de complaisance » : Dufour, au paragraphe 57.

19        Une adoption de complaisance « ne vise que la situation où les parties (l’adopté ou l’adoptant) n’ont pas une véritable intention de créer un lien de filiation » : Dufour, au paragraphe 55. Essentiellement, une telle adoption constitue un « stratagème dont le but est de contourner les exigences de la Loi sur la [Citoyenneté] ou de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, c. 27 » : Dufour, au paragraphe 55. Dans Perera c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2001] ACF no 1443, au paragraphe 14, la Cour fédérale a jugé que « comme dans le cas d’un soi­disant ‘mariage de convenance’ (dans le cadre duquel deux personnes qui ne se connaissent absolument pas font semblant d’entretenir une relation conjugale illusoire de façon à admettre un conjoint temporaire au Canada), les citoyens canadiens, dans le cas d’une ‘adoption de convenance’ prétendraient adopter un enfant inconnu de façon à l’amener au Canada en échange d’une récompense financière ».

[47]           À mon avis, la constatation d’une adoption de complaisance dans la présente affaire ne repose pas sur un raisonnement logique ou sur la preuve. L’agent n’établit jamais de lien entre les conclusions relatives aux lacunes de la preuve et la raison pour laquelle l’adoption est une adoption de complaisance. Si les lacunes de la preuve peuvent être liées au fait que l’adoption est une adoption de complaisance, il ne s’agit que d’une des nombreuses raisons pouvant expliquer ces lacunes.

[48]           En outre, rien ne porte à croire que le demandeur principal aura quelque chose à gagner si sa petite fille devient canadienne, hormis le fait de veiller à ce que sa famille puisse venir au Canada pour des raisons liées à l’éducation de l’enfant : Smith, au paragraphe 65 :

Les motifs du refus de l’agente ne prennent pas acte des éléments de preuve qui appuieraient la conclusion contraire, c’est­à­dire que l’adoption visait d’autres raisons que l’acquisition d’un statut ou d’un privilège au Canada, y compris notamment pour franchir l’étape logique suivante, en l’occurrence pour consolider l’avenir de Shana­K en tant qu’enfant de Mme Smith et pour l’intégrer à sa famille au Canada et lui assurer un milieu de vie plus sûr. L’objectif de Mme Smith d’assurer une meilleure qualité de vie pour Shana­K constitue également un objectif légitime et constitue de toute évidence un des objectifs de l’adoption, mais la conclusion de l’agente que cette intention permettait uniquement de conclure que l’adoption visait à contourner les exigences de la LIPR ou de la Loi sur la citoyenneté n’est pas étayée par la preuve ou le dossier et elle n’est pas raisonnable.

[49]           En outre, comme dans Dufour, il est surprenant que l’agent n’ait jamais fait référence à l’article 11.10 du guide CP14, qui précise les facteurs qui peuvent être pris en compte pour conclure qu’une adoption est une adoption de complaisance.

[50]            Je conclus que la décision de l’agent en ce qui concerne l’adoption de complaisance est déraisonnable.

(3)        La conclusion concernant l’intérêt supérieur de l’enfant n’est pas raisonnable.

[51]           Lors de l’audition de la présente affaire, l’avocat du défendeur a informé la Cour que cette question était admise.

(4)        La conclusion concernant le consentement des parents biologiques ne tient pas compte de la preuve.

[52]           Je suis d’accord avec les demandeurs sur le fait que la conclusion de l’agent en ce qui concerne le consentement des parents biologiques n’était pas raisonnable, car elle ignore et n’examine pas la preuve que des efforts ont été déployés pour localiser les parents biologiques de l’enfant, conformément à la loi chinoise. De plus, l’agent n’établit jamais de lien entre sa conclusion sur ce facteur et ses conclusions à l’effet que l’adoption n’était pas dans l’intérêt supérieur de l’enfant et était une adoption de complaisance.

(5)        La conclusion concernant la traite de l’enfant et la réalisation d’un gain indu n’est pas raisonnable.

[53]           Je suis également d’accord avec les demandeurs que la conclusion de l’agent quant à la question de savoir si l’enfant avait été enlevé, vendu ou avait fait l’objet d’un gain financier indu était déraisonnable. Il n’y a pas de lien logique entre les lacunes de la preuve relativement à la provenance de l’enfant et la question de savoir si cet enfant a été enlevé, vendu ou a fait l’objet d’un gain financier indu. L’agent n’avait pas le droit de tirer cette conclusion au simple motif que la preuve était déficiente; elle devait être justifiée par la preuve. Cela est corroboré par la section 12.9 du guide CP14. De plus, l’agent n’établit jamais de lien entre la conclusion sur ce facteur et les conclusions à l’effet que l’adoption n’était pas dans l’intérêt supérieur de l’enfant et était une adoption de complaisance.

[54]           En outre, je suis d’accord avec les demandeurs sur le fait que, pour rejeter la demande en invoquant ce motif, selon la section 12.9 du guide CP14, l’agent devait communiquer avec la Direction générale du règlement des cas. Bien que non contraignant, contrairement à l’argument du défendeur, le texte du guide CP14 ne limite pas cette exigence uniquement aux situations où les preuves, plutôt que les évaluations de crédibilité, sont examinées pour conclure à une traite de l’enfant ou à un gain indu.

[55]           Pour les motifs qui précèdent, je suis d’avis que la demande doit être accueillie.

[56]           Aucune des parties n’a souhaité proposer de question grave de portée générale aux fins de certification.


JUGEMENT

LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire est accueillie et l’affaire est renvoyée à un autre agent pour nouvel examen.

« John A. O’Keefe »

Juge


ANNEXE

Dispositions légales pertinentes

Loi sur la citoyenneté, L.R.C. (1985), ch. C­29.

5.1 (1) Sous réserve des paragraphes (3) et (4), le ministre attribue, sur demande, la citoyenneté soit à la personne adoptée avant le 1er janvier 1947 par une personne qui a obtenu qualité de citoyen à cette date — ou avant le 1er avril 1949 par une personne qui a obtenu qualité de citoyen à cette date par suite de l’adhésion de Terre­Neuve­et­Labrador à la Fédération canadienne — soit à la personne adoptée par un citoyen le 1er janvier 1947 ou subséquemment, lorsqu’elle était un enfant mineur. L’adoption doit par ailleurs satisfaire aux conditions suivantes :

5.1 (1) Subject to subsections (3) and (4), the Minister shall, on application, grant citizenship to a person who, while a minor child, was adopted by a citizen on or after January 1, 1947, was adopted before that day by a person who became a citizen on that day, or was adopted before April 1, 1949 by a person who became a citizen on that later day further to the union of Newfoundland and Labrador with Canada, if the adoption

a) elle a été faite dans l’intérêt supérieur de l’enfant;

(a) was in the best interests of the child;

b) elle a créé un véritable lien affectif parent­enfant entre l’adoptant et l’adopté;

(b) created a genuine relationship of parent and child;

c) elle a été faite conformément au droit du lieu de l’adoption et du pays de résidence de l’adoptant;

(c) was in accordance with the laws of the place where the adoption took place and the laws of the country of residence of the adopting citizen;

c.1) elle a été faite d’une façon qui n’a pas eu pour effet de contourner les exigences du droit applicable aux adoptions internationales;

(c.1) did not occur in a manner that circumvented the legal requirements for international adoptions; and

d) elle ne visait pas principalement l’acquisition d’un statut ou d’un privilège relatifs à l’immigration ou à la citoyenneté.

(d) was not entered into primarily for the purpose of acquiring a status or privilege in relation to immigration or citizenship.

Règlement sur la citoyenneté, DORS/93­246

5.1 (3) Les facteurs ci­après sont considérés pour établir si les conditions prévues au paragraphe 5.1(1) de la Loi sont remplies à l’égard de l’adoption de la personne visée au paragraphe (1) :

5.1 (3) The following factors are to be considered in determining whether the requirements of subsection 5.1(1) of the Act have been met in respect of the adoption of a person referred to in subsection (1):

c) dans les autres cas :

(c) whether, in all other cases,

(i) le fait qu’une étude du milieu familial a été faite ou approuvée par les autorités compétentes,

(i) a competent authority has conducted or approved a home study of the parent or parents, as the case may be,

(ii) le fait que le ou les parents, selon le cas, ont, avant l’adoption, donné un consentement véritable et éclairé à l’adoption,

(ii) before the adoption, the person’s parent or parents, as the case may be, gave their free and informed consent to the adoption,

(iii) le fait que l’adoption a définitivement rompu tout lien de filiation préexistant,

(iii) the pre-existing legal parent-child relationship was permanently severed by the adoption, and

(iv) le fait que rien n’indique que l’adoption avait pour objet la traite de la personne ou la réalisation d’un gain indu au sens de la Convention sur l’adoption.

(iv) there is no evidence that the adoption was for the purpose of child trafficking or undue gain within the meaning of the Hague Convention on Adoption.

Guide CP14 de Citoyenneté et Immigration Canada, version modifiée (version du 19 juin 2014)

11.10 Repérer une adoption de complaisance/L’adoption ne visait pas l’acquisition d’un statut ou d’un privilège – L5.1(1)d), L5.1(2)b) et L5.1(3)b)

11.10 Identifying an adoption of convenience/not for the purpose of acquiring a status or privilege – A5.1(1)(d), A5.1(2)(b) and A5.1(3)(b)

Si l’agent de citoyenneté conclut qu’une adoption visait principalement l’acquisition d’un statut ou d’un privilège relatifs à l’immigration ou à la citoyenneté (p. ex. adoption de complaisance), il doit refuser la demande.

If a citizenship officer determines that an adoption was entered into primarily for the purpose of acquiring a status or privilege in relation to immigration or citizenship (i.e. an adoption of convenience), the officer must refuse the application.

L’agent de citoyenneté doit fonder son opinion en fonction de facteurs qui, pris ensemble, pourraient mener une personne raisonnablement prudente à en venir à la conclusion que l’adoption a été faite dans le but de contourner les exigences de la LIPR ou de la Loi sur la citoyenneté.

A citizenship officer must form his or her opinion based upon factors which, taken together, could make a reasonably prudent person (balance of probabilities) conclude that the adoption has taken place to circumvent the requirements of the IRPA or the Citizenship Act.

Aucun critère officiel n’a été établi pour conclure qu’il s’agit d’une adoption de bonne foi. L’agent de citoyenneté doit plutôt évaluer toute l’information pertinente au cas, notamment :

No formal criteria exist for deciding whether or not an adoption is bona fide. Rather, the citizenship officer must look at the relevant information of the case, which typically might include:

les circonstances entourant l’adoption;

the circumstances of the adoption;

les allées et venues des parents biologiques de l’enfant adopté et la nature de leur situation personnelle;

the whereabouts of the adopted child's biological parents and the nature of their personal circumstances;

les personnes qui faisaient partie du foyer de l’enfant adopté avant et après l’adoption (p. ex. est­ce que l’enfant continuait d’habiter dans la même maison que ses parents biologiques après l’adoption?);

who was included in the adopted child's household before and after the adoption (i.e. did the adopted child continue to live in the same household as the biological parents even after the adoption);

le fait que le parent adoptif répond ou non aux besoins financiers et émotifs de l’enfant adopté;

whether or not the adoptive parents are supplying financial and emotional support to the adopted child;

la motivation ou les raisons des parents biologiques et du parent adoptif justifiant l’adoption de l’enfant;

the motivation or reasons for the adoption of the child given by the biological parents and the adoptive parents;

l’autorité et la persuasion que le parent adoptif exerce à l’égard de l’enfant adopté;

the authority and influence of the adoptive parents over the adopted child;

les dispositions et mesures prises par le parent adoptif pour prendre soin de l’enfant adopté, subvenir à ses besoins et planifier son avenir;

the arrangements and actions taken by the adoptive parents related to caring, providing and planning for the adopted child;

le fait que l’autorité des parents biologiques de l’enfant est supplantée par celle du parent adoptif, ce qui signifie que le parent adoptif joue le rôle de parent dans tous les aspects de la vie de l’enfant adopté;

the supplanting of the authority of the child's biological parents by that of the adoptive parents, meaning that the adoptive parents play the “parenting role” in all aspects of the adopted child’s life;

le lien entre l’enfant adopté et ses parents biologiques avant l’adoption;

the relationship between the adopted child and the biological parents before the adoption;

le lien entre l’enfant adopté et ses parents biologiques après l’adoption;

the relationship between the adopted child and the biological parents after the adoption;

le traitement que subit l’enfant adopté par rapport au traitement que subissent les enfants biologiques du parent adoptif;

the treatment of the adopted child versus that of the biological children by the adoptive parents;

les pratiques sociales et juridiques régissant l’adoption dans le pays d’origine de l’enfant adopté;

the prevailing social and legal practices governing adoption in the adopted child's home country;

si l’adoption a eu lieu de nombreuses années auparavant, la preuve documentaire démontrant que l’enfant habitait avec le parent adoptif et que ce dernier prenait soin de l’enfant adopté.

in a case where the adoption took place a long time ago, documentary evidence demonstrating that the adopted child has lived with the adoptive parents and that they cared for the adopted child.

Cette liste n’est pas exhaustive. Certains facteurs énumérés peuvent ne pas être applicables dans un cas en particulier, tandis que d’autres, non énumérés dans cette liste, pourraient être pertinents.

This list of factors is not exhaustive. Some factors listed may not be applicable to a particular case, while other factors not included in this list may be relevant.

L’agent de citoyenneté doit disposer de preuves, documentaires ou autres, pour appuyer sa décision concernant la demande et, dans le cas d’un refus, il doit inclure, dans la lettre de refus, les raisons justifiant la décision. Les parents adoptif peuvent présenter une demande auprès de la Cour fédérale du Canada afin que la décision fasse l’objet d’un contrôle judiciaire.

The citizenship officer must have evidence, documentary or otherwise, to support his or her decision on the application and, in cases of a refusal, must include reasons for the decision in the refusal letter. The adoptive parents may apply for a judicial review of the decision with the Federal Court of Canada.

12.9 Traite d’enfants et réalisation d’un gain indu

12.9 Child trafficking and undue gain

Il se peut que l’agent de citoyenneté dispose d’éléments de preuve selon lesquels l’enfant a été enlevé et/ou l’adoption est frauduleuse. Nous avons déjà traité des cas où des enfants adoptés ont été enlevés.

Cases may arise where citizenship officers will have evidence that child abduction and/or fraud has occurred. There have been cases where adopted children were abducted.

Si l’agent de citoyenneté pense qu’un enfant adopté a été enlevé, il peut :

If a citizenship officer suspects that an adopted child was abducted, the officer may:

interroger les parent biologiques ou toute autre personne impliquée dans le processus d’adoption.

interview the biological parents or any of the persons involved in the adoption process.

Si les autorités provinciales/territoriales en matière d’adoption ne sont pas impliquées (p. ex. les parents adoptifs résident à l’extérieur du Canada au moment de l’adoption et/ou les autorités provinciales/territoriales en matière d’adoption ont indiqué qu’elles n’interviennent pas dans l’évaluation de l’adoption) et que l’agent de citoyenneté dispose d’éléments de preuve selon lesquels l’enfant a été victime de traite ou qu’un gain indu a été réalisé dans le cadre du processus (l’enfant a été vendu ou des profits financiers inhabituels ont été réalisés), l’agent de citoyenneté devrait refuser la demande en vertu de l’alinéa L5.1(1)a).

If the relevant P/T adoption authority is not involved (i.e. the adoptive parents reside outside Canada at the time of the adoption and/or the P/T adoption authority has advised that they have no involvement in the assessment of the adoption) and the citizenship officer has evidence that child trafficking has taken place or that there was undue gain in the process (i.e. a child was sold or improper financial gain took place), the citizenship officer should refuse the case on the basis of paragraph A5.1(1)(a)

La traite d’enfants et la réalisation d’un gain indu contreviennent à la plupart des lois étrangères. Les cas où une telle infraction a été commise ne satisfont pas non plus aux exigences énoncées à l’alinéa L5.1(1)c). Si l’agent de citoyenneté envisage de refuser une demande en invoquant ce motif, il doit communiquer avec l’Examen des cas de citoyenneté de la Direction générale du règlement des cas (AC­BCM) par courriel.

Child trafficking and undue gain contravene most foreign legislation. These cases would therefore not meet the requirements of paragraph A5.1(1)(c). If a citizenship officer is considering refusing a case on this basis, the officer must contact Citizenship Case Review at Case Management Branch (CMB) by email.

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-474-15

 

INTITULÉ :

WING KAI LEUNG, MAN KI LEUNG c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 20 octobre 2015

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT :

LE JUGE O’KEEFE

 

DATE DES MOTIFS :

LE 14 JANVIER 2016

 

COMPARUTIONS :

Mario Bellissimo

 

Pour les demandeurs

 

Brad Gotkin

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Bellissimo Law Group

Avocats­procureurs

Toronto (Ontario)

 

Pour les demandeurs

 

William F. Pentney

Sous­procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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