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Date : 20160108


Dossier : T-2361-14

Référence : 2016 CF 32

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 8 janvier 2016

En présence de madame la juge Elliott

ENTRE :

CAPORAL J.J. HIGGINS

demandeur

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]               La présente est un contrôle judiciaire de la décision datée du 22 septembre 2014 et rendue par le colonel J.R.F Malo des Forces armées canadiennes (FAC), agissant à titre d’autorité de dernière instance, dans laquelle le demandeur s’est vu accorder la plupart des règlements, mais pas tous, qu’il demandait dans son grief daté du 5 décembre 2011.

[2]               Au début de l’audience, une requête en vue de modifier le nom du défendeur pour qu’il soit nommé procureur général du Canada a été accordée. Autrement, il n’existait pas de question préliminaire.

I.                   Contexte

[3]               Le demandeur est un caporal des FAC qui, au moment des incidents en cause, occupait le poste de sous-lieutenant du Cadre des instructeurs de cadets de la Force de réserve pour le Service d’administration et d’instruction des organisations de cadets (SAIOC). Les officiers du SAIOC agissent à titre de superviseurs adultes de jeunes membres civils du Programme des Cadets. L’événement déclencheur a été sa suspension du 40e escadron (Snowbird) des Cadets de l’Aviation royale du Canada le 30 août 2011.

[4]               Le 6 septembre 2011, le demandeur a déposé une plainte pour harcèlement et abus de pouvoir contre son commandant et un autre officier, lesquels se sont entretenus avec lui au sujet d’interactions déplacées qu’il aurait eues avec des cadets. Son incapacité alléguée à corriger ses actions a précipité sa suspension. Insatisfait du rapport de l’enquête sur sa plainte, le demandeur a déposé un grief le 5 décembre 2011. Il a été muté dans la Force régulière le jour suivant.

[5]               Le demandeur a continuellement rejeté toutes les allégations qui ont mené à sa suspension. Il a déposé un grief contre sa suspension et les mesures prises par son commandant. Il a indiqué que le commandant n’avait pas respecté les principes de base en matière d’équité procédurale militaire et qu’il avait mené une enquête viciée sur sa plainte de harcèlement.

II.                Les allégations, la plainte et le grief

A.                Les allégations à l’encontre du demandeur

[6]               Diverses allégations à l’encontre du demandeur existaient. Elles sont classées en deux catégories générales, l’une correspondant à des activités ou à une conduite inappropriées avec les cadets et l’autre se rapportant au manque de respect ou au fait de passer outre la chaîne de commandement.

[7]               Au cours des années 2010 et 2011, le commandant du demandeur a reçu diverses plaintes des parents des cadets concernant la conduite du demandeur avec ses cadets en dehors des heures normales : il a notamment pris un café avec les cadets, leur a envoyé des courriels, a communiqué avec eux par l’intermédiaire de sites de réseaux sociaux, a échangé des courriels avec eux et les a invités à voler avec lui dans son avion. Il s’est également lié d’amitié avec certains des parents, ce que son commandant a considéré comme une tentative de se soustraire à l’exigence selon laquelle le demandeur ne doit pas entrer en relation avec les cadets en dehors des heures de travail. D’après les allégations, le demandeur a servi chez lui de l’alcool à un cadet mineur, puis il a autorisé ce dernier à rentrer chez lui en voiture. Selon une autre allégation, le demandeur s’est baigné avec cinq cadets, après en avoir fait la demande auprès du comité de surveillance civile et après que celui-ci l’a rejetée.

[8]               Plus précisément, le demandeur a nié utiliser les médias sociaux pour communiquer avec les cadets. Il a nié catégoriquement avoir accueilli les cadets chez lui, leur avoir servi de l’alcool et avoir regardé un film avec eux. Étant donné que l’une des plaintes portait sur le fait que le demandeur communiquait avec les cadets par l’intermédiaire de son compte Facebook, le demandeur a montré à son commandant qu’aucun cadet n’était son ami sur son compte Facebook. Le commandant a confirmé cette affirmation avec le demandeur par courriel le 17 mars 2010.

[9]               Le demandeur a été avisé verbalement et par écrit, à plusieurs reprises, de cesser d’adopter le comportement présumé, bien qu’il n’ait jamais admis avoir eu un tel comportement. Des préoccupations ont également été exprimées à son égard quant au fait qu’il agissait en marge de la chaîne de commandement en discutant avec les parents et d’autres personnes directement concernant des sujets internes relatifs au SAIOC.

B.                 La plainte

[10]           La plainte du demandeur a été soumise au commandant de l’Unité régionale de soutien aux cadets (Prairies) (URSC [Prairies]). Elle a fait valoir que son commandant et l’Ordre du Commandement aérien (OCA) agissaient de façon injuste envers lui, ce qui a entraîné un harcèlement et un abus de pouvoir, étant donné qu’ils n’ont pas été en mesure de lui fournir des détails ou des éléments de preuve pour étayer les diverses allégations concernant les relations qu’il entretenait avec les cadets.

[11]           L’URSC (Prairies) des officiers d’instruction a été désignée pour examiner la plainte. Le 3 octobre 2011, le demandeur a présenté d’autres données et documents pour étayer sa plainte, y compris des courriels et des témoignages anecdotiques.

[12]           Le 1er novembre 2011, un rapport d’enquête de quatre pages a été publié. Les plaintes du demandeur en matière de harcèlement et d’équité procédurale ont été reconnues, mais elles n’ont pas été directement traitées. Selon le rapport, le demandeur a commis des écarts de conduite durant une longue période et [traduction] « compte tenu du nombre de fois où il a été avisé de corriger son comportement, entre le 2 mars 2010 et le 16 février 2011, il est raisonnable de penser que le 30 août 2011, le sous-lieutenant aurait été au courant des motifs pour lesquels on lui a demandé de quitter l’escadron ». L’enquête a recommandé, entre autres, que les motifs de son retrait soient réitérés au demandeur et qu’il reçoive une première mise en garde (PMG) quant aux attentes concernant sa réactivité aux directives de supérieurs et ses relations personnelles avec les cadets. La PMG est une forme de mesure administrative qui a pour but de consigner officiellement et de fournir le cadre de mentorat nécessaire pour corriger les écarts de conduite.

[13]           L’enquête a conclu que le demandeur n’avait pas répondu aux tentatives répétées de l’aider à corriger les écarts observés. Selon le rapport, le demandeur devrait être autorisé à continuer à exercer ses fonctions, mais dans une autre unité, compte tenu de [traduction] « l’effet irréversible sur la relation de confiance entre le commandant et lui ». (sic)

C.                Le grief

[14]           Le 5 décembre 2011, le demandeur a déposé un grief affirmant que son commandant n’avait pas respecté les principes fondamentaux d’équité procédurale, n’avait pas correctement enquêté sur sa plainte de harcèlement, qu’il avait menti à l’agent qui avait examiné sa plainte et qu’il avait diffusé de façon inappropriée des renseignements protégés à son sujet. Le grief comprenait une déclaration selon laquelle les erreurs ne pouvaient pas être réparées au moyen d’un examen ultérieur.

[15]           Le 6 décembre 2011, le demandeur s’est de nouveau inscrit à l’élément habituel des FAC. Il a été conclu par le chef d’état-major de la Défense (CEMD) que de nombreuses questions soulevées dans le grief du demandeur avaient perdu leur raison d’être en raison de cette mesure.

[16]           Le 16 avril 2012, à la suite des nouveaux renseignements reçus par l’intermédiaire du processus de divulgation, le demandeur a réaffirmé son grief pour ajouter la demande de retrait et de destruction de certaines communications et de certains documents de son dossier et il a demandé que le commandant et d’autres officiers de l’escadron des Cadets de l’Aviation royale du Canada (ECARC) soient assujettis à des mesures administratives ou disciplinaires, puisque des renseignements confidentiels concernant le demandeur avaient été diffusés de façon inappropriée.

[17]           Le grief réaffirmé est celui que le chef d’état-major de la Défense a déterminé. Il s’agit du document sous-jacent à la décision qui fait l’objet de la présente demande d’examen.

III.             Procédure de grief des FAC

[18]           Le demandeur a allégué une iniquité procédurale. Il est donc approprié d’examiner la nature de la procédure de grief établie par les FAC. Le droit de déposer un grief et la procédure de grief prescrite pour les FAC sont décrits dans l’article 29 de la Loi sur la défense nationale, L.R.C (1985), ch. N-5 (Loi) et chapitre 7 des Ordonnances et règlements royaux applicables aux Forces canadiennes. Ils sont complétés par une Directive et ordonnance administrative de la Défense (DOAD), appelée DOAD 2017 – 1, processus militaire de griefs, qui est une ordonnance qui s’applique à tous les officiers et aux militaires du rang des FAC. Ainsi, elle fait partie intégrante du Système de règlement des griefs.

[19]           Il existe également un Manuel des griefs publié par le Directeur général – Autorité des griefs des Forces canadiennes (DGAGFC) qui a été élaboré pour aider à préparer et à soumettre des griefs. Le Manuel explique ce qui peut ou ne peut pas faire l’objet d’un grief, les rôles joués par les diverses parties lorsqu’un grief est déposé, y compris le Comité des griefs des Forces canadiennes (CGFC) maintenant connu sous le nom de Comité externe d’examen des griefs militaires. Le Manuel décrit, de façon assez détaillée, le processus qui sera suivi et explique chaque étape. Le Manuel indique clairement qu’il ne s’agit pas d’un document faisant légalement autorité et qu’il n’a pas force de loi. Il s’agit simplement d’un guide.

[20]           La procédure de grief des FAC est approfondie et détaillée, comme l’on peut s’attendre de la part d’une organisation militaire. Le processus ne comporte que deux niveaux permettant d’accorder ou de rejeter un grief. Il s’agit de l’autorité initiale (AI), qui est habituellement le commandant, et de l’autorité de dernière instance, qui est le chef d’état-major de la Défense ou, comme dans le présent cas, son délégué. Si un plaignant n’est pas satisfait de la décision rendue par l’autorité initiale, il a le droit de transmettre l’affaire au chef d’état-major de la Défense pour qu’il rende une décision définitive. Le DGAGFC aide le chef d’état-major de la Défense en fournissant une analyse du grief et en formulant des recommandations non contraignantes. À l’occasion, comme cela est le cas ici, le Comité des griefs des Forces canadiennes (CGFC) fait également un rapport au chef d’état-major de la Défense. Le CGFC est une entité juridique externe et indépendante chargée, en vertu de la Loi, d’enquêter sur les griefs soumis par le chef d’état-major de la Défense et de les examiner. Le CGFC fournit ses conclusions et recommandations au chef d’état-major de la Défense qui, en vertu du paragraphe 29.13(1) de la Loi, n’est pas tenu de les prendre en compte. En revanche, il doit fournir des motifs s’il ne donne pas suite à une conclusion ou à une recommandation du CGFC.

[21]           Le processus de griefs auquel l’autorité initiale et le chef d’état-major de la Défense prennent part ne comprend pas l’audition de témoins, l’examen d’affidavits ou de documents ou le contre-interrogatoire sur ceux-ci. Il s’agit simplement d’un processus documentaire écrit où tous les éléments de preuve examinés sont formulés par écrit. Un impératif d’équité procédurale est contenu dans la DOAD 2017-1 qui ordonne que « le plaignant a le droit de se faire remettre tous les documents et renseignements pertinents qui seront pris en considération par l’autorité de redressement, d’avoir l’occasion de présenter des observations sur les documents et les renseignements, de recevoir en temps opportun une décision bien expliquée, raisonnable et impartiale à l’égard de son grief ».

[22]           Le processus documentaire qui a été suivi dans le présent cas était vaste. Il comprenait la création et l’envoi au demandeur, aux étapes de l’autorité initiale et de l’autorité de dernière instance, de documents de divulgation et d’un résumé du grief, puis la réception d’une ou de plusieurs réponses écrites plus détaillées de sa part. Un processus similaire est survenu à l’étape du CGFC. Tout au long du processus, un échange animé de documents entre le demandeur et la personne impliquée dans le processus à ce moment-là, à titre d’autorité d’examen, a eu lieu.

[23]           La plainte procédurale du demandeur est, et l’a été depuis le début des allégations portées contre lui, le fait qu’il n’a jamais reçu les noms des plaignants ou les noms des cadets avec lesquels il se serait comporté de façon inappropriée. Il affirme aussi qu’il n’a jamais reçu les dates auxquelles les événements en question ont eu lieu. Il continue à rejeter le fait que des activités inappropriées aient eu lieu.

IV.             Décision de l’autorité initiale

[24]           Le demandeur a reçu un résumé du grief le 2 mai 2012 auquel il a soumis une réponse le 1er juin 2012.

[25]           L’autorité initiale a examiné le grief ainsi que les commentaires des supérieurs de la chaîne de commandement et du personnel supérieur d’état-major dans les quartiers généraux. Les commentaires ont été communiqués au demandeur le 2 mai 2012. Le 6 juin 2012, la réponse du demandeur à cette divulgation a été reçue.

[26]           Le 11 juillet 2012, l’autorité initiale a rendu sa décision. Pour ce qui est de la plainte continue du demandeur selon laquelle il n’a pas reçu de détails, tels que les dates, les noms et les lieux concernant les événements pour lesquels il avait été mis en garde, il a été conclu qu’il avait été informé verbalement, à plusieurs reprises, et qu’il avait reçu le « niveau approprié d’équité procédurale ».

[27]           Au moment de la décision, les plaintes très précises formulées initialement puis réitérées par le demandeur ont été examinées. Bien que certaines affirmations du demandeur aient été appuyées, la plupart ne l’ont pas été. Il a été décidé que le demandeur n’avait pas démontré, à la satisfaction de l’autorité initiale, qu’il avait fait l’objet d’un grief. Le règlement demandé n’a pas été accordé.

[28]           Le demandeur a été avisé de son droit d’acheminer le grief au chef d’état-major de la Défense dans un délai de 90 jours. Le 7 août 2012, il a fourni une réponse à la décision de l’autorité initiale. Le 17 août 2012, il a demandé un examen par le chef d’état-major de la Défense.

V.                Conclusions et recommandations du Comité des griefs des Forces canadiennes

[29]           Le 3 janvier 2013, le grief du demandeur a été envoyé de façon discrétionnaire par le chef d’état-major de la Défense au CGFC. Le 30 mai 2013, les conclusions et recommandations faites par le CGFC selon lesquelles le grief devrait être accueilli partiellement ont été communiquées. Le 4 juin 2013, le CGFC a transmis les conclusions et recommandations au demandeur. Il lui a également envoyé son dossier de grief de 826 pages pour l’aider à se préparer en vue de la décision du chef d’état-major de la Défense. Il a été informé qu’après l’examen des documents, il pouvait fournir des commentaires ou d’autres documents pertinents au DGAGFC afin que le chef d’état-major de la Défense les examine. Les conclusions et recommandations ont pratiquement, mais pas totalement, accueilli le grief.

[30]           Comme l’a indiqué le CGFC, la question était :

... de savoir si la décision de démettre le plaignant de ses fonctions était justifiée et conforme à la politique et si la mesure corrective qui a été prononcée à son égard était appropriée.

[31]           Le CGFC a déterminé qu’étant donné que la mesure corrective d’une PMG a eu lieu après la mutation du demandeur dans la Force régulière, elle était nulle et sans effet et elle devrait être supprimée des dossiers personnels du demandeur.

[32]           Le CGFC a conclu que l’enquête initiale sur la plainte du demandeur était foncièrement erronée pour plusieurs raisons. Il a jugé que les conclusions n’étaient pas justifiées, transparentes, intelligibles ou compréhensibles. Par conséquent, les conclusions de l’enquêteur étaient déraisonnables. Le CGFC a recommandé d’annuler le rapport d’enquête et de le supprimer de tous les dossiers de l’unité.

[33]           Le CGFC a examiné trois documents que le demandeur a demandé de retirer de ses dossiers. Il a conclu que rien ne justifiait leur retrait, étant donné qu’il s’agissait de mesures appropriées prises par le commandant. En outre, le CGFC a indiqué qu’il n’était pas convaincu que des excuses présentées par le commandant et l’Ordre du Commandement aérien, comme l’avait demandé le demandeur, étaient justifiées et, dans tous les cas, le comportement adopté par le demandeur excluait toute possibilité qu’une personne rédige une lettre d’excuse.

[34]           En ce qui concerne les diverses allégations impliquant des communications déplacées avec les cadets, le CGFC a reconnu qu’elles n’avaient pas été bien traitées, mais qu’elles avaient perdu leur raison d’être, le demandeur ayant été muté dans la Force régulière. Il a fait remarquer que l’allégation d’avoir servi de l’alcool à un mineur n’avait pas fait l’objet d’une enquête en bonne et due forme et que les FAC voudront peut-être poursuivre l’affaire.

[35]           En ce qui concerne la décision de relever le demandeur de ses fonctions, le CGFC a encore jugé que la situation n’avait pas été bien gérée et que la mesure n’avait pas été dûment justifiée, une enquête appropriée et équitable n’ayant pas été menée. Cependant, à la suite de la mutation du demandeur dans la Force régulière, le CGFC a de nouveau jugé que cette question était sans objet.

[36]           La seule recommandation formulée par le CGFC était que le chef d’état-major de la Défense accueille partiellement le grief en ordonnant [traduction] « que le formulaire de première mise en garde et l’“examen de la plainte [du plaignant]” ainsi que toutes références à ces documents soient retirés du dossier personnel du demandeur et supprimés, conformément à la Loi sur les Archives nationales du Canada ».

VI.             Décision de l’autorité de dernière instance

[37]           Le 13 juin 2014, le DGAGFC a écrit au demandeur pour confirmer l’exactitude et l’exhaustivité des renseignements qu’il détenait ainsi que sa compréhension des plaintes faisant l’objet d’un grief et du redressement demandé. Le demandeur a reçu les renseignements que le chef d’état-major de la Défense examinerait et il a été invité à fournir une réponse s’il le souhaitait. Un résumé du grief à cette date a été joint à la lettre. Le résumé comprenait un examen du redressement demandé, les faits pertinents, y compris les activités présumées avec les cadets, les conclusions du rapport d’enquête, le fait que le résumé de l’autorité initiale avait été communiqué au demandeur qui avait reçu la décision de l’autorité initiale ainsi que les conclusions et recommandations du CGFC. Le dossier de renseignements comprenait des copies de courriels échangés entre divers membres de la chaîne de commandement concernant le demandeur et les allégations portées contre lui ainsi que des notes internes au dossier détaillant diverses réunions et discussions au sujet de l’affaire.

[38]           Le résumé du grief décrivait les lois et politiques applicables et les examinait dans le contexte du grief du demandeur. Le résumé et la recommandation fournie dans celui-ci différaient quelque peu des conclusions et recommandations du CGFC, mais ils concordaient en grande partie avec celles-ci. La recommandation faite au chef d’état-major de la Défense était d’accorder partiellement le redressement demandé en supprimant la documentation liée à l’enquête, ainsi que les trois comptes rendus de discussion, de tous les dossiers, en retirant la première mise en garde et en publiant plutôt l’avertissement écrit. L’analyste ayant rédigé le résumé, le major Vallée, a recommandé que le chef d’état-major de la Défense ordonne une enquête de la police militaire sur l’allégation selon laquelle de l’alcool aurait été proposé à des mineurs.

[39]           Le demandeur a fourni une réponse détaillée au résumé et à l’information divulguée le 7 juillet 2014.

[40]           Le 22 septembre 2014, le chef d’état-major de la Défense a rendu sa décision (décision). Il a indiqué qu’il avait effectué un examen de novo en mettant de côté les décisions antérieures et en reprenant depuis le début. Le chef d’état-major de la Défense a confirmé qu’il avait examiné le dossier de grief complet, y compris les réponses les plus récentes envoyées par le demandeur. Il a examiné la nature du grief et le redressement demandé et il a décidé que, dans une certaine mesure, le demandeur avait été lésé, mais pas pour les motifs invoqués par ce dernier.

[41]           Le chef d’état-major de la Défense a décidé de partiellement accorder le redressement demandé, le demandeur ayant été lésé dans une certaine mesure. Il s’est penché sur quatre questions pour savoir :

         si la suspension du demandeur était appropriée;

         si l’enquête a été menée correctement;

         si l’équité procédurale a été appliquée du 2 mars 2010 au 12 décembre 2011;

         si la mesure corrective prononcée était justifiée et légale.

[42]           Le chef d’état-major de la Défense a jugé que la décision de muter le demandeur dans une autre unité n’était pas une bonne façon de gérer la situation, la procédure appropriée reliée aux mesures correctives n’ayant pas été suivie, mais la question était sans objet. Le chef d’état‑major de la Défense a trouvé que le commandant de l’URSC (Nord-Ouest) avait réagi rapidement et conformément au Règlement en ordonnant une enquête, mais qu’il n’avait pas fourni de cadre de référence écrit, laissant ainsi l’agent enquêteur sans directives appropriées. Par conséquent, le chef d’état-major de la Défense a considéré que l’enquête sur la plainte de harcèlement menée par l’URSC (N.-O.) était viciée et semblait biaisée. Le redressement a été accordé et le rapport d’enquête ainsi que les documents connexes ont été retirés de tous les dossiers et détruits.

[43]           En ce qui concerne l’équité procédurale, le chef d’état-major de la Défense a jugé que le demandeur avait reçu un traitement juste, tout au long de la procédure. Il a été informé de ses écarts et il a été avisé de la manière d’améliorer son comportement. À chaque étape, il a eu l’occasion d’expliquer ses actions et tous les documents disponibles lui ont été communiqués et chaque fois, il s’est vu offrir la possibilité de fournir des commentaires.

[44]           Pour ce qui est de la mesure corrective, le chef d’état-major de la Défense a jugé qu’elle était bien documentée, que le demandeur a été informé en personne ou par courriel à neuf reprises concernant les mêmes écarts par rapport à la norme de conduite, mais qu’il ne les a pas corrigés. Le chef d’état-major de la Défense a examiné la nature et l’objectif d’une mesure corrective et les facteurs à prendre en compte lors de la prise d’une mesure corrective et de la sélection de la mesure appropriée. Le chef d’état-major de la Défense a convenu qu’une mesure corrective était nécessaire, mais que la chaîne de commandement du demandeur avait été « trop accommodante » en n’agissant pas assez rapidement. Il a constaté que la première mise en garde avait été émise sans l’autorisation adéquate, étant donné que cela a été fait après la mutation du demandeur dans les forces régulières. Par conséquent, il l’a annulée. Le chef d’état-major de la Défense a alors déterminé, à tout le moins, qu’un avertissement écrit était approprié.

[45]           Le chef d’état-major de la Défense a jugé que les allégations relatives à l’offre d’alcool à des mineurs n’ayant pas fait l’objet d’une enquête appropriée, « certains doutes » demeureraient, ce qui pourrait avoir un effet négatif sur l’organisation des cadets et le demandeur. Par conséquent, il pense que l’affaire devrait être examinée de nouveau. Le chef d’état-major de la Défense a donc ordonné que le commandant compétent communique avec l’unité de police militaire locale et étudie l’intérêt d’ouvrir une enquête sur l’allégation selon laquelle le demandeur aurait servi de l’alcool à un mineur.

[46]           Le chef d’état-major de la Défense a ordonné que les trois documents au sujet desquels le demandeur s’est plaint soient retirés de tous les dossiers, car leur conservation au dossier irait à l’encontre de l’esprit de la directive du Chef du personnel militaire en ce qui a trait au dossier personnel de l’unité dont l’objectif est de protéger les membres de FAC.

[47]           Le chef d’état-major de la Défense a décidé avec le CGFC de ne pas ordonner des excuses et ils ont convenu que la chaîne de commandement a agi de façon appropriée, malgré les erreurs administratives commises. Il a aussi jugé qu’il n’était pas approprié qu’il prévoie des mesures administratives et disciplinaires possibles à l’encontre du commandant ou d’autres officiers, dans le contexte du grief. Il a préféré confier la question de la supervision de l’exécution de ses fonctions aux autorités compétentes.

[48]           En ce qui concerne le redressement précis souhaité par le demandeur, selon lequel toute politique ou procédure faisant appel à une mesure disciplinaire fondée uniquement sur une allégation soit réécrite, le chef d’état-major de la Défense a jugé que le demandeur n’avait pas démontré qu’il avait été traité injustement. De plus, il a expressément conclu que les politiques et procédures liées à l’équité procédurale étaient appropriées.

[49]           En fin de compte, le chef d’état-major de la Défense a ordonné que tous les comptes rendus de discussion, le formulaire de première mise en garde, l’examen de la plainte (le rapport d’enquête) et toutes les références à ces documents soient retirés du dossier personnel de l’unité et du dossier personnel de l’unité du demandeur. Les documents retirés ont été supprimés conformément à la Loi sur la Bibliothèque et les Archives du Canada. Dans tous les cas, une fois que ces questions ont été réglées, il a fallu produire un rapport à l’intention du demandeur, du DGAGFC et du commandant du demandeur.

[50]           Le 14 novembre 2014, le demandeur a déposé une demande de contrôle judiciaire de la décision.

VII.          Questions en litige

[51]           Le demandeur se demande s’il est approprié que la Cour annule la décision et la recommandation indiquées ci-joint en ce qui concerne la publication d’un avertissement écrit.

[52]           Le défendeur formule les questions d’une manière quelque peu différente, mais les parties et la Cour conviennent que les questions à prendre en compte concernant ce contrôle judiciaire sont les suivantes :

A)    La décision prise par l’autorité de dernière instance est-elle raisonnable?

B)    L’autorité de dernière instance ou les FAC ont-elles enfreint les règles d’équité procédurale en ne fournissant pas l’information et les détails des allégations au demandeur lors du processus de règlement des griefs?

VIII.       Norme de contrôle

[53]           La première question sur laquelle la Cour doit se pencher est la suivante : quelle est la norme de contrôle appropriée pour chaque affaire?

A.                Caractère raisonnable de la décision

[54]           La Cour d’appel fédérale a statué que les décisions du chef d’état-major de la Défense en ce qui concerne les griefs sont susceptibles de révision selon la norme de la décision raisonnable (Zimmerman c. Canada (Procureur général), 2011 CAF 43, au paragraphe 21). Dans l’arrêt Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9 (Dunsmuir), au paragraphe 57, il est ordonné que si la norme de contrôle a déjà été déterminée, il n’est pas nécessaire de l’examiner de nouveau. Ce contrôle sera donc effectué en partant du principe que le caractère raisonnable est la norme de contrôle de la décision et qu’il convient de faire preuve de retenue à l’égard du décideur.

B.                 « Caractère approprié des motifs »

[55]           Au cours de sa plaidoirie, l’avocat du demandeur a signalé que les motifs fournis par le chef d’état-major de la Défense n’étaient pas adéquats, notamment parce qu’il n’existait pas de conclusion précise sur le fait que le demandeur avait vraiment adopté le comportement allégué. Le demandeur a également indiqué que la norme de contrôle pour vérifier le caractère approprié des motifs devrait être la décision correcte. Ce point de vue découle de la décision de première instance dans l’arrêt Rifai c. Canada (Procureur général), 2014 CF 529 (infirmé par la suite en appel) qui fait référence au paragraphe 22 de l’arrêt Tainsh c. Canada (Procureur général), 2011 CF 1180 qui citait le paragraphe 43 de l’arrêt Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Khosa, 2009 CSC 12, pour conclure que « [l]e caractère approprié des motifs peut être considéré comme l’un des aspects de l’équité procédurale, et cet aspect est donc susceptible de contrôle selon la décision correcte ». Cependant, la décision concernant l’arrêt Tainsh et Khosa a été prise avant l’arrêt Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c. Terre‑Neuve-et-Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62 (Nfld. Nurses), où la juge Abella a décrit la norme de contrôle au moment de traiter cette partie d’une décision contestée au motif du « caractère approprié des motifs » ou de l’absence de celui-ci, au moyen du paragraphe 22 :

[22]      Le manquement à une obligation d’équité procédurale constitue certes une erreur de droit. Or, en l’absence de motifs dans des circonstances où ils s’imposent, il n’y a rien à contrôler. Cependant, dans les cas où, comme en l’espèce, il y en a on ne saurait conclure à un tel manquement. Le raisonnement qui sous‑tend la décision/le résultat ne peut donc être remis en question que dans le cadre de l’analyse du caractère raisonnable de celle‑ci. (souligné dans l’original)

[56]           L’arrêt Nfld. Nurses faisant autorité lorsqu’il s’agit de savoir si les motifs sont adéquats, j’examinerai si les motifs fournis par le chef d’état-major de la Défense étaient suffisants ou non, en partant du principe que cela fait partie de l’examen et de l’analyse du caractère raisonnable général de la décision que j’effectue.

C.                Équité procédurale

[57]           Le demandeur a allégué un manquement à l’équité à son égard, car il ne connaissait pas les détails des allégations portées contre lui. Il soutient qu’il n’a pas eu la moindre occasion de répondre aux allégations, car il ignorait l’identité des personnes ayant porté plainte, avec quels cadets il aurait agi de façon inappropriée, la nature du comportement inapproprié, les dates auxquelles ces événements ont eu lieu et l’endroit où cela s’est déroulé. Il affirme également qu’on ne lui a pas indiqué les motifs pour lesquels une telle conduite était inappropriée.

[58]           La norme de contrôle pour les questions d’équité procédurale est la décision correcte. (Établissement de Mission c. Khela, 2014 CSC 24, au paragraphe 79, et Moodie c. Canada (Procureur général), 2015 CAF 87, au paragraphe 50). Cependant, la jurisprudence récente de la Cour d’appel reconnaît que même selon la norme de la décision correcte, malgré l’expérience et l’expertise considérables du décideur, la marge d’appréciation à appliquer est jugée sur le plan contextuel. Lorsque le contexte réglementaire précis du décideur est pris en considération, il peut faire en sorte que le contrôle ressemble davantage à un contrôle fondé sur la norme de la décision raisonnable. (Maritime Broadcasting System Limited c. Canadian Media Guild, 2014 CAF 59, au paragraphe 51).

[59]           Plus récemment, le statut de la norme de contrôle pour les questions d’équité procédurale a été décrit comme [traduction] « instable » et « un imbroglio juridictionnel » dans Bergeron c. Canada (Procureur général), 2015 CAF 160, au paragraphe 71. Dans la présente affaire, il n’est pas nécessaire d’essayer de résoudre l’« imbroglio ». J’ai déterminé, pour les motifs qui suivent, que la procédure suivie était juste et adéquate, ce qui signifie qu’elle était aussi raisonnable.

IX.             Positions des parties sur les questions

A.                Observations du demandeur

(1)               Caractère raisonnable de la décision

[60]           L’avocat du demandeur a demandé à la Cour de garder à l’esprit que le demandeur s’est représenté lui-même jusqu’à ce qu’il dépose sa demande de contrôle judiciaire, moment où il a retenu les services d’un avocat afin de contre-interroger les souscripteurs d’affidavit du défendeur, puis pour le représenter à l’audience.

[61]           L’avocat soutient également qu’il n’existe pas d’éléments de preuve justifiant les événements allégués. Le demandeur a maintenu, tout au long des différentes étapes de l’affaire, qu’il n’avait rien fait de mal. Il n’a pas admis avoir eu une conduite inappropriée avec les cadets. Il n’y a pas d’accord sur le fait que les allégations sont vraies ou que les événements en question se sont vraiment produits.

[62]           Le demandeur fait valoir qu’il a été mis en garde à plusieurs reprises pour des actions qu’il a niées et qu’il n’a donc pas pu corriger; la « preuve » de sa mauvaise conduite se trouve uniquement dans les avertissements répétés qu’il a reçus.

[63]           Pour appuyer sa position, le demandeur attire l’attention sur les conclusions et recommandations du CGFC selon lesquelles l’enquête initiale sur le harcèlement était foncièrement erronée, l’équité procédurale n’avait pas été fournie, étant donné que le rapport préliminaire n’avait pas été présenté au demandeur à des fins de commentaires ou d’examen, et les conclusions de l’enquête ont été jugées déraisonnables.

(2)               Caractère approprié des motifs

[64]           Le demandeur déclare que, bien qu’il ait été réprimandé par ses supérieurs pour ne pas avoir « corrigé » son comportement avec les cadets, il ne pouvait pas corriger quelque chose qui ne s’était pas produit. L’avocat indique qu’il est en effet « absurde » de justifier la conclusion du chef d’état-major de la Défense sans apporter d’abord la preuve de la mauvaise conduite et sans que le chef d’état-major de la Défense rende sa décision particulière comprenant le récit des détails et événements sous-jacents.

(3)               Équité procédurale

[65]           Le demandeur indique qu’il n’a jamais reçu les détails adéquats qui lui auraient permis de se défendre de manière efficace. Il convient que le fait de fraterniser avec les cadets est inapproprié, mais il maintient fermement qu’il n’est pas coupable.

[66]           Le demandeur se fonde sur R c. Stinchcombe, [1991] 3 RCS 326 (CSC), pour affirmer qu’il a le droit de savoir « qui, quoi, quand, etc. ». Il indique qu’il ne connaissait pas les accusations auxquelles il devait répondre et que la décision ne précisait pas clairement si le chef d’état-major de la Défense, colonel Malo, en avait également pris connaissance.

[67]           Dans ses observations écrites, le demandeur s’est fondé uniquement sur le manque de détails mentionné précédemment étayant les allégations à présenter selon lesquelles il n’a pas reçu le moindre niveau d’équité auquel il avait droit, selon lui. Il se fonde généralement sur les facteurs exposés dans Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 RCS 817 (CSC), pour appuyer cette affirmation, mais sans préciser son application.

[68]           Le demandeur a également déclaré dans son avis de requête qu’un examen de novo (effectué dans cette affaire par le CGFC et le chef d’état-major de la Défense) ne pouvait pas remédier à l’équité procédurale qui avait eu lieu. Il ne cite aucune autorité pour appuyer cette position.

B.                 Observations du défendeur

(1)               Caractère raisonnable de la décision

[69]           Le défendeur soutient que non seulement la décision du chef d’état-major de la Défense doit refléter un niveau élevé de retenue, mais le demandeur souhaite simplement que la Cour réévalue la preuve ou qu’elle soit très sélective en ce qui concerne la preuve. Le défendeur invite la Cour à examiner la totalité de la preuve, comme l’a fait le chef d’état-major de la Défense. Dans cette affaire, le défendeur allègue qu’il existe un nombre amplement suffisant d’éléments de preuve sur lesquels le chef d’état-major de la Défense pourrait fonder et a fondé sa décision.

[70]           En se fondant sur l’arrêt Rompré c. Canada (Procureur général), 2012 CF 101 (Rompré), le défendeur soutient que le chef d’état-major de la Défense bénéficie d’un pouvoir discrétionnaire significatif en ce qui concerne les griefs et la détermination des voies de recours appropriées.

(2)               Caractère approprié des motifs

[71]           Cette question ayant été soulevée une première fois au cours de l’audience, le défendeur n’a pas présenté d’observations écrites en ce qui concerne cette allégation, mais il a affirmé, en se fondant sur l’arrêt Dunsmuir, que la nature du processus de règlement des griefs étant un processus spécialisé au sein d’un organisme spécialisé et la norme de contrôle de la décision étant le caractère raisonnable, les motifs sont justifiés et intelligibles.

(3)               Équité procédurale

[72]           Pour appuyer le fait que le processus a été juste à l’égard du demandeur, le défendeur fait mention de la divulgation détaillée qui a eu lieu et de l’occasion offerte au demandeur et saisie par celui-ci à chaque étape décisive pour donner son avis et répondre. En outre, lorsque le chef d’état-major de la Défense a étudié l’affaire, il s’agissait d’un examen de novo et le demandeur avait reçu les noms exacts des plaignants et des informateurs. Suffisamment de renseignements avaient été révélés pour établir leurs identités. Il les connaissait tous, sur le plan professionnel ou personnel.

X.                Analyse

[73]           Outre l’avis de requête et le mémoire habituel des arguments et du droit de chaque partie, le dossier devant moi comprenait une transcription du contre-interrogatoire de l’analyste de grief du DGAGFC, le major Vallée, qui était responsable de l’examen du dossier du demandeur et qui devait en fournir l’analyse au chef d’état-major de la Défense, ainsi qu’un dossier certifié du tribunal complet contenant plus de 1 000 pages, dont plusieurs avaient été reproduites plusieurs fois et intercalées dans chaque divulgation.

A.                Caractère raisonnable de la décision

[74]           Il est bien établi que conformément à la norme déférente du caractère raisonnable, la Cour doit reconnaître que les questions soumises aux tribunaux administratifs peuvent ne pas appeler un seul résultat précis, mais plutôt donner lieu à un certain nombre de conclusions raisonnables. Mon examen visant à déterminer si la décision du chef d’état-major de la Défense est raisonnable consistera à établir, à l’aide d’un examen des motifs qu’il a fournis, si ceux-ci sont justifiés, transparents et intelligibles dans le contexte du processus décisionnel et si la décision qui a été rendue fait partie des issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit (arrêt Dunsmuir, au paragraphe 47).

[75]           Le juge Noël dans Bernath c. Canada, 2007 CF 104 (conf. par Canada c. Bernath, 2007 CAF 400), a mené un examen approfondi de la nature du processus de règlement des griefs établi par le législateur à l’intention des Forces canadiennes en vertu de la Loi sur la défense nationale et des Ordonnances et règlements royaux applicables aux Forces canadiennes, volume 1, chapitre 7. Il a constaté, au paragraphe 42, que le processus de règlement des griefs était le suivant :

... un système interne de résolution de griefs qui est unique aux Forces canadiennes. L’autorité compétente à chacun des paliers décisionnels est le supérieur, en respect de l’ordre hiérarchique établi au sein des Forces canadiennes, de l’officier ou du militaire de rang portant plainte. En fait, il n’y a pas, au sens juridique du terme, un décideur indépendant appelé à décider d’un litige entre les parties. (Non souligné dans l’original.)

[76]           En vertu du paragraphe 18(1) de la Loi, le chef d’état-major de la Défense bénéficie d’un très large pouvoir, étant donné qu’il « assure la direction et la gestion des Forces canadiennes », sous réserve des règlements uniquement et sous la direction du ministre.

[77]           Compte tenu du degré d’autonomie et de l’expertise particulière du chef d’état-major de la Défense dans le cadre d’un processus hautement spécialisé et au sein d’une organisation unique, je pense que le niveau de retenue auquel il a droit correspond à ce que l’on appelle « une grande marge d’appréciation ». Dans Canada (Procureur général) c. Boogaard, 2015 CAF 150, le juge Stratas, au moment d’effectuer le contrôle d’une décision du commissaire de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) (selon moi, il est raisonnable de faire un parallèle entre ce poste et celui du chef d’état-major de la Défense des Forces canadiennes) a constaté que le commissaire avait droit à une très grande marge d’appréciation. J’estime qu’il en va de même pour les décisions du chef d’état-major de la Défense, pour les mêmes motifs.

[78]           Comme le CGFC, le chef d’état-major de la Défense a jugé que l’enquête initiale était erronée et qu’elle ne respectait pas la politique et le processus appropriés. Il a déterminé que l’enquête et tous les documents connexes devraient être retirés des dossiers et détruits. Bien que le demandeur ait soutenu que l’enquête erronée démontre que la décision rendue par le chef d’état-major de la Défense n’était pas raisonnable, je ne partage pas son avis. Les conclusions du CGFC et la décision rendue par le chef d’état-major de la Défense ne permettent de conclure cela, étant donné qu’ils ont tous deux examiné les allégations portées contre le demandeur en reprenant depuis le début. Dans le cas du CGFC, ils n’ont trouvé rien de « malencontreux ou d’injuste » dans les mesures prises par le commandant pour modifier les responsabilités du demandeur au sein de l’unité et limiter son implication avec les cadets en dehors du Programme des Cadets. Le CGFC a également constaté qu’il n’y avait rien de malencontreux dans les comptes rendus de discussion datés du 2 novembre 2010 et du 16 février 2011 qui justifierait leur retrait des dossiers du demandeur. Les deux documents portaient sur le comportement allégué du demandeur et sur la discussion à cet égard. Les motifs pour lesquels l’enquête a été jugée erronée étaient liés à l’absence d’un processus procédural, non à la collecte d’éléments de preuve composés en majeure partie de documents écrits sous la forme de lettres, de courriels ou de comptes rendus de discussion. Cela ne veut pas dire que parce que l’enquête initiale était erronée, elle a une incidence sur les décisions subséquentes. Le CGFC et le chef d’état-major de la Défense ont étudié les éléments de preuve sans tenir compte des conclusions du rapport d’enquête qui, comme chacun l’a confirmé, devaient être retirées des dossiers du demandeur en raison de leurs lacunes.

[79]           J’ai examiné le dossier devant le chef d’état-major de la Défense et j’ai constaté qu’il étayait d’une façon on ne peut plus appropriée ses conclusions. Même si la marge d’appréciation était étroite plutôt que large, la décision peut se justifier au regard des faits et du droit. La décision aborde chaque question soulevée par le demandeur ou le décideur précédent au cours du processus. Il y a suffisamment de détails et d’explications pour être en mesure de comprendre la raison pour laquelle le chef d’état-major de la Défense est parvenu aux conclusions qu’il a tirées.

[80]           Contrairement aux arguments du demandeur lors de l’audience, les deux motifs relatifs aux désaccords avec les recommandations tirées des conclusions et recommandations du CGFC ont été fournis par le chef d’état-major de la Défense et ils étaient les suivants :

1.      le chef d’état-major de la Défense a décidé que les documents doivent être retirés du dossier du demandeur et détruits, contrairement aux conclusions et recommandations du CGFC selon lesquelles il n’y avait rien de malencontreux dans les documents et rien ne justifiait leur suppression.

Le motif fourni par le chef d’état-major de la Défense était que leur conservation au dossier allait à l’encontre de l’esprit de la directive visant à protéger les membres.

2.      Les conclusions et recommandations du CGFC ont indiqué que la mesure corrective de la première mise en garde était non exécutoire et inopérante, en raison de sa mutation dans la Force régulière. Elle devrait donc être retirée du dossier du demandeur. Le chef d’état-major de la Défense a approuvé cette conclusion, mais il est allé plus loin et a ordonné la prononciation de la nouvelle mesure corrective d’un avertissement écrit, ce qui est plus important qu’une première mise en garde.

Le chef d’état-major de la Défense a fourni une explication très détaillée de sa décision de prononcer un avertissement écrit et il a fini par conclure que le demandeur n’avait pas atteint le niveau approprié de maturité professionnelle et qu’il ne comprenait pas clairement la distinction qu’il devait faire entre les relations personnelles et les relations professionnelles.

[81]           En ce qui concerne cette dernière conclusion, l’avocat du demandeur a soutenu que le chef d’état-major de la Défense n’avait pas le pouvoir de remplacer la première mise en garde par un avertissement écrit. Cependant, dans Rifai c. Canada (Procureur général), 2015 CAF 145, la Cour d’appel a annulé la décision de première instance qui était parvenue à une conclusion semblable au sujet d’une affaire portant sur un grief militaire et une mesure corrective. En agissant ainsi, la Cour a expressément conclu, au paragraphe 4, ce qui suit :

Finalement, le remplacement d’une mesure corrective sur le rendement par une mesure corrective sur la conduite relève du pouvoir discrétionnaire et de l’expertise du CEMD.

[82]           En d’autres termes, remplacer une forme de mesure corrective par une autre forme de mesure corrective est du ressort du chef d’état-major de la Défense. Par conséquent, cette mesure prise par le chef d’état-major de la Défense est raisonnable, compte tenu de l’autorité qu’il détient, des éléments de preuve qu’il a examinés et des motifs qu’il a fournis pour supprimer la première mise en garde et publier un avertissement écrit. Ces décisions relevaient bien de l’expertise et de l’autorité du chef d’état-major de la Défense et peuvent se justifier au regard des faits et du droit.

[83]           Bien que le demandeur ait réussi à convaincre le chef d’état-major de la Défense pour la plupart de ses griefs, il n’a pas été en mesure de le persuader que les allégations selon lesquelles il ne se serait pas bien comporté avec les cadets étaient non fondées. Le chef d’état-major de la Défense a conclu que ces allégations étaient [traduction] « bien documentées », que le demandeur a été « informé en personne ou par courriel, à neuf reprises, des mêmes écarts par rapport à la norme de conduite » et que, selon la prépondérance des probabilités, le demandeur n’a pas corrigé ses écarts de conduite. Bien que le demandeur et son avocat affirment que le chef d’état-major de la Défense n’a pas tiré de conclusion expresse selon laquelle les allégations étaient confirmées et n’a pas abordé la question selon laquelle aucun détail n’a été fourni, il ressort clairement de la partie de la décision portant sur le contexte, ainsi que des motifs fournis tout au long du processus décisionnel, que le chef d’état-major de la Défense n’a pas jugé que les allégations étaient justifiées, bien que l’enquête ait été viciée.

[84]           Le dossier étaye clairement une telle conclusion tirée par le chef d’état-major de la Défense. Bien que l’avocat du demandeur ait préféré que la décision du chef d’état-major de la Défense indique les détails sous-jacents des allégations par chapitre et verset, au lieu d’y faire référence d’une manière générale, il ne fait aucun doute que le chef d’état-major de la Défense est arrivé à la conclusion particulière que les allégations étaient confirmées. Le dossier comporte de nombreux renseignements provenant de plusieurs sources différentes montrant que le demandeur a fraternisé avec les cadets et était critique de façon inopportune à l’égard des parents et d’autres personnes de sa chaîne de commandement. Le poids cumulatif de la preuve est tel que si le chef d’état-major de la Défense avait tiré une autre conclusion concernant les écarts de conduite allégués, une telle conclusion aurait bien pu être déraisonnable.

[85]           S’il fallait croire la déclaration du demandeur selon laquelle il est entièrement innocent des allégations portées contre lui, cela signifierait qu’un vaste complot aurait été monté contre lui au sein de la chaîne de commandement, par les parents des cadets et les cadets, mais également par des membres du public concernés, à l’extérieur du SAIOC. Il n’existe absolument aucune preuve d’un tel complot ou aucune raison apparente à l’existence d’un tel complot.

[86]           Le fait de nier à plusieurs reprises que des événements se sont produits ne signifie pas que les allégations ne sont pas vraies. Cela signifie que suffisamment d’éléments de preuve doivent appuyer les allégations pour permettre au décideur de déterminer qu’il est plus probable qu’improbable qu’elles soient vraies. Le test de prépondérance des probabilités s’applique à cette affaire. Dans cette affaire, des éléments de preuve permettent d’affirmer que plusieurs personnes ont été préoccupées par le comportement du demandeur et ont essayé de le mettre en garde pour qu’il change de comportement. Bien qu’il soit vrai qu’au moins deux parents de cadets ont fourni des lettres qui soutenaient le demandeur, ce soutien portait principalement sur son droit perçu de connaître les détails précis des différents événements et sur l’opinion selon laquelle il n’a pas été bien traité.

[87]           Par conséquent, le chef d’état-major de la Défense a conclu que le demandeur a été lésé dans une certaine mesure, mais pas pour les motifs donnés par le demandeur. Il a déterminé qu’une mesure corrective était le moyen administratif approprié en ce qui concerne les allégations, mais la chaîne de commandement du demandeur avait été trop accommodante et aurait dû prendre une mesure plus tôt, au cours du processus. Il a annulé la mesure corrective d’une PMG, car elle a été prise après que le demandeur a été muté dans la Force régulière. Par conséquent, elle a été émise sans l’autorisation adéquate.

[88]           Le chef d’état-major de la Défense a jugé que le demandeur a été lésé, non pour les motifs qu’il a allégués, mais plutôt parce qu’il [traduction] « n’avait pas eu l’occasion de corriger [ses] faiblesses et de prouver à [sa] chaîne de commandement qu’[il] comprenait la nature de [son] écart de conduite ». Contrairement à l’argument du demandeur selon lequel le chef d’état-major de la Défense n’a pas conclu que les allégations étaient confirmées, il s’agit d’une conclusion très claire indiquant que les allégations sont confirmées. Le chef d’état-major de la Défense a indiqué les motifs de sa conclusion et a expliqué dans la décision pourquoi les officiers avaient besoin de  [traduction« comprendre clairement la distinction qui doit être faite entre les relations personnelles et les relations professionnelles ». C’est pourquoi le chef d’état-major de la Défense a déterminé qu’une nouvelle mesure corrective doit être prise et qu’un avertissement écrit était approprié pour les motifs donnés.

B.                 « Caractère approprié des motifs »

[89]           Bien que la question n’ait pas été soulevée dans son mémoire des arguments, le demandeur m’a demandé si les motifs mentionnés par le chef d’état-major de la Défense convenaient pour expliquer quels éléments de preuve il a examinés et comment il est parvenu à ses conclusions, notamment parce que le chef d’état-major de la Défense n’a pas tiré de conclusion précise sur le fait que le demandeur a adopté le comportement allégué.

[90]           Cependant, le chef d’état-major de la Défense a expliqué la raison de ses conclusions en ce qui concerne les allégations et la mesure corrective liée à celles-ci. Comme je l’ai indiqué concernant la norme de contrôle, le caractère approprié d’un ensemble de motifs fait simplement partie de l’analyse permettant de déterminer si la décision est raisonnable. Dans Nfld. Nurses, la juge Abella explique le concept par l’intermédiaire du paragraphe 12 :

[12] Il importe de souligner que la Cour a souscrit à l’observation du professeur Dyzenhaus selon laquelle la notion de retenue envers les décisions des tribunaux administratifs commande [traduction] « une attention respectueuse aux motifs donnés ou qui pourraient être donnés à l’appui d’une décision ». Dans son article cité par la Cour, le professeur Dyzenhaus explique en ces termes comment le caractère raisonnable se rapporte aux motifs :

[traduction] Le « caractère raisonnable » s’entend ici du fait que les motifs étayent, effectivement ou en principe, la conclusion. Autrement dit, même si les motifs qui ont en fait été donnés ne semblent pas tout à fait convenables pour étayer la décision, la cour de justice doit d’abord chercher à la compléter avant de tenter de les contrecarrer. Car s’il est vrai que parmi les motifs pour lesquels il y a lieu de faire preuve de retenue on compte le fait que c’est le tribunal, et non la cour de justice, qui a été désigné comme décideur de première ligne, la connaissance directe qu’a le tribunal du différend, son expertise, etc., il est aussi vrai qu’on doit présumer du bien-fondé de sa décision même si ses motifs sont lacunaires à certains égards. [Souligné dans l’original] [N’apparaît pas en italique dans l’original]

[91]           Au moment de résumer comment une cour de révision doit juger les motifs donnés par un décideur tel que le chef d’état-major de la Défense, la juge Abella, au paragraphe 18, a cité la décision dans Société canadienne des postes c. Alliance de la Fonction publique du Canada, 2010 CAF 59, rendue par le juge Evans qui a dit :

... « la perfection n’est pas la norme ». [traduction]... les tribunaux de révision devraient déterminer si, « lorsqu’on les examine à la lumière des éléments de preuve dont il disposait et de la nature de la tâche que la loi lui confie, on constate que les motifs du Tribunal expliquent de façon adéquate le fondement de sa décision » (paragraphe  163). (Non souligné dans l’original.)

[92]           Dans Nfld. Nurses, au paragraphe 15, la Cour suprême du Canada confirme qu’une cour de révision peut examiner le dossier pour évaluer le caractère raisonnable de la décision faisant l’objet du contrôle et que les motifs n’ont pas besoin de porter sur chaque élément constitutif de l’affaire. L’instruction du tribunal, aux paragraphes 15 et 16, est très utile à cet égard :

[15] La cour de justice qui se demande si la décision qu’elle est en train d’examiner est raisonnable du point de vue du résultat et des motifs doit faire preuve de « respect [à l’égard] du processus décisionnel [de l’organisme juridictionnel] au regard des faits et du droit » (Dunsmuir, par. 48) Cela signifie que les tribunaux ne doivent pas substituer leurs propres motifs, mais ils peuvent, s’ils le jugent nécessaire, examiner le dossier afin d’évaluer le caractère raisonnable de l’issue.

[16]  Il se peut que les motifs ne fassent pas référence à tous les arguments, dispositions législatives, précédents ou autres détails que le juge siégeant en révision aurait voulu y lire, mais cela ne met pas en doute leur validité ni celle du résultat au terme de l’analyse du caractère raisonnable de la décision. Le décideur n’est pas tenu de tirer une conclusion explicite sur chaque élément constitutif du raisonnement, si subordonné soit‑il, qui a mené à sa conclusion finale (Union internationale des employés des services, local no 333 c. Nipawin District Staff Nurses Assn., [1975] 1 R.C.S. 382, au paragraphe 391). En d’autres termes, « les motifs répondent aux critères établis dans Dunsmuir s’ils permettent à la cour de révision de comprendre le fondement de la décision du tribunal et de déterminer si la conclusion fait partie des issues possibles acceptables ».

[93]           De nombreux éléments de preuve dans le dossier appuient les motifs du chef d’état-major de la Défense. En plus de tous les éléments de preuve, le chef d’état-major de la Défense disposait de la décision rendue par l’autorité initiale, des conclusions et recommandations du CGFC et de l’analyse faite par le DGAGFC. J’ai également examiné le dossier comprenant tous les motifs fournis par les décideurs précédents et, bien entendu, la décision faisant l’objet du contrôle. J’ai déjà déterminé que les motifs fournis par le chef d’état-major de la Défense disposent d’une marge d’appréciation suffisante qui est également appelée « issues possibles acceptables ». Je pense que les motifs fournis sont étayés par le dossier, peuvent se justifier au regard des faits et du droit et sont justifiés, transparents et intelligibles. J’indique cela en particulier, car toutes les décisions dans le dossier servent aussi à compléter les motifs du chef d’état-major de la Défense, sauf lorsqu’il désapprouve expressément un point, comme l’absence de processus dans l’enquête initiale et deux des recommandations formulées par le CGFC. Pour les mêmes motifs que j’ai évoqués au moment d’examiner le caractère raisonnable de la décision, je pense qu’il n’existe aucun problème lié au caractère approprié des motifs fournis. La décision suffit pour me permettre de comprendre pourquoi le chef d’état-major de la Défense a rendu une telle décision et j’ai déjà déterminé que la décision de publier un avertissement écrit fait partie des issues possibles acceptables et relève de l’autorité du chef d’état-major de la Défense.

C.                Équité procédurale

[94]           Le demandeur a soulevé deux questions sous cette rubrique. La première question se rapporte au fait qu’il ne connaissait pas l’allégation à laquelle il devait répondre, car il ne disposait pas de détails suffisants. La seconde question est le fait qu’un examen de novo ne peut pas remédier à ce vice. Il a également soutenu que les décideurs n’ont pas tenu compte des personnes qui ont témoigné en sa faveur.

(1)               Degré de divulgation requis

[95]           Il a été constaté que « [l]’étendue de la divulgation requise pour que la personne visée soit suffisamment informée varie d’une affaire à l’autre, selon les allégations et la preuve contre elle. En dernier ressort, c’est au juge désigné qu’il appartient de décider si cette norme a été respectée. »  Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Harkat, 2014 CSC 37, au paragraphe 57.

[96]           Dans un arrêt sur lequel le demandeur se fonde, Knight c. Indian Head School Division No. 19, [1990] 1 RCS 653, la Cour suprême du Canada a statué qu’un employé qui n’a jamais été avisé officiellement des motifs de son renvoi « savait ou aurait dû savoir » pourquoi son employeur « n’était pas satisfait avec son contrat de travail » précisant qu’il était informé des motifs par l’intermédiaire de réunions avec son employeur. Dans le processus, la Cour suprême, au paragraphe 53, a reconnu et accepté la déclaration selon laquelle « on ne vise pas à créer “la perfection procédurale”, mais bien à établir un certain équilibre entre le besoin d’équité, d’efficacité et de prévisibilité des résultats ».

[97]           Sur le plan législatif, le CEMD est autorisé et orienté par l’article 29.11 de la Loi lorsqu’il agit en tant qu’autorité de dernière instance dans le processus de règlement des griefs : « dans la mesure où les circonstances et les considérations d’équité et de justice naturelle le permettent, l’arbitre règle sans formalisme et en procédure expéditive les affaires dont il est saisi ». Cela permet de distinguer clairement le niveau de divulgation requis dans la procédure de grief des FAC des accusations portées en vertu du Code criminel du Canada, par exemple. En effet, dans l’affaire Bernath, le juge Noël, au moment de déterminer si le chef d’état-major de la Défense était reconnu par « un tribunal compétent » au sens de l’article 24 de la Charte canadienne des droits et libertés, a observé qu’il ne l’était pas. Pour tirer cette conclusion, le juge Noël, au paragraphe 98, a statué que «  le fondement juridique donnant naissance aux deux recours n’est de toute évidence pas le même ». Il est donc raisonnable de conclure que le fondement et le processus procédural ne sont pas les équivalents d’une procédure judiciaire.

[98]           À mon avis, le demandeur, comme le prouve le fait qu’il se fonde sur l’arrêt Stinchcombe, confond le [traduction] « droit de connaître l’allégation à laquelle il doit répondre » et le niveau élevé de divulgation requis de la Couronne en matière pénale. Or, il ne s’agit pas d’une affaire pénale, mais d’une décision rendue par un tribunal administratif spécialisé qui accorde un haut niveau de discrétion au chef d’état-major de la Défense. Lorsqu’il détermine les affaires dont il est saisi il agit avec « célérité et sans formalisme », ce qui comprend l’évaluation du bien-fondé des griefs et les mesures correctives jugées appropriées, la retenue envers le chef d’état-major de la Défense est importante, aussi longtemps que l’équité procédurale est prise en considération, en vertu de l’article 29.11 de la Loi.

[99]           Les composantes de l’équité procédurale auxquelles le demandeur était en droit de s’attendre sont énoncées dans la DOAD 2017-1. Les voici :

Dans le cadre du SGFAC, l’équité procédurale a pour but de garantir au plaignant la possibilité de participer de façon significative au processus décisionnel. Dans le contexte du SGFAC, le plaignant a le droit :
a. d’être avisé des enjeux importants et des conséquences potentielles de toute décision pouvant être prise par l’autorité de redressement;
b. de se faire remettre tous les documents et renseignements pertinents qui seront pris en considération par l’autorité de redressement;
c. d’avoir l’occasion de présenter des observations sur les documents et les renseignements;
d. de recevoir en temps opportun une décision bien expliquée, raisonnable et impartiale à l’égard de son grief.

[100]       Lorsque l’on étudie la procédure dans son ensemble, au moment où cette affaire a été examinée par le chef d’état-major de la Défense, les détails complets avaient été mis à la disposition du demandeur. Par exemple, les documents à divulguer au niveau de l’autorité initiale et du chef d’état-major de la Défense comportaient les détails des allégations, notamment :

         les courriels entre les membres des FAC concernant le comportement du demandeur qui a été directement observé par la personne ayant rédigé ces courriels ou signalé à celle-ci;

         les courriels ou les lettres des parents concernant le comportement du demandeur qui le soutiennent ou qui allèguent une inconduite de sa part;

         une lettre détaillée dactylographiée de trois pages datée du 22 mars 2011 d’un parent de deux cadets qui a entretenu une relation d’amitié avec le demandeur, dont le contenu ne laisserait planer aucun doute dans l’esprit du demandeur quant à l’identité de la personne ayant rédigé cette lettre et qui contenait ce qui suit :

o   détails, parmi d’autres méfaits, de l’allégation selon laquelle le demandeur a servi de l’alcool à son fils;

o   la déclaration selon laquelle, à un moment donné, le demandeur [traduction] « est venu me voir et m’a dit que même les membres de la police militaire lui ont demandé combien de temps il passait avec les cadets »;

o   la déclaration selon laquelle le demandeur n’a pas écouté ou respecté la chaîne de commandement;

o   il a communiqué des renseignements de façon inappropriée provenant de Fortress [sic];

         les allégations détaillées fournies en réponse à une demande de renseignements de la part de l’agent enquêteur par les personnes directement concernées par l’affaire impliquant le demandeur, y compris le commandant et l’Ordre du Commandement aérien contre qui il a porté plainte;

         une copie du courriel du président du comité civil des parents (un lieutenant-colonel) qui a été envoyé au demandeur et qui lui reproche d’avoir communiqué avec le président « contrairement au protocole militaire approprié ».

[101]       Après avoir examiné le dossier, il apparaît clairement que certaines notes au dossier et certains courriels ont censuré les véritables noms. En revanche, tous contenaient d’autres détails importants qui auraient permis au demandeur de facilement deviner qui acheminait les renseignements et quels cadets ou événements étaient concernés. Voici deux exemples types de notes au dossier différentes de la chaîne de commandement qui ont été divulguées au demandeur et qui décrivent les événements allégués : [traduction]

Monsieur [censuré] est allé me voir en passant; je le connais depuis de nombreuses années, car il est un autre ingénieur professionnel de la Saskatchewan Watershed Authority (les mots inutiles ont été omis). [le demandeur] lui a parlé et lui a demandé si je possédais de la correspondance liée à [le demandeur] et à son fils, car une plainte selon laquelle [le demandeur] avait des conversations informelles ne se rapportant pas aux cadets avec le caporal de section [censuré] l’année dernière a été déposée.

La discussion que nous avions eue auparavant concernait Madame [censuré] et son fils. Son fils n’a pas été promu au grade de sous‑officier de 2e classe, car il n’était pas admissible, toutefois [le demandeur] fournissait à la famille des renseignements, en portant une nouvelle fois atteinte à l’unité et en créant beaucoup de paperasse et de difficultés supplémentaires pour les parents, le cadet et moi-même. Il a nié cela, mais les renseignements dont Madame [censuré] disposait, p. ex. comme les Ordonnances sur l’administration et l’instruction des cadets (OAIC) et les taux de présence tirés de FORTRESS, ne pouvaient provenir que d’un agent. Son fils était l’un des amis avec lesquels [le demandeur] entretenait une relation personnelle connue et il s’avère qu’il s’agissait du cadet à qui [le demandeur] a, selon les accusations, servi de l’alcool, d’après la déclaration verbale de son père qui m’a été adressée et une déclaration verbale de sa mère.

[102]       Ces deux notes contiennent suffisamment de détails pour que le demandeur comprenne qui était le plaignant et quel cadet et quels événements étaient en cause. Bien que des dates précises ne soient pas mentionnées dans les notes, la date à laquelle les notes ont été créées apparaît et, sauf si le demandeur a adopté un tel comportement plus d’une fois, la date précise est quelque peu inutile.

[103]       L’un des éléments de preuve les plus importants était peut-être une lettre de trois pages envoyée par un parent qui était un ami du demandeur et la mère du fils à qui il aurait servi de l’alcool. Au début de la lettre, elle indique être le parent de deux cadets et éprouver des inquiétudes concernant le demandeur [traduction] « et les relations étroites qu’il a tissées avec les cadets ». Elle continue en déclarant ce qui suit : [traduction]

Avec le temps, mon mari m’a demandé : « Tu ne trouves pas que c’est étrange que John veuille toujours passer du temps avec [censuré]? ». J’ai répondu peut-être mais qu’il l’invitait seulement à monter à bord de son avion et qu’il apprenait à [censuré] à conduire un véhicule à boîte manuelle.

[104]       Plus loin, elle fait part d’un entretien qu’elle a eu au cours d’une rencontre à Tim Horton’s avec le demandeur, qui avait demandé de rencontrer l’auteure de la lettre et son mari. Dans la lettre, elle écrit que le demandeur a déclaré ce qui suit : [traduction]

Il a appelé [censuré] pour savoir s’il voulait passer du temps avec lui et [censuré] a répondu : « non, je suis occupé ». John, préoccupé, s’est demandé si nous ne faisions pas trop travailler [censuré].

[105]       Une conclusion commune ressort dans cette lettre et d’autres notes du dossier. Il s’agit de la déclaration de l’auteure relative au comportement et aux attitudes du demandeur selon laquelle [traduction] « il ne comprend simplement pas ».

[106]       Les exemples ci-dessus contiennent clairement suffisamment de renseignements, comme cela est aussi le cas pour d’autres documents qui ont été communiqués au demandeur, pour qu’il connaisse les auteurs, le sujet et, avec une quasi-certitude, le moment des diverses allégations, bien que les noms aient été censurés. Il existe également d’autres éléments d’identification dans les lettres et les notes qui, pour une personne raisonnable, dans la plupart des cas, ne laisseraient planer aucun doute quant à l’identité de l’auteur et des cadets impliqués, dans des circonstances similaires. Les événements sont bien détaillés. Ils ont été communiqués de nombreuses fois au demandeur.

[107]       Je n’ai aucune hésitation à conclure que, d’après le dossier, la véritable implication du demandeur dans le processus et la conformité très détaillée et stricte avec la DOAD-2017-1 appliquée par les FAC, la divulgation fournie au demandeur était juste à tous les égards. Le fait que l’on a déterminé que huit griefs sur dix ont été accueillis de la même manière confirme l’authenticité et l’équité du processus une fois l’étape du CGFC et du chef d’état-major de la Défense franchie.

(2)               Examen de novo

[108]       Le demandeur déclare qu’un examen de novo dans le cas présent n’est pas suffisant pour remédier aux vices de l’enquête portant sur sa plainte et à l’absence de détails dans les allégations portées contre lui. Il ne justifie pas sa déclaration, mais je dois traiter la question puisqu’il l’a soulevée.

[109]       Dans l’arrêt Walsh c. Canada (Procureur général), 2015 CF 775 (Walsh), le juge de Montigny, tel était alors son titre, a soutenu au paragraphe 51 que «  l’idée centrale de la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt McBride est qu’un examen de novo suffira pour remédier à un manquement à l’équité procédurale lorsque la procédure, examinée dans son ensemble, était équitable ». La référence à McBride concerne la décision de la Cour d’appel dans l’arrêt McBride c. Canada (Défense nationale), 2012 CAF 181, où la question visant à savoir si un examen de novo peut remédier à des vices de procédure antérieurs a été approfondie. La Cour a conclu que, dans le contexte de la procédure de grief militaire, le processus suivi, qui était identique à celui suivi pour le demandeur, servait à remédier aux manquements antérieurs.

[110]       Le CGFC et le chef d’état-major de la Défense ont entièrement et rigoureusement réexaminé les éléments de preuve, en reprenant depuis le début. À chaque étape, le demandeur a fourni des commentaires et des critiques supplémentaires concernant le processus à cette date. Rien n’a été négligé. Par l’intermédiaire du processus de divulgation présenté précédemment, les détails complets des plaignants, des renseignements suffisants pour déterminer l’identité des cadets et les événements en question, ont été fournis de manière efficace, bien que les noms réels aient été, dans certains cas, censurés. En ce qui concerne les noms, l’avocat a fait valoir, à l’intention du défendeur, que tous les noms ont été divulgués au demandeur. Cependant, le dossier devant moi ayant des censures, je préfère fonder mon analyse sur le fait que certains renseignements ont été censurés. Il est certain que si rien n’a été censuré, il n’existe aucun fondement à la position que maintient le demandeur quant au fait qu’il ne connaissait pas l’allégation à laquelle il a dû répondre.

[111]       Le chef d’état-major de la Défense avait tous ces renseignements devant lui. Le demandeur a notamment expliqué, dans sa défense relativement aux divulgations, que l’auteure de la lettre a peut-être été trop influencée par la chaîne de commandement, étant donné qu’elle a refusé de signaler immédiatement l’événement allégué et que la lettre n’était pas signée. Néanmoins, la lettre a été divulguée au demandeur à plusieurs reprises et bien que trois copies n’aient pas été signées, au moins une copie, qui a été divulguée, l’était.

[112]       Le demandeur affirme qu’en l’absence de dates précises, il était difficile de défendre les allégations. Il pourrait avoir des réponses à certaines allégations, mais si cela est le cas, il ne les a jamais fournies. Le demandeur a affirmé qu’il était à l’étranger au printemps 2010, à deux séries de dates distinctes, pour des raisons personnelles. Il a indiqué qu’il possédait des éléments de preuve selon lesquels il n’était pas dans la province au moment où au moins un des événements en question se serait produit. Selon lui, si la date des événements en question lui était fournie, il fournirait les éléments de preuve concrets de ses absences.

[113]       Enfin, le demandeur a choisi de ne pas fournir les éléments de preuve et il n’a donc pas fait valoir ses arguments. Qu’il ait eu les dates exactes ou non, le demandeur a clairement pris un risque en ne fournissant pas les éléments de preuve potentiellement à décharge. Lorsqu’une personne faisant l’objet d’une enquête décide de ne pas participer ou de ne pas répondre à une partie du processus, il ne s’agit pas d’une question d’équité procédurale. C’est une décision calculée et le demandeur doit accepter les conséquences qui en découlent. Le fait qu’il se représente lui-même n’est pas une excuse pour commettre une erreur tactique d’une telle ampleur évidente.

[114]       Au moment où le CGFC et le chef d’état-major de la Défense ont examiné le dossier de novo, le demandeur connaissait bien toutes les allégations qui étaient assez détaillées. De même, les réfutations du demandeur étaient détaillées et se trouvaient dans le dossier. C’est à ce moment-là, sans doute, qu’il aurait dû présenter toutes les contre-preuves documentaires qu’il avait en sa possession. Il a consacré beaucoup de temps à traiter l’allégation relative aux médias sociaux et à critiquer les actions d’autres personnes de la chaîne de commandement. Il a déclaré qu’il pense qu’il a été [traduction] « victime d’un libelle, qu’il a été calomnié et diffamé en raison des allégations sans fondement portées contre lui. Toutes les allégations sont en effet sans fondement et aucune preuve concluante n’a été fournie pour les étayer ». Il mentionne les courriels et explique pourquoi ils montrent que les allégations ne sont pas valides. Il indique que les éléments de preuve qu’il a fournis pour réfuter les allégations semblent avoir été ignorés ou rejetés à tous les niveaux. J’ai déjà abordé le fait que les lettres présentées par deux parents différents pour soutenir le demandeur se trouvent effectivement dans le dossier. Tous ces renseignements se trouvent dans le dossier et ont été traités par le CGFC, le chef d’état-major de la Défense, ainsi que la Cour. Les décideurs ne sont pas tenus de se reporter à chaque élément de preuve particulier.

[115]       Je pense que l’examen de novo a grandement aidé le demandeur à étoffer entièrement sa position et à répondre à tout ce qui se trouve dans le dossier. Comme on dit, « c’est au fruit qu’on juge l’arbre ». En l’espèce, l’équité du processus peut être constatée dans le résultat qui était fortement favorable au demandeur et qui différait beaucoup de l’enquête initiale et de la décision de l’autorité initiale. Le demandeur a, dans une large mesure, réussi à faire en sorte que son grief soit accueilli. Il a été en partie accueilli en raison de sa mutation dans les forces régulières. Certaines des questions soulevées sont donc devenues sans objet. Il a réussi, dans d’autres aspects, car l’enquête initiale sur sa plainte a été sévèrement critiquée par le CGFC et le chef d’état-major de la Défense qui ont jugé qu’elle était « viciée et semblait biaisée » et que, par conséquent, le rapport de l’enquête et tous les documents connexes devaient être retirés de tous les fichiers et détruits.

XI.             Conclusion

[116]       Il incombait au demandeur de montrer pourquoi la décision n’était pas raisonnable. Bien qu’il continue à nier les événements qui ont eu lieu, la seule question substantielle qu’il a soulevée portait sur l’absence de détails des allégations. J’ai déterminé que le demandeur a bénéficié du degré de divulgation requis. Je ne réévaluerai pas les éléments de preuve, étant donné que ce n’est pas mon rôle. Je souhaite toutefois assurer le demandeur que j’ai examiné le dossier et soigneusement étudié l’affaire. J’ai tiré la même conclusion que le chef d’état-major de la Défense en ce qui concerne les allégations d’écarts de conduite. Elles ont été établies en se fondant sur la norme de preuve requise, selon la prépondérance des probabilités ou, il est « plus probable qu’improbable » que les événements se sont produits.

[117]       J’ai conclu que le processus suivi était juste. Le législateur a confié au chef d’état-major de la Défense la mission de déterminer la mesure corrective appropriée. L’émission d’un avertissement écrit et l’enquête possible sur l’allégation d’offre d’alcool ne semblent pas être disproportionnées par rapport à la conduite qui est réputée avoir eu lieu. Elles semblent raisonnables et comme l’a indiqué le chef d’état-major de la Défense, elles pourraient aider le demandeur.

[118]       Le demandeur a largement eu gain de cause. Je comprends pourquoi il a fait une demande de contrôle judiciaire : il continue d’affirmer son innocence et il ne souhaite pas que l’avertissement écrit soit ajouté à son dossier. Cependant, je conclus que l’émission d’un avertissement écrit relève bien de l’expertise du chef d’état-major de la Défense et qu’elle est également raisonnable. Il ne s’agit pas d’une note disciplinaire à son dossier, mais plutôt d’une formalité administrative et elle vise à aider le demandeur à corriger son rendement insuffisant et à lui accorder du temps pour qu’il corrige sa conduite et améliore son rendement. De même, la question d’une enquête possible sur l’allégation d’offre d’alcool à un mineur vise à « dissiper les doutes » et à supprimer tout soupçon lié au comportement du demandeur. Si une enquête est menée et le demandeur dispose d’éléments de preuve qui le disculperaient, il serait prudent de les fournir à ce moment-là.

[119]       Pour tous les motifs précités, la présente demande de contrôle judiciaire est rejetée avec dépens, adjugés au défendeur, qui seront déterminés en se fondant sur l’évaluation, sauf si les parties peuvent convenir d’un montant, dans les 20 jours suivant la publication de ce jugement.

JUGEMENT

LA COUR REND LE JUGEMENT SUIVANT :

1.       La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

2.       Les dépens sont attribués au défendeur. Si les parties ne peuvent pas convenir, dans les 20 jours suivant la date de ce jugement, du montant approprié des dépens, il devra alors être renvoyé à un agent d’examen aux fins de détermination.

« E. Susan Elliott »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-2361-14

 

INTITULÉ :

HIGGINS c. GÉNÉRAL T. LAWSON CHEF D’ÉTAT‑MAJOR DE LA DÉFENSE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Ottawa (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 15 octobre 2015

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE ELLIOTT

 

DATE DES MOTIFS :

Le 8 janvier 2016

 

COMPARUTIONS :

James Bowie

Pour le demandeur

 

Claudine Patry

 

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

McLeans Lawyers Professional

Corporation

Ottawa (Ontario)

 

Pour le demandeur

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du

Canada

Ottawa (Ontario)

 

Pour le défendeur

 

 

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