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Date : 20150818


Dossier : T-2094-14

Référence : 2015 CF 980

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 18 août 2015

En présence de madame la juge McVeigh

ENTRE :

HEATHER RUTH MCDOWELL

demanderesse

et

AUTOMATIC PRINCESS HOLDINGS, LLC

défenderesse

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

[1]               La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire, présentée en vertu de l’article 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales, LRC 1985, c F-7, d’une décision d’un membre de la Commission des oppositions des marques de commerce (la Commission). La Commission a refusé la demande d’autorisation de la demanderesse (ci‑après, McDowell) de déposer une déclaration d’opposition modifiée.

I.                   Contexte factuel

[2]               Le 25 août 2003, la défenderesse, Automatic Princess Holdings, LCC (ci‑après, Automatic) a déposé la demande de marque de commerce 1,187,510 afin d’enregistrer la marque de commerce HONEY B. FLY. La demande a été approuvée en septembre 2009, puis publiée dans le Journal des marques de commerce en décembre 2009.

[3]               McDowell a déposé une déclaration d’opposition à l’endroit de la marque d’Automatic le 2 mai 2010. Au soutien de son opposition, McDowell a soulevé les motifs d’absence de droit à l’enregistrement et le fait que la marque de commerce n’était pas distinctive, mais elle n’a pas déposé de preuve d’utilisation antérieure de marques. McDowell est propriétaire de l’enregistrement des marques de commerce HONEY et HONEY & DESIGN. McDowell s’est opposée à douze demandes d’enregistrement de marques comportant le mot « Honey », utilisé seul ou avec d’autres mots, pour les marchandises ou les services visés par ses enregistrements.

[4]               En réponse, Automatic a déposé une contre-déclaration le 6 juillet 2010.

[5]               Le 8 novembre 2010, McDowell a déposé l’affidavit d’Elenita Anastacio, qui contenait deux enregistrements : TMA767,075 (HONEY) et TMA767,134 (HONEY & DESIGN). Le 25 mai 2011, Automatic a contre interrogé Elenita Anastacio au sujet de son affidavit.

[6]               Automatic a déposé un affidavit de témoin le 21 janvier 2013. Les parties n’ont déposé aucune réponse. Le 19 mars 2014, McDowell a indiqué qu’elle ne déposerait pas d’argumentation écrite et qu’elle demandait une audience de vive voix. Automatic a déposé une argumentation écrite le 25 juillet 2014 et a demandé une date d’audience le 24 août 2014.

[7]               McDowell s’est aperçue par hasard qu’elle avait omis de modifier sa déclaration d’opposition qui mettrait à jour le changement pour passer d’une demande en attente à un enregistrement, et qu’elle avait aussi omis d’ajouter le nouveau motif de l’alinéa 12(1)d).

[8]               Le 14 août 2014, quatre ans après avoir déposé sa déclaration d’opposition, McDowell a demandé l’autorisation de la modifier afin d’y ajouter un nouveau motif. La modification demandée visait à invoquer l’alinéa 12(1)d) de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T-13 (la Loi), qui modifie le fardeau de preuve dont il faut s’acquitter pour démontrer l’utilisation des marques enregistrées. L’étape de l’audition de la preuve était terminée, et Automatic avait déposé son argumentation écrite.

[9]               Le 20 août 2014, la Commission a demandé à Automatic de lui faire part de ses observations relativement à la demande de modification. Le 3 septembre 2014, Automatic a formulé une opposition à la demande. Le 10 septembre 2014, McDowell a déposé des commentaires relativement aux observations d’Automatic.

[10]           Le 16 septembre 2014, la Commission a refusé d’autoriser le dépôt d’une déclaration d’opposition modifiée après avoir tenu compte des facteurs de la Partie VII de l’Énoncé de pratique concernant la procédure d’opposition en matière de marque de commerce.

[11]           La Commission a décidé que la demande d’autorisation de modifier la déclaration d’opposition avait été déposée très tard au cours des procédures, c’est-à-dire après que McDowell a reçu l’argumentation écrite de McDowell. La Commission a estimé que McDowell n’avait pas fourni d’explication adéquate pour le retard, autre que le fait qu’elle s’en était aperçue par hasard. Selon la Commission, la modification revêtait une certaine importance pour McDowell, car elle contenait un motif d’opposition supplémentaire qui n’obligeait pas McDowell à démontrer l’utilisation des marques de commerce en litige.

[12]           La Commission a estimé qu’Automatic en subissait un préjudice, car la modification aurait pour effet de permettre à McDowell de fragmenter les procédures, ce qui ne va pas de pair avec la justice, même si l’éventualité est accidentelle. Selon la Commission, le dossier semble indiquer que McDowell a produit sa demande d’autorisation de modifier sa déclaration après avoir pris connaissance de l’argumentation écrite d’Automatic.

[13]           La Commission a déclaré avoir pris en considération les facteurs mentionnés dans l’Énoncé de pratique concernant la procédure d’opposition en matière de marque de commerce, en vigueur depuis le 31 mars 2009, puis a rejeté la demande d’autorisation.

[14]           Le 23 septembre 2014, McDowell a demandé à la Commission de réexaminer sa décision, et, le 24 septembre 2014, Automatic a soumis des observations défavorables quant à ce réexamen.

[15]           En réponse à la demande de réexamen, la Commission a déclaré qu’elle n’avait pas commis d’erreur de compréhension des faits relatés dans les observations de McDowell, et qu’elle n’avait pas non plus commis d’erreur de droit manifeste en rejetant la demande d’autorisation de modifier la déclaration d’opposition. Le 7 octobre 2014, la Commission a rejeté la demande de réexamen.

II.                Décision interlocutoire – circonstances spéciales

[16]           La question préliminaire à trancher consiste à savoir si cette décision interlocutoire devrait faire l’objet d’un contrôle judiciaire avant la fin du processus administratif ou s’il existe des circonstances spéciales justifiant ce contrôle judiciaire.

[17]           Les parties conviennent que le refus d’accorder l’autorisation de modifier la déclaration d’opposition constitue une décision interlocutoire (Simpson Strong-Tie c Peak Innovations Inc, 2008 CAF 235) et qu’une décision interlocutoire peut faire l’objet d’un contrôle judiciaire seulement en présence de circonstances spéciales (Szczecka c Canada, [1993] ACF nº 934 (CAF), au paragraphe 4 (Szczecka)).

[18]           Dans l’affaire Szczecka, précitée, la Cour a établi que cette règle avait pour but d’éviter une « fragmentation des procédures » ainsi que de limiter la durée et le coût des procédures en raison de leurs répercussions sur la saine administration de la justice, sur laquelle ils jettent ultimement le discrédit.

[19]           En rendant sa décision, la Commission s’est fondée sur l’Avis à la communauté juridique qui établit les facteurs à prendre en considération au moment de décider de modifier ou non la déclaration d’opposition.

[20]           L’Avis à la communauté juridique dit :

VII Autorisation en vertu des règles 40 et 44(1) du Règlement

Une autorisation de modifier une déclaration d’opposition ou une contre-déclaration ou de produire une preuve supplémentaire ne sera accordée que si le registraire est convaincu qu’il est dans l’intérêt de la justice de le faire, compte tenu de toutes les circonstances de l’espèce, y compris :

1.   l’étape où en est rendue la procédure d’opposition;

2.   la raison pour laquelle la modification n’a pas été apportée ou la preuve n’a pas été produite plus tôt;

3.   l’importance de la modification ou de la preuve;

4.   le tort qui sera causé à l’autre partie.

III.             Circonstances spéciales ou exceptionnelles

[21]           Sans circonstances spéciales ou exceptionnelles, les parties ne peuvent pas s’adresser aux tribunaux judiciaires avant la fin des procédures administratives. Les parties doivent épuiser tous les recours efficaces à leur portée dans le cadre des procédures administratives, et ce n’est qu’à la fin du processus ou lorsqu’il n’y a plus aucun recours efficace qu’ils peuvent s’adresser aux tribunaux (CB Powell Ltd c Canada (Agence des services frontaliers), 2010 CAF 61). Cela signifie que des circonstances spéciales peuvent exister s’il n’y a aucun autre recours approprié (voir Szczecka).

[22]           L’opinion des parties diverge en ce que McDowell prétend qu’il n’existe pas d’autre recours adéquat dans le cadre des présentes procédures qui réponde au critère des circonstances spéciales justifiant un contrôle judiciaire de la décision. Automatic, quant à elle, prétend qu’il existe d’autres recours à épuiser, donc que les faits en question ne constituent pas des circonstances spéciales.

IV.             Recours adéquats

[23]           McDowell s’appuie sur les jurisprudences Parmalat Canada Inc c Sysco Corporation, 2008 CF 1104 (Parmalat) et Dairy Processors Association of Canada c Producteurs laitiers du Canada, 2014 CF 1054 (Dairy Processors). McDowell prétend qu’à l’instar de ces affaires, il existe des circonstances spéciales, parce qu’il n’existe aucun autre recours dans le cadre de ce processus administratif.

[24]           Dans Parmalat, la demanderesse désirait ajouter un nouveau motif d’opposition en vertu du paragraphe 22(1) de la Loi, motif qui n’a pas semblé approprié aux yeux de l’organisme décisionnel.

[25]           Dans Parmalat, le juge Lemieux a estimé qu’il existait des circonstances spéciales après le rejet de la demande de modification de la déclaration d’opposition. La Cour en est venue à cette conclusion à la fin des procédures d’opposition, qui constituaient un appel à la Cour fédérale en vertu de l’article 56 de la Loi, car elle a estimé qu’il n’existait pas d’autre recours adéquat qu’un contrôle judiciaire de la décision interlocutoire. L’article 56 permet à la Cour fédérale, dans un contexte d’appel sur une opposition à une marque de commerce, de statuer uniquement sur des questions qui figurent dans la déclaration d’opposition (Parmalat, au paragraphe 25, citant McDonald’s Corp c Coffee Hut Stores Ltd, [1994] ACF nº 638 (QL), au paragraphe 16). La Cour a estimé que le refus d’autoriser la modification constituait une erreur de droit, étant donné qu’il n’existait aucun autre recours pour l’erreur de droit en cause.

[26]           McDowell prétend que la présente affaire est analogue à l’affaire Parmalat, car les appelantes dans cette affaire ont demandé l’autorisation de déposer une déclaration d’opposition modifiée incluant un motif d’opposition supplémentaire. Le point de vue de McDowell est que la décision statue de façon définitive sur des droits fondamentaux, puisqu’elle empêche McDowell de soulever des arguments au titre de l’alinéa 12(1)d) devant la Commission ou en appel.

[27]           Dans l’affaire Dairy Processors, la Cour a également conclu qu’il existait des circonstances spéciales justifiant un contrôle judiciaire du refus de modifier une déclaration d’opposition, car elle était d’avis qu’il n’existait pas d’autres recours dans le cadre d’autres procédures judiciaires. Selon le juge Locke, l’introduction d’un recours distinct en vertu de l’article de la Loi figurant dans la modification proposée ou une action en radiation devait passer par une instance distincte de l’opposition originale. Il a conclu que les recours subsidiaires envisagés dans Szczecka et CB Powell doivent être ouverts dans le contexte des procédures en cours et ne doivent pas être des recours distincts de l’opposition (Dairy Processors, au paragraphe 23). Le juge Locke a estimé que le membre de l’organisme décisionnel a commis une erreur en concluant que le nouveau motif d’opposition était invalide, adoptant ainsi le point de vue qu’il n’existait aucun recours subsidiaire.

[28]           Automatic, rejetant les jurisprudences Parmalat et Dairy Processors, s’appuie plutôt sur la jurisprudence Indigo Books & Music Inc c C & J Clark International Ltd, 2010 CF 859 (Indigo). Dans Indigo, le juge O’Keefe a conclu qu’il n’y avait pas de circonstances spéciales, car la demanderesse disposait de recours appropriés sous la forme de procédures judiciaires subsidiaires prévues à l’article 40 de la Loi. Par conséquent, la Cour, dans Indigo, n’a pas procédé au contrôle judiciaire de la décision interlocutoire.

[29]           Le juge O’Keefe, dans Indigo, a estimé qu’il existait deux autres recours judiciaires possibles : d’abord, celui qui consistait à intenter une action en vertu de l’article que la partie aurait souhaité faire ajouter à sa déclaration d’opposition, puis celui qui consistait à intenter une action en radiation si les demandes de marque de commerce avaient atteint l’étape de l’enregistrement. Le juge O’Keefe a estimé qu’il s’agissait de recours appropriés pour tenir compte des droits fondamentaux d’Indigo, puis a souligné qu’il n’existe pas nécessairement des circonstances spéciales du simple fait qu’une demande de modification est refusée. Les faits de chaque affaire déterminent s’il existe des circonstances spéciales qui justifient le contrôle judiciaire d’une décision interlocutoire.

[30]           McDowell a également fait observer qu’il y a des « circonstances spéciales » lorsque les décisions interlocutoires règlent définitivement un droit fondamental, ouvrant la porte à un contrôle judiciaire. McDowell affirme que la justification de la politique de refus d’entendre les appels de décisions interlocutoires vient du fait que les appels sont fondés sur l’idée qu’il est possible de trancher toutes les questions en litige en une seule instance (CHC Global Operations c Global Helicopter Pilots Association, 2008 CAF 344).

[31]           McDowell affirme qu’en l’espèce, toutes les questions en litige ne seront pas tranchées en appel, et donc, qu’elles ne tombent pas dans la portée de la justification de la politique. Une décision interlocutoire susceptible de ne pas statuer sur l’argument principal d’une partie pourrait toujours priver celle‑ci de la capacité de soumettre des arguments subsidiaires fondés sur d’autres motifs de fond; dans un tel cas, la décision s’avère tout aussi définitive.

[32]           Automatic prétend qu’il n’existe aucune circonstance spéciale justifiant le contrôle judiciaire de la décision de ne pas autoriser la demande de modification de la déclaration d’opposition. Automatic affirme que l’argument de McDowell selon lequel il existe des circonstances spéciales vient du fait que McDowell s’est fait refuser la possibilité d’ajouter un nouveau motif d’opposition; elle ajoute aussi que l’argument selon lequel la décision est définitive revient à prétendre que des circonstances spéciales existent chaque fois qu’une demande de modification est refusée.

[33]           Je suis d’accord avec Automatic lorsqu’elle affirme que ce n’est pas parce la demande de modification a été refusée qu’il existe des circonstances spéciales. C’est précisément cet argument que la Cour fédérale a rejeté dans Indigo en affirmant que le fait qu’une demande de modification a été refusée n’a pas automatiquement pour effet d’établir l’existence de circonstances spéciales.

[34]           Dans Indigo, il est mentionné que les faits de certaines affaires dans lesquelles une demande de modification est refusée peuvent constituer des circonstances spéciales justifiant le contrôle judiciaire d’une décision interlocutoire. Comme l’a mentionné la Cour dans Indigo, certains faits donnent lieu à des circonstances spéciales, mais comme il est clairement mentionné dans CB Powell, ces circonstances doivent être vraiment spéciales, voire quasiment exceptionnelles pour justifier le contrôle judiciaire d’une décision interlocutoire.

[35]           Il convient de rappeler l’objectif suivant, tel qu’il est énoncé dans la jurisprudence CB Powell :

[32] On évite ainsi le fractionnement du processus administratif et le morcellement du processus judiciaire, on élimine les coûts élevés et les délais importants entraînés par une intervention prématurée des tribunaux et on évite le gaspillage que cause un contrôle judiciaire interlocutoire alors que l’auteur de la demande de contrôle judiciaire est de toute façon susceptible d’obtenir gain de cause au terme du processus administratif […]

[36]           Même sans la déclaration d’opposition modifiée, il est possible que McDowell obtienne de toute façon gain de cause dans l’audience portant sur l’opposition, sans le surplus de dépenses pour les deux parties découlant de ce qui constitue pour moi une « fragmentation des procédures ».

[37]           Deuxièmement, si, selon le raisonnement de la jurisprudence Indigo, ce recours devait être ouvert uniquement au cours du processus administratif, cela occasionnerait une fragmentation des procédures chaque fois qu’une partie invoque une circonstance spéciale, une éventualité contre laquelle la jurisprudence Szczecka met précisément en garde.

[38]           On retrouve de tels faits, comme ils sont exposés dans Indigo, dans les cas où la décision comportait la conclusion erronée portant que le nouveau motif d’opposition était invalide, comme dans Dairy Processors, aux paragraphes 43 et 44, et Parmalat, au paragraphe 36. Il est possible d’apporter une distinction quant aux deux affaires précédentes, étant donné que, dans celles‑ci, le refus d’autoriser la modification reposait sur la conclusion erronée que les motifs d’opposition à ajouter ne pouvaient pas former une opposition, contrairement à la présente affaire, où la Commission n’est pas arrivée à une conclusion.

[39]           L’affaire Parmalat comporte tout de même des circonstances spéciales car la Commission a établi que la Commission des oppositions n’avait pas compétence pour examiner des questions de diminution de valeur et a conclu que l’article 22 ne constituait pas un motif d’opposition approprié. Dans le même ordre d’idées, dans Dairy Processors, le contrôle judiciaire a été autorisé étant donné qu’il y avait une conclusion erronée selon laquelle les articles 30 et 7 ne pouvaient pas constituer un motif d’opposition valide.

[40]           En l’espèce, contrairement à ces deux affaires, il n’y a pas d’erreur sur une question de droit ou sur la question à savoir si l’alinéa 12(1)d) peut être invoqué à titre de motif d’opposition. De plus, compte tenu des faits, la Commission n’a pas refusé d’accorder l’autorisation pour des raisons de compétence.

[41]           La Commission a fondé son refus sur le critère établi dans l’Avis à la communauté juridique dont il est fait mention au paragraphe 20. McDowell a fait valoir que le préjudice qu’elle subirait devrait être pris en compte car il serait beaucoup plus important que celui subi par Automatic. McDowell affirme également que le juge Locke, dans Dairy Processors, a ajouté cette comparaison en tant que nouveau facteur dont il faut tenir compte. Je n’ai pas besoin d’établir si Dairy Processors a ajouté un nouveau facteur, car, en l’espèce, la Commission a bel et bien tenu compte du préjudice qui peut être occasionné aux deux parties, bien qu’il ne s’agisse pas d’un facteur définitif dans cette affaire, comme c’était le cas pour l’existence d’autres recours. La décision de la Commission ne dispose pas des droits fondamentaux de McDowell, car il existait d’autres recours.

[42]           En ce qui concerne les autres recours possibles, McDowell invoque la conclusion tirée dans Dairy Processors pour appuyer la thèse des circonstances spéciales, mais cette conclusion comportait deux volets. Premièrement, l’interprétation du juge Locke de la jurisprudence CB Powell selon laquelle il faut épuiser tous les recours efficaces dans l’instance en cours, et, deuxièmement, son opinion selon laquelle il y avait erreur de droit quant à la validité du motif d’opposition à l’ajout. Avec égards, je ne fais pas la même interprétation que le juge Locke, car, au paragraphe 31 de CB Powell, la Cour résume son point de vue en ces termes :

En d’autres termes, à défaut de circonstances exceptionnelles, les tribunaux ne peuvent intervenir dans un processus administratif tant que celui‑ci n’a pas été mené à terme ou tant que les recours efficaces qui sont ouverts ne sont pas épuisés.

[Non souligné dans l’original.]

[43]           À mon avis, les recours efficaces possibles comprennent les procédures en radiation prévue à l’article 57, dans l’éventualité où les marques atteignent l’étape de l’enregistrement; McDowell peut aussi intenter une autre action contre Automatic au titre de l’alinéa 12(1)d) pour l’utilisation de la marque. Enfin, McDowell peut encore avoir gain de cause dans le cadre de la demande en opposition.

[44]           Cela évite la fragmentation des procédures et évite aussi aux deux parties des dépenses et des délais inutiles, particulièrement si la procédure en opposition est accueillie de toute façon. Si McDowell n’a pas gain de cause, elle peut alors intenter les autres recours décrits au précédent paragraphe, ainsi qu’un appel en vertu de l’article 56 pour les motifs contenus dans la déclaration d’opposition.

[45]           Il n’existe pas suffisamment de circonstances spéciales pour procéder à un contrôle judiciaire de cette décision interlocutoire. Ma conclusion repose principalement sur le raisonnement du juge O’Keefe et partiellement sur la distinction d’avec les faits dont il est question dans Dairy Processors, qui ne correspondent pas à ceux de la présente affaire.

[46]           En somme, dans l’intérêt de la justice, la Cour ne devrait pas exercer son pouvoir discrétionnaire de contrôle judiciaire relativement à cette décision interlocutoire.

[47]           Les parties ne sont pas parvenues à une entente à propos des dépens. Les parties m’ont remis leurs notes de frais préliminaires. J’accorde des dépens à Automatic pour la somme de 3 500 $, payable sans délai par McDowell.


LA COUR STATUE que :

1.                  La demande est rejetée;

2.                  La demanderesse est tenue de payer sans délai à la défenderesse la somme de 3 500 $ au titre des dépens.

« Glennys L. McVeigh »

Juge

Traduction certifiée conforme

Claude Leclerc, LL.B.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :

T-2294-14

 

INTITULÉ :

MCDOWELL c AUTOMATIC PRINCESS HOLDINGS

LIEU DE L’AUDIENCE :

TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

lE 9 mai 2015

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT :

La juge mcveigh

 

DATE DES MOTIFS :

Le 18 AOÛT 2015

COMPARUTIONS :

Kenneth McKay

 

POUR La DEMANDEResse

 

Sarah Engle-Hardy

 

POUR La DÉFENDEResse

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Sim Lowman Ashton & McKay LLP

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

BERESKIN & PARR

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DÉFENDERESSE

 

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