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Date : 20150817


Dossier : T-1940-13

Référence : 2015 CF 977

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 17 août 2015

En présence de madame la juge McVeigh

ENTRE :

SA MAJESTÉ LA REINE
DU CHEF DU CANADA

demanderesse

et

CALLIDUS CAPITAL CORPORATION

défenderesse

ORDONNANCE ET MOTIFS

[1]               La défenderesse dans l’action sous-jacente, Callidus Capital Corporation (Callidus), a déposé devant la Cour, en vertu de l’article 220 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106, une requête la priant de statuer sur un point de droit.

[2]               La demanderesse, Sa Majesté la Reine (la Couronne), et Callidus s’accordent sur l’exposé des faits figurant ci-après, uniquement pour ce qui concerne la présente requête :

Contexte

1.         La société Cheese Factory Road Holdings Inc. (Cheese Factory) est une société fermée ontarienne qui exerce ses activités comme société d’investissement immobilier. Cheese Factory est ou était le propriétaire enregistré de biens immeubles ayant pour désignations civiques 680, rue Bishop, Cambridge (Ontario) (le bien Bishop) et 181, chemin Pinebush, Cambridge (Ontario) (le bien Pinebush).

2.         À toutes les dates pertinentes, Callidus était une société fermée ontarienne qui exerçait des activités partout au Canada comme bailleur de fonds pour des entreprises commerciales moyennant des garanties.

Manquement à l’obligation de verser la TPS et la TVH

3.         La Couronne affirme que, entre 2010 et 2013, Cheese Factory a perçu des montants de TPS et de TVH totalisant 177 299,70 $, mais ne les a pas versés au receveur général.

Facilité de crédit de la BMO

4.         Suite à une lettre d’engagement datée du 22 septembre 2004, Cheese Factory a obtenu de la Banque de Montréal (la BMO) une facilité de crédit dont le principal se chiffrait à 1 950 000 $. Cheese Factory a aussi remis à la BMO des actes de cautionnement et de sûreté pour garantir ses obligations directes et indirectes envers la BMO (actes ci-après appelés collectivement la sûreté).

5.         Au 2 décembre 2011 :

a)   Cheese Factory était en situation de défaut sur la facilité de crédit que lui avait consentie la BMO pour le principal de 1 950 000 $;

b)   Cheese Factory était endettée envers la BMO en tant qu’emprunteur, au titre de la lettre d’engagement, pour la somme de 1 416 418,61 $ (y compris le principal et les intérêts, mais à l’exclusion des honoraires);

c)   Cheese Factory était en situation de défaut sur les garanties qu’elle avait consenties à la BMO;

d)   Cheese Factory était, à titre de caution, redevable à la BMO des sommes de 3 387 658,53 $ et de 81 233,28 $US, qui comprennent le principal et les intérêts, mais non les honoraires.

Cession de la créance et de la sûreté à Callidus

6.         Conformément à un accord de cession de la créance et de la sûreté daté du 2 décembre 2011, la BMO cédait à Callidus tous ses droits, titres et intérêts se rapportant aux dettes et obligations directes et indirectes qu’avait Cheese Factory envers elle, de même que la sûreté.

7.         Conformément à un accord d’abstention daté du 2 décembre 2011, Callidus s’engageait à s’abstenir de faire exécuter les accords de la BMO, sous réserve et dans le respect des modalités de cet accord d’abstention. Conformément à l’accord d’abstention, Callidus s’engageait aussi à consentir à Cheese Factory (et à d’autres débiteurs) certaines facilités de crédit à vue, qui modifiaient les facilités de crédit consenties par la BMO.

Produit de la vente du bien Bishop

8.         Conformément aux modalités de l’accord d’abstention, Cheese Factory s’engageait à mettre sur le marché le bien Bishop, parmi d’autres, en vue de sa vente, et à remettre le produit net de la vente à Callidus en remboursement partiel des sommes dues à Callidus aux termes des facilités de crédit.

9.         Le 5 avril 2012 ou vers cette date, Cheese Factory a vendu le bien Bishop à Poladian Holdings Inc. pour un prix d’achat de 790 000 $.

10.       Le 9 avril 2012 ou vers cette date, Callidus a reçu 590 956,62 $ provenant de la vente du bien Bishop (le produit de la vente).

11.       Callidus a appliqué le produit de la vente à la réduction partielle des dettes et obligations de Cheese Factory envers elle.

Produit de la location du bien Pinebush

12.       Conformément aux modalités de l’accord d’abstention et à celles d’un accord sur l’ouverture de comptes bloqués daté du 9 novembre 2011 (l’accord de comptes bloqués), Cheese Factory s’engageait aussi à ouvrir des comptes bloqués (les comptes bloqués) à la Banque Royale du Canada (la RBC) et à déposer dans les comptes bloqués toutes les sommes reçues de toutes provenances.

13.       L’accord de comptes bloqués stipule que :

a)   Cheese Factory retiendra toute l’encaisse et tous les chèques (selon la définition figurant dans l’accord) reçus par elle en fiducie pour Callidus, séparément de tous les autres fonds et biens de Cheese Factory, jusqu’à ce que l’encaisse et les chèques soient remis à la RBC pour dépôt dans les comptes bloqués;

b)   la RBC virera, avant la fin de chaque jour ouvrable, toutes les sommes en dépôt dans les comptes bloqués au(x) compte(s) de Callidus.

14.       L’intégralité des loyers reçus de Cheese Factory ou du locataire du bien Pinebush depuis décembre 2011 a été déposée dans les comptes bloqués.

15.       Depuis la date à laquelle Callidus a obtenu cession des facilités de crédit et de la sûreté de la BMO, c’est-à-dire le 2 décembre 2011, jusqu’au 31 juillet 2014 inclusivement, la somme de 780 387,62 $ en loyers bruts a été déposée dans les comptes bloqués.

16.       Callidus a appliqué toutes les sommes déposées dans ces comptes à la réduction partielle des dettes et obligations de Cheese Factory envers elle.

Fiducie présumée alléguée par la Couronne

17.       Le 2 avril 2012 ou vers cette date, la demanderesse, par lettre adressée à Callidus, réclamait à celle-ci une somme de 90 844,33 $ en invoquant le mécanisme de la fiducie présumée qui est prévu par la Loi sur la taxe d’accise, LRC 1985, c B-3, et modifications (la LTA).

Faillite de Cheese Factory

18.       Le 7 novembre 2013 ou vers cette date, à la demande de Callidus, Cheese Factory a fait cession de ses biens en vertu de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité, LRC, 1985, c B-3, et modifications.

Procédure introduite par la Couronne

19.       La demanderesse a introduit la présente procédure contre Callidus en déposant une déclaration datée du 25 novembre 2013.

20.       La demanderesse réclame à Callidus la somme totale de 177 299,70 $ plus les intérêts, en invoquant le mécanisme de la fiducie présumée qui est prévu par l’article 222 de la LTA, au titre de la TPS et de la TVH que Cheese Factory avait perçues mais avait omis de verser pour les périodes de déclaration commençant le 31 octobre 2010 et jusqu’au 31 janvier 2013 inclusivement.

21.       La demanderesse prétend que, en conséquence du manquement de Cheese Factory à son obligation de verser la TPS et la TVH au receveur général :

a)   tous les actifs de Cheese Factory étaient réputés détenus en fiducie en faveur de la demanderesse, par priorité sur les créances de Callidus, conformément à l’article 222 de la LTA; et

b)   l’intégralité du produit des biens de Cheese Factory reçu par Callidus, jusqu’à concurrence de la somme garantie par la fiducie présumée, aurait dû être payée au receveur général du Canada par l’effet du mécanisme de la fiducie présumée qui est prévu par l’article 222 de la LTA.

22.       Callidus a signifié et déposé une défense.

Point de droit

23.       La faillite d’un débiteur fiscal, selon ce que prévoit le paragraphe 222(1.1) de la LTA, a-t-elle pour effet de rendre la fiducie présumée dont parle l’article 222 de la LTA inopposable à un créancier garanti qui a reçu, avant la faillite, le produit des biens du débiteur fiscal qui était réputé détenu en fiducie?

I.                   Dispositions applicables

[3]               Les dispositions applicables sont reproduites à l’annexe A.

II.                Les arguments des parties

A.                Callidus – La défenderesse

[4]               Selon Callidus, les paragraphes 222(1.1) et 222(3) de la LTA signifient que la fiducie présumée ne s’applique pas après que le débiteur fiscal devient failli. Il en résulte que la créance du receveur général du Canada (le receveur général), pour cause de fiducie présumée, se rapportant à la TPS et à la TVH perçues mais non versées est sans effet dans un cas de faillite et a le rang d’une créance ordinaire non garantie.

[5]               Selon Callidus, la fiducie présumée dont parle le paragraphe 222(3) est assimilable à une « charge flottante » et ne grève aucun bien en particulier. Ainsi, le débiteur fiscal peut disposer de son bien sans se soucier de la fiducie présumée. D’ailleurs, le paragraphe 222(3) ne précise pas que la fiducie présumée continue de grever le bien du débiteur fiscal après désintéressement d’un créancier, que le débiteur fiscal soit ou non par la suite devenu failli. Callidus croit que, si le législateur avait voulu que la fiducie présumée continue de grever le bien, il aurait employé un langage clair et sans équivoque. Le paragraphe 222(3) ne comporte pas un tel langage, et il faut en conclure que l’intention du législateur ne laisse subsister aucun doute.

[6]               Le paragraphe 222(1.1) quant à lui ne fait pas la distinction entre les biens perçus ou payés par le débiteur fiscal et les biens qui continuent d’être en sa possession au moment de la faillite.

[7]               Selon Callidus, si la Couronne était autorisée, malgré une faillite ultérieure, à recouvrer des sommes payées par un débiteur fiscal à ses créanciers, les créanciers ne seraient nullement enclins à vouloir travailler avec leurs débiteurs pour éviter la faillite. Callidus fait valoir que les créanciers chercheraient immédiatement à mettre leurs débiteurs en faillite plutôt que d’arriver à une solution extrajudiciaire, aggravant de ce fait les pertes sociales et économiques entraînées par l’insolvabilité.

[8]               Callidus assimile les circonstances de la présente espèce à celles dont il s’agissait dans la décision Bank of Nova Scotia c Huronia Precision Plastics Inc, 2009 OJ no 312 (Huronia). Dans cette affaire, les biens du débiteur fiscal avaient été vendus avant que celui-ci ne devienne failli et ils étaient détenus par le séquestre sous réserve des créances de la banque et du receveur général. Le juge Morawetz, auparavant juge de la Cour supérieure de justice de l’Ontario (Rôle commercial), a estimé que le paragraphe 222(1.1) de la LTA a pour effet que la priorité accordée en vertu du paragraphe 222(1) à une fiducie présumée ne vaut pas pour les sommes qui ont été perçues ou sont devenues percevables à partir du moment où le débiteur devient failli au sens de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité, LRC, 1985, c B-3 (la LFI).

[9]               Callidus a aussi mis la présente espèce en comparaison avec la décision Re Gold's Gym and Total Fitness Inc (Bankrupt), 2005 ABQB 716, une affaire où la banque avait saisi et vendu l’équipement de la débitrice fiscale en remboursement partiel de ce que celle-ci lui devait. La Cour du banc de la Reine de l’Alberta écrivait, dans un obiter dictum, que les biens de la débitrice fiscale qui étaient subordonnés avant la faillite à une fiducie présumée avaient cessé d’être subordonnés à cette fiducie le jour de la faillite.

[10]           Finalement, Callidus fait valoir qu’elle est fondée à demander la cession des biens du débiteur failli afin d’inverser les priorités et que c’est là une raison légitime de présenter une telle demande (Re Ivanco Inc, [2006] OJ no 4152 (CA de l’Ont); CIBC Mortgages Inc (Firstline Mortgages) c Chartrand, 2010 ONCA 456, au paragraphe 8).

B.                 La Couronne – La demanderesse

[11]           Le principal argument de la Couronne est que la fiducie présumée dont il est question au paragraphe 222(3) offre deux niveaux de protection pour les versements de TPS et de TVH. D’abord, les biens du débiteur fiscal sont réputés détenus en fiducie pour la Couronne, et ce sont des biens dans lesquels la Couronne a un droit de bénéficiaire, malgré l’existence d’un droit en garantie. Deuxièmement, et aspect capital pour le point à décider, la Couronne soutient que la fiducie présumée fait reposer une responsabilité personnelle et indépendante sur les créanciers garantis qui ne versent pas à la Couronne le produit qu’ils ont reçu de la vente de biens [traduction] « portant l’empreinte » d’une fiducie présumée.

[12]           Selon la Couronne, le texte du paragraphe 222(3) impose une obligation formelle selon laquelle le produit tiré de biens « portant l’empreinte » d’une fiducie présumée est payé :

222(3) […] et le produit découlant de ces biens est payé au receveur général par priorité sur tout droit en garantie.

[13]           Selon la Couronne, l’expression « est payé » ne confère aucun pouvoir discrétionnaire résiduel et, lorsqu’un créancier garanti ne se conforme pas à l’obligation de payer le produit assujetti à la fiducie présumée, il devient personnellement responsable des sommes impayées. La Couronne soutient avoir dès lors une cause d’action distincte à l’encontre du créancier garanti.

[14]           À l’appui, la Couronne invoque l’arrêt Canada (Procureur général) c Banque Nationale du Canada, 2004 CAF 92 (Banque Nationale), où la Cour d'appel fédérale s’exprimait ainsi :

[40] Il me semble évident que le créancier garanti qui ne respecte pas son obligation statutaire de « payer » au Receveur général le produit d'un bien assujetti à la fiducie réputée en priorité sur sa garantie, engage sa responsabilité personnelle et devient de ce fait redevable du montant impayé.

[15]           La Couronne affirme que l’effet du paragraphe 222(1.1) est de soustraire à la fiducie présumée tous les biens qui appartiennent au débiteur fiscal à la date de la faillite. Toutefois, cette disposition de la LTA ne change rien à la responsabilité personnelle, évoquée plus haut, de créanciers ayant reçu avant la faillite le produit tiré de la vente de biens qui étaient assujettis à la fiducie présumée. Selon la Couronne, la responsabilité du créancier garanti nait avant la faillite, tout comme la cause d’action prend corps avant la faillite. Plus précisément, la responsabilité du créancier et la cause d’action distincte ne dépendent pas de la question de savoir si la fiducie présumée subsiste ou non.

[16]           La Couronne considère cette cause d’action comme une cause d’action préexistante et au plein sens du terme, qui résulte de l’emploi abusif du produit des biens avant la faillite. Elle considère que l’article 325 de la LTA rend personnellement responsable une tierce partie qui obtient d’une personne un bien pour une valeur inférieure à sa juste valeur marchande. Le cessionnaire, selon cette disposition, devient alors responsable de la dette fiscale. La Couronne fait valoir que la responsabilité du créancier garanti [traduction] « existe par elle-même », et l’éventuelle faillite n’y change rien.

[17]           La Couronne invoque en particulier l’arrêt Caisse populaire Desjardins de l'Est de Drummond c Canada, 2009 CSC 29 (Caisse populaire) au soutien de sa position selon laquelle la fiducie présumée ne vaut pas exclusivement pour les retenues à la source. Selon la Couronne, la LTA renferme d’autres exemples d’instruments de recouvrement où la responsabilité d’un tiers n’est pas modifiée par une faillite ultérieure. Elle fait une analogie avec les dispositions sur la saisie-arrêt contenues au paragraphe 317(3) de la LTA, qui confèrent à la Couronne une priorité sur tous les créanciers concurrents. Elle affirme que, malgré les mots qui excluent la LFI, lorsqu’une mise en demeure de payer a été signifiée à un tiers avant la faillite du débiteur fiscal, celle-ci, une fois confirmée, n’efface pas la responsabilité du tiers qui ne s’est pas exécuté.

[18]           Au soutien de sa position, la Couronne invoque l’arrêt Banque Toronto-Dominion c Canada, 2010 CAF 174 (Banque TD), arrêt confirmé : 2012 CSC 1. Dans cette affaire, la Cour d'appel fédérale a jugé que, dès réceptions de la mise en demeure de payer, le créancier garanti avait l’obligation légale de payer la somme requise, à défaut de quoi il engageait sa responsabilité personnelle malgré la faillite du débiteur fiscal. Selon la Couronne, le même raisonnement s’applique aux biens soumis à une fiducie présumée qui ont été reçus avant la faillite, ce qui permet de garantir l’uniformité d’application des divers instruments de recouvrement.

[19]           Finalement, la Couronne met en doute les précédents invoqués par Callidus, en faisant valoir que ces précédents ne disent rien d’une [traduction] « responsabilité préexistante, personnelle et autonome » des créanciers garantis. La Couronne fait valoir que l’intention du législateur, lors de la réforme de la LFI de 1992, n’était pas de restreindre l’aptitude de la Couronne à recouvrer des sommes auprès de créanciers garantis avant la faillite, mais de faciliter le recouvrement de sommes pour les créanciers non garantis dans un contexte de faillite.

III.             Analyse

[20]           Selon moi, il faut répondre par l’affirmative au point de droit qui est soulevé. Une simple lecture de la disposition et un examen de la jurisprudence applicable montrent que, lorsque Cheese Factory a déclaré faillite, la fiducie présumée dont parle le paragraphe 222(1) de la LTA est devenue inopposable à Callidus pour ce qui concerne la TPS et la TVH perçues, mais non versées.

[21]           Les points soulevés dans la présente espèce sont assimilables à ceux qu’avait examinés la Cour suprême dans l’arrêt Century Services Inc c Canada (Procureur général), 2010 CSC 60 (Century). Je m’en remets, pour le point de droit qui est soulevé ici, au raisonnement suivi dans cette affaire par la Cour suprême du Canada, gardant à l’esprit que, en l’espèce, nous n’avons pas affaire à des retenues à la source et qu’il n’a jamais été signifié de mise en demeure de payer, ni de bref de saisie-arrêt.

[22]           Le paragraphe 222(1) de la LTA prévoit explicitement que la TPS ou la TVH perçue est réputée détenue en fiducie pour la Couronne et qu’elle n’appartient pas à celui qui l’a perçue. Le mécanisme de la fiducie présumée s’applique aussi aux parties tierces et à toutes fins que de droit.

[23]           Le paragraphe 222(3) de la LTA est une extension de la fiducie présumée : si la TPS et/ou la TVH perçue n’est pas versée, les biens ou fonds – d’une valeur égale – du débiteur fiscal sont réputés être les biens de la Couronne, malgré l’existence de tout droit en garantie. L’extension de la fiducie présumée donne au receveur général priorité absolue sur toutes autres créances et tous autres droits en garantie. Cette priorité absolue des créances de la Couronne présente un contraste frappant avec le statut de la Couronne à titre de créancier ordinaire lorsqu’il y a faillite, comme le montre le paragraphe 222(1.1).

[24]           Le paragraphe 222(1.1) de la LTA dispose que la fiducie présumée s’éteint avec la faillite du débiteur fiscal. Les paragraphes 67(2) et 67(3) de la LFI vont dans le même sens que le paragraphe 222(1.1) de la LTA en insistant sans équivoque sur le fait que la fiducie présumée devient caduque à la suite d’une faillite à moins que les sommes déduites ne soient considérées comme des retenues à la source, par exemple impôt sur le revenu, déductions au titre de Régime de pensions du Canada ou déductions au titre de l’assurance-emploi.

[25]           Dans l’arrêt Century, la Cour suprême du Canada a rappelé l’historique législatif qui avait conduit à la promulgation du paragraphe 222(1.1) en 1992 (les modifications de 1992). La Cour écrivait que, avant lesdites modifications, les créances de la Couronne avaient priorité; toutefois, les propositions de réforme législative à l’époque avaient recommandé l’abandon du traitement préférentiel accordé aux créances de la Couronne.

[26]           S’exprimant pour les juges majoritaires dans l’arrêt Century, madame la juge Deschamps a fait le point, dans le contexte des fiducies présumées, sur les priorités lorsque sont concernées la LFI et la Loi sur les arrangements des créanciers avec les compagnies, LRC, c C-36 (la LACC). Elle a dressé l’historique du régime des priorités en matière d’insolvabilité et décrit la toile de fond à l’origine de l’évolution du droit. Elle a relevé que le législateur semblait s’être éloigné du principe consistant à accorder la priorité aux créances de la Couronne en droit de l’insolvabilité, et, plus précisément, elle concluait ce qui suit :

[45] […] Quand le législateur a voulu protéger certaines créances de la Couronne au moyen de fiducies réputées et voulu que celles‑ci continuent de s’appliquer en situation d’insolvabilité, il l’a indiqué de manière explicite et minutieuse. Par exemple, le par. 18.3(2) de la LACC et le par. 67(3) de la LFI énoncent expressément que les fiducies réputées visant les retenues à la source continuent de produire leurs effets en cas d’insolvabilité. Le législateur a donc clairement établi des exceptions à la règle générale selon laquelle les fiducies réputées n’ont plus d’effet dans un contexte d’insolvabilité. La LACC et la LFI sont en harmonie : elles préservent les fiducies réputées et établissent la priorité de la Couronne seulement à l’égard des retenues à la source. En revanche, il n’existe aucune disposition législative expresse permettant de conclure que les créances relatives à la TPS bénéficient d’un traitement préférentiel sous le régime de la LACC ou de la LFI. Alors que les retenues à la source font l’objet de dispositions explicites dans ces deux lois concernant l’insolvabilité, celles‑ci ne comportent pas de dispositions claires et expresses analogues établissant une exception pour les créances relatives à la TPS.

[Non souligné dans l'original.]

[27]           Toutefois, la juge Deschamps reconnaissait aussi une possible incohérence dans la position de la Couronne à propos de la LACC :

[47]      De plus, il y aurait une étrange asymétrie si l’interprétation faisant primer la LTA sur la LACC préconisée par la Couronne était retenue en l’espèce : les créances de la Couronne relatives à la TPS conserveraient leur priorité de rang pendant les procédures fondées sur la LACC, mais pas en cas de faillite. Comme certains tribunaux l’ont bien vu, cela ne pourrait qu’encourager les créanciers à recourir à la loi la plus favorable dans les cas où, comme en l’espèce, l’actif du débiteur n’est pas suffisant pour permettre à la fois le paiement des créanciers garantis et le paiement des créances de la Couronne (Gauntlet, par. 21). Or, si les réclamations des créanciers étaient mieux protégées par la liquidation sous le régime de la LFI, les créanciers seraient très fortement incités à éviter les procédures prévues par la LACC et les risques d’échec d’une réorganisation. Le fait de donner à un acteur clé de telles raisons de s’opposer aux procédures de réorganisation fondées sur la LACC dans toute situation d’insolvabilité ne peut que miner les objectifs réparateurs de ce texte législatif et risque au contraire de favoriser les maux sociaux que son édiction visait justement à prévenir.

[49]      Les indications selon lesquelles le législateur voulait que les créances relatives à la TPS soient traitées différemment dans les cas de réorganisations et de faillites sont rares, voire inexistantes […] En fait, le sommaire mentionne simplement, en ce qui concerne les fiducies réputées, que les modifications apportées aux dispositions existantes visent à « faire en sorte que les cotisations à l’assurance‑emploi et au Régime de pensions du Canada qu’un employeur est tenu de verser soient pleinement recouvrables par la Couronne en cas de faillite de l’employeur » (Sommaire de la L.C. 2000, ch. 30, p. 4a).  Le libellé de la disposition créant une fiducie réputée à l’égard de la TPS ressemble à celui des dispositions créant de telles fiducies relatives aux retenues à la source et il comporte la même formule dérogatoire et la même mention de la LFI. Cependant, comme il a été souligné précédemment, le législateur a expressément précisé que seules les fiducies réputées visant les retenues à la source demeurent en vigueur. Une exception concernant la LFI dans la disposition créant les fiducies réputées à l’égard des retenues à la source est sans grande conséquence, car le texte explicite de la LFI elle‑même (et celui de la LACC) établit ces fiducies et maintient leur effet. Il convient toutefois de souligner que ni la LFI ni la LACC ne comportent de disposition équivalente assurant le maintien en vigueur des fiducies réputées visant la TPS.

[Non souligné dans l'original.]

[28]           Finalement, dans l’arrêt Century, la Cour suprême écrivait qu’il ne semblait guère établi que le législateur voulait traiter différemment la LACC et la LFI. Le résultat, dans l’espèce Century, est donc qu’une fiducie présumée pour la TPS versée ne survit pas à une réorganisation selon la LACC, et ce même résultat peut être mis en comparaison avec celui auquel donne lieu la LFI. L’extension de la fiducie présumée selon ce que prévoit le paragraphe 222(3) de la LTA ne vaut pas dans un contexte de faillite lorsque le paragraphe 67(2) de la LFI est applicable.

[29]           Monsieur le juge Fish, qui s’est rangé à l’avis des juges majoritaires, a rédigé ses propres motifs sur l’interaction de la LACC et de la LTA. Ses motifs ajoutent du poids à ceux de madame la juge Deschamps en ce qu’ils souscrivaient eux aussi à la conclusion qu’il n’existe pas de fiducie présumée pour la TPS à la suite d’une faillite, sauf naturellement pour les retenues à la source.

[30]           Monsieur le juge Fish a relevé que le législateur fédéral avait procédé à un examen « approfondi » du régime canadien d’insolvabilité, et que la Cour devait considérer « la décision du législateur de maintenir en vigueur les dispositions en question comme un exercice délibéré du pouvoir discrétionnaire de légiférer, pouvoir qui est exclusivement le sien » (Century, au paragraphe 95). Il poursuivait ainsi, au paragraphe 105 :

[105]    […] Bien que le législateur crée en faveur de la Couronne une fiducie réputée dans laquelle seront conservées les sommes recueillies au titre de la TPS mais non encore versées, et bien qu’il prétende maintenir cette fiducie en vigueur malgré les dispositions à l’effet contraire de toute loi fédérale ou provinciale, il ne confirme pas l’existence de la fiducie ― ni ne prévoit expressément le maintien en vigueur de celle‑ci ― dans la LFI ou dans la LACC.

[31]           Arrivant à cette conclusion, M. le juge Fish a élaboré un critère simple pour un régime complexe de priorité des créances en matière d’insolvabilité et de fiducies présumées lorsque sont concernées la LIR, la LTA et la LACC. Il conseillait de vérifier d’abord si le texte législatif en cause établit une fiducie présumée. Il passait ensuite à la question de savoir si le législateur fédéral avait confirmé le maintien en vigueur de la fiducie présumée de la Couronne aux termes des régimes prévus par la LFI et la LACC. Il concluait que l’absence de l’un ou l’autre de ces deux éléments obligatoires témoignait de la volonté du législateur fédéral de laisser la fiducie présumée devenir caduque au moment de l’introduction de la procédure d’insolvabilité.

[32]           Appliquant ce critère à la présente espèce, je suis d’avis qu’une fiducie présumée a été validement établie. Toutefois, après examen de la LFI, il devient clair que le maintien en vigueur de la fiducie présumée n’est pas confirmé, ce qui témoigne de la volonté du législateur de la laisser devenir caduque au moment de l’introduction de la procédure d’insolvabilité.

[33]           Le raisonnement de la Cour suprême dans l’arrêt Century s’accorde avec sa décision antérieure dans l’arrêt Caisse populaire. Dans cette affaire, la Cour suprême instruisait trois causes simultanément. Dans chacune d’elles, la Couronne revendiquait une fiducie présumée pour la TPS et la taxe de vente provinciale qui avaient été perçues mais non versées au moment de la faillite. Les banques créancières prétendaient que la Couronne n’était qu’un créancier ordinaire et que son rang était donc celui d’un créancier ordinaire. La Cour suprême faisait observer que « les autorités fiscales canadiennes sont liées par le choix de politique législative exprimée aujourd’hui dans la LFI » et a conclu que les fiducies présumées qui étaient établies pour garantir le versement de la TPS et de la TVH avaient pris fin à la date de la faillite. Selon elles, il revenait au syndic de liquider les patrimoines comprenant les montants de TPS et de TVQ qui étaient en litige.

[34]           Dans l’espèce Caisse populaire, la Cour d'appel du Québec, tout comme la Cour suprême du Canada, ont estimé que les modifications de 1992 avaient été clairement promulguées pour limiter la priorité de la Couronne et instaurer un meilleur équilibre entre créanciers durant une faillite. Selon la Cour suprême, l’intention du législateur fédéral était claire et formulée dans des termes explicites pour les cas où survient une faillite, et les dispositions comportaient également des exceptions explicites, par exemple pour les retenues à la source.

[35]           Comme dans les espèces Century et Caisse populaire, la Couronne voudrait que soit maintenue en vigueur la fiducie présumée alors qu’il n’existe aucune disposition expresse en ce sens. Comme je l’écrivais plus haut, la Cour suprême affirme, dans l’arrêt Century, que, lorsque le législateur fédéral souhaite protéger des créances de la Couronne, il le fait au moyen de dispositions explicites et minutieuses. Or, le paragraphe 222(1.1) ne présente pas le niveau de précision et de détail que la Couronne prétend lui attribuer. La manière dont la Couronne interprète le paragraphe 222(3) est juste, en ce sens que l’expression « est payé » dénote une obligation, mais la fonction précise du paragraphe 222(1.1) a précisément pour effet de supprimer cette obligation. Le paragraphe 222(1.1) ni le paragraphe 222(3) ne disent quels actifs conservent l’empreinte de la fiducie présumée et lesquels ne la conservent pas. Si le législateur fédéral avait voulu faire la distinction parmi les actifs en la possession du débiteur fiscal ou parmi ceux qui avaient déjà été vendus, il lui aurait été loisible de le préciser. Par ailleurs, l’argument de la Couronne, au paragraphe 46 de son mémoire, selon lequel l’effet net du paragraphe 222(1.1) est de soustraire à la fiducie présumée des actifs appartenant au débiteur fiscal n’est appuyé par aucun précédent et ne ressort pas du libellé du texte législatif.

[36]           L’argument de la Couronne pour qui les modifications de 2000 apportées à la LIR ont renforcé la fiducie présumée qui est établie par le paragraphe 222(3) fait abstraction du fait que les modifications concernaient les retenues à la source, et non les versements de TPS. La Couronne fait valoir que l’obligation légale de Callidus est confirmée par l’arrêt Banque Nationale, mais cette affaire concernait également des retenues à la source qui avaient été perçues par le débiteur fiscal, mais non versées. Il en va de même de l’arrêt Banque Royale du Canada c Sparrow Electric Corp, [1997] 1 RCS 411, et de l’arrêt First Vancouver Finance c Ministre du Revenu national, 2002 CSC 49 (First Vancouver). Ce dernier arrêt n’est pas non plus assimilable à la présente espèce parce que dans cette affaire il y avait eu signification de demandes péremptoires de paiement.

[37]           Il semble que le lien fait par la Couronne avec les articles 317 et 325 de la LTA montre, s’il le fallait, que le législateur fédéral n’a pas promulgué une disposition attribuant explicitement, en l’absence d’un événement déterminant, une responsabilité avant faillite à l’égard du produit d’une vente. Les articles 317 et 325 précisent qu’ils s’appliquent nonobstant une faillite. Dans l’article 317, c’est la réception d’une demande formelle de paiement et, dans l’article 325, c’est le moment où a lieu la cession du bien pour une valeur inférieure à sa juste valeur marchande. En l’espèce, la Couronne n’a fait état d’aucun événement déterminant de nature à immuniser la fiducie présumée contre l’application de la LFI et celle du paragraphe 222(1.1) de la LTA.

[38]           Ces instruments de recouvrement peuvent être distingués de la présente affaire parce que, comme indiqué dans l’arrêt Banque TD, une demande formelle de paiement ou un « avis de saisie-arrêt » avait été reçu avant que ne commencent les démarches de faillite. La Couronne assimile ce précédent à la présente espèce, mais le contexte est différent en l’espèce car l’exposé conjoint des faits n’indique pas qu’un avis de saisie-arrêt ou une demande formelle de paiement a été envoyé à Callidus. Il indique plutôt que c’est une lettre qui a été envoyée à Callidus, et non une véritable mise en demeure de payer.

[39]           La Couronne fait valoir que le même raisonnement s’applique ici, mais la situation est très différente. Dans l’arrêt Banque TD, la demande formelle de paiement avait été envoyée, et les sommes dues tombaient immédiatement sous le coup de cette demande de paiement, laquelle a conservé son effet quand la faillite a été demandée. Si Callidus avait reçu un tel avis, celui-ci aurait entraîné pour Callidus l’obligation de payer la TPS non versée, en dépit de la demande de faillite. L’argument de la Couronne pour qui les instruments de recouvrement devraient s’accorder et pour qui une responsabilité distincte subsiste en dépit d’une faillite subséquente ferait entrer la LFI et la LACC en contradiction l’une avec l’autre, ce que précisément les juges majoritaires de la Cour suprême tentaient de prévenir dans l’arrêt Century.

[40]           Qui plus est, la Couronne n’explique pas en quoi le scénario qu’elle propose, celui d’une [traduction« cause d’action préexistante et au plein sens du terme » à l’encontre de Callidus, s’accorde avec le paragraphe 222(1.1). Elle soutient que, indépendamment de la question de savoir si la fiducie présumée demeure ou non applicable, il n’en résulte pas moins que cette cause d’action distincte a pris corps, mais elle n’établit aucun lien entre le paragraphe 222(1.1) et son argument selon lequel il existe une cause d’action distincte. La Couronne cherche à reformuler le point de droit à décider. La question n’était pas de savoir si Callidus assumait une responsabilité propre, mais de savoir si la fiducie présumée restait en vigueur en dépit de la faillite.

[41]           La responsabilité personnelle d’un créancier garanti n’est pas reconnue ou désignée, dans les paragraphes 222(1.1) ou 222(3) de la LTA, ou dans le paragraphe 67(3) de la LFI, comme une exception pouvant valider l’argument de la Couronne. Par ailleurs, selon la Couronne, la disposition se réfère à un événement « déterminant » explicite, celui où le créancier garanti devient responsable de la taxe malgré une faillite subséquente. Cela met en échec l’argument de la Couronne pour qui d’autres instruments de recouvrement offerts par la LTA, plus précisément l’article 317 et le paragraphe 325(1), n’expirent pas quand le débiteur fiscal devient failli.

[42]           Callidus a plaidé d’une manière persuasive l’interprétation qu’elle donne des modifications de 1992; le paragraphe 222(1.1) avait pour objet de mettre fin à la priorité de la Couronne sur tous autres intérêts dans une faillite. Je ne partage pas l’avis de la Couronne pour qui, lorsqu’il a promulgué les modifications de 1992, le législateur voulait élever le rang des créanciers non garantis et non abaisser celui de la Couronne. Il ressort clairement de ma lecture des arrêts Caisse populaire et Century que les modifications visaient à réduire la priorité de la Couronne. Je suis d’avis que la faillite de Cheese Factory commandait l’application du paragraphe 222(1.1) de la LTA de sorte que la fiducie présumée qui est établie par les paragraphes 222(1) et 222(3) est inopérante.

IV.             Les dépens

[43]           Les parties ont été invitées, à la fin de l’audience, à s’entendre sur les dépens qui devraient être accordés à la partie ayant obtenu gain de cause. La Cour remercie les parties de les avoir de concert chiffrés à 2 600 $, y compris TVH et débours.

[44]           J’accorde des dépens de 2 600 $ à Callidus Capital Corporation, payable sur-le-champ par le receveur général du Canada au nom de la demanderesse, Sa Majesté la Reine.


ORDONNANCE

LA COUR STATUE que :

1.                  Il est répondu par l’affirmative au point de droit soumis de concert par les parties;

2.                 Des dépens de 2 600 $ sont payables sur-le-champ à Callidus Capital Corporation par le receveur général du Canada au nom de la demanderesse, Sa Majesté la Reine.

« Glennys L. McVeigh »

Juge

Traduction certifiée conforme

Claude Leclerc, LL.B.


ANNEXE A

Loi sur la taxe d'accise (LRC, 1985, c E-15)

Montants perçus détenus en fiducie

222. (1) La personne qui perçoit un montant au titre de la taxe prévue à la section II est réputée, à toutes fins utiles et malgré tout droit en garantie le concernant, le détenir en fiducie pour Sa Majesté du chef du Canada, séparé de ses propres biens et des biens détenus par ses créanciers garantis qui, en l’absence du droit en garantie, seraient ceux de la personne, jusqu’à ce qu’il soit versé au receveur général ou retiré en application du paragraphe (2).

Montants perçus avant la faillite

(1.1) Le paragraphe (1) ne s’applique pas, à compter du moment de la faillite d’un failli, au sens de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité, aux montants perçus ou devenus percevables par lui avant la faillite au titre de la taxe prévue à la section II.

Non-versement ou non-retrait

(3) Malgré les autres dispositions de la présente loi (sauf le paragraphe (4) du présent article), tout autre texte législatif fédéral (sauf la Loi sur la faillite et l’insolvabilité), tout texte législatif provincial ou toute autre règle de droit, lorsqu’un montant qu’une personne est réputée par le paragraphe (1) détenir en fiducie pour Sa Majesté du chef du Canada n’est pas versé au receveur général ni retiré selon les modalités et dans le délai prévus par la présente partie, les biens de la personne — y compris les biens détenus par ses créanciers garantis qui, en l’absence du droit en garantie, seraient ses biens — d’une valeur égale à ce montant sont réputés :

a) être détenus en fiducie pour Sa Majesté du chef du Canada, à compter du moment où le montant est perçu par la personne, séparés des propres biens de la personne, qu’ils soient ou non assujettis à un droit en garantie;

b) ne pas faire partie du patrimoine ou des biens de la personne à compter du moment où le montant est perçu, que ces biens aient été ou non tenus séparés de ses propres biens ou de son patrimoine et qu’ils soient ou non assujettis à un droit en garantie.

Ces biens sont des biens dans lesquels Sa Majesté du chef du Canada a un droit de bénéficiaire malgré tout autre droit en garantie sur ces biens ou sur le produit en découlant, et le produit découlant de ces biens est payé au receveur général par priorité sur tout droit en garantie.

Trust for amounts collected

222. (1) Subject to subsection (1.1), every person who collects an amount as or on account of tax under Division II is deemed, for all purposes and despite any security interest in the amount, to hold the amount in trust for Her Majesty in right of Canada, separate and apart from the property of the person and from property held by any secured creditor of the person that, but for a security interest, would be property of the person, until the amount is remitted to the Receiver General or withdrawn under subsection (2).

Amounts collected before bankruptcy

(1.1) Subsection (1) does not apply, at or after the time a person becomes a bankrupt (within the meaning of the Bankruptcy and Insolvency Act), to any amounts that, before that time, were collected or became collectible by the person as or on account of tax under Division II.

Extension of trust

(3) Despite any other provision of this Act (except subsection (4)), any other enactment of Canada (except the Bankruptcy and Insolvency Act), any enactment of a province or any other law, if at any time an amount deemed by subsection (1) to be held by a person in trust for Her Majesty is not remitted to the Receiver General or withdrawn in the manner and at the time provided under this Part, property of the person and property held by any secured creditor of the person that, but for a security interest, would be property of the person, equal in value to the amount so deemed to be held in trust, is deemed

(a) to be held, from the time the amount was collected by the person, in trust for Her Majesty, separate and apart from the property of the person, whether or not the property is subject to a security interest, and

(b) to form no part of the estate or property of the person from the time the amount was collected, whether or not the property has in fact been kept separate and apart from the estate or property of the person and whether or not the property is subject to a security interest

and is property beneficially owned by Her Majesty in right of Canada despite any security interest in the property or in the proceeds thereof and the proceeds of the property shall be paid to the Receiver General in priority to all security interests.

 

Loi sur la faillite et l'insolvabilité (LRC, 1985, c B-3)

Fiducies présumées

(2) Sous réserve du paragraphe (3) et par dérogation à toute disposition législative fédérale ou provinciale ayant pour effet d’assimiler certains biens à des biens détenus en fiducie pour Sa Majesté, aucun des biens du failli ne peut, pour l’application de l’alinéa (1)a), être considéré comme détenu en fiducie pour Sa Majesté si, en l’absence de la disposition législative en question, il ne le serait pas.

Exceptions

(3) Le paragraphe (2) ne s’applique pas à l’égard des montants réputés détenus en fiducie aux termes des paragraphes 227(4) ou (4.1) de la Loi de l’impôt sur le revenu, des paragraphes 23(3) ou (4) du Régime de pensions du Canada ou des paragraphes 86(2) ou (2.1) de la Loi sur l’assurance-emploi (chacun étant appelé « disposition fédérale » au présent paragraphe) ou à l’égard des montants réputés détenus en fiducie aux termes de toute loi d’une province créant une fiducie présumée dans le seul but d’assurer à Sa Majesté du chef de cette province la remise de sommes déduites ou retenues aux termes d’une loi de cette province, dans la mesure où, dans ce dernier cas, se réalise l’une des conditions suivantes :

a) la loi de cette province prévoit un impôt semblable, de par sa nature, à celui prévu par la Loi de l’impôt sur le revenu, et les sommes déduites ou retenues aux termes de la loi de cette province sont de même nature que celles visées aux paragraphes 227(4) ou (4.1) de la Loi de l’impôt sur le revenu;

b) cette province est « une province instituant un régime général de pensions » au sens du paragraphe 3(1) du Régime de pensions du Canada, la loi de cette province institue un « régime provincial de pensions » au sens de ce paragraphe, et les sommes déduites ou retenues aux termes de la loi de cette province sont de même nature que celles visées aux paragraphes 23(3) ou (4) du Régime de pensions du Canada.

Pour l’application du présent paragraphe, toute disposition de la loi provinciale qui crée une fiducie présumée est réputée avoir, à l’encontre de tout créancier du failli et malgré tout texte législatif fédéral ou provincial et toute règle de droit, la même portée et le même effet que la disposition fédérale correspondante, quelle que soit la garantie dont bénéficie le créancier.

Deemed trusts

(2) Subject to subsection (3), notwithstanding any provision in federal or provincial legislation that has the effect of deeming property to be held in trust for Her Majesty, property of a bankrupt shall not be regarded as held in trust for Her Majesty for the purpose of paragraph (1)(a) unless it would be so regarded in the absence of that statutory provision.

Exceptions

(3) Subsection (2) does not apply in respect of amounts deemed to be held in trust under subsection 227(4) or (4.1) of the Income Tax Act, subsection 23(3) or (4) of the Canada Pension Plan or subsection 86(2) or (2.1) of the Employment Insurance Act (each of which is in this subsection referred to as a “federal provision”) nor in respect of amounts deemed to be held in trust under any law of a province that creates a deemed trust the sole purpose of which is to ensure remittance to Her Majesty in right of the province of amounts deducted or withheld under a law of the province where

(a) that law of the province imposes a tax similar in nature to the tax imposed under the Income Tax Act and the amounts deducted or withheld under that law of the province are of the same nature as the amounts referred to in subsection 227(4) or (4.1) of the Income Tax Act, or

(b) the province is a “province providing a comprehensive pension plan” as defined in subsection 3(1) of the Canada Pension Plan, that law of the province establishes a “provincial pension plan” as defined in that subsection and the amounts deducted or withheld under that law of the province are of the same nature as amounts referred to in subsection 23(3) or (4) of the Canada Pension Plan,

and for the purpose of this subsection, any provision of a law of a province that creates a deemed trust is, notwithstanding any Act of Canada or of a province or any other law, deemed to have the same effect and scope against any creditor, however secured, as the corresponding federal provision.

 

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-1940-13

 

INTITULÉ :

SA MAJESTÉ LA REINE c CALLIDUS CAPITAL CORPORATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 8 AVril 2015

ORDONNANCE ET MOTIFS :

La JUGE MCVEIGH

 

DATE DES MOTIFS :

LE 17 AOÛT 2015

COMPARUTIONS :

Louis L’Heureux

Edward Harrison

POUR LA demanderesse

Harvey Chaiton

Sam Rappos

pour la défenderesse

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

pour la demanderesse

Chaitons s.r.l.

Toronto (Ontario)

pour la défenderesse

 

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