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Date : 20150828


Dossier : T‑2292‑14

Référence : 2015 CF 1030

[TRADUCTION FRANÇAISE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 28 août 2015

En présence de monsieur le juge Manson

ENTRE :

LA PREMIÈRE NATION DE PROPHET RIVER, LES PREMIÈRES NATIONS DE WEST MOBERLY

demanderesses

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA, LE MINISTRE DE L’ENVIRONNEMENT, LE MINISTRE DES PÊCHES ET DES OCÉANS, LE MINISTRE DU TRANSPORT ET LA BRITISH COLUMBIA HYDRO AND POWER AUTHORITY

défendeurs

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]               La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire de la décision par laquelle le gouverneur en conseil [GC] a conclu que les effets environnementaux négatifs importants qu’est susceptible d’entraîner, selon les conclusions de l’examen conjoint effectué par le gouvernement de la Colombie‑Britannique, le gouvernement fédéral [la CEC ou la Commission] et la ministre de l’Environnement [la ministre], la réalisation du projet d’énergie propre du site C [le projet], sur la rivière de la Paix en Colombie‑Britannique, sont « justifiables dans les circonstances ». Aux termes du paragraphe 52(4) de la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale 2012 [LCEE 2012], le GC est chargé de rendre une décision à ce sujet après que le ministre a décidé que la réalisation d’un projet est susceptible d’entraîner des effets environnementaux négatifs importants au sens du paragraphe 52(1) de la LCEE 2012.

[2]               Cette demande a été entendue après l’audition de la demande dans le dossier T‑2300‑14 de la Cour fédérale, Peace Valley Landowner Association c Procureur général du Canada, qui fera l’objet d’une décision distincte.

I.                   Le contexte

[3]               Le projet consiste à construire un barrage et une centrale hydroélectrique de 1 100 mégawatts sur la rivière de la Paix, près de Fort St. John, en Colombie‑Britannique, qui inonderaient la vallée de la rivière de la Paix. Il serait le troisième d’une série de barrages construits sur la rivière de la Paix en Colombie‑Britannique. Il comprendrait un barrage en terre de 1 050 mètres de long et de 60 mètres de haut, une centrale hydroélectrique de 1 100 mégawatts et des ouvrages connexes, un réservoir de 83 kilomètres de long, le réalignement de quatre tronçons de la Route 79 et deux lignes de transmission de 77 kilomètres qui seraient construites sur l’emprise de la ligne de transmission existante pour relier le projet au barrage du canyon de la Paix, un des barrages déjà construits sur la rivière de la Paix. Le projet devrait générer en moyenne 5 100 gigawatts heure d’électricité par an, pendant plus de 100 ans.

[4]               Le coût estimé du projet était de 7,9 milliards de dollars au moment de l’évaluation environnementale et la période de construction devait durer huit ans. Il a été indiqué au cours des plaidoiries que cette estimation avait depuis augmenté et s’élevait maintenant à près de 9 milliards de dollars, et qu’elle pourrait encore augmenter.

II.                Les parties

[5]               Les demanderesses sont des Premières Nations signataires du Traité no 8 de la Colombie‑Britannique (les Premières Nations du Traité no 8) dont les membres exercent leurs droits issus de traités et protégés par la Constitution dans la zone du projet et la zone avoisinante.

[6]               Le procureur général du Canada, défendeur, est nommé en qualité de défendeur à la place du gouverneur en conseil, qui a rendu la décision justificative.

[7]               Le ministre de l’Environnement, un des défendeurs, est le ministre qui est tenu de prendre les décisions relatives aux effets environnementaux négatifs importants, aux termes des paragraphes 5(1) et 5(2) de la LCEE 2012, et celui qui a établi la déclaration de décision dans laquelle figure la décision justificative.

[8]               Le ministre des Pêches et des Océans, un des défendeurs, est l’autorité responsable ayant le pouvoir d’accorder des autorisations aux termes de l’alinéa 35(2)b) de la Loi sur les pêches, LRC 1985, c F‑14, concernant le projet.

[9]               Le ministre du Transport, un des défendeurs, est l’autorité responsable ayant le pouvoir d’approuver le projet et les ouvrages connexes aux termes du paragraphe 6(1) de la Loi sur la protection de la navigation, LRC 1985, c N‑22, et il peut autoriser des ouvrages connexes aux termes du paragraphe 9(1) de la même loi.

[10]           La défenderesse, la BC Hydro, est une société de la Couronne provinciale et le promoteur du projet (ensemble « les défendeurs »).

III.             Le processus

[11]           Le 18 mai 2011, BC Hydro a présenté un rapport descriptif du projet au bureau d’évaluation environnementale de la Colombie‑Britannique [EAO] et à l’Agence canadienne d’évaluation environnementale [l’Agence], pour amorcer le processus d’évaluation environnementale des deux organismes.

[12]           Le 30 septembre 2011, l’EAO et l’Agence ont annoncé qu’elles effectueraient une évaluation environnementale coopérative [EEC], à laquelle participerait la CEC. En outre, une version provisoire de l’entente relative au processus et du mandat de la CEC a été publiée le même jour. Dans le mandat, treize facteurs dont la Commission devait tenir compte étaient énumérés. Il convient d’attirer particulièrement l’attention sur les paragraphes 2.2 et 3.14 : le premier fournit la liste des facteurs à prendre en considération, et le second précise le mandat de la Commission concernant les renseignements relatifs au caractère justifiable des effets environnementaux négatifs et importants que pourrait éventuellement entraîner le projet.

[13]           Avant de constituer la CEC, l’Agence et l’EAO ont supervisé l’élaboration des lignes directrices relatives à l’étude d’impact environnemental [l’EIE], qui précisent la portée des facteurs énumérés dans le mandat et indiquent les renseignements que BC Hydro doit fournir sous la forme d’une étude d’impact environnemental [EIE].

[14]           La première version des lignes directrices de l’EIE a été rédigée par BC Hydro et révisée par un groupe de travail chargé de superviser les modifications. Le 7 septembre 2012, la ministre et le directeur exécutif de l’EAO ont estimé que les lignes directrices de l’EIE étaient adéquates et les ont communiquées à BC Hydro. Ces lignes directrices ont été incorporées au mandat conformément au paragraphe 2.8.

[15]           Le 25 janvier 2013, BC Hydro a présenté l’EIE à l’Agence et à l’EAO. Le document a ensuite été examiné par le groupe de travail, des organismes gouvernementaux et le public. BC Hydro a répondu à tous les commentaires et rédigé vingt‑neuf documents techniques sur les thèmes communs de ces commentaires.

[16]           En juin et juillet 2013, l’Agence et l’EAE ont donné instruction à BC Hydro de modifier l’EIE pour tenir compte des commentaires et des réponses, et, le 1er août 2014, le tout a été jugé satisfaisant et prêt pour l’examen de la Commission.

[17]           Entre septembre et novembre 2013, la CEC a demandé des renseignements à BC Hydro à trois reprises et fait des demandes de suivi. Le 7 novembre 2013, la Commission a décidé que l’EIE modifiée ainsi que les renseignements supplémentaires obtenus étaient suffisants pour tenir des audiences publiques.

[18]           Les audiences publiques, tenues en décembre 2013 et janvier 2014, ont duré 26 jours. Les séances du 9 et du 10 décembre et celle du 23 janvier ont porté sur « la nécessité, la raison d’être et les solutions de rechange ».

[19]           Une fois les audiences terminées, la CEC a présenté, le 1er mai 2014, son rapport à la ministre et au directeur exécutif de l’EAO.

[20]           La CEC présentait un certain nombre de conclusions dans son rapport, dont les suivantes :

a)      Le projet risque d’entraîner des effets négatifs importants sur les possibilités et les pratiques de pêche des Premières Nations représentées par la Treaty 8 Tribal Association (T8TA) (Première Nation de Doig River, Première Nation de Halfway River, Première Nation de Prophet River et Premières Nations de West Moberly), les Premières Nations des Saulteaux et les Premières Nations de la rivière Blueberry, et ces effets ne peuvent être atténués.

b)      Le projet risque d’entraîner un effet négatif important sur la chasse et les activités de piégeage sur des territoires non visés par des titres pour les Premières Nations représentées par la T8TA et les Premières Nations des Saulteaux, et ces effets ne peuvent être atténués;

c)      Le projet risque d’entraîner un effet négatif important sur d’autres usages des terres à des fins traditionnelles pour les Premières Nations représentées par la T8TA, les Premières Nations des Saulteaux et les Premières Nations de la rivière Blueberry, et certains de ces effets ne peuvent être atténués;

d)     Le projet risque d’entraîner des effets cumulatifs négatifs importants sur l’usage des terres et des ressources à des fins traditionnelles;

e)      Le projet aurait des effets négatifs cumulatifs importants sur les ressources patrimoniales culturelles à la fois pour les Autochtones et pour les non‑Autochtones;

f)       Le projet entraînerait des effets cumulatifs négatifs importants sur le poisson et l’habitat du poisson, la végétation et les communautés écologiques, les oiseaux, y compris les oiseaux migrateurs, les grands mammifères et les ressources visuelles;

g)      La CEC remettait en question l’optimisation du potentiel hydraulique de la rivière de la Paix, ce qui restreignait d’autant l’examen d’autres possibilités.

[21]           La CEC a également formulé des conclusions sur les attributs uniques de la vallée de la rivière de la Paix qui facilitent l’exercice des droits issus du Traité no 8 comme la pêche et elle a conclu qu’il n’était pas possible de trouver à proximité un autre environnement naturel comparable. La Commission a conclu que, d’après les preuves, les Premières Nations, notamment certaines des Premières Nations demanderesses, avaient démontré leur fort attachement culturel à l’environnement de la rivière de la Paix et que cette zone était d’une très grande importance pour la préservation de leur mode de vie autochtone.

[22]           Le 9 mai 2014, BC Hydro a signalé à la CEC une erreur aux tableaux 16 et 18 du chapitre 15. En effet, la Commission avait omis d’inclure une faible charge satisfaite par le recours au gaz naturel liquéfié [GNL] dans la prévision des charges (ce qui était l’intention déclarée). Or, cette erreur modifiait le bilan de la charge satisfaite par les diverses ressources énergétiques. En réaction, la CEC a publié un erratum à ce sujet le 10 juin 2014 et déclaré qu’elle modifierait les tableaux en y intégrant les renseignements omis, mais que [traduction] « les conclusions demeur[ai]ent les mêmes », sans plus d’explications.

[23]           En août 2014, les demanderesses ont été invitées à présenter des observations écrites sur deux pages à la ministre, pour décrire les préoccupations que soulevait pour elles le projet. Elles ont déclaré qu’elles estimaient que le projet allait porter atteinte à leurs droits issus de traités et que cette atteinte appelait une justification selon le critère de l’arrêt Sparrow. La ministre n’a pas répondu à ces commentaires (R c Sparrow, [1990] 1 RCS 1075).

[24]           Le 8 septembre 2014, une note de service a été envoyée à la ministre. Cette note, une fois signée et datée par cette dernière, a constitué la décision prise en vertu de l’article 52 de la LCEE 2012. Ainsi, la ministre a signé la note et elle s’est dite d’accord avec l’affirmation que le projet, si l’on y donnait suite, entraînerait vraisemblablement des effets environnementaux négatifs et importants.

[25]           Le 14 octobre 2014, le GC a pris le décret 2014 1105, qui énonce sa décision selon laquelle les effets environnementaux négatifs et importants que la réalisation du projet est susceptible d’entraîné sont « justifiables dans les circonstances ».

[26]           Le 14 octobre 2014, la ministre a également délivré une déclaration conformément à la LCEE 2012 (puis une deuxième comportant des corrections mineures le 25 novembre 2014), qui autorise la réalisation du projet.

[27]           Le décret en conseil qui constitue la décision attaquée se lit comme suit :

Attendu que BC Hydro propose le développement du projet d’énergie propre du site C (le « projet ») près de Fort St. John, en Colombie‑Britannique;

Attendu que, après avoir pris en compte le rapport de la commission d’examen conjoint sur le projet d’énergie propre du site C, la ministre de l’Environnement a décidé, compte tenu de l’application des mesures d’atténuation qu’elle estimait indiquées, que le projet est susceptible d’entraîner des effets environnementaux négatifs importants;

Attendu que, après avoir pris cette décision, la ministre de l’Environnement a renvoyé au gouverneur en conseil, conformément au paragraphe 52(2) de la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale (2012) (la « Loi »), la question de savoir si ces effets sont justifiables dans les circonstances;

Attendu que le gouvernement du Canada a mis en place un processus raisonnable et réceptif en vue de consulter les groupes autochtones susceptibles d’être touchés par le projet;

Attendu que le processus de consultation a permis d’engager le dialogue et d’échanger des renseignements pour faire en sorte que les préoccupations et intérêts des groupes autochtones soient pris en compte dans le processus décisionnel;

Attendu que le processus de consultation a offert aux groupes autochtones la possibilité d’examiner et de commenter les conditions qui doivent être énoncées dans la déclaration que doit faire la ministre en application de la Loi et qui sont susceptibles d’atténuer les effets environnementaux et les impacts potentiels sur les groupes autochtones;

Attendu que la ministre tiendra compte des points de vue et des renseignements présentés par les groupes autochtones pour décider des conditions à imposer au promoteur dans sa déclaration;

Attendu que le processus de consultation entrepris est digne de l’honneur de Sa Majesté;

Attendu qu’un équilibre raisonnable a été établi entre les préoccupations et intérêts des groupes autochtones et ceux de la société, notamment les intérêts d’ordre social, économique, stratégique ainsi que les intérêts du public en général,

À ces causes, sur recommandation de la ministre de l’Environnement et en vertu du paragraphe 52(4) de la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale (2012), Son Excellence le Gouverneur général en conseil décide que les effets environnementaux négatifs importants susceptibles d’être entraînés par la réalisation du projet d’énergie propre du site C proposé par BC Hydro en Colombie‑Britannique sont justifiables dans les circonstances.

IV.             Les questions en litige

[28]           Voici les questions en litige :

A.    Le GC avait‑il le pouvoir, aux termes du paragraphe 52(4) de la LCEE 2012, de décider si le projet constitue une atteinte aux droits issus de traités des demanderesses et aurait‑il dû prendre cet aspect en compte pour déterminer si le projet était justifié?

B.     Les demanderesses avaient‑elles l’attente légitime que le GC examine la question de l’atteinte à leurs droits, compte tenu des commentaires qu’elles avaient reçus de l’Agence?

C.     L’obligation de consulter et d’accommoder les Premières Nations défenderesses a‑t‑elle été respectée en l’espèce?

D.    La décision du GC et le décret pris aux termes du paragraphe 52(4) de la LCEE 2012, selon lequel les effets environnementaux négatifs importants que le projet est susceptible d’entraîné sont justifiés, font‑ils partie de la gamme des issues raisonnables?

V.                La norme de contrôle

[29]           Les demanderesses soutiennent que la norme de contrôle applicable est celle de la décision correcte. Elles fondent leur argument sur l’idée que le GC n’a pas respecté l’équité procédurale parce qu’il n’a pas tenu compte de toutes les considérations et de tous les renseignements pertinents. Elles étayent également leurs arguments en soutenant que la présente affaire soulève des questions constitutionnelles, que ce n’est pas le bon critère juridique qui a été appliqué, et que la LCEE 2012 ne protège pas expressément le GC contre tout examen fondé sur la norme de la décision correcte dans son interprétation de la LCEE 2012 (Georgia Strait Alliance c Canada (Ministre des Pêches et des Océans), 2012 CAF 40 aux paragraphes 101, 102 [Georgia Strait]; Paul c Colombie‑Britannique (Forest Appeals Commission), 2003 CSC 5 au paragraphe 47).

[30]           Les demanderesses affirment également que, selon la décision Conseil des Innus de Ekuanitshit c Canada (procureur général), 2013 CF 418 au paragraphe 76, conf. par 2014 CAF 189 aux paragraphes 40 à 42, 44 [Innu], il n’y a lieu de faire preuve de retenue à l’égard de la décision du GC que dans les cas qui ne sont pas visés par l’une ou l’autre des trois exceptions, décrites au paragraphe 76 de la décision de la Cour fédérale, à savoir « 1) le processus légal prévu par la LCEE n’a pas été convenablement suivi avant que la décision ait été prise; 2) la décision du GC a été prise sans égard à l’objet de la LCEE; 3) la décision du GC est, dans les faits, dénuée de fondement raisonnable ». Elles soutiennent que, puisque la décision en question est à tout le moins visée par la deuxième exception, il n’y a pas lieu de faire preuve de retenue à l’égard de la décision du GC.

[31]           En outre, l’existence et l’étendue de l’obligation de consulter sont des questions juridiques qui appellent l’application de la norme de la décision correcte. Le caractère suffisant des consultations de la ministre, ainsi que celles du GC, est susceptible de contrôle selon la norme de la décision raisonnable (Première Nation des Dénés Couteaux‑Jaunes c Canada (Ministre des Affaires autochtones et du Nord Canada), 2015 CAF 148 au paragraphe 46 [Dénés Couteaux‑Jaunes]; Nation Haida c Colombie‑Britannique (Ministre des Forêts), 2004 CSC 73 aux paragraphes 61, 62 [Haida]; Adam c Canada (Ministre de l’Environnement), 2014 CF 1185 au paragraphe 65).

[32]           Les défendeurs soutiennent que la norme de contrôle qui doit s’appliquer à l’interprétation législative à laquelle s’est livré le GC en ce qui concerne son rôle en vertu de la LCEE 2012 est celle de la décision raisonnable, étant donné que la loi lui confie un rôle central dans le processus d’EA et pour ce qui est de déterminer si des effets environnementaux négatifs importants sont justifiables dans les circonstances. La LCEE 2012 est manifestement une loi que le GC connaît particulièrement bien (Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9 aux paragraphes 53 et 54).

[33]           Les défendeurs soutiennent également que la décision du GC est une décision de nature très discrétionnaire, fondée sur des considérations de politique générale et sur des faits, à laquelle il convient d’appliquer une norme très déférente (Innu, précitée, au paragraphe 40; Canada (Revenu national) c JP Morgan Asset Management (Canada) Inc, 2013 CAF 250 au paragraphe 74).

[34]           De plus, les défendeurs soutiennent que les demanderesses ne peuvent utilement invoquer l’affaire Georgia Strait, précitée, pour demander l’application de la norme de la décision correcte, étant donné que la jurisprudence récente confirme que la norme de la décision raisonnable s’applique lorsque la décision faisant l’objet du contrôle résulte de l’exercice d’un pouvoir discrétionnaire et de l’application de politiques à des questions de fait ainsi que de l’interprétation par le décideur de sa propre loi constitutive ou d’une loi étroitement liée à son mandat et dont il a une connaissance approfondie (Agraira c Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2013 CSC 36 au paragraphe 50; Celgene Corp c Canada (Procureur général), 2011 CSC 1 aux paragraphes 33 et 34).

[35]           Le caractère polycentrique de la décision du GC, lui‑même une entité élue, prise sous le régime d’une loi dont il a une connaissance approfondie, justifie également l’application de la norme de la décision raisonnable.

[36]           Les questions touchant l’équité procédurale et l’existence de l’obligation de consulter ainsi que l’étendue de cette obligation (qui sont des questions juridiques) appellent l’application de la norme de la décision correcte (Établissement de Mission c Khela, 2014 CSC 24 au paragraphe 79; Canada (Citoyenneté et Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12 au paragraphe 43; Dénés Couteaux‑Jaunes, précité, au paragraphe 46). La norme de la décision raisonnable est la norme appropriée en ce qui concerne les autres questions, étant donné que le processus de consultation et le caractère suffisant de celle‑ci constituent une question mixte de fait et de droit (Haida, précité, aux paragraphes 61 et 62; Rio Tinto Alcan Inc c Conseil tribal Carrier Sekani, 2010 CSC 43 au paragraphe 64 [Rio]).

VI.             Analyse

[37]           Les dispositions législatives pertinentes sont jointes aux présents motifs à l’annexe A.

A.                Les objections préliminaires concernant les éléments de preuve

[38]           Étant donné que les demanderesses ont retiré les pièces 10 et 11 jointes à l’affidavit Raphal ainsi que les paragraphes 21 et 22 de cet affidavit qui avaient suscité des objections, les défendeurs ont admis que les pièces D à M jointes à l’affidavit Savident n’étaient pas nécessaires, ce qui a résolu les objections qu’avaient soulevées les parties au sujet des éléments de preuve.

B.                 Le GC a‑t‑il le pouvoir, aux termes du paragraphe 52(4) de la LCEE 2012, de décider si le projet constitue une atteinte aux droits issus de traités des demanderesses et aurait‑il dû prendre cet aspect en compte pour déterminer si le projet était justifié?

[39]           Les demanderesses soutiennent que le dépôt d’une action pour invoquer l’atteinte à leurs droits ne constitue pas une voie de recours appropriée en l’espèce. L’avocate a déclaré au cours de sa plaidoirie qu’une action permettait uniquement d’obtenir une réparation a posteriori sous la forme de dommages‑intérêts et prendrait tellement de temps que les effets environnementaux du projet non susceptibles d’atténuation se seraient déjà produits. Le dépôt d’une action n’est donc pas une voie de recours appropriée et efficace pour les demanderesses.

[40]           De plus, étant donné que les droits des demanderesses tirent leur origine d’un traité et que ce ne sont pas des droits revendiqués, les demanderesses affirment que les obligations qu’a la Couronne envers elles sont plus clairement établies et définies que dans les cas où une Première Nation n’a pas encore vu ses droits reconnus et confirmés.

[41]           Les demanderesses soutiennent que la clause de prise des terres figurant dans le Traité no 8 autorise le gouvernement à prendre des terres, et qu’il convient de l’interpréter conformément à l’arrêt R c Badger, [1996] 1 RCS 771. Dans l’arrêt Badger, la Cour a indiqué qu’il était nécessaire d’interpréter le traité en cause en appliquant le critère de l’« utilisation visible et compatible » à l’égard de la prise des terres, et que les parties au traité croyaient que la plupart des terres visées par ledit traité resteraient inoccupées, malgré la clause autorisant la prise des terres.

[42]           Les demanderesses soutiennent également que la réalisation du projet portera atteinte à leurs droits issus de traités et que cette atteinte doit se justifier selon le critère de l’arrêt Sparrow. Les prises de terres par le gouvernement vont au‑delà de ce qu’envisageait le Traité no 8, en raison de leur fréquence et de l’étendue des terres visées. Certes, il est possible que l’atteinte en question se justifie selon le critère de l’arrêt Sparrow, mais en l’espèce la question de savoir s’il y a atteinte aux droits des demanderesses n’a pas été examinée et la CEC a expressément reconnu qu’il ne lui appartenait pas de se prononcer sur la question de l’atteinte aux droits issus de traités. Même si le GC disposait du rapport de la CEC, il était tenu de se conformer à la Constitution, et l’omission d’aborder la question de l’atteinte lorsqu’il a pris la décision attaquée constitue une erreur (R c Sparrow, [1990] 1 RCS 1075). L’omission de traiter de l’atteinte aux droits issus de traités est au cœur de la thèse des demanderesses selon laquelle la décision du GC est à la fois inappropriée et déraisonnable.

[43]           Il en résulte que les demanderesses affirment que l’omission de la part du GC de se prononcer sur l’atteinte portée à leurs droits issus de traités fait en sorte que sa décision ne peut être maintenue, bien que la présente demande ne vise pas à obtenir un résultat particulier. C’est l’omission d’aborder la question de l’atteinte, et non pas l’issue en tant que telle, qui est, d’après les demanderesses, à la fois erronée et déraisonnable.

[44]           Enfin, les demanderesses soutiennent qu’elles s’attendaient légitimement à ce que le GC se prononce sur la question de l’atteinte, en raison principalement d’un « schéma » distribué à différents moments du processus de consultation, qui montrait que le gouvernement fédéral allait examiner la question de l’atteinte aux droits.

[45]           Les demanderesses s’appuient sur les décisions West Moberly et Beckman pour affirmer que, dans le cadre d’une demande de contrôle judiciaire, la Cour fédérale a le pouvoir d’examiner la question de l’atteinte portée à des droits issus de traités (West Moberly First Nations c British Columbia (Chief Inspector of Mines), 2011 BCCA 247 aux paragraphes 92 à 97; Beckman c Première Nation de Little Salmon/Carmacks, 2010 CSC 53 au paragraphe 47).

[46]           Le GC n’est toutefois ni un tribunal administratif ni un ministre. Il exerce son pouvoir discrétionnaire, dans un cadre différent, pour rendre une décision qui se fonde sur des considérations polycentriques et la pondération des intérêts individuels et publics, notamment les intérêts et les préoccupations autochtones. Il convient de faire preuve d’une grande déférence lors du contrôle de ses décisions.

[47]           Le législateur a clairement eu l’intention de confier au GC la question de savoir si les effets environnementaux négatifs importants sont justifiés, sachant que ce genre de décisions appelle une grande retenue et qu’elles jouissent d’une immunité.

[48]           Il ressort de la jurisprudence que les décisions du GC appellent une retenue considérable, parce qu’elles sont par nature polycentriques et qu’elles prennent en compte non seulement des données et des faits scientifiques, mais également des considérations sociales et politiques. Le GC consiste en des représentants élus – dont chacun est responsable de ses décisions devant la population canadienne, représentée par circonscriptions,– en l’espèce, les ministres qui sont nommés en qualité de défendeur (Greenpeace Canada c Canada (Procureur général), 2014 CF 463 aux paragraphes 232 à 236, 280 et 281).

[49]           Je conviens avec les défendeurs que le contrôle judiciaire n’est pas le recours approprié pour décider s’il a été porté atteinte à des droits issus du Traité no 8. Au cours de sa plaidoirie, l’avocate des demanderesses a déclaré qu’elle pensait qu’une action ne permettrait pas aux demanderesses d’obtenir ce qu’elles demandaient et qu’elles se verraient uniquement octroyer des dommages‑intérêts et des dépens si elles obtenaient gain de cause. Elle a également affirmé que la durée de l’instruction d’une action donnerait aux défendeurs largement le temps de réaliser le projet et rendrait sans objet les demandes des demanderesses.

[50]           Une action pourrait néanmoins donner aux demanderesses accès à un certain nombre de mesures, notamment un procès sommaire, une injonction interlocutoire ou un procès accéléré portant sur le fond de la question de l’atteinte, qui, si elles étaient demandées, pourraient donner lieu à un règlement approprié et définitif de cette question, en se fondant sur un dossier de preuve complet.

[51]           En outre, comme l’ont fait remarquer les défendeurs, seule la Colombie‑Britannique a le pouvoir de prendre des terres aux termes du Traité no 8, et une prise de terre visée par un traité n’entraîne pas nécessairement une atteinte aux droits issus d’un traité, si elle est effectuée en respectant les conditions exposées dans l’arrêt Mikisew (Première Nation crie Mikisew c Canada (ministre du Patrimoine canadien), 2005 CSC 69 aux paragraphes 54 à 59, 64 à 66 [Mikisew]; Première Nation de Grassy Narrows c Ontario (Ressources naturelles), 2014 CSC 48 aux paragraphes 30, 52 et 53.

[52]           À mon avis, le dossier de preuve constitué dans le cadre d’un recours par voie d’action est le cadre approprié pour qu’un tribunal se prononce sur la question de l’atteinte portée aux droits issus de traités des demanderesses. Dans Beckman c Première Nation de Little Salmon/Carmacks, précité, au paragraphe 47, la Cour suprême a clairement déclaré que le contrôle judiciaire était un recours très souple, dans le contexte duquel une panoplie de questions peuvent être soulevées, mais qu’il ne pouvait raisonnablement être considéré comme une voie de recours souple au point de donner ouverture à l’examen de toute question, dans tous les contextes, et, comme en l’espèce, pour décider s’il y a eu atteinte aux droits issus du Traité no 8.

[53]           Lorsque l’obligation de consulter implique une consultation approfondie et qu’une question relative à l’atteinte à des droits issus de traités établis est en litige, la Cour est mal outillée pour se prononcer si elle dispose d’un dossier incomplet ou constitué dans le cadre d’un processus informel de présentation de la preuve lors d’un contrôle judiciaire. L’atteinte à des droits issus de traités aussi importants et fondamentaux ne peut s’apprécier qu’en disposant d’un dossier de preuve complet, qui respecte les normes d’admissibilité applicables lors d’un procès, pour que la question puisse être tranchée de façon raisonnable et équitable. Il est néanmoins incontestable que l’examen de la question de l’atteinte aux droits issus de traités, s’il ne peut déboucher sur une décision ou une conclusion définitive, doit néanmoins faire partie du processus de consultation, tel que précisé plus loin.

C.                 Les attentes légitimes

[54]           Les demanderesses n’ont pas démontré qu’elles avaient l’attente légitime que la question de l’atteinte aux droits issus de traités soit examinée par le GC. Ce principe ne s’applique que dans les cas les plus évidents, et la présente espèce n’en est pas un. Le fait d’avoir inclus un schéma dans quelques documents et présenté et distribué aux demanderesses au cours du processus une version modifiée de celui-ci, dans lesquels il n’était pas expressément fait mention de la question de l’atteinte à des droits issus de traités, ne répond pas au critère applicable pour autoriser la Cour à conclure qu’il existait une attente légitime selon laquelle cette question serait tranchée, et non pas simplement examinée, dans le cadre du processus de consultation et d’accommodement.

D.                L’obligation de consulter et d’accommoder les Premières Nations défenderesses a‑t‑elle été respectée en l’espèce et la décision au sujet de la justification prise par le GC était‑elle raisonnable?

[55]           La Cour suprême du Canada a résumé le cadre qui régit l’obligation de consulter dans l’arrêt Rio, précité, au paragraphe 51 :

51  Rappelons que l’obligation de consulter prend naissance lorsque (1) la Couronne a connaissance, concrètement ou par imputation, de l’existence possible d’une revendication autochtone ou d’un droit ancestral, (2) qu’elle envisage une mesure ou une décision et (3) que cette mesure ou cette décision est susceptible d’avoir un effet préjudiciable sur la revendication autochtone ou le droit ancestral. Il faut donc établir un lien de causalité entre la mesure projetée par la Couronne et l’effet préjudiciable possible sur une revendication autochtone ou un droit ancestral.

[56]           Comme cela a été déclaré dans Ktunaxa Nation c British Columbia (Minister of Forests Lands and Natural Resource Operations), 2015 BCCA 352 aux paragraphes 77 à 79 :

[traduction]

77  L’étendue de l’obligation de consultation dépend de l’évaluation préliminaire de la solidité de la preuve étayant l’existence du droit ou du titre revendiqué, et de la gravité des effets préjudiciables potentiels sur le droit ou le titre (Haida, au paragraphe 39). Fondamentalement, la Couronne n’a pas l’obligation de parvenir à une entente, mais plutôt de mener de bonne foi de véritables consultations (Haida, au paragraphe 41). La bonne foi est un élément central, comme l’a expliqué la Cour dans l’arrêt Haida, au paragraphe 42 :

42  À toutes les étapes, les deux parties sont tenues de faire montre de bonne foi. Le fil conducteur du côté de la Couronne doit être « l’intention de tenir compte réellement des préoccupations [des Autochtones] » à mesure qu’elles sont exprimées (Delgamuukw, précité, par. 168), dans le cadre d’un véritable processus de consultation. Les manœuvres malhonnêtes sont interdites. Cependant il n’y a pas d’obligation de parvenir à une entente, mais plutôt de procéder à de véritables consultations. Quant aux demandeurs autochtones, ils ne doivent pas contrecarrer les efforts déployés de bonne foi par la Couronne et ne devraient pas non plus défendre des positions déraisonnables pour empêcher le gouvernement de prendre des décisions ou d’agir dans les cas où, malgré une véritable consultation, on ne parvient pas à s’entendre : voir Halfway River First Nation c British Columbia (Ministry of Forests), [1999] 4 C.N.L.R. 1 (B.C.C.A.), au paragraphe 44; Heiltsuk Tribal Council c British Columbia (Minister of Sustainable Resource Management) (2003), 19 B.C.L.R. (4th) 107 (B.C.S.C.). Toutefois, le seul fait de négocier de façon serrée ne porte pas atteinte aux droits des Autochtones d’être consultés.

78  L’obligation d’accommoder nécessite une pondération d’intérêts. Dans l’arrêt Première Nation Tlingit de Taku River c Colombie‑Britannique (directeur d’évaluation de projet), 2004 CSC 74, la Cour a déclaré au paragraphe 2 :

[… ] Lorsqu’une véritable consultation a eu lieu, il n’est pas essentiel que les parties parviennent à une entente. L’obligation d’accommodement exige plutôt que les préoccupations des Autochtones soient raisonnablement mises en balance avec l’incidence potentielle de la décision sur ces préoccupations et avec les intérêts sociétaux opposés. L’idée de compromis fait partie intégrante du processus de conciliation.

79  La norme de contrôle applicable est selon le paragraphe 62 de l’arrêt Haida celle de la décision raisonnable. L’élément central n’est pas le résultat, mais le processus de consultation et d’accommodement (Haida, au paragraphe 63). La Cour a expliqué ce qui suit au paragraphe 62 :

[…] La perfection n’est pas requise; il s’agit de se demander si, « considéré dans son ensemble, le régime de réglementation [ou la mesure gouvernementale] respecte le droit ancestral collectif en question » : Gladstone, précité, paragraphe 170. Ce qui est requis, ce n’est pas une mesure parfaite, mais une mesure raisonnable. Comme il est précisé dans Nikal, précité, au paragraphe 110, « [l]e concept du caractère raisonnable doit […] entrer en jeu pour ce qui […] concerne[e] l’information et la consultation […] Dans la mesure où tous les efforts raisonnables ont été déployés pour informer et consulter, on a alors satisfait à l’obligation de justifier. » Le gouvernement doit déployer des efforts raisonnables pour informer et consulter […]

[57]           Les parties reconnaissent qu’il était nécessaire en l’espèce de tenir une consultation approfondie (Haida, précité, aux paragraphes 47 à 50).

[58]           Cependant, s’ils ne contestent pas que la possibilité qu’il y ait atteinte à des droits issus de traités devrait être examinée lorsque la Couronne s’acquitte de son obligation de consulter et d’accommoder, les défendeurs soutiennent par contre que cela ne veut pas dire qu’il soit nécessaire de se prononcer sur l’existence d’une atteinte à ces droits. Les droits issus du Traité no 8 que possèdent les demanderesses ont été établis et il est clair que le projet entraînera des effets environnementaux négatifs importants, mais les parties ne s’entendent pas sur la question de savoir si la consultation effectuée et les accommodements prévus sont suffisants (Haida, précité).

[59]           Comme cela a été mentionné ci‑dessus, les demanderesses soutiennent que le processus de consultation ne remplit pas l’exigence de la tenue d’une consultation approfondie, puisque la question de l’atteinte à leurs droits issus du Traité no 8 n’a pas été examinée. Ce n’est pas la quantité, mais la qualité de la consultation qui en détermine la profondeur (Kwikwetlem First Nation c Colombie‑Britannique (Utilities Commission), 2009 BCCA 68 aux paragraphes 66 à 70).

[60]           Toutefois, les renseignements colligés pour le préparer et ceux figurant dans le rapport de la CEC pris en compte par la ministre et implicitement par le GC, de toute évidence, n’englobent pas l’éventail des autres points de vue et facteurs qu’ont pris en compte la ministre et le GC.

[61]           Si je me fonde sur le dossier qui m’a été présenté, et contrairement aux affirmations des demanderesses, il n’était pas nécessaire que la Couronne se prononce sur l’existence d’une atteinte aux droits issus de traités que possèdent les demanderesses; elle a pris en compte ces droits, elle n’a pas fait abstraction des répercussions du projet sur ceux-ci ni conclu que les répercussions négatives pouvaient être atténuées, et elle a examiné les effets cumulatifs qu’ont eu les deux barrages antérieurs sur les droits historiques des demanderesses [Lignes directrices de l’EIE, clauses 8.5.3 et 9‑1).

[62]           BC Hydro a commencé à consulter les demanderesses en novembre 2007. La démarche est résumée dans l’EIE, volume 5, annexe A06, parties 2 et 2(a), et décrite dans l’affidavit #1 de Seanna McConnell. À mon avis, BC Hydro a procédé à des consultations approfondies qui ont été menées de bonne foi. Les demanderesses ont toutefois exprimé leur vive opposition au projet, et elles ont signé une déclaration [traduction« dans laquelle elles s’engageaient à utiliser tous les moyens légaux pour empêcher la réalisation du projet du barrage sur le site C » (EIE, volume 5, annexe A06, partie 5, pages 16 à 30 (dossier des demanderesses, onglet 7C); affidavit de Willson, pièce 14 (dossier des demanderesses, onglet 3); McConnell, affidavit #1, paragraphe 123 (dossier de BC Hydro, onglet 11)).

[63]           Au cours des sept ans qui se sont écoulés entre novembre 2007 et décembre 2014, BC Hydro a rencontré 177 fois les Premières Nations du Traité no 8 concernées et leur a remis 5 879 039,78 $ pour leur permettre, notamment, d’effectuer leur propre étude concernant les conditions de base de la communauté et l’utilisation traditionnelle des terres, de retenir les services de consultants, de participer au processus d’évaluation environnementale, dont les audiences de la CEC, d’assister aux réunions organisées par BC Hydro, d’examiner les documents, et de préparer des rapports et des commentaires en ce qui concerne ou pour BC Hydro, l’Agence, l’EAO et la Commission. Ce montant vient s’ajouter au financement que leur ont fourni les gouvernements provincial et fédéral.

[64]           Ce financement a été accordé conformément à plusieurs ententes conclues avec les Premières Nations du Traité no 8 :

  • Stage 2 Consultation Agreement [Entente relative à l’étape 2 des consultations] (1er décembre 2008 au 31 mars 2010) pour la tenue de consultations préalables à l’évaluation environnementale;
  • Agreement to Negotiate a Traditional Land Use Study Agreement [Entente relative à la négociation d’une entente sur une étude de l’utilisation traditionnelle des terres] (18 décembre 2009), prévoyant un processus de négociation concernant une entente sur une étude de l’utilisation traditionnelle des terres;
  • Traditional Land Use Study Agreement [Entente relative à l’étude de l’utilisation traditionnelle des terres] (16 décembre 2010), pour effectuer une étude de l’utilisation traditionnelle des terres reliée au projet le 4 octobre 2011; à la demande de plusieurs Premières Nations, l’entente a été modifiée de façon à réduire sensiblement l’étendue de la zone à l’étude;
  • Environmental Assessment Participating Agreement [Entente de participation à l’évaluation environnementale] (21 avril 2011 au 14 octobre 2014), qui mettait sur pied un processus de consultation au cours de l’évaluation environnementale;
  • Lettre d’entente (6 mars 2012), qui créait le mandat relatif à la collecte et à la présentation des renseignements de base de nature socio‑économique par les Premières Nations;
  • Diverses lettres d’entente rédigées aux termes de l’Entente relative à la participation à l’évaluation environnementale à l’égard d’activités de consultation particulières, notamment, p. ex., concernant les autres emplacements possibles du barrage;
  • Discussion Framework [Cadre de discussion] (2 octobre 2014), qui créait un cadre pour la consultation postérieure aux travaux de la CEC sur la nécessité du projet et l’existence de solutions de rechange.

[65]           Aux termes de ces ententes, BC Hydro a consulté les Premières Nations du Traité no 8 avant de préparer une première ébauche des lignes directrices de l’EIE, avant la conception et la mise en œuvre de ses études sur le terrain, avant la finalisation de la conception du projet et la préparation de l’EIE, y compris les rapports techniques et les mesures d’atténuation proposées qu’il contenait, et avant la décision de la province d’autoriser le projet.

[66]           En mars 2012, BC Hydro a proposé d’entamer des négociations en vue de conclure avec les demanderesses des ententes sur les répercussions et les avantages. En avril 2014, la Première Nation de Doig River a informé BC Hydro qu’elle souhaitait poursuivre les négociations relatives à une entente sur les répercussions et les avantages. Dans leurs commentaires au sujet de l’EIE, les Premières Nations du Traité no 8 ont déclaré qu’elles examineraient la possibilité de participer à la négociation d’une entente sur le partage des avantages en ce qui concerne les solutions de rechange, avec la réserve toutefois que le promoteur accepte au préalable de renoncer à réaliser le projet proposé.

[67]           De plus, des sources d’énergie ont également été examinées à titre de solution de rechange au projet (EIS, clause 4.1.2, pages 291, 294, 304 et page 431 du RCC).

[68]           Dès le début du processus d’évaluation environnementale en mai 2011, jusqu’à sa conclusion en octobre 2014, un certain nombre d’étapes ont été incluses dans le processus pour que la ministre et le Cabinet reçoivent les renseignements dont ils avaient raisonnablement besoin pour prendre leurs décisions, dont des renseignements relatifs à l’examen de l’entente BC/Canada et du mandat, ainsi qu’à l’examen en plusieurs étapes des lignes directrices de l’EIE et de l’EIE, après quoi l’Agence et l’EAO ont déclaré que l’EIE était satisfaisante. La ministre et le Cabinet ont pris leur décision après avoir reçu de nombreux commentaires du public, des agences gouvernementales et des groupes autochtones, y compris les demanderesses. À l’étape de l’examen de la CEC, celle‑ci a examiné l’EIE et a demandé à BC Hydro de lui fournir des renseignements supplémentaires jusqu’à ce qu’elle estime que l’EIE était suffisante. La Commission a ensuite tenu des audiences publiques; elle a reçu d’autres commentaires et à la fin du processus, elle a produit un long rapport dans lequel elle souligne qu’elle a effectué son évaluation conformément à son mandat.

[69]           L’ampleur de la consultation ressort également des trois plans de consultation mis en place au cours du processus de la CEC et des réunions de consultation postérieures aux travaux de la CEC. Comme cela est exposé dans l’affidavit de Seanna McConnell, BC Hydro a longuement consulté les demanderesses, a agi de bonne foi, et des consultations approfondies ont été tenues, tant sur le plan qualitatif que quantitatif. Il ressort également du dossier que, bien que la Couronne ait cherché à maintenir le dialogue avec les demanderesses en ce qui concerne l’atténuation des effets et les mesures devant être prises après la publication du rapport de la CEC, les demanderesses ont, à partir du moment où elles ont déterminé que la seule solution viable pouvant résulter du processus était l’arrêt du projet, refusé de participer à ce dialogue.

[70]           L’engagement de suivre un processus n’emporte pas l’obligation d’arriver à un accord – ce qui est exigé, c’est de déployer des efforts de bonne foi pour comprendre les préoccupations des demanderesses; les défendeurs ont déployé des efforts de cette nature, et la ministre et le GC ont raisonnablement tenu compte de ces préoccupations.

VII.          Les observations de l’intervenante

[71]           Je suis sensible aux commentaires d’Amnistie Internationale, mais la question au cœur du présent contrôle judiciaire est celle de savoir si les demanderesses devraient chercher à obtenir une décision sur l’existence d’une atteinte à leurs droits issus de traités au moyen d’une action ou si le contrôle judiciaire est le recours approprié. Amnistie Internationale a présenté des renseignements intéressants en ce qui a trait à l’apport du droit international, tant au sujet des traités ratifiés que de ceux qui ne l’ont pas été, et en ce qui concerne l’interprétation des exigences auxquelles doit se conformer une instance comme le GC lorsqu’elle se prononce sur le caractère justifié d’un projet. Ce sont là des informations utiles; toutefois j’accorde peu de poids à ces observations parce qu’elles ne touchent pas les questions qui sont au cœur de la présente demande.

[72]           Pour les motifs ci‑dessus, je suis d’avis de rejeter la demande de contrôle judiciaire.

[73]           Compte tenu des préoccupations d’intérêt public, en particulier celles, tout à fait légitimes, des Premières Nations du Traité no 8 à l’égard des effets environnementaux négatifs importants et non susceptibles d’être atténués qu’entraînera le projet, j’estime que chacune des parties devrait assumer ses propres dépens.


JUGEMENT

LA COUR STATUE que :

1.                  La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

2.                  Compte tenu des préoccupations d’intérêt public légitimes et importantes ainsi que des effets environnementaux négatifs importants et non susceptibles d’être atténués qu’entraînera le projet, tel qu’exposés par les demanderesses, je suis d’avis qu’il convient que les parties assument leurs propres dépens.

« Michael D. Manson »

Juge

Traduction


ANNEXE A

Loi canadienne sur l’évaluation environnementale, 2012 (LC 2012, c 19, art. 52)

Effets environnementaux

5. (1) Pour l’application de la présente loi, les effets environnementaux qui sont en cause à l’égard d’une mesure, d’une activité concrète, d’un projet désigné ou d’un projet sont les suivants :

a) les changements qui risquent d’être causés aux composantes ci‑après de l’environnement qui relèvent de la compétence législative du Parlement :

(i) les poissons et leur habitat, au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur les pêches,

(ii) les espèces aquatiques au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur les espèces en péril,

(iii) les oiseaux migrateurs au sens du paragraphe 2(1) de la Loi de 1994 sur la convention concernant les oiseaux migrateurs,

(iv) toute autre composante de l’environnement mentionnée à l’annexe 2;

b) les changements qui risquent d’être causés à l’environnement, selon le cas :

(i) sur le territoire domanial,

(ii) dans une province autre que celle dans laquelle la mesure est prise, l’activité est exercée ou le projet désigné ou le projet est réalisé,

(iii) à l’étranger;

c) s’agissant des peuples autochtones, les répercussions au Canada des changements qui risquent d’être causés à l’environnement, selon le cas :

(i) en matière sanitaire et socio‑économique,

(ii) sur le patrimoine naturel et le patrimoine culturel,

(iii) sur l’usage courant de terres et de ressources à des fins traditionnelles,

(iv) sur une construction, un emplacement ou une chose d’importance sur le plan historique, archéologique, paléontologique ou architectural.

Exercice d’attributions par une autorité fédérale

(2) Toutefois, si l’exercice de l’activité ou la réalisation du projet désigné ou du projet exige l’exercice, par une autorité fédérale, d’attributions qui lui sont conférées sous le régime d’une loi fédérale autre que la présente loi, les effets environnementaux comprennent en outre :

a) les changements — autres que ceux visés aux alinéas (1)a) et b) — qui risquent d’être causés à l’environnement et qui sont directement liés ou nécessairement accessoires aux attributions que l’autorité fédérale doit exercer pour permettre l’exercice en tout ou en partie de l’activité ou la réalisation en tout ou en partie du projet désigné ou du projet;

b) les répercussions — autres que celles visées à l’alinéa (1)c) — des changements visés à l’alinéa a), selon le cas :

(i) sur les plans sanitaire et socio‑économique,

(ii) sur le patrimoine naturel et le patrimoine culturel,

(iii) sur une construction, un emplacement ou une chose d’importance sur le plan historique, archéologique, paléontologique ou architectural.

 

Environmental effects

5. (1) For the purposes of this Act, the environmental effects that are to be taken into account in relation to an act or thing, a physical activity, a designated project or a project are

(a) a change that may be caused to the following components of the environment that are within the legislative authority of Parliament :

(i) fish and fish habitat as defined in subsection 2(1) of the Fisheries Act,

(ii) aquatic species as defined in subsection 2(1) of the Species at Risk Act,

(iii) migratory birds as defined in subsection 2(1) of the Migratory Birds Convention Act, 1994, and

(iv) any other component of the environment that is set out in Schedule 2;

(b) a change that may be caused to the environment that would occur

(i) on federal lands,

(ii) in a province other than the one in which the act or thing is done or where the physical activity, the designated project or the project is being carried out, or

(iii) outside Canada; and

(c) with respect to aboriginal peoples, an effect occurring in Canada of any change that may be caused to the environment on

(i) health and socio‑economic conditions,

(ii) physical and cultural heritage,

(iii) the current use of lands and resources for traditional purposes, or

(iv) any structure, site or thing that is of historical, archaeological, paleontological or architectural significance.

Exercise of power or performance of duty or function by federal authority

(2) However, if the carrying out of the physical activity, the designated project or the project requires a federal authority to exercise a power or perform a duty or function conferred on it under any Act of Parliament other than this Act, the following environmental effects are also to be taken into account :

(a) a change, other than those referred to in paragraphs (1)(a) and (b), that may be caused to the environment and that is directly linked or necessarily incidental to a federal authority’s exercise of a power or performance of a duty or function that would permit the carrying out, in whole or in part, of the physical activity, the designated project or the project; and

(b) an effect, other than those referred to in paragraph (1)(c), of any change referred to in paragraph (a) on

(i) health and socio‑economic conditions,

(ii) physical and cultural heritage, or

(iii) any structure, site or thing that is of historical, archaeological, paleontological or architectural significance.

Décisions du décideur

52. (1) Pour l’application des articles 27, 36, 47 et 51, le décideur visé à ces articles décide si, compte tenu de l’application des mesures d’atténuation qu’il estime indiquées, la réalisation du projet désigné est susceptible :

a) d’une part, d’entraîner des effets environnementaux visés au paragraphe 5(1) qui sont négatifs et importants;

b) d’autre part, d’entraîner des effets environnementaux visés au paragraphe 5(2) qui sont négatifs et importants.

Renvoi en cas d’effets environnementaux négatifs importants

(2) S’il décide que la réalisation du projet est susceptible d’entraîner des effets environnementaux visés aux paragraphes 5(1) ou (2) qui sont négatifs et importants, le décideur renvoie au gouverneur en conseil la question de savoir si ces effets sont justifiables dans les circonstances.

Renvoi par l’entremise du ministre

(3) Si le décideur est une autorité responsable visée à l’un des alinéas 15a) à c), le renvoi se fait par l’entremise du ministre responsable de l’autorité devant le Parlement.

Décision du gouverneur en conseil

(4) Saisi d’une question au titre du paragraphe (2), le gouverneur en conseil peut décider :

a) soit que les effets environnementaux négatifs importants sont justifiables dans les circonstances;

b) soit que ceux‑ci ne sont pas justifiables dans les circonstances.

Decisions of decision maker

52. (1) For the purposes of sections 27, 36, 47 and 51, the decision maker referred to in those sections must decide if, taking into account the implementation of any mitigation measures that the decision maker considers appropriate, the designated project

(a) is likely to cause significant adverse environmental effects referred to in subsection 5(1); and

(b) is likely to cause significant adverse environmental effects referred to in subsection 5(2).

Referral if significant adverse environmental effects

(2) If the decision maker decides that the designated project is likely to cause significant adverse environmental effects referred to in subsection 5(1) or (2), the decision maker must refer to the Governor in Council the matter of whether those effects are justified in the circumstances.

Referral through Minister

(3) If the decision maker is a responsible authority referred to in any of paragraphs 15(a) to (c), the referral to the Governor in Council is made through the Minister responsible before Parliament for the responsible authority.

Governor in Council’s decision

(4) When a matter has been referred to the Governor in Council, the Governor in Council may decide

(a) that the significant adverse environmental effects that the designated project is likely to cause are justified in the circumstances; or

(b) that the significant adverse environmental effects that the designated project is likely to cause are not justified in the circumstances.


Loi sur les pêches (LRC, 1985, c F‑14)

Dommages sérieux aux poissons

35. (1) Il est interdit d’exploiter un ouvrage ou une entreprise ou d’exercer une activité entraînant des dommages sérieux à tout poisson visé par une pêche commerciale, récréative ou autochtone, ou à tout poisson dont dépend une telle pêche.

Exception

(2) Il est permis d’exploiter un ouvrage ou une entreprise ou d’exercer une activité sans contrevenir au paragraphe (1) dans les cas suivants :

b) l’exploitation de l’ouvrage ou de l’entreprise ou l’exercice de l’activité est autorisé par le ministre et est conforme aux conditions que celui‑ci établit;

Serious harm to fish

35. (1) No person shall carry on any work, undertaking or activity that results in serious harm to fish that are part of a commercial, recreational or Aboriginal fishery, or to fish that support such a fishery.

Exception

(2) A person may carry on a work, undertaking or activity without contravening subsection (1) if

(b) the carrying on of the work, undertaking or activity is authorized by the Minister and the work, undertaking or activity is carried on in accordance with the conditions established by the Minister;


Loi sur la protection de la navigation (LRC, 1985, c N‑22)

Approbation

6. (1) Le propriétaire peut, avec l’approbation du ministre seulement, construire, mettre en place, modifier, réparer, reconstruire, enlever ou déclasser, dans des eaux navigables mentionnées à l’annexe ou sur, sous, au‑dessus ou à travers celles‑ci, un ouvrage qui, selon la décision du ministre prise au titre de l’article 5, risque de gêner sérieusement la navigation; l’approbation ne peut toutefois être délivrée que si la demande est accompagnée des droits applicables.

Approval

6. (1) An owner may construct, place, alter, repair, rebuild, remove or decommission a work in, on, over, under, through or across any navigable water that is listed in the schedule that the Minister has determined under section 5 is likely to substantially interfere with navigation only if the Minister has issued an approval for the work, which may be issued only if an application for the approval is submitted and the application is accompanied by the applicable fee.

Ouvrages permis

9. (1) Le propriétaire peut construire, mettre en place, modifier, réparer, reconstruire, enlever ou déclasser, dans des eaux navigables mentionnées à l’annexe ou sur, sous, au‑dessus ou à travers celles‑ci, un ouvrage qui, selon la décision du ministre prise au titre de l’article 5, ne risque pas de gêner sérieusement la navigation, s’il le fait conformément aux exigences prévues sous le régime de la présente loi.

Permitted works

9. (1) An owner may construct, place, alter, repair, rebuild, remove or decommission a work in, on, over, under, through or across any navigable water that is listed in the schedule that the Minister has determined under section 5 is not likely to substantially interfere with navigation only if the construction, placement, alteration, repair, rebuilding, removal or decommissioning is in accordance with the requirements under this Act.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T‑2292‑14

 

INTITULÉ :

LA PREMIÈRE NATION DE DOIG RIVER, LES PREMIÈRES NATIONS DE PROPHET RIVER, LES PREMIÈRES NATIONS DE WEST MOBERLY ET LA BANDE INDIENNE DE MCLEOD LAKE c LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA, LE MINISTRE DE L’ENVIRONNEMENT, LE MINISTRE DES PÊCHES ET DES OCÉANS, LE MINISTRE DU TRANSPORT ET LA BRITISH COLUMBIA HYDRO AND POWER AUTHORITY

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Vancouver (COLOMBIE‑BRITANNIQUE)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 22 JUILLET 2015

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE MANSON

 

DATE DES MOTIFS :

LE 28 AOÛT 2015

 

COMPARUTIONS :

Allisun Rana

Emily A. Grier

POUR LES DEMANDERESSES

 

John Gailus

Matthew Nefstead

POUR LES DEMANDERESSES

 

Judith Hoffman

Rosemarie Schipizky

Kelly Keenan

POUR LES DÉFENDEURS

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA,

MINISTRE DE L’ENVIRONNEMENT,

MINISTRE DES PÊCHES ET DES OCÉANS et

MINISTRE DU TRANSPORT

 

Mark Andrews, c.r.

Charles Willms

Bridget Gilbride

Patrick Hayes

POUR LA DÉFENDEresse

BRITISH COLUMBIA HYDRO AND POWER AUTHORITY

Jessica Orkin

 

POUR L’INTERVENANTe

AMNISTIE INTERNATIONALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Rana Law

Avocats

Vancouver (C.‑B.)

POUR LES DEMANDERESSES

 

Devlin Gailus Westaway

Avocats

POUR LES DEMANDERESSES

 

William F. Pentney

Sous‑procureur général du Canada

Vancouver (Colombie‑Britannique)

POUR LES DÉFENDEURS

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA,

MINISTRE DE L’ENVIRONNEMENT,

MINISTRE DES PÊCHES ET DES OCÉANS et

MINISTRE DU TRANSPORT

FASKEN MARTINEAU

Avocats

Vancouver (C.‑B.)

POUR LA DÉFENDERESSE

BRITISH COLUMBIA HYDRO AND POWER AUTHORITY

Goldblatt Partners LLP

Vancouver (C.‑B.)

POUR L’INTERVENANTe

AMNISTIE INTERNATIONALE

 

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