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Date : 20150702


Dossier : IMM‑2742‑14

Référence : 2015 CF 813

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 2 juillet 2015

En présence de monsieur le juge Zinn

ENTRE :

JENANTHAN SITTAMBALAM

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]               Jenanthan Sittampalam est un Tamoul; il est né et a grandi dans le Nord du Sri Lanka. Il a refusé de faire partie des Tigres de libération de l’Eelam tamoul (les TLET); cependant, son frère a été recruté par les TLET, et il est mort à la guerre le 23 janvier 2009.

[2]               La famille du demandeur a déménagé souvent et elle a abouti dans un camp pour personnes déplacées à l’intérieur de son propre pays. Par crainte d’être capturé par l’armée, compte tenu de la participation de son frère aux activités des TLET, le demandeur s’est échappé du camp avec un groupe d’autres personnes en soudoyant les gardiens. Le demandeur a quitté le Sri Lanka pour la Thaïlande le 20 mars 2010, avant de monter à bord du MV Sun Sea à destination du Canada.

[3]               La Section de la protection des réfugiés (la SPR) a rejeté la demande d’asile du demandeur en mettant l’accent sur sa crédibilité générale, les allégations d’éventuelle persécution, la question de changement de circonstances, ainsi que la demande sur place.

[4]               Le demandeur a soulevé de nombreuses questions relatives à la décision de la SPR; cependant, à mon avis, l’une de ces questions est essentielle à l’issue de la demande, de sorte qu’il n’est pas nécessaire d’examiner les autres questions – le caractère raisonnable de l’analyse sur place effectuée par la SPR.

[5]               J’ai examiné le dossier dont a été saisi la SPR ainsi que sa décision, et je ne suis pas en mesure de distinguer de façon appréciable l’analyse de la demande effectuée sur place en l’espèce des décisions visées par le contrôle dans Thanabalasingam c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2015 CF 361 (Thanabalasingam), Y.S. c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2014 CF 324, et B381 c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2014 CF 608.

[6]               Dans la décision Thanabalasingam, le juge Fothergill fait mention des deux dernières décisions. Il souligne, en particulier, la pertinence et l’importance de deux documents lors de l’examen des demandes sur place des passagers du MV Sun Sea. Le premier est le UNHCR Eligibility Guidelines for Assessing the International Protection Needs of Asylum‑Seekers from Sri Lanka, du 21 décembre 2012 (les Lignes directrices) qui note que les demandeurs d’asile déboutés, en particulier ceux qui sont d’origine tamoule, sont détenus, maltraités ou torturés lorsqu’ils sont contraints de retourner au Sri Lanka. Le second document est un rapport intitulé Amnesty International Concerns with respect to forced returns to Sri Lanka for passengers of the Ocean Lady and MV Sun Sea (le Rapport d’AI) qui concluait que les demandeurs d’asile déboutés étaient exposés à un risque sérieux de détention, de torture et de mauvais traitements dès lors que le gouvernement sri lankais soupçonnait qu’ils avaient voyagé à bord du MV Sun Sea.

[7]               Dans la décision faisant l’objet du contrôle, la SPR reconnaît que les autorités sri‑lankaises [traduction« pourraient découvrir comment le demandeur est venu au Canada » mais conclut sans mention ni analyse soit des Lignes directrices soit du Rapport d’AI, que parce qu’il y a peu d’éléments de preuve démontrant qu’il participait aux activités des TLET ou les appuyait, et parce qu’il était [traduction« assujetti à un examen rigoureux par les fonctionnaires canadiens et a été libéré subséquemment » qu’il ne serait pas en danger s’il retournait au Sri Lanka.

[8]               Comme dans Thanabalasingam, la SPR a ignoré ces documents pertinents et contradictoires, et n’a fourni aucune raison ni explication pour justifier, malgré ces éléments de preuve contradictoires, la raison pour laquelle elle est d’avis que le demandeur ne serait pas en danger. Cette omission rend la conclusion finale et la décision déraisonnables.

[9]               Pour ces motifs, la décision sera annulée. La demande de statut de réfugié au sens de la Convention ou de personne à protéger au Canada sera renvoyée à un tribunal différemment constitué pour qu’il rende une nouvelle décision.

[10]           Les parties n’ont pas proposé de question à certifier et la présente affaire n’en soulève aucune.


JUGEMENT

LA COUR ORDONNE que la demande soit accueillie et que la décision faisant l’objet du présent contrôle soit annulée, la demande de statut de réfugié du demandeur au sens de la Convention ou de personne à protéger soit réexaminée par un tribunal différemment constitué et qu’aucune question n’est certifiée.

« Russel W. Zinn »

Juge

Traduction certifiée conforme

Nathalie Gadbois, B.A. (trad.), LL.L., J.D.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM‑2742‑14

 

INTITULÉ :

JENANTHAN SITTAMBALAM c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 7 MAI 2015

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE ZINN

 

DATE DES MOTIFS ET DU JUGEMENT :

LE 2 JUILLET 2015

 

COMPARUTIONS :

Micheal Crane

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Tamrat Gebeyehu

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Micheal Crane

Avocat

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

William F. Pentney

Sous‑procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

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