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Date : 20150617


Dossier : T‑2619‑14

Référence : 2015 CF 757

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 17 juin 2015

En présence de monsieur le juge Mosley

ENTRE :

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

demandeur

et

AKINTOMIWA OLADAPO OJO

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire présentée par le ministre aux termes des articles 22.1 et 22.2 de la Loi sur la citoyenneté, LRC 1985, c C‑29 (la Loi). Le ministre demande à la Cour d’annuler la décision rendue par une juge de la citoyenneté qui a accordé la citoyenneté canadienne à M. Ojo. Pour les motifs qui suivent, la demande sera accueillie.

I.                   Le contexte

[2]               Le défendeur, M. Ojo, est un citoyen nigérian. Il est arrivé au Canada avec sa femme et ses trois enfants le 12 octobre 2007. Il est devenu résident permanent le lendemain.

[3]               Plus tard en octobre 2007, le défendeur a quitté le Canada pour 675 jours et a vécu dans d’autres pays, y compris au Nigeria. Il attribue cette absence à leur réinstallation.

[4]               Le demandeur a sollicité la citoyenneté canadienne le 7 février 2013. Par conséquent, la période de résidence de quatre ans pertinente va du 7 février 2009 au 7 février 2013.

[5]               Dans sa demande de citoyenneté, le défendeur a déclaré 1 460 jours de présence et 953 jours d’absence. L’agent de réexamen a fait passer ces chiffres à 505 jours de présence et à 955 jours d’absence, ce qui a entraîné un manque de 590 jours de présence effective.

[6]               Le défendeur a rempli un questionnaire de résidence. Il l’a présenté aux autorités de l’immigration avec toute une série de documents, notamment des rapports provenant d’établissements d’enseignement pour sa femme et ses fils, des preuves de propriété de biens, des cotisations fiscales et des relevés bancaires.

[7]               Une juge de la citoyenneté a convoqué le défendeur à une audience qui a eu lieu le 16 octobre 2014. Elle a approuvé sa demande dans une décision datée du 27 novembre 2014. Le ministre a alors fait une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire.

II.                La question en litige

[8]               La question à trancher dans la présente demande est de savoir si la juge de la citoyenneté a commis une erreur en appréciant la résidence du défendeur au Canada.

III.             La norme de contrôle

[9]               La norme de contrôle applicable est la décision raisonnable : voir, p. ex., Canada (Citoyenneté et Immigration) c Pereira, 2014 CF 574, au paragraphe 18.

IV.             La décision faisant l’objet du contrôle judiciaire

[10]           Selon la prépondérance des probabilités, la juge de la citoyenneté a conclu que M. Ojo respectait l’obligation de résidence qu’impose l’alinéa 5(1)c) de la Loi.

[11]           La juge de la citoyenneté a commencé par examiner à fond les faits. Elle a expliqué que le défendeur avait emménagé dans l’Île‑du‑Prince‑Édouard avec sa femme et ses enfants en 2007, après avoir vendu sa résidence et ses possessions au Nigeria. Il est pilote de ligne professionnel. Lorsqu’il est arrivé au Canada, il avait atteint le niveau de copilote, mais ne pouvait trouver du travail, fondé sur des contrats successifs, qu’avec des compagnies aériennes basées en Afrique. Pour pouvoir obtenir un emploi au Canada, il a fait des démarches en vue d’obtenir une licence de pilote de ligne (licence de pilote) qu’accorde Transports Canada. Pour atteindre ce but, il a continué de travailler pour des compagnies aériennes africaines de façon à accumuler des heures de vol.

[12]           La famille de M. Ojo est demeurée à Charlottetown pendant qu’il travaillait à l’étranger. Il revenait à sa résidence pour les voir chaque fois qu’il le pouvait. Il avait l’habitude de travailler 12 semaines consécutives sur contrat et de passer ensuite quatre semaines au Canada.

[13]           Lorsqu’il se trouvait au Canada, le défendeur était un membre actif de l’église locale. Il a acheté et entretenu une résidence familiale à Charlottetown – bien que la famille ait récemment déménagé en Alberta, parce qu’une banque avait offert un poste à sa femme. Les enfants ont toujours été inscrits à l’école au Canada. Le défendeur a obtenu sa licence de pilote 20 jours avant l’audience et il l’a montrée à la juge de la citoyenneté. Il a expliqué qu’il cherchait maintenant du travail au Canada et qu’il avait l’intention de retrouver sa famille en Alberta lorsqu’il aurait réussi à trouver un emploi.

[14]           La juge de la citoyenneté rappelle que la personne qui demande la citoyenneté a le fardeau d’établir qu’elle répond aux conditions prévues par la Loi. Pour décider si le défendeur respectait l’obligation de résidence, la juge de la citoyenneté a adopté l’approche qualitative qu’avait utilisée la juge Reed dans Koo (Re), [1992] ACF no 1107 (1re inst) (Koo). Il s’agit de savoir si le Canada est bien le lieu où M. Ojo « vit régulièrement, normalement ou habituellement ». Ce critère a également été formulé autrement : le Canada est‑il le pays où le défendeur a centralisé son mode d’existence? La juge de la citoyenneté explique que le critère Koo exige que l’on réponde à six questions.

[15]           La première question est de savoir si la personne intéressée était effectivement présente au Canada durant une période prolongée avant ses absences récentes. La juge de la citoyenneté a expliqué que les absences du défendeur correspondaient au travail qu’il effectuait comme pilote de ligne. Ses titres de compétences l’obligeaient à travailler uniquement dans son pays d’origine. Avant la période pertinente, le défendeur avait vécu au Canada pendant un an et quatre mois.

[16]           La deuxième question porte sur l’endroit où réside la famille et les personnes à charge du défendeur. La juge de la citoyenneté rappelle que l’épouse et les enfants du défendeur ont vécu à Charlottetown pendant la période pertinente. Les enfants fréquentaient l’école dans cette ville et l’épouse a terminé un programme de MBA. Ils vivent actuellement en Alberta, et le défendeur a hâte de les rejoindre. De plus, le parrain et la marraine du défendeur ainsi que sa sœur vivent au Canada. Son père et trois autres frères et sœurs vivent encore au Nigeria.

[17]           La troisième question porte sur la forme de présence physique de la personne au Canada pour savoir si elle dénote que cette dernière revient dans son pays ou qu’elle n’est qu’en visite. La juge de la citoyenneté affirme que le défendeur retourne vivre avec les membres de sa famille proche chaque fois que cela est possible. Elle affirme également que ses absences sont de nature temporaire et n’indiquent pas qu’il a établi des liens avec un lieu particulier. La forme du travail et des voyages du défendeur montrent clairement qu’il a fait du Canada son pays et qu’il n’est pas un simple visiteur.

[18]           La quatrième question concerne l’étendue des absences physiques de la personne intéressée. La juge de la citoyenneté rappelle qu’il manque au défendeur 590 jours de présence. Ces absences étaient liées à son travail et ne reflètent pas un lien étroit avec un pays autre que le Canada, si ce n’est que pour le travail.

[19]           La cinquième question consiste à déterminer si les absences physiques étaient imputables à une situation manifestement temporaire. La juge de la citoyenneté a répondu que c’était le cas. Pendant la période pertinente, tous les déplacements du défendeur étaient liés à son travail et à sa formation de pilote de ligne. La juge de la citoyenneté a admis que cette forme de déplacement était la norme pour les pilotes dans le monde entier. Le demandeur devait respecter cette norme pour conserver ses titres de compétences professionnelles. De plus, il paie de l’impôt sur le revenu au Canada. Maintenant qu’il a obtenu sa licence de pilote, il est bien placé pour obtenir un emploi permanent au Canada.

[20]           La sixième question est de savoir si la qualité des attaches de la personne concernée avec le Canada est plus importante que celle qu’elle possède avec un autre pays. D’après la juge de la citoyenneté, le défendeur a démontré qu’il avait des attaches très fortes avec le Canada, axées sur son épouse et ses trois fils. La famille s’est établie à Charlottetown, et le défendeur s’est intégré à la vie de la collectivité et de son église. Avant de quitter le Nigeria, il s’est départi de tous les biens qu’il y possédait. Il a obtenu un titre de compétences de pilote canadien et souhaite travailler au Canada. Il a adopté les valeurs canadiennes et souhaite agir pour le bien de sa collectivité. Il n’a pas de biens ni d’intérêts commerciaux au Nigeria ni dans un autre pays. Son travail de pilote l’a amené en divers endroits notamment aux États‑Unis, en France, en Afrique du Sud et au Nigeria. Il n’a pas d’attaches importantes avec un autre pays.

[21]           En conclusion, la juge de la citoyenneté conclut que le défendeur a davantage d’attaches avec le Canada qu’avec n’importe quel autre pays, malgré le manque de jours de présence effective. Elle a donc approuvé sa demande de citoyenneté canadienne.

V.                Analyse

[22]           Le ministre ne critique pas le fait que la juge de la citoyenneté ait choisi d’appliquer le critère Koo. Il soutient toutefois qu’il y a lieu d’annuler la décision de la juge de la citoyenneté parce qu’elle a mal appliqué ce critère. De son côté, le défendeur soutient que la juge de la citoyenneté a rendu une décision intelligible que la Cour devrait respecter.

[23]           Il est bien établi en droit qu’une cour de révision doit faire preuve d’une grande retenue à l’égard des conclusions des juges de la citoyenneté. Ces représentants de l’État sont les mieux placés pour examiner les demandes de citoyenneté, en raison de leur expérience et des connaissances qu’ils possèdent dans ces domaines. À la différence des tribunaux, ils ont l’avantage d’interroger les demandeurs en personne et de les entendre témoigner sous serment. Pour ces motifs, la Cour ne peut apprécier à nouveau la preuve pour obtenir le résultat qu’elle préférerait. Dans le cadre d’un contrôle judiciaire, la Cour examine simplement la question de savoir si le juge de la citoyenneté a rendu une décision transparente, justifiée et intelligible : Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, au paragraphe 47.

[24]           En l’espèce, je suis convaincu que la juge de la citoyenneté n’a pas appliqué correctement le critère de résidence. Malgré la déférence due à la juge de la citoyenneté, sa décision dans la présente affaire en particulier était déraisonnable.

[25]           La jurisprudence a établi un critère à deux volets pour examiner la résidence. Premièrement, le juge de la citoyenneté doit décider si la personne a établi une résidence au Canada avant ou au début de la période pertinente. C’est seulement si cette condition est remplie que l’on peut passer au deuxième volet : Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Chang, 2013 CF 432 (Chang), au paragraphe 4; Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Udwadia, 2012 CF 394 (Udwadia), au paragraphe 21.

[26]           Si la première condition est remplie, le juge de la citoyenneté doit décider si la résidence de la personne intéressée lui donne le droit d’obtenir la citoyenneté canadienne. La jurisprudence admet trois critères différents pour régler la question. Le critère Koo est un de ces critères. Encore une fois, le demandeur ne conteste pas le fait que la juge de la citoyenneté pouvait utiliser ce critère.

[27]           En l’espèce, la juge de la citoyenneté n’a jamais expressément abordé la question préliminaire. Elle est immédiatement passée aux six questions de la décision Koo sans se demander si M. Ojo avait déjà établi sa résidence au Canada. Comme mon collègue le juge O’Reilly l'a déclaré dans Udwadia, précitée, au paragraphe 22, il incombe au juge de la citoyenneté de déterminer si la personne concernée a établi sa résidence au Canada ainsi que le moment où elle l’a fait. Dans la décision faisant l’objet du présent contrôle, cette question n’a pas été examinée.

[28]           Dans d’autres affaires, il est parfois possible de déduire des motifs du juge de la citoyenneté la réponse qu’il a fournie à la question préliminaire. Je fais référence sur ce point à Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c Terre‑Neuve‑et‑Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62, aux paragraphes 14 et 15. Cependant, en l’espèce, la Cour ne peut déduire des motifs une réponse raisonnable. Cela vient du fait que la juge de la citoyenneté a commis une erreur de fait manifeste qui a probablement influencé son opinion sur le dossier.

[29]           Lorsqu’elle a examiné la première question de Koo, la juge de la citoyenneté a écrit que M. Ojo avait vécu au Canada pendant un an et quatre mois avant le début de la période pertinente. Ce n’est pas exact. Dans son questionnaire relatif à la résidence, M. Ojo a déclaré une absence de 675 jours qui aurait commencé en octobre 2007. La période pertinente a débuté le 7 février 2009. Par conséquent, l’absence de M. Ojo correspondait à une période qui dépassait les six premiers mois de la période pertinente.

[30]           Il semble qu’un agent de la citoyenneté ait déclaré à tort dans un document interne que M. Ojo avait vécu au Canada pendant un an et quatre mois avant la période pertinente. Il incombait néanmoins à la juge de la citoyenneté d’examiner l’ensemble de la preuve. L’origine de l’erreur ne concerne pas la question de savoir si la décision faisant l’objet du contrôle est raisonnable.

[31]           Après cette absence initiale, M. Ojo est revenu au Canada pendant de courtes périodes et s’est absenté pendant des périodes plus longues, en raison de ses obligations professionnelles. Le dossier ne mentionne aucunement qu’il soit devenu de façon non équivoque résident du Canada à un moment donné. La juge de la citoyenneté n’a pas fourni une conclusion transparente, intelligible et justifiée sur l’aspect à l’égard duquel la Cour devrait faire preuve de retenue. Constitue une erreur susceptible de contrôle le fait de ne pas se prononcer sur cette question dans des circonstances où une réponse claire ne peut se dégager du dossier : Udwadia, précitée, au paragraphe 25; Chang, précitée, au paragraphe 8.

[32]           J’estime également que la juge de la citoyenneté a appliqué le critère de résidence de façon déraisonnable au cours de la deuxième étape, lorsqu’elle a apprécié l’importance des attaches de M. Ojo avec le Canada. Selon le critère Koo, le juge de la citoyenneté doit tirer des conclusions concernant six facteurs et, ensuite, apprécier et soupeser les conclusions favorables par rapport aux conclusions défavorables. Ce n’est pas ce qu’a fait la juge de la citoyenneté en l’espèce. Dans l’ensemble, elle a simplement repris les justifications des absences de M. Ojo, sans concilier les deux types de conclusions.

[33]           Mon collègue le juge Roy a critiqué un raisonnement semblable dans Canada (Citoyenneté et Immigration) c Olafimihan, 2013 CF 603, aux paragraphes 23 et 29, décision dans laquelle il a écrit :

Compte tenu de l’analyse effectuée relativement aux questions 1, 3 et 5, on est frappé par l’importance que le juge de la citoyenneté accorde dans ces motifs aux raisons invoquées pour justifier ces absences, comme si les raisons invoquées pouvaient constituer une justification suffisante ou remplacer l’exigence de résidence continuelle effective et l’obligation d’avoir résidé au Canada avant de pouvoir présenter une demande permettant d’obtenir la citoyenneté canadienne.

[...]

Le tableau qui se dégage de l’examen des six facteurs dans le cas qui nous occupe est le suivant : le juge de la citoyenneté a remplacé les exigences relatives aux attaches physiques exigées par l’alinéa 5(1)c) de la Loi par les raisons invoquées pour justifier les absences motivées par les besoins de l’entreprise. En n’appliquant pas correctement les critères élaborés dans la décision Koo, le juge de la citoyenneté a effectivement créé un nouveau critère. Il n’a accordé aucun poids au quatrième critère et à toutes fins utiles ignoré le premier, le troisième et le cinquième critères. On ne peut guère dire qu’il a satisfait aux critères applicables. […]

[34]           Comme le juge Roy, je conclus que cette approche n’est pas conforme au critère Koo. Ce critère a pour objectif final d’apprécier si les attaches que possède la personne intéressée avec le Canada sont suffisamment fortes pour justifier l’octroi de la citoyenneté, et non pas d’apprécier si cette personne a quitté le Canada pour des raisons valables.

[35]           Le ministre conteste également diverses conclusions tirées par la juge de la citoyenneté lorsque celle‑ci a appliqué les facteurs Koo à la preuve. Par exemple, le ministre soutient qu’il était déraisonnable qu’elle conclue que M. Ojo n’avait pas de liens importants avec un pays autre que le Canada. Pour l’essentiel, en faisant valoir que les conclusions favorables tirées à l’égard de chacun des facteurs Koo étaient déraisonnables, le ministre semble laisser entendre que le dossier ne permet pas d’accorder la citoyenneté à M. Ojo.

[36]           Compte tenu de la retenue dont la Cour doit faire preuve à l’égard des conclusions mixtes de fait et de droit tirées par les juges de la citoyenneté, je ne suis pas disposé à examiner ces arguments. Je ne veux pas que l’on puisse croire que j’ai exprimé une opinion sur la question de savoir s’il y avait lieu en fin de compte d’accorder la citoyenneté à M. Ojo. Les erreurs de droit que j’ai déjà dégagées suffisent pour annuler la décision faisant l’objet du présent contrôle. Il n’y a aucune raison de se demander si la juge de la citoyenneté aurait pu rendre une décision favorable si elle avait répondu à la question préliminaire et concilié les facteurs favorables et défavorables comme l’exigeait Koo.

VI.             Conclusion

[37]           Par conséquent, la présente demande sera accueillie sans frais. Les parties n’ont proposé aucune question en vue de la certification, et aucune ne sera certifiée.

[38]           Comme je l’ai expliqué dans Canada (Citoyenneté et Immigration) c Vijayan, 2015 CF 289, aux paragraphes 90 à 95, la réparation qu’il convient d’accorder consiste à renvoyer l’affaire au ministre qui pourra accorder la citoyenneté canadienne au défendeur ou renvoyer une fois de plus l’affaire devant un juge de la citoyenneté.

[39]           Dans la présente instance, les parties ont débattu de la question de l’admissibilité d’éléments de preuve que M. Ojo tentait de présenter à titre de pièces jointes à un affidavit souscrit par son épouse. Je n’ai pas tenu compte des éléments de preuve qui n’avaient pas été présentés à la juge de la citoyenneté, puisqu’il est bien établi en droit que la cour de révision doit se limiter à la preuve dont disposait le décideur. En fait, le but du contrôle judiciaire est de décider si le décideur a commis une erreur; il ne s’agit pas d’admettre de nouveaux arguments ou éléments de preuve pour rendre une décision indépendante sur le fond : Gitxsan Treaty Society c Hospital Employees’ Union, [1999] ACF no 1192 (CAF), aux paragraphes 13 à 15; Zolotareva c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CF 1274, au paragraphe 36.

[40]           Cependant, étant donné que la décision va être examinée à nouveau, je ne vois aucun obstacle à ce que M. Ojo présente directement ces éléments de preuve au ministre ou qu’il les dépose lors de l’audience que pourrait tenir un juge de la citoyenneté, s’il était convoqué à une telle audience. J’attire l’attention des parties sur l’article 28 du Règlement sur la citoyenneté, DORS/93‑246, qui se lit ainsi :

Malgré les autres dispositions du présent règlement, la personne qui présente une demande en vertu de la Loi doit fournir toute preuve supplémentaire qui pourrait être nécessaire pour établir qu’elle remplit les conditions prévues dans la Loi et le présent règlement.

[41]           Il est attendu des personnes qui demandent la citoyenneté de fournir, dans le cadre de leur demande initiale, la preuve établissant leur résidence au Canada, mais cela ne les empêche pas de fournir de meilleurs éléments de preuve par la suite. En fait, les autorités demandent régulièrement aux demandeurs de présenter des éléments de preuve spécifiques lorsqu’elles examinent leurs demandes : voir, p. ex., Azziz c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CF 663 (demande de résultats de test d’ADN) et Bains c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2000] ACF no 1264 (1re inst) (demande d’empreintes digitales). Il semble que des éléments de preuve de ce genre seraient admissibles, même s’ils étaient présentés par M. Ojo de sa propre initiative.


JUGEMENT

LA COUR STATUE que la présente demande est accueillie, sans frais. Aucune question n’est certifiée.

« Richard G. Mosley »

Juge

Traduction certifiée conforme

C. Laroche


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

t-2619-14

INTITULÉ :

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION ET AKINTOMIWA OLADAPO OJO

LIEU DE L’AUDIENCE :

halifax (nouvelle‑écosse)

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 10 JUIN 2015

JUGEMENT ET MOTIFS :

le juge MOSLEY

DATE DU JUGEMENT

ET DES MOTIFS :

LE 17 JUIN 2015

COMPARUTIONS :

Melissa Chan

POUR LE DEMANDEUR

Anthony O. Merah

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

William F. Pentney

Sous‑procureur général du Canada

Halifax (Nouvelle‑Écosse)

POUR LE DEMANDEUR

Anthony O. Merah

Merah Law Office

Calgary (Alberta)

POUR LE DÉFENDEUR

 

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