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Date : 20150326


Dossier : IMM‑479‑14

Référence : 2015 CF 389

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Toronto (Ontario), le 26 mars 2015

En présence de monsieur le juge Hughes

ENTRE :

CHERRYL CHARLES

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]               La Cour est saisie du contrôle judiciaire de la décision en date du 31 décembre 2013, par laquelle un agent de Citoyenneté et Immigration Canada a rejeté la demande de résidence permanente fondée sur des motifs d’ordre humanitaire que la demanderesse avait présentée depuis le Canada.

[2]               La demanderesse est une citoyenne adulte de la Grenade. Elle est venue au Canada en 1998 avec celui qui est maintenant son ex‑époux et avec son fils. Sa demande d’asile ainsi que celle de son ex‑époux ont été rejetées en 2003, tout comme l’a été, en 2008, l’examen des risques avant renvoi. L’ex‑époux de la demanderesse a été expulsé vers la Grenade. La demanderesse craint pour sa sécurité en raison de son ex‑époux si elle devait elle aussi être expulsée vers la Grenade.

[3]               La demanderesse a donné naissance à un fils au Canada en 2010. L’enfant souffre de crises d’épilepsie et présente des troubles d’élocution. La demanderesse n’a travaillé que brièvement depuis la naissance de son fils et a été déclarée coupable de plusieurs infractions criminelles au Canada, notamment de vol, de fraude et de falsification.

[4]               En l’espèce, il y a une seule question en litige, celle de savoir si l’agent a accordé suffisamment d’importance, ou n’en a pas accordé du tout, au fait que, si la demanderesse était renvoyée en Grenade, où elle n’avait plus de famille, sa sécurité serait menacée par son ex‑époux qui était susceptible de se comporter de façon violente.

[5]               Le dossier dont disposait l’agent comportait des éléments de preuve sur cette question que l’avocat de la demanderesse avait bien résumés comme suit, dans ses observations :

[traduction]

33.    Dans son affidavit, à l’onglet 7, Mme Charles décrit les sévices qu’elle avait subis de la part de son ex‑époux, Andrew Charles. Elle est venue au Canada avec M. Charles et leur fils en 1998. Mme Charles affirme ce qui suit :

Il était violent et m’avait agressée à plusieurs reprises. Je ne l’ai jamais mentionné dans le cadre de ma demande d’asile parce que nous étions part à la même demande. Il me maltraitait devant mon fils aîné Annel. Une fois, j’ai dû porter une minerve pendant deux semaines à la suite de ses actes violents. Il me trompait souvent et a fini par faire l’objet d’accusations de violence conjugale relativement à deux autres femmes au Canada. Il faisait preuve de violence verbale et d’agressivité à l’égard d’Annel.

Mon ex‑époux a précisé qu’il était en colère contre moi. Il me tient responsable de son expulsion du Canada. Il croit qu’étant donné que j’ai réussi à rester plus longtemps au Canada, j’ai dit quelque chose qui a mené à son expulsion. Il m’a menacée au téléphone, au point que j’ai dû changer de numéro de téléphone à deux reprises, la dernière fois en 2011. Si j’étais renvoyée en Grenade, je craindrais mon ex‑époux ainsi que sa famille.

34.    En tant que mère célibataire qui n’a plus de liens familiaux en Grenade, qui s’est absentée du pays pendant des années et qui ne peut donc compter sur le soutien de la collectivité, Mme Charles peut facilement être victime de la colère de son ex‑époux. Selon le rapport de la CISR, « il s’agit d’un très petit pays et les agresseurs réussissent habituellement à trouver leurs victimes lorsque celles‑ci décident de s’installer ailleurs sur l’île ».

[6]               Les motifs de l’agent ne font pas expressément état de cet argument. Il y est fait mention de la « violence » que la demanderesse risquait de subir si elle devait retourner en Grenade et des services de soutien offerts au pays aux [traduction] « victimes de violence conjugale ». L’avocat du défendeur m’invite à considérer ces mentions comme suffisantes pour répondre à la question en litige.

[7]               Toutefois, l’agent ajoute dans ses motifs [traduction] « À mon avis, la demanderesse n’a pas établi de lien entre ces éléments de preuve et sa situation personnelle de manière à faire valoir l’importance des difficultés auxquelles elle serait exposée si elle retournait en Grenade. » Cette affirmation est manifestement erronée et indique clairement que l’agent a fait fi de la question de la violence que la demanderesse avait subie aux mains de son ex‑époux.

[8]               L’affaire doit être renvoyée à un autre agent pour nouvelle décision. Aucune des parties n’a proposé de question à certifier.

 


JUGEMENT

LA COUR STATUE :

1.      La demande est accueillie;

2.      L’affaire est renvoyée à un autre agent pour nouvelle décision;

3.      Aucune question n’est certifiée;

4.      Aucuns dépens ne sont adjugés.

« Roger T. Hughes »

Juge

Traduction certifiée conforme

Semra Denise Omer


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


 

DoSSIER :

IMM‑479‑14

 

INTITULÉ :

CHERRYL CHARLES c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 26 MARS 2015

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE HUGHES

DATE DES MOTIFS :

LE 26 MARS 2015

COMPARUTIONS :

Aisling Bondy

POUR LA DEMANDERESSE

Veronica Cham

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Aisling  Bondy

Avocat

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

William F. Pentney

Sous‑procureur général du Canada

POUR LE DÉFENDEUR

 

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