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Date : 20150316


Dossier : T-1484-12

Référence : 2015 CF 324

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 16 mars 2015

En présence de madame la juge Simpson

ACTION RÉELLE ET PERSONNELLE EN MATIÈRE D’AMIRAUTÉ

ENTRE :

EHLER MARINE & INDUSTRIAL
SERVICE CO.

demanderesse/

défenderesse reconventionnelle

et

LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE NAVIRE « M/V PACIFIC YELLOWFIN », COLIN GRIFFINSON, MARELON GRIFFINSON ET GREAT BEAR COASTAL MARITIME CO. LTD.

défendeurs

et

COLIN GRIFFINSON, MARELON GRIFFINSON ET GREAT BEAR COASTAL MARITIME CO. LTD.

demandeurs reconventionnels

JUGEMENT ET MOTIFS

TABLE DES MATIÈRES

Page

I.             INTRODUCTION.. 3

II.           LES PARTIES. 3

III.         LE « PACIFIC YELLOWFIN ». 4

IV.         LES TÉMOINS ET LES ÉLÉMENTS DE PREUVE.. 4

V.           LES QUESTIONS QUI NE SONT PAS EN LITIGE.. 6

VI.         LA FORMATION DU CONTRAT INITIAL.. 6

VII.       LES POSITIONS DES PARTIES. 10

VIII.     LE DROIT APPLICABLE.. 11

IX.         CONCLUSIONS RELATIVES AU CONTRAT INITIAL.. 13

X.           L’ERREUR COMMISE ET LE CONTRAT MODIFIÉ.. 14

XI.         CONCLUSIONS RELATIVES AU CONTRAT MODIFIÉ.. 15

XII.       LE RECHEVILLAGE ET LE RECALFATAGE – ÉLÉMENTS 6 ET 7. 16

XIII.     LE CIMENTAGE ET LA PEINTURE – ÉLÉMENTS 8 ET 10. 19

XIV.     LE NETTOYAGE DE LA CALE SÈCHE – ÉLÉMENT 12. 20

XV.       LES SOMMES DUES AU TITRE DES ÉLÉMENTS CONTESTÉS. 21

XVI.     LES SOMMES DUES AU TITRE DES MATÉRIAUX CONTESTÉS. 21

XVII.   LE SOMMAIRE GÉNÉRAL.. 22

XVIII. LE LANCEMENT ET LES DOMMAGES. 23

XIX.     LA DEMANDE RECONVENTIONNELLE.. 25

XX.       LES FRAIS DE CARTE DE CRÉDIT. 29

XXI.     LE TAUX DE CHANGE.. 31

XXII.   LES INTÉRÊTS. 31

XXIII. LES DÉPENS. 32

 


I.                   INTRODUCTION

[1]               L’action de la demanderesse concerne la partie impayée du montant facturé pour les travaux de rechevillage et de recalfatage et d’autres tâches connexes (les réparations) qu’elle a effectués sur un navire appelé le « Pacific Yellowfin » (ci-après, le PYF ou le navire). Le litige porte sur la nature du contrat conclu entre la demanderesse et les propriétaires du PYF et, plus précisément, sur le fait de savoir si la demanderesse est liée par l’estimation/la proposition de prix qu’elle a fournie pour les réparations.

[2]               La demande reconventionnelle des défendeurs découle de dommages que le PYF a subis après l’exécution des réparations, lors du lancement du navire.

II.                LES PARTIES

[3]               La demanderesse, Ehler Marine Industrial Service Co. (Ehler Marine), est une société des États‑Unis qui exploite une entreprise au chantier naval Lovric Sea‑Craft (le chantier Lovric) à Anacortes, dans l’État de Washington, aux États‑Unis. M. Ed Ehler, père (M. E.E.) est le président et administrateur d’Ehler Marine, et il est également le gestionnaire du chantier Lovric. C’est lui qui a fourni les estimations et qui a conclu les contrats relatifs aux réparations. C’est également lui qui réalisé une partie du travail de rechevillage.

[4]               Les défendeurs, M. Colin Griffinson (M. C.G.), et son épouse, Mme Marelon Griffinson, sont des résidents du Canada et les propriétaires du PYF. Great Bear Coastal Maritime Co. Ltd. (Great Bear) est la société de la Colombie‑Britannique par l’intermédiaire de laquelle M. C.G. exploite une entreprise de nolisement avec le PYF. Colin Griffinson Inc. a, elle aussi, été désignée comme défenderesse, mais aucune réparation n’est maintenant demandée à son encontre, car la demanderesse a appris que cette société n’était pas réellement en cause dans le litige, bien que son papier à en‑tête et son adresse électronique aient été utilisés pour une bonne partie de la correspondance pertinente. Pour cette raison, une ordonnance modifiant l’intitulé de la cause en vue de supprimer Colin Griffinson Inc. a été rendue.

III.             LE « PACIFIC YELLOWFIN »

[5]               Le PYF est un navire à moteur en bois qui a été construit en 1944. Il a 114 pieds de long et est propulsé par deux moteurs diesel. Le PYF est accrédité par Transports Canada à titre de navire à passagers et est assujetti à des inspections de sécurité. En 2011, lors de l’inspection quadriennale du navire, Transports Canada a exigé de recalfater celui-ci et de refaire le chevillage de la coque. Il s’agit de travaux qui ne sont généralement effectués qu’une seule fois, soit lorsque le navire atteint la moitié de sa vie utile.

IV.             LES TÉMOINS ET LES ÉLÉMENTS DE PREUVE

[6]               M. E.E. et M. David Hartford ont témoigné pour la demanderesse. M. Hartford est un charpentier de marine qui possède de nombreuses années d’expérience dans le calfatage des grands navires en bois. Il a été engagé par M. E.E. pour travailler sur le PYF, à titre de responsable du recalfatage. Il a témoigné que le recalfatage s’est déroulé sans heurts.

[7]               Pour les défendeurs, la Cour a entendu M. C.G., M. David Sharp et M. John Dixon.

[8]               M. C.G. agit, de temps à autre, à titre de capitaine du PYF. Durant les réparations, il a visité périodiquement le chantier Lovric afin de vérifier l’avancement des travaux. Il était également sur place pour peindre la fleur d’eau du navire et il était à bord lors de la mise au sec et du lancement.

[9]               M. David Sharp est un charpentier de marine employé par Great Bear. Il était le superviseur de chantier de M. C.G. durant les réparations. Il était présent au chantier Lovric du lundi au jeudi de chaque semaine et, lorsque l’on a éprouvé de la difficulté avec le rechevillage, il a entrepris les travaux correctifs.

[10]           M. Dixon est un ingénieur naval à la retraite. Il était présent lors de la mise au sec et du lancement, et il était à bord du PYF quand M. C.G. a ramené le navire à Vancouver après les réparations.

[11]           Outre les témoignages de vive voix, les éléments de preuve comprenaient également des extraits tirés de l’interrogatoire préalable de M. C.G., de même que diverses pièces. Parmi les pièces de la demanderesse figuraient un sommaire des dépositions pour la plupart des charpentiers de marine et des ouvriers non qualifiés qui avaient fait les réparations. Dans ces dépositions, les travailleurs ont fourni leurs feuilles de temps quotidiennes et ont juré de leur exactitude.

V.                LES QUESTIONS QUI NE SONT PAS EN LITIGE

[12]           Nul ne conteste que :

            le rechevillage et le recalfatage ont été bien effectués. M. C.G. était satisfait du travail et il a versé des bonis à tous les charpentiers de marine et manœuvres;

            les heures de travail consignées par les charpentiers de marine et les manœuvres étaient exactes;

            aucun problème inhabituel n’est survenu durant le travail de recalfatage;

           le PYF n’a subi aucun dommage structural lors du lancement. Les dommages étaient d’ordre cosmétique et ne comprenaient que des dommages à la peinture et aux matériaux de remplissage

VI.             LA FORMATION DU CONTRAT INITIAL

[13]           Transports Canada ayant exigé le rechevillage et le recalfatage du PYF, M. C.G. a envoyé une demande de propositions datée du 24 octobre 2011 (la DP) à plusieurs chantiers navals, dont le chantier Lovric.

[14]           La DP indiquait, entre autres, que M. C.G. demandait une [TRADUCTION] « estimation relativement précise » pour le rechevillage et le recalfatage de 15 coutures qui se trouvent sous la ligne de flottaison, de chaque côté.

[15]           Après avoir reçu la DP, M. E.E. est entré en contact avec M. C.G. et lui a fait part de son intérêt à l’égard de l’exécution des travaux. Selon M. C.G., au fil de la conversation, M. E.E. a indiqué qu’il avait exécuté des travaux semblables sur un remorqueur en bois appelé l’« Ivanhoe », qu’il possédait son propre navire en bois et qu’il avait travaillé sur la flotte de l’Alaska. M. E.E. a assuré à M. C.G. que, pour ces raisons, il était [traduction] « tout désigné » pour le travail.

[16]           En fonction de la DP, M. E.E. a déposé le 28 octobre 2011 une estimation initiale (la première estimation) prévoyant 13 éléments de travaux. Pour six de ces éléments, l’estimation indiquait provisoirement [traduction] « T et M ». Les parties conviennent que cette mention signifie que ces éléments devaient être facturés en fonction du temps et des matériaux leur ayant réellement été consacrés.

[17]           Les éléments 6, 7, 8, 10 et 12 font l’objet de contestations et seront collectivement appelés les « éléments contestés ». Ce sont tous des coûts estimés, lesquels ne sont pas décrits à titre de [traduction] « T et M » dans la première estimation. Les spécifications de ces éléments (exclusion faite des matériaux connexes) sont les suivantes :

  •  

L’élément 6 est la mise en place d’environ 4 000 nouvelles chevilles.

15 760,00 $

  •  

L’élément 7 est le recalfatage.

33 600,00 $

  •  

L’élément 8 est l’application d’apprêt sur toutes les coutures, ainsi que le cimentage et le goudronnage de celles-ci.

12 200,00 $

  •  

L’élément 10 est l’application d’une couche de peinture anti‑salissures de coque.

820,00 $

  •  

L’élément 12 est l’enlèvement des débris dans la cale sèche pour préparer le lancement du navire.

1 350,00 $

[18]           Le 26 janvier 2012, M. E.E. a envoyé par télécopieur une deuxième estimation (l’estimation finale) présentée comme une [traduction] « proposition de prix ». Dans le cadre de son interrogatoire préalable, M. E.E. a reconnu qu’une proposition de prix représentait habituellement un prix plus ferme ou plus précis qu’une estimation, mais il a affirmé que son estimation ne représentait pas une soumission fixe. M. E.E. a aussi reconnu au cours de son interrogatoire préalable que M. C.G. lui avait demandé de [traduction ] « raffermir » son estimation. Dans son témoignage, M. E.E. a déclaré s’être exécuté et avoir dit à M. C.G. qu’il avait plutôt confiance dans son estimation des réparations en raison des travaux qu’il avait récemment terminés sur l’Ivanhoe.

[19]           Dans l’estimation finale, elle aussi fondée sur les travaux concernant 15 coutures, les montants relatifs aux éléments contestés étaient les suivants :

  •  

Élément 6 – Mise en place de 4 000 nouvelles chevilles.

14 600,00 $

  •  

Élément 7 – Recalfatage.

35 500,00 $

  •  

Élément 8 – Application d’apprêt, cimentage et goudronnage.

12 200,00 $

  •  

Élément 10 – Peinture anti-salissures de coque.

820,00 $

  •  

Élément 12 – Nettoyage de la cale sèche.

1 350,00 $

[20]           Les montants estimatifs se rapportant aux matériaux et aux articles consomptibles applicables aux éléments contestés sont décrits ci-dessous :

Première estimation

Estimation finale

Élément 6 – Matériaux : tire-fonds de ½ po x 8 po et rondelles.

Articles consomptibles – foret de coupe, produits d’étanchéité, colle, sapin.

4 240,00 $

380,00 $

Sera fourni par M. C.G. au lieu de M. E.E.

 

0,00 $

540,00 $

Élément 7 – Coton, étoupe/livre – 260 lb

2 574,00 $

260 lb

 

2 574,00 $

Élément 8 – Ciment, produit d’étanchéité à base de goudron, apprêt, brosses

380,00 $

 

380,00 $

Élément 10 – Filtres, diluants

180,00 $

 

180,00 $

Élément 12 – Aucun matériau

0,00 $

 

0,00 $

[21]           Durant les négociations, M. E.E. a inspecté le PYF dans l’eau, dans son hangar à bateaux à New Westminster, en Colombie‑Britannique, et M. C.G. a visité le chantier Lovric pour voir les installations de la demanderesse. Au cours de la visite, M. C.G. a reçu des conseils de M. E.E. sur plusieurs sujets. Par exemple, M. C.G. a décidé d’utiliser trois cordons d’étoupe lors du recalfatage au lieu d’un cordon de coton et de deux cordons d’étoupe et il a également décidé d’utiliser des chevilles plus longues. À mon avis, cette preuve démontre que M. C.G. reconnaissait l’expertise de M. E.E. dans la réparation des bateaux en bois.

[22]           M. E.E. a indiqué qu’il avait préparé l’estimation à partir des données qui suivent. Il a calculé approximativement la longueur totale des coutures en utilisant une longueur moyenne de 100 pieds. Il a utilisé cette longueur, bien que le PYF ait fait 114 pieds de longueur, afin de tenir compte de la variation de longueur entre les différentes coutures. Il a utilisé le nombre 15 comme nombre de coutures et a multiplié ce nombre par 100 pour un total de 1 500 pieds linéaires par côté. Il a alors multiplié ce résultat par deux (pour les deux côtés du navire), et a obtenu 3 000 pieds linéaires. Outre ce nombre, il a utilisé son expérience de travail sur l’Ivanhoe et d’autres bateaux afin de déterminer la quantité de matériaux et le nombre d’heures et jours‑personnes de travail seraient nécessaires. À partir de ces données, il a déterminé les prix qui figurent dans les estimations.

[23]           Le 10 janvier 2012, se fondant sur les chiffres que M. E.E. lui avait indiqués au téléphone, M. C.G. a convenu de retenir les services de la demanderesse en vue de réaliser les réparations. Les parties conviennent que les sommes d’argent indiquées au téléphone sont celles qui ont été consignées par la suite dans l’estimation finale. C’est donc dire que cette estimation est le fondement du contrat relatif aux réparations qui a été conclu le 10 janvier 2012 (le contrat initial).

VII.          LES POSITIONS DES PARTIES

[24]           La demanderesse affirme que l’estimation finale n’est que cela ‒ une estimation. Autrement dit, il s’agissait de sa [traduction] « meilleure approximation » du prix que M. C.G. pouvait s’attendre à payer. Cependant, il soutient ne s’être jamais engagé à facturer les réparations à ce prix. Il affirme qu’il avait toujours cru comprendre qu’il facturerait le temps et les matériaux réellement consacrés aux travaux, et que la totalité du contrat reposait sur ces éléments, quoique la mention [traduction] « T et M » ne paraissait pas dans l’estimation des éléments contestés. La facture finale de la demanderesse, datée du 11 avril 2012 (la facture finale) se fondait sur cette interprétation. Tous les prix étaient calculés en fonction du temps et des matériaux, et la demanderesse affirme qu’il s’agit des sommes qui lui sont dues. Les frais de main‑d’œuvre pour les éléments contestés sont les suivants :

Élément 6, rechevillage (27 coutures)

 

Charpentiers de marine

Manœuvres

2 665,00 $

25 998,50 $

28 663,50 $

Élément 7, recalfatage (29 coutures)

Charpentiers de marine

Manœuvres

Autre main-d’œuvre

66 560,00 $

5 220,00 $

1 440,00 $

73 220,00 $

Élément 8, ciment, etc.

 

10 962,00 $

Élément 10, peinture, etc.

 

520,00 $

Élément 12, nettoyage de la cale sèche

 

4 292,00 $

[25]           Par ailleurs, M. C.G. dit que, pendant que les négociations avançaient, il a demandé clairement une estimation révisée indiquant des prix [TRADUCTION] « fermes ». Il dit que M. E.E. l’a impressionné avec son expérience et qu’il l’a convaincu qu’il pouvait fournir ces prix.

VIII.       LE DROIT APPLICABLE

[26]           Le critère permettant de déterminer s’il y a eu consensus entre des parties contractantes en l’absence d’un engagement verbal ou écrit est de nature objective. Dans l’arrêt St John Tug Boat Co Ltd c Irving Refining Ltd, [1964] RCS 614, la Cour suprême du Canada a fait sien l’énoncé suivant de lord Blackburn dans la décision Smith c Hughes (1871), LR 6 QB 597, à la page 607, comme étant le critère applicable :

[traduction]

Peu importe l'intention véritable d'une personne dont le comportement ferait croire à quelqu'un de raisonnable qu'elle a consenti aux conditions proposées par l'autre partie, si son comportement mène l'autre partie à s'engager envers elle par contrat sur la foi de cette conviction, elle est liée par le contrat au même titre que si elle avait réellement eu l'intention de donner son accord aux conditions proposées par l'autre partie.

[27]           Dans la décision Greenhill Properties (1977) Ltd c Sandcastle Recreation Centre Ltd (1998), 39 CLR (2d) 205 (CSCB), au paragraphe 89, la Cour suprême de la Colombie‑Britannique a fait référence à l’ouvrage de G.H.L. Fridman intitulé The Law of Contracts, 3e éd. (Toronto : Carswell, 1994), où l’auteur résume le critère, à la page 16 de ce texte :

[traduction]

On trouve constamment dans les jugements l’idée que le critère d’une entente à toutes fins que de droit consiste à savoir si les parties ont indiqué au monde extérieur, représenté par un spectateur objectif et raisonnable, leur intention de conclure un contrat ainsi que les termes de ce contrat. Le droit ne s’intéresse pas à l’intention des parties comme telle, mais à l’intention qui est manifeste. Ce n’est pas ce qu’une partie croit ou comprend être le sens de ce que l’autre partie a déclaré ou fait qui est le critère de l’entente, mais bien le fait qu’une personne raisonnable dans la même situation aurait cru ou compris que l’autre partie donnait son consentement en termes identiques.

[28]           En l’espèce, la demanderesse et les défendeurs conviennent que le critère permettant de déterminer si la demanderesse est liée par son estimation n’est pas ce que chaque partie croyait subjectivement être les conditions du contrat, mais plutôt [traduction] « ce qu’une personne raisonnable se trouvant dans la situation des parties comprendrait être le sens du contrat » (Aerovac Systems Ltd c Darwin Construction (Western) Ltd, 2010 BCSC 654, au paragraphe 25).

[29]           Les défendeurs ont également renvoyé la Cour à plusieurs affaires qui traitent des circonstances dans lesquelles il est possible de conclure qu’une estimation ou une proposition de prix a un effet contractuel. Dans la décision Golder Associates Ltd c Mill Creek Developments Ltd, 2004 BCSC 665, le juge Masuhara a résumé le droit sur ce point et a conclu ce qui suit, aux paragraphes 22 à 24 :

[traduction]

Milite en faveur du fait qu’une estimation a force exécutoire le principe selon lequel, bien qu’une estimation soit forcément un peu imprécise, les personnes qui ont pour entreprise d’exécuter un travail précédé d’une estimation doivent être en mesure de le faire avec une certaine exactitude : voir Kidd, précitée, à la page 540.

La demanderesse a cité une affaire albertaine récente : Husky Oil Operations Ltd c Ledcor Industries Ltd, 2003 ABQB 751, [2003] AJ no 1111, dans laquelle la Cour du Banc de la Reine a examiné les principes qui sous‑tendent la question de savoir si une estimation a force exécutoire et, a-t-elle déclaré [au paragraphe] 36 : [traduction] « Il est évident que le tribunal doit examiner les circonstances dans lesquelles une estimation est fournie, les positions des deux parties, les connaissances de la partie qui a fourni l’estimation et la question de savoir si la partie qui en a fait la demande s’est fondée sur elle. »

En résumé, la Cour doit décider si les estimations ont été faites dans des circonstances qui leur confèrent un effet contractuel et, dans l’affirmative, quelle est la marge d’erreur susceptible de restreindre la mesure dans laquelle elles ont force exécutoire.

IX.             CONCLUSIONS RELATIVES AU CONTRAT INITIAL

[30]           Je suis d’avis qu’un tiers objectif et raisonnable conclurait que M. E.E. avait offert de s’acquitter des éléments contestés aux prix indiqués dans l’estimation finale. Mon premier motif pour cette conclusion réside dans la formulation de l’estimation finale. Le fait que M. E.E. n’a pas utilisé la mention [traduction] « T et M » comme condition pour les prix des éléments contestés alors qu’il l’a fait ailleurs dans l’estimation finale indique que les prix des éléments contestés étaient fermes, c’est‑à‑dire qu’ils ne changeraient que dans la mesure où la nature ou l’ampleur des travaux à effectuer changeait sensiblement. Ma conclusion est renforcée par les éléments de preuve établissant qu’à cette étape des négociations, les termes utilisés dans la DP ([traduction] « une estimation raisonnablement précise ») avaient été supplantés. M. C.G. et M. E.E. utilisaient désormais le terme [traduction] « proposition de prix » pour décrire ce qu’ils considéraient tous deux comme des prix [traduction] « fermes » dans l’estimation finale, et M. E.E. avait exprimé sa [traduction] « confiance » à l’égard de ces prix.

X.                L’ERREUR COMMISE ET LE CONTRAT MODIFIÉ

[31]           Le 11 février 2012, le PYF est arrivé au chantier Lovric et, le lendemain, il était halé sur la piste de halage par M. E.E. M. C.G. était présent avec M. Sharp. Il a alors été découvert que la DP avait incorrectement indiqué que le PYF avait 15 coutures sous la ligne de flottaison (l’erreur). Pendant qu’ils observaient le PYF après la mise au sec, M. C.G. et M. E.E. ont discuté de l’erreur et ont convenu que beaucoup plus que 15 coutures par côté devaient être rechevillées et recalfatées. M. C.G. et M. E.E. ont convenu que les travaux continueraient malgré l’erreur (le contrat modifié). Toutefois, lorsqu’ils ont témoigné, ils ont tous deux déclaré qu’ils avaient une compréhension différente des modalités d’exécution des travaux supplémentaires.

[32]           Dans son témoignage, M. E.E. a dit que, lorsqu’il était devenu évident qu’il y avait nettement plus de travail à faire, M. C.G. avait déclaré : [traduction] « C’est pour cela que l’on m’appelle le roi du temps et des matériaux » et qu’il avait ensuite dit : [traduction] « Faites‑le ». De l’avis de M. E.E., cette déclaration traduisait l’offre de M. C.G. selon laquelle, dorénavant, tous les travaux, y compris les éléments contestés, seraient facturés en fonction du temps de travail et des matériaux utilisés. De l’avis de M. E.E., il avait accepté cette offre.

[33]           Selon l’avocat de M. E.E., le fait que son client a transmis deux factures intermédiaires, qui comprenaient des frais pour le temps consacré au rechevillage et au recalfatage, et le fait que les défendeurs ont réglé ces factures sans exprimer de doutes sont la preuve qu’ils comprenaient que le contrat modifié serait entièrement facturé en fonction du temps de travail et des matériaux utilisés.

[34]           En revanche, M. C.G. se souvient seulement d’avoir demandé à M. E.E. s’il était prêt à effectuer les travaux additionnels, et lorsque M. E.E. lui a répondu par l’affirmative, M. C.G. a dit : [traduction] « [n]ous procéderons conformément au contrat [initial] ». Dans son témoignage, M. C.G. a déclaré qu’il pensait que les prix du contrat initial seraient rajustés au prorata, selon le pourcentage des changements aux travaux. Cependant, il n’y a pas eu de discussion sur la possibilité de rajuster les prix au prorata ni sur la base du calcul.

[35]           Même s’il était présent à la mise au sec, M. Sharp n’avait aucun souvenir de la conversation entre M. E.E. et M. C.G. à propos du contrat modifié.

XI.             CONCLUSIONS RELATIVES AU CONTRAT MODIFIÉ

[36]           Comme M. E.E. a répété dans deux courriels subséquents la formule inhabituelle qu’il attribue à M. C.G., je retiens que M. C.G. s’est bien qualifié de [traduction] « roi du temps et des matériaux » après la découverte de l’erreur. Cependant, à mon avis, un tiers objectif et raisonnable n’aurait pas compris que cette remarque annulait toutes les négociations visant à convenir d’un prix [traduction] « ferme » qui avaient précédé la conclusion du contrat initial. Un courriel envoyé le 23 mars 2012 à M. E.E. par la comptable de M. C.G. après qu’elle eut reçu la deuxième facture intermédiaire soutient cette conclusion. La comptable y mentionne des incohérences dans les feuilles de temps qu’elle a reçues et, dans ce contexte, elle écrit : [traduction] « Comme nous approchons rapidement du montant total de l’estimation, il est impératif de clarifier tout malentendu sans délai. » Cet énoncé révèle clairement qu’elle considérait que les prix donnés dans l’estimation étaient fermes.

[37]           Par conséquent, je conclus que les parties s’étaient entendues pour procéder [traduction] « conformément à [leur] contrat », comme l’a déclaré M. C.G. dans son témoignage. Cela signifie que les prix des éléments contestés dans le contrat initial devaient être rajustés au prorata pour refléter les travaux additionnels.

XII.          LE RECHEVILLAGE ET LE RECALFATAGE – ÉLÉMENTS 6 ET 7

[38]           Le rechevillage et le recalfatage ont commencé le 14 février 2012, et les réparations se sont terminées le ou vers le 4 avril 2012.

[39]           En ce qui a trait au rechevillage (élément 6), la première estimation indique que les chevilles sont des [TRADUCTION] « matériaux » que M. E.E. allait fournir. Toutefois, puisque M. C.G. a convenu de les fournir, leur coût de 4 240,00 $ n’apparaît pas dans l’estimation finale. Les parties ont convenu que le rechevillage avait en fait nécessité 2 599 (arrondi à 2 600) chevilles de différentes longueurs.

[40]           La position des défendeurs, c’est qu’ils avaient eu un prix ferme et que, comme 2 600 chevilles ont été utilisées au lieu de 4 000, les travaux réellement effectués étaient nettement moins importants que prévu dans l’estimation finale. Ils soutiennent par conséquent avoir droit à une réduction de 35 % par rapport à la somme de 14 600 $ prévue dans l’estimation finale. Selon leurs calculs, il resterait 9 460 $ à payer.

[41]           Toutefois, dans son témoignage, M. E.E. a déclaré que, selon lui, la nature du travail de rechevillage a également changé, puisque l’équipe de chevillage a eu de la difficulté à faire tenir les chevilles dans certaines parties du navire où le bois s’était détérioré.

[42]           M. Sharp a convenu que, au départ, il y a eu des problèmes parce que les employés foraient des trous qui étaient trop gros, ce qui empêchait que les chevilles s’agrippent adéquatement au bois. Il a corrigé le problème et après, selon lui, il n’y avait que de rares occasions où la cheville ne tenait pas. Il a indiqué que cela n’avait pas énormément ralenti le travail de rechevillage. Compte tenu de ces éléments de preuve et du travail effectué par M. Sharp, aux frais de M. C.G., pour corriger le problème de chevillage lorsqu’il s’est présenté, j’ai conclu que la nature des travaux effectués par les travailleurs de M. E.E. n’avait pas changé de façon suffisante pour justifier un écart par rapport à l’estimation finale. Par conséquent, j’accepte le calcul des défendeurs quant au montant dû.

[43]           J’en arrive maintenant au recalfatage (élément 7). Les défendeurs affirment que le calcul pour le travail supplémentaire causé par l’erreur devrait être fondé sur le nombre de pieds linéaires. Ils calculent que l’erreur a augmenté la longueur totale des coutures à recalfater à 4 800 pieds linéaires, ce qui représentait une augmentation de 60 % par rapport nombre de 3 000 pieds linéaires que M. E.E. a utilisé pour les estimations. Toutefois, la demanderesse conteste le fait que l’estimation finale devrait être calculée au prorata et elle dit que le nombre réel d’heures de travail devrait être utilisé pour l’établissement du prix. La demanderesse affirme également que, si le nombre de pieds linéaires était utilisé, le chiffre de 4 800 pieds ne serait pas exact. Elle dit qu’un chiffre de 5 400 pieds linéaires, soit une augmentation de 80 %, est plus près du nombre réel et elle fait remarquer que même ce chiffre est encore relativement peu élevé, parce qu’il ne comprend pas les deux coutures au-dessus de la ligne de flottaison que M. C.G. a ajoutées lorsque les réparations étaient en cours (les coutures ajoutées).

[44]           Je ne peux pas accepter l’observation des défendeurs voulant que la longueur en pieds soit le facteur adéquat pour calculer le rajustement au prorata de l’estimation finale en fonction des travaux additionnels. Bien que M. E.E. ait préparé les estimations en utilisant, entre autres, une approximation sommaire de 3 000 pieds linéaires, aucun élément de preuve n’indique que les parties aient jamais discuté de cette mesure ni d’aucune autre mesure en pieds avant que ne soient rédigés le contrat initial et le contrat modifié. De fait, la première mention de l’estimation de 3 000 pieds de M. E.E. se trouve dans un message qu’il a envoyé par télécopieur le 27 avril 2012, soit plus de deux semaines après l’envoi de la facture finale du 11 avril 2012. De même, c’est dans un courriel envoyé par M. C.G. le 24 avril 2012, donc encore une fois bien après la date de la facture finale, que M. E.E. a été avisé pour la première fois de l’estimation de 4 800 pieds faite par les défendeurs.

[45]           À mon avis, un tiers objectif et raisonnable en arriverait à la conclusion que le contrat initial se fondait sur les 15 coutures décrites dans la DP des défendeurs et que le contrat modifié (qui était, selon M.  C.G., [traduction] « fondé » sur le contrat initial) se fondait à son tour sur le nombre accru de coutures découvertes lors de la mise au sec, lorsque l’erreur est devenue apparente. Passer de 15 à 27 coutures représente une augmentation de 80 %, et passer de 15 à 29 coutures pour tenir compte des coutures ajoutées représente une augmentation de 93,33 %.

[46]           Comme le contrat conclu entre les parties n’a pas été établi en fonction de la longueur en pieds, le calcul du prix de l’élément 7 au prorata devrait être fondé sur le nombre de coutures, auquel cas le prix rajusté pour le recalfatage de 29 coutures (y compris les coutures ajoutées) serait déterminé par le calcul suivant :

       L’estimation finale prévoyait un prix de 35 500 $ pour 15 coutures, soit 2 366,67 $ par couture;

       À 2 366,67 $ par couture pour 29 coutures, le prix rajusté serait de 68 633,43 $.

XIII.       LE CIMENTAGE ET LA PEINTURE – ÉLÉMENTS 8 ET 10

[47]           Pour les motifs déjà mentionnés au sujet du recalfatage, je rajusterais ces chiffres au prorata, en fonction de l’augmentation du nombre de coutures (de 15 à 29). Dans ce cas, le calcul pour l’élément 8 (la cimentation) serait le suivant :

  • L’estimation finale prévoyait un prix de 12 200 $ pour 15 coutures, soit 813,33 $ par couture;
  • À 813,33 $ par couture pour 29 coutures, le prix rajusté serait de 23 586,67 $.

[48]           En ce qui concerne l’élément 10 (la peinture), le calcul ci-dessous décrit un rajustement en fonction du passage de 15 à 27 coutures. Les coutures ajoutées ne sont pas comprises, puisque c’est M. C.G. qui a peint la fleur d’eau :

  • L’estimation finale prévoyait un prix de 820 $ pour 15 coutures, soit 54,66 $ par couture;
  • À 54,66 $ par couture pour 27 coutures, le prix rajusté serait de 1475,82 $.

XIV.       LE NETTOYAGE DE LA CALE SÈCHE – ÉLÉMENT 12

[49]           En ce qui concerne cet élément, l’estimation finale prévoyait un prix de 1 350 $, et la facture finale était de 4 292 $, reflétant le temps réellement travaillé. Selon M. E.E., l’ampleur des travaux a changé parce que 29 coutures par côté, au lieu de 15, ont été décalfatées. La quantité de débris à nettoyer au sol a donc augmenté. Cependant, M. E.E. a reconnu que l’ampleur des travaux de décalfatage n’avait pas augmenté de manière proportionnelle au nombre de coutures, parce que certaines des coutures étaient vides.

[50]           Selon ce qui a été dit, le changement le plus important entre le montant de l’estimation finale et le chiffre de la facture finale a été causé par la modification dans la nature des travaux. Dans son témoignage, M. E.E. a déclaré que, lorsque le PYF est arrivé au chantier Lovric, M. C.G. et M. Sharp lui ont demandé de retenir les services d’un camion-pompe afin d’effectuer le pompage des cales avant de procéder au décalfatage. Dans son témoignage, M. C.G. a déclaré qu’il était prêt à débourser 4 000,00 $ concernant le camion‑pompe. Toutefois, M. E.E. a déclaré qu’il avait décidé de ne pas utiliser de camion‑pompe. À la place, il a installé un barrage pour retenir les produits pétroliers et l’eau qui s’écoulaient des cales. Le nettoyage de ces déversements était la raison principale pour l’augmentation de 2 942,00 $ dans le prix de l’élément 12.

[51]           À mon avis, aucune des parties n’avait prévu que les produits pétroliers dans les cales causeraient un problème après l’arrivée du PYF à Anacortes. Bien que M. C.G. ait offert de retenir les services du camion‑pompe, M. E.E. n’avait pas l’obligation contractuelle de le faire. Par conséquent, les travaux nécessaires pour installer le barrage et nettoyer les produits pétroliers représentent un changement de la nature des travaux, et le changement de prix est donc justifié. Comme il n’y a pas eu de proposition de prix pour ces travaux relatifs aux produits pétroliers, j’ai conclu que la demanderesse devait être indemnisée selon le principe du quantum meruit. Comme l’exactitude des heures de travail déclarées par les employés de M. E.E. n’est pas remise en question et que M. C.G. était prêt à verser 4 000 $ pour régler le seul problème des produits pétroliers dans les cales, je conclus qu’il est raisonnable d’ordonner aux défendeurs de verser à la demanderesse la somme facturée pour cet élément. Par conséquent, la somme de 4 292 $ est due.

XV.          LES SOMMES DUES AU TITRE DES ÉLÉMENTS CONTESTÉS

[52]           Les sommes dues au titre des éléments contestés sont les suivantes :

                Élément 6 – Rechevillage (27 coutures) : 9 460 $.

                Élément 7 – Recalfatage (29 coutures) : 68 633,43 $.

                Élément 8 – Cimentation, etc. (29 coutures) : 23 586,67 $.

                Élément 10 – Peinture (27 coutures) : 1 475,82 $.

                Élément 12 – Nettoyage de la cale sèche : 4 292 $.

XVI.       LES SOMMES DUES AU TITRE DES MATÉRIAUX CONTESTÉS

[53]           Les sommes en question sont les suivantes :

  •  

Élément 6

L’estimation finale comprend des frais de 540 $ au titre des matériaux consommables. Ce montant devrait être réduit de 35 % pour tenir compte du nombre réduit de tire‑fonds réellement installés – c.‑à‑d. 35 % de 540 $ = 189 $, et 540 $ - 189 $ = 351 $.

  •  

Élément 7

L’estimation finale indiquait 260 lb d’étoupe pour 15 coutures, à un tarif de 9,90 $ par lb. La quantité d’étoupe pour une (1) couture était donc de 260 lb ÷ 15 = 17,3 lb. Pour 29 coutures, la quantité serait de 17,3 lb x 29 = 501,7 lb. Le montant dû serait alors de 501,7 lb x 9,90 $ = 4 966,83 $.

  •  

Élément 8

Ciment Portland, goudron, apprêt et scellant, brosses. Pour 15 coutures, le prix de l’estimation finale était de 380,00 $. Pour une (1) couture, le prix était donc de 380,00 $ ÷ 15 = 25,33 $. Le montant dû serait de 25,33 $ x 29 coutures = 734,57 $.

  •  

Élément 10

Filtres, diluants. L’estimation était de 180,00 $ pour 15 coutures. Le prix par couture était donc de 180,00 $ ÷ 15 = 12,00 $. Le montant dû pour 29 coutures serait de 12,00 $ x 29 coutures = 348,00 $.

XVII.    LE SOMMAIRE GÉNÉRAL

[54]           L’avocat des défendeurs a préparé un résumé des sommes dues qu’il a joint à ses observations écrites finales. L’avocat de la demanderesse a accepté ce résumé, exception faite de la correction indiquée ci‑dessous pour l’élément 11. En utilisant les chiffres présentés par les défendeurs pour les éléments qui ne sont pas contestés, avec les corrections mentionnées ci‑dessous, ainsi que mes calculs pour le temps et les matériaux se rapportant aux éléments contestés (éléments 6, 7, 8, 10 et 12), les sommes révisées sont les suivantes :

Élément

Sommes

Total par élément

Élément 1

22 890 $

22 890,00 $

Élément 2

467,50 $

467,50 $

Élément 3

1 105 $ + 130,50 $ + 517,12 $ + 136,48 $

1 889,10 $

 

Élément 4

455 $ + 3 161 $

3 616,00 $

Élément 5

8 368,75 $ + 6 206 $

14 574,75 $

Élément 6

9 460 $ + 351 $

9 811,00 $

Élément 7

68 633,43 $ + 4 966,83 $

73 600,26 $

Élément 8

23 586,67 $ + 734,57 $

24 321,24 $

Élément 9

3 712 $ + 297,05 $ + 88,73 $

4 097,78 $

Élément 10

1 475,82 $ + 348 $

1 823,82 $

Élément 11

406 $

406,00 $

Élément 12

4 292 $

4 292,00 $

Élément 13

2 380 $

2 380,00 $

Élément 14

747,50 + 72,33 $ 

819,83 $

Élément 15

65 $

65,00 $

Élément 16

520 $

520,00 $

Tire-fonds additionnels

722,10 $

722,10 $

Total

166 296,38 $

Paiements effectués

117 970,60 $

Solde dû

48 325,78 $

Corrections :

Élément 3

Il manquait 130,50 $, qui ont été ajoutés.

Élément 9

Il manquait 297,05 $ et 88,73 $, qui ont été ajoutés.

Élément 11

Une somme de 406 $ avait été omise par erreur et a été ajoutée.

Élément 14

Une somme de 520 $ avait été inscrite par erreur au lieu de 747,50 $. Cette dernière somme a été rétablie.

Élément 16

Aucune somme n’avait été inscrite. Une somme de 520 $ a été ajoutée.

XVIII. LE LANCEMENT ET LES DOMMAGES

[55]           Les réparations ont été effectuées, le chantier a été nettoyé et le PYF a été lancé le 5 avril 2012 (le lancement). Toutefois, le lancement ne s’est pas déroulé sans heurts. Bien que la piste de halage se soit étendue sur 250 pieds dans l’eau, le PYF n’a pu être mis à flot du premier coup. M. E.E. a alors halé le navire pour le remonter sur la piste de halage, de façon à ce que la proue soit sur la rive et que la poupe demeure dans l’eau (la position de mi‑lancement). À ce moment‑là, l’un des moteurs a été démarré et mis en marche arrière; deux esquifs ont été appelés pour haler le PYF hors de la piste de halage. Grâce à ces opérations, le PYF a été mis à flot lors du deuxième essai.

[56]           Durant le lancement, MM. C.G., Hartford et Sharp étaient à bord du navire et se trouvaient sur le pont. Dans leurs témoignages, ils ont déclaré avoir entendu de forts claquements et craquements, et ils ont ajouté que la peinture du PYF s’était fissurée et décollée. Toutefois, leurs témoignages étaient contradictoires en ce qui a trait au moment où les dommages s’étaient produits. M. Hartford n’était pas certain, mais croyait que les dommages s’étaient produits à la fin du deuxième essai de lancement, lorsque le PYF était sorti de la piste de halage. M. C.G. croyait que les dommages s’étaient produits au fond de la piste de halage lors du premier essai de lancement qui avait échoué, alors que M. Sharp croyait qu’ils s’étaient produits lorsque le navire était en position de mi‑lancement.

[57]           En ce qui a trait à l’étendue des dommages, M. Hartford a vu des fissures dans la peinture des coutures aux jonctions des planches verticales du côté bâbord du roufle principal, de l’extrémité arrière du roufle, jusqu’à l’avant de celui-ci. M. C.G. a dit avoir entendu un son de [TRADUCTION] « craquement et de cassage du bois d’oeuvre » et un [TRADUCTION] « bruit incroyable ». Il n’a pas indiqué où il se trouvait sur le PYF et n’a pas décrit l’emplacement des dommages. Toutefois, il a dit, dans une réponse qui a été lue et qui provenait de son interrogatoire préalable, qu’il avait vu des coutures ouvertes, des fissures dans les cloisons et de la peinture par terre. M. Sharp se tenait sur le pont tribord et il a déclaré avoir vu la peinture se fissurer sur le côté du roufle, à la jonction du revêtement en contreplaqué. Toutefois, il n’a pas décrit l’étendue de ces fissures. Il a également entendu des craquements provenant de sous le pont. Il a d’abord dit qu’il avait vu des fissures dans la peinture des coutures entre les planches du côté tribord de la coque à la mi-longueur du navire, au-dessus de la ligne de flottaison. Il a ensuite modifié son témoignage et affirmé qu’il avait [TRADUCTION] « remarqué des fissures importantes dans pratiquement toutes les coutures des planches des œuvres mortes (partie supérieure) de la coque ».

[58]           Les défendeurs (demandeurs reconventionnels) disent que M. E.E., à titre de maître de cale sèche, est responsable des dommages, car il était implicitement entendu dans le contrat initial et dans le contrat modifié que le lancement ne présenterait aucun risque.

[59]           M. E.E. et M. Hartford ont tous deux proposé des hypothèses quant à la cause des dommages subis après le lancement, mais les personnes présentes ne pouvaient s’entendre sur la cause exacte. Dans son témoignage, M. C.G. a déclaré que le PYF avait navigué par très grosse mer et qu’il avait été halé sur des pistes de halage sans jamais subir de dommages. MM. Hartford et Sharp ont tous deux déclaré dans leurs témoignages qu’ils n’avaient jamais vu ce genre de dommage se produire durant un lancement.

XIX.       LA DEMANDE RECONVENTIONNELLE

[60]           La demande reconventionnelle concerne les dommages causés lors du lancement. Cependant, la preuve produite à l’appui de cette demande est incomplète. Une liasse de documents a été présentée à M. C.G. pour être désignée en tant que pièce lors de son témoignage. Cependant, l’avocat de la demanderesse s’est opposé à cette désignation à cause de la communication tardive des documents. Comme ces derniers n’étaient pas inscrits dans l’affidavit de documents, n’avaient pas été produits lors de l’interrogatoire préalable, avaient fait l’objet d’un engagement et n’avaient été fournis à l’avocat de la demanderesse que le dernier jour ouvrable avant le procès, l’opposition a été accueillie et les documents n’ont pas été déposés en preuve. Cependant, indépendamment de cette décision, il existe quelques éléments de preuve au sujet de la demande reconventionnelle.

[61]           La demande reconventionnelle est constituée des trois montants suivants :

a)      17 379 $ (la demande relative à la peinture) – Cette somme est décrite dans le courriel de M. C.G., daté du 24 avril 2012 (le courriel);

b)      840 $ – Cette somme est décrite dans une facture de Western Marine Surveyors, datée du 31 juillet 2012 (la facture de Surveyors);

c)      3 400 $ – Cette somme est décrite dans une facture d’Allied Shipbuilders, datée du 29 juin 2012 (la facture d’Allied).

Le courriel et les factures d’Allied et de Surveyors étaient tous des pièces au procès, et j’en traiterai à tour de rôle.

A.                La demande relative à la peinture

[62]           Le courriel décrit cette demande en ces termes :

[traduction]

[…] comme vous le savez, le Pacific Yellowfin a subi des dommages considérables pendant qu’il se trouvait dans la piste de halage. Ces dommages sont dus à un mauvais placement du navire au départ.

[…]

Je viens d’investir beaucoup de temps et d’argent à réparer ces dommages.

Les coûts de la réparation de l’extérieur et du peinturage de la coque, à votre tarif le plus bas de 58 $ l’heure, reviennent à 18 055 $. Pour être juste, je vais réduire ce coût de 4 986 $ (main‑d’oeuvre : 4 466 $, matériaux : 520 $), parce que je mets une couche de peinture sur le bateau chaque année. Le coût des travaux de réparation de l’extérieur s’élève donc maintenant à 13 069 $ (main-d’oeuvre : 12 064 $; matériaux, comprenant le bondo, le papier abrasif et autres : 1 005 $).

Le coût de réparation de l’intérieur et de la peinture de la cabine principale et des couloirs, également au taux de 58 $ l’heure revient à 4 310 $ (main-d’oeuvre : 4 060 $; matériaux, comprenant la peinture, le bondo, le papier abrasif et autres : 250 $).

Le total à ce jour est de 17 379 $.

[63]           M. C.G. n’a pas témoigné sur ces aspects du courriel. Cela veut dire que rien n’explique sa déclaration selon laquelle [traduction] « le Pacific Yellowfin a subi des dommages considérables pendant qu’il se trouvait dans la piste de halage ». Il n’y a eu au procès aucune preuve que de tels dommages s’étaient produits. Par conséquent, dans la mesure où elle est incluse dans la demande relative à la peinture, la réparation de ces dommages n’est pas corroborée et, de ce fait, le montant demandé pour le travail de peinture extérieure est sujet à caution.

[64]           Le montant demandé pour la peinture extérieure est également sujet à caution, parce qu’il n’y a pas de preuve claire quant à l’étendue des dommages subis par la coque au-dessus de la ligne de flottaison. Comme il a déjà été mentionné, le témoignage de M. Sharp n’est pas cohérent. Il y avait des photos des dommages subis par la coque au-dessus de la ligne de flottaison, mais M. C.G. n’y a fait référence que pour démontrer qu’il y avait des saignements de rouille à travers la peinture. Il ne les a pas utilisées pour décrire l’étendue des dommages. En outre, il n’y a pas de preuve du temps qui a été nécessaire pour effectuer les réparations à cet endroit de la coque, ni du montant payé à ceux qui avaient fait les réparations.

[65]           Pour ce qui est de la demande relative aux réparations intérieures, aucune preuve n’a été produite au procès sur des dommages causés à l’intérieur du PYF.

[66]           En ce qui a trait au roufle, il y a des photos dans la preuve qui montrent les dommages subis et, comme cela a été dit précédemment, dans leurs témoignages, MM. Hartford et Sharp ont déclaré que les dommages s’étaient produits pendant le lancement. Toutefois, il n’y a pas de preuve décrivant le temps consacré à la réparation de ces dommages, ou démontrant la rémunération réellement reçue par les travailleurs pour effectuer les travaux.

B.                 La facture de Surveyors

[67]           La facture de Surveyors indique qu’un expert maritime s’est présenté au hangar à bateaux du PYF à Richmond pour inspecter les dommages causés par le lancement. Toutefois, son rapport n’a pas été présenté en preuve, et il n’a pas témoigné. En outre, il n’y a pas de preuve claire pour expliquer en quoi l’inspection était nécessaire. M. C.G. a simplement déclaré dans son témoignage que l’expert maritime avait été appelé pour qu’il puisse [TRADUCTION] « prendre note » des dommages à la peinture et qu’il [TRADUCTION] « inscrive cela dans son carnet ».

[68]           La facture de Surveyors indique également que l’expert maritime était présent dans une cale sèche le 12 juin 2012, dans le but [TRADUCTION] d’« inspecter l’oeuvre vive (partie normalement immergée) de la coque et de documenter l’état de celle-ci ». Toutefois, aucune preuve n’a été présentée pour expliquer la raison pour laquelle cette inspection était nécessaire. Personne n’a témoigné au sujet de préoccupations quant à des dommages à la coque sous la ligne de flottaison.

[69]           À mon avis, M. E.E. a une obligation contractuelle à l’égard du coût de la réparation des dommages à la peinture qui sont survenus lors du lancement, et je conclus que le lancement a causé des dommages à la peinture des deux côtés du roufle principal et quelques dommages (on en ignore la gravité) à la peinture de la coque au‑dessus de la ligne de flottaison.

[70]           Il m’est toutefois impossible d’attribuer une valeur pécuniaire aux travaux nécessaires pour réparer ces dommages.

C.                 La facture d’Allied

[71]           Il convient de noter que cette facture indique que le PYF a été mis en cale sèche pendant une journée, le 12 juin 2012, afin de procéder à l’inspection de la coque. Toutefois, étant donné qu’aucune preuve n’a été présentée pour expliquer la nécessité de l’inspection, je ne peux conclure que les frais payés pour la mise en cale sèche étaient justifiés.

[72]           Pour tous les motifs qui précèdent, la demande reconventionnelle sera rejetée.

XX.          LES FRAIS DE CARTE DE CRÉDIT

[73]           Les contrats initial et modifié ne contenaient aucune disposition prévoyant :

                         i.          Le versement d’un acompte ou de paiements intermédiaires par M. C.G.;

                       ii.          La possibilité pour M. C.G.de payer M. E.E. par carte de crédit.

[74]           Cependant, après le début des réparations, M. E.E. a demandé une somme de 25 000 $ à titre d’acompte et de paiement intermédiaire, ce que M. C.G. a accepté.

[75]           Les parties ne s’entendent pas sur la question de savoir si M. C.G. a aussi accepté de payer à M. E.E. des frais de 2,2 % pour les paiements effectués par carte de crédit.

[76]           Dans son témoignage, M. E.E. a déclaré que M. C.G. avait demandé s’il pouvait payer l’acompte et les paiements intermédiaires par carte de crédit, parce qu’il souhaitait accumuler des points récompense. M. E.E. a dit qu’il pouvait le faire moyennant des frais de 2,2 %. Selon M. E.E., la première facture intermédiaire datée du 27 février 2012 montre que M. C.G. avait accepté de payer ces frais. Ces frais y sont annoncés par la mention [traduction] « Veuillez ajouter des frais de 2,2 % […] pour les paiements effectués par carte de crédit ». Cependant, cette mention ne paraît ni sur la deuxième facture intermédiaire, ni sur la facture finale. M. E.E. affirme aussi que le fait que les défendeurs n’ont pas contesté la mention des frais établit d’autant plus leur acceptation. M. E.E. a envoyé une facture distincte de 1 534,86 $, datée du 1er mai 2012, au titre des frais de carte de crédit.

[77]           M. C.G. a déclaré dans son témoignage qu’il n’avait jamais été question de frais de carte de crédit de 2,2 % et qu’il serait financièrement insensé pour lui d’utiliser une carte de crédit pour accumuler des points récompense s’il devait payer des frais.

[78]           À mon avis, les témoignages ci‑dessus ne convaincraient pas un tiers objectif et raisonnable que M.  C.G. avait accepté des frais de 2,2 % sur les paiements qu’il avait effectués avec sa carte de crédit. Autrement dit, la demanderesse ne s’est pas acquittée du fardeau d’établir l’existence de cette entente. Par conséquent, la somme facturée à ce titre n’est pas due.

XXI.       LE TAUX DE CHANGE

[79]           Les parties ont convenu qu’à la date pertinente, les devises américaines et canadiennes étaient à parité.

XXII.    LES INTÉRÊTS

[80]           L’avocat des défendeurs avance que les intérêts devraient fixés à 3 %, parce qu’il s’agit du taux préférentiel et que ce taux a été avalisé par la Cour d’appel de la Colombie-Britannique dans l’arrêt Omega Salmon Group Ltd c Pubnico Gemini (The), 2007 BCCA 33. La Cour d’appel était saisie d’une affaire d’amirauté dans laquelle le juge de première instance avait rejeté le taux préférentiel et lui avait préféré un taux d’intérêt établi sur mesure en fonction du coût d’emprunt réel de la demanderesse.

[81]           La Cour d’appel avait été troublée par l’incertitude qui serait créée si les taux d’intérêt devaient être déterminés en fonction d’enquêtes sur la situation particulière de chaque demandeur. Elle avait donc ordonné que le taux d’intérêt soit ramené au taux préférentiel.

[82]           La demanderesse, en revanche, me demande de suivre la décision qu’a rendue le juge Harrington dans l’affaire Kuchne & Nagel Ltd c Agrimax Ltd, 2010 CF 1303, où il a accordé des intérêts au taux de 5 %. À cet égard, il a parlé de l’article 3 de la Loi sur l’intérêt, LRC, 1985, c I‑15, qui n’a pas changé depuis. Voici ce qu’il a déclaré, au paragraphe 24 :

[…] Bien que les intérêts soient souvent accordés à un taux commercial, j’estime qu’il est plus approprié et juste, compte tenu du taux préférentiel actuel, d’accorder des intérêts avant et après jugement au taux légal de 5 % qui est prévu par la Loi sur l’intérêt.

[83]           La question consiste à déterminer si je devrais suivre la Cour d’appel de la Colombie‑Britannique et utiliser le taux préférentiel, ou adopter la position du juge Harrington et utiliser le taux de 5 % conformément à la Loi sur l’intérêt, étant donné que le taux préférentiel est toujours bas (il est actuellement à 2,85 %). Comme le taux préférentiel est toujours bas et que le principe de la courtoisie s’applique, je fixe le taux d’intérêt à 5 %.

XXIII. LES DÉPENS

[84]           La demanderesse n’a pas réussi à prouver l’existence d’une entente selon laquelle les éléments contestés devaient être facturés en fonction du temps de travail et des matériaux utilisés. C’était là sa thèse.

[85]           Toutefois, les défendeurs n’ont pas réussi à prouver le bien-fondé de leur demande reconventionnelle.

[86]           Dans ces circonstances, si les parties ne parviennent pas à s’entendre sur les dépens – en partant peut‑être du principe que chacune supportera ses propres frais – j’entendrai leurs observations par téléconférence, tenue à une date mutuellement convenable.


JUGEMENT

LA COUR STATUE que :

1.      dans l’action principale, les défendeurs sont responsables conjointement et individuellement du paiement à la demanderesse de la somme de 48 325,78 $, plus des intérêts au taux de 5 %;

2.      la demande reconventionnelle est par les présentes rejetée.

« Sandra J. Simpson »

Juge

Traduction certifiée conforme

C. Laroche


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-1484-12

 

INTITULÉ :

EHLER MARINE & INDUSTRIAL SERVICE CO. c LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR LE NAVIRE « M/V PACIFIC YELLOWFIN », COLIN GRIFFINSON, MARELON GRIFFINSON ET GREAT BEAR COASTAL MARITIME CO. LTD.

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

les 19, 21, 22, 23 et 26 janvier 2015

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE SIMPSON

 

DATE DU JUGEMENT

ET DES MOTIFS :

LE 16 MARS 2015

 

COMPARUTIONS :

J. Michael Hutchinson

 

pour la demanderesse

 

W. Gary Wharton

 

pour les défendeurs

ET

POUR LES DEMANDEURS RECONVENTIONNELS

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Smith Hutchinson Law Corporation

Avocats

Victoria (Colombie-Britannique)

 

POUR LA demanderesse

 

Bernard LLP

Avocats

Vancouver (Colombie-Britannique)

pour les défendeurs

ET

POUR LES DEMANDEURS RECONVENTIONNELS

 

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