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Date : 20150310


Dossier : T-10-15

Référence : 2015 CF 302

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 10 mars 2015

En présence de monsieur le juge en chef

ENTRE :

LA SAVE HALKETT BAY MARINE PARK SOCIETY

demanderesse

et

LE MINISTRE DE L’ENVIRONNEMENT ET L’ARTIFICIAL REEF SOCIETY OF BRITISH COLUMBIA

défendeurs

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]               Dans la présente demande, la Save Halkett Bay Marine Park Society (la Société) demande le contrôle judiciaire d’un permis d’immersion en mer accordé par le ministre de l’Environnement (le ministre) à l’Artificial Reef Society of British Columbia (l’ARSBC). Ce permis autorise le sabordage du navire désarmé NCSM Annapolis (l’Annapolis), pour en faire un récif artificiel dans le parc marin de la baie Halkett, au large de la côte de Vancouver.

[2]               La demanderesse demande que le permis soit annulé au motif que la loi interdisait au ministre d’autoriser le sabordage en mer d’un navire dont la coque contient des substances qui seraient interdites, à savoir le dichlorure de dibutylétain et le chlorure de tributylétain (les TBT). À titre subsidiaire, la demanderesse affirme que le permis devrait être annulé au motif qu’il était déraisonnable de le délivrer dans les circonstances.

[3]               Les défendeurs contestent ces deux arguments et soutiennent que la présente demande a été déposée trop tard.

[4]               Les TBT que contiendrait la coque du navire étaient souvent utilisés dans les peintures [traduction] « antisalissure » servant au revêtement des coques au cours de la période où l’Annapolis était en service actif afin d’empêcher le développement d’anatifes et d’autres espèces marines sur les navires.

[5]               Pour les motifs exposés ci‑dessous, j’ai conclu que la présente demande avait été en fait présentée à l’extérieur du délai. En tout état de cause, j’ai également conclu (i) qu’il n’était pas interdit au ministre par la loi de délivrer le permis et (ii) que la délivrance de celui‑ci n’était pas déraisonnable, compte tenu, plus particulièrement, de ce qui suit :

a)      il a été raisonnablement déterminé que le revêtement antisalissure de la coque ne contenait pas de produits actifs, conformément à la Norme de nettoyage pour l’immersion en mer des navires, aéronefs, plateformes et autres structures d’Environnement Canada (la Norme de nettoyage);

b)      la quantité de TBT dans les échantillons de peinture qui auraient été prélevés sur la coque de l’Annapolis au nom de la demanderesse équivaut à environ 0,004 % - 0,008 % de la quantité qui devrait être décelée dans la peinture antisalissure fraîche;

c)      les dispositions de la Norme de nettoyage relatives aux peintures antisalissure sont conformes à celles de la norme correspondante qui existe aux États‑Unis et aux pratiques mises en place en Australie;

d)     compte tenu du fait que des peintures antisalissure ont été appliquées la dernière fois sur l’Annapolis il y a environ 20 ans avant la délivrance du permis, la conclusion du ministre, selon laquelle les TBT utilisés sur la coque du navire ne sont plus actifs, est également conforme à la norme qui a été adoptée au Royaume‑Uni;

e)      une analyse approfondie et complète (non liée aux TBT) a été effectuée au nom du ministre pendant plusieurs années, avant la délivrance du permis.

I.                   Les parties

A.                 La demanderesse

[6]               La Société est composée de propriétaires et de résidents à temps plein ou à temps partiel de la baie Halkett, à l’île Gambier, en Colombie‑Britannique.

B.     L’ARSBC

[7]               L’ARSBC est un organisme sans but lucratif situé à Vancouver, en Colombie‑Britannique. Elle a pour mission de créer et de mettre en valeur dans la province et partout dans le monde des récifs artificiels durables pour le plaisir des plongeurs amateurs et pour la protection des habitats marins.

[8]               Depuis 1991, l’ARSBC a sabordé avec succès, en Colombie‑Britannique, six grands navires et un Boeing 737 qui sont devenus des récifs artificiels.

[9]               En créant ses récifs, l’ARSBC a pour principal objectif d’attirer la faune et flore marine et de fournir un environnement dans lequel celle‑ci peut prospérer.

C.                 Le ministre

[10]           Le ministre, [poste occupé en date des présentes par] l’honorable Leona Aglukkaq, est la personne responsable de la délivrance du type de permis requis pour immerger un navire en mer, tel qu’il est expliqué davantage ci‑dessous. Pour s’acquitter de cette fonction, le ministre a le soutien du personnel d’Environnement Canada.

II.                Le contexte

[11]           L’Annapolis était un contre-torpilleur qui avait été mis en service par la Marine royale canadienne de 1964 à 1996. Il a été désarmé en 1998 et vendu à l’ARSBC, le 11 mars 2008.

[12]           L’ARSBC a acquis l’Annapolis en vue d’en faire un récif artificiel.

[13]           En juin 2008, l’Annapolis a été transféré de l’installation fédérale d’Esquimalt, en Colombie‑Britannique, à la baie de Port Graves, à l’île Gambier (près de la baie Halkett), pour le préparer avant de le saborder et d’en faire un récif artificiel. Il est amarré à cet endroit depuis lors.

[14]           L’ARSBC a ensuite choisi le parc marin de la baie Halkett comme site du récif artificiel, en partie parce que cela permettra de réparer et de restaurer l’habitat de la baie Halkett qui a été apparemment endommagé par des décennies de flottage de billes.

[15]           Pour saborder l’Annapolis et en faire un récif artificiel, l’ARSBC a dû obtenir les approbations réglementaires des ministères fédéraux Pêches et Océans Canada (le MPO) et Transports Canada. Elle devait également obtenir les permis nécessaires auprès du ministre et du ministère de l’Environnement provincial.

[16]           À l’automne 2012, l’ARSBC avait reçu les approbations nécessaires du MPO et de Transports Canada. Elle a obtenu en outre le soutien des nations Squamish et Tsleil-Waututh pour mener à bien le projet.

[17]           Cependant, en raison des craintes exprimées par la Société à la fin de 2012 concernant la présence possible sur le navire de biphényles polychlorés (les BPC), celui‑ci a fait l’objet de tests, et il a été relevé des concentrations de BPC qui pouvaient poser un risque en cas de rejets accidentels du produit dans l’environnement.

[18]           En juin 2013, l’ARSBC a été avisée de ce fait par Environnement Canada et informée qu’un permis d’immersion en mer ne serait pas délivré jusqu’à ce que les BPC soient enlevés du navire.

[19]           L’ARSBC a alors retiré la demande de permis initiale qu’elle avait présentée et a collaboré avec Environnement Canada en vue d’enlever les BPC du navire. La Cour a dû ordonner la réalisation de travaux d’assainissement, puisque le navire avait été saisi en avril 2013, dans le cadre d’une poursuite intentée par W.R. Marine Services, une entreprise qui fournissait des services d’amarrage au navire dans la baie de Port Graves. L’ordonnance en question a été rendue en février 2014. Une ordonnance ultérieure a été rendue oralement par le protonotaire Lafrenière, le 4 novembre 2014, pour la mainlevée de la saisie du navire. (Une ordonnance a ensuite été rendue par écrit le 24 novembre 2014.)

[20]           En juillet 2014, le navire a été inspecté et certifié exempt de BPC sous forme solide, les concentrations du produit n’excédant pas le seuil de 50 ppm indiqué dans le règlement applicable. Les frais associés aux travaux d’élimination des BPC du navire, qui ont été réalisés par un tiers entrepreneur pour le compte d’Environnement Canada, ont totalisé environ 888 000 $.

[21]           Plus tard ce mois‑là, l’ARSBC a présenté une nouvelle demande de permis pour l’immersion en mer de l’Annapolis.

[22]           Le 2 octobre 2014, le ministre a délivré le permis d'immersion en mer n4543‑2‑03607 (le permis).

[23]           Le 9 octobre 2014, la Société a déposé un avis d’opposition en vertu du paragraphe 332(2) de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement, LC 1999, c 33 (la LCPE), et a demandé que le ministre constitue une commission de révision concernant la délivrance du permis. La Société a réitéré cette demande dans des lettres datées du 9 décembre 2014 et du 17 décembre 2014.

[24]           Le 3 novembre 2014, le ministère provincial de l’Environnement a délivré le permis d’utilisation du parc no 17257 autorisant l’ARSBC à saborder l’Annapolis dans le parc marin de la baie Halkett.

[25]           À ce moment‑là, l’ARSBC avait également confirmé de nouveau ses autorisations auprès de Transports Canada et du MPO.

[26]           Le 6 janvier 2015, le jour suivant l’annonce de l’ARSBC selon laquelle elle envisageait de déplacer le navire dans la baie Halkett, le 13 janvier 2015, et de le saborder quelques jours plus tard, la Société a présenté sa demande dans la présente instance.

[27]           Le 12 janvier 2015, le juge Shore a rendu une ordonnance en vue d’une suspension provisoire de l’instance, ce qui a empêché l’Annapolis d’être déplacé en attendant l’audition d’une requête présentée par la Société en vue d’une suspension interlocutoire du permis et d’une injonction interlocutoire empêchant le déplacement du navire et son sabordage.

[28]           Cette ordonnance a été remplacée par une ordonnance, sur consentement, de la juge Simpson, datée du 30 janvier 2015. Entre autres, cette ordonnance établissait la procédure pour l’audition accélérée de la présente demande et interdisait le déplacement et le sabordage du navire tant qu’une décision ne serait pas rendue sur la demande.

[29]           En raison des retards résultant de l’instance se déroulant devant la Cour, l’ARSBC a informé cette dernière qu’elle avait demandé et obtenu une confirmation auprès du MPO que ce dernier n’empêcherait pas le sabordage après le 1er février 2015.

[30]           L’ARSBC a également demandé à Environnement Canada d’apporter une modification au permis afin de permettre de procéder au sabordage dès que possible, compte tenu du risque accru que le navire coule accidentellement dans un endroit non désiré. Lors de l’audition de la présente demande, l’ARSBC a confirmé que la demande adressée à Environnement Canada était encore en suspens.

III.             La décision du ministre de délivrer le permis

[31]           Le permis est un document comptant plus de quatre pages et qui prévoit diverses conditions et donne d’autres éléments d’information.

[32]           Il ne semble pas que le ministre ait expliqué les motifs de la délivrance du permis dans une lettre d’accompagnement ou dans un autre document ayant été émis à ce moment‑là ou dans les semaines qui ont suivi.

[33]           Il ressort, entre autres, du permis, que l’Annapolis fait partie des « déchets ou autres matières à immerger » et appartient à la catégorie suivante : « navires, aéronefs, plates-formes ou autres ouvrages, à condition que les matériaux risquant de produire des débris flottants ou de contribuer d’une autre manière à la pollution du milieu marin aient été retirés dans la plus grande mesure possible et que leur immersion éventuelle ne constitue pas un obstacle à la pêche ou à la navigation ».

[34]           Le permis est valide du 14 octobre 2014 au 13 octobre 2015. Selon l’une des conditions afférentes, le titulaire ne doit pas procéder au transport ou à l’immersion pendant la période du 1er février 2015 au 14 août 2015.

[35]           La méthode d’immersion repose sur le [traduction] « sabordage au lieu d’immersion par charge explosive pour permettre à l’eau de pénétrer la coque ».

[36]           Parmi les autres conditions, mentionnons le fait que l’ARSBC et ses entrepreneurs sont assujettis à des inspections, conformément à la partie 10 de la LCPE, et qu’un agent de l’autorité désigné en vertu du paragraphe 217(1) de la LCPE et/ou un représentant d’Environnement Canada est autorisé à monter à bord et à inspecter le navire avant son immersion.

[37]           En outre, selon la section 9.7 du permis, avant l’immersion, le navire doit répondre aux critères énoncés dans la version de décembre 2007 de la Norme de nettoyage.

[38]           Le 7 janvier 2015, soit le jour suivant le dépôt de la présente demande, le ministre a refusé la demande de la Société relative à la constitution d’une commission de révision concernant la délivrance du permis.

[39]           La réponse du ministre a résumé, entre autres, les préoccupations qui ont été exprimées par la Société; en outre, le ministre a assuré à cette dernière que ses préoccupations avaient été prises au sérieux et qu’elles avaient défini la portée de l’appréciation qui avait été effectuée. Le ministre a ensuite tiré la conclusion suivante :

[traduction]

Je suis satisfait de la mesure dans laquelle Environnement Canada a fait appel à votre client et du fait que les préoccupations que vous avez soulevées ont été prises en compte. Je crois que l’ancien NCSM Annapolis peut être immergé d’une manière qui ne pose aucun risque important au milieu marin ou à la santé humaine.

Compte tenu de ce qui précède, je rejette la demande de la Save Halkett Bay Marine Park Society, à savoir que je constitue une commission de révision en vertu du paragraphe 333(5) de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (1999).

Veuillez accepter l’expression de mes sentiments les meilleurs.

IV.             Les dispositions législatives applicables

[40]           Conformément au paragraphe 18.1(2) de la Loi sur les Cours fédérales, LRC (1985), c F‑7,« [l]es demandes de contrôle judiciaire sont à présenter dans les trente jours qui suivent la première communication, par l’office fédéral, de sa décision ou de son ordonnance [...], ou dans le délai supplémentaire qu’un juge de la Cour fédérale peut, avant ou après l’expiration de ces trente jours, fixer ou accorder ».

[41]           Le cadre établi dans la LCPE en vue de l’immersion des déchets ou d’autres matières figure à la partie 7, section 3, et aux annexes 5 et 6 de cette loi.

[42]           En somme, l’article 125 de la LCPE interdit de procéder à l’immersion de substances, sauf s’il s’agit de déchets ou autres matières et que l’immersion est effectuée conformément à un permis canadien.

[43]           L’expression « déchets ou autres matières » est définie au paragraphe 122(1) et s’entend des « déchets et autres matières énumérés à l’annexe 5 ».

[44]           Conformément à l’article 3 de l’annexe 5, les navires répondent à la définition de « déchets ou autres matières », à condition que :

[...] les matériaux risquant de produire des débris flottants ou de contribuer d’une autre manière à la pollution du milieu marin aient été retirés dans la plus grande mesure possible et que leur immersion éventuelle ne constitue pas un obstacle à la pêche ou à la navigation.

[45]           Conformément au paragraphe 127(1) de la LCPE, le ministre peut délivrer un permis autorisant l’immersion de déchets ou autres matières. Toutefois, le paragraphe 127(3) de la LCPE prévoit que, le ministre ne peut délivrer un permis en vertu du paragraphe 127(1) que « s’il se conforme à l’annexe 6 et considère tout facteur qu’il juge utile ».

[46]           L’annexe 6 de la LCPE donne des précisions sur l’appréciation et l’analyse nécessaires pour être en mesure de prendre une décision relative à la délivrance du permis. Comme aucune question n’a été soulevée en ce qui concerne l’annexe 6, celle‑ci ne sera pas examinée plus avant dans la présente décision.

[47]           Conformément à l’article 134 de la LCPE, quiconque peut déposer auprès du ministre un avis motivé d’opposition demandant la constitution de la commission de révision prévue à l’article 333 en ce qui concerne la délivrance d'un permis. Si un tel avis est déposé dans le délai prescrit (sept jours), le ministre peut constituer une commission de révision chargée d’enquêter sur la question soulevée par l’avis (paragraphe 333(5)). À la réception du rapport de la commission, le ministre peut prendre des mesures supplémentaires concernant le permis s’il l’estime souhaitable (paragraphe 129(3)).

[48]           L’Organisation maritime internationale (l’OMI) a adopté en octobre 2001 la Convention internationale de 2001 sur le contrôle des systèmes antisalissure nuisibles sur les navires (la Convention). Aux fins de la présente demande, la disposition pertinente de l’instrument est le paragraphe 4(1) qui est ainsi libellé :

1)         Conformément aux prescriptions spécifiées à l’annexe 1, chaque Partie interdit et/ou limite :

a)    l’application, la réapplication, l’installation ou l’utilisation de systèmes antisalissure nuisibles sur les navires visés aux alinéas a) ou b) de l’article 3 1); et

b)    l’application, la réapplication, l’installation ou l’utilisation de tels systèmes sur les navires visés à l’article 3 1) c) lorsqu’ils se trouvent dans un port, un chantier naval ou un terminal au large d’une Partie,

et prend des mesures effectives pour veiller à ce que ces navires satisfassent à ces prescriptions.

[49]           De façon conforme en apparence avec la Convention de l’OMI et conformément à la Loi de 2001sur la marine marchande du Canada, LC 2001, c 6 (la LMMC), le Parlement a adopté le Règlement sur la prévention de la pollution par les navires et sur les produits chimiques dangereux, DORS/2007-86, qui est désormais remplacé par le Règlement sur la pollution par les bâtiments et sur les produits chimiques dangereux, DORS/2012‑69 (le Règlement sur la pollution par les bâtiments). Pour les besoins de la présente demande, la disposition pertinente est le paragraphe 127(1) qui énonce ce qui suit :

(127)(1) Le représentant autorisé d’un bâtiment veille à ce que celui-ci n’ait aucun système antisalissure contenant des composés organostanniques qui agissent en tant que biocides.

[50]           Le texte intégral des différentes dispositions examinées ci‑dessus est reproduit à l’annexe 1 des présents motifs.

V.                Les questions en litige

[51]           Les questions soulevées dans la présente demande sont les suivantes :

A.    La demande a‑t‑elle été présentée à l’extérieur du délai?

B.     Le ministre a‑t‑il commis une erreur en omettant d’envisager et d’appliquer une interdiction totale des TBT qui, selon la Société, sont présents dans l’environnement au Canada?

C.     La délivrance du permis était‑elle déraisonnable?

[52]           Dans ses observations écrites, la Société a également allégué que le refus du ministre d’accepter sa demande d’une commission de révision pour contester le permis a porté atteinte à son droit à l’équité procédurale. Cependant, la Société a abandonné cet argument au cours de l’audition de la présente demande (transcription, aux pages 18 à 20).

VI.             La norme de contrôle

[53]           L’affirmation de la Société, selon laquelle le ministre a omis d’envisager et d’appliquer une interdiction totale des TBT qui, soutient‑elle, sont présents, comporte un élément d’ordre purement juridique et un élément de nature factuelle ou qui constitue une question mixte de fait et de droit.

[54]           L’élément d’ordre purement juridique concerne le paragraphe 127(1) du Règlement sur la pollution par les bâtiments et certaines dispositions de la LCPE, qui, selon la Société, établissent une interdiction totale des TBT. L’examen de la Cour, en vue de déterminer si ces dispositions établissent en fait l’existence d’une interdiction totale des TBT au Canada ayant eu pour effet de rendre illégale la délivrance du permis, est effectué selon la norme de la décision correcte. La raison en est qu’il s’agit d’« une pure question d’interprétation de la loi qui ne comportait aucun élément discrétionnaire », que le ministre « ne peut prétendre qu’il possède une expertise supérieure » à celle de la Cour à l’égard de ces questions et qu’il n’y a pas de clause privative dans la LCPE (Canada (Citoyenneté et Immigration) c Kandola, 2014 CAF 85, au paragraphe 43). De plus, en ce qui concerne le Règlement sur la pollution par les bâtiments, celui‑ci a été pris sous le régime de la LMMC, précitée, qui n’est pas la « loi constitutive » du ministre et aucun élément de preuve n’a été présenté pour démontrer que celui‑ci avait une connaissance approfondie de cette loi (Agraira c Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2013 CSC 36, au paragraphe 50).

[55]           L’élément factuel de la question qui a été soulevée concernant le Règlement sur la pollution par les bâtiments est de savoir si l’Annapolis a un « système antisalissure contenant des composés organostanniques qui agissent en tant que biocides », au sens du paragraphe 127(1) de ce Règlement. Qu’il s’agisse d’une question purement factuelle ou d’une question mixte de fait et de droit, la norme de contrôle applicable est la décision raisonnable (Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9 (Dunsmuir), aux paragraphes 51 à 53).

[56]           L’affirmation de la Société selon laquelle la décision du ministre était déraisonnable est également assujettie à la norme de la décision raisonnable (Dunsmuir, précité).

VII.          La question de preuve

[57]           Les défendeurs soutiennent que les [traduction] « éléments de preuve scientifique » présentés par la Société doivent être radiés, au motif que le fait d’autoriser cette dernière à présenter ces éléments de preuve transgresserait la règle établie selon laquelle, lors d’un contrôle judiciaire suivant le paragraphe 18.1(1) de la Loi sur les Cours fédérales, précitée, l’étendue de la preuve admissible est limitée aux éléments de preuve qui ont été portés à la connaissance du décideur (Association des universités et collèges du Canada c Canadian Copyright Licensing Agency, 2012 CAF 22 (Association des universités et collèges), au paragraphe 19; Première nation d’Ochapowace c Canada (Procureur général), 2007 CF 920 (Ochapowace), au paragraphe 9.

[58]           Par conséquent, les défendeurs estiment que les paragraphes 10 à 15 et 17, de même que les pièces D à O de l’affidavit de William Andrews (l’affidavit d’Andrews) ainsi que l’ensemble des affidavits de Rachel Barsky datés du 9 janvier 2015 (le deuxième affidavit de Barsky) et du 20 janvier 2015 (le troisième affidavit de Barsky) devraient être radiés, au motif que les souscripteurs d’affidavit prétendent donner des éléments de preuve scientifique qui n’ont pas été portés à la connaissance du ministre au moment où il a délivré le permis. Les défendeurs présentent essentiellement les mêmes observations à l’égard des éléments de preuve scientifique fournis dans l’affidavit de M. Emilien Pelletier (l’affidavit de Pelletier).

[59]           Comme l’ont reconnu l’arrêt Association des universités et collèges et la décision Ochapowace, précités, la règle selon laquelle l’étendue de la preuve admissible est limitée aux éléments de preuve qui ont été portés à la connaissance du décideur fait l’objet de certaines exceptions. L’une de ces exceptions a trait aux documents qui sont considérés comme donnant des informations générales qui sont susceptibles d’aider la Cour (Association des universités et collèges, précité, au paragraphe 20a); Ochapowace, précitée).

[60]           Cependant, en analysant cette exception dans l’arrêt Association des universités et collèges, précité, le juge Stratas a souligné qu’« [o]n doit s’assurer que l’affidavit ne va pas plus loin en fournissant des éléments de preuve se rapportant au fond de la question déjà tranchée par le tribunal administratif ». En appliquant ce principe, il a procédé à la radiation de l’affidavit en question, au motif qu’une grande partie des éléments de l’affidavit qui « auraient trait au “contexte” renferment en réalité des éléments de preuve qui portent sur le fond de la question soumise à la Commission » (Association des universités et collèges, précité, au paragraphe 26). Le juge Zinn a tiré une conclusion semblable dans la décision Alberta Wilderness Association c Canada (Ministre de l’Environnement), 2009 CF 710, aux paragraphes 33 et 34.

[61]           À mon avis, les éléments de preuve auxquels les défendeurs s’opposent, tel qu’il est exposé au paragraphe 58 ci-dessus, ne sont pas considérés comme un « contexte », mais plutôt comme des éléments de preuve qui se rapportent au fond de la question dont le ministre était saisi. Comme le ministre l’a confirmé dans sa lettre aux avocats de la Société, datée du 7 janvier 2015, les interventions de la Société ont été [traduction] « prises au sérieux par Environnement Canada et ont défini la portée de l’appréciation qui a été effectuée ». Le ministre a ensuite fait observer ce qui suit : [traduction] « Je suis satisfait de la mesure dans laquelle Environnement Canada a fait appel à votre client et du fait que les préoccupations que vous avez soulevées ont été prises en compte. Je crois que l’ancien NCSM Annapolis peut être immergé d’une manière qui ne pose aucun risque important au milieu marin ou à la santé humaine ».

[62]           La Société a également mentionné les arrêts Hartwig c Saskatoon (City) Police Assn, 2007 SKCA 74, aux paragraphes 30 à 33, et SELI Canada Inc c Construction and Specialized Workers’ Union, Local 1611, 2011 BCCA 353, aux paragraphes 77 à 85. Cependant, ces affaires peuvent être distinguées de la présente espèce, parce qu’elles portaient sur un différend relatif à l’admissibilité des éléments de preuve dont disposait le tribunal inférieur. Une autre affaire invoquée par la Société, soit Da’naxda’xw/Awaetlala First Nation c British Columbia Hydro and Power Authority, 2015 BCSC 16, aux paragraphes 173 à 179, peut également être distinguée, compte tenu du fait que le différend au sujet d’éléments de preuve concernait les éléments de preuve relatifs aux relations passées entre les requérants et la province ou BC Hydro, qui ont été jugés pertinents à l’égard de l’allégation selon laquelle la Couronne avait manqué à son obligation de consulter.

[63]           Nononobstant ce qui précède, je crois que, en fonction des faits très particuliers de l’espèce, la preuve par affidavit contestée devrait être admise.

[64]           Comme l’a fait observer le juge Stratas dans l’arrêt Association des universités et collèges, précité, au paragraphe 20, la liste des exceptions au principe général interdisant les éléments de preuve qui n’ont pas été portés à la connaissance du décideur, dont la décision peut faire l’objet d’un contrôle judiciaire, « n’est sans doute pas exhaustive ». Il peut y avoir d’autres exceptions, en particulier là où elles ne sont « pas incompatible[s] avec le rôle différent joué par la juridiction de révision et par le tribunal administratif » et où elles sont « susceptibles de faciliter ou de favoriser la tâche de la juridiction de révision sans porter atteinte à la mission qui est confiée au tribunal administratif ».

[65]           Une question importante dont était saisi le ministre avait trait à la nature du [traduction] « risque pour le milieu marin ou la santé humaine ». À mon avis, il s’agit d’une question d’intérêt public exceptionnelle qui justifie un assouplissement des règles de preuve types relatives au contrôle judiciaire d’une décision prise par un ministre ou un autre fonctionnaire à l’égard d’une telle question. Si des éléments de preuve scientifique peuvent démontrer l’existence de risques inacceptables pour la santé humaine ou l’environnement, ces éléments de preuve doivent être recevables à l’occasion du contrôle judiciaire d’une décision qui a porté sur cette question. C’est surtout le cas lorsque le ministre ou l’autre fonctionnaire ne disposait pas des éléments de preuve. Le public serait en droit de ne s’attendre à rien de moins.

[66]           Je suis convaincu que l’admission d’éléments de preuve scientifique dans ce contexte ne serait pas incompatible avec les différents rôles joués par la Cour et le ministre ou un autre fonctionnaire, et faciliterait ou favoriserait la tâche de la juridiction de révision sans porter atteinte à la mission qui est confiée au tribunal administratif (Première nation Kwicksutaineuk Ah-Kwa-Mish c Canada (Procureur général), 2012 CF 517, au paragraphe 71).

[67]           Lorsque des éléments de preuve scientifique démontrent, de façon claire et convaincante, l’existence d’un risque inacceptable pour l’environnement ou la santé humaine qui n’a pas été pris en compte par un ministre ou un autre fonctionnaire, cela peut justifier l’annulation de la décision et renvoyer la question au décideur.

[68]           En pratique, ma décision d’admettre les éléments de preuve scientifique contestés importe peu, car j’ai conclu que les éléments de preuve en litige n’étaient pas concluants pour ce qui est de m’aider à déterminer si les TBT qui peuvent être présents sur la coque de l’Annapolis peuvent réellement causer un risque important pour la santé humaine ou l’environnement. Autrement dit, ces éléments de preuve n’ont pas aidé la Cour à trancher la question de savoir si la décision du ministre de délivrer le permis était déraisonnable, dans le sens où celle‑ci n’appartiendrait pas aux « issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » (Dunsmuir, précité, au paragraphe 47).

VIII.       Analyse

A.                 La demande a‑t‑elle été présentée à l’extérieur du délai?

[69]           Les défendeurs soutiennent que la présente demande devrait être rejetée, au motif qu’elle n’a pas été présentée dans le délai de 30 jours prévu au paragraphe 18.1(2) de la Loi sur les Cours fédérales, précitée. Je suis également de cet avis.

[70]           Étant donné que le permis a été délivré le 2 octobre 2014, le délai a expiré le ou vers le 2 novembre 2014. La présente demande n’a été déposée que le 6 janvier 2015, soit plus de deux mois hors de ce délai.

[71]           La Société fait valoir que [traduction] « la doctrine du manque de diligence ne s’applique pas en l’espèce, mais si elle s’applique néanmoins, c’est le ministre de la Justice qui a tardé à soulever cette question ».

[72]           L’argument des défendeurs ne repose pas sur la doctrine du manque de diligence, mais plutôt sur le délai statutaire établi au paragraphe 18.1(2) de la Loi sur les Cours fédérales, précitée. De plus, je suis d’accord avec le ministre défendeur, à savoir que les circonstances de l’espèce sont telles que les défendeurs ne devraient subir aucun préjudice du fait qu’ils ont soulevé la question du retard seulement quand ils ont déposé leurs observations écrites concernant la présente demande. Les circonstances en question sont les suivantes : [traduction] « toutes les parties à ces procédures ont adopté une approche très coopérative dans le cadre d’une procédure de contrôle judiciaire instruite de façon très accélérée, afin que la question puisse être examinée, en raison des inquiétudes à propos de l’urgence de la situation, compte tenu de l’état du navire » (Transcription, aux pages 193 et 194).

[73]           Interrogés pendant l’audience sur la question de savoir si un principe juridique exigeait que les défendeurs présentent leurs observations au sujet du retard plus tôt qu’ils ne l’ont fait, comme à l’audience devant le juge Shore, le 12 janvier 2015, ou lorsque l’affaire a été soumise au juge Simpson peu de temps après, les avocats de la Société ont répondu par la négative (Transcription, aux pages 90 et 91).

[74]           Néanmoins, les avocats de la Société ont affirmé que la présente demande était formulée comme une demande de contrôle judiciaire relativement à la question de la délivrance du permis par le ministre. Les avocats ont avancé une explication : [traduction] « La demande ne conteste pas une décision ou une ordonnance, mais une ligne de conduite de la part du ministre » (Transcription, à la page 91). Nonobstant le fait que la Société avait déjà abandonné sa contestation séparée de la décision du ministre de ne pas constituer une commission de révision, les avocats ont soutenu que la ligne de conduite contestée comprenait les actes posés par le ministre à partir du moment où le permis avait été délivré, soit le 2 octobre 2014, jusqu’au moment où la Société avait déposé la présente demande le 6 janvier 2015.

[75]           À l’appui de cette position particulière, la Société invoque les décisions Krause c Canada, [1999] 2 CF 476 (Krause), et Airth c Canada (Ministre du Revenu national), 2006 CF 1442 (Airth), où a été établie une distinction entre une « décision » ou une « ordonnance » auxquelles le délai de 30 jours visé au paragraphe 18.1(2) est applicable et « l’objet de la demande » plus vaste, prévu au paragraphe 18.1(1), auquel ce délai ne s’applique pas.

[76]           Le ministre défendeur soutient qu’il est possible de distinguer les affaires Krause et Airth, précitées, compte tenu du fait que chacune d’elles concernait une ligne de conduite de la part du ministre défendeur qui s’était étalée sur une période de temps plus longue que celle de la formulation d’une décision ou d’une ordonnance, comme l’envisage le paragraphe 18.1(2). Je suis du même avis.

[77]           Dans l’affaire Krause, les appelants ont contesté « une suite de décisions annuelles qui traduis[ai]ent la politique ou pratique continue dans le temps de l'intimée » (Krause, précitée, aux paragraphes 11 et 23). De même, dans l’affaire Airth, il était évident que la demande de contrôle judiciaire ne visait pas uniquement une décision, mais plutôt une ligne de conduite qui « soulève une multiplicité de questions relatives à l’Agence du revenu du Canada, à la GRC et à la police de Vancouver, à l’usage prévu des renseignements exigés, aux buts du ministre, à des infractions supposées aux dispositions de confidentialité de la Loi de l’impôt sur le revenu, aux projets et aux actions des fonctionnaires fédéraux et aux atteintes aux droits garantis par la Charte qui découleraient de leur conduite » (Airth, précitée, aux paragraphes 8‑9).

[78]           Je conviens aussi avec les défendeurs qu’il ressort clairement de l’avis de demande déposé par la Société que [traduction] l’« objet » de la présente demande est uniquement la décision du ministre de délivrer le permis. Cela ressort du premier paragraphe de la demande qui ne concerne que la [traduction] « délivrance du [permis] ». De même, l’énoncé de la réparation demandée est axé sur le permis et ne fait référence à aucune autre action du ministre. De même, le dernier paragraphe de la demande énonce ce qui suit : [traduction] « Une ordonnance provisoire urgente est nécessaire afin d’interdire le déménagement de l’Annapolis dans la baie Halkett, le 13 janvier 2015, et son sabordage le 17 janvier 2015 pour préserver le statu quo et donner à la Cour le temps nécessaire pour entendre la présente demande et décider si le [permis] est conforme à la loi canadienne et à ses propres conditions ».

[79]           Le seul renvoi dans la demande à toute autre action du ministre, qui permettrait de soutenir qu’une [traduction] « ligne de conduite » plus large que celle relative à la délivrance du permis était contestée, figure au paragraphe 13 du document, sous la rubrique [traduction] « Les motifs de la demande sont les suivants ». Dans ce paragraphe, la Société a décrit les demandes qu’elle a faites pour que soit constituée une commission de révision et a fait observer que le ministre n’avait pas répondu à cette demande et à la demande selon laquelle le permis devait être suspendu en attendant une telle révision.

[80]           À mon avis, le contenu du paragraphe 13 de la demande ne suffit pas à transformer ce qui constitue par ailleurs une contestation qui est clairement axée uniquement sur la décision de délivrer le permis en une contestation d’une ligne de conduite plus large qui comprend les refus du ministre de constituer une commission de révision et de suspendre le permis. Encore une fois, je ferai simplement remarquer en passant que les avocats de la Société ont abandonné dans leur plaidoirie la question que cette dernière avait soulevée dans ses observations écrites en ce qui concerne le défaut du ministre de constituer une commission de révision.

[81]           Il résulte de ce qui précède que le délai de 30 jours prévu au paragraphe 18.1(2) s’applique et que la Société se trouve dans la situation d’être soumise à l’exercice du pouvoir discrétionnaire de la Cour d’accorder une prorogation de ce délai.

[82]           Quatre facteurs guident la Cour pour décider si elle doit exercer ce pouvoir discrétionnaire. Les voici : i) la partie requérante présentait une intention constante de poursuivre sa demande; ii) la demande est bien fondée; iii) les autres parties ont subi un préjudice en raison du délai; iv) il existe une explication raisonnable justifiant le retard (Canada c Hennelly, [1999] ACF no 846 (CAF), au paragraphe 3; Muckenheim c Canada (Commission de l’assurance‑emploi), 2008 CAF 249, au paragraphe 8).

[83]           En appréciant les facteurs qui précèdent, la Cour tiendra compte du fait que le délai de 30 jours prévu au paragraphe 18.1(2) « n’est pas capricieux », mais plutôt « existe dans l’intérêt public, afin que les décisions administratives acquièrent leur caractère définitif et puissent aussi être exécutées sans délai, apportant la tranquillité d’esprit à ceux qui observent la décision ou qui veillent à ce qu’elle soit observée, souvent à grands frais » (Canada c Berhad, 2005 CAF 267, au paragraphe 60).

[84]           Tout bien considéré, les quatre facteurs énumérés ci-dessus, dans leur ensemble, incitent au refus d’exercer le pouvoir discrétionnaire d’accorder une prorogation du délai de 30 jours. En somme, l’ARSBC a subi un préjudice important en raison du fait que la Société n’a pas présenté la présente demande dans le délai en question, qu’elle n’a pas donné une explication raisonnable de ce délai et qu’elle n’a pas démontré l’intention de déposer la demande avant le 17 décembre 2014, date à laquelle elle a informé le ministre de cette possibilité.

[85]           Pour les motifs énoncés dans les parties VIII.B et VIII.C des présents motifs, j’ai également rejeté la présente demande sur le fond. Toutefois, si les faits avaient été différents et s’ils avaient démontré clairement qu’il y avait une possibilité réelle de causer un dommage important à la santé humaine ou à l’environnement, j’aurais pu tirer une autre conclusion en ce qui concerne l’octroi d’une prorogation en vertu du paragraphe 18.1(2), en particulier si un tel préjudice allait au‑delà des intérêts de la demanderesse retardataire.

                                                                              (i)           Le préjudice

[86]           En ce qui concerne le préjudice, j’accepte les arguments des défendeurs, selon lesquels le fait que la Société ait présenté la demande seulement peu avant le sabordage planifié de l’Annapolis, le 17 janvier 2015, a causé un préjudice à l’ARSBC et créé un risque accru que l’Annapolis coule accidentellement à un endroit indésirable, en raison de l’état détérioré du navire. Une telle éventualité ferait courir un danger potentiel et aurait des répercussions négatives sur de nombreux tiers (affidavit de Colin Parkinson souscrit le 6 février 2015, aux paragraphes 11 et 12).

[87]           La Société a été informée, au plus tard le 9 octobre 2014, que le permis avait été délivré, puisqu’elle a écrit au ministre à cette date pour déposer un avis d’opposition et demander la tenue d’une commission de révision relativement à la délivrance du permis. Il peut également être considéré que la Société savait que le paragraphe 3 du permis interdisait le transport et l’immersion du navire du 1er février 2015 au 14 août 2015. Elle n’a pas prétendu ignorer que l’ARSBC envisageait de saborder le navire avant cette période.

[88]           En fait, suivant les éléments de preuve non contredits portés à la connaissance de la Cour, les avocats de la Société (i) ont assisté à une bonne partie de l’audition de la requête pour la levée de la saisie pratiquée contre l’Annapolis, qui a eu lieu le 4 novembre 2014; (ii) étaient présents lorsque le protonotaire Lafrenière a rendu une ordonnance avec motifs, à la fin de l’audience. L’ordonnance, qui a finalement été réduite à des explications écrites datées du 24 novembre 2014, prévoyait que l’Annapolis serait déplacé et sabordé dans un délai de 30 jours (Wesley Racines c Artificial Reef Society of British Columbia, (dossier de la Cour T‑709‑13, 24 novembre 2014)). Cependant, l’ARSBC a ensuite déposé un avis de requête demandant une prolongation, jusqu’au 31 janvier 2015, de la période d’amarrage dans la baie de Port Graves. Une ordonnance datée du 9 décembre 2014 a accueilli la requête.

[89]           Néanmoins, il était évident pour toutes les personnes présentes à l’audience, le 4 novembre 2015, que la situation était devenue très urgente. C’est ce qui ressort clairement du passage suivant des explications du protonotaire Lafrenière :

[traduction]

31.       Troisièmement, il est urgent de terminer le projet. L’état de l’Annapolis s’est détérioré au point qu'il existe un risque substantiel que l’une des passe‑coques ait une fuite avant l’été 2015 en raison de la détérioration de l’état du navire et de la corrosion. Une défaillance de l’une de ces passe‑coques serait susceptible de causer des inondations dans certains secteurs du navire et, finalement, d’entraîner une perte totale. Le navire a été considérablement dépouillé de ses composantes et ouvert. Il est impossible de le réparer à ce stade‑ci ou de le remorquer ailleurs qu’à l’endroit approuvé de son sabordage dans la baie Halkett. Lever la saisie pratiquée contre l’Annapolis afin que le navire puisse être sabordé d’une façon contrôlée à l’endroit approuvé semble être la seule alternative réaliste au naufrage accidentel ultérieur à un endroit non désiré.

32.       À la fin, je conclus que l’ordonnance levant la saisie pratiquée contre l’Annapolis de manière à ce que le navire puisse être sabordé d’une façon contrôlée pour devenir un récif artificiel est la seule alternative réaliste à la catastrophe éventuelle d’une défaillance des passe-coques qui causerait un préjudice aux deux parties.

[Non souligné dans l’original.]

[90]           Compte tenu de la situation urgente décrite ci‑dessus, l’ARSBC a fait appel à un nombre important de fournisseurs de services tiers, immédiatement après la levée de la saisie pratiquée contre l’Annapolis, pour préparer le navire à être déplacé et sabordé dans la baie Halkett. Au moment où les fournisseurs en question s’apprêtaient à assurer leurs services, la Société a présenté sa demande puis a déposé la requête en vue d’une suspension provisoire de l’instance qui a été accueillie par le juge Shore. À la suite de cette suspension, l’ARSBC a dû suspendre le travail des fournisseurs de services et demander qu’une modification soit apportée au permis d’immersion en mer pour être en mesure de déplacer et de saborder le navire après le 1er février 2015. Le navire continue toutefois de se détériorer et de courir un risque croissant de couler accidentellement (affidavit de Jeffrey Smith souscrit le 9 janvier 2015, pièce D; affidavit de Howard Robins, au paragraphe 50). Cela est en partie attribuable au fait que les passe-coques du navire continuent de se corroder et, depuis la levée de la saisie pratiquée contre celui‑ci, d’autres trous ont été percés à l’intérieur du navire et sur la coque pour aider le navire à couler rapidement.

[91]           Outre ce qui précède, l’ARSBC a présenté des éléments de preuve non contestés, à savoir que le coût éventuel résultant d’un naufrage accidentel variait de 2,5 à 6 millions de dollars. De plus, selon les éléments de preuve de l’ARSBC, celle‑ci détient une police d’assurance responsabilité en matière maritime pour l’Annapolis prévoyant un plafond d’un million de dollars, et n’a pas d’autres actifs.

[92]           Compte tenu de tout ce qui précède, je suis convaincu que l’ARSBC a subi un préjudice et continuera de subir un préjudice considérable en raison du retard de la Société à déposer la présente demande. Si le navire coule accidentellement en raison du risque accru qui s’est concrétisé depuis l’expiration du délai de 30 jours prévu au paragraphe 18.1(2) de la Loi sur les Cours fédérales, précitée, des tiers, notamment ceux qui naviguent dans les eaux où un tel accident pourrait se produire, subiront également un préjudice.

                                                                            (ii)           L’intention de poursuivre la demande

[93]           Ainsi qu’il est mentionné précédemment, compte tenu des éléments de preuve dont dispose la Cour, la Société a fait connaître son intention de déposer une demande de contrôle judiciaire concernant la délivrance du permis par le ministre uniquement lorsqu’elle a communiqué le fait dans une lettre envoyée au ministre qui est datée du 17 décembre 2014, une date qui va nettement au‑delà du délai de 30 jours prévu au paragraphe 18.1(2).

[94]           Je reconnais que la Société a rapidement déposé, le 9 octobre 2014, un avis d’opposition et a demandé la tenue d’une commission de révision en ce qui concerne la délivrance du permis; cette demande a été réitérée dans les lettres que la Société a envoyées au ministre et qui sont datées du 9 décembre 2014 et du 17 décembre 2014.

[95]           Cependant, le processus de la commission de révision ne peut être comparé à un processus d’appel administratif ou à un autre recours possible qui doit être épuisé avant qu’une demande de contrôle judiciaire puisse être présentée devant la Cour. Le processus de la commission de révision est entièrement discrétionnaire. En somme, lorsqu’une personne dépose un avis d’opposition, le ministre peut constituer une commission de révision chargée d’enquêter sur la question soulevée par l’avis (LCPE, précitée, paragraphe 333(5)). Dès réception du rapport de la commission, s’il l’estime souhaitable, le ministre peut prendre d’autres mesures concernant le permis (paragraphe 129(3)).

[96]           En résumé, rien n’empêchait la Société de déposer la présente demande dans le délai de 30 jours prévu au paragraphe 18.1(2) de la Loi sur les Cours fédérales, précitée. Le fait que celle‑ci n’a pas communiqué ou autrement démontré son intention de le faire milite contre l’exercice par la Cour du pouvoir discrétionnaire qu’elle a d’accorder une prorogation du délai.

                                                                 (iii)                     L’explication justifiant le retard

[97]           La Société n’a pas expliqué pourquoi elle avait attendu près de deux mois après le délai prévu au paragraphe 18.1(2) avant de déposer la présente demande. Pour les raisons énoncées ci‑dessus, le fait que la Société a tenté de convaincre le ministre de tenir une commission de révision n’est pas une explication raisonnable.

                                                                          (iv)           Le bien‑fondé de la demande

[98]           Pour les motifs énoncés ci-dessous, j’ai rejeté la présente demande sur le fond.

                                                                            (v)           Conclusion concernant l'exercice du pouvoir discrétionnaire de la Cour

[99]           Pour les motifs énoncés ci‑dessus, j’ai conclu qu’il ne serait pas approprié d'exercer mon pouvoir discrétionnaire et de proroger le délai du dépôt de la présente demande jusqu’au 6 janvier 2015, date à laquelle la demande a été déposée.

[100]       Cette conclusion suffit pour trancher la présente demande. Toutefois, au cas où il s’avérerait que j’ai commis une erreur en tirant cette conclusion, je procéderai plus loin à l’appréciation de la demande sur le fond.

B.                  Le ministre a‑t‑il commis une erreur en omettant d’envisager et d’appliquer une interdiction totale des TBT qui, selon la Société, sont présents dans l’environnement au Canada?

[101]       La Société allègue que certaines dispositions de la Convention, du Règlement sur la pollution par les bâtiments et/ou de la LCPE s’appliquent pour imposer une interdiction des TBT au Canada. Compte tenu de cette position et de sa conviction que, à tout le moins, certains TBT sont encore présents sur la coque de l’Annapolis, la Société affirme alors que le ministre a commis une erreur de droit en omettant de tenir compte de l’interdiction et de l’appliquer lorsqu’elle a délivré le permis. Autrement dit, la Société soutient que la délivrance du permis a pour effet de légitimer une violation de la loi canadienne et constitue, par conséquent, un recours excessif à l’exercice de la compétence du ministre.

[102]       Je ne suis pas de cet avis.

                             (i)            La Convention

[103]       En ce qui concerne la Convention, la Société fait observer que le paragraphe 4(1) exige que les parties à cet instrument interdisent et/ou limitent, conformément aux exigences précisées dans l’annexe 1, l’application, la réapplication, l’installation ou l’utilisation de systèmes antisalissure nuisibles sur les navires visés à l’article 3. Le paragraphe 4(1) exige également que les parties à celui‑ci prennent des mesures effectives pour veiller à ce que ces navires satisfassent à ces prescriptions.

[104]       L’annexe 1 de la Convention s’applique aux « composés organostanniques qui agissent en tant que biocides dans les systèmes antisalissure » (non souligné dans l’original). Le Canada a adhéré à la Convention en 2010.

[105]       La Société omet de signaler le fait que le paragraphe 2(9) de la Convention définit ce que désigne un « navire » : « un bâtiment de quelque type que ce soit exploité en milieu marin et englobe les hydroptères, les aéroglisseurs, les engins submersibles, les engins flottants, les plates-formes fixes ou flottantes, les unités flottantes de stockage (FSU) et les unités flottantes production et de déchargement (FPSO) ».

[106]       À mon avis, l’Annapolis n’est pas visé par cette définition. En effet, il a été amarré dans la baie de Graves pendant près de sept ans et ne peut plus être « exploité » ou être considéré comme étant « en exploitation » de façon significative ou tel qu’il est prévu dans la Convention. Cela peut être dû en partie au fait que le navire a été considérablement modifié pour devenir un récif artificiel. Ces modifications ont, notamment, beaucoup compromis l’intégrité structurelle et l’étanchéité à l’eau de l’Annapolis. Au nombre de ces modifications figurent l’élimination de toutes les écoutilles étanches et de nombreuses cloisons étanches pour garantir un accès sécurisé aux plongeurs, de même que le découpage de grandes ouvertures dans la coque (au‑dessus de la ligne de flottaison), le bordé extérieur, le pont et les cloisons transversales (affidavit de Jeffrey Smith, onglet D; affidavit de Colin Parkinson, aux paragraphes 8 à 12).

[107]       Je remarque que l’article 3, qui définit les navires auxquels s’applique la Convention, utilise aussi le terme « exploités » (alinéa 3(1)b)) et le libellé « entrent dans un port, un chantier naval ou un terminal au large d’une Partie » (alinéa 3(1)c)). Les éléments de preuve immédiatement susmentionnés donnent à penser que l’Annapolis n’exercera plus jamais aucune de ces activités.

                           (ii)            Le Règlement sur la pollution par les bâtiments

[108]       En ce qui concerne le Règlement sur la pollution par les bâtiments, le paragraphe 127(1) exige que le représentant autorisé d’un bâtiment veille à ce que celui‑ci n’ait aucun système antisalissure contenant « des composés organostanniques qui agissent en tant que biocides ». L’annexe 1 de la Convention utilise essentiellement la même formulation. Selon la Société, le paragraphe 127(1) crée de fait une interdiction des TBT au Canada, auquel est contrevenu le ministre lorsqu’il a délivré le permis.

[109]       Le ministre défendeur affirme que l’article 187 de la LMMC prévoit expressément que l’interdiction du rejet d’un polluant précisé par les règlements ne s’applique pas aux « rejets » qui sont autorisés par un permis délivré en vertu de la partie 7, section 3 de la LCPE. La LMMC est la loi sous laquelle le Règlement sur la pollution par les bâtiments est entré en vigueur. Le ministre défendeur affirme en outre que la définition de « rejet » donnée à l’article 185 de la LMMC est suffisamment large pour couvrir tous les types de rejet à la mer qui constituent l’objet unique et particulier de la partie 7, section 3 de la LCPE. Cette définition englobe tout « [r]ejet d’un polluant qui, directement ou indirectement, atteint l’eau, notamment par déversement, fuite, déchargement ou chargement par pompage, rejet liquide, émanation, vidange, rejet solide et immersion ».

[110]       Je conviens que cette définition de « rejet » est suffisamment large pour faire en sorte que tout « rejet » de TBT pouvant incidemment résulter de l’immersion de l’Annapolis, tel qu’il est prévu au permis d’immersion en mer, relève du champ d’application de l’article 187 de la LMMC. Par conséquent, bien qu’il soit prétendu que l’Annapolis puisse disposer d’un « système antisalissure contenant des composés organostanniques qui agissent en tant que biocides », comme l’envisage l’article 127 du Règlement sur la pollution par les bâtiments, le ministre n’a pas agi en violation de la loi ou au‑delà de sa compétence en délivrant le permis. L’article 187 de la LMMC lui permettait expressément d’agir ainsi.

[111]       Quoi qu’il en soit, la Cour n’a ciblé aucune disposition de la LMMC, de la LCPE ou du Règlement sur la pollution par les bâtiments qui exigeait que le ministre assure la conformité à cette réglementation avant de délivrer le permis. Je conviens avec les défendeurs qu’il ressort très clairement du paragraphe 127(3) de la LCPE que, avant de délivrer un permis suivant le paragraphe (1) ou de le renouveler, le ministre doit tout simplement se conformer « à l’annexe 6 et consid[érer] tout facteur qu’il juge utile ». Ainsi qu’il est mentionné précédemment dans les présents motifs, aucune question relative à l’annexe 6 n’a été soulevée dans la présente instance.

[112]       La Société a également fait observer que l’article 130 du Règlement sur la pollution par les bâtiments exigeait que tout bâtiment d’une jauge brute de 400 ou plus soit titulaire d’un certificat international du système antisalissure selon le modèle figurant à l’annexe 4 de la Convention, et que celui‑ci soit conservé à bord. La Société soutient que, puisque l’Annapolis pèse environ 2 900 tonnes brutes, l’ARSBC est tenue de détenir et de conserver un tel certificat.

[113]       Je suis d’accord avec le ministre défendeur, à savoir qu’il n’est pas tenu de faire respecter les lois et règlements qui ne relèvent pas de son mandat et qui imposent ce type d’obligations. Autrement dit, l’obligation imposée par l'article 130 n’empêchait pas le ministre de délivrer le permis.

[114]       J’ajouterais en passant qu’il revient à la partie qui demande un permis aux termes de la LCPE de veiller à ce que toutes les autres exigences réglementaires qui peuvent s’appliquer dans une situation donnée soient satisfaites.

[115]       D’un point de vue plus général, le ministre défendeur soutient que l’Annapolis ne relève plus de la définition d’un « bâtiment », énoncée à l’article 2 de la LMMC :

« bâtiment » Navire, bateau ou embarcation conçu, utilisé ou utilisable — exclusivement ou non — pour la navigation sur l’eau, au-dessous ou légèrement au-dessus de celle-ci, indépendamment de son mode de propulsion ou de l’absence de propulsion ou du fait qu’il est encore en construction. Sont exclus de la présente définition les objets flottants des catégories prévues par règlement.

[116]       Se fondant sur l’affaire Salt Spring Island Local Trust Committee c B & B Ganges Marina Ltd, 2007 BCSC 892 (Salt Spring BCCA), aux paragraphes 35 à 44, conf. par 2008 BCCA 544, aux paragraphes 17 à 24 et 33 à 45, le ministre défendeur fait valoir que cette définition met l’accent sur [traduction] « la navigation ». Il soutient que, puisque l’Annapolis a été préparé en vue de son immersion et de son utilisation comme récif artificiel, et qu’il ne servira plus jamais à la navigation, il n’est plus un « bâtiment » selon la définition établie ci‑dessus.

[117]       Considérant que la définition de « bâtiment » porte notamment sur un navire qui a été conçu pour être utilisé uniquement ou partiellement pour la navigation, il n’est pas évident à première vue que l’Annapolis n’est plus un bâtiment aux fins de la LMMC. Je remarque que ce point de vue semble être partagé par la Cour d’appel de la Colombie‑Britannique, lorsque celle‑ci fait observer ce qui suit : [traduction] « Il est évident que la construction flottante est physiquement un navire ou un bâtiment. Celui‑ci a été conçu pour être utilisé pour la navigation. La constatation qu’il reste conçu pour être utilisé pour la navigation est sous‑entendue dans les conclusions du juge ». (Salt Spring BCCA, au paragraphe 38.)

[118]       Étant donné que j’ai déjà rejeté les deux arguments présentés aux paragraphes 108 à 114 ci‑dessus que la Société a avancés en ce qui concerne le Règlement sur la pollution par les bâtiments, il n’est pas nécessaire de tirer une conclusion définitive à l’égard de cette observation supplémentaire du ministre défendeur. Une autre raison pour s’abstenir de tirer une telle conclusion est le fait que la Cour n’a pas reçu les observations écrites sur le point de vue de l’autre partie sur cette question.

                         (iii)            La LCPE

[119]       La Société fait valoir que le respect par le Canada de ses obligations conformément à la Convention comprend les dispositions de la partie 5 de la LCPE qui traitent des « substances toxiques ». À cet égard, la Société attire l’attention sur l’article 64 qui est ainsi libellé :

(64) Pour l’application de la présente partie et de la partie 6, mais non dans le contexte de l’expression « toxicité intrinsèque », est toxique toute substance qui pénètre ou peut pénétrer dans l’environnement en une quantité ou concentration ou dans des conditions de nature à :

a) avoir, immédiatement ou à long terme, un effet nocif sur l’environnement ou sur la diversité biologique;

b) mettre en danger l’environnement essentiel pour la vie;

c) constituer un danger au Canada pour la vie ou la santé humaines.

[120]       La Société fait observer en outre que les [traduction] « TBT » figurent à l’annexe 1 de la LCPE qui dresse la [traduction] « liste des substances toxiques gérées sous la LCPE ».

[121]       Toutefois, la Société n’a pas fait de déclarations au sujet de l’article 64 ou de la liste de l’annexe 1.

[122]       Le ministre défendeur soutient que l’article 64 fournit simplement une définition qui sert à déterminer si une substance peut être inscrite à l’annexe 1. Le ministre a ajouté que, une fois qu’une substance est inscrite à l’annexe 1, certaines autres dispositions de la LCPE sont mises en application, dont celles relatives aux pouvoirs de réglementer la substance. Au nombre de ces pouvoirs figurent ceux qui sont attribués par l’article 71 (les personnes sont tenues d’aviser le ministre de certaines choses, de communiquer à celui‑ci des renseignements ou des échantillons ou encore, de procéder aux essais que le ministre peut demander), par l’article 93 (prendre des règlements à l’égard d’une substance inscrite à l’annexe 1) et par l’article 199 (obliger une personne à élaborer et à exécuter un plan d’urgence environnementale).

[123]       En somme, le ministre a soutenu que le simple fait qu’une substance figure sur la liste de l’annexe 1 n’interdit pas la substance au Canada ou n’empêche pas le ministre de délivrer un permis autorisant l’élimination de la substance. Le fait que celle‑ci soit inscrite sur la liste ouvre plutôt la porte éventuellement à d’autres mesures réglementaires, comme c’est le cas avec l’adoption du Règlement sur les BPC, DORS/2008‑273, qui interdit de rejeter des BPC dans l’environnement au‑delà d’une certaine concentration, autrement qu’à partir d’une pièce d’équipement visée (article 5).

[124]       À ce jour, aucun règlement du même type n’a été adopté à l’égard des TBT, même si ceux‑ci sont pris en compte dans le Règlement sur certaines substances toxiques interdites (2012), DORS/2012‑285 (le Règlement sur certaines substances). Conformément à l’article 4 de ce règlement, « il est interdit de fabriquer, d’utiliser, de vendre, de mettre en vente ou d’importer toute substance toxique mentionnée à l’annexe 1 ou tout produit qui en contient, à moins que celle-ci n’y soit présente fortuitement ». Cependant, les TBT ne figurent pas à l’annexe 1 de ce règlement. Ils figurent plutôt à l’annexe 2 qui est intitulée « Utilisations permises, concentration maximale et seuils pour les rapports ». La dernière annexe a été établie conformément au paragraphe 6(2) du Règlement sur certaines substances qui stipule explicitement que l’interdiction de fabriquer, d’utiliser, etc., des substances toxiques ne s’applique pas dans certains cas, notamment lorsque la limite de concentration est inférieure à 30 % en p/p. Plus important encore, le paragraphe 7(2) de ce règlement énonce qu’« [i]l est permis d’utiliser, de vendre et de mettre en vente tout produit contenant la substance toxique mentionnée dans [la partie de l’annexe 2 où apparaissent les TBT] qui a été fabriqué ou importé avant l’entrée en vigueur du présent règlement », soit le 14 décembre 2012.

[125]       Compte tenu de ce qui précède, je suis d’accord avec les défendeurs, à savoir qu’il ne semble pas y avoir quoi que ce soit dans la LCPE ou le Règlement sur certaines substances qui établit une interdiction totale d’une substance inscrite à l’annexe 1 de la LCPE ou à l’annexe 2 du Règlement sur certaines substances, tout simplement parce que la substance figure dans ces annexes.

[126]       La Société fait ensuite observer que [traduction] « tous les composés de tributylstannane » sont également couverts par l’article 100 de la LCPE qui établit une Liste des substances d’exportation contrôlée pour toute toute substance visée par un accord international qui exige une notification d’exportation ou le consentement du pays de destination avant que la substance ne soit exportée du Canada. Les TBT sont visés par l’article 100, parce qu’ils figurent dans la partie 2 de l’annexe 3 de la LCPE.

[127]       Cependant, encore une fois, je suis d’accord avec les défendeurs, à savoir que l’article 100, à l’instar des autres dispositions relatives à l’exportation de substances, porte exclusivement sur l’exportation de substances qui sont inscrites à l’annexe 3. Ils ne sont pas pertinents à la délivrance du permis et n’ont aucune incidence sur l’examen par la Cour de la délivrance du permis.

                         (iv)            Conclusion sur l’affirmation selon laquelle le ministre a agi en violation de la loi en délivrant le permis

[128]       Compte tenu des conclusions formulées dans les sections (i) à (iii) ci‑dessus, je suis convaincu que le ministre n’a pas agi en contravention de la loi en délivrant le permis. Contrairement aux affirmations de la Société, ni la Convention, ni la LCPE et ni le Règlement sur la pollution par les bâtiments n’établissent une interdiction des TBT ou empêchaient autrement le ministre de délivrer le permis, en raison de la présence de quantités infimes de TBT sur la coque de l’Annapolis. Il en va de même pour le Règlement sur certaines substances.

C.     La décision du ministre de délivrer le permis était‑elle déraisonnable?

[129]       À titre subsidiaire, la Société fait valoir que la décision du ministre de délivrer le permis était déraisonnable principalement pour trois raisons.

[130]       Premièrement, la Société fait valoir que les raisons fournies dans la lettre du ministre, datée du 7 janvier 2015, n’expliquent pas pourquoi il a conclu que l’Annapolis [traduction] « p[ouvait] être immergé d’une manière qui ne pos[ait] pas de risque important au milieu marin ou à la santé humaine ». En se fondant sur l’arrêt Newfoundland and Labrador’s Nurses’ Union c Terre‑Neuve‑et‑Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62 (Nfld Nurses), aux paragraphes 14 à 16, la Société soutient que le compte rendu de décision relatif à la délivrance du permis ne traite aucunement du risque posé au milieu marin ou à la santé humaine qui résulte de la présence de TBT sur la coque du navire. La Société ajoute que le compte rendu de décision ne parvient pas à établir qu’il y a eu une appréciation rigoureuse, justifiable, transparente et intelligible des TBT présents dans la peinture recouvrant la coque de l’Annapolis, comme l’exige l’arrêt Dunsmuir, précité, et les décisions qui en ont découlé. Autrement dit, la Société postule que ni les raisons données ni le compte rendu de décision ne permettent à la Cour de comprendre pourquoi le permis a été délivré et si sa délivrance appartient aux issues possibles et acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit.

[131]        Deuxièmement, la Société allègue que le ministre a omis d’appliquer la Norme de nettoyage d’Environnement Canada en ce qui concerne les résultats [traduction] « non concluants » des analyses qui avaient été effectuées pour détecter la présence de TBT sur la coque de l’Annapolis. À cet égard, la Société soutient que rien ne permet de penser que le protocole défini dans la Norme de nettoyage pour la détection de peinture antisalissure a été suivi, puisque le compte rendu de décision ne fait pas mention des analyses en question et n’indique pas si six échantillons distincts ont été prélevés sur la coque ou si des essais de ruissellement ont été effectués. La Société allègue en outre que les résultats d’analyse [traduction] « non concluants » ne pouvaient raisonnablement constituer le fondement pour la conclusion d’Environnement Canada, mise en évidence dans le compte rendu de décision, à savoir que la peinture antisalissure revêtant la coque du navire était considérée comme un produit non actif. À cet égard, la Société fait notamment observer que, dans le cadre de l’inspection effectuée par M. Darryl Hansen en juin 2011, ce dernier n’a pas porté de jugement sur la partie immergée de la coque et que, ultérieurement, soit en juin 2012 (le rapport d'inspection de juin 2012), il a omis d’inspecter visuellement le revêtement de la coque.

[132]       Troisièmement, au cours de l’audience, la Société a soutenu que, si des TBT avaient été encore présents sur la coque du navire, le ministre n’aurait pu raisonnablement délivrer le permis. La Société allègue qu’il y a des TBT sur la coque du navire, compte tenu de ce qui suit : (i) les analyses que la Société a effectuées en décembre 2014; (ii) les résultats [traduction] « non concluants » susmentionnés; (iii) une déclaration faite sous serment par M. Barry Smith, un haut fonctionnaire d’Environnement Canada, que la Société interprète comme une confirmation que le navire a été, en fait, peint avec de la peinture antisalissure contenant des TBT. La Société se fonde en grande partie sur les éléments de preuve scientifique pour expliquer pourquoi il était déraisonnable que le ministre délivre le permis, compte tenu de la présence de TBT sur la coque de l’Annapolis.

[133]       Je ne souscris pas aux positions précédentes de la Société.

[134]       Au départ, il convient de se rappeler que, au regard de la LCPE, la décision du ministre de délivrer un permis d’immersion en mer est hautement discrétionnaire. Conformément au paragraphe 127(1), le ministre peut, sur demande, délivrer un tel permis. Il doit auparavant se conformer à l'annexe 6, qui n’est pas en cause dans la présente affaire, et considérer tout facteur qu’il juge utile (paragraphe 127(3)). Même si un avis d’opposition est déposé ultérieurement, le ministre a toute latitude pour décider de constituer une commission de révision (paragraphe 333(5)) et de suspendre, retirer ou modifier un permis en tenant compte de la décision de la commission de révision (paragraphe 129(3)).

[135]       De plus, le compte rendu de décision et le deuxième affidavit de Barry Smith (le deuxième affidavit de Smith), directeur régional du Service canadien de la faune d’Environnement Canada, tiennent compte du fait que la décision de délivrer le permis a été un exercice fortement axé sur les faits.

[136]       Ces facteurs nécessitent que la décision commande la retenue dans la façon d’aborder le contrôle judiciaire et que l’éventail des « issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » (Dunsmuir, précité, aux paragraphes 51 à 53) est plus large que ce ne l’aurait peut‑être été autrement (Canada (procureur général) c Abraham, 2012 CAF 266 (Abraham), aux paragraphes 42 à 50). Quoi qu’il en soit, je suis convaincu que la décision du ministre de délivrer le permis se situe bien à l’intérieur des limites de cet éventail.

                                                     (i)            Le fondement de la délivrance du permis

[137]       Relativement au fondement de la décision du ministre de délivrer le permis, il n’y avait aucune obligation de fournir des motifs détaillés, distincts du compte rendu de décision et du contenu du permis. À l’instar d’autres décisions rendues par les ministres ou leurs délégués à l’égard des permis, tels les permis de travail délivrés en vertu de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27, le dossier du décideur peut servir à répondre aux critères de justification, de transparence et d’intelligibilité (voir, par exemple, Singh c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CF 620, au paragraphe 8; Ahmed c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2013 CF 1083, au paragraphe 24; Lally c Société Telus Communications, 2014 CAF 214, au paragraphe 33; HBC Imports c Canada (Agence des services frontaliers), 2013 CAF 167, au paragraphe 14). C’est également le cas dans d’autres domaines du droit (Baker c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 RCS 817 (Baker), au paragraphe 44.

[138]       En l’espèce, le compte rendu de décision ainsi que la lettre mentionnée précédemment, datée du 7 janvier 2015, que le ministre a envoyés aux avocats de la Société permettent à la Cour de comprendre pourquoi le ministre a délivré le permis et d’établir si la décision de délivrer le permis fait partie des issues possibles acceptables au regard des faits et du droit (Nfld Nurses, précité, au paragraphe 16).

[139]       Comme je l’ai mentionné plus haut dans les présents motifs, la lettre du ministre assurait à la Société que ses interventions avaient été prises au sérieux et avaient servi de base pour définir la portée de l’appréciation qui avait été effectuée. Elle abordait notamment les préoccupations que la Société avait soulevées concernant [traduction] « la suffisance de l’échantillonnage et le nettoyage, la transparence, les contaminants et la conformité aux exigences juridiques ». La lettre concluait en affirmant que le ministre avait décidé que [traduction] « l’ancien NCSM Annapolis p[ouvait] être immergé d’une manière qui ne pos[ait] aucun risque important au milieu marin ou à la santé humaine ».

[140]       Tout cela est confirmé et par ailleurs étayé par un examen du compte rendu de décision et par le deuxième affidavit de Smith. Tel qu’il est expliqué au paragraphe 5 de cet affidavit, M. Smith est le fonctionnaire qui a en fait délivré le permis au nom du ministre.

[141]       En ce qui concerne la question particulière des TBT, celle‑ci a été posée pour la première fois de façon très superficielle par Me Peters, l’un des avocats de la Société, dans un courriel daté du 21 juin 2010, à deux représentants d’Environnement Canada. À cette époque, Me Peters a invoqué le Règlement sur la pollution par les bâtiments et fait observer que les composés organostanniques figuraient sur la liste des substances nouvellement interdites ou réglementées; il a aussi fait remarquer que ces composés, également connus sous le nom de TBT, agissaient en tant que biocides dans les systèmes antisalissure utilisés sur les navires. Il a ensuite demandé si le ministère de la Défense nationale avait obtenu un certificat de système antisalissure, conformément au nouveau règlement, avant le transfert du navire à l’ARSBC. En outre, il a demandé si cette dernière avait enlevé la peinture antisalissure contenant des TBT de la coque du navire (dossier de la demanderesse, page 552). En réponse, Environnement Canada a envoyé une copie de la Norme de nettoyage et répondu [traduction] qu’« aux fins du programme d’immersion en mer d’Environnement Canada, la question des peintures est abordée à la section 7 de la Norme de nettoyage ci-jointe ». Il a ajouté qu’il examinerait les résultats de l’appréciation par rapport à la Norme. Il a ensuite invité Me Peters à communiquer avec le ministère de la Défense nationale concernant le certificat de système antisalissure et avec l’ARSBC relativement aux mesures prises depuis l’acquisition du navire.

[142]       Il semble que la Société n’a soulevé de nouveau la question particulière des TBT que dans la lettre, datée du 9 décembre 2014, qu’elle a envoyée au ministre, soit plus de deux mois après la délivrance du permis et après de nombreux échanges avec Environnement Canada au sujet de la question des BPC à bord du navire.

[143]       Cela peut expliquer pourquoi la question des TBT n’a pas fait l’objet d’un examen approfondi dans le compte rendu de décision.

[144]       Quoi qu’il en soit, ce compte rendu fait à plusieurs reprises explicitement et implicitement référence aux TBT. Il y a trois références explicites dans le rapport intitulé Report of Compliance with the Environment Canada Clean-up Standard for Disposal at Sea of Vessels, daté de juillet 2014 (le rapport d’inspection de juillet 2014), qui a été produit par M. Jeffrey Smith.

[145]       Dans la première de ces références explicites, il est noté ce qui suit : [traduction] « Aucune peinture inadmissible n’a été trouvée. La carène extérieure a été examinée afin d’y détecter la présence éventuelle de revêtements organostanniques, notamment de peintures à base de tributylstannane. Les surfaces peintes à l’intérieur du navire étaient en grande partie intactes; elles s’étaient peu détériorées plus de 18 ans après leur dernier entretien. C’est seulement dans certaines parties inférieures de la cale où la corrosion est apparente ou qu’il y a eu un choc mécanique résultant des travaux effectués dans le navire que le revêtement commence à se détériorer ». (Compte rendu de décision, à la page 338.)

[146]       La deuxième de ces références explicites est contenue dans le passage suivant : [traduction] « Le navire est pratiquement exempt de revêtements antisalissure. Ces revêtements auraient été appliqués pour la première fois seulement en 1996. De plus, il y a maintenant une croissance importante d’organismes marins sur la coque. En outre, environ un cinquième de l’ensemble de la coque, à l’extérieur de la chambre des machines et de la chaufferie, a été auparavant recouvert de carreaux insonorisants et ne contient aucune substance organostannique (tributylstannane) ou autre composé ». (Compte rendu de décision, à la page 346.)

[147]       La troisième de ces références explicites était la suivante : [traduction] « La coque a été également examinée afin d’y détecter la présence de revêtement organostannique, en l’occurrence, la peinture à base de tributylstannane. Cette peinture a été régulièrement utilisée pendant la durée de vie en service du navire. Cependant, les tests de strie effectués sur la ligne de flottaison et sous celle-ci n’ont pas été concluants. L’application la plus récente de cette peinture ne pouvait dater des années suivant 2004 (et c’était probablement au plus tard en 1996), de sorte qu’il a été établi que la peinture en question s’était dissoute complètement. Cela est confirmé par la croissance marquée d’organismes marins le long de la coque ». (Compte rendu de décision, à la page 372.)

[148]       La Société se fonde sur le passage mis en évidence dans l’extrait cité ci‑dessus pour confirmer que l’Annapolis a été peint en fait avec un revêtement à base de TBT. Cependant, dans son premier affidavit souscrit le 16 janvier 2015 (le premier affidavit de Smith), M. Barry Smith a déclaré : [traduction] « Environnement Canada ne sait pas si, oui ou non, la carène de l’Annapolis a déjà été peinte avec une peinture contenant des TBT ». Il ne m’apparaît pas que ces deux déclarations sont nécessairement incompatibles. Je considère que la première se limite à affirmer qu’une peinture à base de TBT a été régulièrement utilisée au cours de la période où l’Annapolis était en service.

[149]       Quant aux références implicites aux TBT dans le compte rendu de décision, la première figure dans le tableau de suivi des questions touchant l’Annapolis, aux pages 9 et 10 du compte rendu. Sous l’intitulé [traduction] « Sujets de préoccupation », il est fait mention de ce qui suit :

  • [traduction] « des traces de peinture au plomb sont rejetées sur le rivage, où se baignent les enfants d’une colonie de vacances »;
  • certaines espèces de la faune et flore marine [traduction] « risquent d’être exposées à des contaminants ou à des matières dangereuses qui sont lessivés du navire après que celui‑ci a été sabordé »;
  • [traduction] « [...] les débris accumulés dans la baie, tels que les écailles de peinture au plomb ou les fibres d'amiante rejetées sur le littoral, mettent en danger les espèces marines qui confondent ces débris avec une source de nourriture [...];
  • [traduction] « la question est de savoir si la Norme de nettoyage d’EC assure la protection de la santé humaine et de l’environnement ».

 

[150]       Il s’agit essentiellement des mêmes préoccupations en matière de santé et d’environnement que la Société a soulevées dans la présente instance.

[151]       À la page 34 du compte rendu de la décision, les questions de [traduction] « peinture au plomb » et de [traduction] « peinture cloquée et d’écaillage de peintures extérieures et intérieures » sont traitées de manière quelque peu approfondie.

[152]       En ce qui concerne la Norme de nettoyage, le tableau de suivi mentionne ce qui suit, sous l’intitulé [traduction] « Réponse d’EC » : [traduction] « L’annexe 5 de la LCPE précise que les navires peuvent être immergés en mer, “à condition que les matériaux risquant de produire des débris flottants ou de contribuer d’une autre manière à la pollution du milieu marin aient été retirés dans la plus grande mesure possible”. Environnement Canada s’appuie sur sa Norme de nettoyage pour atteindre cet objectif. »

[153]       Cette dernière observation est confirmée par le premier affidavit de Smith, au paragraphe 12, où il est expliqué qu’Environnement Canada a élaboré la [Norme de nettoyage] pour [traduction] « aider à apprécier si oui ou non les exigences de l’annexe 5 de la LCPE sont respectées en ce qui a trait à l’immersion en mer des navires [...] ». M. Smith a ajouté que la Norme de nettoyage est révisée de temps à autre et que la version actuelle a été diffusée en décembre 2007.

[154]       Il convient de rappeler que l’annexe 5 est la disposition qui, conformément au paragraphe 122(1), définit les « déchets ou autres matières » et que l’article 125 de la LCPE interdit l’immersion de substances, sauf s’il s’agit de « déchets ou autres matières » et que l’immersion est effectuée conformément à un permis canadien. Conformément à l’article 3 de l’annexe 5, les navires sont visés par la définition de « déchets ou autres matières », « à condition que les matériaux risquant de produire des débris flottants ou de contribuer d’une autre manière à la pollution du milieu marin aient été retirés dans la plus grande mesure possible et que leur immersion éventuelle ne constitue pas un obstacle à la pêche ou à la navigation ».

[155]       Parmi les autres références implicites aux TBT dans le compte rendu de décision figurent celles qui sont mentionnées dans les rapports d’inspection de juin 2011 et de juin 2012 rédigés par M. Darryl Hansen. Tel qu’il a été signalé au paragraphe 131 ci‑dessus, M. Hansen a déclaré ce qui suit dans le premier de ces rapports : [traduction] « L’état de la peinture de la carène n’a pas été inspecté visuellement lors de l’inspection préliminaire. Les documents fournis par le promoteur seront examinés avant l’élaboration du prochain rapport ». (Compte rendu de décision, à la page 230.) L’année suivante, M. Hansen a fait la déclaration suivante : [traduction] « L’état du revêtement de la carène n’a pas été inspecté visuellement. La peinture de la coque a été appliquée il y a plus de douze ans et répond ainsi aux exigences de la norme, partie 7.1. » (Compte rendu de décision, à la page 302.)

[156]       En plus de ce qui précède et contrairement aux affirmations de la Société, le compte rendu de décision dans son ensemble, en particulier lorsqu’il est jumelé à la lettre du ministre datée du 7 janvier 2015, autorise le ministre à conclure que l’Annapolis [traduction] « peut être immergé d’une manière qui ne pose aucun risque important au milieu marin ou à la santé humaine ». Ce compte rendu démontre également qu’il y a eu une appréciation justifiable, transparente et intelligible des risques posés par la présence possible de TBT sur la coque du navire, avant la délivrance du permis, et que cette appréciation a été prise en compte par le ministre avant de délivrer le permis. Cela a été confirmé par le deuxième affidavit de Smith, au paragraphe 78, qui n’a pas été contesté. Environnement Canada s’est assuré également que les exigences de l'annexe 5 ont été respectées (compte rendu de décision, aux pages 10, 33 et 34; deuxième affidavit de Smith, au paragraphe 18).

[157]       En somme, avant que le permis soit délivré, Environnement Canada a effectué un examen qui s’est étendu sur plusieurs années. Au cours de ce processus, le ministère a reçu des rapports de M. Gollner, biologiste de la vie marine, de M. Biffard, écologiste des milieux aquatiques, et de M. Marliave, de l’Aquarium de Vancouver, qui concluent tous que le récif artificiel contribuerait positivement à l’écosystème de la baie Halkett en procurant un nouvel habitat au sébaste dont la survie est menacée. En outre, le compte rendu confirme que les Premières nations Squamish et Tsleil‑Waututh ont apporté leur soutien en partie fondé sur le fait que la création d’un récif artificiel aurait des effets bénéfiques sur l’habitat marin dans la baie Halkett. BC Parks a également confirmé que le projet d’immersion de l’Annapolis dans le parc marin provincial de la baie Halkett aurait des répercussions positives sur les plans récréatif, social et environnemental. En outre, une série d’au moins six rapports d’inspection produits par des inspecteurs désignés au cours de la période allant de 2009 à 2014 ont examiné l’état d’avancement des travaux de nettoyage qui ont été effectués au sujet de l’Annapolis et ils ont finalement conclu en 2014 que la Norme de nettoyage avait été respectée, notamment en matière de revêtements antisalissure. Avant de tirer cette conclusion, les inspecteurs ont dûment pris en compte les préoccupations que la Société avait soulevées à l’égard de la présence de BPC sur le navire, à un coût de près de 900 000 $.

[158]       Selon un affidavit souscrit par Howard Robins, les travaux de nettoyage ont porté également sur l’élimination du navire de tous les hydrocarbures résiduels et d’autres substances potentiellement nuisibles. Cela a souvent eu pour conséquence que plusieurs des systèmes du navire ont dû être démantelés et retirés afin que les secteurs requis soient nettoyés et ouverts pour inspection. De plus, de nombreux secteurs et composantes du navire ont dû être nettoyés à la main. Il est estimé qu’au moins 1 000 travailleurs et bénévoles ont aidé à la réalisation de ce projet en accomplissant au moins 17 000 heures de travail. (Affidavit de Howard Robins, daté du 10 février 2015, aux paragraphes 31 à 33.)

[159]       Outre ce qui précède, le MPO a également approuvé le sabordage de l’Annapolis après avoir fait un examen de la question de savoir s’il pouvait y avoir une [traduction] « incidence négative sur les espèces figurant sur la liste des espèces aquatiques en péril » (compte rendu de décision, aux pages 330 et 331). Cette approbation dépend du respect de certaines mesures d’atténuation qui n’ont pas été contestées dans la présente instance.

[160]       En outre, en 2012, conformément aux paragraphes 5(1) et (3) de la Loi sur la protection des eaux navigables, LRC 1985, c N‑22, Transports Canada a également approuvé les travaux qui seront entrepris par l’ARSBC en vue de créer un récif artificiel en immergeant l’Annapolis, pourvu que les conditions de l’approbation aient été respectées (affidavit de Robins, dossier de l’ARSBC, aux pages 208 à 211). Transports Canada a mis à jour son processus d’approbation en avril 2014 (affidavit de Robins, dossier de l’ARSBC, à la page 270).

[161]       Il convient aussi de noter que le permis exige que l’ARSBC permette à un agent de l’autorité désigné en vertu du paragraphe 217(1) de la LCPE et/ou un représentant d’Environnement Canada de visiter et d’inspecter l’Annapolis avant son immersion.

[162]       Compte tenu de ce qui précède, je suis convaincu que le compte rendu de décision et la lettre du ministre datée du 7 janvier 2015 permettent à la Cour de comprendre pourquoi le permis a été délivré et si sa délivrance fait partie des issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit (Nfld Nurses, précité, au paragraphe 16; Dunsmuir, précité, au paragraphe 47).

                           (ii)            La conformité avec la Norme de nettoyage

[163]       Pour les besoins de la présente demande, les dispositions pertinentes de la Norme de nettoyage sont celles de la section 7.1 qui traite des revêtements antisalissure sur les navires. Cette section souligne d’abord ceci : « Les revêtements antisalissure doivent être dans un état non actif avant la délivrance d’un permis en vertu du Règlement. Les demandeurs de permis peuvent satisfaire à cette exigence de l’une des façons [mentionnées par la suite]. » Puis, la section détaille quatre façons de faire différentes à cet égard. L’une de celles‑ci consiste à réaliser des essais afin de garantir l’état du revêtement antisalissure. Si cette méthode est choisie, au moins six échantillons pris dans diverses parties de la carène seront requis et feront l’objet d’essais de ruissellement, selon les directives de l’agent responsable d’Environnement Canada. Comme l’a signalé la Société, les essais qui ont été effectués en vue de satisfaire à cette exigence à l’égard de l’Annapolis se sont avérés [traduction] « non concluants ».

[164]       Cependant, la Société a omis de souligner qu’Environnement Canada s’était ensuite appuyé sur deux des autres méthodes pour satisfaire à l’exigence, tel qu’il est prévu dans la Norme de nettoyage, soit celles ayant trait à la date à laquelle a été appliqué le revêtement antisalissure et à l’étendue de la végétation marine sur la carène.

[165]       Tel qu’il est mentionné au paragraphe 147 ci‑dessus, le rapport d’inspection de juillet 2014 précisait que la peinture sur la coque du navire ne pouvait avoir été appliquée après 2004 et l’avait probablement été au plus tard en 1996. Par conséquent, il a été conclu que les TBT présents dans la peinture étaient probablement complètement dissous. Le rapport d’inspection de juin 2012 tirait une conclusion similaire. Ces conclusions étaient conformes à la Norme de nettoyage qui mentionne ce qui suit : « Les revêtements appliqués depuis plus de douze ans seront considérés comme non actifs. » Ce critère de douze ans avait été majoré par rapport au critère antérieur de cinq ans dans les modifications les plus récentes apportées à la Norme de nettoyage.

[166]       La conclusion du rapport d’inspection de juillet 2014, selon laquelle les TBT étaient probablement complètement dissous, compte tenu de la date à laquelle avait été peinte la coque la dernière fois, a ensuite été confirmée par la [traduction] « croissance marquée d’organismes marins le long de la coque ». Cela semble également être conforme à la Norme de nettoyage qui précise ce qui suit : « Les carènes qui sont recouvertes à plus de 80 % de végétation marine seront présumées ne contenir aucun revêtement antisalissure actif. » C’est sans doute parce que, si la croissance d’organismes marins sur la coque est prononcée, la quantité de TBT qui reste dans la peinture ne peut être importante.

[167]       Les conclusions formulées dans le rapport d’inspection de juillet 2014 et dans celui de juin 2012 sont corroborées par l’affidavit de M. Michael Stege, gestionnaire de projet pour l’attribution du contrat de soutien en service des navires de la classe Iroquois de la Marine royale canadienne (la MRC). Aux paragraphes 7 et 8 de son affidavit, M. Stege déclare qu’il a assisté à une inspection de la carène de l’Annapolis du 17 au 19 décembre 2013 et qu’il [traduction] « a vu que, au début de l’inspection, la carène était presque entièrement recouverte par la faune et flore marine, les espèces les plus visibles comprenaient les moules, les anatifes et les crabes ». Au paragraphe 14, M. Stege affirme avoir été informé par Kenneth Hammond, qui était [traduction] « le technicien de coque en chef de l’Annapolis lors de l’avant‑dernier carénage fait en 1991 », que le navire [traduction] « avait fait l’objet de travaux d’entretien en cale sèche par la MRC en 1994, date à laquelle la coque aurait été nettoyée et probablement repeinte ». Il a ajouté : [traduction] « il s’agissait des derniers travaux effectués sur la coque avant que le navire ne soit désarmé en 1998. L’Annapolis n’a pas été repeint par la MRC ou le MDN après avoir été désarmé. » La preuve de M. Stege n’a pas été contestée par la Société.

[168]       Par conséquent, selon les éléments de preuve non contestés, la coque du navire était presque entièrement recouverte par la faune et flore marine lorsqu’elle a été inspectée à la fin de 2013 et avait été peinte pour la dernière fois en 1994, soit environ 20 ans avant le rapport d’inspection de juillet 2014.

[169]       Il s’ensuit que, contrairement aux affirmations de la Société, la délivrance du permis n’a pas enfreint la Norme de nettoyage. Elle était tout à fait conforme à cette norme qui n’a pas été contestée antérieurement. Cela, en soi, est « caractéristique de la raisonnabilité définie dans l’arrêt Dunsmuir » (Ligue des droits de la personne de B’Nai Brith Canada c Odynsky, 2010 CAF 307, au paragraphe 87; Abraham, précité, aux paragraphes 54, 55 et 59; Baker, précité, au paragraphe 72).

[170]       J’ajouterais par ailleurs que, en étant conforme à la Norme de nettoyage, le permis était également conforme au paragraphe 127(1) du Règlement sur la pollution par les bâtiments. En somme, même si cette réglementation s’appliquait à l'Annapolis, elle demande simplement que le représentant autorisé d'un navire veille à ce que le navire n’ait aucun système antisalissure « contenant des composés organostanniques qui agissent en tant que biocides ». Compte tenu de la date à laquelle la peinture antisalissure a été appliquée et de l’étendue de la prolifération de la faune et flore marine sur la coque, il a été estimé, conformément à la Norme de nettoyage, que la peinture antisalissure était non active.

                         (iii)            Était‑il raisonnablement loisible au ministre de délivrer le permis compte tenu de la présence de TBT sur la coque du navire?

[171]       Il s’agit du dernier motif invoqué par la Société pour contester le prononcé de la décision, en l’occurrence, qu’il n’était pas raisonnablement loisible au ministre de délivrer le permis s’il y avait présence de TBT sur la coque de l’Annapolis.

[172]       ll semble que la seule confirmation de la présence de TBT sur la coque de l’Annapolis est fournie par l’analyse d’un échantillon de peinture qui, selon M. Andrews, a été prélevé sur le navire (affidavit d’Andrews, au paragraphe 10). L’analyse de cet échantillon, qui a été commandée par la Société, a révélé la présence de traces de TBT dans la peinture. Selon un affidavit souscrit le 19 janvier 2015 par M. Kenneth Doe (le premier affidavit de Doe), un ancien biologiste et toxicologue à la retraite d’Environnement Canada, la quantité de TBT dans cet échantillon de peinture est extrêmement faible et représente une fraction, exprimée en poids, de 0,000697 %.

[173]       Malgré cette très faible quantité de TBT trouvés dans l’échantillon de peinture de l’Annapolis, la Société soutient que ces toxines présentent un risque inacceptable pour le milieu marin et la santé humaine. En se fondant sur les éléments de preuve scientifique brièvement décrits dans la partie VII des motifs ci‑dessus, principalement ceux qui sont présentés dans l’affidavit de Pelletier, la Société fait valoir que la conclusion du ministre, selon laquelle les quantités résiduelles de TBT dans la peinture antisalissure de l’Annapolis ont cessé d'agir en tant que biocides, va à l’encontre des données scientifiques qui établissent que les TBT sont réels et toxiques à une concentration se mesurant en nanogrammes pour les organismes marins vivants. Elle ajoute que les TBT présents dans la peinture continuent de poser un risque inacceptable de bioaccumulation et de bioamplification dans la chaîne alimentaire. Par conséquent, la Société allègue que la délivrance du permis par le ministre et le recours de celui‑ci à une norme de nettoyage désuète, qui a été définie avant que les dispositions pertinentes du Règlement sur la pollution par les bâtiments n’entrent en vigueur en 2008, ne font pas partie des issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit.

[174]       M. Pelletier a souscrit à la conclusion de M. Doe, selon laquelle la concentration de TBT dans l’échantillon de peinture analysé par la Société correspondait seulement à une petite fraction de la quantité qu’il y avait lorsque le navire a été peint pour la dernière fois. Toutefois, il a exprimé son désaccord par rapport à la conclusion de M. Doe, selon laquelle les TBT présents sur la coque du navire n’étaient plus [traduction] « actifs ».

[175]       Selon M. Pelletier, les données scientifiques montrent que la quantité résiduelle de TBT sur la coque du navire fait en sorte que les TBT peuvent continuer d’agir en tant que biocides, même avec seulement une capacité limitée, et peuvent continuer de nuire au milieu biologique marin ainsi qu’à l’environnement, notamment par la bioaccumulation et la bioamplification en remontant la chaîne alimentaire. Il a laissé entendre que, même si les TBT ne nuisent peut‑être pas actuellement au milieu biologique marin ainsi qu’à l’environnement, cela changera lorsque des TBT seront rejetés au moment où le navire sera immergé à l’aide d’un certain nombre d’explosions sous-marines qui transperceront la coque du navire. Il a déclaré que de telles explosions créeront inévitablement un grand nombre de petits éclats de peinture qui se répandront lentement dans le voisinage du navire sur une surface de sédiments non connue, selon la force des courants locaux. Il a ajouté que le choc des explosions aura pour effet également de diluer la peinture des deux côtés de la coque, ce qui créera de multiples fissures et fêlures sur la surface peinte, à travers desquelles les TBT pourront s’échapper. Enfin, il a soutenu que les ondes de choc liées aux explosions feraient en sorte que certains des organismes actuellement fixés à la coque tomberont et deviendront la proie des poissons et d’autres prédateurs qui s’empoisonneront alors aux TBT.

[176]       En réponse à l'affidavit de Pelletier, M. Doe a déposé un deuxième affidavit (le deuxième affidavit de Doe), daté du 6 février 2015. M. Doe a d’abord affirmé qu’il souscrivait aux conclusions de M. Pelletier, à savoir que les TBT sont très toxiques, persistants et bioaccumulatifs. Cependant, il a exprimé son désaccord par rapport aux conclusions de M. Pelletier, selon lesquelles l’immersion de l’Annapolis, dans son état actuel, poserait un risque aux organismes aquatiques dans le parc marin de la baie Halkett. Il a également exprimé son désaccord par rapport à la déclaration de M. Pelletier (au paragraphe 10), à savoir que [traduction] « la concentration réelle de TBT dans la peinture doit être comparée à la concentration de TBT dans les sédiments marins et, en particulier, dans les sédiments de l’endroit où l’Annapolis devrait être immergé ».

[177]       M. Doe a ensuite fait observer que les principes de l'évaluation des risques écologiques sont énoncés dans un document, joint en Annexe C au deuxième affidavit de Doe et intitulé Recommended Guidance and Checklist for Tier 1 Ecological Risk Assessment of Contaminated Sites in British Columbia – Chapter 1. Introduction, qui a été élaboré par la province de la Colombie‑Britannique. Il a cité un passage du document : [traduction] « [U]ne substance chimique ne pose aucun risque à un organisme à moins qu’il n’y soit exposé. Cela est très important, parce que pratiquement toutes les matières ont des effets biologiques. Toutefois, à moins qu’il n’y ait suffisamment de cette substance chimique qui interagit avec un système biologique, il n’y aura aucun effet. Il y a dans le risque une part d’exposition, de récepteur et de danger, exprimée sous la forme d’une probabilité. »

[178]       M. Doe a poursuivi en faisant remarquer que la quantité de TBT trouvés dans l’échantillon analysé par la Société [traduction] « représent[ait] une réduction de la quantité de 99,992 % à 99,996 % de ce qui est susceptible d’être trouvé dans une peinture antisalissure fraîche ». (Deuxième affidavit de Doe, au paragraphe 8.) Cela équivaut à environ 0,004 à 0,008 % de la concentration de TBT trouvés dans la peinture antisalissure fraîche. Étant donné cette information, il a exprimé l’opinion suivante : [traduction] « Je suis très persuadé que les concentrations de TBT qui pourraient provenir de la coque de l’Annapolis dans son état actuel et s’accumuler dans un environnement local seraient trop faibles pour causer des inquiétudes quant à des répercussions environnementales risquant d’être néfastes. Je suis d’avis que le risque que poserait la peinture antisalissure non active sur la carène de l’Annapolis pour le milieu environnant est improbable et négligeable. »

[179]       La Société s’arrête sur les mots soulignés dans la citation ci‑dessus pour laisser entendre que M. Doe n’a pas tenu compte de l’effet des explosions qui se produira lorsque le navire sera immergé. Je ne suis pas de cet avis. À mon avis, ces mots signifient [traduction] « dans son état actuel et la peinture antisalissure qui date maintenant d’il y a 20 ans et qui est recouverte d’organismes marins ». Cette interprétation est étayée par la déclaration finale contenue dans le premier affidavit de Doe, où M. Doe a déclaré : [traduction] « Je suis très persuadé que les concentrations de TBT qui pourraient provenir de l’Annapolis et s’accumuler dans un environnement local seraient trop faibles pour causer des inquiétudes quant à des répercussions environnementales risquant d’être néfastes. »

[180]       En fin de compte, la Cour doit se prononcer sur des opinions scientifiques contradictoires et sur les analyses à l’appui de M. Pelletier et de M. Doe, respectivement. Pour arriver à concilier ces éléments de preuve, la Cour n’a pu bénéficier d’un contre-interrogatoire sur ces affidavits.

[181]       Dans l’ensemble, ces éléments de preuve scientifique, ainsi que les autres éléments de preuve scientifique déposés par les parties (comprenant principalement des articles scientifiques), ne sont pas concluants pour ce qui est d’aider la Cour à déterminer si les TBT présents sur la coque de l’Annapolis peuvent réellement constituer un risque important pour la santé humaine ou l’environnement. Autrement dit, ces éléments de preuve n’aident pas la Cour à décider si la décision du ministre de délivrer le permis était déraisonnable.

[182]       En l’absence d’éléments de preuve clairs et probants, à savoir que les TBT encore présents sur la coque de l’Annapolis peuvent être passablement préjudiciables à la santé humaine ou au milieu biologique marin dans la baie Halkett, il y a lieu de faire preuve de retenue à l’endroit de la décision implicite du ministre, selon laquelle le sabordage du navire ne fera pas peser un tel risque (Inverhuron & District Ratepayers Assn c Canada (Ministre de l’Environnement), 2001 CAF 203, paragraphes 35 et 36; Mountain Parks Watershed Assn c Chateau Lake Louise Corp, 2004 CF 1222, au paragraphe 16).

[183]       La Société s’oppose également à l’utilisation par le ministre de la Norme de nettoyage, compte tenu du fait que celle‑ci a été révisée pour la dernière fois avant l’entrée en vigueur des dispositions pertinentes du Règlement sur la pollution par les bâtiments. La Société soutient que la Norme de nettoyage ne reflète plus les plus récentes connaissances scientifiques acquises concernant les TBT.

[184]       Les défendeurs affirment que cela revient à s’en prendre à la Norme de nettoyage même et qu’il n’est pas loisible à la Société de contester celle‑ci dans le cadre du présent contrôle judiciaire.

[185]       Je suis de cet avis. En l’absence d’une démonstration de mauvaise foi de la part du ministre lors de l’élaboration de la Norme de nettoyage, d’une non-conformité aux principes de justice naturelle ou du recours à des facteurs qui sont non pertinents ou qui sont étrangers à l’objectif visé par la LCPE, la Norme de nettoyage n’est pas susceptible d’un contrôle judiciaire (Carpenter Fishing Corp c Canada, [1998] 2 CF 548, au paragraphe 28; Tucker c Canada (Ministre des Pêches et des Océans), 2001 CAF 384, au paragraphe 2; Bow Valley Naturalists Society c Canada (Ministre du Patrimoine canadien), [2001] 2 CF 461, au paragraphe 78; Timberwest Forest Corp c Canada, 2007 CF 148, au paragraphe 89).

[186]       Indépendamment de ce qui précède, voici deux mesures objectives du caractère raisonnable des dispositions de la Norme de nettoyage concernant les peintures antisalissure : (i) ces dispositions n’ont pas été contestées depuis que la norme a été révisée en décembre 2007, soit il y a plus de sept ans et (ii) ces dispositions sont compatibles avec celles de la norme correspondante appliquée aux États‑Unis et avec les pratiques suivies en Australie. En effet, compte tenu des éléments de preuve incontestés, à savoir que l’Annapolis a été peint pour la dernière fois en 1994 avec de la peinture antisalissure, soit environ 20 ans avant la délivrance du permis, la conclusion du ministre, selon laquelle les TBT présents sur la coque du navire ne sont plus actifs, était également conforme à la norme qui a été adoptée au Royaume-Uni.

[187]       En passant, il convient de répéter que le critère des douze années applicable aux revêtements antisalissure, conformément à la section 7.1 de la Norme de nettoyage, avait été majoré par rapport au critère antérieur de cinq ans, après qu’Environnement Canada eut revu plus particulièrement ce critère, au moment où la norme a été examinée la dernière fois, en décembre 2007.

                         (iv)            Conclusion concernant le caractère raisonnable de la décision du ministre de délivrer le permis

[188]       Compte tenu de tout ce qui précède, je suis convaincu que la décision du ministre de délivrer le permis n’était pas déraisonnable.

IX.             Conclusion

[189]       Pour les motifs exposés dans les parties VII et VIII ci-dessus, la présente demande sera rejetée.

X.                Les dépens

[190]       La Société a fait valoir que les dépens devraient lui être accordés, bien qu’elle n’ait pas eu gain de cause dans la présente demande.

[191]       Je ne suis pas de cet avis.

[192]       Le fait que la Société a soulevé des questions d’intérêt public dans la présente instance est le seul facteur à prendre en considération dans l’adjudication de dépens, conformément au paragraphe 400(3) des Règles des Cours fédérales, DORS/98‑106. D’autres incluent le résultat de l’instance, la question de savoir si une étape de celle‑ci a été accomplie de manière négligente ou par erreur, et toute autre question que la Cour juge pertinente.

[193]       À mon avis, le fait que la Société a longuement tardé à déposer la présente demande, ainsi que le préjudice subi par l’ARSBC en raison de ce retard et les injonctions temporaires ultérieures prononcées par la Cour, justifient l’adjudication de dépens en faveur des parties gagnantes, en l’occurrence, les défendeurs.

[194]       Cependant, compte tenu de l’intérêt que la présente demande revêt pour le public, je refuse la demande de l’ARSBC qui sollicite des dépens supérieurs à ceux qui sont habituellement adjugés.

[195]       Les dépens seront adjugés aux défendeurs selon l’échelon médian de la colonne III du tarif B des Règles des Cours fédérales, précitées.


JUGEMENT

LA COUR STATUE que :

1.                  La présente demande est rejetée;

2.                  Les dépens sont adjugés aux défendeurs selon l’échelon médian de la colonne III du tarif B des Règles des Cours fédérales, DORS/98‑106;

3.                  L'interdiction de déplacer et de saborder l’Annapolis, conformément au permis d'immersion en mer no 4543‑2‑03607 délivré par le ministre, n’est plus en vigueur.

« Paul S. Crampton »

Juge en chef

Traduction certifiée conforme

C. Laroche


Annexe 1 – Les dispositions législatives applicables

Loi sur les cours fédérales, LRC 1985, c F‑7.

Demande de contrôle judiciaire

18.1 (1) Une demande de contrôle judiciaire peut être présentée par le procureur général du Canada ou par quiconque est directement touché par l’objet de la demande.

Application for judicial review

18.1 (1) An application for judicial review may be made by the Attorney General of Canada or by anyone directly affected by the matter in respect of which relief is sought.

Délai de présentation

(2) Les demandes de contrôle judiciaire sont à présenter dans les trente jours qui suivent la première communication, par l’office fédéral, de sa décision ou de son ordonnance au bureau du sous-procureur général du Canada ou à la partie concernée, ou dans le délai supplémentaire qu’un juge de la Cour fédérale peut, avant ou après l’expiration de ces trente jours, fixer ou accorder.

Time limitation

(2) An application for judicial review in respect of a decision or an order of a federal board, commission or other tribunal shall be made within 30 days after the time the decision or order was first communicated by the federal board, commission or other tribunal to the office of the Deputy Attorney General of Canada or to the party directly affected by it, or within any further time that a judge of the Federal Court may fix or allow before or after the end of those 30 days.

Loi canadienne sur la protection de l’environnement, LC 1999, c 33

122(1)

« déchets ou autres matières »

“waste or other matter”

« déchets ou autres matières » Les déchets et autres matières énumérés à l’annexe 5.

 

122(1)

“waste or other matter”

« déchets ou autres matières »

“waste or other matter” means waste or other matter listed in Schedule 5.

Immersion dans les eaux relevant du Canada

125. (1) Il est interdit à toute personne et à tout navire de procéder à l’immersion de substances dans un espace visé à l’un des alinéas 122(2) a) à e), sauf s’il s’agit de déchets ou autres matières et que l’immersion est effectuée conformément à un permis canadien.

Disposal in waters under Canadian jurisdiction

125. (1) No person or ship shall dispose of a substance in an area of the sea referred to in any of paragraphs 122(2)(a) to (e) unless

(a) the substance is waste or other matter; and

(b) the disposal is done in accordance with a Canadian permit.

Permis

127. (1) Le ministre peut, sur demande, délivrer un permis pour le chargement pour immersion et l’immersion de déchets ou autres matières et, sous réserve des règlements, le renouveler jusqu’à quatre fois.

Permit

127. (1) The Minister may, on application, issue a permit authorizing the loading for disposal and disposal of waste or other matter and, subject to the regulations, renew it no more than four times.

Demande

(2) La demande :

Application

(2) The application must

a) est présentée en la forme réglementaire;

 

(a) be in the prescribed form

b) contient les renseignements requis par les règlements ou que peut exiger le ministre en vue de se conformer à l’annexe 6;

(b) contain the information that may be prescribed or that may be required by the Minister for the purpose of complying with Schedule 6;

c) est accompagnée des droits réglementaires;

(c) be accompanied by the prescribed fees; and

d) comporte la preuve qu’il en a été donné préavis dans un journal circulant près du lieu de chargement ou d’immersion ou dans toute publication requise par le ministre.

(d) be accompanied by evidence that notice of the application was published in a newspaper circulating in the vicinity of the loading or disposal described in the application or in any other publication specified by the Minister.


Facteurs à considérer

(3) Le ministre ne peut délivrer ou renouveler le permis que s’il se conforme à l’annexe 6 et considère tout facteur qu’il juge utile.

Factors for consideration

(3) Before issuing a permit under subsection (1) or renewing it, the Minister shall comply with Schedule 6 and shall take into account any factors that the Minister considers necessary.

Suspension, retrait ou modification du permis

129(3) S’il l’estime souhaitable, le ministre peut, compte tenu de l’annexe 6, de la constitution de la commission de révision visée à l’article 333 ou de tout rapport de celle-ci, suspendre ou retirer un permis canadien ou en modifier les conditions.

Powers to suspend, revoke or vary permit

129 (3) The Minister may suspend or revoke a Canadian permit or vary its conditions where, having regard to Schedule 6 or the establishment of, or any report of, a board of review under section 333, the Minister considers it advisable to do so.

Avis d’opposition

Notification

134. (1) Quiconque peut déposer auprès du ministre un avis motivé d’opposition demandant la constitution de la commission de révision prévue à l’article 333 dans les cas suivants :

 

Notice of objection

134. (1) Any person may file with the Minister a notice of objection requesting that a board of review be established under section 333 and stating the reasons for the objection, if the Minister

a) le ministre délivre ou refuse le permis canadien;

(a) issues or refuses a Canadian permit;

a.1) le ministre renouvelle ou refuse de renouveler le permis délivré en vertu du paragraphe 127(1);

 

(a.1) renews or refuses to renew a permit issued under subsection 127(1); or

b) le ministre suspend ou annule le permis canadien, ou modifie ses conditions, sauf si la mesure donne suite aux recommandations du rapport d’une commission de révision.

(b) suspends or revokes a Canadian permit or varies its conditions, otherwise than in accordance with the recommendations of a report of a board of review established under section 333 in respect of the permit

Délai de dépôt

(2) L’avis d’opposition doit être déposé dans les sept jours suivant :

 

Time for filing notice of objection

(2) The notice of objection shall be filed within seven days after

a) la publication dans le Registre du texte du permis canadien ou du permis renouvelé en vertu du paragraphe 127(1);

(a) the date the text of the Canadian permit or the permit renewed under subsection 127(1), as the case may be, is published in the Environmental Registry; or

 

b) la réception par la personne d’un avis du ministre l’informant de la mesure.

(b) the date the person receives a notice from the Minister that the Canadian permit has been refused, suspended or revoked, that its conditions have been varied or that the renewal of a permit issued under subsection 127(1) has been refused.

Cas de constitution d’une commission de révision

Danger de la substance

333. (1) En cas de dépôt de l’avis d’opposition mentionné aux paragraphes 77(8) ou 332(2), le ministre, seul ou avec le ministre de la Santé, peut constituer une commission de révision chargée d’enquêter sur la nature et l’importance du danger que représente la substance visée soit par la décision ou le projet de règlement, décret ou texte du gouverneur en conseil, soit par la décision ou le projet d’arrêté ou de texte des ministres ou de l’un ou l’autre.

 

Establishment of board of review

333. (1) Where a person files a notice of objection under subsection 77(8) or 332(2) in respect of

(a) a decision or a proposed order, regulation or instrument made by the Governor in Council, or

(b) a decision or a proposed order or instrument made by either or both Ministers,

the Minister or the Ministers may establish a board of review to inquire into the nature and extent of the danger posed by the substance in respect of which the decision is made or the order, regulation or instrument is proposed.

Accords et conditions afférentes

(2) En cas de dépôt de l’avis d’opposition mentionné aux paragraphes 9(3) ou 10(5), le ministre peut constituer une commission de révision chargée d’enquêter sur l’accord en cause et les conditions de celui-ci.

Establishment of board of review

(2) Where a person files a notice of objection under subsection 9(3) or 10(5) in respect of an agreement or a term or condition of the agreement, the Minister may establish a board of review to inquire into the matter.

Rejet d’une substance dans l’atmosphère ou l’eau

(3) En cas de dépôt, dans le délai précisé, de l’avis d’opposition mentionné au paragraphe 332(2), le ministre constitue une commission de révision chargée d’enquêter sur la nature et l’importance du danger que représente le rejet dans l’atmosphère ou dans l’eau de la substance visée par un projet de règlement d’application des articles 167 ou 177.

Mandatory review for international air and water

(3) Where a person or government files with the Minister a notice of objection under subsection 332(2) with respect to regulations proposed to be made under section 167 or 177 within the time specified in that subsection, the Minister shall establish a board of review to inquire into the nature and extent of the danger posed by the release into the air or water of the substance in respect of which the regulations are proposed.

 

Règlements — partie 9 et article 118

(4) En cas de dépôt, dans le délai précisé, de l’avis d’opposition mentionné au paragraphe 332(2) à l’égard d’un projet de règlement d’application de la partie 9 ou de l’article 118, le ministre constitue une commission de révision chargée d’enquêter sur la question soulevée par l’avis.

Mandatory reviews for certain regulations

(4) Where a person files with the Minister a notice of objection under subsection 332(2) with respect to regulations proposed to be made under Part 9 or section 118 within the time specified in that subsection, the Minister shall establish a board of review to inquire into the matter raised by the notice.

 

Plaintes quant aux permis

(5) En cas de dépôt, dans le délai précisé, de l’avis d’opposition mentionné à l’article 134, le ministre peut constituer une commission de révision chargée d’enquêter sur la question soulevée par l’avis.

Review for permits

(5) Where a person files with the Minister a notice of objection under section 134 within the time specified in that section, the Minister may establish a board of review to inquire into the matter raised by the notice.

 

Toxicité de la substance

(6) Lorsqu’une personne dépose un avis d’opposition auprès du ministre en vertu de l’article 78 pour défaut de décision sur la toxicité d’une substance, le ministre constitue une commission de révision chargée de déterminer si cette substance est effectivement ou potentiellement toxique.

Mandatory review for toxics

(6) Where a person files with the Minister a notice of objection under section 78 in respect of the failure to make a determination about whether a substance is toxic, the Minister shall establish a board of review to inquire into whether the substance is toxic or capable of becoming toxic.

Annexe 5

3. Navires, aéronefs, plates-formes ou autres ouvrages à condition que les matériaux risquant de produire des débris flottants ou de contribuer d’une autre manière à la pollution du milieu marin aient été retirés dans la plus grande mesure possible et que leur immersion éventuelle ne constitue pas un obstacle à la pêche ou à la navigation.

Schedule 5

3. Ships, aircraft, platforms or other structures from which all material that can create floating debris or other marine pollution has been removed to the maximum extent possible if, in the case of disposal, those substances would not pose a serious obstacle to fishing or navigation after being disposed of.

Convention internationale de 2001 sur le contrôle des systèmes antisalissure nuisibles sur les navires

Article 4

(1)        Conformément aux prescriptions spécifiées à l’annexe 1, chaque Partie interdit et/ou limite :

a)         l’application, la réapplication, l’installation ou l’utilisation de systèmes antisalissure nuisibles sur les navires visés aux alinéas a) ou b) de l’article 3 1); et

b)         l’application, la réapplication, l’installation ou l’utilisation de tels systèmes sur les navires visés à l’article 3 1) c) lorsqu’ils se trouvent dans un port, un chantier naval ou un terminal au large d’une Partie,

et prend des mesures effectives pour veiller à ce que ces navires satisfassent à ces prescriptions.

Article 4

(1)        In accordance with the requirements specified in Annex 1, each Party shall prohibit and/or restrict:

(a)        The application, re-application, installation, or use of harmful anti-fouling systems on ships referred to in article 3(1)(a)or(b); and

(b)        The application, re-application, installation or use of such systems, whilst in a Party’s port, shipyard, or offshore terminal, on ships to in article 3(1)(c).

and shall take effective measures to ensure that such ships comply with these requirements.

Règlement sur la pollution par les bâtiments et sur les produits chimiques dangereux, DORS/2012‑69

Composés organostanniques

127. (1) Le représentant autorisé d’un bâtiment veille à ce que celui-ci n’ait aucun système antisalissure contenant des composés organostanniques qui agissent en tant que biocides.

Organotin compounds

(127) (1) The authorized representative of a vessel must ensure that it does not have an anti-fouling system that contains any organotin compounds that acts as biocide.

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DoSSIER :

T-10-15

INTITULÉ :

LA SAVE HALKETT BAY MARINE PARK SOCIETY c LE MINISTRE DE L’ENVIRONNEMENT ET L’ARTIFICIAL REEF SOCIETY OF BRITISH COLUMBIA

LIEU DE L’AUDIENCE :

Vancouver (Colombie-Britannique)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 25 février 2015

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE EN CHEF

DATE DU JUGEMENT

ET DES MOTIFS :

Le 10 mars 2015

COMPARUTIONS :

Martin Peters

Rachel Barski

POUR LA DEMANDERESSE

Sheri Vegneau

Kristin McHale

Kate Bond

POUR LE DÉFENDEUR, LE MINISTRE DE L’ENVIRONNEMENT

Bryan Hicks

Malcolm Funt

pOUR LA DÉFENDERESSE, L’Artificial reef society of british columbia

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Martin Peters

Avocat

Vancouver (Colombie‑Britannique)

POUR LA DEMANDERESSE

William F. Pentney, c.r.

Sous‑procureur général du Canada

Ministère de la Justice

Vancouver (Colombie‑Britannique)

POUR LE DÉFENDEUR, LE MINISTRE DE L’ENVIRONNEMENT

Blake Cassels and Graydon LLP

Vancouver (Colombie‑Britannique)

pOUR LA DÉFENDERESSE, L’Artificial reef society of british columbia

 

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