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Date : 20150130


Dossier : T-1109-14

Référence : 2015 CF 117

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 30 janvier 2015

En présence de monsieur le juge Fothergill

ENTRE :

CAMERON SCOTT ROBINSON

demanderesse

et

AGENCE DU REVENU DU CANADA

défenderesse

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]               Cameron Scott Robinson (le demandeur) demande le contrôle judiciaire de la décision de l’Agence du revenu du Canada (ARC), prise conformément au paragraphe 220(3.1) de la Loi de l’impôt sur le revenu, LRC 1985, c 1 (5e suppl), de renoncer seulement partiellement aux intérêts et pénalités qu’il devait payer à l’égard de sa dette fiscale accumulée depuis 2000, alors qu’il cherchait à obtenir une annulation totale.

I.                   Contexte

[2]               Les problèmes du demandeur avec l’ARC ont commencé il y a environ 15 ans. Il a reconnu qu’il n’a pas produit aucune déclaration de revenus entre 2000 et 2005. Il a expliqué ce manquement en disant que les formalités administratives n’avaient jamais été son fort et qu’il n’avait pas eu beaucoup de revenus comme instructeur de conditionnement physique et massothérapeute. De plus, comme ses placements s’étaient avérés peu judicieux, il supposait qu’il ne devait aucun impôt.

[3]               En tant qu’instructeur de conditionnement physique et massothérapeute, le demandeur avait plusieurs sources de revenus. Aucun des établissements de santé qui avaient retenu ses services n’avait fait de déductions à la source, et c’est, selon le demandeur, la cause de ses problèmes. Ce n’est qu’en 2006, lorsque l’ARC l’a informé qu’il devait plus de 100 000 dollars, que le demandeur a retenu les services d’un comptable pour l’aider à régler la situation. Après plusieurs échanges avec l’ARC, la dette impayée du demandeur pour production tardive a été évaluée à environ 27 000 dollars, plus intérêts et pénalités.

[4]               Le demandeur a eu accident grave en 2012 : alors qu’il circulait à bicyclette, il a été frappé par une automobile. Il a été dans l’impossibilité de travailler pendant quatre mois, et il n’a toujours pas complètement récupéré. Il a perdu son emploi chez GoodLife Fitness parce qu’il n’était pas en mesure de travailler à temps plein. Il a informé la Cour que son médecin lui avait recommandé de ne pas travailler plus qu’à mi-temps. Le demandeur a d’autres dettes en souffrance et il verse également une pension alimentaire pour enfants pour son fils en bas âge.

[5]               Le demandeur a indiqué que ses placements s’élèvent à environ 60 000 dollars. Les mesures d’exécution prises par l’ARC ont limité son accès à ces fonds, mais l’avocat de la défenderesse a informé la Cour que l’ARC a maintenant levé toutes les restrictions relatives à l’utilisation de ces fonds par le demandeur.

[6]               En 2010, le demandeur a demandé à l’ARC de le libérer des intérêts et pénalités qu’il devait à l’égard de ses impôts impayés. Sa demande a été refusée. Il a présenté deux autres demandes en ce sens en 2012. Après de nombreux échanges entre le demandeur et l’ARC, cette dernière est parvenue à une décision le 11 avril 2014. C’est cette décision qui fait maintenant l’objet de la présente demande de contrôle judiciaire.

II.                La décision de l’ARC

[7]               Dans sa décision datée du 11 avril 2014, l’ARC a mentionné les points suivants :

a)      le demandeur n’est pas complètement rétabli de l’accident dont il a été victime;

b)      il a perdu son emploi chez GoodLife Fitness à cause de l’accident;

c)      pendant de nombreuses années, le demandeur a tenté, mais en vain, de régler des problèmes en lien avec ses impôts impayés;

d)     les problèmes médicaux et financiers actuels du demandeur ont considérablement réduit ses revenus;

e)      le demandeur a déjà manqué à ses obligations fiscales dans le passé, et toutes ses déclarations de revenus, à l’exception de celle de 2010, ont été produites en retard depuis 2000;

f)       le demandeur n’a pas fait état de circonstances particulières qui l’auraient empêché de produire ses déclarations de revenus à temps;

g)      le demandeur n’a pas fait preuve de diligence raisonnable dans la conduite de ses affaires et a, en toute connaissance de cause, laissé subsister un solde en souffrance.

[8]               L’ARC a annulé tous les intérêts dus sur l’arriéré jusqu’à la date de la décision sur la foi des renseignements financiers et médicaux fournis par le demandeur. Ces intérêts s’élevaient à environ 28 000 dollars. L’ARC a refusé de renoncer aux pénalités non acquittées, lesquelles s’élèvent à environ 10 000 dollars.

III.             Norme de contrôle

[9]               C’est le paragraphe 220(3.1) de la Loi de l’impôt sur le revenu qui confère à l’ARC son pouvoir de renonciation ou d’annulation à l’égard des intérêts et pénalités relatifs aux impôts sur le revenu d’une personne. La norme de contrôle applicable à une décision prise en vertu de ce paragraphe est celle de la décision raisonnable. La cour de révision doit déterminer si la décision appartient « aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » (Telfer c Agence du revenu du Canada, 2009 CAF 23, paragraphe 25, [2009] ACF no 71 (QL), citant Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 5, [2008] 1 R.C.S. 190, paragraphe 47).

Analyse

[10]           Le demandeur n’a relevé aucune question précise dont l’ARC n’aurait pas tenu compte lorsqu’elle a examiné sa demande d’annulation des intérêts et des pénalités. Il n’a pas non plus allégué qu’on lui avait refusé la possibilité de présenter sa preuve. Au contraire, l’examen du dossier confirme que le demandeur a fourni des renseignements détaillés à l’ARC. La décision comme telle est transparente et intelligible. Comme je l’ai mentionné précédemment, les motifs fournis par le demandeur à l’appui de sa position ont été résumés de façon fidèle dans la décision, et le demandeur a fini par avoir gain de cause dans sa demande d’annulation des intérêts relatifs à l’arriéré.

[11]           Le demandeur se plaint toutefois du fait que l’ARC n’a pas dûment tenu compte de ses difficultés financières et des mesures qu’il a prises en vue de corriger sa situation fiscale lorsqu’elle a refusé de renoncer aux pénalités pour production tardive. Je ne suis pas d’accord. Comme l’ARC l’a indiqué dans sa décision, le demandeur n’a pas mentionné de circonstances particulières qui l’auraient empêché de produire ses déclarations de revenus à temps. Le demandeur a dit à la Cour qu’il avait un diplôme en économie. Il s’agit d’un homme instruit, qui a beaucoup voyagé et qui travaille à son propre compte depuis de nombreuses années.

[12]           L’affirmation du demandeur selon laquelle il ne croyait pas avoir de dette fiscale au cours de la période allant de 2000 à 2005 ne justifie pas qu’il ait omis de produire ses déclarations de revenus, et il reconnaît qu’il s’agissait d’une erreur. Depuis 2006, il a bénéficié des services d’un comptable et il a aussi retenu les services d’une société de services financiers pour l’aider à gérer ses placements. Il n’a donné aucune explication pour son omission de produire des déclarations de revenus depuis 2006. Je note que sa déclaration de revenus relative à l’année 2010 a été produite à temps.

[13]           Je suis par conséquent convaincu que la décision de l’ARC d’accepter la demande d’annulation d’intérêts sur l’arriéré présentée par le demandeur, mais de refuser de renoncer aux pénalités relatives aux productions tardives, appartient aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

IV.             Dépens

[14]           La défenderesse a demandé qu’on lui adjuge les dépens de la demande. Effectivement, elle devrait normalement avoir droit aux dépens. Toutefois, dans la présente affaire, elle a demandé des prorogations de délai à deux reprises pour pouvoir déposer et signifier des documents conformément aux Règles des Cours fédérales, invoquant de simples oublis. Le non‑respect des Règles par la défenderesse a causé des retards et des désagréments tant au demandeur qu’à la Cour. À mon avis, il n’est pas indiqué en l’espèce d’adjuger des dépens.


JUGEMENT

LA COUR REJETTE la demande de contrôle judiciaire sans frais.

« Simon Fothergill »

Juge

Traduction certifiée conforme

Sandra de Azevedo, LL.B.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-1104-14

 

INTITULÉ :

CAMERON SCOTT ROBINSON c AGENCE DU REVENU DU CANADA

LIEU DE L’AUDIENCE :

TORONTO (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE:

LE 27 JANVIER 2015

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT:

LE JUGE FOTHERGILL

 

DATE DES MOTIFS :

LE 30 JANVIER 2015

 

COMPARUTIONS :

CAMERON SCOTT ROBINSON

 

POUR LE DEMANDEUR

(AGISSANT POUR SON PROPRE COMPTE)

 

SHARON LEE

 

POUR LA DÉFENDERESSE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

CAMERON SCOTT ROBINSON

Toronto, ON

 

POUR LE DEMANDEUR

(AGISSANT POUR SON PROPRE COMPTE)

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

 

POUR LA DÉFENDERESSE

 

 

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