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Date : 20140723


Dossier : IMM-803-14

Référence : 2014 CF 735

Ottawa (Ontario), le 23 juillet 2014

En présence de monsieur le juge Shore

ENTRE :

YOUSSEF BEN CHEIKH BRAHIM, SONIA GHALI ET SARAH BEN CHEIKH BRAHIM

demandeurs

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.                   Au préalable

[1]               La Cour estime, selon la transcription détaillée de l’audience à la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié [la SPR], que les demandeurs n’ont pas été privés d’une audience en français; plutôt, ils ont renoncé eux-mêmes à leur droit à un interprète en permettant à leur conseil de plaider en anglais pour une partie de sa plaidoirie comme les notes du conseil des demandeurs étaient en anglais et leur conseil voulait les transmettre en anglais.

II.                Introduction

[2]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire présentée par les demandeurs en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [LIPR], qui vise une décision de la SPR, datée le 28 janvier 2014, selon laquelle la demande de réouverture du dossier des demandeurs a été rejetée.

III.             Faits

[3]               Les demandeurs sont des citoyens de la Tunisie. Ils craignent d’être persécutés dans leur pays parce qu’ils sont chrétiens. Le demandeur principal s’est converti de l’islam au christianisme en 1999 et depuis ce temps aurait été harcelé et interrogé par la police à son emploi.

[4]               Pour sa part, sa conjointe, la demanderesse majeure, aurait vécu la persécution en tant qu’enseignante. Elle aurait subi l’isolement et des sanctions des parents et de l’école où elle travaillait pour avoir enseigné la foi chrétienne aux élèves.

[5]               Leur fille mineure aurait ainsi souffert à l’école en raison de sa foi chrétienne. Elle aurait eu à changer d’école plusieurs fois. Pour son bien-être psychologique, ses parents indiquent l’avoir envoyée au Canada en mai 2011. Ils sont ensuite venus la rejoindre au Canada en août 2011.

[6]               La famille a présenté une demande d’asile le 19 août 2011. Leur demande a été rejetée le 1er octobre 2013, pour le motif principal qu’il n’y avait pas suffisamment d’éléments de preuve établissant une possibilité sérieuse que les demandeurs soient exposés à un risque de persécution du fait de leurs croyances religieuses à leur retour en Tunisie. La SPR a conclu que la preuve documentaire démontrait que la situation actuelle en Tunisie était considérablement différente depuis le départ des demandeurs; les chrétiens pratiquent maintenant leur religion largement sans restrictions dans ce pays. La SPR a noté que bien que les demandeurs auraient peut-être fait l’objet de discrimination dans le passé, il avait peu de preuve qu’ils le seraient à l’avenir.

[7]               Suite à cette décision, les demandeurs ont déposé une demande de contrôle judiciaire. Ils ont ainsi déposé une demande de réouverture à la SPR, laquelle fut rejetée le 28 janvier 2014. Les demandeurs demandent maintenant à la Cour d’intervenir à l’égard de cette dernière décision pour les motifs qui suivent :

a)      La SPR a violé leur droit à une audience dans la langue de leur choix;

b)      La SPR a omis de tenir compte de toute la preuve au dossier;

c)      La SPR a erré dans la manière qu’elle a analysé le risque prospectif des demandeurs.

IV.             Analyse

[8]               Selon le défendeur, les deux dernières questions ne sont pas pertinentes en l’espèce, car elles n’ont pas rapport à un manquement aux principes de justice naturelle. La Cour est d’accord. Ces allégations n’ont aucunement trait à la justice naturelle; elles sont plutôt liées au caractère raisonnable de la décision. Les demandeurs tentent essentiellement de plaider les mêmes arguments que ceux déjà présentés dans le dossier IMM-7118-13 (2014 CF 734) devant cette Cour. Bref, les demandeurs sont en désaccord avec la façon dont la SPR a tenu compte de la preuve et la façon dont elle a analysé leur demande d’asile. La Cour ne peut pas intervenir pour ni un ni l’autre de ces motifs en l’espèce. L’article 62 des Règles de la Section de la protection des réfugiés, DORS/2012-256, indique clairement que la SPR ne peut rouvrir une demande d’asile que si un demandeur démontre qu’il y a eu un manquement aux principes de justice naturelle (Lakhani c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2006 CF 612; Ali c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 1153, 228 FTR 226).

[9]               En ce qui a trait à la question de la langue de l’audience, la Cour estime, selon la transcription détaillée de l’audience à la SPR, que les demandeurs n’ont pas été privés d’une audience en français; plutôt, ils ont renoncé eux-mêmes à leur droit à un interprète en permettant à leur conseil de plaider en anglais pour une partie de sa plaidoirie comme les notes du conseil des demandeurs étaient en anglais et leur conseil voulait les transmettre en anglais. La SPR n’avait aucune obligation de demander aux demandeurs s’ils voulaient un interprète à ce moment ou de les solliciter à renoncer expressément à leur droit à un interprète. Cette Cour a clairement statué qu'une partie peut renoncer implicitement aux droits linguistiques qui lui sont accordés par la Loi sur les langues officielles, LR (1985), c 31 (4e suppl)) (voir la décision Taire c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2003 CF 877).

V.                Conclusion

[10]           Pour toutes les raisons ci-dessus, la demande de contrôle judiciaire des demandeurs est rejetée.


JUGEMENT

LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire des demandeurs soit rejetée sans aucune question d’importance générale à certifier.

« Michel M.J. Shore »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-803-14

 

INTITULÉ :

YOUSSEF BEN CHEIKH BRAHIM, SONIA GHALI ET SARAH BEN CHEIKH BRAHIM c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 17 juillet 2014

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE SHORE

 

DATE DES MOTIFS :

LE 23 JUILLET 2014

 

COMPARUTIONS :

Claudia Andrea Molina

 

Pour les demandeurs

 

Mario Blanchard

 

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Cabinet Molina Inc.

Avocats

Montréal (Québec)

 

Pour les demandeurs

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)

 

Pour le défendeur

 

 

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