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Date : 20141219


Dossier : T-1174-14

Référence : 2014 CF 1242

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 19 décembre 2014

En présence de monsieur le juge Boswell

ENTRE :

JACQUES VERT GROUP LIMITED

demanderesse

et

YM INC. (SALES)

défenderesse

JUGEMENT ET MOTIFS

I.                   Le contexte et la nature de l’instance

[1]               Le 23 août 1991, Planet Fashion Limited a fait enregistrer le mot « PLANET » en tant que marque de commerce visant les marchandises suivantes : [traduction« [m]anteaux, imperméables, blazers, pantalons, chemisiers, jupes, tailleurs, vestes, gilets en tricot, cardigans, chandails, pull-overs, foulards, ceintures (à vocation vestimentaire), pour femmes et filles ». Le 21 décembre 2007, Planet Fashion Limited a cédé son enregistrement de marque de commerce concernant le mot « PLANET » à Jacques Vert PLC (le prédécesseur en titre de la demanderesse).

[2]               Le 24 avril 2008, Jacques Vert PLC a présenté au registraire des marques de commerce une demande (no 641,981(1)) d’extension de son enregistrement de marque de commerce no LMC 387,969 concernant le mot « PLANET », comme suit :

[traduction]

Étendre l’état déclaratif des marchandises à l’égard desquelles la marque de commerce est enregistrée en vue d’inclure : bijoux et montres, sacs à main, sacs‑pochettes, sacs de soirée, portefeuilles et parapluies.

Étendre l’état déclaratif des services à l’égard desquels la marque de commerce est enregistrée en vue d’inclure la vente au détail de bijoux, montres, sacs à main, sacs‑pochettes, sacs de soirée, porte‑monnaie, portefeuilles, parapluies, tenues de cérémonie, complets‑vestons, articles vestimentaires et vêtements prêts‑à‑porter haute couture, costumes, gilets, chandails, chasubles, pull‑overs, foulards, châles, ceintures, chapeaux, chaussures de cérémonie, chaussures de soirée, chaussures de plage, chaussures de sport, pantoufles.

[3]               La défenderesse, qui avait fait enregistrer les mots « URBAN PLANET » en tant que marque de commerce visant des services de magasin d’habillement au détail, s’est opposée à la demande d’extension de l’enregistrement de la marque de commerce de la demanderesse au motif que la marque de commerce « PLANET » n’avait pas été utilisée à la date déclarée du premier emploi, qu’elle créait de la confusion avec « URBAN PLANET » et qu’elle n’avait pas un caractère distinctif.

[4]               L’affaire a été soumise à la Commission d’opposition des marques de commerce [la Commission], dont les membres ont le pouvoir délégué, en application du paragraphe 63(3) de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T‑13 [la Loi], de trancher des procédures d’opposition pour le registraire des marques de commerce [le registraire]. Dans une décision datée du 25 février 2014, la Commission a refusé de faire droit à la demande d’extension de la marque de commerce « PLANET » de la demanderesse (voir : 2014 COMC 42).

[5]               La demanderesse interjette maintenant appel de la décision de la Commission en vertu des paragraphes 56(1) et 63(4) de la Loi par la voie d’une demande présentée à la Cour en vertu de l’alinéa 300d) des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106 (les Règles).

[6]               La demanderesse sollicite, notamment, une ordonnance infirmant la décision de la Commission et faisant droit à la demande no 641,981(1). Même si l’avis de demande de la demanderesse a été dûment signifié le 16 mai 2014 à la défenderesse, cette dernière n’a pas déposé d’avis de comparution en vertu de l’article 305 des Règles et elle n’a pas contesté le présent appel pas plus qu’elle n’y a comparu.

II.                Les questions en litige

[7]               En appel, la demanderesse a présenté avec son dossier de demande des preuves qui n’avaient pas été soumises à la Commission et elle a soulevé diverses questions qu’il est possible de résumer comme suit :

a)      Les nouvelles preuves de la demanderesse sont-elles admissibles?

b)      Quelle est la norme de contrôle applicable?

c)      Le mot « PLANET » crée-t-il de la confusion avec les mots « URBAN PLANET »?

d)     La marque « PLANET » a-t-elle un caractère distinctif?

e)      Est-il nécessaire d’évaluer les motifs d’opposition que la Commission a rejetés?

III.             La décision de la Commission

[8]               Après avoir résumé le contexte de la présente affaire et tranché quelques questions d’ordre préliminaire, la Commission a fait remarquer qu’il incombait à la demanderesse d’établir que sa demande d’extension de son enregistrement de marque de commerce était conforme aux exigences de la Loi, mais qu’il fallait tout d’abord que la défenderesse produise suffisamment de preuves pour étayer ses motifs d’opposition à la demande de la demanderesse. La Commission a ensuite entrepris d’évaluer les divers motifs d’opposition que la défenderesse a soulevés.

[9]               La Commission a rejeté l’argument de la défenderesse selon lequel la demanderesse ne s’était pas conformée à l’alinéa 30b) de la Loi. Même si la défenderesse a fait valoir que la demanderesse n’avait pas employé la marque en liaison avec les marchandises et les services visés par la demande d’extension, la seule preuve qu’elle a fournie à cet égard était une recherche dans Internet que la Commission a jugée insuffisante pour s’acquitter de son fardeau de preuve.

[10]           La Commission a ensuite examiné si la marque « PLANET » créait de la confusion avec la marque « URBAN PLANET ». Après avoir énoncé le critère applicable, la Commission a fait remarquer que le paragraphe 6(5) de la Loi l’obligeait à prendre en compte plusieurs facteurs : a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues, b) la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage, c) le genre de marchandises, de services ou d’entreprises, d) la nature du commerce, et e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce.

[11]           En analysant ces facteurs, la Commission a fait remarquer que les marques des deux parties possédaient toutes deux un certain caractère distinctif inhérent car ni l’une ni l’autre ne décrivait les marchandises ou les services qu’elle visait et, somme toute, « URBAN PLANET » avait un caractère un peu moins distinctif car le mot « urban » (urbain) dénotait un style urbain ou inspiré de la mode urbaine. Cependant, la Commission s’est dite convaincue par la preuve de la défenderesse que la marque « URBAN PLANET » était devenue bien connue dans l’ensemble du Canada et que, comme la demanderesse n’avait présenté aucune preuve sur l’emploi de sa marque de commerce, les alinéas 6(5)a) et 6(5)b) de la Loi favorisaient la défenderesse.

[12]           En ce qui concerne les alinéas 6(5)c) et 6(5)d) de la Loi, la Commission a conclu que les marchandises et les services des parties étaient différents, du moins dans la mesure où les services visés par la demande de la demanderesse incluaient la vente au détail de chaussures, et que les autres marchandises et services étaient liés mais non identiques. Même si la demanderesse faisait valoir que les voies de commercialisation étaient différentes puisqu’elle vendait ses propres produits de marque et que la défenderesse ne vendait que des produits de tiers, elle n’avait présenté aucune preuve à cet égard et la Commission a donc présumé que les voies de commercialisation se recoupaient.

[13]           La Commission a de plus conclu que l’alinéa 6(5)e) de la Loi favorisait lui aussi la défenderesse. Tout en reconnaissant que le premier mot est souvent l’élément le plus important d’une marque, elle a jugé que le mot « URBAN » évoquait un style vestimentaire et n’était pas l’élément le plus frappant ou le plus unique de la marque de la défenderesse. Considérant la marque de la défenderesse dans sa totalité, la Commission a conclu que le mot « PLANET » était l’élément le plus frappant ou le plus unique de la marque de la défenderesse et, étant donné que le mot « PLANET » était le seul élément de la marque de la demanderesse, il existait une grande ressemblance entre les marques.

[14]           Pour conclure que le motif d’opposition invoqué par la défenderesse en vertu de l’alinéa 12(1)d) de la Loi était retenu, la Commission a rejeté divers arguments invoqués par la demanderesse pour démontrer l’absence de confusion. Elle a déclaré que même si la demanderesse avait fait valoir que les marques n’étaient pas source de confusion car l’examinateur de marques de commerce n’avait pas cité la marque « PLANET » lors de l’examen de la marque « URBAN PLANET », elle n’était pas liée par les décisions de la Section de l’examen de l’Office de la propriété intellectuelle du Canada. L’argument de la demanderesse selon lequel les marques coexistaient depuis des années sans confondre qui que ce soit a été rejeté par la Commission car la demanderesse n’avait pas prouvé que la marque « PLANET » avait été employée au Canada dans une mesure importante. En réponse à l’argument additionnel de la demanderesse selon lequel les marchandises et les services visés par la demande d’extension pouvaient être considérés comme le prolongement naturel des marchandises déjà visées et amoindrir ainsi toute confusion, la Commission a fait remarquer que la demanderesse n’avait pas automatiquement droit à l’extension.

[15]           Quant aux motifs d’opposition restants, la Commission a déclaré que, comme elle avait conclu à une probabilité de confusion entre les marques respectives des parties, cette conclusion dictait le même résultat pour les autres motifs d’opposition. Elle a donc rejeté la demande d’extension de la marque de commerce de la demanderesse.

IV.             Les observations des parties

A.                Les observations de la demanderesse

[16]           Bien qu’elle ait choisi de ne pas produire d’éléments de preuve devant la Commission, la demanderesse soutient que le paragraphe 56(5) de la Loi l’autorise à présenter de nouveaux éléments de preuve dans le présent appel et c’est ce qu’elle a fait. Ces éléments, présentés par la voie d’affidavits, comprennent des copies imprimées des pages Web officielles de La Baie et d’Urban Planet, qui, soutient la demanderesse, sont admissibles (invoquant la décision ITV Technologies Inc. c WIC Television Ltd, 2003 CF 1056, aux paragraphes 16 à 18, 29 CPR (4th) 182 [ITV]), ainsi que des déclarations de deux directeurs nationaux de la demanderesse au sujet de l’emploi et des ventes des vêtements et des accessoires produits et vendus sous la marque « PLANET » dans des boutiques situées dans des points de vente de la Compagnie de la Baie d’Hudson d’un bout à l’autre du Canada.

[17]           La demanderesse déclare que, bien que les décisions de la Commission soient habituellement contrôlées selon la norme de la raisonnabilité, ce n’est pas le cas lorsque des éléments de preuve nouveaux ou additionnels qui auraient sensiblement influencé les conclusions de fait de la Commission ou l’exercice de son pouvoir discrétionnaire sont produits; cela étant le cas dans le présent appel, la norme de contrôle qui s’applique à la décision de la Commission est la décision correcte (citant la décision Scott Paper Ltd c Georgia-Pacific Consumer Products LP, 2010 CF 478, 83 CPR (4th) 273 [Scott]).

[18]           La demanderesse soutient qu’au vu de ces nouveaux éléments de preuve il ne peut y avoir aucune confusion entre les mots « PLANET » et « URBAN PLANET ». Elle souscrit à la décision de la Commission selon laquelle les deux marques ont un caractère distinctif inhérent, mais elle soutient que cette dernière a commis une erreur en concluant que les mots « URBAN PLANET » avaient acquis un caractère plus distinctif en étant devenus bien connus. Elle est d’avis que la preuve maintenant soumise à la Cour montre que la marque « PLANET » a acquis un caractère distinctif important et en usage au Canada depuis 1999 au moins et que, de ce fait, les facteurs énoncés aux alinéas 6(5)a) et 6(5)b) de la Loi ne favorisent ni l’une ni l’autre des parties.

[19]           La demanderesse allègue aussi que tant la nature des marchandises et des services que les voies de commercialisation dénotent que sa marque « PLANET » ne crée pas de confusion avec la marque « URBAN PLANET ». La défenderesse, déclare-t-elle, ne vend que des produits de tiers destinés à une clientèle jeune et sensible aux tendances, et ce, à des prix nettement inférieurs à ceux des produits de marque de la demanderesse, tandis que les produits « PLANET » sont vendus dans les propres boutiques de la demanderesse, à une clientèle plus mûre et de type professionnel. Il s’agit là, selon elle, de marchés distincts au sein de l’industrie de la mode, un aspect qui atténue le risque d’une confusion quelconque.

[20]           La demanderesse déclare par ailleurs que la Commission a commis une erreur en concluant que les marques se ressemblent beaucoup et qu’elle n’aurait pas dû disséquer le terme « URBAN PLANET » en mettant l’accent sur le second mot, d’autant plus que le premier mot d’une marque est habituellement le plus important.

[21]           La demanderesse soutient qu’il ressort maintenant des éléments de preuve soumis à la Cour que les marques coexistent depuis de nombreuses années sans aucune preuve de confusion. De plus, la marque « URBAN PLANET » a été déposée en 2005, en dépit du fait que la marque « PLANET » est inscrite au registre depuis 1991; elle soutient que si le registraire n’a pas considéré que les marques créaient de la confusion en 2005, elles n’en créent pas aujourd’hui.

[22]           Quant au motif d’opposition que constitue l’absence de droit à l’enregistrement, la demanderesse est d’avis que la Commission a conclu à tort que la défenderesse s’était acquittée du fardeau que lui impose l’alinéa 16(1)a) de la Loi car la date pertinente à prendre en considération était la date de premier emploi revendiquée par la demanderesse, une date nettement antérieure à celle à laquelle la défenderesse a commencé à utiliser sa marque « URBAN PLANET » au Canada. Quoi qu’il en soit, la demanderesse ajoute qu’étant donné qu’il n’existe aucun risque de confusion, la Commission aurait dû rejeter ce motif d’opposition.

[23]           Pour ce qui est du motif d’opposition que constitue l’absence de caractère distinctif, la demanderesse déclare que la décision de la Commission à cet égard était inexacte car elle aussi était fondée sur l’existence d’une confusion.

[24]           Pour ces motifs, soutient la demanderesse, elle est en droit d’étendre sa marque « PLANET » afin qu’elle vise les marchandises et les services additionnels.

B.                 Les observations de la défenderesse

[25]           Même si elle a été avisée du présent appel le 16 mai 2004, la défenderesse n’a pas déposé d’avis de comparution en vertu de l’article 305 des Règles, pas plus qu’elle n’est intervenue après que l’ordonnance fixant l’audition de la présente affaire lui a été télécopiée le 16 juillet 2014. L’appel s’est donc déroulé sans contestation.

V.                L’analyse

A.                Les nouvelles preuves de la demanderesse sont-elles admissibles?

[26]           Bien qu’un appel interjeté en vertu du paragraphe 56(1) de la Loi se déroule à bien des égards comme un contrôle judiciaire, le paragraphe 56(5) de la Loi dispose :

56. […] (5) Lors de l’appel, il peut être apporté une preuve en plus de celle qui a été fournie devant le registraire, et le tribunal peut exercer toute discrétion dont le registraire est investi.

56. … (5) On an appeal under subsection (1), evidence in addition to that adduced before the Registrar may be adduced and the Federal Court may exercise any discretion vested in the Registrar.

La Cour d’appel fédérale a conclu que cette disposition autorise une partie à déposer une preuve même si elle n’en a produit aucune devant la Commission (voir : Fondation canadienne des tumeurs cérébrales c Fondation Starlight, 2001 CAF 36, aux paragraphes 3 à 6, 11 CPR (4th) 172). Le droit est clair : la preuve par affidavit de la demanderesse peut être prise en considération pour les besoins du présent appel.

[27]           De plus, la Cour a parfois admis en preuve des documents tirés de sites Web officiels d’entreprises (ITV, aux paragraphes 16 à 18), mais pas nécessairement comme preuve de leur contenu (ITV, au paragraphe 12). En fait, même si la Cour d’appel fédérale a confirmé le jugement de première instance dans ITV, elle a expressément refusé de se prononcer sur la question de savoir si la preuve issue d’Internet était admissible (ITV Technologies Inc. c WIC Television Ltd, 2005 CAF 96, aux paragraphes 29 à 31, 251 DLR (4th) 208).

[28]           En l’espèce, Mme Roberts a joint à son affidavit, en tant que pièces, quelques imprimés de pages Web tirés d’Internet pour justifier ses observations personnelles selon lesquelles les marchandises de la marque « PLANET » sont plus coûteuses que celles qui sont vendues dans les magasins « URBAN PLANET ». Ces observations n’ont été contredites par aucune autre preuve soumise à la Cour, et je conclus donc, sans tenir compte des imprimés de pages Web eux‑mêmes, que, d’après les observations de Mme Roberts, les marchandises vendues dans les magasins « URBAN PLANET » affichaient des prix inférieurs à ceux des marchandises vendues dans les boutiques « PLANET ». Il est inutile d’analyser plus en détail l’admissibilité des imprimés de pages Web.

B.                 Quelle est la norme de contrôle applicable?

[29]           Même si de nouveaux éléments de preuve peuvent être présentés, un appel interjeté en vertu du paragraphe 56(1) de la Loi n’est pas un nouveau procès puisqu’il faut également prendre en considération les documents qui ont été soumis à la Commission. Il est donc nécessaire de déterminer la norme de contrôle qui s’applique.

[30]           Dans l’arrêt Brasseries Molson c John Labatt Ltée, [2000] 3 RCF 145, au paragraphe 51, 5 CPR (4th) 180 (CA), le juge Rothstein a écrit :

Compte tenu de l'expertise du registraire, et en l'absence de preuve supplémentaire devant la Section de première instance, je considère que les décisions du registraire qui relèvent de son champ d'expertise, qu'elles soient fondées sur les faits, sur le droit ou qu'elles résultent de l'exercice de son pouvoir discrétionnaire, devraient être révisées suivant la norme de la décision raisonnable simpliciter. Toutefois, lorsqu'une preuve additionnelle est déposée devant la Section de première instance et que cette preuve aurait pu avoir un effet sur les conclusions du registraire ou sur l'exercice de son pouvoir discrétionnaire, le juge doit en venir à ses propres conclusions en ce qui concerne l'exactitude de la décision du registraire.

Le passage qui précède a été reconnu par la Cour suprême du Canada comme conforme à l’approche qu’elle a suivie dans l’arrêt Mattel, Inc. c 3894207 Canada Inc., 2006 CSC 22, au paragraphe 41, [2006] 1 RCS 772 [Mattel], et il a aussi été suivi par la Cour fédérale et la Cour d’appel fédérale à la suite de l’arrêt Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 RCS 190 (voir, p. ex. : Iwasaki Electric Co Ltd c Hortilux Schreder BV, 2012 CAF 321, au paragraphe 2, 442 NR 310; et Scott, aux paragraphes 42 à 44).

[31]           Je conviens avec la demanderesse que la preuve maintenant présentée à la Cour aurait eu une incidence importante sur la décision de la Commission. La principale question dont la Commission était saisie était la confusion entre les marques, et cette dernière a expressément fondé un grand nombre de ses conclusions sur le fait qu’il n’y avait aucune preuve de la part de la demanderesse pour réfuter les objections de la défenderesse. En particulier, l’absence de preuve que la demanderesse avait employé la marque « PLANET » a amené la Commission à tirer les conclusions suivantes : « URBAN PLANET » avait acquis un caractère plus distinctif que « PLANET », la marque « URBAN PLANET » était employée depuis plus longtemps que celle de la demanderesse, et les voies de commercialisation se recouperaient.

[32]           La demanderesse a maintenant présenté une preuve importante au sujet de questions dont la Commission n’était pas au courant et cette preuve aurait eu une incidence importante sur la manière dont la Commission a évalué les facteurs énoncés au paragraphe 6(5) de la Loi. En conséquence, il n’y a pas lieu de faire preuve de retenue à l’égard des conclusions de la Commission et de sa décision de rejeter la demande de la demanderesse concernant l’extension de sa marque de commerce.

C.                 Le mot « PLANET » crée-t-il de la confusion avec les mots « URBAN PLANET »?

[33]           L’opposant à une marque de commerce proposée, comme la défenderesse en l’espèce, a le fardeau de prouver que les motifs d’opposition sont étayés avant qu’un demandeur ait le fardeau légal de prouver que sa revendication à l’égard d’une marque de commerce est engagée (voir : John Labatt c Molson Co (1990), 36 FTR 70, au paragraphe 11, 30 CPR (3d) 293, conf. par (1992), 144 NR 318, 42 CPR (3d) 495 [Labatt]; et voir : Christian Dior, SA c Dion Neckwear Ltd, 2002 CAF 29, aux paragraphes 10 et 11, [2002] 3 RCF 405). Même si ce fardeau de preuve est léger (voir : Loblaws Inc. c Telecombo Inc., 2006 CF 634, au paragraphe 36, 292 FTR 272), l’opposant doit quand même présenter une preuve suffisante à partir de laquelle il est possible de conclure raisonnablement que les faits allégués à l’appui d’un motif d’opposition existent (voir : République de Chypre (Industrie et Commerce) c International Cheese Council of Canada, 2011 CAF 201, au paragraphe 26, 93 CPR (4th) 255, citant Labatt, au paragraphe 13).

[34]           La demanderesse a soutenu devant la Commission qu’elle employait le mot « PLANET » depuis au moins 1997 au Canada pour marquer les marchandises et les services visés dans sa demande. Selon la preuve soumise à la Commission, la première boutique utilisant la bannière « URBAN PLANET » avait ouvert ses portes au Centre Eaton à Toronto le 7 juillet 1998 et la marque « URBAN PLANET » n’avait fait l’objet d’une demande que le 4 juin 2004. La Commission a conclu que la défenderesse ne s’était pas acquittée de son fardeau de montrer que la marque de la demanderesse n’avait pas été employée en liaison avec les marchandises et les services visés par la demande depuis 1997, et elle a conclu (au paragraphe 25 de sa décision) qu’« on ne peut donc pas présumer que la Requérante [la demanderesse en l’espèce] n’a pas employé sa Marque en liaison avec les marchandises ou services visés par la demande ». Je souscris à la conclusion de la Commission à cet égard.

[35]           Cependant, la Commission a conclu que la défenderesse s’était acquittée de son fardeau de preuve initial pour ce qui était de son opposition au fait que l’extension de la marque que proposait la demanderesse n’était pas enregistrable car elle créait de la confusion avec la marque de la défenderesse. Elle a également conclu qu’étant donné qu’il y avait un risque raisonnable de confusion entre la marque de la demanderesse et celle de la défenderesse, il y avait lieu de rejeter la demande de la demanderesse en vue d’une extension de l’état déclaratif des marchandises et des services visés par sa marque.

[36]           Compte tenu de la preuve nouvelle et additionnelle dont la Cour est maintenant saisie, je ne suis pas d’accord. J’estime qu’il n’y a pas de risque raisonnable de confusion entre « URBAN PLANET » et l’extension proposée de la marque « PLANET » de la demanderesse.

[37]           Aux termes de l’alinéa 12(1)d) de la Loi, une marque de commerce est enregistrable sauf si « elle crée de la confusion avec une marque de commerce déposée ». La date importante par rapport à laquelle cette confusion doit être évaluée est la date de la décision (voir : Park Avenue Furniture Corp c Wickes/Simmons Bedding Ltd (1991), 37 CPR (3d) 413, à la page 422, 130 NR 223 (CAF)) et, la Cour étant maintenant saisie d’une nouvelle preuve importante, cette date devrait être celle de la décision de la Cour (voir : Compagnie de la Baie d’Hudson c Anonim Sirketi, 2013 CF 124, au paragraphe 28, 109 CPR (4th) 211).

[38]           Aux termes du paragraphe 6(2) de la Loi, une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce si elle est « susceptible de faire conclure que les produits liés à ces marques de commerce sont fabriqués, vendus, donnés à bail ou loués, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces produits ou ces services soient ou non de la même catégorie générale ». Dans l’arrêt Masterpiece Inc. c Alavida Lifestyles Inc, 2011 CSC 27, au paragraphe 40, [2011] 2 RCS 387 [Masterpiece], la Cour suprême du Canada a énoncé la démarche suivante :

Le critère applicable est celui de la première impression que laisse dans l’esprit du consommateur ordinaire plutôt pressé la vue [de la marque], alors qu’il n’a qu’un vague souvenir des marques de commerce [antérieures] et qu’il ne s’arrête pas pour réfléchir à la question en profondeur, pas plus que pour examiner de près les ressemblances et les différences entre les marques.

[39]           De plus, le paragraphe 6(5) de la Loi exige que l’on prenne en compte la totalité des circonstances de l’affaire en vue de décider si des marques de commerce créent de la confusion :

6. […](5) En décidant si des marques de commerce ou des noms commerciaux créent de la confusion, le tribunal ou le registraire, selon le cas, tient compte de toutes les circonstances de l’espèce, y compris :

 

6. ...(5) In determining whether trade-marks or trade-names are confusing, the court or the Registrar, as the case may be, shall have regard to all the surrounding circumstances including

a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce ou noms commerciaux, et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus;

 

(a) the inherent distinctiveness of the trade-marks or trade-names and the extent to which they have become known;

b) la période pendant laquelle les marques de commerce ou noms commerciaux ont été en usage;

 

(b) the length of time the trade-marks or trade-names have been in use;

c) le genre de marchandises, services ou entreprises;

 

(c) the nature of the wares, services or business;

d) la nature du commerce;

 

(d) the nature of the trade; and

e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’ils suggèrent.


(e) the degree of resemblance between the trade-marks or trade-names in appearance or sound or in the ideas suggested by them.

[40]           Alinéa 6(5)a) : caractère distinctif et notoriété – Je conviens avec la Commission que les deux marques ont un caractère distinctif inhérent, et ce, pour la même raison. Toutes deux sont arbitraires et ni l’une ni l’autre ne décrit ou ne dénote logiquement les marchandises et les services qu’elles visent. Je souscris également à la conclusion de la Commission (au paragraphe 32 de sa décision) que la marque « URBAN PLANET » est devenue très bien connue dans l’ensemble du Canada.

[41]           Cependant, contrairement à la Commission, la Cour dispose maintenant d’une preuve que la marque « PLANET » est, elle aussi, devenue connue au Canada. Selon les affidavits de deux des directeurs nationaux de la demanderesse, des produits portant la marque « PLANET » sont vendus dans des boutiques situées dans 50 points de vente de La Baie dans sept provinces et, depuis 2009, les ventes annuelles de ces produits sont supérieures à 32 millions de dollars. L’affidavit de Mme Roberts indique en outre que le nom de la marque « PLANET » est affiché à l’intérieur de la boutique du magasin La Baie d’Ottawa, c’est-à-dire au mur et sur les cintres, et que le sac dans lequel sont déposés les achats portent la mention de la marque. Au vu de cette preuve, je conclus que la marque « PLANET » est elle aussi devenue connue au Canada.

[42]           Alinéa 6(5)b) : période d’usage – J’admets que les marques respectives de la demanderesse et de la défenderesse sont en usage depuis à peu près la même période, en ce sens que la défenderesse a ouvert sa première boutique « URBAN PLANET » à Toronto en 1998 et que des boutiques « PLANET » sont exploitées depuis au moins 1999.

[43]           Alinéa 6(5)c) : genre de produits et de services – Tant la marque « URBAN PLANET » que l’extension de la marque de la demanderesse que vise la demande englobent la vente au détail de services vestimentaires. Même si la marque « URBAN PLANET » ne vise pas de marchandises, le consommateur ordinaire pourrait associer les services au détail d’une boutique de vêtements à des marchandises marquées de la même façon. Ce facteur dénote que les marques sont susceptibles de créer de la confusion dans l’esprit du consommateur ordinaire plutôt pressé, mais, pour les raisons mentionnées ci-après, ce facteur à lui seul, selon moi, n’est pas suffisant pour rejeter la demande de la demanderesse.

[44]           Alinéa 6(5)d) : nature du commerce – Il n’y a aucune preuve que la défenderesse vend des produits ou des marchandises sur lesquelles figure sa marque de commerce; en fait, la Cour dispose d’une preuve que la défenderesse ne vend que des produits ou des marchandises de tiers. Par contraste, il ressort nettement de la preuve que les produits de marque « PLANET » sont vendus exclusivement dans les propres boutiques de la demanderesse, lesquelles sont situées dans des magasins de La Baie. De plus, les fourchettes de prix des produits ou des marchandises que vend chaque partie sont sensiblement différentes; en général, les produits de la marque « PLANET » coûtent nettement plus cher que les produits vendus dans les boutiques « URBAN PLANET ». Il a été conclu que ces sortes de différences amoindrissent le risque de confusion (voir, p. ex. : Hermès SA c Fletcher Golf Enterprises Ltd (1984), 78 CPR (2d) 134, à la page 146, [1984] ACF no 29 (QL) (CF 1re inst.).

[45]           Le fait que les produits de chaque partie sont vendus dans des types de magasins différents et commercialisés auprès d’un type différent de client est un facteur important (voir : Mattel, au paragraphe 86), car un consommateur qui connaît bien les vêtements vendus dans une boutique « URBAN PLANET » ne les confondrait vraisemblablement pas avec des articles vestimentaires plus coûteux vendus dans une boutique « PLANET », située dans un magasin à rayons de La Baie. De plus, il n’existe aucune preuve que ces voies de commercialisation risquent de se recouper dans l’avenir rapproché. Comme l’a fait remarquer la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Alticor Inc. c Nutravite Pharmaceuticals Inc., 2005 CAF 269, au paragraphe 37, 257 DLR (4th) 60 :

La jurisprudence établit que l'examen des activités futures d'une entreprise ne devrait pas comprendre de spéculations sur de nouvelles activités possibles (voir Joseph E. Seagram & Sons Ltd. c. Registraire des marques de commerce (1990), 33 C.P.R. 454, (C.F. 1re inst.), à la page 46, Cochrane-Dunlop Hardware Ltd. c. Capital Diversified Industries Ltd. (1976), 30 C.P.R. (2d) 176 (C.A. Ont.), à la page 188). Il vaut mieux se fonder sur les circuits commerciaux effectivement utilisés au moment de l'examen des conclusions touchant le risque futur de confusion. [Non souligné dans l’original.]

[46]           Je suis conscient que l’usage présent ou réel d’une marque ne doit pas être pris en considération à l’exclusion des usages futurs que l’on pourrait faire dans le cadre d’un enregistrement. Après tout, « ce qui est en cause est ce que l’enregistrement permettrait [à la demanderesse] de faire, et non pas ce qu’elle fait actuellement » (Mattel, au paragraphe 53; Masterpiece, au paragraphe 53). Rien ne garantit que les produits « PLANET » seront toujours vendus exclusivement ou uniquement dans des boutiques de La Baie ou que la défenderesse vendra toujours des produits peu coûteux dans ses boutiques « URBAN PLANET ». Cependant, la Cour n’a en main aucune preuve dénotant que les voies de commercialisation actuelles changeront et, de ce fait, ce facteur étaye la demande de la demanderesse.

[47]           Alinéa 6(5)e) : degré de ressemblance entre les marques – Il s’agit souvent du facteur le plus important quand on évalue le risque de confusion entre des marques de commerce (Masterpiece, au paragraphe 49). La demanderesse conteste le fait que la Commission ait [traduction] « disséqué » la marque de la défenderesse (voir le paragraphe 40 de la décision de la Commission) et mette indûment l’accent sur le mot « planet » pour conclure qu’« il existe une ressemblance considérable entre les marques dans la présentation, dans le son et dans les idées qu’elles suggèrent ». La demanderesse soutient que le premier mot est habituellement le plus important (voir : Conde Nast Publications Inc. c Union des éditions modernes (1979), 46 CPR (2d) 183, à la page 188, [1979] ACF no 801 (QL) (CF 1re inst.)), et que la Commission a commis une erreur en concluant que le mot « URBAN » n’était pas la caractéristique la plus frappante ou la plus unique de la marque de la défenderesse. Dans l’arrêt Masterpiece, au paragraphe 64, la Cour suprême a déclaré : « [i]l est vrai que dans certains cas le premier mot sera l’élément le plus important pour établir le caractère distinctif d’une marque de commerce, mais j’estime qu’il est préférable de se demander d’abord si l’un des aspects de celle‑ci est particulièrement frappant ou unique. »

[48]           À mon avis, les deux mots qui composent la marque « URBAN PLANET » sont frappants. Je ne crois pas que le mot « URBAN » domine le mot « PLANET », ou vice‑versa. Les deux mots réunis confèrent à la marque de la défenderesse son caractère unique ou sa saveur, évoquant ainsi l’image d’une ville ou d’une zone urbaine de grande taille s’étalant sur l’ensemble d’une planète ou d’un monde. Par contraste, le mot « PLANET », dans la marque de la demanderesse, n’est modifié par aucun adjectif, ce qui évoque donc une image d’espace, la terre ou une autre planète au sein de l’univers. Ces images sont différentes et, selon moi, elles dénotent des styles vestimentaires différents. Certes le son des deux marques est quelque peu semblable, mais uniquement dans la mesure où toutes deux sont ancrées par le même substantif : « planet ».

[49]           Autres circonstances pertinentes – La demanderesse demande à la Cour de tirer une conclusion défavorable de l’absence de toute confusion proprement dite entre sa marque et celle de la défenderesse. Dans l’arrêt Mattel, au paragraphe 55, la Cour suprême a déclaré qu’il est possible de tirer une telle conclusion dans des circonstances où la preuve d’une confusion réelle « pourrait facilement être obtenue si l’allégation de probabilité de confusion était justifiée ».

[50]           Dans le cas présent, il y a lieu de tirer une telle conclusion défavorable. Il ressort de la preuve que les marques coexistent au Canada depuis presque le début de leur existence. Les parties ont un nombre comparable de points de vente au détail qui se recoupent géographiquement : la défenderesse possédait 86 boutiques en 2009, tandis que la demanderesse en a environ 50 en 2014. De plus, il n’y a aucune preuve qu’au sein du marché un consommateur ait jamais confondu les services et les marchandises de la demanderesse et ceux de la défenderesse ou d’un tiers quelconque. En conséquence, en l’absence d’une preuve qu’un consommateur quelconque a été confondu par la marque « PLANET », je conclus qu’un consommateur ordinaire ne le serait pas non plus.

[51]           La demanderesse a fait valoir aussi qu’il est pertinent que sa marque originale ait fait l’objet d’une demande en 1989 et qu’elle ait été déposée en 1991, plusieurs années avant que la défenderesse commence à employer sa marque « URBAN PLANET ». Le fait que la défenderesse ait obtenu sa marque en 2005 dénote, selon la demanderesse, que le registraire n’a pas considéré que les marques créaient de la confusion à cette époque, et il devrait en être autant aujourd’hui. Les conclusions antérieures du registraire peuvent être une circonstance pertinente, mais elles ne lient pas la Commission ou la Cour (Masterpiece, au paragraphe 112).

[52]           Au vu de ce qui précède, je suis persuadé qu’un consommateur ordinaire plutôt pressé ne déduirait vraisemblablement pas que les marchandises et les services vendus sous la marque « PLANET » sont fournis par la même personne qui se sert de la marque « URBAN PLANET ». Les deux marques ne créent pas de confusion et, de ce fait, les motifs d’opposition que la défenderesse fonde sur l’alinéa 12(1)d) et le paragraphe 16(1) de la Loi sont rejetés.

D.                La marque « PLANET » a-t-elle un caractère distinctif?

[53]           Aux termes de l’alinéa 38(2)d) de la Loi, il est possible de faire opposition à une marque de commerce en se fondant sur le fait qu’elle n’est pas distinctive. L’article 2 de la Loi définit le mot « distinctive » de la manière suivante :

2. Les définitions qui suivent s’appliquent à la présente loi.

 

2. In this Act,

[…]

 

« distinctive » Relativement à une marque de commerce, celle qui distingue véritablement les marchandises ou services en liaison avec lesquels elle est employée par son propriétaire, des marchandises ou services d’autres propriétaires, ou qui est adaptée à les distinguer ainsi.

“distinctive”, in relation to a trade-mark, means a trade-mark that actually distinguishes the wares or services in association with which it is used by its owner from the wares or services of others or is adapted so to distinguish them;

[54]           L’absence de caractère distinctif s’évalue à la date du dépôt de la déclaration d’opposition (voir : Metro-Goldwyn-Mayer Inc. c Stargate Connections Inc., 2004 CF 1185, au paragraphe 25, 34 CPR (4th) 317). Dans le cas présent, la première déclaration d’opposition de la défenderesse a été déposée le 30 juin 2011.

[55]           Dans les observations écrites qu’elle a soumises à la Commission, la défenderesse a fait valoir qu’étant donné que Planet Fashions Limited avait été titulaire de la marque pendant 10 ans avant de la céder à Jacques Vert PLC (le prédécesseur en titre de la demanderesse), cette marque n’était pas distinctive de la demanderesse mais, plutôt, de Planet Fashions Limited. Cependant, la Commission a rejeté avec raison cet argument car la demande de la demanderesse avait été modifiée de manière appropriée de façon à inclure Planet Fashions Limited en tant que prédécesseur en titre de la demanderesse.

[56]           La seule raison pour laquelle la Commission a jugé que « PLANET » n’était pas distinctive est qu’elle a conclu que ce mot créait de la confusion avec « URBAN PLANET ». Compte tenu de la nouvelle preuve dont dispose maintenant la Cour et de mes motifs qui précèdent, je conclus que la marque de la demanderesse est distinctive et je rejette ce motif d’opposition invoqué par la défenderesse.

E.                 Est-il nécessaire d’évaluer les motifs d’opposition que la Commission a rejetés?

[57]           Je conviens avec la demanderesse qu’étant donné qu’aucun appel incident n’a été déposé et que la défenderesse n’a pas pris part à l’appel, la Cour ne devrait pas modifier les motifs d’opposition fondés sur l’alinéa 30b) que la Commission a rejetés.

VI.             La conclusion

[58]           La demanderesse sollicitait au départ les dépens afférents à son avis de demande, mais elle n’a pas présenté une telle demande à l’audition de la présente affaire, pas plus que dans son mémoire des faits et du droit. L’avocate de la demanderesse a déclaré qu’elle serait satisfaite d’une ordonnance de la Cour allant dans le sens du paragraphe 102 du mémoire de la demanderesse (où, incidemment, il n’y a pas de demande de dépens).

[59]           En conséquence, pour les motifs qui précèdent, l’appel est accueilli et il y a lieu d’autoriser l’extension de la marque de commerce LMC 387,969 que la demanderesse a demandée dans le cadre de la demande no 641,981(1). Aucune ordonnance n’est rendue quant aux dépens.

 


JUGEMENT

LA COUR ORDONNE :

1.                  l’appel est accueilli;

2.                  la demande de marque de commerce no 641,981(1) est renvoyée à l’Office de la propriété intellectuelle du Canada en vue d’un examen plus approfondi;

3.                  aucuns dépens ne sont accordés.

« Keith M. Boswell »

Juge

Traduction certifiée conforme

Claude Leclerc, LL.B.

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-1174-14

 

INTITULÉ :

JACQUES VERT GROUP LIMITED c YM INC. (SALES)

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Ottawa (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

le 26 août 2014

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

le juge BOSWELL

 

DATE DES MOTIFS :

le 19 décembre 2014

 

COMPARUTIONS :

Adele Finlayson

 

POUR LA demanderesse

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Macera & Jarzyna LLP

Ottawa (Ontario)

 

pour la demanderesse

 

Nul n’a comparu

 

pour la défenderesse

 

 

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