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Date : 20141215


Dossier : T-1878-13

Référence : 2014 CF 1214

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 15 décembre 2014

En présence de monsieur le juge O'Reilly

ENTRE :

SHARON PELLISSEY

demanderesse

et

PREMIÈRE NATION PEHDZEH KI; CONSEIL DE LA PREMIÈRE NATION PEHDZEH KI ET LES CONSEILLÈRES ELSIE HARDISTY, LISA MOSES,

GLORIA HARDSTY ET MARY CLILLE

défendeurs

JUGEMENT ET MOTIFS

I.                   Aperçu

[1]               Madame Sharon Pellissey a été chef de la Première Nation Pehdzeh Ki en Colombie-Britannique du 25 juillet 2013 au 29 octobre 2013, quand le conseil de la Première Nation a  présenté une résolution la destituant de ses fonctions de chef.

[2]               Madame Pellissey soutient que la Première Nation l’a traitée de façon injuste puisqu’elle n’a pas été adéquatement informée des procédures qui ont mené au vote de destitution ou des motifs de sa destitution. Elle affirme également que la décision de la destituer était déraisonnable parce qu’elle n’était pas étayée par une preuve d’inconduite de sa part.

[3]               Vu la situation dans son ensemble, je ne suis pas convaincu que Mme Pellissey a été traitée de façon injuste ou que la décision de la Première Nation était déraisonnable. Madame Pellissey était au courant des allégations portées contre elle, elle avait été avisée des procédures et elle avait eu la possibilité de se défendre. De plus, la décision de la Première Nation était fondée sur une preuve relative à la conduite adoptée par Mme Pellissey avant la réunion et, par conséquent, n’était pas déraisonnable.

[4]               En conséquence, je dois rejeter la présente demande de contrôle judiciaire. Comme Mme Pellissey ne s’est pas présentée, ni en personne ni par l’entremise d’un avocat, à l’audition de la présente demande de contrôle judiciaire, je me suis fondé sur les documents déposés par les parties.

A.                La décision de la Première Nation

[5]               Le conseil de la Première Nation a tenu une réunion le 22 octobre 2013, à laquelle ont assisté quatre conseillères, mais pas Mme Pellissey. Son frère, qui était aussi conseiller, n’était pas présent non plus. Les conseillères ont adopté une motion de défiance à l’égard de Mme Pellissey à titre de chef, et ce, pour quatre raisons : (i) inconduite professionnelle; (ii) état d’ébriété en public; (iii) divulgation de renseignements confidentiels; et (iv) manque de communication. Le conseil a décidé de demander la tenue d’un scrutin public. 

[6]               Lors de la réunion du 22 octobre 2013, Mme Pellissey participait à une autre rencontre à Hay River, dans les Territoires du Nord-Ouest. Le conseil avait demandé à Mme Pellissey de ne pas assister à cette rencontre en raison de sa consommation et avait envoyé une lettre à Hay River à cet égard. Madame Pellissey a reçu la lettre, mais s’est tout de même présentée à la rencontre.

[7]               Une assemblée publique a été tenue dans la communauté le 28 octobre 2013. Les membres de la communauté ont été avisés de l’assemblée, tout comme Mme Pellissey. Les allégations portées contre cette dernière ont été lues à voix haute lors de l’assemblée et les personnes présentes, dont Mme Pellissey, ont eu la possibilité de s’exprimer. Une majorité des personnes présentes ont voté en faveur de la tenue d’une élection complémentaire en vue d’élire un nouveau chef. Le vote a été confirmé le lendemain par une résolution du conseil de la Première Nation.

(1)               Madame Pellissey a-t-elle été traitée de façon injuste?

[8]               Madame Pellissey soutient que le processus par lequel elle aurait été destituée de ses fonctions de chef n’était pas autorisé par les coutumes reconnues de la bande et était aussi injuste. Plus particulièrement, elle affirme ne pas avoir été convenablement avisée de l’assemblée publique, ne pas avoir reçu l’ordre du jour de cette assemblée et ne pas avoir eu la possibilité de répondre aux allégations portées contre elle.

[9]               Madame Pellissey soutient également que, en ce qui concerne la réunion du 22 octobre 2013, le conseil de la Première Nation l’a traitée de façon injuste. Cette réunion a été délibérément tenue en l’absence de Mme Pellissey et de son frère et a, en fait, abouti à la décision de destituer cette dernière de ses fonctions de chef sans qu’elle ait son mot à dire.

[10]           Je ne crois pas que Mme Pellissey a été traitée de façon injuste.

[11]           Le conseil a tenu la réunion du 22 octobre 2013 parce qu’il craignait que Mme Pellissey ne s’occupe des affaires de la bande (c.-à-d., assister à la rencontre à Hay River) en état d’ébriété. La réunion a été tenue d’urgence. Madame Pellissey avait été mise au courant de l’inquiétude du conseil. Quoi qu’il en soit, vu l’objet de la réunion, elle n’aurait pas pu y participer. Le frère de Mme Pellissey a été avisé de la réunion, mais il a refusé d’y assister en raison d’un conflit d’intérêts.

[12]           Selon moi, aucune décision définitive n’a été prise à la réunion du 22 octobre 2013. Les conseillères ont enregistré un vote de méfiance à l’égard de Mme Pellissey et ont rédigé, sans la signer, une résolution du conseil de bande la destituant de ses fonctions. Le conseil a décidé de demander la tenue d’un scrutin public, ce qui a donné lieu à l’assemblée publique du 28 octobre 2013. 

[13]           En ce qui concerne l’assemblée publique, des avis ont été envoyés à tous les membres de la communauté, y compris à Mme Pellissey. De plus, Mme Pellissey a été directement informée de l’objet de l’assemblée. Les allégations ont été lues à voix haute lors de l’assemblée et Mme Pellissey a eu amplement l’occasion d’y répondre. Un vote a été tenu et la majorité a exprimé le désir de procéder à une élection complémentaire pour le poste de chef. Ce vote a été confirmé le lendemain par une résolution du conseil de bande.

[14]           Selon moi, il n’y a rien d’inéquitable dans ce processus. Madame Pellissey a reçu un avis, a été informée des allégations formulées contre elle, a eu l’occasion de répondre à ces allégations et a profité de la tenue d’un scrutin public. Après le scrutin, Mme Pellissey a écrit au conseil pour le remercier, lui demander une indemnité de départ et savoir si elle pouvait reprendre son ancien poste d’agente des terres. Elle ne s’est pas plainte du processus par lequel elle a été destituée.

[15]           Je soulignerais également qu’il ressort de la preuve que le processus appliqué par la Première Nation en l’espèce avait déjà été suivi pour destituer un chef de ses fonctions.

B.                 La décision de la Première Nation était-elle déraisonnable?

[16]           Madame Pellissey soutient que la décision de la destituer était déraisonnable puisqu’elle n’était pas fondée sur une preuve d’inconduite fiable.  

[17]           À mon avis, le dossier n’appuie pas la position de Mme Pellissey.

[18]           Outre la preuve susmentionnée, l’agent administratif principal pour la Première Nation a reçu des appels téléphoniques de membres de la communauté à propos de la conduite de Mme Pellissey. Son comportement était incompatible avec son serment professionnel par lequel elle avait expressément promis de servir de modèle pour la communauté et, le cas échéant, de préserver la stricte confidentialité.

[19]           Vu la preuve, la décision de destituer Mme Pellissey de ses fonctions de chef n’était pas déraisonnable.

II.                Conclusion et décision

[20]           Le processus par lequel Mme Pellissey a été destituée n’était pas injuste et le résultat n’était pas déraisonnable. Je dois donc rejeter la présente demande de contrôle judiciaire, avec dépens.


JUGEMENT

LA COUR REJETTE la demande de contrôle judiciaire, avec dépens.

« James W. O’Reilly »

Juge

Traduction certifiée conforme

Mylène Borduas


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-1878-13

 

INTITULÉ :

SHARON PELLISSEY c PREMIÈRE NATION PEHDZEH KI; CONSEIL DE LA PREMIÈRE NATION PEHDZEH KI ET LES CONSEILLÈRES ELSIE HARDISTY, LISA MOSES, GLORIA HARDSTY ET MARY CLILLE

 

AUDIENCE TENUE PAR TÉLÉCONFÉRENCE ENTRE VANCOUVER (COLOMBIE-BRITANNIQUE) ET EDMONTON (ALBERTA)

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 23 JUIN 2014

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE O'REILLY

 

DATE DES MOTIFS :

LE 15 DÉCEMBRE 2014

 

COMPARUTIONS :

Non représentée

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Shawn A. Beaver

 

POUR LES DÉFENDEURS

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Non représentée

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

BEAVER LEEBODY FRANK & ASSOCIATES

Avocats

Edmonton (Alberta)

 

POUR LES DÉFENDEURS

 

 

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