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Date : 20140808


Dossier : IMM-8011-13

Référence : 2014 CF 786

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 8 août 2014

En présence de monsieur le juge Russell

ENTRE :

RAJPAL SHARMA

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

INTRODUCTION

[1]               La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire fondée sur le paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la Loi] d’une décision, datée du 4 décembre 2013, par laquelle un agent d’immigration [l’agent] du Centre de traitement des demandes [CTD] de Vegreville (Alberta), de Citoyenneté et Immigration Canada [CIC], [la décision] a refusé la demande présentée par le demandeur en vue d’obtenir le rétablissement de son statut de résident temporaire et un permis de travail.

LE CONTEXTE

[2]               Le demandeur est un prêtre hindou qui vit et travaille au Canada depuis 2000; il a tout d’abord travaillé pour le Fraser Valley Hindu Temple d’Abbotsford (C.-B.), et ensuite, pour la Sri Durga Bhamashwari Mandir Society de Surrey (C.-B.).

[3]               Pendant les premières années, jusqu’au mois d’août 2008 – les documents de CIC l’autorisant à demeurer au Canada étaient intitulés « Dossier de visiteur ». Le demandeur a joint à son dossier de demande huit documents de ce type qui couvrent la période allant d’octobre 2000 à août 2008. On trouve dans ces documents diverses « remarques », notamment que le demandeur est autorisé à exercer des fonctions religieuses en qualité de prêtre dans les temples mentionnés ci-dessus. Il semble donc que pendant cette période le demandeur était un résident temporaire de la catégorie des visiteurs et travaillait sans permis de travail, comme le prévoit le Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 [le Règlement] à l’égard de certaines personnes qui exercent des fonctions religieuses.

[4]               Depuis janvier 2009, CIC a délivré trois permis de travail successifs au demandeur, le plus récent ayant expiré le 21 juin 2013. Le demandeur a sollicité le renouvellement de ce permis de travail, mais sa demande a été refusée, le 19 août 2013, parce qu’il n’avait fourni ni Avis sur le marché du travail [AMT], ni confirmation de Ressources humaines et Développement des compétences Canada [RHDCC] (tel était alors le nom de ce ministère). La lettre qui informait le demandeur de cette décision l’avisait également que son statut de résident temporaire avait expiré à la date de la lettre, le 19 août 2013, mais qu’il pouvait demander le rétablissement de ce statut dans les 90 jours suivants. Le demandeur a sollicité le rétablissement de son statut de résident temporaire et un permis de travail. La demande a été refusée le 4 décembre 2013 dans la décision qui fait l’objet du présent contrôle.

LA DÉCISION CONTRÔLÉE

[5]               Voici la partie pertinente de la lettre qui informait le demandeur de la décision :

[traduction]
La présente lettre concerne votre demande visant à obtenir le rétablissement de votre statut de résident temporaire et un permis de travail.

Nous avons le regret de vous informer que votre demande a été refusée.

Après examen de l’ensemble de votre dossier, il a été décidé que votre demande de permis de travail ne pouvait être approuvée en l’absence d’un avis favorable sur le marché du travail et d’une confirmation de Ressources humaines et Développement des compétences Canada. Votre employeur éventuel doit obtenir cette confirmation.

[6]               La lettre informait également le demandeur qu’il se trouvait au Canada sans avoir le statut de résident temporaire, qu’il n’avait pas droit au rétablissement de ce statut, en application de l’article 182 du Règlement, et qu’il devait donc quitter le Canada immédiatement.

[7]               Les notes figurant dans le Système mondial de gestion des cas [notes du SMGC] de CIC expliquent les motifs du refus de la façon suivante :

[traduction]
Le permis de travail précédent du demandeur était valide jusqu’au 21 juin 2013. Il a présenté une demande de prolongation qui a été reçue par le CTDV, le 20 juin 2013, et qui a été refusée pour absence d’AMT le 19 août 2013. Le demandeur a perdu son statut de résident temporaire, le 19 août 2013. Cette demande a été reçue par le CTDV, le 17 septembre 2013. Vérifié le SNSE, aucun AMT pour ce demandeur dans le système. La demande est refusée pour absence d’AMT. La période de rétablissement se terminait le 17 novembre 2013. Le demandeur ne peut plus être rétabli et doit quitter le Canada. Lettre de refus envoyée pour l’informer.

LES QUESTIONS EN LITIGE

[8]               Le demandeur soumet à la Cour deux questions dans la présente affaire :

a.       L’agent a-t-il commis une erreur en concluant qu’un AMT favorable était nécessaire?

b.      L’agent a-t-il commis une erreur en omettant d’examiner de façon appropriée la demande de rétablissement du statut de résident temporaire du demandeur?

LA NORME DE CONTRÔLE

[9]               Dans l’arrêt Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9 [Dunsmuir], la Cour suprême du Canada a déclaré qu’il n’est pas toujours nécessaire de se livrer à une analyse relative à la norme de contrôle. Ainsi, lorsque la norme de contrôle qui s’applique à la question particulière dont la cour est saisie est établie de manière satisfaisante par la jurisprudence, il est loisible à la cour de révision de l’adopter. Ce n’est que si cette démarche se révèle infructueuse ou que la jurisprudence semble devenue incompatible avec l’évolution récente du droit en matière de contrôle judiciaire, que la cour de révision doit examiner les quatre éléments de l’analyse relative à la norme de contrôle. Agraira c Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2013 CSC 36, au paragraphe 48 [Agraira].

[10]           La décision d’un agent en matière de délivrance d’un permis de travail ou de rétablissement du statut de résident temporaire, y compris l’interprétation et l’application des dispositions légales pertinentes, doit être examinée selon la norme de la raisonnabilité : voir Arora c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 241 au paragraphe 23 [Arora]; Kanthasamy c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2014 CAF 113; Lemus c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2014 CAF 114; Agraira, précité.

[11]           Lors du contrôle d’une décision selon la norme de la raisonnabilité, l’analyse tient « à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit ». Voir Dunsmuir, précité, au paragraphe 47, et Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12, au paragraphe 59. Autrement dit, la Cour ne doit intervenir que si la décision est déraisonnable, en ce sens qu’elle n’appartient pas « aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit ».

DISPOSITIONS LÉGISLATIVES

[12]           Les dispositions suivantes de la Loi s’appliquent en l’espèce :

Droit du résident temporaire

Right of temporary residents

29. (1) Le résident temporaire a, sous réserve des autres dispositions de la présente loi, l’autorisation d’entrer au Canada et d’y séjourner à titre temporaire comme visiteur ou titulaire d’un permis de séjour temporaire.

29. (1) A temporary resident is, subject to the other provisions of this Act, authorized to enter and remain in Canada on a temporary basis as a visitor or as a holder of a temporary resident permit.

[…]

[…]

Règlements

Regulations

32. Les règlements régissent l’application des articles 27 à 31, définissent, pour l’application de la présente loi, les termes qui y sont employés et portent notamment sur :

32. The regulations may provide for any matter relating to the application of sections 27 to 31, may define, for the purposes of this Act, the terms used in those sections, and may include provisions respecting

a) les catégories de résidents temporaires, notamment les étudiants et les travailleurs;

(a) classes of temporary residents, such as students and workers;

b) les critères de sélection applicables aux diverses catégories d’étrangers, et aux membres de leur famille, ainsi que les méthodes d’appréciation de tout ou partie de ces critères;

(b) selection criteria for each class of foreign national and for their family members, and the procedures for evaluating all or some of those criteria;

[…]

[…]

 

[13]           Les dispositions suivantes du Règlement s’appliquent en l’espèce :

Visa de résident temporaire

Délivrance

Temporary Resident Visa

Issuance

179. L’agent délivre un visa de résident temporaire à l’étranger si, à l’issue d’un contrôle, les éléments suivants sont établis :

179. An officer shall issue a temporary resident visa to a foreign national if, following an examination, it is established that the foreign national

a) l’étranger en a fait, conformément au présent règlement, la demande au titre de la catégorie des visiteurs, des travailleurs ou des étudiants;

(a) has applied in accordance with these Regulations for a temporary resident visa as a member of the visitor, worker or student class;

[…]

[…]

d) il se conforme aux exigences applicables à cette catégorie;

(d) meets the requirements applicable to that class;

[…]

[…]

181 […]

181 […]

Prolongation

Extension

(2) L’agent prolonge l’autorisation de séjourner à titre de résident temporaire de l’étranger si, à l’issue d’un contrôle, celui-ci satisfait toujours aux exigences prévues à l’article 179.

(2) An officer shall extend the foreign national’s authorization to remain in Canada as a temporary resident if, following an examination, it is established that the foreign national continues to meet the requirements of section 179.

[…]

[…]

Rétablissement

Restoration

182. (1) Sur demande faite par le visiteur, le travailleur ou l’étudiant dans les quatre‑vingt‑dix jours suivant la perte de son statut de résident temporaire parce qu’il ne s’est pas conformé à l’une des conditions prévues à l’alinéa 185a), aux sous‑alinéas 185b)(i) à (iii) ou à l’alinéa 185c), l’agent rétablit ce statut si, à l’issue d’un contrôle, il est établi que l’intéressé satisfait aux exigences initiales de sa période de séjour, qu’il s’est conformé à toute autre condition imposée à cette occasion et qu’il ne fait pas l’objet d’une déclaration visée au paragraphe 22.1(1) de la Loi.

182. (1) On application made by a visitor, worker or student within 90 days after losing temporary resident status as a result of failing to comply with a condition imposed under paragraph 185(a), any of subparagraphs 185(b)(i) to (iii) or paragraph 185(c), an officer shall restore that status if, following an examination, it is established that the visitor, worker or student meets the initial requirements for their stay, has not failed to comply with any other conditions imposed and is not the subject of a declaration made under subsection 22.1(1) of the Act.

[…]

[…]

Permis non exigé

No permit required

186. L’étranger peut travailler au Canada sans permis de travail :

186. A foreign national may work in Canada without a work permit

[…]

[…]

l) à titre de personne chargée d’aider une communauté ou un groupe à atteindre ses objectifs spirituels et dont les fonctions consistent principalement à prêcher une doctrine, à exercer des fonctions relatives aux rencontres de cette communauté ou de ce groupe ou à donner des conseils d’ordre spirituel;

(l) as a person who is responsible for assisting a congregation or group in the achievement of its spiritual goals and whose main duties are to preach doctrine, perform functions related to gatherings of the congregation or group or provide spiritual counselling;

[…]

[…]

Catégorie

Class

191. La catégorie des visiteurs est une catégorie réglementaire de personnes qui peuvent devenir résidents temporaires.

191. The visitor class is prescribed as a class of persons who may become temporary residents.

Qualité

Visitor

192. Est un visiteur et appartient à la catégorie des visiteurs l’étranger autorisé à entrer au Canada et à y séjourner à ce titre.

192. A foreign national is a visitor and a member of the visitor class if the foreign national has been authorized to enter and remain in Canada as a visitor.

[…]

[…]

Catégorie

Class

194. La catégorie des travailleurs est une catégorie réglementaire de personnes qui peuvent devenir résidents temporaires.

194. The worker class is prescribed as a class of persons who may become temporary residents.

Qualité

Worker

195. Est un travailleur et appartient à la catégorie des travailleurs l’étranger autorisé à entrer au Canada et à y séjourner à ce titre.

195. A foreign national is a worker and a member of the worker class if the foreign national has been authorized to enter and remain in Canada as a worker.

Permis de travail

Work permit required

196. L’étranger ne peut travailler au Canada sans y être autorisé par un permis de travail ou par le présent règlement.

196. A foreign national must not work in Canada unless authorized to do so by a work permit or these Regulations.

[…]

[…]

Demande après l’entrée au Canada

Application after entry

199. L’étranger peut faire une demande de permis de travail après son entrée au Canada dans les cas suivants :

199. A foreign national may apply for a work permit after entering Canada if they

a) il détient un permis de travail;

(a) hold a work permit;

b) il travaille au Canada au titre de l’article 186 et n’est pas un visiteur commercial au sens de l’article 187;

(b) are working in Canada under the authority of section 186 and are not a business visitor within the meaning of section 187;

[…]

[…]

Permis de travail — demande préalable à l’entrée au Canada

Work permits

200. (1) Sous réserve des paragraphes (2) et (3), et de l’article 87.3 de la Loi dans le cas de l’étranger qui fait la demande préalablement à son entrée au Canada, l’agent délivre un permis de travail à l’étranger si, à l’issue d’un contrôle, les éléments ci-après sont établis :

200. (1) Subject to subsections (2) and (3) — and, in respect of a foreign national who makes an application for a work permit before entering Canada, subject to section 87.3 of the Act — an officer shall issue a work permit to a foreign national if, following an examination, it is established that

[…]

[…]

c) il se trouve dans l’une des situations suivantes :

(c) the foreign national

(i) il est visé par les articles 206, 207 ou 208,

(i) is described in section 206, 207 or 208,

(ii) il entend exercer un travail visé aux articles 204 ou 205 pour lequel aucune offre d’emploi ne lui a été présentée,

(ii) intends to perform work described in section 204 or 205 but does not have an offer of employment to perform that work,

(ii.1) il entend exercer un travail visé aux articles 204 ou 205, il a reçu une offre d’emploi pour un tel travail et l’agent a conclu, en se fondant sur tout renseignement fourni, à la demande de l’agent, par l’employeur qui présente l’offre d’emploi et tout autre renseignement pertinent, que :

(ii.1) intends to perform work described in section 204 or 205, has an offer of employment to perform that work and an officer has determined, on the basis of any information provided on the officer’s request by the employer making the offer and any other relevant information,

(A) l’offre était authentique conformément au paragraphe (5),

(A) that the offer is genuine under subsection (5), and

(B) l’employeur, selon le cas :

(B) that the employer

(I) au cours des six années précédant la date de la réception de la demande de permis de travail par le ministère, a confié à tout étranger à son service un emploi dans la même profession que celle précisée dans l’offre d’emploi et lui a versé un salaire et ménagé des conditions de travail qui étaient essentiellement les mêmes — mais non moins avantageux — que ceux précisés dans l’offre,

(I) during the six-year period before the day on which the application for the work permit is received by the Department, provided each foreign national employed by the employer with employment in the same occupation as that set out in the foreign national’s offer of employment and with wages and working conditions that were substantially the same as — but not less favourable than — those set out in that offer, or

(II) peut justifier le non-respect des critères prévus à la sous‑division (I) au titre du paragraphe 203(1.1),

(II) is able to justify, under subsection 203(1.1), any failure to satisfy the criteria set out in subclause (I), or

(iii) il a reçu une offre d’emploi et l’agent a rendu une décision positive conformément aux alinéas 203(1)a) à e);

(iii) has been offered employment, and an officer has made a positive determination under paragraphs 203(1)(a) to (e); and

[…]

[…]

Appréciation de l’emploi offert

Assessment of employment offered

203. (1) Sur présentation d’une demande de permis de travail conformément à la section 2 par tout étranger, autre que celui visé à l’un des sous‑alinéas 200(1)c)(i) à (ii.1), l’agent décide, en se fondant sur l’avis du ministère de l’Emploi et du Développement social, sur tout renseignement fourni, à la demande de l’agent, par l’employeur qui présente l’offre d’emploi et sur tout autre renseignement pertinent, si, à la fois :

203. (1) On application under Division 2 for a work permit made by a foreign national other than a foreign national referred to in subparagraphs 200(1)(c)(i) to (ii.1), an officer must determine, on the basis of an opinion provided by the Department of Employment and Social Development, of any information provided on the officer’s request by the employer making the offer and of any other relevant information, if

a) l’offre d’emploi est authentique conformément au paragraphe 200(5);

(a) the job offer is genuine under subsection 200(5);

b) le travail de l’étranger est susceptible d’avoir des effets positifs ou neutres sur le marché du travail canadien;

(b) the employment of the foreign national is likely to have a neutral or positive effect on the labour market in Canada;

[…]

[…]

Intérêts canadiens

Canadian interests

205. Un permis de travail peut être délivré à l’étranger en vertu de l’article 200 si le travail pour lequel le permis est demandé satisfait à l’une ou l’autre des conditions suivantes :

205. A work permit may be issued under section 200 to a foreign national who intends to perform work that

[…]

[…]

d) il est d’ordre religieux ou charitable.

(d) is of a religious or charitable nature.

[…]

[…]

ARGUMENTATION

Le demandeur

Aucun AMT n’était nécessairepour obtenir un permis de travail

[14]           Le demandeur soutient qu’il était dispensé de l’obligation de produire un AMT en application de l’alinéa 205d) du Règlement, qui prévoit une exception dans le cas d’un travail « d’ordre religieux ou charitable ». Ainsi, il n’avait pas besoin d’un AMT pour obtenir un permis de travail et continuer à travailler comme prêtre hindou pour son employeur actuel.

[15]           Dans sa demande de rétablissement, le demandeur affirme qu’il a clairement précisé qu’il entendait exercer la profession de prêtre hindou et qu’il a présenté une offre de son employeur l’invitant à travailler comme prêtre hindou. L’agent devait donc décider s’il était un prêtre hindou, auquel cas il bénéficiait d’une dispense d’AMT en application de l’alinéa 205d) du Règlement. Pour ce faire, affirme le demandeur, l’agent devait appliquer la Section 5.39 du Manuel d’opération de CIC, FW 1 : Procédures des travailleurs étrangers temporaires [Procédures FW 1], dont voici un extrait :

La dispense d’AMT selon le R205d) s’applique aux travailleurs dans les domaines religieux et de bienfaisance qui assument des fonctions religieuses pour un organisme religieux ou de bienfaisance canadien et dont les fonctions, au cours de leur service dans un organisme religieux ou de bienfaisance ne sont pas en concurrence directe avec celles des citoyens canadiens ou des permanents résidents sur le marché du travail canadien. Il (sic) ne s’applique pas aux employés d’organisme religieux qui entrent pour prêcher une doctrine ou être au service d’une congrégation, car ceux-ci peuvent être autorisés à entrer au Canada en vertu du R186l).

[16]           Le demandeur soutient que l’agent a commis une erreur susceptible de contrôle en n’appliquant pas les Procédures FW 1 et le Règlement : Arora, précitée. Il affirme que ni les Procédures FW 1 ni le Règlement ne l’obligent à produire un AMT pour obtenir un permis l’autorisant à travailler pour une organisation religieuse en qualité de prêtre, dont les fonctions principales consistent à prêcher une doctrine, à être au service d’une congrégation ou d’un groupe ou à donner des conseils d’ordre spirituel. Il n’entrait pas au Canada pour prêcher une doctrine, puisqu’il se trouvait déjà au Canada et qu’il cherchait à faire prolonger son permis de travail alors en vigueur ou son statut de résident temporaire pour continuer à travailler comme prêtre hindou. La lettre contenant l’offre d’emploi décrivait ses tâches et démontrait ainsi qu’il avait droit à la dispense d’AMT à titre d’employé d’un ordre religieux qui exerçait ses fonctions pour une organisation religieuse canadienne. Il ne serait pas en concurrence directe avec des citoyens canadiens ou des résidents permanents sur le marché du travail canadien. L’omission de la part de l’agent de tenir compte des fonctions décrites dans la lettre d’offre d’emploi et de déterminer si cette lettre lui donnait droit à la dispense d’AMT de l’alinéa 205d) par l’application de la Section 5.39 des Procédures FW 1 constitue une erreur susceptible de contrôle.

Le demandeur avait droit à ce que son statut de résident temporaire soit prolongé même en l’absence d’un permis de travail, conformément à l’alinéa 186l) du Règlement

[17]           À titre subsidiaire, le demandeur soutient que, peu importe qu’il ait été ou non tenu de produire un AMT pour pouvoir obtenir un permis de travail, il avait à tout le moins droit au rétablissement de son statut de résident temporaire et il pouvait continuer à travailler en qualité de prêtre hindou en application de l’alinéa 186l) du Règlement. Cette disposition dispense les travailleurs appartenant à un ordre religieux, comme le demandeur, de l’obligation de se procurer un permis de travail.

[18]           Par conséquent, le demandeur soutient que, pour continuer à travailler au Canada en qualité de prêtre, il lui suffisait de maintenir son statut de résident temporaire. Pour ce faire, il n’avait qu’à informer l’agent qu’il avait demandé qu’on prolonge son statut de résident temporaire et qu’il était autorisé à exercer des fonctions religieuses en qualité de prêtre, ce qu’il a fait. Il signale qu’il était déjà autorisé à exercer des fonctions religieuses pour le même employeur et qu’il avait simplement à prolonger son statut de visiteur et à présenter une lettre d’offre d’emploi décrivant ses fonctions. Il n’a jamais été tenu de fournir un AMT.

[19]           Le demandeur affirme que le défendeur a tort d’affirmer qu’il a décidé de demander un permis de travail et invoque la Section 5.13 des Procédures FW 1, qui se lit en partie comme suit :

  Dans les bureaux à l’étranger et aux points d’entrée (PDE)

[…]

Si une demande de permis de travail est présentée sans un AMT, et que le demandeur n’est pas admissible à une dispense, l’agent doit refuser de délivrer le permis. S’il y a lieu l’agent peut délivrer un visa de résident temporaire (au bureau à l’étranger) ou une fiche de visiteur (au PDE). Il importe d’informer le demandeur qu’il peut travailler au Canada sans permis de travail en vertu du R186l), et que, s’il désire toujours un permis de travail, il peut en faire la demande en vertu du R199b) après être entré au Canada et avoir obtenu un AMT.

[Caractères gras ajoutés par le demandeur.]

Le demandeur soutient qu’il ressort très clairement de ce qui précède qu’il aurait dû, à tout le moins, obtenir le rétablissement de son statut de résident temporaire et être autorisé à exercer ses fonctions religieuses; la décision de l’agent de ne pas rétablir son statut de résident temporaire était donc déraisonnable.

Le défendeur

L’AMT était requis

[20]           Le défendeur soutient tout d’abord que le demandeur est préclus de soutenir qu’aucun AMT n’était requis pour qu’on lui délivre un permis de travail. Il a demandé un AMT pour étayer ses demandes de permis de travail antérieures, et il en a aussi demandé un pour étayer la demande de rétablissement qui fait l’objet de la présente espèce. En raison de ce comportement répété, ainsi que des observations écrites formulées par son ancien consultant en immigration selon qui le demandeur avait demandé un AMT pour étayer sa demande de rétablissement, il faut considérer que le demandeur a reconnu qu’il devait fournir un AMT pour obtenir un permis de travail. Étant donné que le demandeur a adopté cette position devant le tribunal administratif en première instance, il ne peut, d’après le défendeur, revenir sur cette position en sollicitant le contrôle judiciaire de la décision de l’agent.

[21]           À titre subsidiaire, le défendeur soutient que la position du demandeur n’est pas fondée. Les travailleurs appartenant à un ordre religieux et qui prêchent une doctrine ou sont au service d’une congrégation doivent faire un choix : ils peuvent décider d’entrer au Canada en qualité de visiteur et travailler sans permis de travail, en application de l’alinéa 186l) du Règlement, ou ils peuvent demander un permis de travail, auquel cas ils doivent fournir un AMT parce qu’ils ne peuvent alors pas se prévaloir de la dispense d’AMT qu’accorde aux travailleurs dans les domaines religieux et de bienfaisance l’alinéa 205d) du Règlement.

[22]           L’étranger qui demande un permis de travail est généralement tenu d’obtenir un AMT auprès de RHDCC, selon l’article 203 du Règlement. L’exception à cette obligation prévue à l’alinéa 205d) du Règlement ne s’applique pas au demandeur, soutient le défendeur, parce qu’elle ne s’applique pas aux « employés d’organismes religieux qui entrent au Canada pour prêcher une doctrine ou être au service d’une congrégation ». Le défendeur cite la Section 5.39 des Procédures FW 1 à l’appui de cet argument :

5.39   Employés d’organisme religieux et de bienfaisance R205(d), C50

Comprend les mises à jour tirées d’OB 64

La dispense d’AMT selon le R205(d) s’applique aux travailleurs dans les domaines religieux et de bienfaisance qui assument des fonctions religieuses pour un organisme religieux ou de bienfaisance canadien et dont les fonctions, au cours de leur service dans un organisme religieux ou de bienfaisance, ne sont pas en concurrence directe avec celles des citoyens canadiens ou des permanents résidents sur le marché du travail canadien. Il (sic) ne s’applique pas aux employés d’organismes religieux qui entrent pour prêcher une doctrine ou être au service d’une congrégation, car ceux-ci peuvent être autorisés à entrer au Canada en vertu du R186l).

[Non souligné dans l’original.]

[23]           Le défendeur invoque également la Section 5.13 des Procédures FW 1, qui énonce très clairement, d’après lui, que le CTD de Vegreville ne doit pas délivrer de permis de travail à un employé d’organisme religieux qui se trouve dans la situation du demandeur, c.­à­d. à une personne qui est tout d’abord entrée au Canada sans permis de travail, en application de l’alinéa 186l) du Règlement, et qui demande, par la suite, un permis de travail après être entrée au Canada sans avoir d’AMT :

5.13   Travailler sans permis de travail –R186l) – Membre du clergé

[…]

Traitement des demandes de permis de travail des travailleurs appartenant à un ordre religieux (membre du clergé, ministres du culte, prêtres) – OB 29

  Dans les bureaux à l’étranger et aux points d’entrée (PDE)

Si un étranger qui est normalement autorisé à travailler en vertu du R186l) présente une demande de permis de travail à un bureau à l’étranger ou à un PDE, sa demande doit être examinée en vertu du R2001).

Dans le cas des travailleurs appartenant à un ordre religieux qui ne sont pas visés au R200(1)c)(i) et (ii), la demande de permis de travail doit être accompagnée d’un AMT. Il n’y a pas de dispense de l’AMT dans ces cas; la dispense au titre du R205a) (intérêts canadiens, code C10) ne s’applique pas. Voir la Section 5.29 pour des explications plus détaillées sur l’application du R205a).

Si une demande de permis de travail est présentée sans un AMT et que le demandeur n’est pas admissible à une dispense, l’agent doit refuser de délivrer le permis. S’il y a lieu, l’agent peut délivrer un visa de résident temporaire (au bureau à l’étranger) ou une fiche du visiteur (au PDE). Il importe d’informer le demandeur qu’il peut travailler au Canada sans permis de travail en vertu du R186l) et que, s’il désire toujours un permis de travail, il peut en faire la demande en vertu du R199b) après être entré au Canada et avoir obtenu un AMT.

[Souligné par le défendeur.]

  Au CTD de Vegreville

Les travailleurs appartenant à un ordre religieux qui sont au Canada et qui ont été initialement autorisés à prêcher une doctrine ou à être au service d’une congrégation en vertu du R186l) peuvent présenter une demande de permis de travail au CTD de Vegreville en vertu du R199b), à condition qu’ils aient obtenu préalablement un AMT. Le CTD de Vegreville ne délivre pas de permis de travail aux demandeurs qui n’ont pas un AMT.

[Caractères gras dans l’original.]

[24]           Le défendeur affirme que le travailleur appartenant à un ordre religieux qui a été autorisé au départ à entrer au Canada pour prêcher une doctrine ou être au service d’une congrégation, en application de l’alinéa 186l) du Règlement, peut demander un permis de travail en vertu de l’alinéa 199b) après son arrivée au Canada, mais il doit obtenir un AMT favorable. Étant donné que le demandeur est un travailleur appartenant à un ordre religieux qui a été autorisé au départ à prêcher une doctrine ou à être au service d’une congrégation, en application de l’alinéa 186l), il était tenu d’avoir un AMT valide pour obtenir un permis de travail. Il n’a pas présenté d’AMT et sa demande a donc été dûment refusée.

[25]           Le défendeur affirme qu’il n’aurait servi à rien que l’agent examine en détail la demande de rétablissement du permis de travail du demandeur, notamment la lettre d’offre d’emploi, puisqu’il manquait un élément fondamental (l’AMT) et que la demande devait être refusée pour cette raison.

[26]           Le défendeur soutient que le fait que le demandeur ait obtenu un AMT favorable après la prise de cette décision est sans pertinence pour la présente demande; cet AMT ne peut donc être admis à titre de preuve nouvelle et doit être écarté : Barlagne c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 547, aux paragraphes 22 et 23.

Le rétablissement du statut de résident temporaire n’était pas justifié

[27]           Le défendeur soutient que le rétablissement du statut de résident temporaire n’est pas un exercice purement théorique; il doit déboucher sur la délivrance d’une quelconque autorisation ou d’un document relatif au statut. En l’espèce, le demandeur sollicitait le rétablissement et la délivrance d’un permis de travail, ou une autorisation. Le demandeur ne répondait pas aux critères applicables à l’obtention d’un permis de travail parce qu’il n’avait pas présenté d’AMT.

[28]           Le défendeur soutient que le fait que le demandeur ait travaillé auparavant comme prêtre sans avoir dû obtenir de permis de travail n’est pas pertinent. Le demandeur devait choisir entre conserver son statut de visiteur sans permis de travail, en application de l’alinéa 186l), ou demander un permis de travail, en application de l’alinéa 199b), auquel cas il devait présenter un AMT. Le demandeur a choisi de demander un permis de travail, de sorte que sa demande de rétablissement de son permis de travail a été examinée en fonction des critères applicables aux permis de travail. Le demandeur n’a pas sollicité le rétablissement de son statut de visiteur, de sorte que l’agent n’a pas examiné sa demande sur ce fondement.

ANALYSE

[29]           Le demandeur vit et travaille au Canada depuis 2000; il a travaillé au départ en qualité de résident temporaire de la catégorie des visiteurs, puis, à partir de 2009, en vertu de permis de travail successifs.

[30]           Les problèmes ont commencé lorsque le demandeur a demandé le renouvellement de son permis de travail et que sa demande a été refusée, le 19 août 2013, parce qu’il n’avait pas fourni d’AMT valide. On l’informait, avec ce refus, que son statut de résident temporaire avait expiré, mais qu’il pouvait en demander le rétablissement dans les 90 jours.

[31]           Le demandeur a ensuite sollicité le rétablissement de son statut de résident temporaire et un permis de travail. Sa demande concernait toutefois un [traduction] « permis de travail l’autorisant à travailler pour le même employeur » et [traduction] « le rétablissement du statut de résident temporaire en qualité de travailleur » [italiques ajoutés], et précisait également qu’elle était étayée par un AMT favorable.

[32]           Il semble que cette formulation ait amené l’agent à considérer la demande comme une demande « dans la catégorie des travailleurs » (qui exige un permis de travail), et non comme une demande dans la « catégorie des visiteurs » à laquelle s’applique l’alinéa 186l) du Règlement.

[33]           Le demandeur affirme maintenant que, compte tenu des renseignements fournis, l’agent aurait dû examiner tous les motifs possibles qui lui auraient permis de prolonger son statut de résident temporaire, ou tout au moins l’informer qu’il lui était possible d’invoquer l’alinéa 186l).

[34]           Il me paraît vraisemblable que le demandeur ait pu répondre aux conditions requises pour demeurer au Canada en application de l’alinéa 186l), mais CIC affirme maintenant avec insistance que ce n’est pas ce qu’il a demandé et que, étant donné que sa demande était présentée en qualité de « travailleur », il était inévitable qu’elle soit refusée.

[35]           Je ne pense pas que le demandeur puisse soutenir qu’il ne savait pas qu’il pouvait demander de rester au Canada sur le fondement de l’alinéa 186l), parce qu’il avait travaillé à titre de visiteur jusqu’en août 2008. Mais il n’a pas demandé de rester au Canada et de travailler en qualité de visiteur; il a demandé le « rétablissement de son statut de résident temporaire en qualité de travailleur » tout en précisant que cette demande reposait sur un AMT favorable qu’il n’a pas présenté. C’est pourquoi je ne pense pas qu’il était déraisonnable pour l’agent de présumer que le demandeur voulait un statut de travailleur et non un statut de visiteur. Je ne pense pas non plus, compte tenu de ces faits, que l’agent devait examiner d’autres motifs qui auraient pu autoriser le demandeur à demeurer au Canada et à prolonger son statut de résident temporaire.

[36]           Il reste toutefois à déterminer si le demandeur était dispensé de l’obligation de présenter un AMT, en application de l’alinéa 205d) du Règlement, de sorte qu’aucun AMT n’était nécessaire pour qu’il puisse obtenir un permis de travail. De toute évidence, au moment de la demande de rétablissement, le demandeur s’est fondé sur un AMT favorable, comme il l’avait fait pour ses demandes de permis de travail antérieures. Je ne pense pas que le demandeur soit préclus de soutenir devant moi qu’aucun AMT n’était nécessaire à cause de l’alinéa 205d), mais encore là, le demandeur n’a pas mentionné qu’il voulait invoquer l’alinéa 205d) plutôt que de fournir un AMT favorable. Il me paraît donc encore une fois difficile de reprocher à l’agent d’avoir examiné la demande comme le demandeur souhaitait qu’elle soit examinée.

[37]           Cela soulève toutefois la question de savoir si le demandeur pouvait bénéficier de la dispense prévue à l’alinéa 205d) et, dans l’affirmative, si l’agent devait tenir compte de cette dispense dans le cadre de son examen de la demande du demandeur.

[38]           Le demandeur cite à la Cour la Section 5.39 des Procédures FW 1 de CIC et affirme que l’agent était tenu d’appliquer l’alinéa 205d) du Règlement parce qu’il [traduction] « n’entrait pas au [Canada] pour prêcher une doctrine ou être au service d’une congrégation […] », mais qu’il se trouvait déjà au Canada où il exerçait « des fonctions religieuses pour un organisme religieux ou de bienfaisance canadien […] ».

[39]           Le défendeur affirme que le demandeur était tenu de présenter un AMT pour obtenir un permis de travail parce qu’il n’était pas visé par l’alinéa 205d), qui ne s’applique pas aux travailleurs appartenant à un ordre religieux qui entrent au Canada pour prêcher une doctrine ou être au service d’une congrégation.

[40]           La lettre du consultant du demandeur, datée du 16 septembre 2013, indique très clairement que le demandeur sollicitait le « rétablissement de la prolongation d’un permis de travail » :

[traduction]
Il a été offert à M. Sharma de prolonger son poste et il a accepté l’offre d’emploi présentée par la Shree Mata Bhameshwari Durga Devi Society. L’employeur a demandé un AMT pour l’employé, mais cette demande a été rejetée le 24 juillet 2013 en raison d’une erreur technique. L’employeur a demandé un nouvel AMT, cette fois conformément aux nouvelles lignes directrices de RHDCC, c.­à­d. qu’il doit annoncer le poste pendant un mois et ensuite soumettre une nouvelle demande, de sorte qu’il ne pourra présenter une demande d’AMT avant l’expiration de cette période. Nous aimerions prolonger son permis de travail concernant cet employeur, lorsque nous aurons reçu confirmation de Service Canada au sujet du présent dossier, nous la transmettrons immédiatement à votre bureau.

[41]           Cette lettre montre clairement que le demandeur savait que sa demande devait être accompagnée d’un AMT valide.

[42]           Il n’est pas contesté que le demandeur aurait pu récupérer son statut de visiteur en invoquant l’alinéa 186l), mais il a clairement demandé une « prolongation du permis de travail ».

[43]           Il n’est pas non plus contesté que le demandeur pouvait demander, en vertu de l’alinéa 186l), un permis de travail après être entré au Canada et y avoir travaillé. Voici les dispositions pertinentes de l’article 199 du Règlement :

Demande après l’entrée au Canada

Application after entry

199. L’étranger peut faire une demande de permis de travail après son entrée au Canada dans les cas suivants :

199. A foreign national may apply for a work permit after entering Canada if they

a) il détient un permis de travail;

(a) hold a work permit;

b) il travaille au Canada au titre de l’article 186 et n’est pas un visiteur commercial au sens de l’article 187;

(b) are working in Canada under the authority of section 186 and are not a business visitor within the meaning of section 187;

[…]

[…]

[44]           Le demandeur avait déjà demandé et obtenu un permis de travail à titre de personne travaillant au Canada au sens de l’alinéa 199b). Pour obtenir ce permis de travail, il avait présenté un AMT valide. Donc, encore une fois, il savait très bien qu’il était tenu de fournir un AMT.

[45]           Le principal argument avancé par le demandeur dans la présente demande est qu’il avait le droit d’obtenir un permis de travail sans AMT grâce à la dispense prévue à l’alinéa 205d) du Règlement. Or, outre le fait que le demandeur n’a jamais invoqué cette dispense au soutien de sa demande de permis de travail et de rétablissement, j’estime que l’alinéa 205d) s’applique uniquement aux demandes présentées en vertu de l’article 200 du Règlement et qu’il pouvait donc, de toute façon, être invoqué par le demandeur en application de l’article 199. De plus, le demandeur n’a pas démontré comment il aurait pu demander un permis de travail sous le régime de l’article 199. Il cherche tout simplement à bénéficier de la dispense prévue à l’alinéa 205d), qui s’applique uniquement aux demandes fondées sur l’article 200.

[46]           Je pense que le demandeur aurait pu demander et obtenir le rétablissement de son statut de visiteur en vertu de l’alinéa 186l). Cependant, et pour une raison que j’ignore, il a clairement demandé, sur les conseils du conseil qu’il avait à l’époque, le rétablissement de son statut de travailleur. Le fait qu’il se soit rendu compte par la suite que c’était une erreur ne rend pas la décision déraisonnable.

[47]           Le deuxième argument du demandeur est que, même s’il ne pouvait invoquer en l’espèce l’alinéa 205d), l’agent était tenu de rétablir son statut en application de l’alinéa 186l) ou de l’informer de cette possibilité.

[48]           À cet égard, le demandeur s’appuie fortement sur une partie de la Section 5.13 des Procédures FW 1, mais si l’on cite intégralement la partie pertinente, on constate qu’elle ne s’applique aucunement au demandeur :

  Dans les bureaux à l’étranger ou aux points d’entrée (PDE)

Si un étranger qui est normalement autorisé à travailler en vertu du R186l) présente une demande de permis de travail à un bureau à l’étranger ou à un PDE, sa demande doit être examinée en vertu du R2001).

Dans le cas des travailleurs appartenant à un ordre religieux qui ne sont pas visés au R200(1)c)(i) et (ii), la demande de permis de travail doit être accompagnée d’un AMT. Il n’y a pas de dispense de l’AMT dans ces cas; la dispense au titre du R205a) (intérêts canadiens, code C10) ne s’applique pas. Voir la Section 5.29 pour des explications plus détaillées sur l’application du R205a).

Si une demande de permis de travail est présentée sans un AMT et que le demandeur n’est pas admissible à une dispense, l’agent doit refuser de délivrer le permis. S’il y a lieu, l’agent peut délivrer un visa de résident temporaire (au bureau à l’étranger) ou une fiche du visiteur (au PDE). Il importe d’informer le demandeur qu’il peut travailler au Canada sans permis de travail en vertu du R186l) et que, s’il désire toujours un permis de travail, il peut en faire la demande en vertu du R199b) après être entré au Canada et avoir obtenu un AMT.

  Au CTD de Vegreville

Les travailleurs appartenant à un ordre religieux qui sont au Canada et qui ont été initialement autorisés à prêcher une doctrine ou à être au service d’une congrégation en vertu du R186l) peuvent présenter une demande de permis de travail au CTD de Vegreville en vertu du R199b), à condition qu’ils aient obtenu préalablement un AMT. Le CTD de Vegreville ne délivre pas de permis de travail aux demandeurs qui n’ont pas un AMT.

[Caractères gras dans l’original.]

[49]           De toute évidence, le demandeur ne présentait pas sa demande dans un bureau à l’étranger ou à un point d’entrée de sorte qu’il ne pouvait raisonnablement s’attendre à ce qu’elle soit traitée conformément au troisième paragraphe ci-dessus.

[50]           Il est également évident que le demandeur présentait sa demande au CTD de Vegreville, ce qui veut dire qu’il pouvait raisonnablement s’attendre à ce que, sans AMT, « le CTD ne délivre pas de permis de travail. » C’est la raison pour laquelle le conseil du demandeur tenait, dans sa lettre du 16 septembre 2013, à informer Vegreville qu’il présenterait une nouvelle demande lorsqu’il aurait obtenu un AMT.

[51]           Si le demandeur est sincère lorsqu’il dit que ses intentions ont été déformées – et je n’ai aucune raison de penser qu’il ne l’est pas – alors une erreur grave a été commise. Il paraît difficile de savoir, au vu du dossier, qui est finalement responsable de cette erreur, s’il y a bien un responsable. Je suis toutefois convaincu que cette erreur ne peut être imputée au défendeur ou à l’agent qui a traité les demandes du demandeur. Je conclus que cette décision ne contient aucune erreur susceptible de contrôle.

[52]           Les avocats conviennent qu’il n’y a pas de question à certifier en l’espèce et la Cour est d’accord.

 


JUGEMENT

LA COUR ORDONNE :

1.      La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

2.      Il n’y a pas de question à certifier.

« James Russell »

Juge

Traduction certifiée conforme

Édith Malo, LL.B.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-8011-13

 

INTITULÉ :

RAJPAL SHARMA c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Vancouver (COLOMBIE-bRITANNIQUE)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 10 JUILLET 2014

 

JUGEMENT ET MOTIFS DU JUGEMENT :

LE JUGE RUSSELL

 

DATE DES MOTIFS :

LE 8 AOÛT 2014

 

COMPARUTIONS :

Baldev S. Sandhu

 

POUR LE demandeur

RAJPAL SHARMA

 

Marjan Double

 

POUR LE défendeur

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Sandhu Law Office

Avocat

Surrey (Colombie-Britannique)

 

POUR LE demandeur

RAJPAL SHARMA

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

POUR LE défendeur

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

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