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Date : 20140214


Dossier : T-1777-12

 

Référence : 2014 CF 148

Ottawa (Ontario), le 14 février 2014

En présence de madame la juge Mactavish

 

ENTRE :

WESTERN CANADA WILDERNESS COMMITTEE, FONDATION DAVID SUZUKI, GREENPEACE CANADA, SIERRA CLUB OF BRITISH COLUMBIA FOUNDATION ET

WILDSIGHT

 

demandeurs

et

MINISTRE DES PÊCHES ET DES OCÉANS ET

MINISTRE DE L’ENVIRONNEMENT

 

défendeurs

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]               Lorsqu’une espèce est identifiée comme étant en voie de disparition, menacée ou disparue du pays, la Loi sur les espèces en péril, LC 2002, ch. 29 (la LEP ou la Loi), exige du ministre compétent qu’il publie un projet de programme de rétablissement à l’égard de l’espèce en question dans un délai précis. La Loi exige également du ministre qu’il publie la version définitive du programme de rétablissement peu de temps après.

 

[2]               Le ministre des Pêches et des Océans n’a pas respecté les délais prévus par la loi pour l’élaboration et la publication de programmes de rétablissement concernant la population d’esturgeon blanc de la rivière Nechako (l’esturgeon blanc de la Nechako) et la population de rorqual à bosse du Pacifique Nord (le rorqual à bosse du Pacifique). Le ministre de l’Environnement n’a pas respecté non plus les délais prévus par la loi pour l’élaboration et la publication de programmes de rétablissement concernant le guillemot marbré et la population de caribou des bois des montagnes du Sud (le caribou des montagnes du Sud). Il s’agit des quatre espèces en cause dans les présentes demandes de contrôle judiciaire réunies (collectivement les quatre espèces).

 

[3]               Le défaut, de la part des ministres, d’agir en temps opportun concernant les quatre espèces a amené les demandeurs à introduire les présentes demandes de contrôle judiciaire. Les demandeurs sollicitent un jugement déclaratoire au sujet de la conduite des ministres ainsi que des ordonnances de mandamus pour obliger les ministres à exécuter leurs obligations légales concernant les quatre espèces. 

 

[4]               L’introduction de la présente instance a provoqué la publication de projets de programme de rétablissement pour trois des quatre espèces peu avant le début de l’audience, de même que la publication de la version définitive du programme de rétablissement pour une de ces espèces. Un projet de programme de rétablissement a été publié pour la quatrième espèce peu après la fin de l’audience. Dans chacun des cas, cependant, le projet de programme de rétablissement a été publié plusieurs années après l’expiration du délai applicable prévu par la loi.

 

[5]               Les ministres admettent qu’ils ont fait défaut d’exécuter leurs obligations légales aux termes de la LEP. Par contre, ils contestent la position des demandeurs concernant les conséquences juridiques qui devraient découler de ce manquement.

 

[6]               Pour les motifs qui suivent, j’ai conclu que les demandes de contrôle judiciaire devraient être accueillies et que, à la lumière des énormes retards dans chacun des cas, un jugement déclaratoire devrait être rendu concernant la conduite des ministres.

 

[7]               Étant donné que les projets de programme de rétablissement ont maintenant été publiés pour l’ensemble des quatre espèces en cause, les demandes de mandamus seront rejetées dans la mesure où elles ont trait aux projets de programme de rétablissement. Conformément à l’entente conclue entre les parties, je demeurerai saisie de la présente affaire afin de permettre aux parties de présenter des observations additionnelles quant à savoir si des ordonnances de mandamus devraient être rendues concernant la publication de la version définitive des programmes de rétablissement pour les trois espèces pour lesquelles on n’a pas encore publié une telle version.

 

Les parties

[8]               Les demandeurs, le Western Canada Wilderness Committee, la Fondation David Suzuki, Greenpeace Canada, la Sierra Club of British Columbia Foundation et Wildsight sont des organisations non gouvernementales dédiées à la protection de l’environnement et à la préservation des espèces en péril au Canada. Ces organisations se qualifient elles‑mêmes de parties à un litige d’intérêt public qui ont un intérêt dans la protection et le rétablissement des espèces en péril au Canada.

 

[9]               Les ministres n’ont pas soulevé de question relativement à la qualité des demandeurs pour agir et présenter les présentes demandes.

 

[10]           Les défendeurs, le ministre des Pêches et des Océans et le ministre de l’Environnement, sont les « ministres compétents » aux termes de l’article 2 de la LEP et ils sont responsables des quatre espèces en cause dans les présentes demandes. Le ministre des Pêches et des Océans est le ministre compétent pour l’esturgeon blanc de la Nechako et le rorqual à bosse du Pacifique, alors que le ministre de l’Environnement est le ministre compétent pour le guillemot marbré et le caribou des montagnes du Sud.

 

La Loi sur les espèces en péril

[11]           Les dispositions applicables de la LEP sont entrées en vigueur le 5 juin 2003. L’édiction de la LEP a eu pour effet d’incorporer les objectifs de la Convention sur la diversité biologique (négociée sous l’impulsion de l’Organisation des Nations Unies et ratifiée par le Canada en décembre 1992) dans la législation canadienne.

 

[12]           L’objet de la LEP, énoncé à l’article 6, est de « […] prévenir la disparition — de la planète ou du Canada seulement — des espèces sauvages, [de] permettre le rétablissement de celles qui, par suite de l’activité humaine, sont devenues des espèces disparues du pays, en voie de disparition ou menacées et [de] favoriser la gestion des espèces préoccupantes pour éviter qu’elles ne deviennent des espèces en voie de disparition ou menacées ». Le libellé complet des dispositions applicables de la LEP est joint en annexe des présents motifs.

 

[13]           À l’article 2 de la Loi, on définit l’expression « espèce en péril » comme une « [e]spèce sauvage disparue du pays, en voie de disparition, menacée ou préoccupante ». Une « espèce disparue du pays » est une espèce « qu’on ne trouve plus à l’état sauvage au Canada, mais qu’on trouve ailleurs à l’état sauvage ». Une « espèce en voie de disparition » est une « [e]spèce sauvage qui, de façon imminente, risque de disparaître du pays ou de la planète », alors qu’une « espèce menacée » est une « [e]spèce sauvage susceptible de devenir une espèce en voie de disparition si rien n’est fait pour contrer les facteurs menaçant de la faire disparaître ». Enfin, une « espéce préoccupante » est une « [e]spèce sauvage qui peut devenir une espèce menacée ou une espèce en voie de disparition par l’effet cumulatif de ses caractéristiques biologiques et des menaces signalées à son égard ».

 

[14]           La LEP crée un processus pour la classification des espèces par niveau de péril. L’article 14 de la Loi constitue le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada (le COSEPAC), lequel est un comité indépendant d’experts. Selon le paragraphe 15(1) de la Loi, le COSEPAC a pour mission d’évaluer la situation de chaque espèce sauvage qu’il estime être en péril, de signaler les menaces réelles ou potentielles à son égard et d’établir, selon le cas, que l’espèce est disparue, disparue du pays, en voie de disparition, menacée ou préoccupante.

 

[15]           Si une espèce est classée comme étant « en péril », le ministre de l’Environnement doit alors faire une recommandation au gouverneur en conseil d’inscrire l’espèce à l’annexe 1 de la Loi avec la classification attribuée par le COSEPAC, de ne pas inscrire l’espèce ou de renvoyer l’affaire au COSEPAC pour nouvel examen.

 

[16]           Une fois qu’une espèce est inscrite à l’annexe 1 de la Loi, le paragraphe 37(1) prévoit que le ministre compétent doit élaborer un programme de rétablissement pour l’espèce en question et les délais prévus par la loi commencent à courir.

 

[17]           Le paragraphe 42(1) de la Loi prévoit que, dans le cas d’une espèce en voie de disparition, le ministre compétent doit mettre un projet de programme de rétablissement pour l’espèce dans le registre public établit aux termes de l’article 120 de la Loi dans l’année suivant l’inscription de l’espèce dans l’annexe 1. Un projet de programme de rétablissement doit être mis dans le registre public dans les deux ans suivant l’inscription de l’espèce, dans le cas d’une espèce menacée ou disparue du pays.

 

[18]           Pour les espèces inscrites à l’annexe 1 à l’entrée en vigueur des dispositions applicables de la Loi, le paragraphe 42(2) exige que le ministre compétent mette un projet de programme de rétablissement dans le registre public dans les trois ans suivant cette date dans le cas d’une espèce en voie de disparition, et dans les quatre ans dans le cas d’une espèce menacée ou disparue du pays.

 

[19]           Lorsqu’une espèce est ajoutée à l’annexe 1 par le gouverneur en conseil par suite d’une évaluation faite aux termes de l’article 130 de la Loi, l’article 132 de la LEP exige qu’un programme de rétablissement pour l’espèce soit élaboré dans les trois ans dans le cas d’une espèce en voie de disparition, et dans les quatre ans dans le cas d’une espèce menacée.

 

[20]           Quel que soit le processus suivi pour inscrire les espèces, une fois qu’un projet de programme de rétablissement a été mis dans le registre pour une espèce en péril, l’article 43 de la Loi prévoit une période de 60 jours pour les observations du public. Le ministre compétent a ensuite 30 jours additionnels pour étudier les observations qui lui ont été présentées, apporter les modifications qu’il estime indiquées et mettre le texte définitif du programme de rétablissement dans le registre public.

 

[21]           Les programmes de rétablissement doivent répondre aux menaces à la survie des espèces, y compris toute perte de l’habitat essentiel. Le ministre doit ensuite élaborer un plan d’action fondé sur le programme de rétablissement. Aucun délai n’est prévu par la loi pour l’élaboration d’un plan d’action.

 

[22]           Comme il a déjà été mentionné, les délais pour la production du projet et de la version définitive des programmes de rétablissement dépendent du niveau de péril évalué et du processus suivi, parmi plusieurs, pour l’inscription de l’espèce en question. Selon ce que je comprends, il n’y a pas de désaccord fondamental entre les parties quant aux délais applicables dégagés dans les paragraphes qui suivent.

 

L’esturgeon blanc de la Nechako

[23]           L’esturgeon blanc de la Nechako a été inscrit en tant qu’espèce en voie de disparition à annexe 1 de la LEP le 15 août 2006, par suite d’une évaluation faite aux termes de l’article 130 de la Loi. Les défendeurs admettent que, conformément à l’article 132 de la Loi, le ministre des Pêches et des Océans devait mettre un projet de programme de rétablissement pour l’esturgeon blanc de la Nechako dans le registre public créé aux termes de la Loi dans les trois ans, c’est‑à‑dire le 15 août 2009 au plus tard. La Loi exigeait en outre que la version définitive du programme de rétablissement soit mise dans le registre public au plus tard le 16 novembre 2009.

 

[24]           Au moment où les demandeurs ont introduit leur demande de mandamus concernant le projet de programme de rétablissement pour l’esturgeon blanc de la Nechako, soit le 25 septembre 2012, le projet de programme de rétablissement n’avait toujours pas été mis dans le registre, et le délai était écoulé depuis plus de trois ans.

 

[25]           Les défendeurs admettent également que, par suite de l’introduction de la présente instance, le ministre des Pêches et des Océans a décidé de prioriser cette affaire. Cela a conduit à la mise dans le registre public d’un projet de programme de rétablissement pour l’esturgeon blanc de la Nechako à la mi‑décembre 2013, soit moins d’un mois avant le début de l’audience, et plus de quatre ans après que le délai prévu par la loi pour ce faire fut expiré.

 

Le rorqual à bosse du Pacifique

[26]           Le rorqual à bosse du Pacifique a été inscrit, à titre d’espèce menacée, à l’annexe 1 de la LEP le 12 janvier 2005, par suite d’une évaluation faite aux termes de l’article 130 de la Loi. Le ministre des Pêches et des Océans devait donc mettre un projet de programme de rétablissement pour le rorqual à bosse du Pacifique dans le registre public le 12 janvier 2009 au plus tard, et la version définitive du programme de rétablissement était due pour le 14 avril 2009.

 

[27]           Au moment où les demandeurs ont introduit leur demande de mandamus concernant le projet de programme de rétablissement pour le rorqual à bosse du Pacifique, le projet de programme de rétablissement n’avait toujours pas été mis dans le registre et il était en retard de près de quatre ans.

 

[28]           Comme dans le cas de l’esturgeon blanc de la Nechako, l’introduction de la présente instance a amené le ministre des Pêches et des Océans à faire avancer l’affaire. Un projet de programme de rétablissement pour le rorqual à bosse du Pacifique a été mis dans le registre public le 17 juillet 2013, et la version définitive du programme de rétablissement fut publiée le 21 octobre 2013, soit avec un retard de plus de quatre ans.

 

[29]           Du fait que la version définitive du programme de rétablissement a maintenant été mise dans le registre pour le rorqual à bosse du Pacifique, les demandeurs ne sollicitent plus d’ordonnance de mandamus relativement à cette espèce, mais ils demandent toujours un jugement déclaratoire.

 

Le guillemot marbré

[30]           Le guillemot marbré est un oiseau de mer qui se nourrit de petits poissons et qui cherche sa nourriture dans les eaux côtières de la Colombie‑Britannique ainsi que dans les forêts anciennes adjacentes. Le guillemot marbré a été inscrit en tant qu’espèce menacée le 5 juin 2003. Par conséquent, il fallait qu’un projet de programme de rétablissement soit mis dans le registre au plus tard le 5 juin 2007, et la version définitive du programme était due le 6 septembre 2007.

 

[31]           Au moment où les demandeurs ont introduit leur demande de mandamus concernant le projet de programme de rétablissement pour le guillemot marbré, soit en septembre 2012, aucun projet de programme de rétablissement n’avait encore été mis dans le registre public, et il était en retard de plus de cinq ans.

 

[32]           L’introduction de la présente instance a également incité le ministre de l’Environnement à faire avancer l’affaire, et un projet de programme de rétablissement pour le guillemot marbré fut mis dans le registre public le 7 janvier 2014, soit le jour précédant le début de l’audience ainsi que quelque six ans et demi après que le délai prévu par la loi pour la mise d’un tel document dans le registre fut expiré.

 

Le caribou des montagnes du Sud

[33]           Le caribou des montagnes du Sud a été inscrit comme espèce menacée le 5 juin 2003. Un projet de programme de rétablissement aurait donc dû avoir été mis dans le registre au plus tard le 5 juin 2007, et la version définitive du programme de rétablissement devait avoir été mise dans le registre le 6 septembre 2007 au plus tard. Aucun projet de programme de rétablissement pour le caribou des montagnes du Sud n’avait été mis dans le registre au moment de l’audition de la présente affaire. Toutefois, les avocats des défendeurs ont informé la Cour du fait que le ministre de l’Environnement s’était engagé à mettre un projet de programme de rétablissement dans le registre au plus tard le 17 janvier 2014, et on m’a par la suite avisée que cela avait été fait ce jour‑là, quelque six ans et demi après que le délai fut expiré.

 

Les demandes de contrôle judiciaire

[34]           Les demandeurs ont introduit leurs quatre demandes de contrôle judiciaire le 25 septembre 2012. Ils ont choisi, comme sujets de leurs demandes, un mammifère terrestre et un oiseau migrateur dont le ministre de l’Environnement était responsable, avec un mammifère aquatique et un poisson qui relevaient du ministre des Pêches et des Océans.

 

[35]           Pour les demandeurs, ces quatre demandes sont représentatives des problèmes constants et généralisés qu’ils ont rencontrés avec le ministre des Pêches et des Océans et le ministre de l’Environnement concernant l’application des dispositions de la LEP relatives au programme de rétablissement.

 

[36]           À titre de réparation, les demandeurs sollicitent un jugement déclaratoire portant que le défaut ou le refus continu, de la part des ministres, de mettre les projets de programme de rétablissement pour les quatre espèces dans le registre public, comme ils étaient tenus de le faire selon les dispositions de la LEP, est illégal.

 

[37]           Dans les demandes, on cherche aussi à obtenir des ordonnances de mandamus obligeant le ministre compétent à mettre dans le registre public les projets de programme de rétablissement pour chacune des quatre espèces dans les 30 jours de la date du jugement de la Cour et de mettre dans le registre public la version définitive des programmes de rétablissement pour les quatre espèces dans les 90 jours de la date à laquelle le projet de programme de rétablissement pertinent a été mis dans le registre public.

 

[38]           Enfin, les demandeurs demandent qu’on leur accorde les dépens, s’ils ont gain de cause, ou une ordonnance portant qu’ils ne sont pas tenus de payer des dépens aux ministres, advenant que les demandes soient rejetées.

 

[39]           Par une ordonnance du protonotaire Lafrenière, les quatre demandes ont été réunies, et il a ordonné qu’elles soient entendues ensemble, sur la base d’une preuve commune.

 

Les concessions faites par les ministres

[40]           Les ministres ont fait un certain nombre d’admissions et de concessions qui ont grandement aidé à limiter et à contenir les questions en litige dans la présente cause.

 

[41]           Plus particulièrement, les ministres reconnaissent ce qui suit :

1.         La LEP ne confère aucun pouvoir discrétionnaire aux ministres pour la prorogation des délais pour l’exécution de leurs obligations légales quant à l’élaboration et la mise dans le registre du projet et de la version définitive des programmes de rétablissement pour les espèces en péril;

 

2.         Les ministres sont légalement tenus de respecter les délais prévus par la loi et ils ne l’ont pas fait dans les présents cas;

 

3.         Le non‑respect des délais prévus par la loi dans la présente instance n’était pas anodin : il y a eu des [traduction] « retards importants » dans l’élaboration des projets de programme de rétablissement pour chacune des quatre espèces, et le délai pour la mise des documents dans le registre était [traduction] « gravement dépassé »;

 

4.         Les ministres ont fourni des explications pour les retards dans la mise des projets de programme de rétablissement dans le registre pour chacune des quatre espèces, mais ces explications ne changent rien au fait que les ministres avaient violé les dispositions de la LEP.

 

[42]           Les avocats des défendeurs affirment que les explications données concernant les retards à mettre dans le registre les projets de programme de rétablissement pour les quatre espèces ne constituent pas une justification pour le défaut des ministres de respecter les dispositions de la Loi. Les raisons invoquées pour les retards sont plutôt des éléments dont la Cour devrait tenir compte pour décider s’il y a lieu ou non de rendre des ordonnances de mandamus, et pour déterminer les modalités de ces ordonnances.

 

[43]           Les défendeurs ont produit une preuve considérable composée des affidavits de quatre déposants : deux cadres supérieurs du ministère des Pêches et des Océans, et deux autres d’Environnement Canada.

 

[44]           Cependant, avant d’examiner les explications fournies par les ministres, il est d’abord nécessaire d’étudier les requêtes présentées par les parties relativement à la preuve par affidavit déposée dans la présente affaire.

 

Les requêtes en radiation

[45]           Avant le début de l’audience, les demandeurs ont présenté une requête en radiation visant des parties de la preuve des défendeurs. Ceux‑ci ont alors répliqué par une requête incidente qui sollicitait la radiation de parties de l’affidavit du principal déclarant des demandeurs, ce que le protonotaire Lafrenière a décrit, dans son ordonnance du 8 août 2013, comme étant essentiellement une [traduction] « réaction du tac au tac », plutôt que comme une réelle préoccupation au sujet du préjudice découlant de l’affidavit en cause.

 

[46]           Le protonotaire Lafrenière a convenu avec les demandeurs que des parties des affidavits des défendeurs [traduction] « cont[enaient] du ouï‑dire, des conjectures, des arguments et des conclusions plutôt que des faits, ainsi qu’une preuve sous forme d’opinion ». Toutefois, il n’était pas convaincu que le fait de laisser la preuve contestée au dossier causerait un grave préjudice ou entraverait l’issue ordonnée de la présente instance. Par conséquent, il a rejeté les deux requêtes, sous réserve des droits des parties d’avancer à nouveau leurs arguments à l’audience sur le fond.

 

[47]           Lors de l’audience, les parties ont convenu qu’elles étaient satisfaites du fait de laisser les parties contestées de la preuve de leurs adversaires dans le dossier et du fait que la Cour prenait en compte leurs objections pour déterminer le poids à attribuer aux éléments de preuve contradictoires. Les demandeurs ont également confirmé qu’ils ne sollicitaient plus l’autorisation de déposer d’autres affidavits dans la présente affaire en réponse à quelques‑uns des éléments de preuve des défendeurs.

 

[48]           À la lumière des récents développements dans la présente affaire, de même que des différentes concessions et admissions faites par les avocats des ministres, il n’est pas nécessaire d’examiner dans tous les détails la preuve des parties dans les présents motifs. Bien que je sois d’accord avec les demandeurs selon qui il y a des faiblesses dans la preuve des défendeurs, j’ai néanmoins tenu compte de toute la preuve pour en arriver à ma décision.

 

Les explications des ministres

[49]           Bien que les faits ayant causé des retards dans la mise des projets de programme de rétablissement dans le registre diffèrent quelque peu d’une espèce à l’autre, les défendeurs soulignent quatre défis importants qu’ils affirment avoir rencontrés dans l’élaboration des projets de programme de rétablissement pour les quatre espèces.

 

[50]           Premièrement, l’édiction de la LEP a obligé les ministres à élaborer à nouveau des politiques, des normes, des structures administratives et des processus de consultation. Ils ont aussi dû acquérir l’expertise scientifique nécessaire à la mise en œuvre de la législation. Tout cela a pris du temps.

 

[51]           Deuxièmement, plusieurs des déposants des défendeurs attribuent au moins certains des retards dans l’élaboration des programmes de rétablissement à des [traduction] « questions liées à la capacité organisationnelle », y compris le roulement de personnel. Les retards étaient aussi causés par la nécessité de gérer des obligations légales contradictoires, y compris le besoin de consulter les intervenants, notamment les gouvernements provinciaux, les Premières Nations, les propriétaires fonciers et les représentants de l’industrie.

 

[52]           Il faudrait, cependant, souligner que, bien que le manque de ressources ait été un thème récurrent dans la preuve des défendeurs, leurs avocats ont informé la Cour qu’on leur avait expressément donné comme instructions de ne pas soulever ce point pour justifier le retard dans la mise dans le registre des projets de programme de rétablissement pour les quatre espèces.

 

[53]           Troisièmement, les ministres affirment qu’ils ont dû relever des défis sur le plan scientifique, en particulier concernant la désignation de l’habitat essentiel des espèces en question.

 

[54]           L’« habitat essentiel » est défini à l’article 2 de la LEP comme étant « [l]’habitat nécessaire à la survie ou au rétablissement d’une espèce sauvage inscrite, qui est désigné comme tel dans un programme de rétablissement ou un plan d’action élaboré à l’égard de l’espèce ». La désignation de l’habitat essentiel de l’espèce est nécessaire à la survie et au rétablissement d’une espèce : en fait, le préambule de la LEP décrit la préservation de l’habitat des espèces en péril comme étant « important[e] pour leur conservation ».

 

[55]           Enfin, les ministres décrivent les défis auxquels ils disent avoir été confrontés en réponse au changement, en particulier à l’évolution de la compréhension du droit résultant de différentes décisions de la Cour. Par exemple, le ministère des Pêches et des Océans a entrepris [traduction] « une analyse complète des politiques » dans le but d’élaborer de nouvelles lignes directrices opérationnelles pour la désignation de l’habitat essentiel, à la suite des décisions de la Cour dans les affaires Environmental Defence Canada c. Canada (Pêches et Océans), 2009 CF 878, 349 FTR 225 (Le naseux de Nooksack), et Fondation David Suzuki c. Canada (Pêches et Océans), 2010 CF 1233, [2012] 3 RCF 136,  infirmée en partie pour d’autres motifs 2012 CAF 40, 427 N.R. 110 (L’épaulard).

 

Les conséquences du défaut d’agir de la part des ministres

[56]           Les demandeurs soulignent que le défaut de mettre dans le registre les programmes de rétablissement pour les quatre espèces en temps opportun a eu des conséquences négatives pour les espèces, puisque cela les a privés d’un habitat essentiel désigné. Cela a, par ricochet, empêché la mise en place de mesures de rétablissement et a nié aux espèces la protection juridique de leur habitat essentiel ainsi que l’interdiction de sa destruction.

 

[57]           Les demandeurs sont particulièrement préoccupés par le fait que l’habitat essentiel des quatre espèces soit en danger à cause du développement industriel qui se fait sur la côte de la Colombie‑Britannique. Par exemple, les demandeurs citent le projet de développement du pipeline Northern Gateway d’Enbridge qui, affirment‑ils, aura un impact négatif sur l’ensemble des quatre espèces en cause dans les présentes demandes. Je ne comprends pas que les défendeurs contestent cette thèse, bien qu’ils nient effectivement que des programmes de rétablissement aient été intentionnellement retardés dans le but de faciliter le développement industriel.

 

[58]           Les ministres soutiennent que le travail qui a été fait pour l’élaboration de projets de programme de rétablissement pour les quatre espèces a été utilisé par leur ministère pour formuler des observations à la Commission d’examen conjoint du projet Enbridge Northern Gateway. Les observations avaient trait aux répercussions potentielles du projet sur les quatre espèces et aux possibles mesures d’atténuation pour minimiser ces répercussions.

 

[59]           J’admets que le travail effectué par les ministres concernant les projets de programme de rétablissement pour les quatre espèces peut bien avoir aidé à formuler des observations à la Commission d’examen conjoint du projet Enbridge Northern Gateway quant à l’impact potentiel du projet sur les quatre espèces.

 

[60]           Cela dit, l’absence de programmes de rétablissement dans le registre prive les ministres d’une force considérable pour contrer l’impact du développement industriel sur les espèces en péril. En outre, le fait de faire des observations à un organisme de réglementation de cette nature ne peut équivaloir au niveau de protection qui serait fourni aux quatre espèces si les programmes de rétablissement avaient été mis dans le registre pour eux en temps opportun. Comme les demandeurs le soulignent, les obligations légales des défendeurs d’empêcher la destruction de l’« habitat essentiel » ne sont en général pas en jeu tant qu’un tel habitat n’a pas été désigné dans un programme de rétablissement ou un plan d’action pour les espèces.

 

Les questions en litige

[61]           Les parties ont qualifié les questions en litige soulevées par les présentes demandes de différentes façons. Je conviens avec les défendeurs que les affaires soulèvent ultimement deux questions fondamentales. La première est de savoir s’il y a eu un manquement, de la part des ministres, à leur obligation prévue par la loi de mettre dans le registre les projets de programme de rétablissement pour les quatre espèces dans les délais prévus par la loi. Comme il a déjà été mentionné, les défendeurs concèdent qu’il y a bel et bien eu une telle contravention à la loi.

 

[62]           Cela nous amène à la deuxième question : quelles conséquences devraient découler de ce manquement? Je traiterai des questions dégagées par les demandeurs, y compris la pertinence d’une analyse relative à la norme de contrôle à l’égard de la présente affaire ainsi que la nature juridique des délais en cause prévus par la loi, dans ce contexte.

 

Devrait‑on accorder un jugement déclaratoire?

[63]           Les ministres soutiennent qu’on ne devrait pas accorder de jugement déclaratoire dans la présente affaire. Selon les ministres, le fait qu’ils ont concédé qu’ils étaient légalement tenus de respecter les délais prévus par la loi pour la mise dans le registre de projets de programme de rétablissement et qu’ils ont omis de le faire signifie que les jugements déclaratoires n’auraient aucune utilité sur le plan pratique.

 

[64]           À l’appui de cette affirmation, les défendeurs invoquent l’arrêt de la Cour suprême du Canada dans Bande indienne des Lax Kw'alaams c. Canada (Procureur général), 2011 CSC 56, [2011] 3 RCS 535, au paragraphe 14, où la Cour suprême a déclaré qu’« [e]n règle générale, les tribunaux ne rendent pas de jugement déclaratoire sur des questions qui ne sont pas en litige entre les parties ». Voir aussi l’arrêt Solosky c. La Reine, [1980] 1 RCS 821, 105 DLR (3d) 745.

 

[65]           Cela est incontestablement vrai en général, mais la Cour possède un large pouvoir discrétionnaire concernant le fait d’accorder ou non un jugement déclaratoire, et il y a des affaires où une telle réparation peut néanmoins être appropriée : voir, par exemple, Première Nation des K'Omoks c. Canada (Procureur général), 2012 CF 1160, 419 FTR 144, au paragraphe 44. Il s’agit justement d’un de ces cas.

 

[66]           Un jugement déclaratoire peut porter sur la légalité de l’action du gouvernement, tant prospectivement que rétroactivement : Reece c. Edmonton (City), 2011 ABCA 238, 335 DLR (4th) 600, au paragraphe 163, par la juge en chef Fraser, dissidente, mais pas sur ce point. En outre, les fonctionnaires ne sont pas au‑dessus des lois. Si un fonctionnaire agit en violation d’une loi, les cours de justice ont le droit de le déclarer : voir la décision Singh c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CF 757, 372 FTR 40, au paragraphe 40, citant Canada c. Kelso, [1981] 1 RCS 199, à la page 210.

 

[67]           Un examen du dossier dans les présentes affaires soulève un certain nombre de préoccupations. L’élaboration d’un projet de programme de rétablissement pour une espèce en péril est indubitablement un processus complexe impliquant la nécessité de réconcilier des exigences prévues par la loi et des priorités ministérielles qui sont contradictoires, ainsi que de consulter de multiples intervenants, d’autres niveaux de gouvernement et les Premières Nations. Le processus comporte également, pour les ministres, divers défis sur le plan administratif et implique une base de connaissances scientifiques qui évolue. On doit présumer, toutefois, que le législateur savait ce qu’il faisait lorsqu’il a créé les délais pour l’élaboration de projets de programme de rétablissement aux articles 42 et 132 de la LEP.

 

[68]           Il semble que la mise dans le registre de projets de programme de rétablissement ait été retardée dans les présentes affaires, en partie, par suite d’un désir d’atteindre un consensus parmi les intervenants. C’est particulièrement le cas pour les espèces aquatiques relevant du ministre des Pêches et des Océans.

 

[69]           Bien qu’il puisse être souhaitable d’en arriver à un consensus, il ne s’agit pas d’une exigence législative pour un programme de rétablissement. En réalité, l’article 39 de la LEP n’envisage qu’une collaboration avec les autres « [d]ans la mesure du possible ». Sous réserve des obligations constitutionnelles des ministres de consulter les Premières Nations, je conviens avec les demandeurs qu’il ne faudrait pas rechercher le consensus aux dépens des obligations légales imposées aux ministres.

 

[70]           En outre, comme l’a fait remarquer l’un des déclarants des ministres, un programme de rétablissement devrait être fondé sur la science, et non sur un consensus : voir le contre‑interrogatoire de Robert McLean, le directeur exécutif du Service canadien de la faune d’Environnement Canada, aux pages 3007 et 3022 du dossier des demandeurs. Voir aussi la décision Le naseux de Nooksack, au paragraphe 41.

 

[71]           Dans la mesure où le fondement scientifique des projets de programme de rétablissement est concerné, je conviens avec les demandeurs que [traduction] « la perfection ne devrait pas devenir l’ennemie du bien » dans les présentes affaires. L’article 38 de la LEP (qui incorpore le « principe de précaution » dans la Loi) est très clair : « le manque de certitude scientifique ne doit pas être prétexte à retarder » l’élaboration d’un programme de rétablissement pour une espèce en péril.

 

[72]           Le principe de précaution a été analysé par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt 114957 Canada Ltée (Spraytech, Société d'arrosage) c. Hudson (Ville), 2001 CSC 40, [2001] 2 RCS 241. Citant la Déclaration ministérielle de Bergen sur le développement durable (1990), la Cour a pris en note que « [l]es mesures adoptées doivent anticiper, prévenir et combattre les causes de la détérioration de l’environnement ». Par conséquent, « [l]orsque des dommages graves ou irréversibles risquent d’être infligés, l’absence d’une totale certitude scientifique ne devrait pas servir de prétexte pour ajourner l’adoption de mesures destinées à prévenir la détérioration de l’environnement » : au paragraphe 31.

 

[73]           En effet, comme le juge Russell l’a fait remarquer dans la décision de L’épaulard, « [l]es espèces en voie de disparition n’ont pas le temps d’attendre que [le ministre compétent] “fasse bien les choses” » : au paragraphe 66.

 

[74]           Il importe également de se rappeler que les projets de programme de rétablissement sont, en raison de leur nature même, sujets à changement selon les idées additionnelles reçues par le ministre compétent par l’entremise du processus de consultation. En outre, le contenu de la version définitive des programmes de rétablissement et des plans d’action n’est pas immuable. La LEP prévoit expressément que des modifications peuvent être apportées à chaque document en tout temps (voir le paragraphe 45(1) dans le cas des programmes de rétablissement et le paragraphe 52(1) dans le cas des plans d’action).

 

[75]           Il ressort également d’un examen du dossier qu’au sein des ministères concernés, de temps à autre, on a pris délibérément des décisions pour retarder ou reporter l’élaboration de projets de programme de rétablissement pour les quatre espèces.

 

[76]           Par exemple, dans le cas du guillemot marbré, de multiples projets de programme de rétablissement ont été élaborés pour cet oiseau entre 2003 et 2007. Un projet de programme de rétablissement fut envoyé à l’administration centrale du Service canadien de la faune d’Environnement Canada, pour approbation et mise dans le registre, en février 2008 (huit mois après l’expiration du délai applicable prévu par la loi pour la mise dans le registre du document).

 

[77]           Selon la preuve présentée par les défendeurs, le projet de programme de rétablissement a ensuite été [traduction] « mis en attente pour examen et approbation ». Toutefois, le personnel de l’administration centrale n’en a pas fait l’examen pendant plus d’un an. Lorsque le Comité exécutif du Service canadien de la faune a enfin examiné le document au printemps de 2009, certains changements devaient être apportés au document, bien que je note qu’il y a un certain degré de désaccord entre les déclarants des défendeurs quant à savoir dans quelle mesure il était nécessaire de travailler davantage ce document dans le but de le finaliser au niveau régional.

 

[78]           Selon l’affidavit du Dr Barry Douglas Smith, directeur régional de la région du Pacifique et du Yukon pour le Service canadien de la faune d’Environnement Canada, les changements ont été complétés dans l’intention de mettre le projet de programme de rétablissement pour le guillemot marbré dans le registre public à l’été de 2009 au plus tard : affidavit du Dr Smith, au paragraphe 80. Toutefois, la sortie de la décision de la Cour dans l’affaire Alberta Wilderness Assn c. Canada (Environnement), 2009 CF 710, 349 FTR 63 (Le tétras des armoises), à l’été de 2009 a reporté la publication afin de permettre une désignation, au moins partielle, de l’habitat essentiel de l’espèce.

 

[79]           Que s’est‑il passé ensuite? La réponse courte est : pas grand‑chose. Le Dr Smith déclare dans son affidavit que, en raison de pénuries de personnel  et de [traduction] « la nécessité de faire des progrès par rapport au très grand nombre de programmes de rétablissement en retard pour d’autres espèces », le travail de désignation de l’habitat essentiel pour le guillemot marbré n’a pas été achevé en 2009‑2010, et on a décidé de reporter cela à l’exercice suivant : affidavit du Dr Smith, au paragraphe 84.

 

[80]           Le travail ne fut toutefois pas non plus complété dans l’exercice financier 2010‑2011. Le Dr Smith explique dans son affidavit que, [traduction] « en raison de contraintes de capacité importantes », il [traduction] « estimait que c’était un risque acceptable de donner la priorité au travail sur des espèces en péril dont les populations étaient plus petites et sur lesquelles les menaces étaient plus immédiates » : affidavit du Dr Smith, au paragraphe 85.

 

[81]           Les problèmes de dotation semblent également avoir empêché tout travail de fond sur le projet de programme de rétablissement pour le guillemot marbré durant l’exercice 2011‑2012. En réalité, ce n’est pas avant d’avoir été identifié comme prioritaire en novembre 2012 que le travail de fond sur un projet de programme de rétablissement pour le guillemot marbré a recommencé, soit après l’introduction de la présente instance, et plus de cinq ans après le délai prescrit par la LEP pour la mise dans le registre d’un projet de programme de rétablissement pour cet oiseau : affidavit du Dr Smith, aux paragraphes 86 à 88.

 

[82]           Comme il a déjà été mentionné, un projet de programme de rétablissement pour le guillemot marbré a été mis dans le registre public le 7 janvier 2014, soit la veille du début de l’audience, et quelque six ans et demi après l’expiration du délai prévu par la loi pour la mise dans le registre d’un tel programme.

 

[83]           Bien que la cause d’une bonne partie du retard décrit par le Dr Smith dans son affidavit revient, en fin de compte, à une question de ressources, il y a lieu de répéter que les ministres n’invoquent pas expressément le manque de ressources comme justification pour le retard concernant les espèces en cause dans les présentes demandes.

 

[84]           L’introduction de la présente instance a amené les ministres compétents à mettre ces dossiers « sur le dessus de la pile », ce qui fait que les projets de programme de rétablissement sont maintenant dans le registre pour les quatre espèces. Cependant, le récent débordement d’activités sur ces dossiers ne règle pas la détérioration des conditions pour les quatre espèces en cause qui a pu survenir pendant les années durant lesquelles les ministres ont manqué à leurs obligations légales.

 

[85]           En outre, il semble que les retards qui se sont produits dans les quatre présents cas ne constituent que la pointe de l’iceberg. Il y a manifestement un problème systémique au sein des ministères en cause, étant donné le fait que les défendeurs reconnaissent qu’il reste quelque 167 espèces en péril pour lesquelles on n’a pas encore élaboré de programmes de rétablissement. À cet égard, il convient de noter que les ministres reconnaissent qu’ils n’ont respecté les délais prévus par la loi pour l’élaboration et la mise dans le registre de projets de programme de rétablissement pour aucune des autres 167 espèces.

 

[86]           En fait, on peut raisonnablement présumer que l’accélération de l’avancement des quatre cas en question ici, en réponse à l’introduction de la présente instance, peut bien avoir occasionné d’autres retards dans l’élaboration de programmes de rétablissement pour les autres espèces.

 

[87]           Cependant, le fait de répondre selon les besoins aux pressions externes, comme un litige en cours, ne tient pas compte du fait que le législateur a lui‑même identifié les priorités dans le traitement de ces affaires, en fixant des délais différents pour l’élaboration de projets de programme de rétablissement pour les espèces mises dans le registre, ces délais étant basés sur la mesure dans laquelle les espèces sont en péril.

 

[88]           Les défendeurs conviennent qu’on ne devrait pas s’attendre à ce que les demandeurs introduisent 167 demandes de contrôle judiciaire additionnelles dans le but d’obliger les ministres compétents à exécuter leurs obligations légales. Et cela ne serait pas non plus une réponse aux problèmes systémiques sous‑jacents qui se posent dans le processus de protection des espèces en péril, puisqu’il est clair qu’on ne peut donner la priorité à chaque cas sans enlever tout sens à la fixation des priorités.

 

[89]           Je conviens avec les défendeurs que rien n’établit qu’il y aurait eu de la mauvaise foi dans les présentes affaires. Toutefois, les défendeurs reconnaissent aussi qu’il n’est pas nécessaire de prouver la mauvaise foi pour qu’un jugement déclaratoire soit rendu.

 

[90]           La Cour suprême du Canada a fait observer que la primauté du droit est une caractéristique majeure de la démocratie canadienne : Doucet-Boudreau c. Nouvelle‑Écosse (Ministre de l’Éducation), 2003 CSC 62, [2003] 3 RCS 3, au paragraphe 31. En outre, comme la juge en chef Fraser l’a fait remarquer dans son opinion dissidente, dans l’arrêt Reece, la primauté du droit permet aux citoyens de s’adresser aux tribunaux judiciaires pour assurer l’application de la loi à l’encontre du pouvoir exécutif.

 

[91]           La juge en chef Fraser a continué en observant que [traduction] « […] les tribunaux ont le pouvoir d’examiner les mesures prises par le pouvoir exécutif pour juger si ces mesures sont conformes à la loi et, s’ils l’estiment justifié, ils peuvent déclarer illégale la mesure prise par l’État. Ce droit, qui appartient à la population, ne constitue pas une menace à la gouvernance démocratique, mais en est plutôt l’affirmation même » : au paragraphe 159.

 

[92]           Il n’est simplement pas acceptable que les ministres compétents continuent de ne pas respecter les délais impératifs que le législateur a établis. Dans les circonstances des présentes affaires, il est donc nécessaire et approprié d’accorder aux demandeurs le jugement déclaratoire qu’ils sollicitent, tant pour exprimer la désapprobation judiciaire de la situation actuelle que pour encourager les ministres compétents à se conformer à la loi à l’avenir.

 

[93]           En fait, les questions soulevées à l’origine par les présentes demandes sont [traduction] « véritables, non pas théoriques ou hypothétiques », dans la mesure où il y a encore de nombreuses espèces en péril pour lesquelles la mise dans le registre de projets de programme de rétablissement est en retard depuis longtemps : Danada Enterprises Ltd c. Canada (Procureur général), 2012 CF 403, 407 FTR 268, au paragraphe 67. En outre, je suis convaincue qu’un jugement déclaratoire sera utile et réglera, « de façon pratique », les problèmes posés par les présentes affaires : voir l’arrêt Solosky, précité, aux pages 832 et 833.

 

[94]           Par conséquent, un jugement déclaratoire sera rendu, lequel déclarera illégal le défaut, de la part des ministres, de mettre des projets de programme de rétablissement pour les quatre espèces dans le registre public dans les délais prescrits par les articles 42 et 132 de la LEP. Étant donné que le délai prévu par la loi pour la mise dans le registre de la version définitive des programmes de rétablissement pour trois des quatre espèces n’est toujours pas expiré, et qu’il semble y avoir eu, pour l’essentiel, respect des délais prévus par la loi pour la mise dans le registre de la version définitive du programme de rétablissement pour le rorqual à bosse du Pacifique, je refuse de rendre un jugement déclaratoire à cet égard.

 

[95]           Avant de passer à autre chose, je voudrais faire remarquer que les parties ont passé un certain temps à discuter, dans leurs observations, de la question de savoir si les délais fixés par la LEP pour la mise dans le registre de projets de programme de rétablissement étaient [traduction] « impératifs » ou [traduction] « directifs ». Tout en affirmant que cela constituait [traduction] « une distraction non pertinente » dans la présente affaire, les demandeurs soutiennent néanmoins que les délais sont [traduction] « impératifs », puisque la LEP prévoit que le ministre compétent « met » [dans la version anglaise de la Loi, on emploie le mot « must »] dans le registre le projet et la version définitive des programmes de rétablissement dans des délais précis.

 

[96]           En revanche, les défendeurs prétendent que les délais de la LEP ne sont pas impératifs [traduction] « au sens du droit administratif », mais qu’ils sont plutôt [traduction] « directifs ». À l’appui de cette prétention, les défendeurs soulignent que l’obligation dont il faut s’acquitter est publique, et que la Loi ne prévoit pas de pénalité pour le défaut de respecter les délais en question. En outre, selon la prépondérance des inconvénients, les délais devraient être interprétés comme étant directifs plutôt qu’impératifs, parce que le fait de les interpréter autrement contreviendrait aux objectifs de la LEP.

 

[97]           En particulier, les défendeurs affirment que le fait d’interpréter les délais comme étant impératifs signifierait que les ministres perdraient le pouvoir de mettre dans le registre des programmes de rétablissement pour les espèces en péril une fois que les délais prévus dans la Loi seraient expirés.

 

[98]           Il ressort de la jurisprudence citée par les parties que l’importance de la distinction entre des délais « impératifs » et « directifs » est que, comme le laissent entendre les défendeurs, une autorité publique qui exerce un pouvoir prévu par la loi perd sa compétence une fois que le délai est expiré : voir Renvoi : Droits linguistiques au Manitoba, [1985] 1 RCS 721, [1985] ACS no 36, au paragraphe 35.

 

[99]           Dans la présente affaire, les parties conviennent toutes que les ministres ne perdent pas compétence après l’expiration des délais fixés dans les articles 42 et 132 de la LEP, et qu’ils peuvent continuer à élaborer et à mettre dans le registre les projets de programme de rétablissement après l’expiration des délais précisés dans la Loi.

 

[100]       Vu que les parties sont d’accord sur ce point, je n’ai pas à décider si les délais contenus dans les articles 42 et 132 de la LEP sont impératifs ou directifs. Cependant, le fait que les délais puissent être directifs, plutôt qu’« impératifs » (dans le sens juridique du terme) ne signifie pas qu’ils sont optionnels, ou que les ministres compétents ne sont pas tenus de les respecter. En fait, les avocats des ministres ont reconnu que ceux‑ci étaient effectivement obligés de respecter la loi à cet égard.

 

[101]       Il est évident que Loi sur les espèces en péril fut édictée en raison du fait que certaines espèces sauvages au Canada étaient en péril. Comme le font remarquer les demandeurs, de nombreuses espèces sont dans une course contre la montre, puisque leur habitat essentiel subit une pression croissante, et, ultimement, c’est peut‑être leur survie qui est en jeu.

 

[102]       Les délais fixés par la Loi reflètent la volonté clairement exprimée par le législateur que des programmes de rétablissement soient élaborés en temps opportun pour les espèces en péril, ce qui fait que l’on reconnaît qu’il y a effectivement urgence à cet égard. Le respect des délais prévus par la loi est essentiel à la mise en œuvre appropriée du plan conçu par le législateur pour la protection des espèces en péril.

 

La demande de mandamus des demandeurs

[103]       La prochaine question à examiner est la demande de mandamus des demandeurs.

 

[104]       Dans leurs avis de demande, les demandeurs sollicitent des ordonnances de mandamus obligeant le ministre compétent à mettre un projet de programme de rétablissement pour chacune des quatre espèces dans le registre public dans les 30 jours du jugement de la Cour dans la présente affaire.

 

[105]       On sollicite également des ordonnances de mandamus pour obliger le ministre compétent à mettre la version définitive des programmes de rétablissement pour les quatre espèces dans le registre public dans les 90 jours du jugement de la Cour.

 

[106]       Comme il a déjà été mentionné, un projet et une version définitive du programme de rétablissement ont tous les deux été mis dans le registre pour le rorqual à bosse du Pacifique, ce qui fait que les demandeurs ne sollicitent plus d’ordonnance de mandamus à ce sujet.

 

[107]       Dans la mesure où les trois autres espèces sont concernées, dans leur mémoire des faits et du droit, les ministres déclarent qu’ils ne contestent pas le fait que la plupart des éléments du critère pour accorder un mandamus établis par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Apotex Inc c. Canada (Procureur général), [1994] 1 CF 742, [1993] ACF no 1098,  sont présents dans la présente affaire ou ne sont pas pertinents.

 

[108]       Toutefois, dans leur mémoire, les ministres ont défendu la thèse selon laquelle le droit d’obtenir l’exécution de leur obligation prévue par la loi n’avait pas été établi, dans la mesure qui concerne les demandes de mandamus relativement à la mise dans le registre de projets de programme de rétablissement pour les trois espèces qui restent. C’est parce qu’ils affirment que le retard dans ces cas n’est pas déraisonnable, à la lumière des explications qui ont été fournies.

 

[109]       Les demandeurs soutiennent que la Cour d’appel fédérale a déjà décidé, dans son arrêt dans l’affaire de L’épaulard, que la norme de contrôle applicable à l’interprétation donnée par les ministres aux dispositions de la LEP était la décision correcte : voir Canada (Pêches et Océans) c. Fondation David Suzuki, 2012 CAF 40, [2012] ACF no 157, aux paragraphes 6 et 98 à 105.

 

[110]       À la lumière de ce qui précède, les demandeurs affirment qu’on ne devrait pas permettre aux ministres de contourner l’arrêt de la Cour d’appel fédérale dans l’affaire de L’épaulard, en appliquant une analyse relative au caractère raisonnable pour apprécier leur conduite au moment de décider si un bref de mandamus devrait être délivré.

 

[111]       Il est quelque peu difficile pour moi d’accepter les observations des demandeurs sur ce point, étant donné qu’il n’y a pas de désaccord entre les parties au sujet de l’interprétation à donner aux dispositions applicables de la LEP.

 

[112]       Ce qui est en cause dans la présente instance, ce n’est pas le contrôle judiciaire d’une décision ou d’une mesure ministérielle, mais plutôt une tentative pour obliger l’exécution d’une obligation prévue par la loi, par suite d’une inaction prolongée. Ainsi, la question est de savoir si les exigences relatives au mandamus ont été remplies. L’une d’elles implique qu’il faut décider si les ministres ont fourni une explication raisonnable pour le retard.

 

[113]       Cependant, comme nous le verrons plus loin, je n’ai pas, en fin de compte, à trancher la question de savoir si une analyse relative à la norme de contrôle devrait faire partie de l’équation dans les demandes de mandamus, compte tenu des récents développements dans les présentes affaires.

 

[114]       La position des ministres a évolué par suite de ces développements. Lors de l’audition de la présente affaire, les ministres ont soutenu que la demande de mandamus concernant la mise de projets de programme de rétablissement dans le registre public pour chacune des quatre espèces était maintenant théorique, étant donné que les projets de programme de rétablissement avaient déjà été mis dans le registre pour l’ensemble des quatre espèces.

 

[115]       Bien qu’ils n’abandonnent pas expressément cet aspect de leur demande de mandamus, je ne comprends pas que les demandeurs insistent encore sur leur demande de réparation quant aux projets de programme de rétablissement. Même si je me trompe avec cette façon de voir les choses, je conviens avec les ministres que cet aspect de la demande de mandamus des demandeurs est maintenant effectivement théorique.

 

[116]       Il s’ensuit que le prochain point à régler, c’est la demande faite par les demandeurs qui vise à obtenir des ordonnances de mandamus obligeant le ministre compétent à mettre la version définitive du programme de rétablissement dans le registre public dans les 90 jours du jugement de la Cour pour chacune des trois espèces pour lesquelles de tels programmes demeurent pendants.

 

[117]       Les ministres s’opposent à ce que l’on accorde cette réparation, en soutenant que la demande de mandamus des demandeurs est prématurée. À l’appui de cette prétention, ils soulignent que le délai de 60 jours établi au paragraphe 43(1), pour permettre au public de faire des commentaires sur les projets de programme de rétablissement, et le délai additionnel de 30 jours prescrit au paragraphe 43(2) de la LEP, pour élaborer la version définitive de tels programmes, ne sont toujours pas expirés. Par conséquent, il n’y a pas encore, affirment les ministres, d’obligation légale d’agir à caractère public.

 

[118]       Étant donné que le ministre de l’Environnement était prêt à s’engager à mettre dans le registre un projet de programme de rétablissement pour le caribou des montagnes du Sud au plus tard à une date précise, la Cour a demandé aux avocats des défendeurs si les ministres étaient prêts à offrir un engagement semblable à l’égard de la mise dans le registre de la version définitive des programmes de rétablissement pour le caribou des montagnes du Sud, le guillemot marbré et l’esturgeon blanc de la Nechako dans le délai de 90 jours envisagé par l’article 43 de la LEP.

 

[119]       Les avocats ont informé la Cour que les ministres ne pouvaient pas s’engager ainsi, puisqu’ils ne connaissaient pas encore la nature des commentaires qu’ils recevraient au cours de la période de 60 jours, et qu’ils ne pouvaient pas non plus, à ce moment‑là, prévoir la nature et l’ampleur des changements à apporter aux projets de programme de rétablissement avant de pouvoir en arriver à la version définitive.

 

[120]       On a alors demandé aux avocats si cela voulait dire que les demandeurs auraient à introduire de nouvelles demandes de mandamus, au cas où les ministres ne mettraient pas dans le registre, dans le délai fixé par l’article 43 de la LEP, la version définitive des programmes de rétablissement pour une ou plusieurs des trois espèces en cause.

 

[121]       Les avocats des ministres ont convenu que les demandeurs ne devraient pas être obligés de tout reprendre à partir du début. Ils ont laissé entendre que la meilleure chose serait que la Cour demeure saisie des présentes affaires afin de permettre aux demandeurs de lui soumettre cet aspect de leur demande de réparation, au cas où ils commenceraient à s’inquiéter du fait que la version définitive des programmes de rétablissement pour les trois espèces en cause, ou pour l’une ou deux d’entre elles, n’aurait pas été complétée en temps opportun.

 

[122]       Les demandeurs préféreraient que la Cour rende des ordonnances de mandamus pour obliger les ministres à exécuter leur obligation prévue par la loi de fournir la version définitive des programmes de rétablissement dans les 90 jours de la mise des projets de programme de rétablissement dans le registre public. Toutefois, ils conviennent que, dans l’éventualité où la Cour ne serait pas disposée à rendre une telle ordonnance, elle devrait effectivement demeurer saisie du dossier afin de s’occuper des futurs développements dans les présentes affaires, en cas de besoin.

 

[123]       Je conviens avec les ministres que, dans les faits, la demande de mandamus des demandeurs concernant la mise dans le registre de la version définitive des programmes de rétablissement pour les trois espèces en question est prématurée. Les délais fixés à l’article 43 de la LEP n’entrent en jeu que lorsqu’un projet de programme de rétablissement a été mis dans le registre public. Ces délais ne sont pas encore expirés, ce qui fait qu’il n’existe pas, pour le moment, d’obligation légale d’agir à caractère public pour les ministres concernant la mise dans le registre de la version définitive des programmes de rétablissement pour le caribou des montagnes du Sud, le guillemot marbré et l’esturgeon blanc de la Nechako.

 

[124]       Une ordonnance de mandamus ne sera pas accordée pour obliger un fonctionnaire à agir d’une manière donnée si ce dernier n’est pas tenu d’agir à la date de l’audience : Apotex, précité, au paragraphe 51. Voir également l’arrêt Colombie‑Britannique (Procureur général) c. Canada (Procureur général), [1994] 2 RCS 41, 114 DLR (4th) 193, au paragraphe 157.

 

[125]       Je souscris à l’opinion des parties selon laquelle il convient que la Cour demeure saisie de la présente affaire. Cela éviterait aux demandeurs de devoir reprendre au début, avec de nouvelles demandes de mandamus, pour obliger les ministres à exécuter leurs obligations légales, dans le cas où la version définitive des programmes de rétablissement ne serait pas mise dans le registre public en temps opportun. Il est évident que cela constituerait un usage plus efficace des ressources de toutes les parties concernées.

 

[126]       Je prends acte du fait qu’une approche similaire a été retenue par la Cour en matière d’immigration : voir Zaib c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 687, [2008] ACF no 880, et Rousseau c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 602, 252 FTR 309. La Cour a également suspendu l’octroi d’une réparation dans une autre affaire relative à la LEP, afin de permettre au ministre compétent de respecter ses obligations légales : voir Adam c. Canada (Environnement), 2011 CF 962, [2011] 4 CNLR 17, au paragraphe 73.

 

[127]       Les parties ont convenu des modalités de l’ordonnance qu’elles sollicitent. Conformément à cette entente, j’ajournerai la demande des demandeurs, dans la mesure où elle vise à obtenir un bref de mandamus pour obliger la mise dans le registre de la version définitive des programmes de rétablissement pour le caribou des montagnes du Sud, le guillemot marbré et l’esturgeon blanc de la Nechako.

 

[128]       Au besoin, une date sera fixée avec les parties pour tenir une conférence de gestion d’instance à fin d’avril ou au début mai, après l’expiration de la dernière des périodes de 60 et 30 jours prévues à l’article 43 de la LEP pour la mise dans le registre de la version définitive des programmes de rétablissement pour ces espèces.

 

[129]       Les parties doivent se consulter quant à l’avancement des présentes affaires avant la conférence de gestion d’instance, afin de voir si elle est nécessaire et de tenter de résoudre toute question pendante, sans que la Cour n’ait à intervenir de nouveau.

 

[130]       Dans l’éventualité où il faille aller de l’avant, les défendeurs aviseront la Cour, lors de la conférence de gestion d’instance, quant à savoir si la version définitive pertinente des programmes de rétablissement a été mise dans le registre public pour les trois espèces encore en cause. Les demandeurs informeront la Cour de leur intention de poursuivre ou non leurs demandes de mandamus concernant la publication de la version définitive des programmes de rétablissement pour certaines ou l’ensemble des espèces en question.

 

[131]       Dans le cas où les demandeurs auraient bel et bien l’intention de poursuivre leurs demandes d’ordonnances de mandamus, la Cour établira un calendrier pour la présentation de la preuve additionnelle, des contre‑interrogatoires (le cas échéant) à l’égard de cette preuve additionnelle, pour l’échange d’observations écrites (y compris les observations des demandeurs en réplique, au besoin), ainsi que pour d’autres comparutions des parties pouvant être requises.

 

Les dépens

[132]       Les présentes demandes ont été présentées par les demandeurs, qui agissaient dans l’intérêt public, pour obliger les ministres à exécuter leurs obligations légales au titre de la LEP, ce que ceux‑ci, il est vrai, n’ont pas fait.

 

[133]       L’introduction de la présente instance a eu l’effet salutaire de pousser les ministres à élaborer et à mettre dans le registre les projets de programme de rétablissement pour les quatre espèces en cause dans les présentes demandes. Le fait que je n’ai pas accédé à la demande de mandamus des demandeurs concernant la mise dans le registre de projets de programme de rétablissement ne reflète pas le bien‑fondé de leur demande, mais il s’agit plutôt d’une conséquence de l’exécution à la dernière minute, par les ministres, de leurs obligations légales à cet égard.

 

[134]       En outre, les demandeurs ont réussi à me convaincre qu’il serait approprié de leur accorder un jugement déclaratoire dans la présente affaire.

 

[135]       Dans ces circonstances, je suis convaincue qu’il y aurait lieu d’allouer des dépens aux demandeurs à l’égard des frais engagés dans le cadre des présentes demandes jusqu’à ce jour. Conformément à l’entente conclue entre les parties, ces dépens sont fixés à 22 500 $, débours compris.


ORDONNANCE

 

LA COUR STATUE QUE :

 

1.                  Les présentes demandes sont accueillies en partie;

 

2.                  La Cour déclare que le ministre des Pêches et des Océans a agi illégalement en omettant de mettre dans le registre les projets de programme de rétablissement pour le rorqual à bosse du Pacifique et l’esturgeon blanc de la Nechako dans les délais prévus par la Loi sur les espèces en péril;

 

3.                  La Cour déclare en outre que le ministre de l’Environnement a agi illégalement en omettant de mettre dans le registre les projets de programme de rétablissement pour le guillemot marbré et le caribou des montagnes du Sud dans les délais prévus par la Loi sur les espèces en péril;

 

4.                  Les demandes sont rejetées dans la mesure où elles ont trait aux demandes d’ordonnances de mandamus pour obliger la mise dans le registre de projets de programme de rétablissement pour les quatre espèces;

 

5.                  Les demandes sont ajournées sine die en ce qui concerne les demandes faites par les demandeurs afin d’obtenir des ordonnances de mandamus pour obliger la mise dans le registre de la version définitive des programmes de rétablissement pour l’esturgeon blanc de la Nechako, le guillemot marbré et le caribou des montagnes du Sud, et la Cour demeurera saisie de ces aspects des demandes;

 

6.                  Au besoin, une date sera fixée avec les parties pour tenir une conférence de gestion d’instance à fin d’avril ou au début mai. Les parties se consulteront avant la date prévue pour cette conférence et, lorsqu’elles s’y présenteront, elles devront être prêtes à traiter de la question de la nécessité de tenir d’autres audiences dans les présentes affaires et de fixer un calendrier pour les prochaines étapes de l’instance;

 

7.                  La Cour alloue des dépens aux demandeurs à l’égard des frais engagés dans le cadre des présentes demandes jusqu’à ce jour, lesquels dépens sont fixés à 22 500 $, débours compris;

 

8.                  Une copie des motifs devra être déposée dans les dossiers T-1778-12, T-1779-12 et T‑1780‑12.

 

 

 

 

« Anne L. Mactavish »

Juge

 


Annexe

 

Loi sur les espèces en péril, LC 2002, ch. 29

 

 

2. (1) Les définitions qui suivent s’appliquent à la présente loi.

 

[…]

 

« ministre compétent »

 

[…]

 

b) en ce qui concerne les espèces aquatiques […], le ministre des Pêches et des Océans;

 

c) en ce qui concerne tout autre individu, le ministre de l’Environnement.

2. (1) The definitions in this subsection apply in this Act.

 

 

“competent minister” means

 

 

(b) the Minister of Fisheries and Oceans with respect to aquatic species …; and

 

 

(c) the Minister of the Environment with respect to all other individuals.

 

 

6. La présente loi vise à prévenir la disparition — de la planète ou du Canada seulement — des espèces sauvages, à permettre le rétablissement de celles qui, par suite de l’activité humaine, sont devenues des espèces disparues du pays, en voie de disparition ou menacées et à favoriser la gestion des espèces préoccupantes pour éviter qu’elles ne deviennent des espèces en voie de disparition ou menacées.

 

6. The purposes of this Act are to prevent

wildlife species from being extirpated or becoming

extinct, to provide for the recovery of wildlife species that are extirpated, endangered or threatened as a result of human activity and to manage species of special concern to prevent them from becoming endangered or threatened.

 

14. Est constitué le Comité sur la situation

des espèces en péril au Canada.

 

14. The Committee on the Status of Endangered Wildlife in Canada is hereby established.

 (1) Le COSEPAC a pour mission :

 

a) d’évaluer la situation de toute espèce sauvage qu’il estime en péril ainsi que, dans le cadre de l’évaluation, de signaler les menaces réelles ou potentielles à son égard et d’établir, selon le cas :

 

 

 

(i) que l’espèce est disparue, disparue du pays, en voie de disparition, menacée ou préoccupante,

 

 

(ii) qu’il ne dispose pas de l’information voulue pour la classifier,

 

 

(iii) que l’espèce n’est pas actuellement en péril;

 

 

b) de déterminer le moment auquel doit être effectuée l’évaluation des espèces sauvages, la priorité étant donnée à celles dont la probabilité d’extinction est la plus grande;

 

c) d’évaluer de nouveau la situation des espèces en péril et, au besoin, de les reclassifier ou de les déclassifier;

 

c.1) de mentionner dans l’évaluation le fait que l’espèce sauvage traverse la frontière du Canada au moment de sa migration ou que son aire de répartition chevauche cette frontière, le cas échéant;

 

d) d’établir des critères, qu’il révise périodiquement, en vue d’évaluer la situation des espèces sauvages et d’effectuer leur classification, ainsi que de recommander ces critères au ministre et au Conseil canadien pour la conservation des espèces en péril;

 

e) de fournir des conseils au ministre et au Conseil canadien pour la conservation des espèces en péril et d’exercer les autres fonctions que le ministre, après consultation du conseil, peut lui confier.

 

 

(2) Il exécute sa mission en se fondant sur la meilleure information accessible sur la situation biologique de l’espèce en question notamment les données scientifiques ainsi que les connaissances des collectivités et les connaissances traditionnelles des peuples autochtones.

 

(3) Pour l’exécution de sa mission, il prend en compte les dispositions applicables des traités et des accords sur des revendications territoriales.

 

 (1) The functions of COSEWIC are to

 

(a) assess the status of each wildlife species considered by COSEWIC to be at risk and, as part of the assessment, identify existing and potential threats to the species and

 

 

 

 

(i) classify the species as extinct, extirpated, endangered, threatened or of special concern,

 

 

(ii) indicate that COSEWIC does not have sufficient information to classify the species, or

 

(iii) indicate that the species is not currently at risk;

 

 

(b) determine when wildlife species are to be assessed, with priority given to those more likely to become extinct;

 

 

 

(c) conduct a new assessment of the status of species at risk and, if appropriate, reclassify or declassify them;

 

(c.1) indicate in the assessment whether the wildlife species migrates across Canada’s boundary or has a range extending across Canada’s boundary;

 

 

(d) develop and periodically review criteria for assessing the status of wildlife species and for classifying them and recommend the criteria to the Minister and the Canadian Endangered Species Conservation Council; and

 

 

(e) provide advice to the Minister and the Canadian Endangered Species Conservation Council and perform any other functions that the Minister, after consultation with that Council, may assign.

 

 

(2) COSEWIC must carry out its functions on the basis of the best available information on the biological status of a species, including scientific knowledge, community knowledge and aboriginal traditional knowledge.

 

 

(3) COSEWIC must take into account any applicable provisions of treaty and land claims agreements when carrying out its functions.

 

 

    27. (1) Sur recommandation du ministre, le gouverneur en conseil peut, par décret, modifier la liste conformément aux paragraphes (1.1) et (1.2) soit par l’inscription d’une espèce sauvage, soit par la reclassification ou la radiation d’une espèce sauvage inscrite et le ministre peut, par arrêté, modifier la liste conformément au paragraphe (3) de la même façon.

 

    (1.1) Sous réserve du paragraphe (3), dans les neuf mois suivant la réception de l’évaluation de la situation d’une espèce faite par le COSEPAC, le gouverneur en conseil peut examiner l’évaluation et, sur recommandation du ministre :

 

        a) confirmer l’évaluation et inscrire l’espèce sur la liste;

 

        b) décider de ne pas inscrire l’espèce sur la liste;

 

        c) renvoyer la question au COSEPAC pour renseignements supplémentaires ou pour réexamen.

 

    (1.2) Si le gouverneur en conseil prend des mesures en application des alinéas (1.1)b) ou c), le ministre est tenu, avec l’agrément du gouverneur en conseil, de mettre dans le registre une déclaration énonçant les motifs de la prise des mesures.

 

    (2) Avant de faire une recommandation à l’égard d’une espèce sauvage ou d’une espèce en péril, le ministre :

 

        a) prend en compte l’évaluation de la situation de l’espèce faite par le COSEPAC;

 

        b) consulte tout ministre compétent;

 

        c) si l’espèce se trouve dans une aire à l’égard de laquelle un conseil de gestion des ressources fauniques est habilité par un accord sur des revendications territoriales à exercer des attributions à l’égard d’espèces sauvages, consulte le conseil.

 

    (3) Si, dans les neuf mois après avoir reçu l’évaluation de la situation de l’espèce faite par le COSEPAC, le gouverneur en conseil n’a pas pris de mesures aux termes du paragraphe (1.1), le ministre modifie, par arrêté, la liste en conformité avec cette évaluation.

 

    27. (1) The Governor in Council may, on the recommendation of the Minister, by order amend the List in accordance with subsections (1.1) and (1.2) by adding a wildlife species, by reclassifying a listed wildlife species or by removing a listed wildlife species, and the Minister may, by order, amend the List in a similar fashion in accordance with subsection (3).

 

    (1.1) Subject to subsection (3), the Governor in Council, within nine months after receiving an assessment of the status of a species by COSEWIC, may review that assessment and may, on the recommendation of the Minister,

 

        (a) accept the assessment and add the species to the List;

 

        (b) decide not to add the species to the List; or

 

        (c) refer the matter back to COSEWIC for further information or consideration.

 

 

    (1.2) Where the Governor in Council takes a course of action under paragraph (1.1)(b) or (c), the Minister shall, after the approval of the Governor in Council, include a statement in the public registry setting out the reasons.

 

    (2) Before making a recommendation in respect of a wildlife species or a species at risk, the Minister must

 

        (a) take into account the assessment of COSEWIC in respect of the species;

 

        (b) consult the competent minister or ministers; and

 

        (c) if the species is found in an area in respect of which a wildlife management board is authorized by a land claims agreement to perform functions in respect of a wildlife species, consult the wildlife management board.

 

    (3) Where the Governor in Council has not taken a course of action under subsection (1.1) within nine months after receiving an assessment of the status of a species by COSEWIC, the Minister shall, by order, amend the List in accordance with COSEWIC’s assessment.

 

    37. (1) Si une espèce sauvage est inscrite comme espèce disparue du pays, en voie de disparition ou menacée, le ministre compétent est tenu d’élaborer un programme de rétablissement à son égard.

 

    (2) Si plusieurs ministres compétents sont responsables de l’espèce sauvage, le programme de rétablissement est élaboré conjointement par eux. Le cas échéant, la mention du ministre compétent aux articles 38 à 46 vaut mention des ministres compétents.

 

    37. (1) If a wildlife species is listed as an extirpated species, an endangered species or a threatened species, the competent minister must prepare a strategy for its recovery.

 

    (2) If there is more than one competent minister with respect to the wildlife species, they must prepare the strategy together and every reference to competent minister in sections 38 to 46 is to be read as a reference to the competent ministers.

 

38. Pour l’élaboration d’un programme de rétablissement, d’un plan d’action ou d’un plan de gestion, le ministre compétent tient compte de l’engagement qu’a pris le gouvernement du Canada de conserver la diversité biologique et de respecter le principe selon lequel, s’il existe une menace d’atteinte grave ou irréversible à l’espèce sauvage inscrite, le manque de certitude scientifique ne doit pas être prétexte à retarder la prise de mesures efficientes pour prévenir sa disparition ou sa décroissance.

 

38. In preparing a recovery strategy, action plan or management plan, the competent minister must consider the commitment of the Government of Canada to conserving biological diversity and to the principle that, if there are threats of serious or irreversible damage to the listed wildlife species, cost-effective measures to prevent the reduction or loss of the species should not be postponed for a lack of full scientific certainty.

 

39. (1) Dans la mesure du possible, le ministre compétent élabore le programme de rétablissement en collaboration avec :

 

 

a) le ministre provincial ou territorial compétent dans la province ou le territoire où se trouve l’espèce sauvage inscrite;

 

b) tout ministre fédéral dont relèvent le territoire domanial ou les autres aires où se trouve l’espèce;

 

 

c) si l’espèce se trouve dans une aire à l’égard de laquelle un conseil de gestion des ressources fauniques est habilité par un accord sur des revendications territoriales à exercer des attributions à l’égard d’espèces sauvages, le conseil;

 

d) toute organisation autochtone qu’il croit directement touchée par le programme de rétablissement;

 

 

e) toute autre personne ou organisation qu’il estime compétente.

 

 

    (2) Si l’espèce sauvage inscrite se trouve dans une aire à l’égard de laquelle un conseil de gestion des ressources fauniques est habilité par un accord sur des revendications territoriales à exercer des attributions à l’égard d’espèces sauvages, le programme de rétablissement est élaboré, dans la mesure où il s’applique à cette aire, en conformité avec les dispositions de cet accord.

 

    (3) Le programme de rétablissement est élaboré, dans la mesure du possible, en consultation avec les propriétaires fonciers et les autres personnes que le ministre compétent croit directement touchés par le programme, notamment le gouvernement de tout autre pays où se trouve l’espèce.

 

39. (1) To the extent possible, the recovery strategy must be prepared in cooperation with

 

 

(a) the appropriate provincial and territorial minister for each province and territory in which the listed wildlife species is found;

 

(b) every minister of the Government of Canada who has authority over federal land or other areas on which the species is found;

 

(c) if the species is found in an area in respect of which a wildlife management board is authorized by a land claims agreement to perform functions in respect of wildlife species, the wildlife management board;

 

(d) every aboriginal organization that the competent minister considers will be directly affected by the recovery strategy; and

 

(e) any other person or organization that the competent minister considers appropriate.

 

    (2) If the listed wildlife species is found in an area in respect of which a wildlife management board is authorized by a land claims agreement to perform functions in respect of wildlife species, the recovery strategy must be prepared, to the extent that it will apply to that area, in accordance with the provisions of the agreement.

 

 

 

    (3) To the extent possible, the recovery strategy must be prepared in consultation with any landowners and other persons whom the competent minister considers to be directly affected by the strategy, including the government of any other country in which the species is found.

 

42. (1) Sous réserve du paragraphe (2), le ministre compétent met le projet de programme de rétablissement dans le registre dans l’année suivant l’inscription de l’espèce sauvage comme espèce en voie de disparition ou dans les deux ans suivant l’inscription de telle espèce comme espèce menacée ou disparue du pays.

 

 

    (2) En ce qui concerne les espèces sauvages inscrites à l’annexe 1 à l’entrée en vigueur de l’article 27, le ministre compétent met le projet de programme de rétablissement dans le registre dans les trois ans suivant cette date dans le cas de l’espèce sauvage inscrite comme espèce en voie de disparition ou dans les quatre ans suivant cette date dans le cas de l’espèce sauvage inscrite comme espèce menacée ou disparue du pays.

 

 

42. (1) Subject to subsection (2), the competent minister must include a proposed recovery strategy in the public registry within one year after the wildlife species is listed, in the case of a wildlife species listed as an endangered species, and within two years after the species is listed, in the case of a wildlife species listed as a threatened species or an extirpated species.

 

    (2) With respect to wildlife species that are set out in Schedule 1 on the day section 27 comes into force, the competent minister must include a proposed recovery strategy in the public registry within three years after that day, in the case of a wildlife species listed as an endangered species, and within four years after that day, in the case of a wildlife species listed as a threatened species or an extirpated species.

 

43. (1) Dans les soixante jours suivant la mise du projet dans le registre, toute personne peut déposer par écrit auprès du ministre compétent des observations relativement au projet.

 

    (2) Dans les trente jours suivant la fin du délai prévu au paragraphe (1), le ministre compétent étudie les observations qui lui ont été présentées, apporte au projet les modifications qu’il estime indiquées et met le texte définitif du programme de rétablissement dans le registre.

 

43. (1) Within 60 days after the proposed recovery strategy is included in the public registry, any person may file written comments with the competent minister.

 

 

    (2) Within 30 days after the expiry of the period referred to in subsection (1), the competent minister must consider any comments received, make any changes to the proposed recovery strategy that he or she considers appropriate and finalize the recovery strategy by including a copy of it in the public registry.

 (1) Le ministre compétent peut modifier le programme de rétablissement. Une copie de la modification est mise dans le registre.

 (1) The competent minister may at any time amend the recovery strategy. A copy of the amendment must be included in the public registry.

 

 (1) Le ministre compétent peut modifier le plan d’action. Une copie de la modification est mise dans le registre.

 (1) The competent minister may at any time amend an action plan. A copy of the amendment must be included in the public registry

 (1) Le COSEPAC évalue la situation de chaque espèce sauvage visée aux annexes 2 ou 3 ainsi que, dans le cadre de l’évaluation, signale les menaces réelles ou potentielles à son égard et établit, selon le cas :

 

a) que l’espèce est disparue, disparue du pays, en voie de disparition, menacée ou préoccupante;

 

b) qu’il ne dispose pas de l’information voulue pour la classifier;

 

 

c) que l’espèce n’est pas actuellement en péril.

 

    (2) Dans le cas d’une espèce visée à l’annexe 2, l’évaluation doit être terminée dans les trente jours suivant l’entrée vigueur de l’article 14.

 

    (3) Si l’évaluation d’une espèce visée à l’annexe 2 n’est pas terminée dans le délai imparti ou prorogé, le COSEPAC est réputé avoir classifié cette espèce selon ce qui est indiqué à cette annexe.

 

 

 

 

    (4) Dans le cas d’une espèce visée à l’annexe 3, l’évaluation doit être terminée dans l’année suivant la date à laquelle le ministre compétent en fait la demande. Si plusieurs ministres compétents sont responsables de l’espèce, la demande est présentée conjointement par eux.

 

    (5) Sur recommandation faite par le ministre après consultation de tout ministre compétent, le gouverneur en conseil peut, par décret, proroger le délai prévu pour l’évaluation d’une espèce visée aux annexes 2 ou 3. Le ministre met dans le registre une déclaration énonçant les motifs de la prorogation.

 

 

    (6) Les paragraphes 15(2) et (3) et 21(1) et l’article 25 s’appliquent à l’évaluation faite au titre du paragraphe (1).

 

    (7) Le COSEPAC peut, pour l’évaluation d’une espèce sauvage, prendre en compte et se fonder sur tout rapport portant sur l’espèce qui a été élaboré dans les deux ans précédant la sanction de la présente loi.

 (1) COSEWIC must assess the status of each wildlife species set out in Schedule 2 or 3, and, as part of the assessment, identify existing and potential threats to the species and

 

 

(a) classify the species as extinct, extirpated, endangered, threatened or of special concern;

 

(b) indicate that COSEWIC does not have sufficient information to classify the species; or

 

(c) indicate that the species is not currently at risk.

 

    (2) In the case of a species set out in Schedule 2, the assessment must be completed within 30 days after section 14 comes into force.

 

    (3) If an assessment of a wildlife species set out in Schedule 2 is not completed within the required time or, if there has been an extension, within the extended time, COSEWIC is deemed to have

 

classified the species as indicated in Schedule 2.

 

    (4) In the case of a species set out in Schedule 3, the assessment must be completed within one year after the competent minister requests the assessment. If there is more than one competent minister with respect to the species, they must make the request jointly.

 

    (5) The Governor in Council may, on the recommendation of the Minister after consultation with the competent minister or ministers, by order, extend the time provided for the assessment of any species set out in Schedule 2 or 3. The Minister must include a statement in the public registry setting out the reasons for the extension.

 

    (6) Subsections 15(2) and (3) and 21(1) and section 25 apply with respect to assessments under subsection (1).

 

    (7) In making its assessment of a wildlife species, COSEWIC may take into account and rely on any report on the species that was prepared in the two-year period before this Act receives royal assent.

 

132. Si l’inscription d’une espèce sauvage par le gouverneur en conseil découle d’une évaluation faite par le COSEPAC en application de l’article 130, le programme de rétablissement est élaboré dans les trois ans suivant l’inscription en ce qui concerne une espèce en voie de disparition et dans les quatre ans en ce qui concerne une espèce menacée.

 

132. If a wildlife species is added to the List by the Governor in Council as the result of an assessment under section 130, the recovery strategy for the species must be prepared within three years after the listing in the case of an endangered species, and within four years in the case of a threatened species.

 

 

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 


DOSSIER :

T-1777-12

 

INTITULÉ :

WESTERN CANADA WILDERNESS COMMITTEE, FONDATION DAVID SUZUKI, GREENPEACE CANADA, SIERRA CLUB OF BRITISH COLUMBIA FOUNDATION ET WILDSIGHT c. MINISTRE DES PÊCHES ET DES OCÉANS ET MINISTRE DE L’ENVIRONNEMENT

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              VANCOUVER (COLOMBIE‑BRITANNIQUE)

DATE DE L’AUDIENCE :             LES 8 ET 9 JANVIER 2014

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                            LA JUGE MACTAVISH

DATE DES MOTIFS

ET DU JUGEMENT :                     LE 14 FÉVRIER 2014

 

COMPARUTIONS :

Sean Nixon

Lara Tessaro

 

POUR LES DEMANDEURS

 

Brian McLaughlin

Ken Manning

Lisa Nevens

 

POUR LES DÉFENDEURS

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

EcoJustice Canada

Vancouver (Colombie‑Britannique)

 

POUR LES DEMANDEURS

 

William F. Pentney

Sous‑procureur général du Canada

Vancouver (Colombie‑Britannique)

POUR LES DÉFENDEURS

 

 

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