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Date : 20130404

Dossier : T-463-07

Référence : 2013 CF 341

Ottawa (Ontario), le 4 avril 2013

En présence de monsieur le juge Barnes

 

ENTRE :

 

DENNIS MANUGE

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

SA MAJESTÉ LA REINE

 

 

 

défenderesse

 

 

 

 

 

           MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               La présente instance avait été amorcée au moyen d’une déclaration déposée le 15 mars 2007. À la mi-février 2008, une requête en autorisation de l’instance comme recours collectif avait été plaidée devant moi à Halifax (Nouvelle‑Écosse), et, par décision rendue le 20 mai 2008, j’ai autorisé l’instance comme recours collectif : voir Manuge c Canada, 2008 CF 624, [2008] ACF no 787. La défenderesse avait interjeté appel de cette décision, et le 3 février 2009, la Cour d’appel fédérale a annulé l’ordonnance d’autorisation que j’avais délivrée : voir Canada c Manuge, 2009 CAF 29, [2009] ACF no 73. Le demandeur, M. Dennis Manuge, avait subséquemment interjeté appel de cet arrêt à la Cour suprême du Canada, qui, dans une décision unanime rendue le 23 décembre 2010, a rétabli mon ordonnance, ce qui permettait que l’action soit poursuivie comme recours collectif : voir Manuge c Canada, 2010 CSC 67, [2010] 3 RCS 672.

 

[2]               Les parties, et cela est tout à leur honneur, ont ensuite conjointement proposé de présenter une question de droit à la Cour, en vue d’obtenir un jugement sommaire. Cette affaire a été débattue devant moi à Halifax, et j’ai statué, par décision rendue le 1er mai 2012, que la manière dont la défenderesse interprétait la police d’assurance invalidité prolongée (AIP) applicable du Régime d’assurance revenu militaire (RARM) et, particulièrement, que la politique de déduire les prestations d’invalidité mensuelles versées aux membres du groupe atteints d’une invalidité au titre de la Loi sur les pensions, LRC 1985, c P‑6, des sommes qui leurs sont versés à titre d’assurance invalidité prolongée était illégale : voir Manuge c Canada, 2012 CF 499, [2012] ACF no 512. Aucun appel n’a été interjeté à l’égard de cette décision, et les parties ont entrepris des négociations approfondies en vue de régler les questions liées aux incidences financières de mon jugement.   

 

[3]               Les présents motifs sont délivrés en lien avec une requête des parties présentée au titre de l’article 334.29 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106 (les Règles), par laquelle elles sollicitaient l’approbation de la Cour à l’égard de leur règlement négocié quant au présent recours collectif. Les avocats du groupe ont aussi demandé l’approbation de la Cour, au titre de l’article 334.4 des Règles, pour que leurs honoraires soient prélevés à même les sommes recouvrées au titre du règlement proposé. Les avocats de la défenderesse s’opposent à cette demande, au motif que le montant proposé à titre d’honoraires est excessif.

 

Les principes généraux applicables aux règlements de recours collectifs

[4]               Il y a lieu que la Cour approuve un règlement de recours collectif dans le cas où, au vu des circonstances globales, elle juge que le règlement est juste et raisonnable, et qu’il est dans le meilleur intérêt du groupe dans son ensemble : Bodnar c The Cash Store Inc, 2010 BCSC 145, [2010] BCJ no 192, au paragraphe 17. Dans la décision Chateauneuf c Canada, 2006 CF 286, [2006] ACF no 363, au paragraphe 7, la juge Danièle Tremblay‑Lamer a décrit la démarche générale de la Cour en matière d’approbation d’un règlement de recours collectif :

7     La Cour saisie d’un règlement d’un recours collectif n’y cherche pas la perfection, mais plutôt que le règlement soit raisonnable, un bon compromis entre les deux parties. Le but d’un règlement est d’éviter les risques d’un procès. Même imparfait, le règlement peut être dans les meilleurs intérêts de ceux qui sont affectés, particulièrement si on le compare aux risques et au coût d’un procès. Il faut toujours tenir compte qu’un règlement proposé signifie le désir des parties de régler le dossier hors cour sans aucune admission de part et d’autre ni quant aux faits ni quant au droit.

 

 

[5]               La cour de révision ne peut réécrire les modalités de fond d’un règlement proposé, et les intérêts des membres du recours collectif ne devraient pas être examinés séparément de ceux de l’ensemble du groupe : voir Dabbs c Sun Life Assurance Co of Canada, [1998] OJ no 1598 (disponible sur QL), aux paragraphes 10 et 11.

 

[6]               Il sera toujours d’une grande importance pour la Cour de ne pas rejeter à la légère un règlement négocié d’égal et égal et de bonne foi. Les parties sont, après tout, les mieux placées pour apprécier les risques et les coûts (autant d’un point de vue financier que d’un point de vue humain) liés au fait de mener à terme un recours collectif complexe. Le rejet d’un règlement comportant de multiples aspects, comme celui négocié en l’espèce, entraîne aussi le risque de déraillement du processus de négociation et de la perte de l’esprit de compromis.  

 

Les modalités du règlement proposé

[7]               Le règlement proposé par les parties contient un certain nombre de modalités avantageuses, autant sur le plan financier que sur le plan administratif. La valeur du règlement pécuniaire a été estimée à plus de 887 millions de dollars, un chiffre qui comprend la valeur actualisée nette des montants qui seront versés aux membres du groupe qui ont une invalidité. De plus, la défenderesse, en mettant fin à la déduction des prestations versées au titre de la Loi sur les pensions des sommes versées au titre d’un certain nombre d’autres programmes fédéraux de soutien financier, a sciemment amplifié l’incidence financière du règlement.

 

[8]               L’élément central du règlement proposé est le recouvrement intégral, par les 7 500 membres du groupe ou par leur famille, des montants qui ont illégalement été déduits ou qui auraient autrement été déduits à l’avenir de leur revenu d’AIP du RARM. Le recouvrement rétroactif des prestations a été consenti jusqu’au 1er juin 1976, soit la date à laquelle avait commencé la compensation effectuée au titre de la Loi sur les pensions. Cette partie du règlement découle de la concession, faite par la défenderesse, d’abandonner sa défense relative aux limites à la couverture et d’agrandir le groupe pour qu’y soient inclus les membres des Forces canadiennes (FC) ayant une invalidité, lesquels auraient autrement été laissés pour compte. L’accord prévoit aussi que les conjoints et les enfants mineurs des membres décédés auront droit au recouvrement, au lieu de devoir recourir au processus lourd et complexe de reconnaissance des réclamations successorales. 

 

[9]               De plus, les parties ont négocié des taux raisonnables en ce qui a trait aux intérêts avant et après jugement, qui remontent à 1992 et qui s’élevaient à 80 millions de dollars en date du 14 février 2013. Les intérêts continuent de s’accumuler, à raison de 1,3 million de dollars par mois. 

 

[10]           Les parties reconnaissent que les prestations d’AIP versées aux membres du groupe seront assujetties à l’impôt sur le revenu. Vu que les prestations d’AIP du RARM constituent un revenu imposable, le paiement d’impôt sur le revenu est essentiellement inévitable. Pour atténuer l’incidence de l’impôt sur les sommes forfaitaires recouvrées, les prestataires ayant une invalidité auront la possibilité, si cela leur permet de diminuer leur montant d’impôt à payer, de répartir les sommes reçues à titre de remboursements rétroactifs sur les années au cours desquelles elles auraient été exigibles. D’autres mesures d’atténuation fiscale comprennent un supplément de traitement en espèces de 3,27 p. 100 sur les prestations rétroactives d’AIP devant être versées aux membres, ainsi que le droit de déduire les honoraires, à titre de dépense engagée en vue du recouvrement d’un revenu imposable. 

 

[11]           Pour tenir compte des difficultés vécues par certains des membres du groupe, les parties ont convenu de créer un fonds de perfectionnement de 10 millions de dollars, qui sera géré pendant une période de 15 ans par l’Association des universités et des collèges du Canada. Les membres du groupe et leur famille pourront avoir accès à ce fonds en vue d’études à temps partiel et à temps plein, et on s’attend à ce que des bourses allant jusqu’à 1 300 dollars puissent être accordées à chaque demandeur admissible.  

 

[12]           Les parties ont aussi négocié un processus simplifié quant à la gestion du paiement des remboursements et quant au règlement des différends possibles quant aux réclamations. Plus précisément, un certain nombre de membres du groupe ont été visés par des compensations effectuées au titre de la Loi sur les pensions qui excédaient la valeur de leurs prestations d’AIP du RARM. Ces membres en sont venus à être désignés sous le nom de bénéficiaires à « somme zéro ». Il était difficilement possible d’établir si ceux‑ci étaient constamment admissibles aux prestations d’AIP, parce que l’administrateur du RARM n’avait pas gardé leurs renseignements financiers et médicaux. Cet obstacle au recouvrement a été levé, en partie, en permettant à l’administrateur du RARM d’avoir accès aux données médicales provenant d’autres sources gouvernementales et en établissant des indicateurs approximatifs pour déterminer le degré constant d’invalidité d’une personne. Ce calcul tenait compte d’une reconnaissance « d’invalidité totale » au titre d’autres programmes de gestion de l’invalidité, comme celui du Régime de pensions du Canada. Pour les membres libérés après le 30 novembre 1989, la défenderesse a consenti, sans condition, à considérer comme invalides tous les membres à somme zéro au cours de la période de 24 mois initiale correspondant à leur emploi antérieur.

 

[13]           Un processus d’appel simple et exécutoire a été établi pour les membres du groupe qui sont en désaccord avec l’évaluation de la défenderesse quant à l’invalidité ou avec la somme devant leur être versée. Les avocats du groupe se sont engagés à représenter les membres dans le cadre de tout appel interjeté à cet égard, lesquels seront instruits par une arbitre expérimentée, au sujet de laquelle les parties se sont entendues et dont la rémunération sera assurée par la défenderesse. 

 

[14]           Le règlement proposé prévoit aussi la nomination d’un surveillant, qui aura la responsabilité de vérifier si la défenderesse se conforme aux modalités du règlement. Le surveillant présentera un rapport chaque trimestre et sera rémunéré par la défenderesse.

 

[15]           En dernier lieu, à l’exception d’un différend qui reste à trancher entre les parties concernant le calcul de l’indice des prix à la consommation (IPC) concernant les prestations payables au titre de la police du RARM (et qui sera tranché à une date ultérieure par la Cour), le règlement prévoit la libération de la défenderesse à l’égard de toute responsabilité en lien avec les réclamations qui découlent du présent litige ou qui auraient pu y être soulevées.

 

L’opinion des membres du groupe

[16]           L’avis préliminaire de règlement invitait les membres du groupe à écrire à leurs avocats pour exprimer leur appui ou leur opposition aux modalités du règlement. Les avocats ont reçu 269 réponses, qu’ils ont produites à la Cour par voie d’affidavit. Un petit nombre de membres du groupe ont écrit directement à la Cour. Un certain nombre de membres du groupe étaient présents lors de l’audition de la requête visant l’approbation du règlement proposé, et plusieurs d’entre eux se sont adressés à la Cour. Ils y exprimaient, dans la grande majorité de leurs observations, leur forte approbation envers les modalités du règlement, y compris quant à la réclamation relative aux honoraires. Seules 15 des observations écrites témoignaient d’un désaccord général quant au règlement, et 18 autres relataient uniquement un désaccord quant à la réclamation des frais juridiques. De plus, 30 membres du groupe ont pris position pour que la défenderesse fasse droit à la réclamation des honoraires formulée par les avocats du groupe. 

 

[17]           Les observations formulées à la Cour consistaient, en très grande majorité, en des compliments envers M. Manuge et son équipe d’avocats ainsi qu’en un fort appui envers le règlement. Quelques exemples suffiront pour illustrer cette opinion générale. M. George Hrynewich a rédigé ce qui suit :

[traduction]

Le règlement me permettra de récupérer ce que le RARM m’a arraché. Le montant à titre d’intérêts est acceptable en ce qui me concerne, parce qu’honnêtement, j’aurais probablement dépensé l’argent et je n’aurais gagné aucun revenu d’intérêt. Les honoraires des avocats? C’est certain que tout le monde aimerait que ces frais‑là soient moins élevés, mais je m’attendais à ce qu’ils soient plus élevés, de sorte que j’estime qu’il sont justes. Ils ont travaillé beaucoup pour nous et ils ont dû composer avec plusieurs problèmes. Ce serait bien si M. Manuge pouvait en obtenir un peu plus pour tout le travail qu’il a fait pour lancer l’action en justice et la poursuivre. On ne peut échapper à l’impôt sur le revenu, et je préférerais plutôt que l’Agence du revenu du Canada (l’ARC) retienne trop d’argent et qu’elle me rembourse plus tard, plutôt que d’avoir à trouver les moyens de lui redonner de l’argent l’année prochaine. En bref, je dois dire que je suis convaincu que nous avons atteint les buts principaux que je voulais qu’on accomplisse lorsque je me suis greffé à cette action en justice. Je ne m’y suis pas joint en m’attendant à devenir riche et je crois que le règlement est raisonnable et juste.

 

Peut-être, et surtout, j’aimerais que ce processus prenne fin, et qu’il prenne fin alors que nous avons un règlement favorable. Si quelqu’un me promettait que j’obtiendrais définitivement plus d’argent, mais que cela pourrait nécessiter plusieurs années supplémentaires et nous faire perdre certains de nos autres gains, je lui dirais non merci. Cette personne devra pouvoir me garantir que j’obtiendrais des centaines de milliers de dollars, voire un million, avant que je lui dise que je songerais même à y penser. Ce n’est que mon avis, et je respecte l’opinion de la majorité des membres du groupe, ainsi que le jugement et les décisions de la Cour. 

 

 


Marcel Pellerin a écrit ce qui suit :

[traduction]

Bonjour, je m’appelle Marcel Pellerin et je vote POUR l’acceptation de cette proposition de règlement.

 

J’aurais aimé bénéficier de plus d’allègements fiscaux, mais je suis cependant très content que toute cette histoire soit presque terminée.  

 

Je ne pourrais plus continuer d’endurer le stress, l’anxiété et les problèmes de santé physique que l’affaire m’a causés au cours des dix dernières années.

 

Merci beaucoup à notre équipe d’avocats et à M. Manuge. Vous avez obtenu un merveilleux résultat pour le groupe, [n]otamment pour moi et pour ma fille adolescente. 

 

 

Dana Morris a écrit ce qui suit :

[traduction]

J’aimerais vous remercier, vous et votre personnel, pour tout le travail que vous avez fait pour notre compte dans le présent recours collectif. Il s’agissait d’une tâche monumentale, pour laquelle il fallait manifestement des nerfs solides. La minutie et le professionnalisme dont vous avez fait preuve devraient être la norme à imiter.

 

Je trouve toujours qu’il est difficile… non, impossible, d’estimer les sommes qui nous seront accordées; cela dit, à ce stade‑ci, cela n’a pas d’importance! Si ce n’avait été du courage de Dennis Manuge et de Peter Driscoll, ainsi que de leur détermination à aller jusqu’au bout, nous (les membres du groupe) n’aurions rien à quoi nous attendre, ni à espérer.

 

À titre de membre du groupe et d’ancien combattant invalide, j’appuie, tout comme ma famille, l’accord et le pourcentage d’honoraires, tels que décrits par McInnes Cooper dans le courriel daté du 9 janvier 2013 et envoyé à tous les membres du groupe.

 

Je ne saurais assez dire « MERCI beaucoup », pour nous avoir donné de l’espoir ainsi que « redonné une petite partie de nous-mêmes ».

 

 

[18]           Compte tenu du fort appui envers le règlement qui a été exprimé par la vaste majorité des membres du groupe ayant présenté des observations ainsi que de la notoriété générale de la présente affaire et de son issue au sein de la communauté des vétérans invalides, je suis convaincu que le règlement est perçu de manière très favorable par presque tous les bénéficiaires du groupe. Si l’insatisfaction à l’égard du règlement était généralisée, je me serais certes attendu à ce que plus que quelques membres du groupe aient fait part de leurs réserves à la Cour.

 

[19]           Au vu des observations des membres du groupe, il appert que certains des opposants au règlement proposé croient, à tort, que la Cour a le pouvoir d’en modifier les modalités de manière unilatérale. À l’exception de l’approbation des honoraires en vertu de l’article 334.4 des Règles, la Cour n’a pas le pouvoir de modifier un règlement conclu entre les parties ou de leur imposer ses propres modalités. Le rôle de la Cour se limite plutôt à approuver ou à rejeter un règlement dans son intégralité.

 

[20]           Le paiement d’impôt sur le revenu tiré des prestations rétroactives d’AIP, la réticence du gouvernement à contribuer au paiement des frais juridiques engagés par le groupe et l’absence d’indemnité à titre de dommages‑intérêts généraux ou punitifs étaient trois questions récurrentes au sujet desquelles certains membres du groupe avaient des réserves. Quelques personnes étaient préoccupées par des points précis, dont notamment la mère d’un ancien combattant décédé, qui s’opposait au fait que les membres de la famille élargie soient exclus du groupe.

 

[21]           Les réserves exprimées par quelques membres du groupe à propos du défaut d’inclure une indemnité à titre de dommages‑intérêts généraux ne sont pas convaincantes. Il s’agissait d’une réclamation relative à la violation d’un contrat, une situation dans laquelle on accorde rarement de telles indemnités, dont le montant n’est certainement pas substantiel. Les avocats soulignent aussi, non sans justification, que le fonds de perfectionnement de 10 millions de dollars au sujet duquel les parties se sont entendues représente une forme d’indemnité de remplacement pour les difficultés personnelles vécues par certains des membres du groupe au fil des ans. Le maintien des réclamations en dommages‑intérêts généraux aurait également exigé de chacun des membres du groupe qu’il produit une preuve médicale et, possiblement, qu’il livre un témoignage au sujet des difficultés qu’il a vécues. Je suis d’avis qu’une telle démarche aurait nécessité plus de temps et de ressources financières, et qu’elle aurait été plus complexe que ne le justifieraient les avantages pécuniaires qui en auraient découlé. 

 

[22]           La critique selon laquelle le règlement aurait dû imposer au gouvernement une obligation d’indemniser eu égard aux dépens ne tient pas compte du fait que, sauf dans des circonstances exceptionnelles, la Cour n’adjuge pas les dépens à ni l’une ni l’autre des parties dans le contexte d’un recours collectif, et ce, peu importe l’issue du recours : voir article 334.39 des Règles. Cette disposition avait été adoptée dans le but d’éliminer un obstacle pratique à l’introduction d’un recours collectif par un représentant demandeur, car, sinon, ce dernier pourrait être exposé à une importante adjudication des dépens s’il devait ultimement être débouté. Vu que nos règles ne contiennent pas de dispositions prévoyant que les dépens puisse être payés séparément, il n’était pas déraisonnable de la part des parties de négocier un règlement portant que les dépens pouvaient être intégrés au produit du règlement. 

 

[23]           Quelques membres du groupe se plaignent qu’ils devront payer l’impôt sur le revenu à l’égard de leurs prestations rétroactives d’AIP. Cependant, l’imposabilité une conséquence inéluctable de l’application de la Loi de l’impôt sur le revenu, LRC 1985, c 1 (5e supp) et de la manière avec laquelle les primes d’AIP du RARM ont été payées au fil des ans. Selon le règlement proposé, les membres du groupe ont droit à une majoration de 3,27 p. 100 aux fins de l’impôt et ils pourront choisir de recevoir des prestations échelonnées, si cela leur permet d’obtenir un résultat plus avantageux sur le plan fiscal. Ces mesures atténueront l’incidence de l’impôt sur le revenu à l’égard des sommes recouvrées imposables. On doit aussi garder à l’esprit que, si les membres du groupe avaient reçu leurs prestations intégrales d’AIP conformément à la police du RARM, celles‑ci auraient été assujetties à l’impôt au moment de leur réception.

 

[24]           Il n’y aura jamais de règlement de recours collectif parfait. Le recouvrement est toujours confiné aux personnes qui répondent à la définition de membre du groupe, selon les modalités de l’autorisation. Dans des affaires, comme celle en l’espèce, qui concernent des milliers de réclamations uniques, il est impossible et non souhaitable de traiter chaque prestataire de la même manière, autant d’un point de vue financier que d’un point de vue administratif. Il est inévitable qu’un règlement comme celui en l’espèce laisse pour compte quelques personnes ou profite davantage à certains. Dans le cas présent, ces écarts ne sont pas assez importants pour rejeter le règlement proposé.

 

[25]           Je n’ai aucune hésitation à approuver le règlement proposé relativement à la présente action, et ce, en dépit des réserves exprimées par quelques membres du groupe. Il constitue une solution généreuse, exhaustive et réfléchie aux questions qui ont été soulevées au cours du litige, et il fournira une aide financière substantielle aux milliers d’anciens combattants des FC ayant une invalidité et à leur famille. Les modalités du règlement sont aussi le produit des longues négociations entre les parties. Il ne servirait pas les intérêts de la grande majorité des membres du groupe – dont un bon nombre éprouvent des difficultés financières – de renvoyer les parties à la table de négociations pour qu’elles traitent des réserves exprimées par une poignée de personnes qui s’opposent à l’accord. Ce règlement a aussi reçu l’assentiment de la grande majorité des membres du groupe qui ont saisi l’occasion de faire connaître leur opinion à la Cour. En résumé, le règlement constitue un compromis juste et raisonnable, qui est dans les meilleurs intérêts du groupe dans son ensemble et qui est, par conséquent, approuvé.

 

[26]           Il serait négligent de ma part de ne pas reconnaître que les avocats, M. Manuge et le gouvernement du Canada ont fait preuve d’un esprit de générosité et de compromis, lequel a manifestement guidé leurs négociations et a conduit au règlement du différend de longue date qui était au cœur de la présente affaire. Le règlement n’aurait pas été possible sans la ténacité de M. Manuge, la bonne volonté fondamentale des parties et le travail ardu de tous les avocats concernés.

 

[27]           C’est toutefois différent en ce qui concerne la réclamation relative aux honoraires présentée par les avocats du groupe. Les parties ne s’entendent pas quant à cette question, et, quoi qu’il en soit, il appartient à la Cour, en application de l’article 334.4 des Règles, de déterminer le montant approprié de ces honoraires. 

 

[28]           L’obligation que les honoraires accordés aux avocats du groupe soient justes et raisonnables est au cœur de l’application de l’article 334.4 des Règles : voir Parsons et al c Canadian Red Cross Society et al, 49 OR (3d) 281, [2000] OJ no 2374 (Parsons et al). Lorsque la Cour est appelée à déterminer ce qui est juste et raisonnable, elle doit examiner un certain nombre de facteurs, y compris les résultats obtenus, l’étendue du risque assumé par les avocats du groupe, la quantité d’heures de travail effectivement consacrées au litige, le lien de causalité entre les efforts déployés par les avocats et le résultat obtenu, la qualité de la représentation, la complexité des questions soulevées par le litige, la nature et l’importance du litige, la probabilité que les réclamations individuelles aient été soumises aux tribunaux de toute façon, les opinions exprimées par le groupe, l’existence d’une convention d’honoraires et les honoraires approuvés dans des affaires comparables. On a aussi reconnu, dans certaines décisions, qu’il existe un intérêt public général à ce qu’un contrôle soit exercé sur les honoraires payables aux avocats : voir Endean c Canadian Red Cross Society, 2000 BCSC 971, au paragraphe 73, 2000 BCJ no 1254 (Endean).

 

La qualité de la représentation juridique et les résultats obtenus

[29]           Les décisions relatives à l’autorisation de recours collectif et à la responsabilité, lesquelles étaient à l’origine du règlement, découlaient d’une représentation habile et tenace de la part des avocats du groupe dans le contexte d’un processus contradictoire qui les opposait à des avocats tout aussi habiles et tenaces. Les questions en litiges ont été abordées en profondeur et ont été plaidées de manière convaincante; il ne fait aucun doute que la grande qualité du travail juridique effectué par les avocats du groupe a conduit au résultat favorable à leurs clients quant à la question de la responsabilité.

 

[30]           Les modalités du règlement sont tout aussi impressionnantes. Chaque dollar déduit sera remboursé aux membres du groupe ou à leur famille, avec les intérêts applicables. Abstraction faite de l’incidence des honoraires, les sommes recouvrées par les membres du groupe constitueront une indemnisation valable et qui, pour nombre de ces derniers, était grandement nécessaire. Le fait que la défenderessse ait retiré ses allégations en défense fondées sur les limites à la couverture permettra à d’autres demandeurs de s’ajouter au recours collectif, ainsi que le recouvrement de sommes datant de 1976. Un fonds de perfectionnement de 10 millions de dollars sera établi, à titre d’indemnité de remplacement eu égard à d’éventuelles réclamations en dommages‑intérêts généraux. Comme il a été discuté ci-dessus, il est notoire qu’il est difficile de prouver l’existence de dommages de droit dans un cas de violation de contrat. Cela se révèle particulièrement vrai dans des cas où les demandeurs ont une invalidité attestée par un médecin, et les incidences psychologiques découlant du manque d’argent sont souvent difficiles à isoler des autres facteurs sous‑jacents. La solution retenue par les parties pour résoudre le présent litige était novatrice et créative. On peut en dire de même de l’inclusion des conjoints survivants et des enfants à charge, plutôt que de faire entrer en jeu la succession des membres du groupe qui sont décédés, avec les énormes difficultés que ce processus entraînerait. Des mesures simples et efficientes ont été mises en place pour résoudre tout différend qui persisterait concernant les prestations, et on s’attend à ce que les prestataires acceptent celles‑ci dans une proportion approchant 100 p. 100. Il s’agit de résultats qui n’auraient pas été raisonnablement envisagés par quiconque au début du présent litige. En fait, si les négociations quant au règlement avaient été entreprises avant que j’aie rendu mon jugement, l’issue raisonnablement envisageable aurait été substantiellement moins favorable aux membres du groupe que celle en l’espèce. L’excellente représentation juridique offerte par les avocats du groupe et le succès obtenu dans le contexte des négociations quant au règlement sont des facteurs qui militent en faveur d’une majoration importante dans la taxation des dépens. 

 

Le caractère risqué du litige

[31]           Il ne fait aucun doute que les avocats du groupe se sont exposés à un important degré de risque lorsqu’ils ont accepté le mandat quant à la présente affaire. Une fois que l’affaire avait ultimement été autorisée comme recours collectif, les avocats étaient tenus de la porter jusqu’à sa conclusion définitive, pour le compte de tous les membres du groupe : voir Slater Vecchio LLP c Cashman, 2013 BCSC 134, [2013] BCJ no 151. 

 

[32]           Dans le cours normal de ce type de litige, les avocats peuvent s’attendre à ce que leurs services soient retenus pendant de nombreuses années. En l’espèce, on s’attendait à ce que des dizaines de milliers de pages de preuve documentaire soient communiquées; des interrogatoires exhaustifs de témoins ainsi que d’autres tâches préalables au procès étaient aussi envisagés. Lorsque les avocats du groupe ont accepté le mandat de représentation en justice, on ne s’attendait pas à ce que la question juridique déterminante soit réglée de manière sommaire et à ce que cette décision ne fasse pas l’objet d’un appel. Compte tenu de l’opposition exprimée par la défenderesse à l’égard de la requête en autorisation, les avocats auraient assumé qu’ils s’exposaient à un risque financier pouvant se mesurer en une possible perte d’heures de travail professionnel et en des débours qui atteindront probablement des dizaines de millions de dollars. Il ne s’agissait pas non plus d’une affaire où la responsabilité de la défenderesse était presque chose certaine. L’issue de la réclamation quant au redressement fondé sur la Charte était douteuse dans le meilleur des cas, et l’élément d’interprétation contractuelle qui a, en fin de compte, conduit au règlement n’était ni une certitude ni blindé contre un appel. Bien qu’il y eût possiblement une dimension politique au règlement définitif, il est peu probable qu’une telle somme eut été recouvrée, le cas échéant, si ma décision quant à la responsabilité avait été défavorable au groupe et qu’elle avait ensuite été confirmée en appel.

 

[33]           Même la requête en autorisation de l’action comme recours collectif exposait les avocats à un degré de risque considérable. Bien que ma décision d’autoriser le recours collectif ait été rétablie par la Cour suprême du Canada, la probabilité d’obtenir l’autorisation de pourvoi devant cette cour n’était d’environ qu’une chance sur dix. De plus, l’arrêt de la Cour suprême du Canada était centré sur une question contestée en matière de droit judiciaire qui subsistait depuis longtemps dans la jurisprudence canadienne. Les avocats de M. Manuge ont entrepris un processus de trois ans pour obtenir l’autorisation du recours collectif. Ils ont aussi pris en charge des dizaines de milliers de dollars de frais remboursables et ils ont accepter d’indemniser M. Manuge pour sa possible condamnation aux dépens devant la Cour suprême du Canada.

 

[34]           Le risque assumé par les avocats du groupe en lien avec le litige s’illustre aussi par le fait que le différend qui était au cœur de l’affaire était bien connu depuis plus de 30 ans et que celui‑ci n’avait pas été judiciarisé, que ce soit à titre individuel ou à titre de recours collectif, jusqu’à ce que Me Peter Driscoll accepte, en 2007, le mandat concernant la réclamation de M. Manuge. 

 

[35]           Les avocats de la défenderesse soulignent que la décision de ne pas interjeter appel de mon jugement a fait diminuer de manière considérable le risque lié au litige. Par conséquent, ils ont prétendu que la valeur rattachée aux heures consacrées au travail professionnel par les avocats du groupe après ce moment-là ne devrait pas faire partie du calcul.

 

[36]           Les avocats du groupe prétendent que la plupart des heures de travail juridique qu’ils ont consacrées à la présente affaire étaient attribuables au fait que la demanderesse s’était initialement opposée au recours collectif. Selon eux, la conduite initiale de la défenderesse dans sa défense contre la réclamation diminue le poids de l’argument qu’elle présente à ce stade‑ci, selon lequel les honoraires réclamés sont excessifs.

 

[37]           À cette étape‑ci, je ne me préoccupe pas particulièrement des positions que les parties avaient adoptées avant de conclure le règlement. Il suffit de relever que le risque lié au litige que les avocats du groupe ont assumé est surtout apprécié en fonction du risque assumé au tout début de l’affaire. Ce point a été souligné par le juge Warren Winkler dans la décision Parsons et al, précitée, dans les passages suivants :

[traduction]

[29]      De plus, un recours collectif introduit des complications supplémentaires. Les recours collectifs complexes se subsument dans les heures productives des avocats. Le risque assumé par les avocats n’est pas simplement en fonction des probabilités de gagner ou de perdre sa cause. Il faut aussi s’arrêter aux ressources investies par l’avocat du groupe et aux incidences que cela aura dans l’éventualité où le recours devait échouer. Le fait d’avoir gain de cause dans l’un des deux recours collectifs pourrait être une marque de réussite raisonnable. Cependant, pour l’avocat qui est débouté lors de son premier recours collectif, l’épuisement total des ressources dont il dispose pourrait faire en sorte qu’il serait incapable de piloter une autre action. Par conséquent, le véritable risque assumé par l’avocat du groupe n’est pas la simple réciproque de « l’évaluation de la probabilité de succès » de l’action, même si ce calcul ne repose sur aucun degré de certitude. À un certain point, un avocat qui défend un groupe dans le contexte d’un recours collectif complexe peut véritablement, pour reprendre les mots employés par M. Strosberg, « parier son cabinet », et ce, sans égard au degré de risque. Il faut en tenir compte lors de l’appréciation du facteur de « risque » eu égard aux honoraires appropriés pour les avocats.  

 

[…]

 

[36]      Il appert du dossier que, même si le présent litige a pris la forme d’une négociation en vue d’un règlement à compter du milieu de l’année 1998, les risques assumés par l’avocat du groupe n’en étaient pas moins réels que s’il avait consacré ses heures professionnelles à l’obtention d’une décision dans un processus judiciaire, et ce, à tous les stades du litige.

 

[37]      De plus, la législation autorisant les recours collectifs introduit plusieurs caractéristiques qui distinguent ces actions d’un litige ordinaire. Un des aspects qui alourdit le risque inhérent aux recours collectifs est l’exigence que tout règlement conclu soit approuvé par la cour. De longues négociations nécessitent que les avocats et les parties y consacrent du temps et des ressources. Cependant, la cour n’approuvera pas un règlement de recours collectif qu’elle juge ne pas être dans le meilleur intérêt du groupe, et ce, sans égard à la question de savoir si les avocats du groupe sont d’avis contraire. Par conséquent, les avocats du groupe peuvent se trouver dans la situation d’avoir consacré du temps et des ressources en vue de la négociation d’un règlement, qu’ils croient être dans le meilleur intérêt du groupe, seulement pour réaliser que la cour n’approuvera pas le règlement qui a été conclu. Bien que cette situation constitue un risque en soi, elle entraîne aussi un avantage pour le défendeur, qui peut réussir à prolonger les négociations jusqu’à ce que les ressources des avocats du groupe soient épuisées, avant de présenter une « offre définitive de règlement » qui peut ultimement ne pas être approuvée par la cour. Dans de tels cas, les avocats du groupe peuvent avoir épuisé leurs ressources en tentant d’obtenir un règlement raisonnable et, par conséquent, être incapables de poursuivre le litige. Il s’ensuit que, dans le contexte d’un recours collectif, le risque n’est pas simplement apprécié en fonction des questions de savoir si un procès est prévu et si le groupe aura gain de cause. Il existe plutôt des risques inhérents à l’adoption et au maintien d’une stratégie donnée en vue du règlement de l’affaire.

 

[38]      Compte tenu de ce qui précède, je ne peux souscrire à la prétention selon laquelle le degré de risque dans la présente affaire était moins élevé du fait que les parties ont choisi de négocier. De plus, contrairement à ce que certains intervenants ont fait observer, il semble que le fait que les avocats du groupe aient consacré du temps et des ressources dans les négociations occasionnait, au fur et à mesure que ces négociations continuaient, une augmentation du risque plutôt qu’une diminution. Les négociations devenaient plus difficiles du fait que les parties se rapprochaient d’un règlement, puisque les questions devenaient plus pointues, ce qui entraînait un accroissement, et non une diminution, du risque d’aboutir dans une impasse. La progression des négociations faisait en sorte qu’elles devenaient de plus en plus périlleuses […]

 

[…]

 

[42]      […] Les dépenses des avocats du groupe, autant sur le plan du temps consacré que sur le plan financier, risquaient de devenir des pertes si un politicien au pouvoir avait décidé, pour des raisons de commodité ou de principe, de ne pas régler de recours collectifs ou d’instaurer de manière unilatérale un régime de compensation sans égard à la faute, et ainsi court‑circuiter l’avocat du groupe et le litige. Il y avait toujours le danger intrinsèque qu’un règlement pancanadien puisse être impossible à obtenir, en raison de la réticence d’un gouvernement en particulier ou du groupe partie à une action en particulier à approuver une entente.

 

 

[38]           Je suis d’avis que le risque assumé par les avocats du groupe en lien avec le litige était important et qu’il excédait presque assurément le degré de tolérance d’autres confrères. Il s’agit d’un facteur militant en faveur d’une majoration des frais recouvrés, en partie pour inciter les avocats à accepter des mandats relatifs à des recours collectifs ardus qui concernent des réclamations potentiellement fondées qui pourraient sinon être abandonnées.

 

Le temps et les efforts consacrés

[39]           L’affidavit de Me Driscoll, l’avocat principal, révèle que les deux cabinets d’avocats retenus pour le compte du groupe ont travaillé plus de six ans sur le recours collectif (qui a nécessité 20 avocats) et qu’ils ont investi plus de 8 500 heures de travail non facturé. Il leur reste d’autres tâches considérables à accomplir, y compris superviser directement le processus de remboursement ainsi que fournir de l’aide relativement aux appels interjetés à titre individuel par les membres du groupe et suivre l’évolution de ces appels. Ils ont déployé des efforts considérables jusqu’à maintenant afin de répondre aux demandes de renseignements provenant de centaines de membres très actifs du groupe, et continueront sans doute de ce faire. Les frais remboursables s’élèvent maintenant à tout près de 200 000 dollars, et on estime que ceux‑ci excéderont 260 000 dollars d’ici la conclusion de l’affaire. Les avocats ont assumé l’ensemble des dépenses liées au dossier, lesquelles représentaient, dans une très large mesure, un risque. Les avocats du groupe évaluent à plus de 3,2 millions de dollars leurs heures de travail non facturé à ce stade‑ci. Cette évaluation me semble raisonnablement juste. Cependant, il est important de reconnaître que ces cabinets d’avocats ont assumé, pendant plusieurs années, les coûts liés à une grande partie des heures de travail facturables et l’ensemble des débours liés au dossier et qu’il leur reste un travail considérable à effectuer relativement à la surveillance et à la prise en charge des réclamations des membres du groupe à titre individuel. 

 

L’importance du litige pour les membres du groupe

[40]           Il s’agissait d’un important litige concernant un différend contractuel de longue date touchant des milliers d’anciens combattants des FC ayant une invalidité. Depuis 1976, la politique de déduire les prestations d’invalidité versées au titre de la Loi sur les pensions des prestations d’AIP du RARM avait entraîné plusieurs difficultés et avait attiré plusieurs critiques de la part de tierces parties. Le gouvernement du Canada a défendu sa position avec vigueur, jusqu’à ce que je rende mon jugement quant à la responsabilité. Le règlement du présent recours collectif conférera une indemnisation digne de ce nom à plusieurs milliers d’anciens combattants des FC, et le paiement au titre de ce règlement constituera vraisemblablement le quatrième en importance de l’histoire des recours collectifs au Canada. Il s’agit de facteurs qui militent en faveur de l’octroi de dépens majorés aux avocats du groupe.

 

L’intérêt public

[41]           S’il existe un intérêt public concernant les affaires comme celle dont je suis saisi, celui‑ci s’articule plutôt autour des intérêts du groupe que de l’intérêt général prétendu de la population à garder sous contrôle la compensation offerte aux avocats ayant participé au recours collectif. Je suis d’avis qu’il est pertinent de tenir compte de l’incidence des honoraires liés au recours collectif sur les sommes recouvrées par les membres du groupe pour décider si ces honoraires sont raisonnables et justes. Je crois qu’il s’agissait de la préoccupation exprimée par la Cour suprême de la Colombie‑Britannique dans la décision Killough c Canadian Red Cross Society, 2007 BCSC 941, [2007] BCJ no 1486 (Killough), lorsqu’elle a fait mention, au paragraphe 8, des répercussions des honoraires convenus sur les sommes qui seraient sinon disponibles pour le groupe.

 

[42]           Pour quelqu’un comme M. Manuge, dont la réclamation aux prestations rétroactives d’AIP est estimée à moins de 10 000 dollars, la déduction d’un montant de 1 500 dollars au titre des honoraires ne pourrait être considérée comme injuste ou déraisonnable. Cependant, pour un ancien combattant des FC qui a une invalidité majeure limitant sa capacité de travailler, la déduction d’un montant de plus de 37 000 dollars d’une indemnisation de 250 000 dollars entrainera une perte importante d’un point de vue financier. En bref, les personnes qu’on pourrait qualifier de celles ayant le plus besoin de leurs indemnités rétroactives sont celles qui assument la plupart de la responsabilité quant aux honoraires. Il s’agit d’un facteur qui milite en faveur d’une diminution de la somme accordée aux avocats du groupe.

 

La convention d’honoraires conditionnels, la réclamation d’un pourcentage du recouvrement et le recours à un multiplicateur

 

[43]           Je reconnais qu’une convention d’honoraires conditionnels conclue entre les avocats et un représentant demandeur dans le contexte d’un recours collectif projeté peut être pertinente et qu’elle peut parfois être une considération déterminante lors de l’examen définitif concernant les honoraires. J’ai néanmoins l’impression qu’une telle convention d’honoraires ne sera pas nécessairement une considération principale, parce que celle‑ci est plus souvent signée à un stade précoce de l’affaire, où on en sait fort peu sur son déroulement futur. Il s’agit essentiellement du point que j’ai soulevé au paragraphe 34 de Manuge c Canada, 2008 CF 624, au paragraphe 34, la décision par laquelle j’ai autorisé la présente instance comme recours collectif :

[34]      Un autre point soulevé par la Couronne concerne l’ampleur des honoraires conditionnels qui seraient payables au titre du mandat de représentation en justice conclu entre M. Manuge et son avocat. Ce mandat prévoit des honoraires représentant 30 p. 100 de tout jugement rendu en faveur de M. Manuge, outre les débours. Le mandat précise aussi que les honoraires payables [traduction] « devront être approuvés par la Cour ». Il n’y a évidemment rien d’illégitime à ce que soit conclu un accord d’honoraires conditionnels dans un cas comme celuici, dont l’issue est imprévisible et où les sommes, considérées isolément, ne semblent pas justifier un recours aux tribunaux. Le montant des honoraires payables à l’issue d’un recours collectif dépendra naturellement de l’appréciation du juge de première instance et devra être proportionnel aux efforts effectivement consentis et au risque pris par l’avocat. Je n’ai aucune réserve sur l’aptitude de la Cour à examiner cet aspect, au besoin, dans l’exercice de sa fonction de surveillance[1].

 

 

[44]           Personne ne savait, lorsque M. Manuge a conclu la convention d’horaires avec ses avocats, que la question de l’autorisation du recours collectif serait ultimement plaidée à la Cour suprême du Canada ni que la question déterminante de la responsabilité serait en fin de compte résolue après une courte audience en fonction d’une preuve produite d’un commun accord et sans qu’elle ne nécessite un long processus d’interrogatoire préalable, ni un procès. Dans la même veine, personne n’aurait pu prédire avec exactitude l’issue des négociations ayant conduit au règlement dont la Cour est saisie, ni que la défenderesse consentirait à abandonner sa défense valable, quoique partielle, relative aux limites à la couverture.

 

[45]           La convention d’honoraires conditionnels qui a été signée par M. Manuge et qui avait pour objet de prévoir des honoraires équivalant à 30 p. 100 des sommes recouvrées pour le compte des membres du groupe n’est pas réellement importante dans le contexte du présent examen. Il en est ainsi, parce que M. Manuge et les avocats du groupe ont essentiellement renoncé à cette convention. Ils demandent maintenant l’approbation d’honoraires représentant approximativement 7,5 p. 100 de la valeur brute du règlement, y compris les prestations antérieures et les prestations futures. Ils proposent aussi que les honoraires soient en totalité payés à même les montants dus aux membres du groupe à l’égard du passé, ce qui représenterait environ 15,7 p. 100 de la valeur totale de leurs prestations rétroactives.

 

[46]           Mis à part le fait évident que les honoraires réclamés à ce stade‑ci représentent environ un quart du montant prévu dans la convention d’honoraires conditionnels initiale, on ne m’a présenté aucune explication claire quant à savoir comment en était-on arrivé à la somme de 65 millions de dollars, hormis l’observation selon laquelle cette somme a été fixée à un montant moindre que celui du montant des intérêts courus prévus dans le règlement. La somme réclamée à titre d’honoraires n’est guère plus qu’un simple nombre, qui s’avère d’ailleurs être très élevé.

 

[47]           Il est approprié d’utiliser des pourcentages et des multiplicateurs pour déterminer les honoraires liés à un recours collectif, mais surtout pour vérifier leur caractère raisonnable, et non pas pour établir un montant absolu. Chaque méthode a son utilité. Le multiplicateur semble être une méthode qui convient davantage à des cas où les effets sociaux bénéfiques obtenus peuvent être plus importants que les sommes recouvrées et où la méthode du pourcentage entraînerait probablement une compensation insuffisante pour les avocats. Le recours à un pourcentage semble être privilégié dans ce que l’on appelle les affaires de fonds communs, parce que cette méthode tend à récompenser la réussite et à favoriser un règlement rapide.

 

[48]           Selon moi, il est dangereux d’accorder une importance excessive à la méthode du multiplicateur ou à celle fondée sur un pourcentage du règlement dans une affaire comme celle‑ci. Je partage la préoccupation exprimée par le juge Ian Pitfield dans les passages suivants de la décision Killough, précitée :

[traduction]

45     Avec égards, les autres facteurs n’ont pas pour effet d’élever l’apport des avocats dans la présente affaire au même degré que celui des avocats en lien avec le règlement antérieur. Bien que le temps consacré à l’affaire et les multiplicateurs comparatifs soient pertinents et utiles, il convient de faire preuve de prudence lorsque vient le temps d’utiliser ces facteurs comme référence pour déterminer le caractère raisonnable des honoraires. La principale préoccupation réside dans le fait qu’il n’existe pas de moyens pour établir si le temps consacré était nécessaire et s’il représentait une utilisation raisonnable et productive du temps des avocats. Les recours collectifs ne doivent pas constituer une invitation à accumuler des heures de travail sans tenir compte de la productivité.  

 

46     L’accumulation importante de temps facturé en lien avec une affaire juridique ne justifie pas toujours une compensation établie au moyen de taux de base ou de multiples de ceux‑ci. En revanche, des démarches qui nécessitent peu de temps peuvent justifier des honoraires plusieurs fois plus élevés que la valeur comptable aux heures consacrées.

 

47     Les comparaisons entre la méthode du multiplicateur et celle du pourcentage du recouvrement sont complètement arbitraires. L’efficacité des multiplicateurs est affectée par le caractère raisonnable, qui ne peut nullement être apprécié en fonction des heures accumulées et des taux horaires desquels le multiplicateur est dérivé. La comparaison du pourcentage de recouvrement est réduite, et, par conséquent, elle semble être plus favorable en comparant les honoraires globaux à un montant global de règlement qui comprenait l’ensemble des prestations, le fonds de gestion, la taxe sur les produits et services et la taxe de vente provinciale le cas échéant, et l’ensemble des honoraires. Les honoraires ont été inclus, sans égard à l’affirmation, répétée à maintes reprises dans les affidavits et les observations, selon laquelle les honoraires n’étaient pas liés à aucune autre considération du règlement.

 

48     En résumé, bien que les avocats doivent être compensés de manière juste et raisonnable eu égard au risque assumé et au travail effectué pour le compte du groupe qu’ils représentent, la détermination du caractère raisonnable est, en fin de compte, plus subjective qu’objective.

 

 

[49]           La défenderesse met considérablement l’accent sur la valeur relativement faible des heures de travail professionnel consacrées par les avocats du groupe et elle fait ensuite valoir que le modificateur habituel, situé entre 1,5 et 3,5, devrait être employé. Cela me semble simpliste et en grande partie insensible aux facteurs militant en faveur d’un recouvrement majoré. Il convient de récompenser l’efficacité dont les avocats ont fait preuve dans l’obtention d’un excellent résultat, et non de la décourager au moyen de l’application rigide d’un multiplicateur aux heures de travail consacrées. En l’espèce, je souscris aux opinions exprimées par le juge George Strathy dans la


décision Helm c Toronto Hydro-Electric System Ltd, 2012 ONSC 2602, [2012] OJ no 2081, aux paragraphes 25 à 27 :

[traduction]

25     Les honoraires proposés représentent une majoration importante en comparaison à une situation où ils seraient calculés en fonction de la multiplication du temps consacré par les taux horaires réguliers. Est‑ce que cela justifie pour autant de refuser de tels honoraires? Seraient‑ils plus appropriés, ou moins appropriés, si le règlement avait été conclu quatre années plus tard, à la veille du procès, alors que plus d’un million de dollars en heures de travail facturable auront été accumulées? Les avocats ne devraient-ils pas être récompensés pour avoir réussi à obtenir une conclusion rapide et louable quant au présent litige? Ne devraient-ils pas être félicités pour avoir adopté une stratégie dynamique et innovatrice à l’égard du jugement sommaire, laquelle a fait en sorte que le demandeur a pu entreprendre des négociations de règlement sérieuses et qui se sont en fin de compte avérées productives?

 

26     Les avocats du demandeur sont des professionnels sérieux, responsables, engagés et efficaces en matière de recours collectif. Ils font preuve d’esprit d’initiative. Ils accepteront certaines causes qu’ils perdront, ce qui leur occasionnera des conséquences importantes sur le plan financier. Ils accepteront des mandats relatifs à des affaires, pour lesquels ils ne seront pas payés pendant des années. À mon avis, ils devraient être généreusement compensés lorsqu’ils obtiennent des résultats excellents de manière rapide, comme en l’espèce.

 

27     Pour les présents motifs, j’approuve les honoraires.

 

 

Voir aussi la décision Vitapharm Canada Ltd c F. Hoffmann-La Roche Ltd, [2005] OJ no 1117, [2005] OTC 208, au paragraphe 107. 

 

[50]           Il n’est pas non plus d’une grande utilité de s’inspirer des précédents dans lesquels les honoraires approuvés constituaient un pourcentage des montants recouvrés. Des honoraires raisonnables devraient avoir un lien adéquat avec la somme recouvrée : voir Endean, précitée, au paragraphe 80. Les affaires étant à l’origine de recouvrements de quelques millions pourraient bien justifier une adjudication des dépens correspondant à 25 à 30 p. 100 du recouvrement global. Il est plus difficile d’appuyer une telle solution lorsque la décision prévoit le recouvrement de centaines de millions de dollars. On peut supposer qu’il s’agit du motif pour lequel les avocats du groupe n’invoquent pas l’indemnité de 30 p. 100 prévue dans la convention d’honoraires conditionnels. Il s’agit aussi du motif pour lequel le pourcentage de dépens accordés dans les trois précédents qui se comparent le mieux à la présente affaire en ce qui concerne les sommes recouvrées était situé au bas de l’échelle : voir Baxter c Canada (Attorney General), [2006] OJ no 4968, 83 OR (3d) 481; Endean, précitée, et Killough, précitée[2]. Ces décisions comparables n’appuient pas une adjudication des dépens d’approximativement 7,5 %, ou, en termes financiers, 65 millions de dollars, dans la présente affaire.

 

Conclusion

[51]           Compte tenu de tous les facteurs exposés ci‑dessus, j’approuverai des honoraires d’un montant correspondant à 8 p. 100 des remboursements rétroactifs qui seront versés aux prestataires du groupe (y compris l’annulation des dettes des membres du groupe à la Financière Manuvie). Ce montant représente approximativement 4 p. 100 de la valeur totale du règlement. De plus, j’approuverai la déduction d’un montant correspondant à 0,079 p. 100 des sommes à rembourser aux prestataires du groupe (y compris l’annulation des dettes des membres du groupe à la Financière Manuvie), à titre d’indemnité pour les frais remboursables. Les avocats du groupe sont aussi autorisés à déduire la taxe sur les produits et services, la taxe de vente harmonisée ou la taxe de vente provinciale des sommes à rembourser aux prestataires du groupe, selon le cas, ainsi qu’à remettre ces montants à l’Agence du revenu du Canada ou à l’organisme provincial approprié. 

 

[52]           Je suis convaincu que le recouvrement des honoraires décrit ci‑dessus est conforme aux honoraires approuvés dans les affaires comparables. Fait plus important, il représente un incitatif adéquat pour les avocats afin qu’ils acceptent des mandats relatifs à des recours collectifs à haut risque, sans pour autant avoir une incidence indue sur les sommes recouvrées par les anciens combattants des FC, dont ceux‑ci avaient grand besoin. J’exprime ma reconnaissance aux avocats, pour leur examen approfondi de la jurisprudence pertinente et, plus particulièrement, les avocats du ministre, qui ont joué leur rôle d’adversaire nécessaire en l’espèce.

 

Les paiements discrétionnaires

[53]           Les avocats du groupe se sont engagés à créer un fonds d’aide juridique à l’intention des anciens combattants, par l’allocation d’un montant de 1 003 420 dollars, lequel est tiré des dépens qui leur ont été accordés. De plus, ils proposent de payer à M. Manuge des honoraires de 50 000 dollars, en reconnaissance de son apport important relativement à la présente action. Plusieurs membres du groupe ont prétendu que M. Manuge devrait recevoir un montant supérieur à 50 000 dollars. Cependant, dans la mesure où la Cour a une forme de contrôle sur les dépens accordés aux avocats, je ne crois pas qu’il soit approprié que M. Manuge reçoive un montant supérieur à celui décrit dans l’avis préliminaire de règlement qui a été envoyé aux membres du groupe. Il s’agissait des modalités de la proposition qui aurait été examinée par les membres du groupe, et il n’est pas souhaitable d’y apporter, après coup, une modification unilatérale à cette étape‑ci. La proposition de créer un fonds d’aide juridique à l’intention des anciens combattants est louable, et la Cour approuve aussi cette proposition, si cela s’avère nécessaire.

 

[54]           Aucuns dépens ne sont accordés relativement à la présente requête.

 

[55]           Je laisse aux avocats le soin d’apporter les modifications requises à la proposition d’ordonnance de règlement qui sera soumise à la Cour pour exécution et délivrance.

 


ORDONNANCE

 

LA COUR ORDONNE QUE le règlement relatif à la présente action soit approuvé, selon les modalités proposées par les parties.  

 

            LA COUR ORDONNE EN OUTRE QUE les dépens à payer aux avocats du groupe soient approuvés, selon les modalités suivantes :  

 

a)         en ce qui concerne les honoraires, par la déduction d’un montant correspondant à 8 p. 100 du remboursement et l’annulation des dettes, le cas échéant, de chaque prestataire admissible du groupe envers la Financière Manuvie;

 

b)         en ce qui concerne les débours, par la déduction d’un montant correspondant à 0,079 p. 100 du remboursement et l’annulation des dettes, le cas échéant, de chaque prestataire admissible du groupe envers la Financière Manuvie;

 

c)         par la déduction des remboursements à verser aux prestataires du groupe et la remise de tout montant payé à titre de taxe sur les produits et services, de taxe de vente harmonisée ou de taxe de vente provinciale, selon le cas.

 

 

"R.L. Barnes"

Judge

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        T-463-07

 

INTITULÉ :                                      MANUGE c SA MAJESTÉ LA REINE

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              Halifax (Nouvelle‑Écosse)

 

DATE DE L’AUDIENCE :             Le 14 février 2013

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                            Le juge Barnes

 

DATE DES MOTIFS

ET DU JUGEMENT :                     Le 4 avril 2013

 

 

COMPARUTIONS :

 

Peter J. Driscoll

Dan Wallace

Ward K. Branch

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Paul B. Vickery

Lori Rasmussen

Travis Henderson

POUR LA DÉFENDERESSE

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

McInnes Cooper

Avocats

Halifax (Nouvelle‑Écosse)

 

Branch MacMaster

Avocats

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

POUR LE DEMANDEUR

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

POUR LA DÉFENDERESSE

 

 



[1]    Voir aussi Parsons et al c Canadian Red Cross Society et al, 49 OR (3d) 281, [2000] OJ no 2374, au paragraphe 58.

[2]     Dans la décision Baxter, précitée, une adjudication des dépens correspondant à 4,87 p. 100 d’un paiement projeté de presque deux milliards de dollars a été approuvée. Cela a donné lieu à des honoraires se situant entre 85 et 100 millions de dollars. Dans la décision Endean, précitée, des honoraires de 52 500 000 dollars ont été approuvés, ce qui représentait 4,26 p. 100 du total de la somme recouvrée. Dans la décision Killough, précitée, les parties ont consenti à des honoraires de 37 290 000 dollars, et ceux‑ci n’ont pas été déduits des produits du règlement. Ce montant a été approuvé par la Cour – non sans réserve – et il représentait 3,64 % du montant total accordé. 

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