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 Date : 20120504


Dossier : IMM‑2216‑11

Référence : 2012 CF 503

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 4 mai 2012

En présence de monsieur le juge Campbell

 

ENTRE :

 

HAIXHIN ZHANG

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

           MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               Le demandeur, citoyen chinois, demande l’asile au Canada à titre de chrétien, affirmant craindre subjectivement et avoir des raisons objectives de craindre d’être exposé, dans le cas où il serait obligé de rentrer en Chine, à plus qu’une simple possibilité de persécution sous le régime de l’article 96 de la LIPR ou à un risque probable sous le régime de son article 97. La présente demande concerne le rejet de sa demande d’asile par suite de ce qu’il soutient être une pratique hautement contestable du commissaire en cause de la Section de la protection des réfugiés, M. L. Favreau.

 

[2]               La présente demande vise la réception de la preuve du demandeur tendant à établir qu’il était chrétien pratiquant en Chine et que, en tant que chrétien pratiquant au Canada, il a le droit de former une demande d’asile sur place. Elle conteste en particulier la conclusion du commissaire selon laquelle il n’est pas vraisemblable, étant donné sa connaissance insuffisante de la doctrine chrétienne, que le demandeur soit chrétien.

 

I.         La demande d’asile formée par le demandeur au titre de sa pratique du christianisme en Chine

[3]               Le commissaire propose au paragraphe 2 de la décision contrôlée la récapitulation suivante des événements ayant mené à la demande d’asile du demandeur :

Le demandeur d’asile allègue avoir été initié au christianisme par sa mère en 2005. Peu intéressé par le christianisme au départ, son intérêt pour les enseignements de cette religion s’est accru au fil du temps. Un bon ami l’a invité à sa maison-église pour la première fois en novembre 2006. Par la suite, il est devenu membre de l’église et la fréquentait régulièrement. En décembre 2006, des membres du Bureau de la sécurité publique (PSB) ont failli découvrir les activités de sa maison-église. Les services religieux, qui avaient lieu une fois par semaine, ne se donnaient plus qu’une fois par mois après l’incident. En décembre 2007, le demandeur d’asile s’est rendu au Canada muni d’un visa de visiteur. Durant son séjour, il a assisté régulièrement à des services religieux. Il a reçu des nouvelles de la Chine selon lesquelles des membres de sa maison-église clandestine se faisaient interroger par des agents du PSB et que le chef de la maison-église avait été arrêté. Craignant d’être arrêté à son tour s’il retournait en Chine, le demandeur d’asile a présenté une demande d’asile en décembre 2008.

 

 

Après examen des déclarations sous serment du demandeur selon lesquelles il était chrétien en Chine, le commissaire, se fondant sur les contradictions et les incohérences dont ces déclarations étaient selon lui entachées, a conclu que ledit demandeur n’était pas crédible et n’avait pas pratiqué le christianisme en Chine. L’avocat du demandeur soutient énergiquement que cette conclusion défavorable sur la crédibilité est déraisonnable. J’estime pour ma part inutile d’examiner cet argument aux fins de trancher la présente demande, parce que, pour les motifs dont l’exposé suit, je conclus que le commissaire a commis en droit une erreur donnant lieu à révision en rejetant sur le fondement de ladite conclusion défavorable relative à sa crédibilité la demande d’asile formée sur place par le demandeur au titre de sa pratique du christianisme au Canada.

 

II.        La demande d’asile formée par le demandeur au titre de sa pratique du christianisme au Canada

[4]               Le commissaire a formulé les conclusions suivantes sur cette question aux paragraphes 12 à 20 de la décision contrôlée :

Le demandeur d’asile allègue avoir commencé à fréquenter l’église de sa mère peu de temps après son arrivée au Canada. Par la suite, il s’est joint à la Living Stone Assembly et a assisté à des services religieux à Kitchener, à Waterloo et à Toronto. Le demandeur d’asile s’est fait poser différentes questions sur ses connaissances générales du christianisme; il a été en mesure de répondre à certaines d’entre elles et a su montrer une certaine connaissance de la religion. Cependant, il a répondu de façon inexacte à certaines questions fondamentales. Il a été incapable de nommer correctement les quatre Évangiles. Il a pu en nommer deux, sans toutefois avoir la certitude qu’il s’agissait de leur nom exact. Prié de nommer les apôtres de Jésus, le demandeur d’asile a admis qu’il n’avait pas une très bonne mémoire pour les noms et qu’il ne se rappelait que de Jacques et de Simon. Le tribunal rejette l’explication du demandeur d’asile. Ce dernier compte 16 années de scolarité et affirme assister régulièrement à des services chrétiens depuis novembre 2006. Bien qu’incertain, au début, de la fréquence de ses lectures de la Bible, le demandeur d’asile a finalement indiqué qu’il lisait la Bible quatre ou cinq fois par semaine. Il serait raisonnable de s’attendre à ce que le demandeur d’asile puisse se souvenir des quatre Évangiles et nommer un plus grand nombre d’apôtres. À cet égard, le tribunal tire une conclusion défavorable.

 

Le demandeur d’asile s’est fait demander s’il connaissait le titre de certaines prières, mais il n’a été en mesure de nommer que le Notre Père. Il n’a pas réussi à réciter correctement le Notre Père lorsqu’il a été invité à le faire, ayant omis deux phrases complètes et remplacé de nombreux passages de la prière par des mots de son cru. Le Notre Père est la prière fondamentale du christianisme, et il est raisonnable de supposer qu’un chrétien authentique pratiquant depuis quatre ans est en mesure de réciter la prière de mémoire sans difficulté.

 

Le demandeur d’asile a affirmé lire la Bible quatre ou cinq fois par semaine. De plus, il a déclaré qu’il était chrétien depuis novembre 2006 et qu’il assistait régulièrement à des services religieux lorsqu’il était en Chine. Le demandeur d’asile a déposé des lettres du révérend Ko et d’autres pasteurs indiquant qu’il fréquente l’église régulièrement depuis son arrivée au Canada. Certes, bien des gens qui se disent chrétiens ont une connaissance limitée de leur religion; le tribunal doit néanmoins établir s’il est raisonnable de la part du demandeur d’asile d’avoir une connaissance limitée dans les circonstances. Le demandeur d’asile allègue s’être délibérément exposé au risque d’être arrêté et mis en détention pour sa religion. Il a ajouté qu’il est un chrétien pratiquant depuis novembre 2006 et qu’il lit la Bible régulièrement. Le demandeur d’asile est une personne instruite qui compte 16 années de scolarité. Selon le tribunal, il est raisonnable de s’attendre à ce que le demandeur d’asile ait davantage de connaissances sur le christianisme qu’il ne l’a montré. Compte tenu de ce qui précède, le tribunal conclut qu’il n’est ni probable ni vraisemblable que le demandeur d’asile ait une connaissance aussi limitée du christianisme s’il est bel et bien chrétien depuis novembre 2006.

 

Le demandeur d’asile a affirmé lire la Bible à la maison. À la question de savoir à quelle fréquence il lisait la Bible, il a répondu [traduction] « quand j’ai le temps ». Tenu de préciser s’il lisait la Bible tous les jours, toutes les semaines ou tous les mois, le demandeur d’asile a donné une réponse vague et a fini par indiquer qu’il lisait la Bible quatre ou cinq fois par semaine. À de nombreuses reprises durant la présente audience, le demandeur d’asile a témoigné de façon vague, évasive et confuse en ce qui a trait aux aspects importants de sa demande d’asile. Par moments, ses réponses manquaient de clarté même s’il lui a été donné maintes occasions de répondre aux questions pour qu’il ait toutes les chances possibles de plaider sa cause.

 

Bien qu’il soit difficile de rendre une décision concernant l’authenticité de la pratique religieuse d’une personne, il est nécessaire de trancher la question en l’espèce. Pour ce faire, le tribunal a tenu compte de l’ensemble des éléments de preuve dont il disposait. Le demandeur d’asile a une certaine connaissance du christianisme; or, cette connaissance ne montre pas nécessairement qu’il s’agit d’un chrétien pratiquant authentique. Le demandeur d’asile a produit des lettres du révérend Ko et d’autres pasteurs ainsi qu’un certificat de baptême indiquant que le demandeur d’asile a été baptisé au Canada. Ces documents ne font simplement qu’attester la participation du demandeur d’asile aux activités de l’église, mais n’indiquent en rien ses intentions réelles. À ce sujet, la jurisprudence récente établit que l’évaluation par un pasteur de l’authenticité de la foi d’une personne ne peut servir à remplacer l’évaluation que le tribunal est tenu d’effectuer [Wo Ji Cao c Canada (Citoyenneté et Immigration), IMM‑1803‑08, le juge Mosleyi, 2008 CF 1174]. Le tribunal accorde peu de valeur probante à ces documents. Après avoir établi que le demandeur d’asile n’était pas une personne recherchée par le PSB et qu’il avait une connaissance limitée du christianisme, le tribunal conclut que le demandeur d’asile n’était pas un chrétien pratiquant en Chine, comme il le prétend. Le tribunal conclut en outre que l’allégation du demandeur d’asile selon laquelle il était chrétien pratiquant en Chine n’est pas crédible et ne servait qu’à étayer une demande d’asile frauduleuse, et que ces problèmes de crédibilité soulèvent un doute important quant à sa crédibilité générale.

 

Comme il a conclu que le demandeur d’asile n’était pas un chrétien en Chine, le tribunal doit trancher la question de savoir si le demandeur d’asile est un chrétien pratiquant authentique au Canada. Dans le cadre d’une demande d’asile, il est nécessaire d’agir « de bonne foi ». À ce sujet, R.P.G. Haines, président d’une commission d’appel du statut de réfugié, et A.G. Wang Heed, membre du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, a déclaré notamment ce qui suit :

 

                                    [traduction]

S’il n’existe aucune exigence de bonne foi dans le cas d’une demande sur place, le demandeur d’asile se retrouve en possession des moyens lui permettant de déterminer de façon unilatérale si le statut de réfugié peut lui être accordé.

 

[Refugee Status Appeals Authority (Nouvelle‑Zélande), recours no 2254/94, Re HB,

21 septembre 1994 (www.Nzrefugeeappeals.govt.nzlpdfs/ref 1994092 l_2254.pdf.]

 

À cet égard, le tribunal cite les propos de James Hathaway dans l’ouvrage The Law of Refugee Status [le droit du statut de réfugié] concernant les demandes d’asile faites sur place : [traduction] « Quiconque, en guise de stratagème, manipule délibérément les circonstances en vue de susciter un risque véritable de persécution qui n’existait pas au départ ne peut être considéré comme appartenant à cette catégorie » [James Hathaway, The Law of Refugee Status, 1991]. Le tribunal conclut que, selon la prépondérance des probabilités, la demande d’asile en l’espèce n’a pas été faite de bonne foi.

 

Comme il a constaté que le demandeur d’asile n’était pas un chrétien pratiquant authentique en Chine et que la demande d’asile en l’espèce n’a pas été faite de bonne foi, le tribunal conclut que, selon la prépondérance des probabilités et compte tenu des conclusions mentionnées précédemment, le demandeur d’asile est devenu membre d’une église chrétienne au Canada dans le seul but d’étayer une demande d’asile frauduleuse. Dans les circonstances décrites ci‑dessus, et compte tenu de l’ensemble de la preuve déposée et de la connaissance limitée du demandeur d’asile quant au christianisme, le tribunal conclut que ce dernier n’est pas un chrétien pratiquant authentique et ne serait pas perçu comme tel en Chine [...]

 

Compte tenu de l’ensemble de la preuve et de l’accumulation des conclusions défavorables mentionnées précédemment, le tribunal conclut que le demandeur d’asile ne s’est pas acquitté du fardeau qui lui incombait d’établir qu’il existe une possibilité sérieuse qu’il soit persécuté ou exposé personnellement à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités, ou au risque d’être soumis à la torture par une quelconque autorité de la Chine.

 

[Non souligné dans l’original.]

 

[5]               Le processus qui a mené le commissaire à la conclusion que le demandeur n’avait pas prouvé être un chrétien au Canada comportait donc deux opérations distinctes, soit un interrogatoire dudit demandeur sur sa connaissance de la doctrine chrétienne et le rejet sommaire de la preuve relative à ses activités au Canada.

 

            A.  L’interrogatoire du demandeur sur sa connaissance de la doctrine chrétienne

[6]               La question, pour ce qui concerne cet élément, est celle de savoir s’il est équitable de la part du commissaire d’effectuer une analyse subjective de la connaissance du christianisme possédée par un demandeur d’asile et d’en conclure s’il est ou non effectivement chrétien.

 

[7]               S’il est vrai que le commissaire déclare difficile de se prononcer sur l’authenticité de la pratique religieuse d’une personne, rien n’indique dans la décision contrôlée qu’il a hésité à le faire dans le cas du demandeur. Qu’on en juge par l’extrait suivant de l’interrogatoire auquel il l’a soumis à l’audience :

                       

                        [TRADUCTION]

COMMISSAIRE :         Dites-moi tout ce que vous savez du christianisme.

 

DEMANDEUR :           C’est un sujet très vaste. Pourriez-vous préciser ce que vous voulez?

 

COMMISSAIRE :         Dites-moi n’importe quoi de ce que vous savez, n’importe quoi.

 

DEMANDEUR :           Comme les dix commandements?

 

COMMISSAIRE :         D’accord, quoique ce ne soit pas... Les dix commandements ne sont pas particuliers au christianisme, mais continuez.

 

DEMANDEUR :           J’ai entendu dire que d’autres Églises croient aussi aux dix commandements.

 

COMMISSAIRE :         Qui est la personne-clé dans le christianisme?

 

DEMANDEUR :           Jésus‑Christ, bien sûr.

 

COMMISSAIRE :         N’est‑ce pas là un élément différent? N’est‑ce pas là quelque chose que vous auriez pu me dire plus tôt?

 

Quel était le but de la vie de Jésus‑Christ sur terre?

 

DEMANDEUR :           Il est le seul vrai Dieu, le seul Dieu de la Trinité.

 

COMMISSAIRE :         Pourquoi est‑il venu sur terre?

 

DEMANDEUR :           Fils de Dieu.

 

COMMISSAIRE :         Pardon?

 

INTERPRÈTE :             Fils de Dieu.

 

COMMISSAIRE :         Oui, il est le fils de Dieu. Oui. Mais quel était son but en venant sur terre?

 

DEMANDEUR :           Il est venu pour nous sauver, pour nous racheter. Il a vécu pour nous et il est mort pour nous. Pour nous sauver, pour laver notre péché... péché originel de notre propre péché. Pour que nous puissions obtenir la vie éternelle.

 

COMMISSAIRE :         Voulez-vous dire que Jésus a lavé votre péché originel?

 

DEMANDEUR :           Tous ceux qui croient en lui, le péché originel.

 

COMMISSAIRE :         Mais, si tel est le cas, quel est l’objet du baptême?

 

DEMANDEUR :           C’est de... l’objet du baptême est de laver notre péché originel.

 

COMMISSAIRE :         Alors c’est laquelle des deux réponses? Est‑ce le sacrifice de Jésus sur la croix qui a lavé votre péché originel, ou est‑ce le baptême? Laquelle de ces deux réponses est la bonne? Parce que vous m’avez donné deux réponses différentes.

 

DEMANDEUR :           Le baptême.

 

COMMISSAIRE :         Le baptême était... a lavé notre péché originel. Bon. Alors qu’est‑ce que Jésus a fait, quel était le but de sa mort dans ce cas?

 

DEMANDEUR :           Il est mort pour nous.

 

COMMISSAIRE :         Quel jour est‑il mort?

 

INTERPRÈTE :             Pardon?

 

COMMISSAIRE :         Quel jour est‑il mort?

 

DEMANDEUR :           Le Vendredi saint.

 

COMMISSAIRE :         Vous en êtes bien certain?

 

DEMANDEUR :           Oui, tout à fait.

 

COMMISSAIRE :         Quand Jésus a‑t‑il commencé son ministère?

 

DEMANDEUR :           Trente ans.

 

COMMISSAIRE :         À l’âge de trente ans?

 

DEMANDEUR :           Oui.

 

COMMISSAIRE :         C’est exact.

 

DEMANDEUR :           C’est exact?

 

COMMISSAIRE :       Oui, c’est bien ça.

 

(Dossier certifié du tribunal, pages 187 et 188.)

 

[8]               On croirait lire la transcription d’un débat entre spécialistes sur l’interprétation de la théologie chrétienne. La pratique consistant à mettre à l’épreuve la connaissance que possède un demandeur d’asile d’une doctrine religieuse soulève des questions extrêmement sérieuses qui n’ont pas été examinées. Un simple aperçu de la complexité du sujet devrait donner à réfléchir sur l’opportunité d’interroger quelqu’un touchant ses croyances et valeurs religieuses, et même ses connaissances en cette matière.

 

[9]               La Cour suprême du Canada s’est efforcée de tirer les conséquences du fait que la religion est affaire de croyance et que la croyance procède de la foi, phénomène difficile à éclaircir.

 

[10]           Elle fait observer, au paragraphe 70 de Ross c Conseil scolaire du district no 15 du Nouveau‑Brunswick, [1996] 1 RCS 825, qu’« il n’appartient pas à notre Cour de décider quelle religion il faut professer ». Elle formule également la conclusion suivante au paragraphe 39 de Syndicat Northcrest c Amselem, [2004] 2 RCS 551 :

[…] Essentiellement, la religion s’entend de profondes croyances ou convictions volontaires, qui se rattachent à la foi spirituelle de l’individu et qui sont intégralement liées à la façon dont celui-ci se définit et s’épanouit spirituellement, et les pratiques de cette religion permettent à l’individu de communiquer avec l’être divin ou avec le sujet ou l’objet de cette foi spirituelle.

 

[11]           Les arrêts Ross aussi bien qu’Amselem posent en principe qu’une croyance, si singulière qu’elle soit, peut être dite religieuse si l’on y adhère avec conviction. Dans le même ordre d’idées, la remarque suivante met en évidence le caractère subjectif de la foi :

[TRADUCTION] [Ce que l’on] considère comme religieux en droit, c’est ce qui parle à l’esprit de l’intéressé [...] l’idée que se fait la personne de son propre rapport au divin ou à l’objet de sa foi constitue l’essence de la conception juridique de la religion.

 

(Benjamin L. Berger, « Law’s Religion: Rendering Culture », Osgoode Hall Law Journal, été 2007.)



[12]           Notre Cour a déjà relevé le risque que présente du point de vue de l’équité la mise à l’épreuve des connaissances religieuses par la SPR et elle a essayé de limiter la rigueur de cette méthode d’enquête. Rappelons à ce sujet la conclusion suivante formulée par le juge Kelen au paragraphe 20 de Dong c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CF 55 :

Pour évaluer la connaissance que possède un demandeur du christianisme, la Commission ne devrait pas adopter une norme de connaissance aussi déraisonnablement élevée ou mettre l’accent sur « quelques erreurs ou malentendus au point d’en faire une analyse microscopique » : Attakora c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (C.A.F.), (1989), 99 N.R. 168, [1989] A.C.F. no 444 (QL) et des affaires ultérieures : Huang c. Canada (MCI), 2008 CF 346, 69 Imm. L.R. (3d) 286, par le juge Mosley, au paragraphe 10; Chen c. Canada (MCI), 2007 CF 270, 155 A.C.W.S. (3d) 929, par le juge Barnes, au paragraphe 16.

 

En fait, dans Penghui Wu c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2009 CF 929, le juge Kelen a même conclu qu’il est contraire à la loi de contrôler l’authenticité de la qualité de chrétien par le moyen de « questions futiles ». En outre, le juge Beaudry, dans Wang c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 1030, affirme qu’une décision de la SPR peut être annulée dans le cas où celle‑ci a appliqué au demandeur d’asile une norme de connaissance religieuse déraisonnablement rigoureuse. Dans cette affaire, la SPR avait conclu que le demandeur n’était pas chrétien au motif que, selon elle, il avait répondu incorrectement à des questions sur la « transsubstantiation ». Le juge Beaudry s’exprime dans les termes suivants sur cette conclusion au paragraphe 13 de sa décision :

La Commission a eu tort de recourir à des « futilités » pour mesurer la connaissance de la foi catholique du demandeur. Lorsqu’elle a apprécié les connaissances du demandeur concernant le christianisme, « c’est à tort que la Commission s’attendait à ce que le demandeur lui fournisse des réponses à des questions sur sa religion qui équivaudraient à la connaissance qu’elle avait elle-même de cette religion » (Ullah c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2000] A.C.F. no 1918, au paragraphe 11).

 

[13]           La Cour suprême a invité à la prudence dans le contrôle des croyances. Certes, on est en droit de s’attendre à ce qu’un chrétien possède une certaine connaissance de sa religion, mais le niveau de la connaissance à supposer doit être déterminé avec équité. Si l’on veut partir du principe que tous les chrétiens devraient connaître des éléments déterminés de la religion chrétienne, il faut définir ce critère objectivement. Il n’est pas permis au décideur de délimiter le contenu d’une telle condition de manière complètement subjective. Par conséquent, si l’on établit comme critère général d’authenticité de l’appartenance religieuse la capacité des demandeurs d’asile qui affirment être chrétiens à répondre à des questions déterminées, il faut donner préavis de ce critère de manière à les traiter tous équitablement, en se résignant au risque que certains demandeurs éventuels acquièrent tout exprès les connaissances nécessaires. De même, si l’on veut faire admettre que telle personne qui se dit chrétienne devrait connaître des éléments déterminés du christianisme, il faut donner de cette exigence une explication raisonnable et crédible.

 

[14]           Il y a cependant une question de toute première importance à se poser à cet égard : en toute équité, que signifie l’incapacité d’une personne à répondre à une question concernant tel ou tel élément d’une doctrine religieuse? On peut imaginer de multiples réponses possibles : la question n’a pas été comprise, de sorte que la réponse n’est pas pertinente; la personne interrogée n’a pas bonne mémoire en général ou elle a eu un trou de mémoire en l’occurrence; elle n’a pas acquis les connaissances nécessaires pour répondre sur ce point précis si considérablement qu’elle ait étudié par ailleurs; elle croit sincèrement avoir donné la bonne réponse même si la personne qui l’interroge pense autrement; et ainsi de suite. À mon avis, de tels facteurs étant en jeu, l’incapacité à répondre ne signifie pas grand-chose. Les implications de ce point apparaissent clairement dans la présente espèce.

 

[15]           Il ne fait aucun doute que le demandeur pratique assidûment la religion chrétienne au Canada depuis 2007 et qu’il a prouvé posséder des connaissances sur celle‑ci. Dans ce contexte, il me paraît absolument ridicule et injuste de la part du commissaire d’avoir posé que l’incapacité illustrée plus haut à répondre à certaines questions pouvait justifier la conclusion que le demandeur n’était pas chrétien. La seule chose que prouve cette incapacité est que le demandeur n’a pu donner les réponses attendues.

 

[16]           Donc, la présomption de véracité dont bénéficie la personne qui déclare sous serment adhérer à une croyance religieuse déterminée ne peut être réfutée sur la seule base de son degré de connaissance de cette religion. Premièrement, on ne saurait assimiler les connaissances religieuses à la foi. Et deuxièmement, la qualité et la quantité des connaissances religieuses qui seraient nécessaires pour prouver la foi sont invérifiables. Par conséquent, la conclusion d’invraisemblance selon laquelle une personne donnée n’adhère pas à une croyance religieuse déterminée au motif qu’elle ne remplit pas une norme fixée subjectivement par le décideur est injustifiable en fait.

 

[17]           En outre, à mon sens, le fait d’interroger quelqu’un sur la religion de la manière dont le commissaire a interrogé le demandeur est injustifiable en droit.

 

[18]           Essentiellement, la pratique de l’interrogatoire en matière religieuse permet au commissaire de la SPR d’être son propre expert touchant le point de savoir quelles questions il peut poser et quelles réponses il est en droit d’attendre. Comme il a été établi dans les décisions citées plus haut, le caractère hautement subjectif de cette pratique de la part d’un décideur risque certainement de donner lieu à des abus. Ladite pratique consiste à appliquer une sorte d’idée stéréotypée que se fait le commissaire de la SPR de ce qu’un chrétien devrait connaître. Décider que les réponses ne sont pas satisfaisantes revient essentiellement à conclure au défaut de plausibilité des déclarations du demandeur d’asile, c’est‑à‑dire que si celui‑ci ne répond pas comme le commissaire le voudrait aux questions destinées à établir sa connaissance du christianisme, ledit commissaire s’estime fondé à conclure qu’il n’est pas vraisemblable que ledit demandeur soit chrétien.

 

[19]           Le droit applicable aux conclusions d’invraisemblance est très clair. On ne peut tirer de telles conclusions que conformément à une rigoureuse norme de preuve, formulée dans le passage suivant de Vodics c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 783 (paragraphes 10 et 11) :

En ce qui a trait aux conclusions défavorables sur la crédibilité en général et les conclusions d’invraisemblance en particulier, le juge Muldoon a énoncé, dans la décision Valtchev c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2001] A.C.F. no 1131 [paragraphe 7], la norme à appliquer :

 

Le tribunal a fait allusion au principe posé dans l’arrêt Maldonado c. M.E.I., [1980] 2 C.F. 302 (C.A.), à la page 305, suivant lequel lorsqu’un revendicateur du statut de réfugié affirme la véracité de certaines allégations, ces allégations sont présumées véridiques sauf s’il existe des raisons de douter de leur véracité. Le tribunal n’a cependant pas appliqué le principe dégagé dans l’arrêt Maldonado au demandeur et a écarté son témoignage à plusieurs reprises en répétant qu’il lui apparaissait en grande partie invraisemblable. Qui plus est, le tribunal a substitué à plusieurs reprises sa propre version des faits à celle du demandeur sans invoquer d’éléments de preuve pour justifier ses conclusions

 

Un tribunal administratif peut tirer des conclusions défavorables au sujet de la vraisemblance de la version des faits relatée par le revendicateur, à condition que les inférences qu’il tire soient raisonnables. Le tribunal administratif ne peut cependant conclure à l’invraisemblance que dans les cas les plus évidents, c’est-à-dire que si les faits articulés débordent le cadre de ce à quoi on peut logiquement s’attendre ou si la preuve documentaire démontre que les événements ne pouvaient pas se produire comme le demandeur d’asile le prétend. Le tribunal doit être prudent lorsqu’il fonde sa décision sur le manque de vraisemblance, car les demandeurs d’asile proviennent de cultures diverses et que des actes qui semblent peu plausibles lorsqu’on les juge en fonction des normes canadiennes peuvent être plausibles lorsqu’on les considère en fonction du milieu dont provient le revendicateur [voir L. Waldman, Immigration Law and Practice (Markham, ON, Butterworths, 1992) à la page 8.22].

 

                                                [Non souligné dans l’original.]

 

 

Il n’est pas difficile de comprendre que, en toute justice pour la personne qui jure de dire toute la vérité, des motifs concrets s’appuyant sur une preuve forte doivent exister pour qu’on refuse de croire cette personne. Soyons clairs. Dire qu’une personne n’est pas crédible, c’est dire qu’elle ment. Donc, pour être juste, le décideur doit pouvoir exprimer les raisons qui le font douter du témoignage sous serment, à défaut de quoi le doute ne peut servir à tirer des conclusions. La personne qui rend témoignage doit bénéficier de tout doute non étayé.

 

[20]           Donc, dans la présente espèce, la conclusion du commissaire selon laquelle il n’est pas vraisemblable que le demandeur soit chrétien doit être mesurée à l’aune de la norme exposée dans le paragraphe précédent. Ainsi qu’il est expliqué au paragraphe 5 de Zakhour c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 1178, la marche à suivre pour conclure légitimement à l’invraisemblance est la suivante :

Par conséquent, en l’espèce, et selon la preuve au dossier, la SPR devait : premièrement, établir clairement ce à quoi on pouvait raisonnablement s’attendre à l’égard de la réponse du Hezbollah envers les actes du demandeur; ensuite, tirer des conclusions de fait quant à la réponse manifestée par le Hezbollah; et, enfin, conclure si la réponse cadre avec ce à quoi on pouvait raisonnablement penser. Ce processus d’analyse critique n’a pas été suivi en l’espèce. Pour ces motifs, je conclus que les conclusions d’invraisemblance de la SPR sont des hypothèses non fondées et que, par conséquent, la décision visée par le contrôle n’est pas justifiée au regard des faits et du droit.

 

[Souligné dans l’original.]

 

Adapté au contexte de l’interrogatoire religieux, le critère applicable aux conclusions d’invraisemblance exige du commissaire de la SPR qu’il suive un processus en trois étapes : établir selon la preuve au dossier la réponse qu’il est raisonnablement permis d’attendre à une question déterminée; obtenir de manière équitable la réponse du demandeur d’asile; et enfin, établir si cette réponse est conforme à ce qu’on pouvait raisonnablement penser. L’élément principal de ce critère est l’établissement de la réponse qu’il est raisonnablement permis d’attendre. Cette caractéristique exige qu’on ait défini et que soit connu au préalable un fondement probatoire crédible et vérifiable pour la réponse qu’on attend.

 

[21]           Dans la présente espèce, le demandeur a répondu à la plupart des questions du commissaire de manière jugée satisfaisante par ce dernier, la conclusion d’invraisemblance se fondant seulement sur les quelques réponses considérées comme insatisfaisantes. Au motif que le processus d’analyse critique exposé plus haut n’a pas été suivi, plus précisément au motif que l’attente d’une réponse déterminée n’avait pas de fondement probatoire défini et connu au préalable, ainsi que crédible et vérifiable, j’estime que le commissaire a tiré de manière erronée ses conclusions d’invraisemblance.

 

[22]           J’admets, comme l’a soutenu l’avocat du défendeur, que le demandeur d’asile qui fonde sa demande sur des motifs religieux doit prouver l’appartenance religieuse qu’il invoque. J’admets aussi que si le commissaire doit établir et faire connaître un fondement crédible et vérifiable pour les réponses qu’il sera en droit d’attendre aux questions sur la religion avant de poser de telles questions, il sera possible aux demandeurs d’asile d’abuser de la procédure en apprenant les réponses exprès pour cet interrogatoire. La solution de ce dilemme est à chercher dans un principe : le droit ne tolère rien de moins que la conformité au processus légitime, et comme la pratique actuelle consistant à interroger le demandeur d’asile sur ses connaissances religieuses n’est pas conforme au droit et que le processus légitime risquerait d’entraîner des abus, ladite pratique devrait être abandonnée, étant fondamentalement viciée du fait qu’elle ne se repose pas sur une norme objectivement vérifiable.

 

[23]           Il en va ainsi parce que, à mon sens, la connaissance des dogmes n’est pas assimilable à l’adhésion à une croyance religieuse. L’important n’est pas la doctrine, mais l’éthique définie par les préceptes religieux que l’intéressé a adoptés et auxquels il essaie de conformer sa vie. Le fait de fréquenter l’église et de citer les Écritures n’est pas aussi important que le point de savoir comment on essaie de modeler sa vie sur la morale et les valeurs apprises. Il me paraît aussi que, d’après ce principe, la pratique consistant à poser des questions sur les connaissances religieuses est une manière fondamentalement déficiente d’enquêter sur la foi religieuse de l’intéressé. La seule voie menant à la vérité me semble être de se renseigner sur la personne même.

[24]           L’éminent juriste James C. Hathaway propose à la page 38 de The Law of Refugee Status, Toronto, Butterworths, 1991, des observations éclairantes touchant la manière dont le fait de se renseigner au sujet de la personne qui forme une demande d’asile sur place au titre de sa pratique du christianisme au Canada peut aider à rendre une décision équitable dans le cas où sa crédibilité est en question : 

[TRADUCTION]

 

S’agissant de personnes qui ont choisi d’exercer une activité politique dans leur État d’origine, on prend en général pour acquise l’authenticité des opinions politiques sous-jacentes à leur militantisme. Cela paraît raisonnable, étant donné qu’il est peu probable qu’une personne attaque son État de mauvaise foi alors qu’elle reste en son pouvoir. La capacité de l’État à contrôler et à punir est un critère implicite d’authenticité. Par contre, la personne qui se trouve hors de la portée de son État d’origine n’est pas soumise à un tel mécanisme de contrôle automatique et efficace. Il est donc plus facilement concevable qu’une telle personne affecte une position de dissidence dans le seul but d’étayer frauduleusement une demande d’asile [voir la note de bas de page], position qui n’exprimerait pas alors une opinion politique comme l’exige la définition. Le problème consiste donc à tenir compte de cette différence réelle sur le plan de la preuve sans écarter d’un revers de main les besoins de protection de la personne qui exprime des convictions sincères en dehors de son État d’origine.


On peut résoudre ce problème en se posant un certain nombre de questions. Premièrement, le demandeur d’asile conserve‑t‑il des liens étroits avec sa famille, ses amis ou des institutions de son État d’origine? De tels liens, s’ils subsistent, constituent un indicateur indirect de sincérité, puisqu’il est peu probable que le demandeur d’asile exprime une fausse opposition dans le cas où une telle expression mettrait en danger des personnes importantes pour lui. Deuxièmement, les déclarations faites, et les actes accomplis, par le demandeur d’asile à l’étranger cadrent-ils avec son comportement antérieur à son départ? Dans l’affirmative, cette conformité prouve dans une certaine mesure sa sincérité. Dans la négative, la décision du demandeur d’asile de s’exprimer ouvertement, ou son adoption de nouvelles opinions, une fois à l’étranger, s’explique‑t‑elle par des raisons valables? Troisièmement, est‑il possible de vérifier la solidité des convictions nouvellement exprimées par le demandeur d’asile? La probabilité d’authenticité de son adhésion aux principes qui sous-tendent ses déclarations ou ses actions est proportionnelle à son intelligence des questions et des enjeux, ainsi qu’au degré de sa participation à leur expression publique.

 

[Note de bas de page : « Le droit d’asile protège les demandeurs de bonne foi, ceux qui ont authentiquement besoin d’être préservés de la persécution. Cette protection n’est pas conçue pour s’appliquer à ceux qui font des déclarations politiques dans le seul but de se faire reconnaître la qualité de réfugiés » (non souligné dans l’original).             K. Petrini, « Basing Asylum Claims on a Fear of Persecution Arising from a Prior Asylum Claim » (1981), 56 Notre Dame Lawyer 719, page 729.]

 

B.  Le rejet sommaire de la preuve relative aux activités du demandeur au Canada

[25]           Comme on l’a vu dans les passages cités plus haut, le commissaire reconnaît que le demandeur a produit des éléments de preuve documentaire tendant à établir les activités qu’il a exercées en tant que chrétien au Canada, notamment les suivants :

·            un extrait de baptême;

·            des lettres de l’East Toronto Mandarin Alliance Church concernant le demandeur d’asile, sa mère et sa sœur;

·            une lettre du Service d’intégration communautaire de la région   de Waterloo;

·            des lettres de la Living Stone Assembly;

·            une lettre de la maison de retraite Chester Village concernant la mère du demandeur;

·            une lettre de la Kitchener-Waterloo Chinese Alliance Church concernant le frère du demandeur.

 

(Dossier de la demande du demandeur, onglet B.)

 

[26]           La lettre de M. Ko, le pasteur du demandeur, est le plus important de ces éléments. En voici le texte :

[TRADUCTION]

 

M. Haixin Zhang, né le 25 mars 1954, assiste aux services de notre Église depuis son arrivée au Canada en décembre 2007. Il a d’abord fréquenté le temple de Living Water Road à Waterloo, où il a participé activement aux assemblées et autres activités, s’est livré à l’étude assidue de la Bible et s’est montré très désireux d’apprendre.

 

M. Zhang a déménagé à Toronto en juin 2008 et a alors commencé à participer aux activités de notre paroisse torontoise, la Living Stone Assembly. Là encore, il n’a pas ménagé son temps ni ses efforts, accueillant les fidèles, distribuant des programmes et se portant régulièrement volontaire pour diverses autres tâches.

 

Je connais M. Zhang depuis décembre 2007. C’est un homme aimable, avec qui il est facile de s’entendre, humble et honnête dans ses rapports avec les gens. Ses relations avec ses coparoissiens lui ont permis de s’adapter rapidement et de manière satisfaisante à un nouveau genre de vie et à un nouveau milieu. Il s’est aussi révélé très attentif aux besoins d’autrui, offrant son aide à chacun.

 

Je suis le pasteur de nombreuses paroisses, notamment celles de Living Water Road à Waterloo et celle de Living Stone à Toronto.

 

(Dossier certifié du tribunal, page 155.)

[27]           À mon avis, et contrairement à son affirmation selon laquelle il a conclu à l’inauthenticité de la pratique religieuse du demandeur en se fondant sur l’ensemble de la preuve dont il disposait, le commissaire a commis une grave erreur en ne prenant pas dûment en considération les éléments de preuve produits par ledit demandeur concernant sa conduite. S’il est vrai que le commissaire a raison de dire qu’il appartient au décideur de la SPR d’apprécier l’authenticité d’une demande d’asile, y compris d’évaluer des éléments de preuve forte sous forme d’opinion, le droit exige qu’il fonde sa conclusion sur l’ensemble de la preuve; voir Owusu-Ansah c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1989] A.C.F. no 442 (CA). Or, dans la présente espèce, la SPR n’a pas équitablement examiné les éléments de preuve produits par le demandeur pour établir qu’il est chrétien au Canada. L’opinion du pasteur Ko, en particulier, exigeait un examen attentif, qui aurait pu aller jusqu’à l’inviter à témoigner, et donc à se prêter à un contre-interrogatoire, si l’on trouvait une quelconque raison de ne pas considérer sa déclaration écrite comme crédible.

 

III.       Résultat

[28]           Pour les motifs qui précèdent, je conclus que la décision contrôlée n’appartient pas aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit.


 

ORDONNANCE

 

LA COUR ORDONNE :

 

1.                  La décision contrôlée est annulée, et l’affaire est renvoyée devant la SPR pour réexamen par une autre formation.

 

2.                  Il n’y a pas de question à certifier.

                                             

 

« Douglas R. Campbell »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Christiane Bélanger, LL.L.

 

 


 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                IMM‑2216‑11

 

INTITULÉ :                                              HAIXHIN ZHANG c

                                                                   LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                        Toronto

 

DATE DE L’AUDIENCE :                      Le 17 avril 2012

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                              LE JUGE CAMPBELL

 

DATE DES MOTIFS :                             Le 4 mai 2012

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Norris Ormston

 

POUR LE DEMANDEUR

 

David Knapp

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Ormston Bellissimo Rotenberg

Avocats

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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