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Cour fédérale

 

Federal Court


 

Date : 20100721

Dossier : IMM-5592-09

Référence : 2010 CF 769

[traduction certifiée, non révisée]

Toronto (Ontario), le 21 juillet 2010

En présence de madame la juge Mactavish

 

 

ENTRE :

IMRAN ZAIB

demandeur

 

et

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               La demande de visa de résident permanent présentée par Imran Zaib à titre de travailleur qualifié a été rejetée au motif qu’il a fait des présentations erronées sur des faits importants. En produisant un diplôme de baccalauréat frauduleux à l’appui de sa demande.

 

[2]               Pour les motifs qui suivent, je suis convaincu que M. Zaib n’a pas reçu un traitement équitable lors de l’appréciation de sa demande. Par conséquent, sa demande de contrôle judiciaire sera acceptée.

 

Le contexte

 

[3]               Au cours d’une entrevue avec M. Zaib, l’agent des visas a eu des inquiétudes à l’égard de l’authenticité du diplôme d’études du demandeur car le baccalauréat de l’université du Pendjab que le demandeur a produit était du [traduction] « nouveau style ». L’agent était également préoccupé par le fait que M. Zaib avait de la difficulté à répondre aux questions concernant ses études. Par conséquent, l’agent a demandé à M. Zaib de produire une confirmation documentaire relativement à son diplôme universitaire.

 

[4]               Très peu de temps après, l’agent a reçu une lettre émanant prétendument de l’université du Pendjab confirmant que M. Zaib était bel et bien titulaire d’un baccalauréat de cet établissement. Comme il avait des doutes quant à l’authenticité de la lettre, l’agent a communiqué directement avec l’université. Il a transmis à l’université une copie de la lettre produite par M. Zaib et a demandé à ce que son authenticité soit confirmée. L’université a avisé l’agent que la lettre était frauduleuse.

 

[5]               L’agent a envoyé une lettre d’équité à M. Zaib dans laquelle il a déclaré ceci : traduction] « J’ai des motifs raisonnables de croire que le diplôme que vous avez produit est frauduleux. Veuillez soumettre des éléments de preuve démontrant le contraire dans les 30 jours […] » À titre de réponse, le consultant en immigration de M. Zaib a produit une autre copie de la lettre de confirmation originale émanant prétendument de l’université du Pendjab.

 

[6]               La demande de M. Zaib a été rejetée en raison des fausses déclarations qu’il a faites.

 

[7]               M. Zaib a par la suite obtenu d’autres documents, émanant censément de l’université du Pendjab, mentionnant que la lettre de confirmation n’était pas authentique et qu’elle lui avait été envoyée à la suite d’une erreur cléricale. M. Zaib a également soumis une copie certifiée de son diplôme et a demandé à l’agent des visas de réexaminer sa décision. L’agent a refusé. L’avocat de M. Zaib a présenté une deuxième demande de réexamen, mais aucune réponse n’a été reçue à cet égard.

 

 

Analyse

 

[8]               M. Zaib a soulevé un certain nombre de questions quant à la décision de l’agent, mais je ne dois qu’examiner la question relative à l’équité car c’est la question qui est déterminante quant à l’issue de la demande.

 

[9]               La section du Guide de l’immigration de Citoyenneté et Immigration Canada qui a trait à l’équité procédurale lors d’examens de demandes de visa prévoit que les agents doivent décrire de façon précise aux demandeurs de visa les documents qu’ils sont tenus de présenter afin de dissiper les doutes des agents. Le Guide prévoit également ceci :

Le demandeur doit connaître l’affaire, c.-à-d. que l’information détenue par l’agent doit être révélée au demandeur avant que la décision soit prise. Par exemple, si un agent se fie à des preuves extrinsèques (par ex. des preuves provenant d’autres sources que du demandeur), il doit donner au demandeur la possibilité de s’expliquer.

 

 

[10]           L’obligation d’équité procédurale s’accorde avec l’obligation que la jurisprudence impose aux agents des visas : voir Muliadi c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), 1986 2 CF 205, 66 N.R. 8 au paragraphe 14 (C.A.F.); Simmons c. Canada (Ministre de la sécurité publique et de la Protection civile), 2006 CF 1123, 151 A.C.W.S. (3d) 503, au paragraphe 7.

 

[11]           Compte tenu de la forme censément inhabituelle du certificat et de l’incapacité de M. Zaib à répondre aux questions concernant ses études, sauf en des termes très généraux, il était tout à fait raisonnable que l’agent doute de l’authenticité du diplôme de M. Zaib. La preuve extrinsèque qui a ultérieurement été obtenue de l’université a naturellement suscité des doutes supplémentaires à l’égard de la véracité des déclarations faites dans la demande de visa présentée par M. Zaib quant à ses études.

 

[12]           Toutefois, il faut souligner que l’agent n’a pas demandé à l’université du Pendjab une confirmation de l’authenticité du diplôme universitaire de M. Zaib, il n’a seulement demandé qu’une confirmation de l’authenticité de la lettre de confirmation produite par M. Zaib. L’université a informé l’agent que la lettre de confirmation était frauduleuse, mais n’a rien mentionné quant à l’authenticité du diplôme en soi. En fait, l’université a demandé à l’agent de transmettre une copie du diplôme afin qu’elle puisse vérifier son authenticité. Rien au dossier n’indique que ce document a été envoyé à l’université à des fins d’authentification.

 

[13]           Cependant, la lettre d’équité envoyée à M. Zaib ne faisait aucune allusion à un quelconque doute de la part de l’agent quant à l’authenticité de la lettre de confirmation qu’il avait produit. Les doutes en question étaient plutôt liés à l’authenticité du diplôme même. Je conviens que la preuve voulant que la lettre de confirmation soit frauduleuse soulèverait logiquement de sérieux doutes quant à l’authenticité du diplôme même. Cela dit, je suis néanmoins convaincue que le fait que l’agent n’ait pas informé M. Zaib de la nature de la preuve extrinsèque émanant de l’université a occasionné une injustice à son égard car M. Zaib n’était pas au courant des doutes qu’il devait dissiper.

 

[14]           Le fait que M. Zaib ne comprenait pas les doutes qu’il devait dissiper est illustré par sa réponse à la lettre d’équité.

 

[15]           M. Zaib a répondu à la lettre d’équité en envoyant à l’agent des visas une copie supplémentaire de la lettre de confirmation émanant de l’université. Cette réponse aurait été raisonnable si les doutes avaient porté sur l’authenticité du diplôme même. En effet, M. Zaib aurait très bien pu présumer que la première copie de la lettre avait été égarée et n’avait pas été reçue par l’agent, ce qui aurait eu comme conséquence que les doutes de l’agent quant à l’authenticité du diplôme n’aurait pas été dissipé.

 

[16]           Cependant, une telle réponse n’aurait eu aucun sens si M. Zaib avait été au courant que l’agent détenait des renseignements émanant de l’université selon lesquels la lettre de confirmation était fausse.

 

[17]           Dans ces circonstances, je suis convaincue que le fait que l’agent n’a pas décrit de façon adéquate la preuve extrinsèque obtenue a eu pour conséquence que M. Zaib s’est vu priver d’une véritable occasion de dissiper les doutes l’agent.

 

Conclusion

 

[18]           En raison de ma conclusion selon laquelle le processus suivi à l’égard de la demande de visa du demandeur a été injuste, la présente demande de contrôle judiciaire sera accueillie, et l’affaire sera renvoyée à un autre agent des visas pour nouvelle décision. Il faut toutefois souligner que je n’ai tiré aucune conclusion quant à l’authenticité du diplôme universitaire de M. Zaib. Toute nouvelle conclusion à cet égard devra comprendre un examen très minutieux du niveau d’études de M. Zaib, compte tenu des doutes sérieux qui ont été soulevés à cet égard.

 

 

Certification

 

[19]           Aucune des parties n’a proposé de question à certifier et aucune n’est soulevée en l’espèce.


JUGEMENT

 

 

            LA COUR ORDONNE :

 

            1.         La demande de contrôle judiciaire est accueillie, et l’affaire est renvoyée à un autre agent des visas pour nouvelle décision conforme aux présents motifs;

 

            2.         Aucune question grave de portée générale n’est certifiée.

 

« Anne Mactavish »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

 

Claude Leclerc, LL.B.

Réviseur

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-5592-09

 

INTITULÉ :                                       IMRAN ZAIB c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               LE 20 JUILLET 2010

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LA JUGE MACTAVISH

 

DATE DES MOTIFS
ET DU JUGEMENT :
                       LE 21 JUILLET 2010

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Matthew Jeffery

 

POUR LE DEMANDEUR

Deborah Drukarsh

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Matthew Jeffery

Avocat

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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