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Date : 20080502

Dossier : IMM-4243-07

Référence : 2008 CF 564

Ottawa (Ontario), le 2 mai 2008

En présence de monsieur le juge Kelen

 

 

ENTRE :

AGHA SHABBAR MUSTAFA

alias SHABBAR MUSTAFA AGHA

demandeur

et

 

LE MINISTRE DE

LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision rendue le 16 août 2007 par un agent des visas, Syed Abdul Hameed, au haut‑commissariat du Canada à Islamabad, au Pakistan, dans laquelle l’agent des visas a rejeté la demande de résidence permanente présentée par le demandeur dans la catégorie du regroupement familial. La présente affaire concerne l’authenticité d’un mariage arrangé où les époux ne se sont jamais rencontrés.

 

 

LE CONTEXTE

[2]               Le demandeur, âgé de 33 ans, est un citoyen du Pakistan. Le 26 août 2006, il s’est marié avec Bushra Kazmi qui a obtenu l’asile au Canada en juin 2005. Le mariage a été célébré au téléphone alors que le demandeur se trouvait au Pakistan et Mme Kazmi, au Canada. Leur certificat de mariage a été signé à ce moment‑là. Bien que leur mariage ait été célébré il y a plus d’un an et demi, le demandeur et son épouse ne se sont pas encore rencontrés face à face.

 

La relation du demandeur avec son épouse

[3]               L’épouse du demandeur a déjà été mariée et elle est la mère d’un jeune enfant. Elle et son ex‑mari s’étaient mariés en l’an 2000, mais ils ont fait face à des problèmes matrimoniaux peu de temps avant que Mme Kazmi quitte le Pakistan en 2002. Ils ont divorcé officiellement en décembre 2005.

 

[4]               Le demandeur et son épouse se sont connus par l’entremise d’amis communs à l’époque où la famille de Mme Kazmi tentait de lui trouver un autre époux. Des membres des deux familles se sont réunis et ont discuté de la possibilité d’un mariage entre le demandeur et Mme Kazmi qui ont commencé à communiquer par téléphone et par courriel. Ils ont décidé de se marier par téléphone alors que le demandeur serait au Pakistan et Mme Kazmi, au Canada.

 

[5]               Le demandeur affirme qu’il était au courant du mariage précédent de son épouse et du fait qu’elle a un jeune garçon, mais que cela ne le dérangeait pas étant donné que, plusieurs années auparavant, ses propres parents avaient divorcé.

[6]               Après son mariage en août 2006, l’épouse du demandeur a avisé Citoyenneté et Immigration Canada du changement à son état matrimonial, qui l’a informée qu’elle pouvait ajouter le demandeur à sa demande de résidence permanente dans la catégorie du regroupement familial. En conséquence, en février 2007, le demandeur a présenté une demande de résidence permanente au haut‑commissariat du Canada à Islamabad.

 

[7]               Le 8 août 2007, le demandeur a participé à une entrevue au haut‑commissariat du Canada, où on lui a posé un certain nombre de questions concernant sa relation avec Mme Kazmi. M. Syed Abdul Hameed, agent des visas, a procédé à l’entrevue.

 

La décision contestée

[8]               Par une lettre datée du 16 octobre 2007, le demandeur a été avisé que sa demande de résidence permanente avait été rejetée au motif qu’il y avait [traduction] « peu de preuves crédibles de l’établissement d’une relation » entre le demandeur et son épouse. Comme l’a mentionné l’agent des visas, M. Hameed :

[traduction]

Votre épouse (le chef de famille) et vous avez contracté un mariage de pure forme qui n’a pas encore été consommé et vous ne vous êtes pas encore rencontrés. Votre épouse a déjà été mariée et a un enfant âgé de sept ans issu de ce mariage. Il y a peu de preuves crédibles de l’établissement d’une relation entre vous et votre épouse. Je ne suis pas convaincu que vous et votre épouse ne soyez pas de mauvaise foi dans cette relation.

 

[…]

 

Je suis convaincu que vous ne satisfaites pas aux exigences relatives à la résidence permanente en qualité de membre de la famille de Bushra Kazmi. Je rejette donc votre demande présentée en vertu du paragraphe 11(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés.

 

[9]               Le 15 octobre 2007, le demandeur a déposé la présente demande d’autorisation et de contrôle judiciaire relativement à la décision de l’agent des visas.

 

LA QUESTION EN LITIGE

[10]           La question soulevée par la présente demande est de savoir si l’agent des visas a commis une erreur en concluant que le demandeur n’appartenait pas à la catégorie du regroupement familial au motif que son mariage n’était pas authentique.

 

LA NORME DE CONTRÔLE

[11]           La question dont est saisie la Cour est de savoir si l’agent des visas a commis une erreur en concluant que le mariage du demandeur n’avait pas été contracté de bonne foi. Au paragraphe 23 de la décision Rosa c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 117, [2007] A.C.F. no 152 (QL), le juge Barnes a déterminé la norme de contrôle applicable à une telle conclusion :

¶ 23     La décision quant à savoir si un mariage est authentique repose essentiellement sur les faits. En l’espèce, la Commission a signalé qu’une telle décision doit prendre en compte de nombreux facteurs, dont la durée de toute relation ou cohabitation antérieure entre les parties, leur connaissance de leurs histoires respectives, leur comportement ensemble, les détails de leur fiançailles et de la cérémonie de mariage, la fréquence et la substance de leurs communications pendant qu’ils sont séparés, et le degré de leur dépendance financière. Ce sont là toutes des questions qui nécessitent de trier et de soupeser la preuve et de procéder à une évaluation de la crédibilité, processus que la Commission est bien placée pour mener à bien. J’accepte que la norme d’examen applicable à ces questions est la norme de la décision manifestement déraisonnable : voir Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Navarrete, [2006] A.C.F. no 878, 2006 CF 691, et les décisions qui y sont citées au paragraphe 17.

 

[12]           Cependant, à la lumière du récent arrêt Dunsmuir c. Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] A.C.S. no 9 (QL), rendu par la Cour suprême du Canada, la décision manifestement déraisonnable a été abolie, et les cours procédant à une analyse relative à la norme de contrôle ont maintenant le choix entre deux normes : la décision correcte et la raisonnabilité. Il est de jurisprudence constante qu’une conclusion relative à l’authenticité d’un mariage doit bénéficier de la plus grande retenue : voir Khella c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 1357, 58 Imm. L.R. (3d) 15, décision rendue par le juge de Montigny, paragraphe 12.

 

[13]           Lorsque les cours font preuve de retenue, cela corrobore le fait que la raisonnabilité soit la norme de contrôle applicable et signifie que, comme la Cour suprême l’a conclu au paragraphe 49 de l’arrêt Dunsmuir, elles doivent « dûment [tenir] compte des conclusions du décideur » lorsqu’elles tirent leur conclusion. Bien que la décision rendue dans l’affaire Rosa, précitée, ait concerné une décision de la Section d’appel de l’immigration de la Commission de l’immigration et du statut de réfugiée, les mêmes éléments sont en jeu lorsque la Cour doit décider si l’agent des visas a commis une erreur en concluant que les époux n’ont pas contracté leur mariage de bonne foi. Par conséquent, la norme de contrôle applicable à la décision de l’agent des visas dans la présente affaire est la raisonnabilité.

 


LE RÈGLEMENT PERTINENT

[14]           Une demande de résidence permanente dans la catégorie du regroupement familial peut être rejetée sur le fondement de l’article 4 du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002‑227, qui dispose ce qui suit :

4. Pour l’application du présent règlement, l’étranger n’est pas considéré comme étant l’époux, le conjoint de fait, le partenaire conjugal ou l’enfant adoptif d’une personne si le mariage, la relation des conjoints de fait ou des partenaires conjugaux ou l’adoption n’est pas authentique et vise principalement l’acquisition d’un statut ou d’un privilège aux termes de la Loi.

4. For the purposes of these Regulations, a foreign national shall not be considered a spouse, a common-law partner, a conjugal partner or an adopted child of a person if the marriage, common-law partnership, conjugal partnership or adoption is not genuine and was entered into primarily for the purpose of acquiring any status or privilege under the Act.

 

ANALYSE

La question en litige :        L’agent des visas a‑t‑il commis une erreur en concluant que le   demandeur n’appartenait pas à la catégorie du regroupement familial au motif que son mariage n’était pas authentique?

 

[15]           Le demandeur soutient que la décision de l’agent des visas renferme trois raisons pour lesquelles il n’a pas satisfait aux exigences relatives à la résidence permanente dans la catégorie du regroupement familial. Ces raisons se présentent comme suit :

1.      le mariage n’avait pas encore été consommé, et les époux ne s’étaient pas encore rencontrés;

2.      l’épouse du demandeur avait déjà été mariée et a un fils de sept ans;

3.      les « preuves crédibles d’établissement d’une relation » entre le demandeur et son épouse étaient minces.

 

[16]           Cependant, le demandeur soutient que l’agent des visas a omis de :

1.      dire de quelque façon pourquoi le mariage précédent de son épouse était pertinent quant à la conclusion selon laquelle son mariage n’était pas authentique;

2.      tenir compte de son explication justifiant pourquoi lui et son épouse ne s’étaient pas encore rencontrés ou n’avaient pas encore consommé leur mariage;

3.      lui donner une occasion appropriée de répondre à ses réserves relativement au manque de preuve concernant l’établissement de la relation avec son épouse.

 

Chacun de ces points sera analysé tour à tour.

 

Le mariage précédent de Mme Kazmi

 

[17]           En plus de ceux fournis au demandeur dans la lettre du 16 août 2007, les motifs de l’agent des visas comprennent également les notes qu’il a consignées dans le Système de traitement informatisé des dossiers d’immigration (les notes du STIDI). Dans la présente affaire, les notes rédigées par l’agent des visas mentionnent que le demandeur allait être invité à passer une entrevue pour nous permettre [traduction] « d’aborder les questions de relation et de compatibilité », en raison du mariage précédent de Mme Kazmi. Les notes du STIDI révèlent par la suite les résultats de l’entrevue :

L’É. [l’étranger] (le demandeur) affirme ne pas avoir les documents originaux relatifs au divorce du CDF [chef de famille] (Mme Kazmi); ne pas connaître les détails du mariage précédent de la CDF; n’avoir jamais demandé à les connaître; ne pas savoir si l’ex‑époux de la CDF est au Pakistan, aux États‑Unis ou au Canada, ni où a eu lieu le divorce entre la CDF et l’ex‑époux; seulement savoir que le certificat de divorce a été délivré à Karachi, au Pakistan, et avoir appris que l’ex‑époux de la CDF était quelque peu désobligeant à son égard.

 

L’É affirme qu’une amie de sa mère connaissait la famille de la CDF; que sa mère avait arrangé la relation avec la CDF; qu’il n’avait pas de raisons particulières pour marier la CDF, mais que sa mère lui cherchait une compagne et que, lorsque l’ami de sa mère a parlé de la CDF à sa mère, ils ont tous deux convenu au mariage; que sa mère n’a toujours pas rencontré la CDF; que l’amie de sa mère avait dit à sa mère que la CDF était convenable et qu’elle serait une bonne compagne pour lui (l’É);

qu’il n’a pas encore rencontré la CDF;

qu’il sait que la CDF a un fils issu de son mariage précédent et qu’il vit avec elle au Canada;

que le fils de la CDF a environ sept ans;

qu’il ne connaît pas la date d’anniversaire de naissance de la CDF;

qu’il n’a aucune preuve relative à l’établissement de la relation à présenter et que la CDF lui a envoyé deux photographies, mais qu’il n’a pas les enveloppes dans lesquelles elles lui sont parvenues.

 

Conclusion: je conclus que l’É et la CDF ont contracté un mariage de pure forme et ne se sont pas rencontrés; que la CDF a déjà été mariée et que de ce mariage est né un garçon aujourd’hui âgé de sept ans. Il y a peu de preuves crédibles de l’établissement d’une relation entre l’É et la CDF. Je ne suis pas convaincu que la relation entre l’É et la CDF ne soit pas un mariage contracté de mauvaise foi […]

 

 

[18]           Il ressort clairement de la lecture tant de la lettre de décision que des notes du STIDI que le mariage précédent de Mme Kazmi a fait naître les réserves de l’agent des visas quant à l’authenticité du mariage du demandeur.

 

[19]           Le défendeur affirme qu’il est expliqué dans l’affidavit de l’agent des visas, lequel a été déposé le 5 décembre 2007, en quoi le mariage précédent de Mme Kazmi est pertinent. Aux paragraphes 7 et 8 de l’affidavit, l’agent des visas mentionne ce qui suit :

[traduction]

¶ 7       Une des questions que j’ai soulevées lors de l’entrevue concernait l’étendue de la connaissance et de la perception que le demandeur et son répondant avaient de leur situation respective. J’avais des réserves relativement au fait que ni le demandeur, ni sa mère, qui apparemment tentait de lui trouver une épouse, n’avaient rencontré la CDF ni ne la connaissaient. Dans la culture locale, lorsqu’il a une relation antérieure ou un enfant en jeu, un second mariage peut bien avoir lieu, mais seulement si on est en présence de circonstances de nature humanitaire : par exemple, dans le cas où les époux potentiels proviennent de la même famille élargie ou si les familles respectives des deux personnes sont proches l’une de l’autre. Dans ces circonstances, le mariage n’est pas rare, mais même dans ces circonstances, ils auraient des discussions concernant des questions telles que les soins à donner à l’enfant et qui en sera financièrement responsable. On peut s’attendre à ce que la personne qui n’était pas mariée précédemment veuille obtenir des précisions sur les raisons pour lesquelles le mariage de l’autre personne pris fin.

 

¶ 8       Aucun des éléments susmentionnés n’était présent en l’espèce. Par exemple, le demandeur n’avait guère de connaissances relativement au mariage précédent de la demanderesse. Il affirme qu’il n’a pas demandé à son épouse de le renseigner sur son ex‑époux. Le demandeur ne connaissait même pas la date de naissance de son épouse. En outre, ils se sont mariés à distance et, par conséquent, le mariage n’a pas été consommé.

 

 

[20]           Lorsque l’on considère la décision dans son ensemble, le raisonnement précité n’est pas pertinent quant à la décision définitive, il ne sert qu’à expliquer pourquoi l’agent des visas avait procédé à l’entrevue du demandeur en vue de déterminer le sérieux de la relation et le degré réel de compatibilité des époux ou, autrement dit, l’authenticité du mariage. Par conséquent, je conclus que l’affidavit donne un contexte, mais ne fournit pas après coup les motifs de la décision. Sinon, j’aurais conclu que l’agent des visas avait omis de fournir au demandeur des motifs suffisants justifiant le rejet de sa demande de résidence permanente.

 

L’omission de tenir compte de l’explication du demandeur

[21]           Les raisons que l’agent des visas avait de rejeter la demande de résidence permanente du demandeur concernaient en partie le fait que lui et son épouse ne s’étaient jamais rencontrés et qu’ils n’avaient jamais consommé leur mariage. L’agent des visas a par conséquent noté qu’il s’agissait d’un mariage de pure forme et que cela n’était pas suffisant pour établir que le mariage avait été contracté de bonne foi. Le demandeur, par contre, a déclaré dans son affidavit que, lorsque l’agent des visas lui avait demandé pourquoi il n’avait jamais rencontré son épouse, il avait affirmé que c’était parce que son épouse avait demandé l’asile à titre de réfugié venant du Pakistan et qu’elle était donc incapable d’y retourner que ce soit pour le mariage ou par après. En outre, le demandeur soutient que l’agent des visas devait savoir ce renseignement étant donné que son épouse est une réfugiée au sens de la Convention et qu’elle a présenté sa demande de résidence permanente au Canada dans la catégorie des « personnes protégées ».

 

[22]           Cependant, l’agent des visas ne mentionne nulle part dans la décision ou dans les notes du STIDI qu’il a pris en considération le fait que Mme Kazmi est une réfugiée pour rendre sa décision. L’agent des visas semble plutôt ne pas avoir tenu compte du tout du statut de réfugié de Mme Kazmi lorsqu’il a rendu sa décision en se fondant, du moins en partie, sur le fait que le demandeur et Mme Kazmi ne s’étaient jamais rencontrés, ni n’avaient consommé leur mariage. En effet, l’agent des visas l’a même mentionné au paragraphe 8 de son affidavit : [traduction] « ils se sont mariés à distance et, par conséquent, le mariage n’a pas été consommé ».

 

[23]           Que Mme Kazmi ne puisse pas retourner au Pakistan au motif qu’elle a fui le pays parce qu’elle y était persécutée et que le demandeur ne puisse pas venir au Canada sans visa valide constituent des éléments de preuve pertinents et importants. C’est ce qui explique pourquoi ils ne se sont jamais rencontrés ou rendus visite. Cependant, l’agent des visas ne mentionne aucunement ces faits dans la lettre de rejet ou dans les notes du STIDI. Il en vient plutôt à une conclusion diamétralement opposée en se fondant sur l’absence d’une relation comme l’une des raisons lui permettant d’affirmer l’inauthenticité du mariage. Par conséquent, la Cour conclut qu’il était déraisonnable que l’agent des visas se fonde sur le fait que les époux ne s’étaient pas encore rencontrés ou n’avaient pas encore consommé leur mariage, étant donné qu’il n’a pas tenu compte de la preuve dont il disposait. En outre, l’agent des visas a manqué à son obligation en omettant de se pencher sur cette preuve pertinente et importante. La Cour doit déduire que l’absence de mention relative à cette preuve signifie que la décision a été prise sans en tenir compte. Il s’agit d’une décision déraisonnable.

 

L’occasion de répondre aux réserves de l’agent des visas

[24]           Le demandeur soutient que l’agent des visas a commis une erreur parce qu’il ne lui a pas fourni une occasion de répondre à ses réserves relatives au fait qu’il avait omis de déposer des éléments de preuve montrant qu’il avait établi une relation avec son épouse et corroborant l’authenticité du mariage. Le demandeur a affirmé dans son affidavit daté du 23 octobre 2007 que, même s’il avait présenté un certain nombre de cartes de vœux et de photographies à l’entrevue, il avait omis d’apporter des lettres et des courriels que sa femme et lui s’étaient écrits. Le demandeur affirme que, si l’agent des visas lui avait fait part de ses réserves lors de l’entrevue, il aurait alors demandé l’autorisation de lui envoyer les lettres et les courriels après l’entrevue.

 

[25]           Dans les notes du STIDI, l’agent des visas a affirmé qu’il n’avait accordé aucun poids aux cartes de vœux et aux photographies parce que le demandeur avait omis de déposer les enveloppes dans lesquelles elles avaient été envoyées, ce qui signifiait qu’il lui était impossible de connaître leurs dates d’envoi ou de savoir si elles avaient été envoyées ensemble. Il n’y a aucune mention dans les notes du STIDI selon lesquelles le demandeur aurait affirmé posséder des preuves supplémentaires corroborant l’établissement de la relation.

[26]           Il incombe au demandeur d’établir l’authenticité du mariage. Comme l’a affirmé le juge Evans, alors juge à la Cour fédérale, au paragraphe 6 de la décision Madan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1999), 172 F.T.R. 262, les agents des visas doivent fonder leurs décisions sur les renseignements fournis par le demandeur :

¶ 6       Il est bien établi qu'un demandeur de visa a l'entière responsabilité de présenter à l'agent des visas toute la documentation qui pourrait permettre à ce dernier de rendre une décision favorable. Les agents des visas n'ont par conséquent aucune obligation générale en droit de demander des détails ou des renseignements additionnels avant de rejeter une demande de visa au motif que la documentation soumise ne suffisait pas à les convaincre que le demandeur répondait aux critères de sélection pertinents.

 

Par conséquent, il incombait au demandeur de fournir à l’agent des visas tous les éléments de preuve pertinents qu’il possédait relativement à l’établissement d’une relation avec son épouse, et l’agent des visas n’était aucunement dans l’obligation de demander au demandeur s’il possédait ou non des preuves supplémentaires relatif à l’établissement de cette relation. C’était d’autant plus important étant donné que le demandeur avait été avisé par lettre datée du 4 juillet 2007 d’apporter à l’entrevue des éléments de preuve relatifs à l’établissement de la relation avec son épouse.

 

CONCLUSION

[27]           Pour ces motifs, la présente demande de contrôle judiciaire sera accueillie, la décision de l’agent des visas, infirmée et l’affaire, renvoyée à un autre agent des visas pour nouvel examen.

 

[28]           Les parties conviennent que l’affaire ne soulève aucune question qui devrait être certifiée, et la Cour est d’accord.


JUGEMENT

 

LA COUR STATUE que :

 

1.                  la présente demande de contrôle judiciaire est accueillie;

2.                  la décision de l’agent des visas est infirmée;

3.                  l’affaire est renvoyée à autre agent des visas pour nouvel examen qu’il n’effectuera qu’après avoir procédé à une entrevue avec le demandeur.

 

 

 

« Michael A. Kelen »

Juge

 

 

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Jean-François Martin, LL.B., M.A.Trad.jur.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                    IMM-4243-07

 

INTITULÉ :                                                  AGHA SHABBAR MUSTAFA ALIAS SHABBAR MUSTAFA AGHA c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                            Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                          LE 22 AVRIL 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                         LE JUGE KELEN

 

DATE DES MOTIFS :                                 LE 2 MAI 2008

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Lisa Rosenblatt

 

POUR LE DEMANDEUR

Michael Butterfield

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Lisa Rosenblatt

Avocate

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

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