Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

 

 

 

Date : 20070214

Dossier : T-768-06

Référence : 2007CF170

Toronto (Ontario) le 14 février 2007

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE HUGUES

 

ENTRE :

PFIZER CANADA INC. et  PFIZER INC.

demanderesses

et

LE MINISTRE DE LA SANTÉ  et

COBALT PHARMACEUTICALS INC.

défendeurs

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               Les présents motifs et l’ordonnance concernent une requête, qui m’a été présentée le lundi 12 février 2007 au moment de l’audition de deux autres requêtes, visant à permettre aux demanderesses de déposer à leur dossier, à l’appui de la requête la plus longue relative au brevet canadien numéro 2,355,493, un affidavit de Navrish Dhanao souscrit le 11 décembre 2006.  À l’audience,  j’ai indiqué que la requête serait rejetée et que l’affidavit de M. Dhanoa ne serait pas admis en preuve. J’ai ajouté que de brefs motifs suivraient. Ces motifs sont les suivants :

 

[2]               Les instances T-768-06 et T-899-06 ont été instruites ensemble.  Elles ont été engagées sous le régime du Règlement sur les médications brevetées (Avis de conformité), DORS-93-133, modifié (le Règlement). Dans les deux cas, il s’agit des mêmes demanderesses et le ministre de la Santé est défendeur dans les deux instances. Les deux instances concernent les mêmes brevets. Les codéfenderesses, fabricants de médicaments génériques, que le Règlement appelle « seconde partie »,  sont différentes dans les deux instances.  Dans T-768-06, il s’agit de Cobalt Pharmaceuticals Ltd. alors que dans T-899-06, il s’agit de Pharmascience Inc.

 

[3]               Dans chacune des instances, il a été convenu entre les parties d’établir un échéancier pour le dépôt des affidavits et les contre-interrogatoires, qui a fait l’objet d’une ordonnance de la Cour.    Le contre-interrogatoire de l’un des témoins de Pharmascience était terminé lorsque l’avocat de la demanderesse a, apparemment par hasard,  remarqué que l’affidavit de M. Dhanoa, qui n’avait pas encore été souscrit, ne faisait pas partie du dossier. L’avocat des demanderesses a cherché à obtenir le consentement de l’avocat des défenderesses au dépôt de l’affidavit, lequel  lui a été refusé. D’où la requête.

 

[4]               L’avocat des demanderesses admet que l’affidavit de M. Dhanoa a été déposé tardivement, ayant été présenté après l’expiration du délai de dépôt conformément aux engagements convenus entre avocats, entente ultérieurement incorporée dans une ordonnance. Il a été présenté après le début du contre-interrogatoire du témoin de la partie adverse. La seule excuse offerte pour le retard est l’inattention de l’avocat des demanderesses.

[5]               L’article 312 des Règles confère à la Cour le pouvoir discrétionnaire de permettre le dépôt d’affidavits complémentaires dans les circonstances appropriées. Dans Merck Frosst Canada & Co. c. Canada (Ministre de la Santé) (2003), 25 C.P.R (4e) 56, la Cour a énoncé un certain nombre de facteurs à considérer pour autoriser le dépôt de ce type de documents :

1.                  Cet élément de preuve aurait-il pu être prévu antérieurement?

2.                  Cet élément de preuve aidera-t-il la Cour à rendre un jugement définitif?

3.                  Le refus de la Cour causerait-il un préjudice important à la partie qui cherche à déposer le document?

4.                  Cet élément de preuve servira-t-il l’intérêt de la justice?

5.                  Cet élément de preuve entraînera-t-il des délais déraisonnables?

 

 

[6]               Dans les circonstances de l’espèce, il ressort clairement du paragraphe 5 de l’affidavit de

M. Zimmerman au soutien de la requête des demanderesses que l’affidavit de M. Dhanoa a été antérieurement prévu, et qu’en fait seule l’inattention de l’avocat a empêché le dépôt de cet affidavit dans les délais.  C’est un facteur qui justifie de refuser son dépôt aujourd’hui.

 

[7]               Quant à l’utilité de l’affidavit de M. Dhanoa,  celui-ci est un étudiant en droit qui est employé aux bureaux des avocats des demanderesses.  Il aurait apparemment communiqué par téléphone avec une maison d’édition et  obtenu des renseignements sur la date de publication d’un article scientifique écrit par M. Zhang.  M. Dhanoa s’est également rendu au CISTI, un centre de service de livraison de documents, où on lui a remis une copie d’un autocollant qui porte une date de réception visible de l’article de  M. Zhang .  Cet élément de preuve constitue du ouï-dire.  Aucun motif n’a été fourni  pour expliquer pourquoi l’éditeur ou le CISTI n’ont pu fournir une preuve directe. Un contre-interrogatoire de M. Dhanoa serait largement futile. 

 

[8]               Bien que l’article 81 des Règles permette que l’affidavit contienne des preuves par ouï-dire, le défaut de fournir des affidavits de personnes ayant personnellement connaissance des faits  peut donner lieu à des conclusions défavorables.

 

[9]               De plus,  M. Dhanoa est un étudiant en droit qui travaille aux bureaux des avocats des demanderesses.  L’article 82 des Règles de la Cour interdit à un avocat de présenter des arguments fondés sur son affidavit sans avoir obtenu l’autorisation de la Cour. Dans Cross-Canada Auto Body Supply (Windsor) Ltd. c. Hyundai Auto Canada, [2006] A.C.F. no 539, la Cour d’appel fédérale a déclaré qu’il était inapproprié pour un avocat de plaider une requête à l’appui de laquelle un membre de son cabinet a signé un affidavit. Bien que la Cour puisse, comme l’autorise l’article 82 des Règles, permettre à un avocat de présenter des arguments lorsque l’affidavit est non contesté,  s’il en est autrement, l’affidavit ne sera pas admissible ou un autre avocat devrait présenter des arguments.

 

[10]           Or ici, l’affidavit constituant du ouï-dire et son admissibilité soulevant des interrogations vu que son auteur travaille au cabinet des avocats des demanderesses, sa valeur probante est faible. On ne doit pas perdre de vue que nous devons en l’espèce examiner la preuve présentée et non ce qui pourrait être tiré de la preuve. Si la preuve est faible, peu importe les arguments qu’elle permette d’avancer, il est encore moins justifié d’en autoriser le dépôt tardif.

 

 

 

[11]           Quoi qu’il en soit, ce qu’il fallait démontrer, soit la date de publication de l’article de

M. Zhang,  n’a fait ultimement aucune différence quant aux arguments présentés oralement dans le cadre des autres requêtes.

 

[12]           Conséquemment, la requête visant à autoriser le dépôt et l’ajout au dossier de l’affidavit de M. Dhanoa est rejetée avec dépens.


ORDONNANCE

 

POUR LES MOTIFS FOURNIS EN L’ESPÈCE, LA COUR ORDONNE :

 

1.                  La requête visant à autoriser le dépôt et l’ajout au dossier de l’affidavit de M. Dhanoa  est  rejetée;

 

2.                   La défenderesse, Cobalt, a droit à ses dépens.

 

« Roger T. Hughes »

Juge

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Dany Brouillette, LL.B.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

 

DOSSIER :                                        T-768-06

 

INTITULÉ :                                       Pfizer Canada Inc. et al. c.

                                                            Cobalt Pharmaceuticals et al.

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 12 février 2007

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE   

ET ORDONNANCE :                       LE JUGE HUGHES

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 14 février 2007

 

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Jana Stettner

POUR LES DEMANDERESSES

 

 

Heather Watts

POUR LA DÉFENDERESSE

COBALT

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

TORYS, LLP

POUR LES DEMANDERESSES

 

 

DEETH WILLIAMS WALL, LLP

POUR LA DÉFENDERESSE

COBALT

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.