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Date : 20070110

Dossier : IMM-714-06

Référence : 2007 CF 20

Ottawa (Ontario), le 10 janvier 2007

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE O’KEEFE

 

 

ENTRE :

LUZ MARINA HERNANDEZ BONILLA

demanderesse

 

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

LE JUGE O’KEEFE

 

[1]               La demanderesse sollicite, en application du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la LIPR), le contrôle judiciaire de la décision d’un agent des visas, en date du 12 décembre 2005, qui lui a refusé un permis d’études et un visa de résidente temporaire.

 

Le contexte

 

[2]               La demanderesse est une Colombienne âgée de seize ans. Le 25 novembre 2005, elle a sollicité un permis d’études afin de pouvoir étudier au Canada durant quatre ans. L’école secondaire de Gravenhurst, à Gravenhurst (Ontario), avait déjà accepté la demanderesse comme étudiante. La garde et la tutelle de la demanderesse ont été transférées par ses parents à sa sœur, Blanca Isabel Hernandez, et au mari de celle-ci, Bruce Maltby, un citoyen canadien. Le couple a accepté de s’occuper de la demanderesse et de subvenir à tous ses besoins. Les parents de la demanderesse, ainsi que ses autres frères et sœurs et sa famille élargie, vivent en Colombie.

 

[3]               Le dossier présenté par la demanderesse comprenait ce qui suit : la demande de permis d’études, les renseignements familiaux complémentaires, le droit d’ouverture de dossier, la lettre d’acceptation du conseil scolaire, une copie de l’acte de naissance et du passeport de la demanderesse, une lettre notariée d’autorisation de ses parents, un affidavit de son tuteur selon lequel il avait accepté la tutelle, enfin un affidavit de son tuteur précisant qu’il était marié avec sa sœur, qu’il gagnait un salaire supérieur à 80 000 $ par année et qu’il était disposé à payer les frais de scolarité et frais de subsistance de la demanderesse. L’affidavit précisait aussi que la demanderesse quitterait le Canada à l’expiration de son statut d’étudiante. L’affidavit était accompagné des pièces suivantes : un certificat de mariage, une preuve de résidence de la sœur de la demanderesse, des lettres de l’employeur et des références.

 

[4]               La demanderesse n’a pas été invitée à une entrevue par l’agent des visas qui a examiné sa demande. Par lettre en date du 12 décembre 2005, elle fut informée que sa demande avait été refusée. L’agent des visas a estimé que le fait pour la demanderesse de vivre au Canada durant ses années formatrices d’études secondaires aurait un effet défavorable sur l’aptitude de la demanderesse à se réadapter à la vie en Colombie. La demanderesse n’a donc pas été à même de prouver qu’elle retournerait dans son pays d’origine après l’expiration de son permis d’études, pour le cas où un tel permis lui serait accordé. Il s’agit ici du contrôle judiciaire de la décision de l’agent.

 

Les motifs donnés par l’agent à l’appui de sa décision

 

[5]               Après avoir évalué la demande de visa, l’agent des visas a estimé que la demanderesse ne remplissait pas les conditions d’obtention d’un visa de résidente temporaire. La demande de visa a donc été refusée. Selon l’agent, la demanderesse ne remplissait pas les conditions de la LIPR et de son règlement d’application. Plus précisément, il n’était pas persuadé que la demanderesse remplissait les conditions de l’article 179 du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 (le Règlement), en vertu duquel l’étranger doit établir qu’il entend quitter le Canada à la fin de son séjour temporaire.

 

[6]               L’agent a tenu compte des liens de la demanderesse avec le pays de sa nationalité et les a mis en balance avec les facteurs qui pourraient l’inciter à vouloir rester au Canada. Il a relevé que, en application de l’alinéa 216(1)b) du Règlement, c’est à la demanderesse qu’il appartenait d’établir qu’elle était véritablement une résidente temporaire qui quitterait le Canada à la fin de ses études.

 

[7]               L’agent des visas a considéré l’existence possible d’une double intention, en application du paragraphe 22(2) de la LIPR, selon lequel l’intention qu’il a de s’établir au Canada n’empêche pas l’étranger de devenir résident temporaire sur preuve qu’il aura quitté le Canada à la fin de la période de séjour autorisée. L’agent a relevé que la demanderesse souhaitait étudier au Canada durant quatre de ses années les plus formatrices. Il a conclu que le fait pour elle d’être séparée de sa famille, de sa communauté, de sa langue et du système scolaire de la Colombie durant une période aussi longue entraînerait la rupture de ses liens avec la Colombie. L’agent a estimé qu’il serait improbable que la demanderesse quitte le Canada pour le cas où un visa de résidente permanente lui serait refusé.

 

[8]               Les notes portées par l’agent des visas dans le Système de traitement informatisé des dossiers d’immigration (STIDI) font partie des motifs de sa décision :

[traduction] Je ne suis pas persuadé que cette candidate quittera le Canada à la fin de ses études au Canada comme l’y oblige l’alinéa 216(1)b) du Règlement. Elle aura passé toutes ses années formatrices au Canada, loin de ses parents, de sa communauté, de sa culture et de sa langue. En fait, elle se sera expatriée, car elle ne se sera pas établie comme adulte en Colombie, puisqu’elle ne serait pas en mesure de s’y réadapter pour le cas où elle voudrait y retourner. Dans ces conditions, je ne suis pas persuadé que le paragraphe 22(2) de la Loi (double intention) est applicable au cas de la demanderesse, et cela parce que la prépondérance de la preuve – compte tenu qu’elle souhaite rester au Canada durant quatre ans – donne à penser qu’elle a l’intention de rester en permanence au Canada, ce qui aurait pour effet de rendre impossible pour elle la mise à exécution de la deuxième moitié de la double intention.

 

Les points en litige

 

[9]               La demanderesse a soumis les points suivants à l’examen de la Cour :

1.  A-t-elle été privée de l’application des principes de justice naturelle parce qu’elle n’a pas eu l’occasion de réagir aux doutes de l’agent?

2.  La décision de l’agent était-elle déraisonnable compte tenu des preuves dont il était saisi?

 

Les prétentions de la demanderesse

 

[10]           La demanderesse a d’abord pris note de certaines portions du témoignage de l’agent des visas, extraites du contre-interrogatoire de celui-ci sur le contenu de son affidavit. L’agent a déclaré qu’il n’avait aucun souvenir direct des documents produits dans le dossier de la demanderesse. Il a dit que les documents produits à l’appui de la demande de visa ne l’avaient pas persuadé que la demanderesse quitterait le Canada après ses études. La demanderesse a relevé que, dans les cas où la preuve documentaire montre qu’un candidat ne remplit pas les conditions d’obtention d’un visa, l’agent ne commet pas d’erreur s’il ne s’enquiert pas davantage. Cependant, la demanderesse a fait valoir qu’elle répondait à toutes les conditions d’obtention du visa et que la question en litige en était une d’intention subjective. Selon elle, l’agent avait tiré une conclusion défavorable sans lui donner l’occasion de réagir, alors qu’elle n’avait aucune raison d’anticiper les doutes de l’agent, puisque les documents qu’elle avait produits étaient complets.

 

[11]           La demanderesse n’a pas bénéficié d’une entrevue. Elle a relevé que les agents n’ont pas l’obligation d’accorder des entrevues, mais elle a ajouté que, lorsque l’agent tire une conclusion se rapportant à l’intention de l’étranger, celui-ci devrait avoir la possibilité de réagir aux doutes de l’agent. La demanderesse a cité une jurisprudence où la Cour fédérale avait annulé les décisions d’agents des visas qui avaient tiré des conclusions défavorables sur l’intention d’un étranger de quitter le Canada après l’expiration de son permis d’études, sans lui avoir donné l’occasion de réagir (voir les décisions Yue c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2002), 26 Imm. L.R. (3d) 158 et Yuan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2001), 215 F.T.R. 66).

 

[12]           La demanderesse a fait valoir que, par l’affidavit de son tuteur, elle avait confirmé qu’elle retournerait en Colombie une fois ses études achevées. Elle a précisé que toute sa famille, à l’exception d’une sœur, vivait encore en Colombie et que ses études au Canada n’entraîneraient pas la rupture de tous ses liens avec son pays d’origine. Selon elle, l’agent avait manqué aux principes de l’équité en tirant une conclusion défavorable sur son intention de quitter le Canada et de retourner en Colombie, et cela sans lui donner la possibilité de réagir.

 

[13]           L’agent a témoigné que les candidats à un visa temporaire qui souhaitent venir étudier au Canada y restent en général moins d’un an, ou que, s’ils y restent plus longtemps, c’est par nécessité, par exemple lorsqu’un de leurs parents vient séjourner au Canada pour des raisons professionnelles. Selon la demanderesse, l’agent avait fait intervenir dans l’examen de la demande un impératif de nécessité qui n’était pas justifié. Dans ses motifs, l’agent des visas écrivait que la demanderesse ne serait plus en mesure de se réadapter à la vie en Colombie ou d’y travailler si elle devait rester au Canada durant une période de quatre ans. La demanderesse soutient que, si la durée de ses études projetées ou son aptitude à se réintégrer à la société colombienne suscitait des doutes dans l’esprit de l’agent, celui-ci aurait dû lui donner la possibilité d’y réagir.

 

[14]           La demanderesse soutient aussi que l’agent avait commis une erreur manifestement déraisonnable en rejetant sa demande. La décision de l’agent était entièrement fondée sur le fait que la demanderesse viendrait au Canada poursuivre ses études secondaires durant ses années formatrices. Le raisonnement de l’agent conduit à la conclusion selon laquelle toutes les demandes de permis d’études doivent être refusées parce que les demandeurs ne retourneront pas dans leur pays après avoir terminé leurs études secondaires au Canada, puisqu’ils se seront établis ici et auront rompu leurs liens avec leur pays d’origine. La demanderesse a fait valoir que l’affirmation générale de l’agent, sans qu’il se soit référé au cas particulier de la demanderesse et sans avoir pris en compte les faits, ne saurait être admise. Elle a relevé que, dans l’arrêt Wong c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1999), 246 N.R. 377, la Cour d’appel fédérale était arrivée à la conclusion que les projets d’études à long terme d’un demandeur de visa temporaire constituent un facteur pertinent, mais non déterminant, dans l’évaluation d’une demande de permis d’études.

 

[15]           La demanderesse a relevé que, dans le jugement Zhang c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CF 1493, l’agent avait refusé un visa au demandeur parce qu’il lui semblait que ce dernier n’avait pas de liens étroits en dehors du Canada. La Cour a annulé la décision de l’agent parce qu’il n’avait pas tenu compte de la solidité des liens du demandeur avec la Chine. La demanderesse souligne que, dans la présente affaire, sa famille tout entière, à l’exception d’une sœur, habite en Colombie et qu’elle a elle-même passé toute sa vie en Colombie. Selon elle, la conclusion de l’agent était manifestement déraisonnable et devait être annulée.

 

Les prétentions du défendeur

 

[16]           Selon le défendeur, la décision d’un agent des visas relative à une demande de résidence temporaire est de nature discrétionnaire. Il a fait valoir que, lorsque l’agent a exercé son pouvoir discrétionnaire de bonne foi, en conformité avec les principes de justice naturelle, et qu’il s’est gardé de prendre en compte des facteurs hors de propos ou sans rapport avec l’objet du texte de loi, alors la Cour devrait s’abstenir d’intervenir (voir l’arrêt Jang c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2001 CAF 312).

 

[17]           Le défendeur a dit que le contenu du devoir d’équité auquel est astreint un agent des visas lorsqu’il se prononce sur une demande de visa se situe à l’extrémité inférieure du registre (voir l’arrêt Patel c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CAF 55). Selon le défendeur, l’agent n’était pas tenu de donner à la demanderesse une nouvelle occasion d’éclaircir les preuves qui avaient été produites, puisque c’est à la demanderesse qu’il appartenait de déposer une demande claire (voir la décision Lam c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1998), 152 F.T.R. 316 (C.F. 1re inst.)). En outre, un agent des visas n’est pas tenu d’informer un demandeur que sa demande présente des lacunes (voir la décision Asghar c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1997), 73 A.C.W.S. (3d) 662).

 

[18]           Le défendeur a relevé que la demanderesse avait présenté sa demande avec l’aide d’un avocat. Cependant, elle n’avait pas établi qu’elle quitterait le Canada à la fin de ses études. Il a fait valoir que rien ne prouvait que l’agent avait conçu, à propos de la demande de visa, des doutes que la demanderesse n’avait pas eu l’occasion de dissiper en présentant sa demande. Le défendeur a cité le jugement Wen c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2002), 25 Imm. L.R. (3d) 316, où la juge Snider a estimé que, dans cette affaire, l’agente des visas n’était pas tenue de donner à l’étudiant demandeur l’occasion de dissiper ses doutes. Selon le défendeur, l’agent avait dans le cas présent évalué avec soin la situation de la demanderesse lorsqu’il avait refusé sa demande.

 

La réponse de la demanderesse

 

[19]           Selon la demanderesse, certains des précédents invoqués par le défendeur étaient hors de propos parce qu’ils concernaient des demandes de visas qui étaient au départ déficientes. Dans la présente affaire, la demanderesse remplissait toutes les conditions légales, et la question posée concernait la manière dont l’agent des visas avait interprété son intention subjective de quitter le Canada une fois son permis d’études expiré.

 

Analyse et décision

 

[20]           Le premier point concerne un déni de justice naturelle et doit être revu selon la norme de la décision correcte (voir le jugement Duraisami c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 1008).

 

[21]           Point n° 1

La demanderesse a-t-elle été privée de l’application des principes de justice naturelle parce qu’elle n’a pas eu l’occasion de dissiper les doutes de l’agent?

            La demande de visa présentée par la demanderesse répondait à tous les critères réglementaires, mais elle a été refusée parce que l’agent des visas a conclu que la demanderesse n’avait pas l’intention de quitter le Canada après ses études. La demanderesse soutient que l’agent a manqué aux règles de la justice naturelle parce qu’il ne lui a pas donné l’occasion de réagir à son idée qu’elle n’avait pas l’intention de quitter le Canada.

 

[22]           Il est bien établi que les agents des visas ne sont en général pas tenus de donner aux demandeurs de visas l’occasion de préciser ou d’expliquer davantage leurs demandes (voir les décisions Li c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2001), 208 F.T.R. 294 et Wen c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2002), 25 Imm. L.R. (3d) 316). Il appartient aux demandeurs de visas de présenter aux agents des visas des demandes en bonne et due forme.

 

[23]           En l’espèce, l’agent des visas n’a pas été persuadé que, comme le requiert l’alinéa 216(1)b) du Règlement, la demanderesse avait prouvé qu’elle quitterait le Canada à la fin de ses études. Cette conclusion reposait sur l’opinion de l’agent des visas selon laquelle, après avoir passé quatre années formatrices au Canada, la demanderesse se serait séparée de sa famille et de sa culture à un point tel qu’il lui serait impossible de se réadapter à la vie en Colombie lorsqu’elle voudrait y retourner. L’agent des visas écrivait ce qui suit dans ses notes du STIDI :

[traduction] Elle aura passé toutes ses années formatrices au Canada, loin de ses parents, de sa communauté, de sa culture et de sa langue. En fait, elle se sera expatriée, car elle ne se sera pas établie comme adulte en Colombie, puisqu’elle ne serait pas en mesure de s’y réadapter pour le cas où elle voudrait y retourner.

 

 

[24]           L’agent des visas a déclaré ce qui suit dans sa lettre de refus adressée à la demanderesse :

[traduction] Dans l’évaluation de votre demande, j’ai pris note du fait que vous souhaitiez rester au Canada, à la faveur d’un permis d’études, durant quatre de vos années les plus formatrices, et qu’une séparation de votre famille, de votre communauté, de votre langue et du système d’éducation colombien durant une période aussi longue aurait pour effet de rompre vos liens avec la Colombie et de rendre improbable votre éventuel retour et votre réintégration dans ce pays.

 

 

[25]           La Cour fédérale a jugé que les agents des visas ne peuvent pas fonder leurs décisions sur des stéréotypes ou des généralisations, sans donner au demandeur de visa la possibilité de réagir. Le juge Kelen déclare ce qui suit, dans la décision Yuan, précitée, au paragraphe 12 :

Bien que l’obligation d’équité n’exige pas nécessairement une audience, l’agent des visas est tenu de fournir au demandeur la possibilité de s’exprimer sur une préoccupation importante, soit, autrement dit, de répondre. L’opinion de l’agent des visas selon laquelle de nombreux demandeurs de visas provenant de cet endroit de la Chine revendiquent le statut de réfugié après avoir reçu leur visa ne constitue pas un motif équitable ou raisonnable pour écarter tous les demandeurs de cette région sans leur fournir la possibilité réelle de répondre à cette préoccupation.

 

 

[26]           Je suis d’avis que l’agent des visas s’est fondé sur une généralisation quand il a refusé la demande de visa. La généralisation en cause est l’idée selon laquelle toutes les demandes de permis d’études qui portent sur quatre années d’études secondaires devraient être refusées puisqu’il est improbable que les auteurs de telles demandes retourneraient automatiquement dans leur pays d’origine en raison de la longue séparation d’avec leurs familles et leurs cultures. Manifestement, toute personne qui sollicite un visa pour venir étudier durant quatre ans dans une école secondaire au Canada sera éloignée des caractéristiques de son pays qu’a évoquées l’agent des visas. Cependant, il n’est pas nécessairement vrai que, dans de telles conditions, toute jeune personne deviendra de ce fait incapable de se réadapter à son pays d’origine après une période d’études de quatre ans au Canada, et qu’elle ne quittera donc probablement pas le Canada.

 

[27]           Il ne s’agit pas ici d’un cas où la demande elle-même de visa était incomplète, mais d’un cas où l’agent est arrivé à la conclusion subjective que la demanderesse ne retournerait pas en Colombie après avoir terminé ses études. Selon moi, l’agent aurait dû ici donner à la demanderesse l’occasion de répondre à sa préoccupation. La demanderesse n’avait aucun moyen de savoir que l’agent des visas suivrait son idée selon laquelle ceux ou celles qui sont dans leurs « années formatrices » ne peuvent pas venir étudier au Canada durant une période de quatre ans parce qu’il est improbable qu’ils retourneront dans leur pays. Le fait que l’agent des visas n’a pas donné à la demanderesse l’occasion de répondre à ses préoccupations constitue, au vu des faits de l’affaire, un manquement aux règles de la justice naturelle. La demande de contrôle judiciaire est donc accueillie, et l’affaire est renvoyée à un autre agent des visas pour nouvelle décision.

 

[28]           Aucune des parties n’a souhaité me soumettre une question grave de portée générale susceptible d’être certifiée.

 

 

JUGEMENT

 

[29]           LA COUR ORDONNE QUE : La demande de contrôle judiciaire est accueillie, la décision de l’agent des visas est annulée et l’affaire est renvoyée à un autre agent des visas pour nouvelle décision.

 

« John A. O’Keefe »

Juge

 


 

ANNEXE

 

Les dispositions législatives applicables

 

Les dispositions applicables de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27, sont les suivantes :

22. (1) Devient résident temporaire l’étranger dont l’agent constate qu’il a demandé ce statut, s’est déchargé des obligations prévues à l’alinéa 20(1)b) et n’est pas interdit de territoire.

 

22. (1) A foreign national becomes a temporary resident if an officer is satisfied that the foreign national has applied for that status, has met the obligations set out in paragraph 20(1)(b) and is not inadmissible.

 

(2) L’intention qu’il a de s’établir au Canada n’empêche pas l’étranger de devenir résident temporaire sur preuve qu’il aura quitté le Canada à la fin de la période de séjour autorisée.

 

 

 

 

(2) An intention by a foreign national to become a permanent resident does not preclude them from becoming a temporary resident if the officer is satisfied that they will leave Canada by the end of the period authorized for their stay.

 

Les dispositions applicables du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227, sont les suivantes :

179. L’agent délivre un visa de résident temporaire à l’étranger si, à l’issue d’un contrôle, les éléments suivants sont établis :

 

179. An officer shall issue a temporary resident visa to a foreign national if, following an examination, it is established that the foreign national

 

a) l’étranger en a fait, conformément au présent règlement, la demande au titre de la catégorie des visiteurs, des travailleurs ou des étudiants;

 

(a) has applied in accordance with these Regulations for a temporary resident visa as a member of the visitor, worker or student class;

 

b) il quittera le Canada à la fin de la période de séjour autorisée qui lui est applicable au titre de la section 2;

 

(b) will leave Canada by the end of the period authorized for their stay under Division 2;

 

c) il est titulaire d’un passeport ou autre document qui lui permet d’entrer dans le pays qui l’a délivré ou dans un autre pays;

 

(c) holds a passport or other document that they may use to enter the country that issued it or another country;

 

d) il se conforme aux exigences applicables à cette catégorie;

 

(d) meets the requirements applicable to that class;

 

e) il n’est pas interdit de territoire;

 

(e) is not inadmissible; and

 

f) il satisfait aux exigences prévues à l’article 30.

 

(f) meets the requirements of section 30.

 

216. (1) Sous réserve des paragraphes (2) et (3), l’agent délivre un permis d’études à l’étranger si, à l’issue d’un contrôle, les éléments suivants sont établis :

 

216. (1) Subject to subsections (2) and (3), an officer shall issue a study permit to a foreign national if, following an examination, it is established that the foreign national

 

. . .

 

. . .

 

b) il quittera le Canada à la fin de la période de séjour qui lui est applicable au titre de la section 2 de la partie 9;

 

(b) will leave Canada by the end of the period authorized for their stay under Division 2 of Part 9;

 

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                                IMM-714-06

 

INTITULÉ :                                                               LUZ MARINA HERNANDEZ BONILLA

 

                                                                                    - et -

 

                                                                                    LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                         TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                                       LE 6 DÉCEMBRE 2006

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                                      LE JUGE O’KEEFE

 

DATE DES MOTIFS :                                              LE 10 JANVIER 2007

 

 

COMPARUTIONS :

 

TanyaTokar

Krassina Kostadinov

 

POUR LA DEMANDERESSE

Greg George

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Waldman et Associés

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

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