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Date : 20060814

Dossier : T-728-05

Référence : 2006 CF 980

Ottawa (Ontario), le 14 août 2006

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE O'KEEFE

 

ENTRE :

[1]FILM CITY ENTERTAINMENT LTD.,

[2] ABBA MOVIES COMPANY LIMITED,

[3] CENTURY CREATOR COMPANY LIMITED,

[4] CHINA STAR PICTURES LIMITED,

[5] EMPEROR MOTION PICTURE (HK) LIMITED,

[6] EMPEROR MULTIMEDIA GROUP (HK) LTD.,

[7] GREAT ENTERTAINMENT LTD.,

[8] I-ANIMATION LIMITED,

[9] L.S. ENTERTAINMENT GROUP INC.,

[10] MATRIX PRODUCTIONS COMPANY LIMITED,

[11] MEDIA ASIA FILMS (BVI) LTD.,

[12] MEDIA ASIA FILMS LTD.,

[13] MEGA STAR PRODUCTION LIMITED,

[14] MEI AH FILM PRODUCTION COMPANY LTD.,

[15] ONE HUNDRED YEARS OF FILMS COMPANY LIMITED,

[16] S&W ENTERTAINMENT LIMITED,

[17] TEAMWORK MOTION PICTURES LTD.,

et [18] UNIVERSE ENTERTAINMENT LTD.

 

demanderesses

 

et

 

JOHN DOE, JANE DOE ET TOUTES LES PERSONNES, SOCIÉTÉS DE PERSONNES ET PERSONNES MORALES QUI FONT AFFAIRE À PARTIR DES UNITÉS SUIVANTES DU PACIFIC MALL, 4300, AV. STEELES EST, MARKHAM (ONTARIO) :

UNITÉ A-58, UNITÉ B-5, UNITÉ B-59, UNITÉ C-12, UNITÉ D-17 et UNITÉ D-69

 

défenderesses

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

LE JUGE O’KEEFE

 

[1]        Il s’agit d’une requête introduite par la défenderesse, l’Unité B‑5, juridiquement connue sous le nom de 1642312 Ontario Ltd. (ci‑après l’Unité B-5), afin d’obtenir :

1.         Une ordonnance en vertu de l’alinéa 399(1)b) des Règles des Cours fédérales, DORS/98‑106 (les Règles), annulant mon ordonnance du 16 mai 2005, qui portait sur la requête entendue conformément à l’ordonnance rendue par le juge Yves de Montigny le 2 mai 2005, en ce qui a trait à l’Unité B-5.

2.         Une ordonnance ajournant la présentation de la requête en examen pour permettre à l’Unité B‑5 de préparer et de déposer des documents en réponse et de procéder à des contre‑interrogatoires, et prorogeant le délai prescrit dans l’ordonnance du juge de Montigny du 2 mai 2005.

3.         Une ordonnance accordant à l’Unité B‑5 les dépens de la requête, payables sans délai.

 

[2]        Le 2 mai 2005, le juge de Montigny a rendu une ordonnance Anton Piller dans la présente affaire et j’ai réexaminé cette ordonnance le 16 mai 2005 en l’absence de l’Unité B‑5. J’ai rendu une ordonnance le 16 mai 2005 confirmant la réparation accordée dans l’ordonnance Anton Piller jusqu’à ce qu’une décision finale ait été rendue sur les questions en litige en l’espèce ou jusqu’à la date fixée par la Cour. J’ai également accordé des dépens de 5 000 $ payables sans délai par l’Unité B‑5.

 

[3]        L’Unité B-5 a demandé que j’annule mon ordonnance en vertu de l’alinéa 399(1)b) des Règles, car elle croyait que l’avocat avait demandé l’ajournement de l’audience d’examen.

 

[4]        Pour que j’annule ou je modifie mon ordonnance, l’Unité B‑5 doit démontrer que c’est par erreur qu’elle n’a pas comparu et elle doit produire une preuve prima facie indiquant pourquoi l’ordonnance n’aurait pas dû être rendue.

 

[5]        L’ordonnance Anton Piller a été signifiée à l’Unité B‑5 le 6 mai 2005. Ce même jour, Mme Chen, présidente de l’Unité B-5, a essayé de joindre son avocat. Le 12 mai 2005, elle s’est adressée à un autre avocat, M. Long, qui était censé demander un ajournement de l’instance pour elle afin qu’elle ait plus de temps pour faire appel aux services d’un avocat spécialisé en propriété intellectuelle qui pourrait l’aider à s’occuper de la requête en examen. Elle a versé une avance de 3 000 $ à cet avocat, qui a envoyé une lettre à l’avocat responsable de la recherche Anton Piller afin de demander un ajournement de l’instance. Cet avocat n’a pas reçu la demande.

 

[6]        Croyant que l’ajournement avait été obtenu, Mme Chen a rencontré Serge Anissimoff, un avocat qui exerce le droit dans le domaine de la propriété intellectuelle. Elle a retenu ses services le 24 mai 2005. À ce moment‑là, elle ignorait que mon ordonnance du 16 mai 2005 avait été rendue. Elle l’a appris le 3 juin 2005, après que M. Anissimoff l’eut lui‑même appris du greffe de la Cour fédérale.

 

[7]        Mme Chen a versé 2 217,58 $ à M. Long pour les services rendus.

 

[8]        Je suis convaincu, compte tenu de ces faits, que ce n’est pas par mégarde que l’Unité B‑5 n’a pas comparu à l’audience. Il ne s’agit pas d’un cas où la défenderesse est restée à ne rien faire.

 

[9]        L’Unité B-5 doit également produire une preuve prima facie indiquant pourquoi l’ordonnance n’aurait pas dû être rendue.

 

[10]      La défenderesse a fait valoir l’absence d’une intention ou d’une connaissance préalable de la violation du droit d’auteur pour étayer l’ordonnance Anton Piller. Dans Aldrich et. al. cStruk et. al. (1984), 8 C.P.R. (3d) 369 (C.S. C.‑B.), la Cour a déclaré qu’il y avait une preuve prima facie solide étant donné que le demandeur avait le droit de revendiquer un droit d’auteur et que le défendeur était parfaitement au courant du droit d’auteur sur les œuvres. En l’espèce, il y a litige quant à la signification de la mise en demeure. Mme Chen déclare dans son affidavit que la lettre ne lui a pas été signifiée, pas plus qu’à l’Unité B‑5. L’affidavit de signification dont j’ai été saisi à l’audience d’examen a été signifié à Pacific Video, et non à Pacific Mall. Dans un affidavit ultérieur, l’huissier a déclaré que Pacific Video aurait dû se lire Pacific Mall, mais la Cour doit encore régler la question de l’affidavit de Mme Chen, qui précise que la lettre d’avertissement n’a pas été signifiée à l’Unité B‑5. Par ailleurs, l’huissier a déclaré avoir signifié la lettre à une employée du nom de Mme Leung. Dans son affidavit, Mme Chen a dit que l’Unité B‑5 n’avait aucune employée de ce nom.

 

[11]      Les demanderesses ont déclaré que la défenderesse était un importateur de marchandises et que, suivant le paragraphe 27(3) de la Loi sur le droit d’auteur, L.R.C. 1985, ch. C‑42, la connaissance préalable n’est pas pertinente. C’est en raison de la déclaration qu’a faite Mme Chen au paragraphe 5 de son affidavit que les demanderesses ont affirmé l’Unité B‑5 est un importateur :

[Traduction] DC, entre autres lieux, se procure les DVD d’un grossiste en Chine, plus particulièrement situé dans la ville de Guang Zhow, dans la province de Guang Dong, et en prend livraison ici au Canada. DC vend les DVD dans ses propres locaux.

 

 

[12]      Selon moi, cette déclaration n’établit pas que l’Unité B‑5 a importé les DVD. En fait, on y dit qu’elle prend livraison des marchandises ici au Canada. Il me semble que cela signifierait plutôt que quelqu’un d’autre a effectivement importé les marchandises. Je suis d’avis que la preuve ne corrobore pas l’application du paragraphe 27(3) de la Loi sur le droit d’auteur.

 

[13]      Comme de nouveaux éléments de preuve attestent que la lettre d’avertissement n’a pas été correctement signifiée à la défenderesse (ce qui veut dire que la défenderesse n’était pas au courant de la violation), cette dernière a produit une preuve prima facie indiquant pourquoi mon ordonnance n’aurait pas dû être rendue.

 

[14]      J’estime que mon ordonnance du 16 mai 2005 devrait être annulée et que l’instance devrait être reportée à une date permettant à la défenderesse de préparer et de déposer ses documents en réponse et de procéder à des contre‑interrogatoires. La mesure de réparation sollicitée par les demanderesses aux paragraphes 2 et 3 de leur avis de requête déposé le 11 mai 2005 doit être maintenue jusqu’à ce que la Cour se prononce sur la requête.

 

[15]      La requête de l’Unité B‑5 est accueillie. Je n’examinerai pas les autres arguments de la défenderesse.

 

[16]      Aucune ordonnance ne sera rendue au sujet des dépens.

 

JUGEMENT

 

[17]      LA COUR ORDONNE :

            1.         Mon ordonnance du 16 mai 2005 est annulée et l’instance est reportée à une date permettant à la défenderesse, l’Unité B‑5 , de préparer et de déposer ses documents en réponse et de procéder à des contre‑interrogatoires.

            2.         La mesure de réparation sollicitée par les demanderesses aux paragraphes 2 et 3 de leur avis de requête déposé le 11 mai 2005 sera maintenue jusqu’à ce que la Cour se prononce sur la requête.

            3.         Aucune ordonnance n’est rendue au sujet des dépens.

 

 

« John A. O’Keefe »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Suzanne Bolduc, LL.B.


ANNEXE

 

            Les dispositions pertinentes des Règles des Cours fédérales (DORS/98‑106) sont les suivantes :

8. (1) La Cour peut, sur requête, proroger ou abréger tout délai prévu par les présentes règles ou fixé par ordonnance.

 

(2) La requête visant la prorogation d'un délai peut être présentée avant ou après l'expiration du délai.

 

[...]

 

189. (1) Le défendeur qui fait valoir contre le demandeur un droit de réparation peut, au lieu d'intenter une action distincte, faire une demande reconventionnelle.

 

(2) La demande reconventionnelle et la défense sont réunies dans le même document.

 

(3) La défense et demande reconventionnelle comporte un second intitulé qui donne les noms du demandeur reconventionnel et des défendeurs reconventionnels.

 

399. (1) La Cour peut, sur requête, annuler ou modifier l'une des ordonnances suivantes, si la partie contre laquelle elle a été rendue présente une preuve prima facie démontrant pourquoi elle n'aurait pas dû être rendue:

 

a) toute ordonnance rendue sur requête ex parte;

 

b) toute ordonnance rendue en l'absence d'une partie qui n'a pas comparu par suite d'un événement fortuit ou d'une erreur ou à cause d'un avis insuffisant de l'instance.

 

 

 

 

 

[...]

 

(3) Sauf ordonnance contraire de la Cour, l'annulation ou la modification d'une ordonnance en vertu des paragraphes (1) ou (2) ne porte pas atteinte à la validité ou à la nature des actes ou omissions antérieurs à cette annulation ou modification.

8. (1) On motion, the Court may extend or abridge a period provided by these Rules or fixed by an order.

 

(2) A motion for an extension of time may be brought before or after the end of the period sought to be extended.

 

 

...

 

189. (1) A defendant who claims to be entitled to relief against a plaintiff may make a counterclaim instead of bringing a separate action.

 

 

(2) A counterclaim shall be included in the same document as the statement of defence.

 

(3) A statement of defence and counterclaim shall contain a second style of cause identifying the plaintiff by counterclaim and the defendants to the counterclaim.

 

399. (1) On motion, the Court may set aside or vary an order that was made

 

 

 

 

 

 

(a) ex parte; or

 

 

(b) in the absence of a party who failed to appear by accident or mistake or by reason of insufficient notice of the proceeding,

 

if the party against whom the order is made discloses a prima facie case why the order should not have been made.

 

 

...

 

(3) Unless the Court orders otherwise, the setting aside or variance of an order under subsection (1) or (2) does not affect the validity or character of anything done or not done before the order was set aside or varied.

 

            Les demanderesess invoquent l’article 27 de la Loi sur le droit d’auteur, L.R.C. 1985, ch. C‑42, pour affirmer qu’il y a eu violation du droit d’auteur :

27. (1) Constitue une violation du droit d'auteur l'accomplissement, sans le consentement du titulaire de ce droit, d'un acte qu'en vertu de la présente loi seul ce titulaire a la faculté d'accomplir.

 

(2) Constitue une violation du droit d'auteur l'accomplissement de tout acte ci-après en ce qui a trait à l'exemplaire d'une oeuvre, d'une fixation d'une prestation, d'un enregistrement sonore ou d'une fixation d'un signal de communication alors que la personne qui accomplit l'acte sait ou devrait savoir que la production de l'exemplaire constitue une violation de ce droit, ou en constituerait une si l'exemplaire avait été produit au Canada par la personne qui l'a produit:

 

a) la vente ou la location;

 

b) la mise en circulation de façon à porter préjudice au titulaire du droit d'auteur;

 

c) la mise en circulation, la mise ou l'offre en vente ou en location, ou l'exposition en public, dans un but commercial;

 

d) la possession en vue de l'un ou l'autre des actes visés aux alinéas a) à c);

 

e) l'importation au Canada en vue de l'un ou l'autre des actes visés aux alinéas a) à c).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

(3) Lorsqu'il s'agit de décider si les actes visés aux alinéas (2)a) à d), dans les cas où ils se rapportent à un exemplaire importé dans les conditions visées à l'alinéa (2)e), constituent des violations du droit d'auteur, le fait que l'importateur savait ou aurait dû savoir que l'importation de l'exemplaire constituait une violation n'est pas pertinent.

 

[...]

27. (1) It is an infringement of copyright for any person to do, without the consent of the owner of the copyright, anything that by this Act only the owner of the copyright has the right to do.

 

(2) It is an infringement of copyright for any person to

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

(a) sell or rent out,

 

(b) distribute to such an extent as to affect prejudicially the owner of the copyright,

 

(c) by way of trade distribute, expose or offer for sale or rental, or exhibit in public,

 

 

(d) possess for the purpose of doing anything referred to in paragraphs (a) to (c), or

 

(e) import into Canada for the purpose of doing anything referred to in paragraphs (a) to (c),

 

a copy of a work, sound recording or fixation of a performer's performance or of a communication signal that the person knows or should have known infringes copyright or would infringe copyright if it had been made in Canada by the person who made it.

 

(3) In determining whether there is an infringement under subsection (2) in the case of an activity referred to in any of paragraphs (2)(a) to (d) in relation to a copy that was imported in the circumstances referred to in paragraph (2)(e), it is irrelevant whether the importer knew or should have known that the importation of the copy infringed copyright.

 

...

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                    T-728-05

 

INTITULÉ :                                                   FILM CITY ENTERTAINMENT INC. et al.

c.

JOHN DOE AND JANE DOE et al.

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                           LE 15 FÉVRIER 2006

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                         LE JUGE O’KEEFE

 

DATE DES MOTIFS :                                 LE 14 AOÛT 2006

 

 

COMPARUTIONS :

 

David Ullman                                                   POUR LES DEMANDERESSES

 

Harjinder Mann                                               POUR LES DÉFENDERESSES

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Minden Gross Grafstein &Greenstein              

Avocats

Toronto (Ontario)                                            POUR LES DEMANDERESSES

 

Anissimoff & Associates                                 

Avocats

London (Ontario)                                            POUR LES DÉFENDERESSES

 

 

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