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Date : 20000811

Dossier : IMM-1204-99

ENTRE :

JOSEPH ROZARIO et

ROWENA DELICIA ROZARIO

demandeurs

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE O'KEEFE

[1]                Cette demande présentée par Joseph Rozario et Rowena Delicia Rozario (les demandeurs) vise le contrôle judiciaire de la décision d'une agente des visas, Amitys Salas (l'agente des visas), datée du 1er février 1999. L'agente des visas a rejeté leur demande de visas d'immigration dans la catégorie des indépendants.


[2]                Le 21 avril 1997, les demandeurs ont présenté une demande chacun en vue d'obtenir des visas d'immigration et ils ont versé les droits requis. Ces demandes ont été déposées au Haut-commisariat du Canada à Columbo, au Sri Lanka. La demande de l'époux indique qu'il est le demandeur principal, son épouse et ses deux enfants étant donnés comme personnes à charge devant l'accompagner. La demande de l'épouse indique qu'elle est le demandeur principal, son mari et leurs deux enfants étant donnés comme personnes à charge devant l'accompagner.

[3]                M. Rozario a demandé à être apprécié dans les professions de chef de service de promotion des ventes (CCDP 1179-154, CNP 4163) et d'agent de voyage (CCDP 4195-110, CNP 6431). Mme Rozario a fait sa demande à titre de personne à charge accompagnant son mari et déclaré qu'elle avait l'intention de travailler comme secrétaire. Dans sa propre demande, Mme Rozario a déclaré que la profession qu'elle avait l'intention d'exercer au Canada était celle de secrétaire (4111-110).

[4]                La demande principale a été appréciée comme suit :

Âge                                                      10

Demande professionnelle                       01

Études et formation                               15

Expérience                                            06

Emploi réservé                           00

Facteur démographique                         08

Études                                                   10

Anglais                                      09

Français                                               00

Personnalité                                           03

Total                                         62


[5]                Dans sa décision datée du 1er février 1999, l'agente des visas a informé les demandeurs du rejet de leur demande. Ce rejet était fondé sur le fait que le demandeur principal n'avait par reçu le minimum de 70 points d'appréciation.

[6]                Rien dans la décision de l'agente des visas n'indique qu'elle aurait apprécié Mme Rozario par rapport à la profession qu'elle souhaitait exercer et on ne trouve aucune mention d'une appréciation dans ses notes STIDI.

[7]                L'agente des visas a donné deux versions de son appréciation de Mme Rozario. Dans sa déclaration solennelle, souscrite à Paris, France, le 11 mai 1999, elle déclare ceci au paragraphe 8 :

[traduction]

8. Subsidiairement, j'ai aussi apprécié Mme Rowena Rozario, même si le demandeur principal dans ce dossier est son mari. Depuis 1989, Mme Rozario est une femme au foyer qui s'occupe de sa famille. Avant cette date, elle travaillait comme secrétaire. Elle ne pouvait rencontrer les critères de choix.

[8]                Lors de son contre-interrogatoire sur sa déclaration solennelle, qui a eu lieu le 10 août 1999, elle a témoigné notamment ce qui suit :

[traduction]

Q.             D'accord. Y a-t-il quelque chose dans vos notes au sujet d'une appréciation de Mme Rozario par rapport à la profession qu'elle désirait exercer?


R.             Si vous regardez attentivement mes notes dans cette affaire, vous verrez que j'ai apprécié Mme Rozario de façon informelle. Si elle est seulement . . . à ce moment là, elle était seulement une personne à charge et une compagne, et non le demandeur principal. Ils n'ont pas payé les droits requis pour qu'elle soit appréciée officiellement. Néanmoins, au Canada nous cherchons toujours à obtenir de bons candidats. J'essaie d'examiner son profil de façon informelle pour déterminer si elle pourrait faire une demande comme demandeur principal et oui, j'ai considéré ceci et j'ai conclu qu'elle ne réussirait pas non plus à ce titre. Pourriez-vous expliquer encore une fois en quoi ceci est pertinent en l'affaire?

. . .

R.             Oui, c'est vrai. La définition de la CCDP indique qu'elle devait pouvoir prendre la dictée en sténographie ou sur une sténotype, et ainsi de suite.

Q.             Avez-vous examiné son expérience pour voir si elle répondait à ces aspects de la définition?

R.             Comme elle n'était pas le demandeur principal, je ne l'ai pas interviewée longuement. Néanmoins, j'ai examiné de façon globale son dossier et son profil.

La question en litige

[9]         L'agente des visas a-t-elle commis une erreur susceptible de contrôle dans son traitement de la demande de Rowena Rozario d'être appréciée comme secrétaire?

Droit et analyse

[10]       Le droit applicable à l'appréciation d'une demande se trouve en partie au paragraphe 8(1) du Règlement sur l'immigration de 1978, DORS/78-172, tel que modifié :



8.1 Subject to section 11.1, for the purpose of determining whether an immigrant and the immigrant's dependants, other than a member of the family class, a Convention refugee seeking resettlement or an immigrant who intends to reside in the Province of Quebec, will be able to become successfully established in Canada, a visa officer shall assess that immigrant or, at the option of the immigrant, the spouse of that immigrant . . .

8.1 Sous réserve de l'article 11.1, afin de déterminer si un immigrant et les personnes à sa charge, à l'exception d'un parent, d'un réfugié au sens de la Convention cherchant à se réinstaller et d'un immigrant qui entend résider au Québec, pourront réussir leur installation au Canada, l'agent des visas apprécie l'immigrant ou, au choix de ce dernier, son conjoint . . .


[11]       La Cour a appliqué cette disposition de la Loi sur l'immigration à plusieurs occasions et conclu que c'est le demandeur qui décide qui doit être apprécié comme demandeur principal : Nanji c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), le 6 août 1993 (dossier IMM-1749-92); Mozumder c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), le 21 mars 1997 (dossier IMM-2766-95). Il n'y a aucune exigence portant qu'un agent des visas doit apprécier le demandeur ainsi que le conjoint. En fait, le paragraphe 8(1) du Règlement porte que l'agent des visas apprécie l'immigrant « ou, au choix de ce dernier, son conjoint » .

[12]       Dans leur présentation à la Cour, les demandeurs ont aussi soutenu que l'agente des visas n'a pas apprécié la demande individuelle de Rowena Rozario. Il n'est pas nécessaire de trancher cette question dans cette demande, qui peut être réglée au motif que l'appréciation de Rowena Rozario, en sa qualité de conjointe du demandeur, Joseph Rozario, n'était pas complète.


[13]       Notre Cour a déjà décidé que, si un agent des visas assume la responsabilité d'apprécier un immigrant, l'équité procédurale exige qu'il effectue une « appréciation complète et non pas une appréciation sommaire » : Zamyadi c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), le 27 mars 2000 (dossier IMM-1092-99).

[14]       Je suis d'accord avec cette approche. Un examen du paragraphe 8 de la déclaration solennelle de l'agente des visas, ainsi que de son contre-interrogatoire au sujet de sa déclaration solennelle, fait ressortir clairement que l'appréciation n'était pas complète, mais bien qu'elle était informelle et assez brève. Au vu des faits de la présente affaire, je conclus que l'agente des visas n'a pas accordé l'équité procédurale requise en appréciant la demanderesse Rowena Rozario et qu'elle n'a pas procédé à une évaluation complète. Ce faisant, l'agente des visas a commis une erreur susceptible de contrôle par la Cour. Sa décision n'était pas raisonnable. Le défendeur n'a pas contesté ce point de vue.

[15]       En conséquence, j'accueille la demande de contrôle judiciaire et renvoie les dossiers pour nouvel examen de l'expérience de la conjointe en tant que secrétaire.

[16]       Au vu de la décision dans cette demande, les parties n'ont pas soumis de question à certifier en vertu de l'article 83 de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2.


ORDONNANCE

[17]      La demande de contrôle judiciaire est accueillie et les dossiers sont renvoyés pour nouvel examen de l'expérience de la conjointe en tant que secrétaire.

            John A. O'Keefe                                                              

                                                                                                                J.C.F.C.                           

Toronto (Ontario)

Le 11 août 2000

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, LL.L., Trad. a.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                                                    Avocats inscrits au dossier

No DE GREFFE :                                           IMM-1204-99

INTITULÉ DE LA CAUSE :                         JOSEPH ROZARIO et

ROWENA DELICIA ROZARIO

                                                                                                                                      demandeurs

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                           défendeur

DATE DE L'AUDIENCE :                             LE MARDI 8 AOÛT 2000

LIEU DE L'AUDIENCE :                               TORONTO (ONTARIO)

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE DE :                              M. LE JUGE O'KEEFE

EN DATE DU :                                               VENDREDI 11 AOÛT 2000

ONT COMPARU                                           M. Max Chaudhary

pour les demandeurs

M. Kevin Lunney

pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER        Max Chaudhary Law Office

Avocat et procureur

405-255, chemin Duncan Mill

North York (Ontario)

M3B 3H9

pour les demandeurs

            Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

pour le défendeur

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