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Date : 20060426

 

Dossier : T‑1959‑04

 

Référence : 2006 CF 523

 

 

Ottawa (Ontario), le 26 avril 2006

 

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE BLANCHARD

 

 

ENTRE :

 

 

SHAHROKH AHMADZADEGAN

 

demandeur

 

et

 

 

le Ministre de la Sécurité publique

et de la Protection civile

 

défendeur

 

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

 

1.         Les faits

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire présentée en vertu de l’article 41 de la Loi sur la protection des renseignements personnels, L.R.C. 1981, ch. P‑21 (la Loi), visant une décision de refus de communiquer au demandeur les renseignements personnels le concernant émanant de la Gendarmerie royale du Canada (GRC). M. Ahmadzadegan demande que les renseignements qui, selon lui, sont faux, soient retirés des dossiers que détient la GRC.

 

[2]               Le demandeur, Shahrokh Ahmadzadegan, est arrivé au Canada en 1980 à l’âge de 22 ans. En 1989, il a été déclaré coupable d’infractions relatives au trafic de drogue et il a été condamné à une peine de 25 ans de prison. À l’heure actuelle, il est incarcéré dans l’établissement de Matsqui à Abbotsford (Colombie‑Britannique).

 

[3]               Le demandeur prétend que, comme la GRC a fait à Service correctionnel Canada (SCC) des allégations [TRADUCTION] « non fondées et non prouvées » dans une lettre en date du 8 septembre 1992, il s’est vu refuser un transfèrement d’un pénitencier à sécurité maximale vers un établissement à sécurité moyenne, ainsi que la libération conditionnelle totale. Plus précisément, le demandeur déclare que son transfèrement vers une prison à sécurité moyenne a été révoqué le 15 octobre 1992, après que SCC eut reçu la lettre de la GRC. En outre, le demandeur déclare que la Commission nationale des libérations conditionnelles s’est appuyée sur cette lettre afin de lui refuser la libération conditionnelle totale en août 1996 et en avril 1997. La section d’appel lui a donné raison deux fois et elle a infirmé la décision de la CNLC.

 

[4]               Le demandeur déclare que, à de nombreuses reprises, il a tenté, personnellement et par l’intermédiaire de ses avocats, d’obtenir des précisions quant aux assertions le concernant figurant dans la lettre du 8 septembre 1992, et quant aux efforts faits, le cas échéant, pour en vérifier la véracité. En mai et en juin 2003, le demandeur a écrit une lettre à la GRC et deux à SCC dans lesquelles il demandait qu’on l’informe des éléments que l’on avait invoqué pour faire ces assertions et que la GRC et SCC retirent les allégations fausses de leurs dossiers. Le demandeur a aussi envoyé des courriers à la Commission canadienne des droits de la personne (la CCDP), le commissaire des plaintes du public contre la GRC, la Commission des plaintes du public contre le Service de police de la communauté urbaine de Montréal, le Service canadien du renseignement de sécurité, et la commissaire à la protection de la vie privée du Canada. Il semble que seule la CCDP ait répondu au demandeur.

 

[5]               Le 16 juin 2003, M. Ahmadzadegan a présenté à la GRC, conformément au paragraphe 12(1) de la Loi, une demande afin d’obtenir des [TRADUCTION] « renseignements concernant l’allégation de septembre 1992 et, le cas échéant, les autres renseignements pertinents ». Dans la lettre accompagnant la formule de demande d’accès à l’information, M. Ahmadzadegan a, sans équivoque, demandé des précisions quant à son prétendu concours aux activités de la police secrète en Iran. Il a aussi déclaré que, selon la Loi, il a le droit de faire corriger les renseignements ou de contraindre l’auteur de la lettre à lui fournir les preuves des allégations le visant.

 

[6]               Le 27 juin 2003, la GRC a informé M. Ahmadzadegan qu’elle ne lui communiquerait aucun des renseignements visés par sa demande, invoquant le pouvoir discrétionnaire que lui conférait l’alinéa 22(1)a) de la Loi. Selon cette disposition, le responsable d’une institution fédérale peut refuser la communication des renseignements personnels qui ont été obtenus ou préparés par un organisme d’enquête, au cours d’enquêtes licites ayant trait à la détection, la prévention et la répression du crime ou aux activités destinées à faire respecter les lois fédérales ou provinciales.

 

[7]               Le demandeur a alors déposé plainte auprès du bureau du commissaire à la protection de la vie privée du Canada en septembre 2003. Après enquête, la commissaire a avisé le demandeur dans la lettre du 25 mars 2004, que sa plainte n’était pas fondée : elle a convenu que la GRC avait le pouvoir légal de refuser de communiquer les renseignements en cause en vertu de l’alinéa 22(1)a) de la Loi.

 

[8]               Le demandeur a déposé un avis de demande de contrôle judiciaire le 3 novembre 2004.

 

 

2.         L’affaire dont est saisie la Cour

 

[9]               À l’ouverture de l’audience, M. Ahmadzadegan a demandé l’ajournement de l’instance afin qu’il puisse interjeter appel contre la décision du juge Michel Shore en date du 2 mars 2006, qui a rejeté la requête par laquelle il avait demandé, en vertu de l’article 45 des Règles des Cours fédérales, que la Cour rende une ordonnance exigeant qu’il soit amené devant la Cour pour l’audience. Celle‑ci s’est déroulée de la manière suivante : le demandeur a comparu de l’établissement de Matsqui par téléconférence et l’avocat du défendeur s’est présenté personnellement à la salle d’audience. M. Ahmadzadegan a aussi demandé l’ajournement afin qu’il puisse trouver un avocat. Il s’est représenté lui‑même depuis le début de l’instance.

 

[10]           Après avoir examiné les questions soulevées et les observations des parties, j’ai refusé d’accorder l’ajournement au demandeur. En ce qui concerne le premier motif invoqué à l’appui de sa demande, j’observe que, lors de l’audience, il n’avait pas déposé d’avis d’appel concernant la décision du juge Shore. En ce qui concerne sa recherche d’un avocat, j’observe que le demandeur a eu plus d’un an depuis qu’il a déposé son avis de demande en novembre 2004 pour en trouver un, mais qu’il n’en a pas cherché. Pour ces motifs, je conclus que faire droit à la demande d’ajournement à M. Ahmadzadegan ne servirait pas l’intérêt supérieur de la justice.

 

[11]           À l’ouverture de l’audience, j’ai aussi précisé avec les parties la nature des questions en litige dans la présente demande. Dans son avis de demande, M. Ahmadzadegan déclare qu’il demande à la Cour d’ordonner à la GRC et à SCC de retirer de leurs dossiers respectifs tous les faux renseignements le concernant. Il demande aussi des dommages‑intérêts compensatoires et spéciaux pour perte de possibilités d’obtenir la libération conditionnelle et de la possibilité de se faire classifier comme personne présentant un risque pour la sécurité moindre, et pour troubles moraux et émotionnels. Enfin, le demandeur allègue qu’il y a eu atteinte à l’article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés, partie I de la Loi constitutionnelle de 1982 (R.‑U.), constituant l’annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R.‑U.), 1982, ch. 11.

 

[12]           Est visée par la présente demande de contrôle judiciaire la décision prise par la GRC de refuser au demandeur la communication de renseignements personnels en vertu de l’alinéa 22(1)a) de la Loi. J’ai donc informé le demandeur que je ne peux statuer que sur celle‑ci. En d’autres termes, je ne peux pas examiner la mesure réparatrice que M. Ahmadzadegan sollicite à l’encontre de SCC. J’observe qu’il n’a jamais demandé à SCC la communication des renseignements personnels le concernant qu’il détenait. En ce qui concerne sa demande de dommages‑intérêts, la jurisprudence enseigne que l’on ne peut pas demander des dommages‑intérêts dans le cadre d’une demande de contrôle judiciaire : voir l’arrêt Al‑Mhamad c. Canada (Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes), 2003 CAF 45. Enfin, en ce qui concerne la prétendue violation de l’article 7 de la Charte découlant du refus de la GRC de corriger dans ses dossiers les renseignements qui seraient faux, je conclus que cette thèse doit être rejetée. Le demandeur n’a produit aucun élément de preuve tendant à établir une telle violation.

 

[13]           Ayant entendu les observations des parties, je reformule les questions sur lesquelles je suis appelé à statuer dans le cadre de la présente demande de la manière suivante :

 

1)                  La GRC a‑t‑elle correctement exercé le pouvoir discrétionnaire que lui confère l’alinéa 22(1)a) de la Loi lorsqu’elle a refusé de communiquer au demandeur les renseignements personnels qui le concernent?

 

2)                  À supposer que ces renseignements auraient dû être communiqués au demandeur par la GRC, la Cour peut‑elle ordonner qu’ils soient corrigés en vertu du paragraphe 12(2) de la Loi?

 

[14]           Selon le régime prévu par la Loi, le demandeur n’a droit à la mesure réparatrice prévue par le paragraphe 12(2) que s’il a été donné une suite favorable à sa contestation de la décision de refus de la GRC. Le paragraphe 12(2) ne peut être invoqué que relativement aux renseignements qui ont été communiqués en vertu de l’alinéa 12(1)a) de la Loi.

 

[15]           Le paragraphe 12(1) de la Loi reconnaît aux personnes le droit de se faire communiquer les renseignements personnels les concernant :

 

12. (1) Sous réserve des autres dispositions de la présente loi, tout citoyen canadien et tout résident permanent au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés ont le droit de se faire communiquer sur demande :

12. (1) Subject to this Act, every individual who is a Canadian citizen or a permanent resident within the meaning of subsection 2(1) of the Immigration and Refugee Protection Act has a right to and shall, on request, be given access to

a) les renseignements personnels le concernant et versés dans un fichier de renseignements personnels;

(a) any personal information about the individual contained in a personal information bank; and

b) les autres renseignements personnels le concernant et relevant d’une institution fédérale, dans la mesure où il peut fournir sur leur localisation des indications suffisamment précises pour que l’institution fédérale puisse les retrouver sans problèmes sérieux.

(b) any other personal information about the individual under the control of a government institution with respect to which the individual is able to provide sufficiently specific information on the location of the information as to render it reasonably retrievable by the government institution.

 

[16]           Le paragraphe 12(3) permet au gouvernement de prendre des règlements afin d’élargir la classe des personnes qui ont le droit de se faire communiquer des renseignements personnels en vertu de l’article 12 aux personnes autres que les citoyens canadiens et les résidents permanents. Le Décret d’Extension no 1, DORS/83‑553 a aussi donné ce droit aux détenus au sens de la partie I de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition qui ne sont ni citoyens canadiens ni résidents permanents au sens de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27.

 

[17]           Selon le paragraphe 12(2) de la Loi, la personne qui reçoit communication, en vertu du paragraphe 12(1), de renseignements personnels peut en demander la correction ou, s’il y a lieu, qu’il soit fait mention des corrections qui ont été demandées.

 

12. (2) Tout individu qui reçoit communication, en vertu de l’alinéa (1)a), de renseignements personnels qui ont été, sont ou peuvent être utilisés à des fins administratives, a le droit :

12. (2) Every individual who is given access under paragraph (1)(a) to personal information that has been used, is being used or is available for use for an administrative purpose is entitled to

a) de demander la correction des renseignements personnels le concernant qui, selon lui, sont erronés ou incomplets;

(a) request correction of the personal information where the individual believes there is an error or omission therein;

b) d’exiger, s’il y a lieu, qu’il soit fait mention des corrections qui ont été demandées mais non effectuées;

(b) require that a notation be attached to the information reflecting any correction requested but not made; and

c) d’exiger :

(c) require that any person or body to whom that information has been disclosed for use for an administrative purpose within two years prior to the time a correction is requested or a notation is required under this subsection in respect of that information

(i) que toute personne ou tout organisme à qui ces renseignements ont été communiqués pour servir à des fins administratives dans les deux ans précédant la demande de correction ou de mention des corrections non effectuées soient avisés de la correction ou de la mention,

(i) be notified of the correction or notation, and

(ii) que l’organisme, s’il s’agit d’une institution fédérale, effectue la correction ou porte la mention sur toute copie de document contenant les renseignements qui relèvent de lui.

(ii) where the disclosure is to a government institution, the institution make the correction or notation on any copy of the information under its control.

 

[18]           En l’espèce, si le demandeur obtient gain de cause dans sa contestation du refus de la GRC de lui communiquer les renseignements personnels le concernant, il peut alors demander la correction ou la suppression de ceux qui sont, selon lui, faux, et telle est la mesure réparatrice qu’il demande dans le cadre de le présente demande.

 

3.         La norme de contrôle

 

[19]           La disposition précise qu’invoque la GRC en l’espèce – l’alinéa 22(1)a) – confère un pouvoir discrétionnaire aux institutions fédérales :

 

22. (1) Le responsable d’une institution fédérale peut refuser la communication des renseignements personnels demandés en vertu du paragraphe 12(1) :

22. (1) The head of a government institution may refuse to disclose any personal information requested under subsection 12(1)

a) soit qui remontent à moins de vingt ans lors de la demande et qui ont été obtenus ou préparés par une institution fédérale, ou par une subdivision d’une institution, qui constitue un organisme d’enquête déterminé par règlement, au cours d’enquêtes licites ayant trait :

(a) that was obtained or prepared by any government institution, or part of any government institution, that is an investigative body specified in the regulations in the course of lawful investigations pertaining to

(i) à la détection, la prévention et la répression du crime,

(i) the detection, prevention or suppression of crime,

(ii) aux activités destinées à faire respecter les lois fédérales ou provinciales,

(ii) the enforcement of any law of Canada or a province, or

(iii) aux activités soupçonnées de constituer des menaces envers la sécurité du Canada au sens de la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité;

(iii) activities suspected of constituting threats to the security of Canada within the meaning of the Canadian Security Intelligence Service Act,

if the information came into existence less than twenty years prior to the request;

 

 

[20]           Dans la décision Kelly c. Canada (Solliciteur général) (1992), 53 F.T.R. 147 (1re inst.), conf. par (1993) 154 N.R. 319 (C.A.F.), le juge Barry Strayer s’est exprimé en ces termes à la page 148 :

 

Il existe fort peu de jurisprudence sur la nature du pouvoir de révision que confère à la Cour l’article 48 de la Loi sur la protection des renseignements personnels et, en l’espèce, les plaidoiries n’ont pas traité sérieusement de la question. Je n’irai donc pas plus loin qu’il le faut pour définir ce rôle. Il est vrai que, selon l’article 47, il incombe au responsable d’un établissement fédéral de faire la preuve qu’il est fondé à refuser de communiquer les renseignements personnels en question. La nature de ce fardeau est suffisamment claire lorsque le responsable de l’établissement invoque simplement une exemption obligatoire : dans un tel cas, la Cour peut examiner la Loi et les renseignements visés par l’exemption et déterminer si, en droit, lesdits renseignements correspondent à la description des renseignements qui, d’après la Loi, doivent être exemptés (voir Nick Ternette c. Solliciteur général du Canada, [1984] 2 C.F. 486, p. 501 (C.F. 1re inst.); voir aussi Commissaire à l’information du Canada c. Président du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, [1986] 3 C.F. 413 (C.F. 1re inst.) en ce qui concerne les refus non discrétionnaires de divulguer des renseignements aux termes de la Loi sur l’accès à l’information , L.R.C. (1985), ch. A‑1.] [...] (non souligné dans l’original.)

 

Le juge Strayer a ensuite analysé l’approche en deux temps que le responsable d’une institution fédérale doit suivre lorsqu’il invoque le pouvoir discrétionnaire que lui confère la Loi, et le rôle de la Cour saisie de la demande de contrôle.

Comme on peut le voir, ces exemptions exigent que le responsable d’un établissement prenne deux décisions : 1) une décision de fait sur la question de savoir si les renseignements en question correspondent à la description de renseignements susceptibles de ne pas être divulguées; et 2) une décision discrétionnaire sur la question de savoir s’il convient néanmoins de divulguer lesdits renseignements.

 

Le premier type de décision est, je crois, révisable par la Cour et celle‑ci peut y substituer sa propre conclusion, sous réserve, à mon avis, de la nécessité de faire preuve d’une certaine déférence envers les décisions des personnes qui, de par les responsabilités institutionnelles qu’elles assument, sont mieux placées pour juger la question. [...]

 

Le second type de décision est purement discrétionnaire. À mon sens, en révisant une telle décision la Cour ne devrait pas tenter elle‑même d’exercer de nouveau le pouvoir discrétionnaire, mais plutôt examiner le document en question et les circonstances qui l’entourent et se demander simplement si le pouvoir discrétionnaire semble avoir été exercé en bonne foi et pour un motif qui se rapporte de façon logique à la raison pour laquelle il a été accordé….

 

En ce qui concerne le premier type de décision, le juge Strayer est d’avis qu’il s’agit d’une question de droit.

 

[21]           Depuis qu’a été rendue la décision Kelly, la jurisprudence portant sur la norme de contrôle a évolué. Pour décider quelle est la norme de contrôle applicable à la décision de la GRC de refus de communiquer au demandeur les renseignements personnels le concernant, la Cour doit maintenant procéder à une analyse pragmatique et fonctionnelle, selon les directives énoncées pour la première fois dans l’arrêt Pushpanathan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1998] 1 R.C.S. 982. Selon cette approche, il faut examiner les quatre facteurs suivants :

 

1)                  l’existence et l’absence d’une clause privative clause ou d’un droit d’appel prévu par la loi;

 

2)                  l’expertise du tribunal sur la question en litige par rapport à celle de la cour saisie de la demande de contrôle;

 

3)                  l’objet de la loi et de la disposition particulière en cause;

 

4)                  la nature de la question : s’agit‑il d’une question de droit, d’une question de fait ou d’une question mixte de fait et de droit?

 

 

 

[22]           Dans la décision Thurlow c. Canada (Solliciteur général), 2003 C.F. 1414, le juge John O’Keefe a effectué une analyse de ce genre afin de déterminer la norme d’examen applicable lorsque la GRC décide de ne pas communiquer des renseignements en vertu du pouvoir discrétionnaire que lui confère la Loi, notamment le sous‑alinéa 22(1)a)(i). En ce qui concerne la première question évoquée par le juge Strayer dans la décision Kelly, précitée (les renseignements demandés relèvent‑ils d’une catégorie visée par le pouvoir discrétionnaire prévu par la Loi?), le juge O’Keefe, après avoir soupesé tous les facteurs énoncés dans l’arrêt Pushpanathan, a statué que la norme de contrôle correcte est la décision correcte. En ce qui concerne la question suivante (la GRC doit‑elle exercer son pouvoir discrétionnaire dans le sens de la communication des renseignements demandés, même s’ils relèvent d’une catégorie visée par ce pouvoir?) – le juge O’Keefe a statué que la norme de contrôle applicable est la décision raisonnable simpliciter.

 

[23]           En l’espèce, comme dans l’affaire Thurlow, il s’agit d’une décision de rejet d’une demande de communication de renseignements personnels par la GRC fondée sur l’alinéa 22(1)a). Je suis d’accord avec la conclusion qu’a formulé le juge O’Keefe dans cette décision en ce qui concerne la norme de contrôle applicable. En l’espèce, je suivrai donc son analyse et ses conclusions.

 

4.         Analyse

 

A.                 La GRC a‑t‑elle correctement exercé le pouvoir discrétionnaire que lui confère l’alinéa 22(1)a) de la Loi lorsqu’elle a refusé de communiquer au demandeur les renseignements personnels qui le concernent?

 

[24]           Le défendeur avait déposé une requête par laquelle il demandait que l’affidavit de Renaud Lebel contenant notamment les renseignements refusés au demandeur soient traités de manière confidentielle et qu’il ne soit pas obligé de lui signifier ce document. Le protonotaire Hargrave a accueilli cette requête et il a rendu une ordonnance en ce sens le 17 janvier 2005.

 

[25]           Se fondant sur cette ordonnance de confidentialité et sur l’article 46 de la Loi, le défendeur a présenté une requête par laquelle il demandait à la cour d’examiner le point de savoir si la GRC avait à bon droit exercé son pouvoir discrétionnaire à huis clos et en l’absence du demandeur. Cette disposition se lit comme suit :

 

 

46. (1) À l’occasion des procédures relatives aux recours prévus aux articles 41, 42 ou 43, la Cour prend toutes les précautions possibles, notamment, si c’est indiqué, par la tenue d’audiences à huis clos et l’audition d’arguments en l’absence d’une partie, pour éviter que ne soient divulgués de par son propre fait ou celui de quiconque :

46. (1) In any proceedings before the Court arising from an application under section 41, 42 or 43, the Court shall take every reasonable precaution, including, when appropriate, receiving representations ex parte and conducting hearings in camera, to avoid the disclosure by the Court or any person of

a) des renseignements qui justifient un refus de communication de renseignements personnels demandés en vertu du paragraphe 12(1) ou de renseignements contenus dans un document demandé sous le régime de la Loi sur l’accès à l’information;

(a) any information or other material that the head of a government institution would be authorized to refuse to disclose if it were requested under subsection 12(1) or contained in a record requested under the Access to Information Act; or

b) des renseignements faisant état de l’existence de renseignements personnels que le responsable d’une institution fédérale a refusé de communiquer sans indiquer s’ils existaient ou non.

(b) any information as to whether personal information exists where the head of a government institution, in refusing to disclose the personal information under this Act, does not indicate whether it exists.

 

 

Dans sa requête, le défendeur a soutenu que si la demande devait être entendue intégralement en public, celle‑ci deviendrait caduque parce que le demandeur aurait alors accès aux renseignements dont la communication a été refusée.

 

[26]           Après avoir examiné les observations des parties, j’ai accueilli la requête du défendeur. J’ai donc entendu les observations du défendeur concernant les renseignements confidentiels en cause à huis clos et en l’absence du demandeur.

 

[27]           Parmi les pièces dont la communication a été refusée par la GRC en vertu de l’alinéa 22(1)a), il y avait la lettre du 8 septembre 1992 envoyée à John Rose de SCC (la lettre). Cette lettre est déjà en la possession du demandeur, même s’il ne l’a pas reçue par la voie d’une demande de communication.

 

[28]           S’inspirant des motifs formulés par le juge Strayer dans la décision Kelly, précitée, la Cour doit décider si les renseignements dont la communication a été refusée au demandeur sont visés par l’alinéa 22(1)a) de la Loi, et si tel est le cas, si la GRC a exercé de manière raisonnable son pouvoir discrétionnaire.

 

[29]           En ce qui concerne la question de savoir qui a la charge de prouver que le refus de communication des renseignements demandés était justifié, c’est à la GRC qu’elle incombe, comme l’indique l’article 47 de la Loi.

 

47. Dans les procédures découlant des recours prévus aux articles 41, 42 ou 43, la charge d’établir le bien‑fondé du refus de communication de renseignements personnels ou le bien‑fondé du versement de certains dossiers dans un fichier inconsultable classé comme tel en vertu de l’article 18 incombe à l’institution fédérale concernée.

 

47. In any proceedings before the Court arising from an application under section 41, 42 or 43, the burden of establishing that the head of a government institution is authorized to refuse to disclose personal information under subsection 12(1) or that a file should be included in a personal information bank designed as an exempt bank designated as an exempt bank under section 18 shall be on the government institution concerned.

 

 

[30]           La première question qui se pose est la suivante : les pièces dont la GRC a refusé la communication sont‑elles visées par l’alinéa 22(1)a) de la Loi? Comme je l’ai déjà signalé, aux termes de cette disposition, le responsable d’une institution fédérale a le pouvoir discrétionnaire de refuser la communication de renseignements personnels :

 

1.                  s’ils remontent à moins de vingt ans;

 

2.                  s’ils ont été obtenus ou préparés par un organisme d’enquête mentionné par le Règlement sur la protection des renseignements personnels (DORS/83‑508);

 

3.                  s’ils ont été obtenus ou préparés au cours d’enquêtes licites ayant trait notamment à la détection, la prévention et la répression du crime, ou aux activités destinées à faire respecter les lois fédérales ou provinciales.

 

[31]           Le défendeur soutient que ces trois conditions étaient remplies lorsque la GRC a refusé de communiquer les renseignements demandés. À l’appui de cet argument, le défendeur a versé au dossier de la Cour l’affidavit confidentiel du sergent Renaud Lebel, du service chargé de l’accès à l’information et de la protection des renseignements personnels de la GRC. En qualité de superviseur de la communication des renseignements, il est intervenu dans le traitement de la demande de communication de M. Ahmadzadegan.

 

[32]           Après avoir examiné les pièces et les témoignages, je conviens, comme l’a dit le défendeur, que les renseignements en cause remplissent les conditions énoncées à l’alinéa 22(1)a) : ils remontent à moins de 20 ans et ils ont été obtenus ou préparés par la GRC, qui est visé, à titre d’organisme d’enquête, par l’annexe III du Règlement sur la protection des renseignements personnels. En outre, je conclus que les renseignements en question en sont qui ont été obtenus au cours d’enquêtes licites ayant trait à la détection, la prévention et la répression du crime, ou aux activités destinées à faire respecter les lois fédérales ou provinciales. Ayant appliqué la norme de contrôle, je conclus que la décision qu’a prise la GRC était correcte pour toutes les pièces dont elle a refusé la communication au demandeur.

 

[33]           Je vais maintenant examiner la question de savoir si la GRC a exercé son pouvoir discrétionnaire de manière raisonnable lorsqu’elle a refusé de communiquer au demandeur les pièces en cause.

 

[34]           En ce qui concerne ces pièces, à part la lettre, je conclus que la GRC a agi raisonnablement lorsqu’elle a refusé de communiquer les renseignements personnels ayant trait au demandeur qui y figuraient.

 

[35]           Cependant, en ce qui concerne la lettre, je suis d’avis que, dans les circonstances, la GRC n’a pas exercé raisonnablement son pouvoir discrétionnaire. Je m’appuie sur le fait que le demandeur a déjà une copie de celle‑ci et, si je me fie au dossier dont la Cour est saisie, je peux en déduire que la GRC savait que le demandeur avait cette copie avant d’opposer son refus. Je remarque que le défendeur ne conteste pas que le demandeur a une copie de cette lettre, et qu’il ne donne pas non plus d’explications quant à la manière dont elle a abouti entre ses mains. En outre, je remarque que, même si cela fait un moment que la GRC sait que le demandeur a une copie de ce document, elle ne semble pas avoir fait quoi que ce soit afin qu’il la lui rende.

 

[36]              Vu cette lettre, les circonstances de l’espèce et l’objet de la Loi, je suis d’avis que la GRC n’a pas agi raisonnablement lorsqu’elle a refusé de communiquer au demandeur les renseignements personnels le concernant contenus dans ce document. Tout refus de communiquer au demandeur les renseignements personnels qui le concernent doit servir l’objectif suivant : protéger les sources et le caractère des renseignements sensibles obtenus ou préparés au cours d’enquêtes visant des activités criminelles. Dans les circonstances, cet objectif ne pouvait plus être atteint parce que les renseignements en cause étaient déjà entre les mains du demandeur. En outre, en refusant, en vertu du paragraphe 22(1), au demandeur la communication de renseignements personnels le concernant figurant dans la lettre, la GRC lui refuse aussi la possibilité de faire corriger ceux qui sont, selon lui, erronés, en vertu du paragraphe 12(2) de la Loi.

 

[37]              Dans ces circonstances très particulières, où le demandeur est déjà en possession de la lettre, avaliser la décision de la GRC ne serait pas conforme à l’objet de la Loi, qui consiste non seulement à donner aux personnes le droit de se faire communiquer les renseignements personnels les concernant, mais aussi à protéger leur vie privée à cet égard. L’article 2 de la Loi se lit comme suit :

 

2. La présente loi a pour objet de compléter la législation canadienne en matière de protection des renseignements personnels relevant des institutions fédérales et de droit d’accès des individus aux renseignements personnels qui les concernent.

 

2. The purpose of the Act is to extend the present laws of Canada that protect the privacy of individuals with respect to personal information about themselves held by a government institution and that provide individuals with a right of access to that information.

 

 

 

[38]              Cet objet comporte implicitement le droit des personnes de s’assurer que les renseignements personnels les concernant contenus dans les dossiers détenus par le gouvernement sont corrects. En l’espèce, la mesure réparatrice que sollicite M. Ahmadzagan, à savoir que [TRADUCTION] « soient corrigés les renseignements personnels détenus par la GRC qui seraient faux », ne peut lui être accordée que s’il en obtient communication en vertu du paragraphe 12(1) de la Loi. Dans les circonstances, le refus de la GRC de les communiquer n’est pas raisonnable parce qu’il ne sert aucun objectif. Refuser au demandeur l’accès à cette lettre, c’est lui refuser le droit de se faire accorder une mesure réparatrice prévue par la Loi.

 

[39]           Cela dit, le demandeur n’a droit qu’aux seuls renseignements personnels le concernant qui sont contenus dans cette lettre. Je reconnais que celle‑ci contient des renseignements ayant trait à des personnes autres que le demandeur. Ceux‑ci ne doivent pas être communiqués au demandeur. L’article 26 de la Loi se lit comme suit :

 

26. Le responsable d’une institution fédérale peut refuser la communication des renseignements personnels demandés en vertu du paragraphe 12(1) qui portent sur un autre individu que celui qui fait la demande et il est tenu de refuser cette communication dans les cas où elle est interdite en vertu de l’article 8.

26. The head of a government institution may refuse to disclose any personal information requested under subsection 12(1) about an individual other than the individual who made the request, and shall refuse to disclose such information where the disclosure is prohibited under section 8.

 

 

[40]           Je suis d’avis qu’il convient de supprimer les éléments suivants de la lettre avant de la communiquer au demandeur :

 

a)les noms des personnes autres que le demandeur dans la ligne intitulée « objet »;

b)                  Les deux derniers paragraphes de la page 1;

 

c)                  Les trois premiers paragraphes de la page 2.

 

 

[41]              À part ces passages, je suis d’avis que la GRC a commis une erreur lorsqu’elle a refusé de communiquer la lettre au demandeur. La GRC a estimé à bon droit que les renseignements contenus dans la lettre étaient visés par l’alinéa 22(1)a); cependant, dans les circonstances, elle n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire de manière raisonnable lorsqu’elle a refusé de les communiquer.

 

[42]           L’article 48 confère à la Cour de larges pouvoirs discrétionnaires lorsqu’elle conclut que le responsable d’une institution fédérale a eu tort de refuser la communication des renseignements personnels en question :

 

48. La Cour, dans les cas où elle conclut au bon droit de l’individu qui a exercé un recours en révision d’une décision de refus de communication de renseignements personnels fondée sur des dispositions de la présente loi autres que celles mentionnées à l’article 49, ordonne, aux conditions qu’elle juge indiquées, au responsable de l’institution fédérale dont relèvent les renseignements d’en donner communication à l’individu; la Cour rend une autre ordonnance si elle l’estime indiqué.

48. Where the head of a government institution refuses to disclose personal information requested under subsection 12(1) on the basis of a provision of this Act not referred to in section 49, the Court shall, if it determines that the head of the institution is not authorized under this Act to refuse to disclose the personal information, order the head of the institution to disclose the personal information, subject to such conditions as the Court deems appropriate, to the individual who requested access thereto, or shall make such other order as the Court deems appropriate.

 

[43]              J’ordonnerai donc que le responsable de l’institution fédérale en cause, à savoir la GRC, communique au demandeur les renseignements personnels le concernant, sous réserve des suppressions indiquées au paragraphe 39 ci‑dessus.

 

B.                 La Cour peut‑elle ordonner que les renseignements personnels concernant le demandeur qui figurent dans les dossiers de la GRC soient corrigés?

 

[44]           Vu que j’ai conclu, en vertu du paragraphe 12(1) de la Loi, que la GRC a commis une erreur lorsqu’elle a refusé de communiquer au demandeur les renseignements personnels le concernant contenus dans la lettre, la question suivante se pose : la Cour peut‑elle lui accorder une mesure réparatrice en vertu du paragraphe 12(2)? M. Ahmadzadegan demande que soient corrigés les renseignements contenus dans les dossiers de la GRC, à savoir la lettre. Le demandeur allègue que les éléments suivants énoncés dans la lettre du 8 septembre 1992 envoyée par la GRC à SCC sont faux :

 

a)                  il a été employé par la « Savak », la police secrète iranienne, ou en a été membre, et il a torturé des gens;

 

b)                  il a été membre de la mafia iranienne en Iran;

 

c)         il a menacé et intimidé ses avocats lors de son premier procès.

 

[45]           Le dossier dont la Cour est saisie indique que, à plusieurs reprises, M. Ahmadzadegan a demandé à ce que l’on corrige les renseignements qui sont, selon lui, faux, ou qu’on les prouve. Dans la lettre annexée à la demande de communication de renseignements personnels le concernant qu’il a présentée en vertu de la Loi, il a spécifiquement demandé des précisions concernant sa prétendue appartenance à la police secrète iranienne et les actes de torture qu’il aurait perpétrés.

 

[46]           Dans son affidavit, le demandeur fait état d’éléments de preuve qui réfuteraient ces allégations. Comme la GRC a conclu qu’elle pouvait, en vertu de l’alinéa 22(1)a), refuser la communication des renseignements personnels qu’il avait demandée, il ne semble pas qu’elle se soit penchée sur le fond de ses allégations. Il ne revient pas à la Cour de le faire dans le cadre d’une demande de contrôle judiciaire. Cependant, M. Ahmadzadegan a maintenant la possibilité de demander, en vertu du paragraphe 12(2) de la Loi, que soient corrigés les renseignements personnels le concernant s’ils sont erronés, comme il le prétend.

 

5.         Conclusion

 

[47]           Pour ces motifs, je conclus que la GRC a commis une erreur lorsqu’elle a refusé, en vertu de l’alinéa 22(1)a) de la Loi de communiquer au demandeur les renseignements personnels le concernant contenus dans la lettre. En vertu du pouvoir conféré à la Cour par l’article 48 de la Loi, j’ordonnerai au responsable de la GRC de communiquer au demandeur ces renseignements, à l’exception des passages supprimés signalés au paragraphe 39 ci‑dessus. En ce qui concerne les autres pièces dont la communication a été refusée au demandeur, je conclus que la GRC n’a commis aucune erreur susceptible de contrôle.

 

[48]           Vu l’issue mitigée de la présente demande, et le fait qu’aucun nouveau principe n’a été soulevé, en vertu de mon pouvoir discrétionnaire, je n’accorderai pas les dépens.

 

[49]           À l’audience, le défendeur a présenté une requête en modification de l’intitulé de l’instance afin de remplacer le Commissaire de la Gendarmerie royale du Canada par le Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile. J’ai accueilli cette requête. L’intitulé désignera donc dorénavant le Ministre comme défendeur.


 

ORDONNANCE

 

 

            LA COUR ORDONNE :

 

1.         La demande est accueillie en partie;

 

2.         La lettre en date du 8 septembre 1992 doit être communiquée au demandeur, à l’exception de certains passages supprimés :

1.                  les noms des personnes autres que le demandeur dans la ligne intitulée « objet »;

2.                  les deux derniers paragraphes de la page 1;

3.                  les trois premiers paragraphes de la page 2;

 

3.                  L’intitulé est modifié et le défendeur est désormais le Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile.

 

4.            Il n’est pas adjugé de dépens.

 

« Edmond P. Blanchard »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

François Brunet, LL.B., B.C.L.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        T‑1959‑04

 

INTITULÉ :                                       SHAHROKH AHMADZADEGAN

                                                            c.

                                                            le Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Vancouver (Colombie‑Britannique)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               LE 7 MARS 2006

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

 ET ORDONNANCE :                      LE JUGE BLANCHARD

 

DATE DES MOTIFS :                      LE 26 AVRIL 2006

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Shahrokh Ahmadzadegan (par téléphone)                                 POUR LE DEMANDEUR

 

Helen Park/Peter Bell                                                               POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Shahrokh Ahmadzadegan                                                         POUR LE DEMANDEUR

L’établissement de Matsqui

Abbotsford (Colombie‑Britannique)

 

John H. Sims, c.r.                                                                     POUR LE DÉFENDEUR

Sous‑procureur général du Canada

 

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