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Date : 20060116

Dossier : T-1473-91

Référence: 2006 CF 21

Ottawa (Ontario), le 16 janvier 2006

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE SHORE

ENTRE :

REMO IMPORTS LTD

demanderesse/

défenderesse reconventionnelle

et

JAGUAR CARS LIMITED et FORD MOTOR COMPANY OF CANADA, LIMITED/FORD DU CANADA LIMITÉE

exploitant une entreprise sous la raison sociale JAGUAR CANADA

défenderesses/

demanderesses reconventionnelles

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

APERÇU

[1]                Après 14 ans de préparation de l'instruction par les parties et huit semaines d'instruction réparties sur une année, après le dépôt de plus de 6 000 pièces, de 200 classeurs, de douzaines de brochures et de dizaines d'échantillons d'accessoires comme des valises, des porte-documents, des sacs à dos, des chaînettes porte-clés, des pochettes de documents pour voiture, des chaînettes pour porte-clés et des automobiles jouets, l'analyse de la preuve a été rendue possible grâce à l'assistance de Mme Sylvie Baillargeon et de M. Alain Dernek, deux greffiers de la Cour fédérale. Ce sont ces deux personnes qui ont catalogué et organisé la documentation, avec l'aide de deux personnes très compétentes qui ont exercé les fonctions d'archivistes des conseillers juridiques respectifs des deux parties, Mme Bettina Murphy et M. Tyson Neil. Mme Mireille Legault, qui a mis en forme la version papier du présent jugement et assuré l'inclusion et la citation des notes de fin de document, mérite également une mention spéciale.

            En outre, en raison du dépôt par les parties d'observations finales représentant quatre et huit classeurs respectivement, soit douze autres classeurs (dont six concernant la doctrine et la jurisprudence), j'ai demandé aux parties de déposer, dans un délai d'une semaine, un résumé de leurs observations finales sous la forme d'un mémoire d'au plus 90 pages sur les points qu'elles jugeaient essentiels pour leur position. Les parties se sont exécutées de bon gré.

            Emerson a dit que l'essentiel se trouve dans la simplicité.

            Le fondement même de cette affaire en marques de commerce comporte une question : qui a droit à quoi, quand et pourquoi ?

            (1)         qui - quelle entreprise?

            (2)         quoi -- pour quelle marque de commerce ?

            (3)         quand -- pour quelle période et depuis quand ?

            (4)         pourquoi -- quels produits ?


TABLE DES MATIÈRES

APERÇU.. 1

TABLE DES MATIÈRES. 3

INTRODUCTION.. 5

DEMANDE ET DEMANDE RECONVENTIONNELLE.. 7

structure de la décision.. 8

CONTEXTE FACTUEL.. 9

Les témoins des faits. 9

Les témoins de Remo. 9

Les témoins de Jaguar Cars. 16

Les témoins experts. 20

Les experts de Jaguar 20

Les experts de Remo. 24

FIABILITÉ ET VALIDITÉ DES sondages. 25

Le sondage de 1998 sur la notoriété de Jaguar Cars. 26

Le sondage de 1998 sur les mallettes de Jaguar 31

Le sondage de 2004 sur les bagages/sacs à dos/portefeuilles/porte-clés de Jaguar 31

Le sondage de 2004 sur la publicité de produits Jaguar 33

Rapport de M. Mitch Bergesen (données du BAV; preuve relative au marketing; analyse de régression) 40

Le rapport de M. Moorthy. 47

Le sondage de Landor 56

ConclusionS de la COUR concernant LA PREUVE PAR sondage.. 57

FAITS DÉTAILLÉS. 58

Les ventes de Jaguar Cars depuis 1936. 58

Les voitures Jaguar sont considérées comme des véhicules de luxe. 58

Les voitures JAGUAR étaient célèbres en 1980 et en 1991, et elles le sont toujours. 60

Les faits convenus. 60

activités de promotion à l'échelle mondiale.. 61

Promotion AU Canada.. 61

La preuve de la réputation.. 64

Jaguar Cars a des activités LIÉES À des accessoires personnels, y compris des articles de bagage, depuis au moins les années 50. 66

Jaguar Cars a étendu sa gamme D'ACCESSOIRES au début des années 80. 67

Au début des années 80 et par la suite, l'extension de la marque de Jaguar Cars à une plus vaste gamme d'accessoires personnels, dont des articles de bagage, était une évolution naturelle, et l'association faite entre ces accessoires et la célèbre marque de voitures Jaguar avait une valeur commerciale auprès des consommateurs. 70

L'emploi d'articles de bagage par d'autres constructeurs d'automobiles. 70

Les faits reconnus par Remo. 71

L'enregistrement de certains accessoires personnels de Jaguar Cars. 72

DEPUIS 1973, Remo vend des accessoires personnels au Canada sous les marques de commerce remo, beau sac et sacsibo.. 72

Remo a adopté la marque de commerce JAGUAR en 1980, affirmant qu'elle ignorait alors l'existence de la marque de Jaguar Cars. 73

Les enregistrements de Remo. 74

Les ventes de Remo. 74

La demande d'extension de Remo. 75

La vaste campagne publicitaire menée par Remo en 1999. 75

Parmi les marchandises vendues par Remo, certaines étaient des produits bas de gamme vendus à des chaînes de magasins bas de gamme. 76

DATES IMPORTANTES. 77

QUESTIONS EN LITIGE.. 79

ANALYSE.. 80

La validité de l'enregistrement de la marque de commerce de Remo. 80

La portée de la protection. 81

L'achalandage. 83

L'expansion naturelle de l'achalandage. 83

Les facteurs de liaison entre les automobiles et les articles de bagage. 94

Les facteurs de diminution de la valeur - Généralités. 96

La prise d'un élément d'actif de valeur 98

La perte d'exclusivité (dilution) 100

L'atteinte à la réputation. 102

La possibilité de tromperie. 103

La probabilité de confusion. 107

Les circonstances de l'espèce. 114

Conclusion relative à la confusion. 115

L'absence de caractère distinctif 116

Conclusion concernant le caractère distinctif 121

L'invalidité de l'enregistrement de Remo. 121

La validité des enregistrements de la marque de commerce de Jaguar Cars à l'égard des marchandises faisant l'objet de l'opposition. 122

La diminution de valeur, la contrefaçon et la commercialisation trompeuse de la part de Remo. 124

L'absence de contrefaçon ou de commercialisation trompeuse de la part de Jaguar Cars. 127

Les dépens. 127

CONCLUSION.. 127

JUGEMENT.. 127

notes. 3


INTRODUCTION

[2]                « La plupart des décisions concernant des marques célèbres et similaires ont une faible valeur jurisprudentielle. Ces affaires reposent sur des faits particuliers, souvent uniques. Il est rare que deux marques se ressemblent ou se distinguent de la même manière. Il est peu fréquent que deux affaires concernent des entreprises du même type ou des clients du même genre. Par conséquent, les décisions rendues antérieurement peuvent s'avérer intéressantes, mais, en règle générale, elles ne sont guère utiles dans cette sorte de décision. » Le juge Linden, de la Cour d'appel fédérale, dans l'arrêt Pink Panther Beauty Corp c. United Artists Corp. (C.A.), [1998] 3 C.F. 534, [1998] A.C.F. no 441 (QL) à la page 566, paragraphe 39.

[3]                Après une réflexion approfondie, ainsi qu'un examen détaillé et minutieux de la preuve, des observations finales et du résumé des observations finales des deux parties, la Cour souscrit à l'essentiel des arguments juridiques des défenderesses. Bien qu'elle disconvienne de l'analyse faite par les témoins experts des défenderesses en ce qui concerne les sondages qu'elles avaient commandés, ce désaccord découle simplement et uniquement de la méthodologie inhérente des sondages, qui a été justifiée par les experts mais avec laquelle la Cour n'est pas d'accord par principe.

[4]                L'emploi conscient ou inconscient de la méthode socratique dans n'importe quelle situation mettant en jeu au moins deux groupes d'experts exige l'application de la logique pour comprendre les questions relatives à une certaine discipline ou à une certaine spécialité. Lorsque les parties adverses examinent, pendant l'audience, la logique des réponses fournies par les experts ou la cohérence des définitions ou des explications qui constituent le fondement des conclusions « fondées » des experts, dans l'analyse concluante qui est faite par le tribunal les réponses ne sont pas toutes considérées comme égales ou comme revêtant la même valeur probante. Dans le cours de cette analyse, certains éléments sont acceptés et d'autres, réfutés. Par conséquent, l'application consciente ou inconsciente de la méthode socratique oblige la Cour à faire preuve d'humilité pour éviter l'arbitraire. Cette attitude permet à la Cour d'assurer une recherche constante de l'équité en refusant d'accepter comme définitives les hypothèses invoquées par quelque expert confronté par l'une des parties, et en étudiant plutôt ces hypothèses avec humilité pour les fins de sa propre analyse.

[5]                Par conséquent, pour ce qui est des sondages et des expertises, la Cour est, après réflexion, fondamentalement d'accord avec l'analyse de la demanderesse, bien que cela ne modifie pas en soi l'analyse qu'elle a faite à la suite de l'examen de l'ensemble de la preuve. Bien que le résultat ultime soit identique à ce que les défenderesses ont plaidé à l'égard de l'interprétation du droit, de la doctrine et de la jurisprudence, l'on notera que les deux parties prétendent l'une et l'autre que son propre échelon de direction ne connaissait pas l'existence de l'autre lors de l'introduction de l'action; et la preuve, même interprétée de manière opposée par chacune des parties, ne permet pas de conclure autrement. Les parties devraient donc être tenues d'en supporter les conséquences pour le passé ; en corollaire, donc, et davantage encore, il appert clairement de la preuve que les clientèles respectives des parties étaient différentes, tout comme la distinction marquée sur le marché entre les produits respectifs des parties. Remo vendait ses accessoires principalement dans les magasins de détail de bas de gamme et parfois de milieu de gamme, alors que Jaguar Cars vend ses accessoires par l'intermédiaire de ses concessionnaires automobiles ou directement à ses acheteurs sans intermédiaire.

[6]                Par conséquent, il ne sera pas ordonné à la demanderesse de verser de dommages-intérêts exemplaires, punitifs ou autres. Cependant, pour les raisons exposées dans les motifs qui suivent, les défenderesses ont droit à leur marque de commerce « célèbre » , et la marque de commerce de la demanderesse au nom de Jaguar doit donc être radiée.

[7]                La conclusion ultime de la Cour est que, même s'il n'y a pas eu de confusion dans le passé, celle-ci a la possibilité d'exister, ce qui, en soi, est un fait d'une grande signification. Étant donné que chacune des parties, à son propre échelon de direction, prétend qu'elle ne connaissait pas « consciemment » ni « directement » l'existence de l'autre avant l'introduction de l'action, aucune d'elles ne devrait être obligée de rendre des comptes à l'autre pour le passé, ni subir de conséquences financières sur la base de ce passé (hormis la taxation des dépens, lesquels restent à déterminer). Cependant, il en va différemment en ce qui concerne l'avenir, d'où le jugement qui suit.

DEMANDE ET DEMANDE RECONVENTIONNELLE

[8]                La présente demande a été introduite le 5 juin 1991 par la demanderesse Remo Imports Ltd. (Remo) contre Jaguar Cars Limited et Ford Motors Company of Canada Limited (Jaguar Canada) (conjointement, Jaguar Cars) pour contrefaçon et commercialisation trompeuse de la marque de commerce JAGUAR de Remo, enregistrement no 263,924, enregistrée le 30 octobre 1981 en liaison avec des fourre-tout et des bagages, et le 11 janvier 1984 en liaison avec des sacs à main et des sacs d'école, en raison de la vente par Jaguar Cars des marchandises suivantes : étuis pour permis de conduire, étuis pour portefeuilles, étuis pour cartes d'affaires, ceintures, étuis pour cartes de crédit, étuis à clés, carnets d'adresses, carnets de notes, étuis pour passeports, étuis de beauté, étuis à documents, portefeuilles de poche (les marchandises faisant l'objet de l'opposition) en liaison avec la marque de commerce JAGUAR. Remo demande également la radiation des marchandises faisant l'objet de l'opposition des enregistrements nos 378,643 et 378,644 de Jaguar Cars en ce qui concerne JAGUAR et JAGUAR AND LEAPER DESIGN.

[9]                Le 6 mars 1992, Jaguar Cars a demandé reconventionnellement la radiation de l'enregistrement de Remo au motif que l'adoption de la marque de commerce JAGUAR par Remo en 1980 était et demeure invalide étant donné qu'elle était susceptible d'entraîner la diminution de la valeur de l'achalandage attaché à l'enregistrement no UCA21,618, de Jaguar Cars, de la marque JAGUAR en ce qui concerne les automobiles, qu'elle créait de la confusion avec celle-ci et trompait le public, et qu'elle n'était pas distinctive. Jaguar Cars demande également des mesures de réparation pour la diminution de valeur, la contrefaçon et la commercialisation trompeuse.

[10]            La question en litige fondamentale, tant dans la demande que dans la demande reconventionnelle, est l'enregistrement valide. Toutes les autres questions en litige découlent de cette décision.

structure de la décision

[11]            En raison de la documentation et de l'argumentation extrêmement détaillées présentées par les parties, un historique détaillé précède l'exposition des questions en litige. La validité des marques de commerce spécifiques aux marchandises de chacune des parties ne peut être tranchée qu'après un examen détaillé de la preuve en ce qui concerne la célébrité de la marque de commerce de Jaguar Cars au Canada durant la période pertinente, puis -- seulement alors -- du lien entre cette marque de commerce et les marchandises vendues comme accessoires par cette dernière. Il est également indispensable d'étudier dès l'abord la preuve de Remo en ce qui concerne la liaison entre sa marque de commerce JAGUAR et ses marchandises; ce n'est qu'après l'exposition détaillée de ce contexte que seront analysées les questions fondamentales pour décider la demande et la demande reconventionnelle.

CONTEXTE FACTUEL

Les témoins des faits

Les témoins de Remo

[12]            M. Moise Bassal est et a toujours été l'unique actionnaire et le président-directeur général de Remo.

[13]            M. Bassal est né à Beyrouth, au Liban, le 30 janvier 1947. Il a fait ses études primaires et secondaires à Beyrouth. Il ne se rappelle pas avoir joué avec des voitures jouets Jaguar, ou en avoir vu, étant enfant. Il ne se rappelle pas avoir vu, au cours de ses études primaires et secondaires, de photos, de magazines ou de livres portant sur les voitures Jaguar. M. Bassal a un baccalauréat de la faculté des lettres de l'université de Beyrouth. Il ne se rappelle par avoir vu de voitures Jaguar ou avoir monté à bord d'une voiture Jaguar à cette époque.

[14]            Titulaire d'un baccalauréat, M. Bassal s'est rendu à Paris en vue d'y obtenir un diplôme d'enseignement. Lorsqu'il était à Paris, il se déplaçait en métro, non en automobile, et il ne se rappelle pas avoir vu de voitures Jaguar dans les rues de Paris.

[15]            Après ses études à Paris, M. Bassal est rentré au Liban pour une période de deux ans, au cours de laquelle il a enseigné. Entre le moment où il est rentré au Liban et le moment où il en est parti, en 1967, M. Bassal ne se rappelle pas avoir vu ou avoir conduit une voiture Jaguar, ni avoir vu de photos, de livres ou de magazines portant sur les voitures Jaguar.

[16]            En 1967, M. Bassal a quitté le Liban pour venir au Canada, où il a enseigné pendant quatre ans au niveau secondaire.

[17]            Lorsqu'il enseignait à Montréal, M. Bassal a importé au Canada des sacs à main en cuir provenant du Liban, en vue de les revendre. Après quatre ans d'enseignement, il a abandonné cette profession pour se lancer dans le commerce des sacs à main. Remo Imports Ltd. a été constituée le 16 janvier 1973.

[18]            Entre 1967 et 1979, M. Bassal a fait l'acquisition de six voitures, mais au lieu de visiter des salons de l'automobile et des concessionnaires automobiles ou d'acheter des ouvrages consacrés à l'achat et à la vente de voitures, il demandait la plupart du temps conseil à des amis ou à des employés pour arrêter son choix (comme il est expliqué en détail aux paragraphes 398 et 410 à 412 du premier mémoire des faits et du droit de la demanderesse, volume 1).

[19]            Bien que M. Bassal admette avoir vu une voiture Jaguar à Hong Kong, il a expliqué que ce n'était pas lors de son premier voyage à Hong Kong, en 1978 (comme il est indiqué au paragraphe 404 du premier mémoire des faits et du droit de la demanderesse, volume 1).

[20]            Au cours de son témoignage, M. Bassal a indiqué qu'il n'avait ni vu ni conduit de voitures Jaguar au cours de son premier voyage en Corée, en 1978, étant donné que la Corée était fermée aux importations à cette époque et qu'aucune voiture étrangère ne circulait donc dans les rues coréennes.

[21]            Même si, entre 1973 et 1980, M. Bassal a fait des voyages d'affaires au Québec et en Ontario, ainsi qu'en Europe comme aux Pays-Bas, en Hollande et dans le Nord de l'Italie, il a affirmé n'avoir jamais entendu parler des voitures Jaguar à cette époque, [traduction] « comme je ne m'intéressais pas aux voitures Jaguar, ni aux autres voitures d'ailleurs, c'est quelque chose qui m'importait peu » .

[22]            M. Bassal lisait de temps à autre le journal Montreal Gazette de 1967 à 1979, mais il n'a vu aucune des 168 publicités faites dans ce journal par les concessionnaires Jaguar (VSA 31), étant donné qu'il n'a jamais accordé d'attention à ce type de publicité et qu'il ne lisait jamais la section du journal où ces publicités figuraient.

[23]            En 1979, au cours d'un voyage d'affaires en Italie, M. Bassal a rendu visite à un ami, M. Roberto Gista, qui a d'abord agi à titre d'agent pour lui. L'entreprise de cet ami, Jaguar S.R.L., vendait des valises en Italie, et plus tard dans d'autres régions de l'Europe, en liaison avec la marque de commerce « JAGUAR » .

[24]            Au cours de cette visite, M. Bassal a demandé à M. Gista s'il pouvait se servir de la même marque de commerce au Canada. M. Gista lui a répondu qu'il n'y voyait aucun inconvénient, comme il ne vendait pas de produits au Canada, et que M. Bassal pouvait faire ce qu'il voulait.

[25]            Lorsque M. Bassal a vu la marque de commerce « JAGUAR » chez son ami, celle-ci était assortie d'un logo. M. Bassal a indiqué que ce logo était comme celui figurant dans la pièce P-46, soit le document italien d'enregistrement de la marque de commerce et du dessin « JAGUAR » de Jaguar S.R.L.

[26]            Lorsqu'il est rentré au Canada après son voyage en Italie, M. Bassal a demandé à son avocat, M. Charles Wolfson, de vérifier si Remo pouvait utiliser la marque de commerce « JAGUAR » au Canada pour des fourre-tout et des bagages. M. Wolfson lui a indiqué que la marque de commerce était disponible.

[27]            M. Bassal ne se rappelle pas que M. Wolfson lui ait mentionné l'existence d'enregistrements de la marque « JAGUAR » pour des automobiles.

[28]            Le 10 octobre 1980, après avoir reçu une réponse favorable à l'issue de la recherche faite par M. Wolfson, Remo a produit la demande no 460,209 en vue de l'enregistrement de la marque de commerce « JAGUAR » pour des fourre-tout et des bagages.

[29]            La demande no 460,208 a donné lieu à l'enregistrement no 263,924 le 10 octobre 1981, pour des fourre-tout et des bagages.

[30]            Le 3 mars 1982, Remo a produit une demande d'extension de la liste des marchandises associée à l'enregistrement no 263,924 de la marque de commerce « JAGUAR » afin d'y inclure les sacs à main et les sacs d'école. Cette demande a été approuvée, et un certificat de modification a été délivré le 11 janvier 1984.

[31]            En 1980, Remo a commencé à acheter des produits de marque « JAGUAR » en provenance de la Corée, particulièrement des sacs en polyuréthanne et en nylon oxford. Ces produits portaient tous une étiquette volante « JAGUAR » et un logo « JAGUAR » . Lorsque ces sacs sont entrés au Canada et qu'ils ont été livrés aux clients de Remo, ils portaient une étiquette volante et un logo « JAGUAR » .

[32]            Les pièces P-162, P-163, P-164 et P-165 sont des confirmations de ventes de produits de marque « JAGUAR » à la suite de commandes faites par Remo en 1980.

[33]            La pièce MB-22.1 (P-50) est une liste des produits de marque « JAGUAR » qui étaient offerts par Remo en 1980.

[34]            La pièce P-102 comprend des copies de factures faites par Remo à ses clients en 1980.

[35]            Au procès, M. Bassal a passé en revue chacune des factures de la pièce P-102. Il a indiqué que les produits de marque « JAGUAR » correspondaient aux modèles nos 78508, 78849, 78508, 78700, 78780, 78521, 102, 104, 105, 106, 108, 109, 112 et 114.

[36]            Des renvois précis ont été faits aux pièces ayant un lien avec l'achat par Remo de marchandises en cuir de marque « JAGUAR » entre les années 1981 et 2000, et la vente de ces marchandises par Remo à des détaillants canadiens (paragraphes 482 à 533 du premier mémoire des faits et du droit de la demanderesse, volume 1).

[37]            Remo a vendu et continue de vendre sa gamme de produits de marque « JAGUAR » à des grands magasins, à des chaînes de magasins de détail et à des magasins spécialisés situés un peu partout au Canada.

[38]            Le chiffre d'affaires brut tiré par Remo de la gamme de produits de marque « JAGUAR » entre 1980 et 1997 inclusivement est indiqué dans la pièce confidentielle DT-32.

[39]            Entre 1988 et 1999, Remo a fait de la publicité collective avec nombre de ses clients, notamment Zellers Inc., K-Mart Canada Ltd., Bentley Leathers Inc. et Kotler Canada. Les pièces P-33 et P-76 (MBA-100) sont des copies de notes de crédit transmises par Remo à ses clients concernant de la publicité collective de produits de marque « JAGUAR » faite entre 1988 et 1998.

[40]            Entre 1980 et 1988, Remo a également participé à une publicité collective du même genre avec certains clients, en particulier Zellers et K-Mart.

[41]            Des copies de notes de crédit concernant de la publicité collective faite par Remo pour ses produits de marque « JAGUAR » , entre 1997 et 2001, avec des clients comme K-Mart Canada Ltd., Zellers Inc., Tigre Géant, Sears Canada Inc., Bentley Leathers Inc. et La Baie d'Hudson ont également été produites sous la cote P-99.

[42]            À partir du début des années 80 jusqu'en 1992 inclusivement, Remo a assisté et participé au Salon international canadien de la chaussure organisés à l'hôtel de la Place Bonaventure, à Montréal. À chacun de ces salons professionnels, Remo a occupé un kiosque où il présentait ses produits en vente en liaison avec la marque de commerce « JAGUAR » .

[43]            Depuis 1986, Remo participe à la foire commerciale Luggage, Leathergoods, Handbags and Accessory Show, qui a lieu chaque printemps à Toronto (Ontario). À chacune de ces foires commerciales, Remo occupe un kiosque où il présente ses produits en vente en liaison avec la marque de commerce « JAGUAR » .

[44]            Régulièrement depuis 1980, Remo participe à des foires commerciales ouvertes au public de moindre envergure dans des hôtels de la ville de Québec, où il présente, pour les vendre, ses produits de marque « JAGUAR » .

[45]            Une illustration de l'ensemble de bagages « JAGUAR AVANT GARDE II » de Remo a été publiée le 14 décembre 1999 dans le National Post.

[46]            Une illustration des valises « JAGUAR AVANT GARDE II » et « JAGUAR PILOT » a été publiée en décembre 1999, aux dates et dans les journaux indiqués dans le fait convenu P-849.

[47]            En août 1999, Remo a lancé une campagne de publicité sur des panneaux d'affichage et des abribus pour ses produits « JAGUAR » .

[48]            Les publicités de produits de marque « JAGUAR » de Remo faites sur des panneaux d'affichage et des abribus ont été préparées et installées par Mediacom Inc., pour le compte de Remo, entre août 1999 et décembre 2000, dans les endroits suivants : Halifax et Sydney (Nouvelle-Écosse); Moncton et Saint John (Nouveau-Brunswick); Thetford Mines, Drummondville, Granby, Beauce, Québec, Chicoutimi, Trois-Rivières, Sherbrooke, Montréal et Hull (Québec); Kingston/Brockville, Belleville, Ottawa, Toronto, Hamilton, Oshawa, Kitchener, St. Catherines/Niagara, London, Windsor, Sarnia, Peterborough/Lindsay, Barrie, Orilla et Thunder Bay (Ontario); Winnipeg (Manitoba); Regina et Saskatoon (Saskatchewan); Moose Jaw, Edmonton et Calgary (Alberta); Vancouver (Colombie-Britannique).

[49]            Des photographies de ces publicités faites par Mediacom Inc. sur des panneaux d'affichage et des abribus figurent dans la pièce P-152.

[50]            Après décembre 2000 et régulièrement jusqu'à présent, Remo a pris des ententes avec Viacom Inc. et Patterson afin que des publicités de certains de ses produits « JAGUAR » soient faites sur des panneaux d'affichage et des abribus dans l'ensemble du Canada.

[51]            Mme Alice Ann Morlock est avocate spécialisée en marques de commerce chez McMillan Binch. En 1987, elle était avocate externe pour Jaguar Cars au Canada. Elle a témoigné au sujet de certaines pratiques liées aux marques de commerce. Ses communications avec son client sont confidentielles; elles ne figurent pas parmi les éléments de preuve.

Les témoins de Jaguar Cars

[52]            Mme Vivien Shortt travaille pour Jaguar Canada depuis 1981. Elle a été responsable des gammes d'accessoires personnels de Jaguar Canada entre le début des années 80 et les années 90. Depuis son arrivée au sein de l'entreprise, en 1981, Jaguar a élargi sa gamme d'accessoires personnels en une gamme complète d'accessoires personnels : porte-documents, serviettes, mallettes, sacs à main, étuis pour permis, porte-monnaie, portefeuilles, agendas, chemises, porte-cartes de crédit, porte-cartes, anneaux porte-clés, porte-clés, housses à vêtements, sacs de sport, valises, sacoches de vol, ensembles de voyage, bagages, ceintures, vêtements, polochons, fourre-tout et autres articles similaires. Jaguar Cars fait la promotion de cette nouvelle gamme d'accessoires personnels JAGUAR au Canada, depuis le début des années 80, dans de nombreux dépliants et brochures qu'elle met à la disposition des clients dans les salles d'exposition des concessionnaires et les salons de l'automobile. Les ventes sont effectuées par les concessionnaires et les licenciés de Jaguar Canada, et certaines ventes directes le sont par Jaguar Canada. Jaguar Cars a adopté des normes rigoureuses en matière de fabrication, de présentation, de promotion, de publicité et de vente de sa gamme d'accessoires personnels portant la marque de commerce JAGUAR. Tous les accessoires personnels authentiques dont la vente sous la marque de commerce JAGUAR est autorisée au Canada sont d'excellente qualité. Mme Shortt n'était pas au courant de l'existence de la demanderesse ni de ses ventes au Canada avant que l'avocat de celle-ci n'envoie la lettre de mise en demeure qui est à l'origine de la présente action.

[53]            M. Jim Robertson travaille pour Jaguar Canada depuis 1976. Il y a occupé des postes en marketing et en ventes et il est actuellement coordonnateur du marketing, de la présentation et de la formation. Il a parlé des activités de marketing de Jaguar de 1976 à aujourd'hui. Il a fait état des ventes de voitures de luxe effectuées par Jaguar Cars en liaison avec la marque de commerce JAGUAR entre le début des années 70 et 1997.

[54]            M. Craig Manuel est un avocat de Toronto. Il a parlé de différents vidéos, dont certains films datant de 1942 dans lesquels il avait repéré des voitures Jaguar.

[55]            À titre de cadre supérieur chez Jaguar Cars Limited en Angleterre, M. John Maries a été responsable de l'élargissement de la marque de commerce JAGUAR à une gamme complète d'accessoires personnels, et ce, entre la fin des années 1970 et 1999. Partout dans le monde et au Canada, la marque de commerce JAGUAR a été employée en liaison avec différents accessoires personnels par Jaguar Cars ou ses licenciés, dont certains depuis les années 50 au moins, y compris des valises, des modèles réduits, des pochettes pour documents de voiture, des chaînettes pour porte-clés et des chaînes porte-clés. Il a décrit certaines activités de promotion d'accessoires personnels entreprises par Jaguar Cars dans le monde entre 1950 et 1980. Des concurrents de Jaguar Cars dans le segment des voitures de luxe, comme Mercedes-Benz, avaient étendu leur marque réputée à des accessoires personnels avant 1980. À la fin des années 70, les dirigeants de Jaguar Cars ont décidé d'étendre leur prestigieuse marque Jaguar à une gamme complète d'accessoires personnels. M. John Maries, responsable de la mise sur pied du projet en 1981, est à l'origine de la brochure argent (Silver Brochure), présentée en 1982. Jaguar Cars n'a jamais autorisé l'utilisation de sa marque de commerce JAGUAR par Remo. Avant de recevoir les lettres de mises en demeure liées à cette action, au milieu des années 90, Jaguar Cars ignorait l'existence de Remo. Si Jaguar Cars avait su que Remo utilisait la marque de commerce JAGUAR, elle aurait tenté de l'en empêcher. Jaguar Cars a effectivement pris des mesures en ce sens dans d'autres cas d'utilisation de la marque de commerce JAGUAR, lorsque cela a été possible.

[56]            M. Anders Clausager est archiviste pour une entreprise affiliée à Jaguar Cars Limited en Angleterre. En liaison avec les marques de commerce JAGUAR, LEAPING JAGUAR DESIGN et JAGUAR HEAD DESIGN, Jaguar Cars et ses prédécesseurs vendent des voitures dans le monde entier, sans interruption, depuis 1936, y compris au Canada. M. Anders Clausager a donné un ordre de grandeur du volume des ventes. Depuis 1936, Jaguar fait la publicité et la promotion continues des voitures de Jaguar Cars sur le marché mondial, y compris au Canada, en liaison avec la marque de commerce JAGUAR. Depuis au moins 1959, Jaguar Cars et ses voitures ont fait l'objet de nombreux ouvrages rigoureux.

[57]            M. John Mackie a été vice-président des ventes puis président de Jaguar Canada entre 1965 et 1997 environ. Il a fait état des dépenses de publicité et des ventes de voitures de luxe réalisées entre 1948 et 1997 par Jaguar Cars en liaison avec la marque JAGUAR. Il a décrit la nature et l'ampleur des activités de promotion visant les automobiles de Jaguar Cars au Canada, entre 1948 et 1997. De nombreux documents produits au fil des ans avant 1980 font état de la réputation de Jaguar Cars au Canada et de l'image de richesse et de qualité qui y est associée. Jaguar Cars ou ses licenciés ont utilisé la marque de commerce JAGUAR, au Canada, en liaison avec différents accessoires personnels dès 1950 au moins, notamment des valises, des modèles réduits, des pochettes pour documents de voiture, des chaînettes pour porte-clés et des chaînes porte-clés. C'est vers 1981 ou 1982 que Jaguar Canada a commencé à envisager, de concert avec Jaguar Cars, d'étendre la précieuse marque JAGUAR à une gamme complète d'accessoires personnels. Jaguar Canada n'a jamais autorisé ou accepté l'emploi de sa marque de commerce JAGUAR par Remo. Avant la présentation des lettres de mises en demeure liées à cette action, au milieu des années 90, Jaguar Canada ignorait l'existence de Remo.

[58]            M. Brian Green a été directeur général du service d'entretien et de réparation de Jaguar Canada de 1968 à 1986, puis vice-président de 1986 à 1994. Il a décrit certaines activités de Jaguar Canada de 1968 à aujourd'hui. La marque de commerce JAGUAR a été utilisée au Canada, par Jaguar Cars ou ses licenciés, en liaison avec différents accessoires personnels dès les années 50, notamment des valises, des modèles réduits, des pochettes pour documents de voiture, des chaînettes porte-clés et des chaînes porte-clés. Des concurrents de Jaguar Cars dans le segment des voitures de luxe, comme Mercedes-Benz, BMW, Porsche et Saab, ont commencé à étendre leur marque réputée à des accessoires personnels avant 1980.

[59]            M. John Cox a été directeur général et/ou propriétaire de concessions Jaguar Cars à Toronto, entre 1981 et 2000 environ. Il travaille dans le domaine des concessions d'automobiles depuis 1970. Il a fait état des activités de la concession Jaguar Coventry entre 1993 et 1998 et de la concession Jaguar de la rue Bay entre 1981 et 1992. Il a indiqué en quoi consistait, pour chacune des deux concessions, une promotion annuelle type d'accessoires personnels de marque JAGUAR. Les ventes d'accessoires personnels ont commencé au début des années 80 et ont progressivement pris de l'importance par la suite. Entre le début et le milieu des années 80, les concessionnaires de Jaguar proposaient à leurs clients des accessoires figurant dans leurs catalogues, brochures et listes de prix, notamment la brochure « Collection Jaguar » . Il a décrit certaines des techniques utilisées par Jaguar Coventry pour faire la promotion de ses voitures et de ses accessoires, notamment lors d'activités sportives et culturelles, dans des publications et sur les lieux d'exposition.

Les témoins experts

Les experts de Jaguar

[60]            Mme Ruth Corbin est spécialiste du marketing ainsi que de l'étude et de l'analyse du comportement du consommateur, particulièrement des sondages portant sur les questions liées aux marques de commerce. Elle a mené quatre sondages indépendants, soit deux en 1998 et deux en 2004.

[61]            Sondage de 1998 sur la notoriété de Jaguar Cars : à partir des résultats obtenus lors d'un sondage téléphonique pancanadien, elle a conclu qu'en 1980 et en 1998, 89 % des Canadiens - étant donné un certain niveau de précision, connaissaient le nom JAGUAR comme étant un nom de voiture.

[62]            Sondage de 1998 sur les porte-documents Jaguar : à partir des résultats obtenus lors d'un sondage téléphonique pancanadien, elle a tiré les conclusions suivantes :

(1)         en voyant un porte-documents de marque JAGUAR, de 5 % à 9 % des répondants concluent sans qu'on le leur suggère que ce porte-documents a été fabriqué par Jaguar Cars ou a fait l'objet d'une licence de Jaguar Cars;

(2)         si la question leur est posée, 19 % des répondants (31 % des propriétaires de voitures de luxe) concluent qu'il existe un lien entre les porte-documents JAGUAR et Jaguar Cars.

[63]            Sondage de 2004 sur les valises/sacs à dos/portefeuilles/porte-clés Jaguar : à partir des résultats obtenus lors d'un sondage téléphonique pancanadien, elle a tiré les conclusions suivantes :

(1)         en voyant une valise, un sac à dos ou un portefeuille de marque JAGUAR, de 4 % à 7 % des répondants concluent que le produit, a été fabriqué par Jaguar Cars ou a fait l'objet d'une licence de Jaguar Cars;

(2)         si la question leur est posée, 35 % des répondants concluent qu'il existe un lien entre les porte-clés JAGUAR et Jaguar Cars.

[64]            Sondage de 2004 sur la publicité de Jaguar : à partir des réponses obtenues lors d'un sondage mené dans un centre commercial auprès de Canadiens à qui on a montré la copie d'une publicité de Remo sur un panneau d'affichage, elle a tiré les conclusions suivantes :

(1)         97 % des répondants connaissent Jaguar Cars;

(2)         Jaguar Cars est associée à des adjectifs comme luxueux, élégant, classique, chic;

(3)         sans qu'on le leur suggère, 44 % des adultes établissent un lien entre Jaguar Cars et les publicités des valises JAGUAR de Remo;

(4)         même lorsqu'ils n'y a pas confusion, la majorité des répondants établissent tout de même un lien entre le nom Jaguar des produits de Remo et l'achalandage de Jaguar Cars.

[65]            M. Mich Bergesen est un spécialiste de l'évaluation des marques (de commerce), de l'extension de marques, de l'évaluation de l'achalandage et de l'extension de marques de commerce bien connues, ainsi que de la mesure de la notoriété de marques biens connues aux États-Unis et au Canada auprès des consommateurs[1]. Il a mené des recherches de type historique en ce qui concerne l'extension de marques de voitures bien connues à des « articles de bagage » . Il a décrit la banque de données Brand Asset Valuator (BAV), qui contient des renseignements sur des milliers de marques au Canada et aux États-Unis pour la période de1993 à 2003.

[66]            Il a présenté son analyse des données susmentionnée et d'autres attributs de la marque de commerce JAGUAR du point de vue des consommateurs :

(1)         96 % des consommateurs connaissaient la marque de voitures JAGUAR;

(2)         le niveau de perception de la richesse et de la qualité était très élevé, tant aux États-Unis qu'au Canada;

(3)         la valeur de l'achalandage de la marque de commerce JAGUAR en liaison avec des voitures était considérable et mesurable.

(4)         la valeur de l'achalandage de la marque de commerce JAGUAR étendue à des articles de bagage était considérable et mesurable.

[67]            Pour les données et l'analyse, on a fait une extrapolation rétrospective jusqu'en 1980, au Canada. Selon lui, en 1980, en 1991, en 1993 et aujourd'hui au Canada :

(1)         un expert des marques dirait à Jaguar Cars qu'elle aurait un achalandage précieux en étendant sa marque JAGUAR à des articles de bagage;

(2)         un tiers employant la marque pour des articles de bagage utiliserait un achalandage pour lequel Jaguar aurait pu accorder une licence ou que Jaguar aurait pu vendre à un prix élevé;

(3)         un lien étroit est et a été établi entre la marque de commerce JAGUAR utilisée pour des voitures et la même marque utilisée pour des articles de bagage comme les produits auxquels Jaguar Cars a bel et bien étendu sa marque JAGUAR dans les années 80.

[68]            M. Darmon a contesté cette extrapolation rétrospective jusqu'en 1980.

[69]            M. Joachimsthaler est un spécialiste des stratégies de commercialisation, de la création de marques fortes et de l'extension de marques à de nouvelles catégories de produits et de services[2]. Il considère que M. Bergesen a utilisé une technique fiable et valide, que JAGUAR était largement connue comme une marque de voitures haut de gamme entre 1993 et 2004, au Canada et aux États-Unis, et qu'il est approprié de faire une extrapolation rétrospective au Canada, jusqu'en 1980. Il a conclu que la marque JAGUAR se prêtait à une extension à des bagages au Canada, en 1980. Il a également indiqué qu'en vendant au Canada des valises portant la marque de commerce JAGUAR en 1980, Remo s'est livrée à des activités ayant une valeur considérable pour Jaguar Cars. M. Joachimsthaler a confirmé que, sur les plans historique et de la commercialisation, il y a eu des cas d'extension de marques de voitures bien connues à des valises avant 1980 au Canada, et que d'étroits rapprochements peuvent être faits en ces deux types de produits; c'est pourquoi il a conclu que Remo, en utilisant la marque JAGUAR pour des valises au Canada en 1980, a diminué la valeur de la marque de voitures JAGUAR, que les valises aient été ou non de grande qualité et qu'il y ait eu ou non confusion chez les consommateurs, étant donné qu'on peut parler de différents types de diminution de valeur. Son témoignage est écarté pour les motifs indiqués plus bas en ce qui concerne M. Bergesen.

[70]            M. Sridhar Moorthy est un spécialiste du marketing en général, et du développement d'images de marque en particulier, y compris de l'évaluation de marques, de l'extension de marques (de commerce), de la connaissance des marques par les consommateurs et de la valeur ajoutée des marques. Il a conclu que l'extrapolation rétrospective des données, au Canada, jusqu'en 1980, est valide et qu'en 1980, en 1991, en 1993 et en 2004 :

(1)         il y avait de bonnes raisons pour Jaguar Cars d'étendre sa marque de voitures JAGUAR à des « articles de bagage » ;

(2)         un tiers employant la marque de commerce JAGUAR pour des articles de bagage utiliserait un achalandage qui aurait autrement eu une valeur considérable pour Jaguar Cars;

(3)         du point de vue du consommateur, les marchandises liées aux automobiles JAGUAR sont des produits complémentaires aux articles de bagage;

(4)         il y avait de bons motifs, sur le plan marketing, pour qu'une marque de voiture bien connue soit étendue à des articles de bagagerie;

(5)         en utilisant la marque JAGUAR pour des articles de bagagerie au Canada en 1980, Remo a pu réaliser des économies de coûts de promotion, elle a diminué la valeur de l'achalandage lié à la marque de commerce JAGUAR utilisée pour des voitures, et ce, d'une ou plusieurs façons, qu'il y ait ou non confusion et que les produits de Remo soient ou non de moindre qualité.

[71]            La réflexion de la Cour à cet égard est présentée ci-dessous.

Les experts de Remo

[72]            M. Alain D'Astous, professeur de marketing, est un spécialiste reconnu en marketing multiculturel au Canada; il a reçu des prix dans ce domaine. Il a examiné l'analyse des processus mnémoniques présentée dans la preuve par sondage produite par Jaguar Cars.

[73]            M. René Darmon a témoigné pour Remo; il a examiné l'analyse de régression présentée dans le rapport de M. Bergesen. Il est également spécialisé en marketing. M. Darmon enseigne toujours le marketing en Europe et en Amérique du Nord. Il est un spécialiste reconnu aussi bien dans l'Union européenne qu'en Amérique du Nord, et il a reçu un prix pour le meilleur rapport de recherche appliquée en marketing au Canada.

[74]            La Cour est du même avis que les témoins experts de Remo, comme l'indique l'analyse de la Cour ci-après, simplement pour des motifs liés à la méthodologie dont les experts de Jaguar se sont servis pour tirer des conclusions pour les besoins du présent litige uniquement. C'est avec cette méthodologie que la Cour n'est pas d'accord.

FIABILITÉ ET VALIDITÉ DES sondages

[75]            Comme une bonne part du temps a été consacrée à l'interrogatoire et au contre-interrogatoire des témoins experts relativement aux sondages, lesquels avaient été commandés par les défenderesses uniquement pour les besoins du présent litige, les résultats de ces sondages ont été décrits ci-dessus. La Cour termine en donnant des exemples précis des lacunes inhérentes des analyses des sondages effectuées par les experts dans le cadre de l'espèce.

[76]            Cette partie sera traitée en trois sections distinctes, soit :

(i)          les sondages Corbin;

(ii)         les données du BAV (preuve relative au marketing, analyse de régression);

(iii)        la jurisprudence applicable.

Le sondage de 1998 sur la notoriété de Jaguar Cars

[77]            Ce sondage a été mené en 1998 pour tenter d'établir la notoriété du nom « JAGUAR » en tant que nom de voiture avant 1980. Ce sondage a été mené par téléphone.

[78]            Les sondages par téléphone sont courants dans l'industrie des sondages, mais ce sondage, du fait de sa raison d'être, présente une lacune inhérente s'il est mené par téléphone, étant donné que l'âge, le sexe ou d'autres caractéristiques des répondants ne peuvent être vérifiés de façon empirique. Il s'agit de renseignements particulièrement pertinents compte tenu de la nature et de l'objectif énoncé du sondage de 1998 sur la notoriété de Jaguar Cars.

[79]            Mme Corbin reconnaît ce qui suit à la page 151 de la transcription du 5 juillet 2005, en réponse à la question 228 :

[traduction] En ce qui concerne la possibilité qu'une personne mente sur son âge, il va sans dire qu'une confirmation visuelle serait préférable.

[80]            Étant donné que l'âge du répondant est une donnée essentielle à la fiabilité et à la validité du sondage, particulièrement pour ce qui est des réponses données aux questions 4, 5 et 6, un sondage mené par téléphone pour les besoins évoqués par Mme Corbin soulève immédiatement des doutes quant à sa fiabilité et à sa validité.

[81]            Rien ne garantit que l'on puisse conclure, d'après le sondage, que les données démographiques (c'est-à-dire d'une « population » ) étaient adéquates pour les besoins du sondage.

[82]            La première question posée aux répondants était la suivante : [traduction] « Quelle est la première chose qui vous vient à l'esprit lorsque vous entendez le nom Jaguar/Panthère? »

[83]            Comme l'indiquent les résultats détaillés, onglet 2, à la page 3 de la pièce DT-4.2, en relation avec la question 1 :

a)          personne n'a mentionné les termes bagage ou porte-documents;

b)          quatre pour cent (4 %) des répondants ont répondu « personnes riches/argent » ;

c)          un pour cent (1 %) des répondants a répondu « cher/grande qualité » .

[84]            La question 2 était la suivante : [traduction] « Y a-t-il autre chose qui vous vient à l'esprit lorsque vous entendez le nom Jaguar? Autre chose? » Dans les résultats détaillés, onglet 2, à la page 4 de la pièce DT-4.2, le tableau qui contient les réponses aux questions 1 et 2 indique que :

a)          moins de un pour cent (1 %) des répondants a répondu « bagage » ;

b)          deux pour cent (2 %) ont répondu « cher/grande qualité » .

[85]            Toujours à la page 4 des résultats détaillés, il est indiqué que la question 1 permettait de mesurer [traduction] « ce qui venait à l'esprit en premier lieu » et que la question 2 était une [traduction] « question de contrôle, ouverte et sans choix de réponses » .

[86]            La question 3 était la suivante : [traduction] « Avez-vous déjà entendu le nom Jaguar utilisé comme nom de voiture, ou non? » .

[87]            Au paragraphe 19 de son affidavit, pièce DT 4.1, Mme Corbin a confirmé que la question 3, qui était posée aux répondants n'ayant pas mentionné le mot « voiture » aux questions 1 et 2, donnait à penser à une « connaissance suggérée » .

[88]            Dans sa réponse à la question 103, à la page 78 de la transcription du 5 juillet 2005, Mme Corbin a confirmé que la question 3 était en fait une question fermée, ce qu'elle a de nouveau reconnu dans sa réponse à la question 130, à la page 85 de la transcription précitée. En outre, elle confirme que l'enquêteur avait pour instruction de poser une question fermée en faisant référence au nom Jaguar en tant que nom de voiture.

[89]            La question 4 était la suivante : [traduction] « Quel âge aviez-vous environ lorsque vous avez appris l'existence de voitures portant le nom Jaguar? » .

[90]            Les répondants qui, à la question 4, ne se souvenaient pas de l'âge qu'ils avaient ou de la tranche d'âge dans laquelle ils se situaient devaient répondre à la question 5, soit la question fermée suivante : [traduction] « Selon vous, était-ce avant votre adolescence, pendant votre adolescence ou après votre adolescence? » .

[91]            Mme Corbin reconnaît que la question 5 a été posée de manière à suggérer une réponse, et elle fait l'interprétation subjective suivante :

[traduction] De nombreuses personnes se souviennent très clairement de la perception qu'ils avaient des voitures de luxe lorsqu'ils étaient adolescents.

On peut légitimement se demander si des données empiriques soutiennent cette supposition (Mme Corbin n'a pas présenté d'éléments de preuve en ce sens) et, par ailleurs, si une telle supposition s'applique de la même façon dans l'ensemble des segments culturels et socio-économiques de la population canadienne.

[92]            La question 77 ci-dessous figure à la page 69 de la transcription du 5 juillet 2005 :

[traduction]

Q- La question 5 est-elle une question fermée?

R- La question 5 est fermée.

La question 78, figurant dans la même transcription, est libellée comme suit :

[traduction]

Q- Diriez-vous que la question 6 est fermée, ou qu'elle n'est pas fermée?

R- Oui, oui, la question 4 est ouverte, et les questions 5 et 6 sont fermées, pas seulement selon le sens employé en recherche. Il s'agit du genre de sollicitation de la mémoire mentionnée dans les ouvrages portant sur la mémoire, exactement le genre de sollicitation qui fait ressortir des souvenirs enfouis dans la mémoire à long terme [...]

[93]            Dans sa réponse à la question 290, à la page 195 de la transcription du 5 juillet 2005, Mme Corbin devait dire si la question 5 était une question où l'on préparait les personnes à répondre à la question 6. Il a été suggéré à Mme Corbin que la mémoire des répondants était stimulée. Sa réponse a été la suivante :

[traduction] La question 4 ne stimule pas la mémoire, on ne fait que poser une question, mais on peut dire qu'on stimule la mémoire à la question 5, si nous employons bien ce terme de façon objective, oui.

[94]            En outre, dans sa réponse à la question 64 de la transcription du 6 juillet 2005, Mme Corbin reconnaît que les questions 5 et 6 sont fermées.

[95]            La question 6 était la suivante : [traduction] « Était­-ce avant 1980, aux alentours de 1980, après 1980, ou est-ce que vous ne vous en souvenez pas? » . Mme Corbin affirme :

[traduction] Pour ces personnes, nous passions à la question 6, et là elles avaient une question fermée, qui les aidait à donner une réponse factuelle à la question 6 [...]

[96]            La demanderesse a fait valoir que les questions 4, 5 et 6 ne sont pas simplement « fermées » selon le jargon ou le langage quotidien employé dans l'industrie des sondages, elles sont même suggestives. Pour ces motifs, et en raison des questions soulevées par M. D'Astous dans son rapport et dans son témoignage, ainsi que du temps écoulé entre les faits faisant l'objet du sondage et le sondage lui-même, soit au moins 18 ans, les résultats du sondage ne sont ni fiables ni valides. Comme M. D'Astous l'a indiqué :

[traduction] [...] comme je l'ai dit à différentes reprises, on demande à la personne de se souvenir de quelque chose qui s'est produit il y a près de vingt (20) ans, de surcroît de quelque chose qui n'est pas marquant selon moi, soit le fait de savoir que Jaguar est le nom d'une voiture. En outre, compte tenu du temps dont les répondants disposent pour se rappeler ce fait en répondant au sondage, je crois qu'ils se bâtiront une connaissance générique pour ensuite donner une réponse raisonnable qui n'est pas le fruit de leur mémoire.

[97]            En ce qui concerne la pièce DT-24, la Cour est respectueusement renvoyée aux pages 17 à 25 de la transcription du 20 juillet 2005, inclusivement, particulièrement à la page 20, où Mme Corbin affirme :

[traduction] Règle générale, les souvenirs s'effacent avec le temps, selon les circonstances, et je sais que vous n'avez pas posé de question à ce sujet. Généralement parlant, c'est vrai.

[98]            En ce qui concerne la question de savoir si la question 6 du sondage portant sur la notoriété de Jaguar Car est redondante et si elle a été posée simplement pour recueillir des données, mention est faite des pages 45 et suivantes de la transcription du 20 juillet 2005, précisément de la réponse donnée par Mme Corbin à la question 95, à la page 47, comme il est indiqué ci-dessous :

[traduction]

Q. Donc, la question six n'est plus un outil de calcul dans l'exemple qu'on vient de donner?

R. C'est un élément contextuel supplémentaire. Vous avez raison, c'est un indicateur additionnel, pas... il ne peut être considéré comme un outil précis pour le calcul, c'est seulement un indicateur.

Q. Donc, il ne s'agit pas d'un moyen de diversion à part entière?

R. Oui, nous pourrions dire qu'il s'agit d'un moyen de diversion presque à part entière mais... mais oui, c'est un bon argument.

Q. Pas à part entière?

R. Je le reconnais, et je crois qu'il s'agit d'un bon exemple.

Le sondage de 1998 sur les mallettes de Jaguar

[99]            Ce sondage a produit des données pour 1998. Il a été mené par téléphone. Mention est faite des paragraphes 5.6 et suivants du premier mémoire des faits et du droit de la demanderesse, volume 2, relativement aux questions du sondage et à l'absence de condition de contrôle à la question 2. Comme il est indiqué au paragraphe 5.9 du mémoire précité, le fait de mentionner l'expression « marque de commerce JAGUAR » serait un indice permettant de deviner qu'il s'agit d'un constructeur de voitures, c'est pourquoi une condition de contrôle aurait dû être posée.

[100]        Ce sondage manque de rigueur en raison de la lacune inhérente aux sondages par téléphone en général, ainsi que de l'absence de condition de contrôle dans les cas où cela eut été nécessaire.

Le sondage de 2004 sur les bagages/sacs à dos/portefeuilles/porte-clés de Jaguar

[101]        Ce sondage a été mené en 2004. Il s'agissait d'un sondage téléphonique national mené auprès d'adultes du Canada, plus précisément auprès d'un échantillon représentatif de 202 personnes de 18 ans et plus choisies au hasard dans l'ensemble des provinces du Canada.

[102]        Le sondage avait pour but de déterminer la mesure dans laquelle les consommateurs sont susceptibles ou non de penser que les produits de marque Jaguar de l'entreprise Remo sont en fait des produits de Jaguar Cars Limited.

[103]        Il convient de souligner que le sondage a été mené en 2004, soit environ vingt-quatre (24) ans après que la demanderesse a eu commencé à faire la promotion de ses produits et à vendre ses produits au Canada.

[104]        Les questions et les données recueillies sont présentées aux paragraphes 6.5 à 6.21 du mémoire des faits et du droit de la demanderesse, volume 2.

[105]        En ce qui concerne la question 5 et le fait qu'il a été confirmé qu'il s'agissait d'une question fermée, mention est faite du paragraphe 51 de l'affidavit de Mme Corbin et de la question 291, à la page 171 de la transcription du 6 juillet 2005. Toujours en ce qui concerne la question 5, mention est faite de la question 293, à la page 172 de la même transcription et des questions 299 à 302, aux pages 173 et suivantes de la même transcription.

[106]        Pour une autre confirmation du caractère fermé de la question 5, mention est faite de la question 317, à la page 183 de la transcription du 6 juillet 2005.

[107]        Au paragraphe 51 de l'affidavit de Mme Corbin, cette dernière reconnaît que la question 5 est une question fermée et qu'une simple lecture suffit pour conclure à la nature suggestive de cette question.

[108]        Au paragraphe 55 de l'affidavit de Mme Corbin, pièce DT-4.1, Mme Corbin indique que le sondage de 2004 a permis d'établir qu'à la vue de bagages, de sacs à dos ou de portefeuilles Jaguar, un certain pourcentage de répondants (de 4 % à 7 %) a conclu, sans qu'on le leur suggère, que ces produits sont fabriqués directement par Jaguar Cars Limited ou sous licence accordée par cette dernière. Qu'il suffise de dire que ces pourcentages reflètent le fait que la demanderesse vend ses marchandises depuis près d'un quart de siècle.

[109]        Ce sondage n'est ni fiable ni valide, compte tenu de la critique qui peut être généralement faite des sondages téléphoniques menés auprès de répondants ayant au moins un certain âge, et compte tenu des commentaires formulés dans le premier mémoire des faits et du droit de la demanderesse, volume 2, et dans le présent mémoire, selon lesquels des questions suggestives et tendancieuses étaient posées aux répondants, en particulier les questions 4 et 5.

Le sondage de 2004 sur la publicité de produits Jaguar

[110]        Ce sondage avait pour objet la notoriété de la marque, comme il l'est indiqué à la page 1 de la pièce DT-4.4 et au paragraphe 57 de l'affidavit de Mme Corbin.

[111]        Mention est également faite des questions 42 et 43, à la page 34 de la transcription du 7 juillet 2005, ainsi que de la page 4 de la pièce DT-4.4, où on peut lire :

[traduction] Selon le mandat de Ridout & Maybee, la population pertinente interviewée était constituée des consommateurs adultes anglophones canadiens, étant donné que les publicités ont été faites dans les médias de masse. Les questions du sondage ont également permis d'analyser les réponses des personnes qui achètent des articles de bagage, des personnes qui conduisent une voiture de luxe et des personnes qui vivent dans une ville donnée ou qui se situent dans un groupe d'âge donné.

[112]        Au paragraphe 59 de l'affidavit de Mme Corbin, on peut constater que les entrevues ont eu lieu dans des centres commerciaux de quatre provinces du Canada, nommément l'Ontario, la Colombie-Britannique, la Nouvelle-Écosse et l'Alberta.

[113]        Ainsi, la part de la population résidant au Québec, soit environ 25 % de la population canadienne, a été exclue du sondage mené dans les centres commerciaux, bien que cette part de la population soit distincte, à différents égards importants, du reste de la population canadienne, notamment sur les plans de la langue et de la culture, et cela sans compter que Remo a fait de la publicité sur des panneaux d'affichage dans de nombreux endroits au Québec.

[114]        Mme Corbin a reconnu que ce sondage n'était pas nécessairement représentatif sur le plan démographique et, à cet égard, mention est faite de la question 64, à la page 39 de la transcription du 7 juillet 2005, ainsi que du paragraphe 60 de l'affidavit de Mme Corbin.

[115]        Aux questions 79 à 86 de la transcription du 7 juillet 2005, il a été confirmé que l'annonce publicitaire de Remo est celle qui a été particulièrement ciblée et, à cet égard, mention est faite du paragraphe 61 de l'affidavit de Mme Corbin, ainsi que des questions 79 à 86, inclusivement, de la transcription du 7 juillet 2005, à partir de la page 44.

[116]        Il en résulte donc, évidemment, que l'annonce de Remo était celle dont les répondants se souvenaient le mieux, étant donné que c'est la dernière des trois annonces qu'ils avaient vues.

[117]        Mention est faite des questions 169 à 172 inclusivement, aux pages 114 et suivantes de la transcription du 7 juillet 2005, de la question 175, à la page 118 de la même transcription, ainsi que des questions 179 à 181 inclusivement, aux pages 119 et suivantes de la transcription. Une attention particulière est portée aux questions 179 à 181, aux pages 119 et 120 de la transcription précitée, ainsi libellées :

[traduction]

Q. [179] Ce que j'ai dit, c'est que si une personne disait seulement « voiture » , elle ne disait pas « voiture Jaguar » , et que si elle disait seulement « véhicule » , elle ne disait pas « véhicule Jaguar » . Tel est l'argument que je souhaite apporter, Madame Corbin.

R. C'est exact. Je le reconnais. Je souhaite simplement mentionner la question où on leur demandait de nommer un produit ou des produits et à laquelle ils ont donné une de ces réponses, oui.

Q. [180] D'accord. Donc, encore une fois, je soutiens qu'on ne peut tirer de conclusions à partir des données présentées dans ce tableau, le tableau 2, en ce qui concerne le pourcentage de répondants ayant seulement nommé les voitures Jaguar, non?

R. Oui, c'est... nous ne pouvons pas... c'est vrai, oui.

Q. [181] D'accord. Donc, ai-je raison de dire que les personnes ayant dit qu'il s'agissait d'une publicité pour les voitures Jaguar ont peut-être aussi dit qu'il s'agissait d'une publicité pour des articles de bagage?

R. Oui, c'est possible.

[118]        La question 3 est reproduite à la page 11 de la pièce DT-4.4 :

[traduction] Même si vous l'avez déjà dit, veuillez dire quelle entreprise est derrière la dernière publicité que vous avez vue.

Encore une fois, cette question concerne l'annonce publicitaire de Remo et, à la page 147 de la transcription du 4 juillet 2005, Mme Corbin reconnaît que [traduction] « maintenant, on est de plus en plus directif » .

[119]        À la page 148 de la transcription du 4 juillet 2004, Mme Corbin reconnaît que la question 3 est directive.

[120]        De plus, à la page 149 de la transcription du 4 juillet 2005 , Mme Corbin indique que [traduction] « 45 % des personnes ont répondu "Agua ", ce qui devrait alors être pris en considération. Certaines personnes ne faisaient que lire, je m'en excuse » .

[121]        Il est donc évident que des répondants ont simplement indiqué le nom figurant sur la dernière annonce publicitaire qu'ils avaient vue (toujours l'annonce de produits Jaguar de Remo).

[122]        La question 4 figure à la page 12 de la pièce DT4.4 : [traduction] « Que savez-vous des produits de cette entreprise, le cas échéant? (Précision) Y a-t-il autre chose? Quels sont, selon vous, les produits qui pourraient être décrits ainsi? » .

Comme il est indiqué à la page 12, la question 4 avait pour objet de clarifier les réponses ambiguës données à la question 3, en raison de la possibilité que certaines personnes devinent les noms Jaguar ou Remo à partir des mots figurant dans les annonces. Aucune réponse ambiguë n'a été donnée à la question 3, et cette question était une tentative de provoquer des réponses : [traduction] « si une personne avait donné des renseignements pouvant être liés aux produits Jaguar ou Remo, on pouvait conclure qu'elle faisait en fait référence à Jaguar Cars Limited ou à Remo Imports Limited » .

[123]        La réponse « Jaguar » n'est pas ambiguë en elle-même. Les répondants faisaient peut-être référence à un « fabricant de valises Jaguar » . En posant la question 4, les enquêteurs font une suggestion aux répondants afin qu'ils en déduisent autre chose que ce qu'ils avaient déjà répondu.

[124]        Le tableau 4A, à la page 13 de la pièce DT-4.4, contient les réponses détaillées données à la question 4. On peut également souligner, selon les renseignements présentés à la page 13, que la question 9d a été ajoutée en cours d'entrevue, afin de demander à ceux ayant simplement répondu « Jaguar » à la question 3 s'ils faisaient référence à la même entreprise que celle offrant des voitures Jaguar, ou à une autre entreprise. La question a été posée uniquement aux personnes ayant répondu « Jaguar » à la question 3. La question 9d est libellée comme suit :

[traduction] J'ai une dernière question à vous poser au sujet de l'annonce publicitaire. Vous avez dit plus tôt que vous pensiez qu'une entreprise nommée Jaguar était derrière cette annonce. Vouliez-vous dire qu'il s'agissait de la même entreprise que celle offrant les voitures Jaguar, d'une entreprise différente de celle offrant des voitures Jaguar, ou d'autre chose?

La question 9d est très suggestive et tendancieuse, et il s'agit d'une question fermée. Par ailleurs, ajouter une question en cours de sondage pour obtenir des précisions au sujet de réponses données antérieurement n'est pas une pratique normale dans le cadre d'un sondage.

[125]        Le tableau 4b, à la page 14 de la pièce DT-4.4, est un résumé des résultats concernant les associations faites avec Jaguar, dans le groupe Jaguar, selon la première impression se dégageant de l'annonce. Les réponses à la question 9d sont incluses dans ces résultats, et les données figurant dans ce tableau sont très discutables, compte tenu, en particulier, de la nature de la question 9d.

[126]        La question 7, à la page 19 de la pièce DT-4.4, est très suggestive. La question aurait pu être formulée ainsi : « Connaissez-vous une entreprise du nom de "Jaguar"? » , sans ajouter « qui fabrique des voitures » .

[127]        La question 8 et le tableau 8 contenant les résultats détaillés obtenus à cette question sont présentés à la page 19 de la pièce DT-4.4, et mention est faite des questions 260 et 261, à la page 163 de la transcription du 7 juillet 2005, ainsi que des questions 264 et 265, à la page 164, libellées comme suit :

[traduction]

Q. [260] La question 8 était la suivante :

Quels mots utiliseriez-vous pour décrire les voitures Jaguar?

On - on! - l'enquêteur fait précisément référence aux voitures Jaguar?

R. Oui.

Q. [261] Bon. Si l'on examine les sections horizontales du tableau 8, vis-à-vis du terme « fiable » , on lit six pour cent (6 %) pour la condition Jaguar. C'est exact?

R. C'est exact.

Q. [264] Bon. Si vous me suivez, plus bas dans le tableau 8, quelques sections horizontales plus bas, il y a une colonne intitulée « marque bien connue » , et pour la marque Jaguar, il est indiqué deux pour cent (2 %).

R. C'est exact.

Q. [265] Et cela, après avoir mentionné les voitures Jaguar dans la question?

R. C'est exact.

[128]        Il convient de souligner que les sondages Corbin (outre celui de 1998 sur la notoriété de Jaguar Cars) ont permis de conclure que les répondants établissent un faible lien ou ne voient aucun lien entre les valises et les voitures et, à titre d'exemple, mention est faite des paragraphes 5.12, 5.14, 5,15, 6.10a), 6.13, 6.19, 6.28 et 11.33 du premier mémoire des faits et du droit de la demanderesse, volume 2.

[129]        En particulier, les résultats du sondage mené dans un centre commercial ne sont pas représentatifs des caractéristiques démographiques de la population canadienne. Les annonces de produits Jaguar et Agua ont été présentées en dernier aux répondants, de sorte qu'elles étaient celles dont les répondants se souvenaient le mieux. On pourrait même se demander s'il était nécessaire de présenter aux répondants les deux premières annonces, avant celles des produits Jaguar et Agua.

[130]        La jurisprudence sur l'admissibilité de la preuve par sondage, qui se trouve aux pages 64 à 76 du premier mémoire des faits et du droit de la demanderesse, volume 2, s'applique aux quatre sondages Corbin. Voici quels sont les critères établis par la jurisprudence en général :

a)          Si et seulement si l'échantillon est choisi de manière appropriée, on pourra affirmer que les opinions exprimées par les personnes formant l'échantillon sont représentatives de tout l'univers (Disney)[3].

b)          Les questions doivent être formulées d'une façon qui ne suggère pas les réponses que souhaitent obtenir le commanditaire du sondage (Disney, ci-dessus).

c)          Le sondage ne doit pas obliger l'enquêteur à porter un jugement subjectif au moment de catégoriser les réponses données (par exemple, l'usage des termes « cher » , « personnes riches » , etc.) (Disney, ci-dessus).

d)          On doit interroger le bon consommateur (McDonald's)[4].

e)          Un sondage mené 12 ans après les dates pertinentes pour l'évaluation de l'absence de confusion ne peut être considéré comme représentatif de la réponse d'un Canadien moyen d'intelligence ordinaire (Seagram)[5].

f)           Nous ne savons rien du degré d'instruction des personnes interrogées, nous ne savons pas si elles savent lire, si elles souffrent d'incapacités physiques ou si elles travaillent au centre commercial ou en sont des clients. Dans ces conditions, la force probante des résultats me paraît très limitée. Une étude aussi limitée dans le temps, comme d'ailleurs dans l'espace, puisqu'elle a été effectuée dans une seule ville au Canada, est très peu représentative (Seagram, ci-dessus).

g)          Dans le cadre du sondage [traduction], « [...] l'enquêteur [...]doit décider si la personne interviewée témoigne d'une certaine hésitation, ce qu'il ne peut faire qu'en interprétant la réponse obtenue. On n'a apporté aucun élément de preuve sur les antécédents, les connaissances ou l'expérience des enquêteurs. La même réponse, donnée par un individu quelconque, peut recevoir autant d'interprétations différentes qu'il y a d'enquêteurs, selon l'intelligence, la formation ou l'expérience de chacun. Il serait certainement hasardeux d'admettre des preuves fondées sur autant de facteurs inconnus ou variables » (Seagram, ci-dessus).

h)          Les personnes interviewées n'ont pas comparu, et il serait extrêmement onéreux pour une partie de constituer, à ce stade des procédures, un dossier complet sur chacune des personnes interviewées (Salada Foods)[6].

i)           Le sondage comportait des lacunes flagrantes et déterminantes qui nuisent considérablement à sa pertinence. Les résultats du sondage en ce qui concerne l'allégation d'un lien entre les marchandises et les services des parties étaient tout à fait inconséquents. En outre, aucune preuve de confusion n'a été faite, et ce, sur une période de 10 ans de coexistence entre les marques des parties. La seule conclusion qu'on pouvait tirer du sondage était que la marque de commerce de l'opposante était très bien connue ou célèbre, facteur dont le registraire avait tenu compte dans sa décision. La célébrité d'une marque n'était que l'un des facteurs devant être pris en considération dans l'évaluation de la confusion. Ce n'est pas parce la marque de l'opposante était célèbre qu'il fallait automatiquement présumer qu'il y aurait confusion. La question pertinente n'était pas de savoir s'il existe, dans l'abstrait, une probabilité raisonnable de confusion entre les marques. On devait plutôt se demander si l'emploi de la marque de l'auteur de la demande incitait les consommateurs à conclure que les marchandises ou les services portant l'une ou l'autre des marques provenaient de la même source ou étaient autrement liées (Mattel)[7].

j)           Les questions suggestives ne devraient pas être permises (Mattel, ci-dessus).

k)          En ce qui concerne le traitement des sondages réalisés longtemps après la période pertinente pour ce qui est de déterminer la confusion, l'affaire Seagram est la plus pertinente. Cette affaire a été citée dans une décision subséquente de la Commission des oppositions des marques de commerce, John Labatt Ltd.c. Miller Brewing Co. (1996), 70 C.P.R. (3d) 351 C.O.M.C., dans le cadre de laquelle la preuve par sondage n'avait pas été admise au motif que le sondage avait été réalisé après le délai pertinent.

Page 361

[traduction] La requérante s'est également fondée sur les affidavits d'Ossip et de Greensmith, qui faisaient état d'un sondage mené pour évaluer la réaction des consommateurs à différentes marques de commerce et descriptions de produit (y compris la marque de commerce LITE Design de la requérante) utilisées en liaison avec la bière. Toutefois, le sondage a été mené en octobre 1991, soit environ six ans après la période pertinente, et c'est pourquoi il ne permet pas de trancher la question de savoir si la marque de la requérante avait ou non un caractère distinctif le 18 novembre 1985.

Rapport de M. Mitch Bergesen (données du BAV; preuve relative au marketing; analyse de régression)

[131]        Les pièces 3, 4, 5, 6, 7 et 8 du rapport de M. Bergesen, pièce DT-11.1, font référence à des mallettes personnalisées, à des valises et à des cartons à chapeaux, à des bagages assortis pour les voitures Mercedes Benz et Porsche, ainsi qu'à des bagages assortis et à des bagages pour voitures de marque Louis Vuitton. Le témoin ne sait pas si les produits illustrés dans ces pièces portaient une marque de commerce, ni s'ils ont été mis en marché au Canada.

[132]        Aux pages 43 et suivantes de la transcription du 8 juillet 2005, à partir de la question 59, par rapport au paragraphe 17 de son rapport, M. Bergesen cite les quatre (4) piliers de toute marque :

a)          différentiation

b)          pertinence

c)          estime

d)          notoriété

[133]        Ces piliers contribuent au succès d'une marque sur un marché donné. On considère que le succès est mesuré en fonction du chiffre d'affaires ou des profits réalisés sur un marché donné.

[134]        En ce qui concerne la pièce 12 de son rapport, M. Bergesen reconnaît qu'à la page 12 de cette pièce, il est indiqué que différents groupes ethniques, comme les Afro-Américains, les Hispaniques et les Asiatiques, ne sont pas entièrement représentés dans l'échantillon. Lorsqu'on lui a demandé si cela avait eu une incidence sur les conclusions tirées à partir des données du BAV, il a reconnu que si les groupes sous-représentés l'étaient de façon importante, les résultats pouvaient trop pencher vers les groupes surreprésentés. Par ailleurs, il a reconnu qu'il est généralement très difficile d'obtenir un nombre suffisant de personnes appartenant à des groupes minoritaires et qu'il en est ainsi, en général, lors des études de marché. Ces groupes sont généralement sous-représentés dans toutes les études de marché. Lorsqu'on lui a demandé si c'était le cas au Canada, il a répondu : [traduction] « J'imagine que oui, mais je n'en suis pas certain » .

[135]        Lorsqu'on lui a demandé s'il existait des données pour le Canada, le témoin a répondu : [traduction] « Je n'ai pas préparé de données sur la représentativité pour le Canada, non » .

[136]        M. Bergesen a reconnu en outre que ces tests statistiques appliqués aux données canadiennes n'ont pas été produits.

[137]        Pour ce qui est de la diapositive 18 de la pièce 17, il convient de mentionner que les données sur le Canada uniquement renvoient aux années 1993, 1997 et 2002, et les données sur les États-Unis uniquement, aux années 1993, 1997, 1999, 2000, 2001, 2002 et 2003. Aux pages 85 et suivantes de la transcription du 11 juillet 2005, mention est faite de la diapositive 20, qui présente les résultats de l'analyse de régression pour l'extrapolation rétrospective, jusqu'en 1980, aux États-Unis. La diapositive 21 indique ces résultats, mais pour le Canada.

[138]        Aux pages 88 et suivantes de la transcription du 11 juillet 2005, mention est faite du paragraphe 43 du rapport de M. Bergesen, à la page 13, qui décrit l'analyse de régression faite par M. Bergesen jusqu'en 1980, et de la pièce 21 de son rapport. Comme premier commentaire d'ordre général, on note que les voitures Jaguar détiennent une faible part de marché par rapport à toutes les autres marques haut de gamme de voitures prises en compte dans l'analyse. À la lumière de la pièce 18 du rapport de M. Bergesen, on note que, sur plus de onze millions (11 000 000) de voitures vendues aux États-Unis en 1980, trois mille vingt-trois (3 023) étaient des voitures Jaguar; dans le seul segment des voitures de luxe, Jaguar a fourni 3 023 des quelques deux cent cinquante mille voitures vendues (250 000), environ un et demi pour cent (1,5 %) du marché des voitures de luxe.

[139]        En ce qui concerne les variables mesurées par M. Bergesen dans le cadre de son analyse de régression, mention est faite du paragraphe 43 de son rapport et de la page 88 de la transcription du 11 juillet 2005, où il affirme :

[traduction] Pour faire une extrapolation jusqu'en mille neuf cent quatre-vingt (1980) de la notoriété de la marque Jaguar, on a analysé la relation entre la notoriété de la marque, mesurée à partir des données du BAV, et le volume unitaire des ventes de différentes marques haut de gamme de voitures pour la période allant de mille neuf cent quatre-vingt-treize à deux mille trois (1993 à 2003). On a élaboré un modèle de prédiction de la notoriété de marque fondée sur le volume unitaire des ventes, au moyen d'une régression des moindres carrés ordinaire.

[140]        L'analyse de régression présentée à la pièce 21 du rapport de M. Bergesen est mentionnée aux pages 91 et suivantes de la transcription du 11 juillet 2005, où il est fait mention du paragraphe 46 du rapport de M. Bergesen.

[141]        M. Bergesen a confirmé qu'il n'avait pas examiné les activités de Jaguar Cars par rapport à l'extension de sa marque à d'autres produits au Canada.

[142]        Il a examiné les enregistrements de marque de commerce fournis par l'avocat, mais il n'a procédé à aucune étude empirique des extensions de marque faites au Canada par quelque entreprise d'automobiles que ce soit, à quelque période que ce soit.

[143]        M. Bergesen a reconnu que différents facteurs pouvaient atténuer la relation pour un constructeur d'automobiles par rapport à un autre. Cela dit, pour les besoins de l'analyse de régression, qui visait à obtenir une confirmation ou une infirmation du degré de notoriété, l'hypothèse selon laquelle il pouvait se fonder sur des points de données pour la notoriété et le volume unitaire des ventes pour la catégorie des voitures de luxe était suffisamment circonscrite.

[144]        M. Bergesen reconnaît par ailleurs qu'il a pris pour hypothèse que les caractéristiques de grande notoriété et de faible part de marché associées aux marques haut de gamme des voitures de luxe s'appliquent à l'ensemble de l'échantillon, comme l'indiquent les graphiques de la pièce 21, où il a placé les points de notoriété pour chaque modèle de luxe.

[145]        Quant à son analyse, M. Bergesen confirme qu'il s'est fondé sur les données réelles de part de marché pour Jaguar et qu'il n'a posé aucune hypothèse en dehors de cela. Il a pris pour point de départ un coefficient de quatre-vingt-treize virgule vingt-neuf pour cent (93,29 %) comme étant représentatif de ce segment du marché, et il confirme que le degré de notoriété ne sera ainsi jamais en deçà de quatre-vingt-treize virgule vingt-neuf pour cent (93,29 %).

[146]        En l'espèce, la Cour rejette les données du BAV pour les motifs suivants :

a)          L'échantillon utilisé n'est pas représentatif sur le plan démographique, étant donné que les groupes minoritaires et différents groupes ethniques ont été exclus. Comme l'a indiqué M. Bergesen, c'est peut-être aussi le cas de l'échantillon de la population canadienne.

b)          Selon l'argument de la demanderesse, M. René Darmon a réussi à contester l'analyse de régression de M. Bergesen. M. Darmon présente un résumé de ses conclusions au paragraphe 16 de son rapport.

            La méthodologie décrite est fondée sur les hypothèses judicieuses implicites présentées ci-dessous.

(i)          Pour toutes les marques haut de gamme confondues de voitures, y compris Jaguar, la même relation sous-jacente existe entre la notoriété de la marque et les ventes. De cette façon, on ne tient pas compte de l'effet de différenciation probable des activités de commercialisation de ces marques, présentes sur les mêmes marchés.

(ii)         Une relation linéaire est établie entre la notoriété de marque et le volume des ventes. De solides fondements théoriques permettent de contester cette approche : la notoriété de marque devrait s'accroître à un taux marginal décroissant en fonction du volume des ventes. Des fonctions concaves devraient normalement illustrer de façon plus fidèle ce genre de relation.

(iii)        Dans le temps, le marché canadien suit exactement la même tendance que le marché américain, mais avec un certain délai. Peu d'explications ont été données quant au bien-fondé de cette hypothèse et à la raison pour laquelle on pourrait penser qu'une tendance observée empiriquement à un moment donné puisse avoir été la même 13 ans auparavant.

Données et méthode d'analyse

(i)          L'ensemble de données utilisé pour l'analyse est composé d'observations (les marques) et de données chronologiques. Voilà qui diverge de l'une des hypothèses de base de l'analyse de régression, soit que les observations sont le résultat de tirages indépendants dans une population mère. Cela ne devrait pas avoir d'incidence marquée sur les résultats de l'équation de régression, mais on ne peut en dire autant au sujet de l'exactitude des prévisions.

(ii)         En outre, on peut se demander si la régression de la notoriété de marque sur le volume des ventes est satisfaisante sur le plan intellectuel. Cette régression implique que la notoriété de marque est une conséquence des ventes. Comme il est indiqué, les ventes sont une conséquence de la notoriété de marque, et non l'inverse. Manifestement, cette méthodologie a été adoptée parce qu'autrement, le modèle n'aurait pu être appliqué pour faire des prévisions. Cela dit, si la régression avait été faite dans le bon sens, l'équation de relation aurait été différente, mais la relation aurait conservé la même force. Il est néanmoins évident qu'on aurait obtenu des résultats plus convaincants en tenant compte d'un facteur ayant réellement une incidence sur la notoriété de marque, comme les dépenses publicitaires (plutôt que d'une conséquence possible de cette notoriété).

(iii)        On pourrait faire valoir que la direction du lien de causalité importe peu, pourvu qu'une relation existe entre les deux variables. C'est vrai lorsque la relation est étroite, ce qui n'est définitivement pas le cas ici. De fait, le volume des ventes « explique » seulement 8 % de la variation de la notoriété de marque. Comme il a été indiqué, selon des statisticiens, les prédictions établies à partir d'une relation aussi peu étroite (même lorsque cette relation est significative sur le plan statistique, comme c'est le cas ici) ne peuvent donner de résultats fiables. En témoigne ici le modèle estimé (mention est faite de la pièce 21 du rapport de M. Bergesen, en particulier le feuillet intitulé « Knowledge 2 Model, Summary Output, Regression Statistics » ).

(iv)        Le modèle de régression estimé est le suivant :

            Notoriété de marque (en pourcentage) = 93,29 + 0,000211 Ventes (unités)

            Selon ce modèle, la notoriété de marque est très faiblement liée aux ventes.

            Si aucune vente n'est réalisée (V=0) alors la notoriété de marque sera de 93,29 %. Quel que soit le volume des ventes (pourvu qu'il s'agisse d'une quantité réaliste), la notoriété de marque sera seulement légèrement supérieure à 93,29 %. Dans le cas qui nous intéresse, 3 023 voitures Jaguar ont été vendues en 1980, ce qui donne un indice de notoriété de 93,93 % pour la marque (aux États-Unis). Autrement dit, selon ce modèle, la notoriété de marque varie très peu en fonction du volume des ventes. Pourquoi donc se fonder sur le volume des ventes pour établir une prévision de la notoriété de la marque?

            En d'autres termes, toute prévision fondée sur cette formule donnera un pourcentage supérieur à 93,29 %, peu importe le volume des ventes enregistré en 1980. Toute prévision permettra de conclure que l'indice de notoriété moyenne des neuf marques de voitures était élevé entre 1993 et 2003 (environ 90 %). Par conséquent, l'analyse qui a été présentée revient essentiellement à dire ceci : « Un indice de notoriété très élevé était associé à neuf marques de voitures de luxe entre 1993 et 2003 (en moyenne). Ainsi, l'indice de notoriété associé à la marque Jaguar en 1980 (ou à une quelconque autre année) était probablement du même ordre » . Nul besoin de dire qu'un tel énoncé est non fondé.

(v)         On pourrait soutenir que la faiblesse de la relation se traduira automatiquement par un intervalle de confiance accru. Dans ce cas, l'intervalle de confiance au seuil de 0,95 est, pour la valeur estimée, de plus ou moins 9,58 points de pourcentage. En d'autres termes, l'indice de notoriété se situe, compte tenu de cet intervalle de confiance, entre 84,35 et 103,51%. Évidemment, l'indice de notoriété d'une marque ne peut être supérieur à 100 %. Cet intervalle indique clairement que l'écart-type de l'estimation n'est pas constant (alors que c'est une condition essentielle à l'exactitude des prévisions; ce problème est connu sous le nom d'hétéroscédasticité en statistique), et que l'intervalle de confiance calculé au moment de faire les prévisions pourrait être plus grand que ce qui a été présenté. Voilà qui est confirmé à la pièce 2 du rapport de M. Darmon, où il est indiqué que la distribution des résidus de l'équation de régression n'est pas uniforme. Moins le volume des ventes est élevé, plus les résidus sont importants, et réciproquement (un coup d'oeil aux données permet de conclure que le terme d'erreur pourrait être aussi important que +8 ou -25 points de pourcentage lorsque le volume des ventes est peu élevé, par exemple, de 3 023 unités). Si l'on tient pour acquis que le reste de l'analyse est juste, ce que M. Darmon ne croit pas, alors l'estimation la plus conservatrice de l'indice de notoriété est de 68 % (et non de 84 %). Cela dit, il semble que l'analyse soit inexacte, comme il est indiqué dans l'affidavit de M. Darmon.

(vi)        Pour la circonstance, les prévisions faites pour les États-Unis ont été transposées au Canada, une approche qui, nous l'avons déjà mentionné, repose sur une hypothèse lourde de conséquences, soit que les différences observées entre les deux pays entre 1993 et 2003 étaient les mêmes en 1980, soit 13 ans auparavant.

[147]        En ce qui concerne la diapositive 41 de la pièce 17 de M. Bergesen, mention est faite de la réponse donnée par M. Darmon à la question 278, à la page 104 de la transcription du 14 juillet 2005. M. Darmon affirme qu'une telle similarité dans les tendances ne signifie pas nécessairement que la même similarité sera observée pour une marque donnée et une année donnée.

[148]        En ce qui concerne le paragraphe 16(2)e) du rapport de M. Darmon, en particulier la partie du paragraphe où il est indiqué [traduction] « En d'autres termes, l'intervalle de confiance est de 84,35 à 103,51 % pour cette estimation [...] » , mention est faite des questions 285 à 288, aux pages 187 et suivantes de la transcription du 14 juillet 2005, et des réponses de M. Darmon aux questions 666 à 667 de la Cour, aux pages 199 et suivantes de la transcription.

[149]        Toujours en ce qui a trait au paragraphe 16(2)e), particulièrement la partie où il est indiqué que [traduction] « l'intervalle est une indication claire que l'écart-type n'est pas constant » , mention est faite des réponses données par M. Darmon aux questions 705, 722 et 726; en ce qui concerne le problème de l'hétéroscédasticité, encore une fois, mention est faite des réponses données par M. Darmon aux questions 685 et 686, aux pages 208 et suivantes de la transcription du 14 juillet.

[150]        Selon le rapport de M. Darmon, les données qui ont été utilisées n'étaient pas appropriées compte tenu des circonstances, et les techniques de régression et d'extrapolation rétrospective qui ont été appliquées modifient les données d'une telle sorte que les conclusions tirées ne tiennent pas la route.

Le rapport de M. Moorthy

[151]        En ce qui concerne le paragraphe 16(1)a) du rapport de M. Darmon, M. Moorthy répond aux questions 22 à 25, aux pages 62 et suivantes de la transcription du 15 juillet 2005. À la question 25, M. Moorthy décrit comment il atténuerait les préoccupations exprimées par M. Darmon au paragraphe 16(1)a) de son rapport. M. Moorthy admet donc implicitement que l'analyse de régression de M. Bergesen est lacunaire.

[152]        En ce qui concerne le paragraphe 16(1)b) du rapport de M. Darmon, M. Moorthy a répondu aux questions 29 à 31, aux pages 68 et suivantes de la transcription du 15 juillet 2005. Sa réponse à la question 29 a été la suivante :

[traduction]

Q.            À la lumière du paragraphe 16(1) b) de l'affidavit de M. Darmon, comment pourriez-vous régler ce problème?

                    R.        Eh bien, vous savez, il s'agit de vérifications et d'ajustements avec lesquels doit normalement composer toute personne qui tente d'établir le meilleur modèle de régression possible pour un ensemble défini de données.

                   

                    On pourrait se pencher sur la préoccupation soulevée par M. Darmon, soit que la relation pourrait être concave.

                   

                    Cela dit, il existe des façons simples de traiter cette préoccupation. On peut ajouter un terme au carré à la régression et tenter de déterminer quel sera le coefficient de ce terme. Si le coefficient a une valeur non significative, alors on peut conclure que la relation est plutôt linéaire. Si le coefficient du terme mis au carré a une valeur positive...

                   

                    [...]

                    Question 31

                    R. Oui. Comme je le disais, de simples vérifications peuvent être faites pour déterminer si la relation entre la notoriété et le volume des ventes présente une forme concave. D'accord? Ce test est une façon assez simple de le vérifier.

[153]        Il est intéressant de noter qu'en réponse aux critiques formulées par M. Darmon, M. Moorthy suggère d'apporter des modifications à l'analyse de régression de M. Bergesen. Faut-il rappeler que ni M. Moorthy, dans son rapport, pièce DT 17, ni M. Bergesen n'ont apporté les corrections que propose M. Moorthy.

[154]        En ce qui concerne l'observation aberrante, en réponse à la question 59, à la page 79 de la transcription précitée, M. Moorthy a affirmé ce qui suit :

[traduction]

R. Eh bien, en ce qui a trait aux observations aberrantes, il faut déterminer quelle est leur incidence sur la régression.

On souhaite évidemment éviter qu'une observation aberrante change toute la régression, et pour cela, on tente de déterminer... c'est-à-dire que la seule façon de procéder est de déterminer comment les résultats de la régression seraient modifiés si on tenait compte de cette observation aberrante, et dans quelle mesure la courbe de régression se déplacerait si on ne tenait pas compte de cette... de ce qui semble être une observation aberrante.

[155]        En ce qui concerne le paragraphe 16(1)c) du rapport de M. Darmon, la Cour est renvoyée aux réponses données par M. Moorthy aux questions 72, 74, 76, 77 et 78 de la transcription du 15 juillet 2005. Il convient de souligner que, dans sa réponse à la question 78, M. Moorthy a fait état de similarités et de disparités entre les marchés américain et canadien :

[traduction] Il pourrait bien sûr y avoir des différences, que je souhaiterais examiner. Par exemple, il y a des différences climatiques. L'analyse de régression de M. Bergesen n'en tient pas compte.

[156]        En réponse à la question 80 figurant dans la transcription du 15 juillet, on a demandé à M. Moorthy ce qu'il considérait comme des différences importantes entre les marchés du Canada et des États-Unis. Il a répondu ainsi à la question 81 :

[traduction] Je suis désolé, excusez-moi, deux mille trois (2003). La structure était fondamentalement la même, je présume. La différence à laquelle je fais allusion est celle que j'ai également mentionnée dans l'affidavit, soit que le segment des voitures de luxe a enregistré une croissance importante entre mille neuf cent quatre-vingt (1980) et mille neuf cent quatre-vingt-treize (1993) et que de nombreux joueurs ont pénétré le marché. Par exemple, vous savez, nombre des voitures japonaises de luxe offertes en mille neuf cent quatre-vingt-treize (1993) n'existaient pas en mille neuf cent quatre-vingt (1980). Elles existaient en mille neuf cent quatre-vingt-treize (1993), mais non en mille neuf cent quatre-vingt (1980).

[157]        En ce qui concerne le paragraphe 16(2)a) du rapport de M. Darmon, mention est faite des réponses données par M. Moorthy aux questions 84, 85, 86, 87, 88, 89 et 90, à partir de la page 90 de la transcription du 15 juillet 2005. Une attention particulière est portée aux affirmations suivantes de M. Moorthy en réponse à la question 90 :

Page 93

[traduction] La question est de savoir si, en ce qui concerne les termes d'erreur de la régression, l'hypothèse d'indépendance est réfutée ou corroborée.

Page 94

[traduction] [...] le fait qu'il n'y a pas indépendance restreint la possibilité de tirer des conclusions, mais n'affecte en rien la meilleure estimation tirée des données dont on dispose.

[158]        L'affirmation ci-dessus est une critique implicite de l'analyse de régression de M. Bergesen.

[159]        À la question 92, à la page 94 de la transcription du 15 juillet 2005, M. Moorthy est interrogé. On lui rappelle que M. Darmon a dit qu'une régression distincte devrait être faite pour chaque marque et pour chaque année. En réponse à la question 93, M. Moorthy affirme ce qui suit :

[traduction] [...] Comme je l'ai déjà dit, il serait possible d'en tenir compte en utilisant des variables nominales, de tenir compte des aspects temporels des données en ajoutant un terme temporel. C'est faisable.

M. Bergesen n'a pas procédé ainsi dans le cadre de son analyse de régression.

[160]        À la question 94, à la page 97 de la transcription du 15 juillet 2005, on demande à M. Moorthy s'il est courant d'effectuer une régression à partir d'observations réelles, telles qu'elles se présentent. En réponse à la question 96, M. Moorthy affirme :

[traduction] [...] Il y a des façons de tenir compte de problèmes qui peuvent surgir lorsqu'on décide de prendre les données comme elles se présentent. Je veux dire par là que c'est une question d'ordre pratique.

M. Bergesen n'a pas procédé ainsi.

[161]        À la suite de la question 100 posée par la Cour, à la page 99 de la transcription du 15 juillet 2005, la Cour a posé la question 102 suivante : [traduction] « Dans ce cas, se peut-il qu'une situation d'erreur ait été involontairement créée en n'en tenant pas compte de façon distincte » ? La réponse est « oui » .

M. Moorthy a répondu ainsi aux questions 103 et 104 : [traduction] « Bien, je veux dire, vous savez, la modification de la régression pour tenir compte des problèmes soulevés par M. Darmon concernant le fait que les marques sont différentes... est une préoccupation du même ordre que celle dont vous parlez » .

M. Moorthy poursuit à la page 101 : [traduction] « En ce qui concerne les caractères uniques, c'est exactement la raison pour laquelle les variables nominales sont utilisées, pour que les données puissent refléter la possibilité que ces voitures aient un caractère unique » .

[162]        En outre, la Cour lui a posé la question107, libellée ainsi :

[traduction] Exactement. Ainsi, il faudrait déterminer dans quelle mesure on souhaite que les résultats soient groupés et dans quelle mesure on souhaite... qu'ils soient distincts ...

La réponse de M. Moorthy a été la suivante : [traduction] « Absolument » .

[163]        M. Bergesen n'a pas procédé ainsi.

[164]        À la question 112, à la page 102 de la transcription du 15 juillet 2005, M. Wilson interroge M. Moorthy au sujet de la préoccupation exprimée par M. Darmon quant au fait que les années ne sont pas indépendantes. Voir la réponse de M. Moorthy :

[traduction]

R. Oui. Encore une fois, il s'agit de le reconnaître et d'en tenir compte au moment de faire la régression. Bon. Encore une fois, il existe une technique très courante pour composer avec ce genre de problème, et c'est de poser le temps comme variable. Un terme temporel pourrait être inclus pour tenir compte du fait que certaines données sont associées à l'année quatre-vingt-treize (1993), d'autres à l'année quatre-vingt-quatorze (1994), quatre-vingt-quinze (1995), quatre-vingt-seize (96), et ainsi de suite.

De cette façon, le passage du temps peut être reconnu et pris en compte dans la régression, ce qui permettrait très probablement d'éliminer le problème de la non-indépendance des données.

[165]        À la question 122, à la page 107 de la transcription du 15 juillet 2005, on mentionne à M. Moorthy l'affirmation de M. Darmon selon laquelle la notoriété de Jaguar en 1980 ne peut être estimée de façon approximative à partir de l'analyse de M. Bergesen. On demande à M. Moorthy de commenter cette affirmation. Voici la réponse qu'il a donnée :

[traduction] Je crois qu'on peut la déterminer. Je crois, vous savez, que la question de savoir dans quelle mesure on peut se fonder sur cette estimation est toute autre. Bon. Cela dit, on peut certainement la déterminer, et il ne s'agit que d'un élément de preuve parmi de nombreux autres.

[166]        En outre, en réponse à la question 123, à la page 108, M. Moorthy donne la réponse suivante :

[traduction] Bien entendu, dans le cas d'une extrapolation rétrospective, plus on remonte loin en arrière, moins le degré de confiance sera élevé.

[167]        À la question 125, à la page 108 de la transcription du 15 juillet 2005, M. Wilson renvoie M. Moorthy à la page 5 du rapport de M. Darmon, où ce dernier se dit préoccupé par la force de la relation entre la notoriété et les ventes. Lorsqu'on lui demande ce qu'il pourrait faire pour atténuer cette préoccupation, M. Moorthy répond ce qui suit :

            Page 109

[traduction] Souvent, au moment de faire une régression, on règle un problème, on règle de nombreux problèmes. Vous savez, nous avons mentionné différents problèmes dans ce cas, notamment que les marques sont différentes, que les données ne sont pas indépendantes, que huit pour cent (8 %), seulement huit pour cent (8 %) de la notoriété est expliquée par le volume des ventes.

Si on réglait ces deux autres problèmes, je ne serais pas étonné que la valeur du R au carré augmente de façon importante.

La Cour :

Attendez.

Q. [126] Cela ne modifierait-il pas les résultats de façon importante?

R. Cela accroîtrait le degré de confiance accordé aux résultats.

Q. [127] Et cela ne modifierait-il pas les résultats de façon importante?

R. Non, cela ne modifiera pas les... Au fait, cela pourrait les modifier ou ne pas les modifier. Je veux dire, peut-être que oui, peut-être que non.

Q. [128] Mais cela pourrait les modifier?

R. Cela pourrait modifier les résultats.

[168]        À la question 131, à la page 110 de la transcription précitée, lorsqu'on lui demande ce qu'il aurait fait à cet égard, M. Moorthy répond ainsi :

[traduction]

R. Comme je le disais, vous savez, le fait que seulement huit pour cent (8 %) de la variation de la notoriété de la marque est expliquée par le volume des ventes donne à penser qu'il existe d'autres facteurs de notoriété. Bon.

Premièrement, je tiendrais compte du fait qu'il y a une tendance temporelle. Au fil du temps, de plus en plus de personnes connaissent la marque.

J'inclurais donc une variable de temps. Il existe des données à cet égard. Nous avons les données sur la notoriété pour mille neuf cent quatre-vingt-treize (1993), quatre-vingt-quatorze (1994), quatre-vingt-quinze (1995), quatre-vingt-seize (1996), quatre-vingt-dix-sept (1997), et ainsi de suite.

Ainsi, je prendrais en considération que le temps passe et que cela a peut-être une incidence sur la notoriété, et j'en tiendrais compte dans la régression. Je crois qu'en faisait la régression de cette façon, on pourrait expliquer une plus grande part de la variation de la notoriété.

Par ailleurs, en tenant compte des différences liées aux marques, l'ajustement du modèle serait meilleur et on pourrait ainsi expliquer une plus grande part de la variation.

La Cour :

Q. [132] Je suis désolé, à propos du modèle, je n'ai pas compris le mot employé avant « modèle » .

R. Ajustement.

[169]        À la question 135, à la page 111 de la transcription du 15 juillet 2005, relativement au paragraphe 16(2)d) du rapport de M. Darmon, M. Wilson indique à M. Moorthy que M. Darmon a soulevé la question de l'indépendance entre la notoriété et les ventes. On lui demande comment il aborderait cette question.

M. Moorthy répond ainsi :

[traduction] Oui. Vous savez, là n'est pas la préoccupation première. Notre objectif est de déterminer quelle était la notoriété de Jaguar en mille neuf cent quatre-vingt (1980).

La prévision dépend de la méthode utilisée pour ce faire. Je veux dire qu'il n'est pas absolument nécessaire de se fonder sur le volume des ventes. Comme nous avons les données sur le volume des ventes, nous en avons tenu compte.

Comme je l'ai déjà dit, il y a de bonnes raisons de penser que le volume des ventes pourrait de fait avoir une incidence sur la notoriété, en raison de la visibilité que cela entraîne, en plus des autres raisons que j'ai mentionnées plus tôt en ce qui concerne la notoriété et la publicité, entre autres.

Donc, il est certainement souhaitable de tenir compte du volume des ventes, mais si les données indiquent que la relation entre le volume des ventes et la notoriété n'est pas très étroite, alors je n'en serais pas trop affecté. Je répondrais que mon objectif est d'élaborer un bon modèle de régression pour faire une estimation du degré de notoriété en mille neuf cent quatre-vingt (1980). Il y a plusieurs façons de procéder, oui. D'accord ...

[170]        À la question 137, à la page 114, M. Wilson demande à M. Moorthy de commenter l'affirmation selon laquelle M. Bergesen n'a pas utilisé les outils les plus récents dans le cadre de son étude. Il répond ce qui suit :

[traduction] Eh bien, la régression est un outil de base encore utilisé. En ce sens, il s'agit d'une technique récente. Bien entendu, des améliorations sont sans cesse apportées à cet outil.

Certes, j'examinerais d'abord la façon dont M. Bergesen a effectué la régression, mais j'irais plus loin en apportant des modifications au modèle, entre autres. Je ne sais pas si mon opinion serait la même en bout de ligne, mais j'explorerais différentes avenues.

[171]        En ce qui concerne les questions de la Cour mentionnées aux pages 119 et suivantes de la transcription du 15 juillet 2005 (questions 148 à 157), quant à savoir ce qu'aurait pensé M. Moorthy si un étudiant lui avait présenté le rapport de M. Bergesen, les réponses sont présentées à la suite des questions 148 à 157 susmentionnées, particulièrement à la suite de la question 151 (page 120), où il affirme : [traduction] « Oui, je lui demanderais de faire les vérifications qui s'imposent pour la régression » . À la question 152 (page 120), il répond :

[traduction] Selon la disposition des résidus, vous savez; les termes d'erreur; la disposition des résidus; l'apparence du graphique. Semble-t-il y avoir hétéroscédasticité? Y a-t-il indépendance entre les termes d'erreur? La relation entre les ventes et la notoriété est-elle linéaire? Bon.

Toutes ces préoccupations, vous savez, devraient être prises en compte en faisant une distinction, comme je l'ai déjà dit, entre le fait d'obtenir les meilleures estimations possibles de la notoriété et celui de tirer des conclusions au sujet de la validité de ces estimations, ou au sujet de la variation des estimations.

Ainsi, je lui demanderais de faire ces vérifications pour déterminer si cela entraîne une différence. À ce stade, je ne connaîtrais pas la réponse, mais je lui demanderais de faire la vérification.

[172]        À la question 159, à la page 122 de la transcription du 15 juillet 2005, M. Wilson renvoie M. Moorthy au paragraphe 16(2)e) du rapport de M. Darmon au sujet de l'hétéroscédasticité et du R au carré. On demande à M. Moorthy comment il composerait avec ces problèmes. Il répond :

[traduction] [...] Encore une fois, il existe des façons de corriger cela, et il s'agit de techniques de base utilisées depuis des dizaines d'années. Vous savez, dans le cas qui nous intéresse, je dirais que, vous savez, en ayant... en apportant des ajustements pour tenir compte du fait que les marques sont différentes, au moyen de variables nominales, et en apportant des ajustements pour tenir compte de la présence d'une série chronologique en posant le temps comme variable, la situation serait nettement meilleure.

[173]        À la question 162, à la page 127 de la transcription du 15 juillet 2005, M. Wilson indique à M. Moorthy que M. Darmon s'est dit très préoccupé par le fait que la limite supérieure de l'intervalle de confiance pouvait être supérieure à cent pour cent (100 %), et il lui demande de se prononcer sur la question. Voici les commentaires de M. Moorthy :

[traduction] Eh bien, oui, c'est le cas ici, parce que, bien sûr, vous savez, il s'agit de pourcentages, et les pourcentages supérieurs à cent pour cent (100 %) n'ont manifestement aucun sens [...]

[...] Encore une fois, on aurait pu faire en sorte que les estimations ne soient jamais supérieures à cent pour cent (100 %) ou inférieures à zéro pour cent (0 %). Il eut fallu apporter une autre modification à la régression [ ...]

[174]        À la question 230, aux pages 142 et suivantes de la transcription, on demande à M. Moorthy de donner son avis concernant l'effet cumulé des critiques formulées par M. Darmon à l'égard des résultats de M. Bergesen. À la page 143, M. Moorthy répond ce qui suit :

[traduction] Comme je l'ai dit, il y a des façons de répondre à ces critiques. Si j'avais le temps, je referais la régression pour déterminer quels sont les effets des éléments mis en cause et pour trouver un moyen de les contourner.

[175]        M. Erich Joachimsthaler a examiné les données du BAV pour la période de 1993 à 2004. Son témoignage n'est pas pris en compte, et ce, pour les mêmes motifs que ceux mentionnés pour M. Bergesen.

[176]        En résumé, le témoignage de M. Moorthy valide le rapport de M. Darmon et invalide l'analyse de régression de M. Bergesen. Ainsi, la Cour ne devrait pas tenir compte de l'analyse de régression de M. Bergesen.

Le sondage de Landor

[177]        Le sondage de Landor fait exception. Ce sondage n'a pas été effectué pour les besoins de l'espèce, et sa validité a été démontrée. En effet, c'est le seul sondage qui a été mené dans les années 80 pour obtenir des renseignements au sujet des années 80 (et non un sondage effectué des années après les faits étudiés).

[178]        Dans les années 80, le sondage de Landor a fait figure de révolution pour l'étude des marques du point de vue du consommateur[8]. En 1988, un article du Wall Street Journal portant sur un sondage de Landor a circulé au Canada. Cet article cite les résultats du sondage effectué en 1988, où il est indiqué que la marque de commerce JAGUAR de Jaguar Cars figure au 17e rang [traduction] « mondial des marques de commerce pour ce qui est du degré de notoriété et du prestige, selon un sondage effectué auprès de 3 000 consommateurs » . La marque de commerce JAGUAR figurait tout juste derrière NESTLE et ROLEX, et tout juste avant XEROX, LIPTON et HILTON[9].

ConclusionS de la COUR concernant LA PREUVE PAR sondage

[179]        En tant que juge des faits, la Cour a eu l'avantage distinct, en l'espèce, d'entendre tous les témoins et, au besoin, de les interroger, y compris les experts mentionnés précédemment.

[180]        Ainsi, la Cour a conclu qu'elle n'est pas d'accord avec la méthodologie utilisée par les experts des défenderesses, à cause justement de cette méthodologie et seulement pour cette raison, appuyant plutôt les critiques formulées par les témoins experts de la demanderesse. La preuve par sondage des défenderesses, dans les moindres détails, au fur et à mesure qu'elle a été produite, jour après jour, heure après heure, longuement, a peut-être semblé, au tout début, capable de permettre l'examen des questions fondamentales, mais après analyse, on a constaté qu'elle avait, essentiellement, peu ou pas d'importance (si ce n'est qu'à l'occasion, qu'elle faisait état de principes généraux de marketing confirmés et nuancés par d'autres éléments de preuve, la doctrine et la jurisprudence).

[181]        Toutefois, les témoins des défenderesses, outre leurs témoins experts, ont produit des éléments de preuve clés concernant la renommée de Jaguar Cars au Canada et ailleurs pendant les périodes pertinentes, ainsi que d'importants renseignements sur les dates et les emplacements de la percée fort bien documentée de Jaguar Cars sur le marché des accessoires.

FAITS DÉTAILLÉS

Les ventes de Jaguar Cars depuis 1936

[182]        Jaguar Cars vend des voitures et des accessoires d'automobile en liaison avec la marque JAGUAR dans 95 pays du monde, y compris au Canada, et ce, sans interruption depuis 1936[10]. Jaguar Cars est connue comme constructeur de voitures sport (de course) depuis 1936[11].

[183]        Jaguar Canada reçoit ses produits (voitures, accessoires d'automobile, pièces d'automobile et accessoires personnels) de Jaguar Cars et de ses licenciés, comme Unipart Group Unlimited et Jaguar U.S., puis elle les vend à ses concessionnaires autorisés partout au Canada, qui les vendent à leur tour aux consommateurs[12].

[184]        Au Canada, les ventes de voitures ont enregistré une croissance stable, passant d'environ 220 en 1950 à environ 300 en 1980[13].

[185]        Selon les prix de vente connus en Angleterre et au Canada, les ventes se sont accrues à un rythme plutôt stable, passant d'environ 50 000 $ en 1950 à environ 10 millions de dollars en 1980[14].

Les voitures Jaguar sont considérées comme des véhicules de luxe

[186]        Pour le grand public, les voitures Jaguar sont perçues comme des produits de luxe. Les parties s'entendent pour dire que Jaguar est une marque connue de voiture de luxe au même titre que Mercedes-Benz, BMW, Lexus, Infinity, Porsche, Volvo, Audi, Bentley, Rolls Royce, Saab, Ferrari et Aston Martin. Les parties conviennent qu'une voiture de luxe possède différentes caractéristiques de luxe, c'est-à-dire des caractéristiques qui ne sont pas nécessaires à la conduite mais qui accroissent le plaisir de conduire... leur prix est généralement supérieur à 40 000 $ (en dollars de 1997)[15].

[187]        Les témoins de Jaguar Cars ont fait état des mesures prises par Jaguar Cars pour garder son image de marque et l'image de ses voitures pour ce qui est de l'origine, du raffinement, de la fabrication et du rendement. En achetant une voiture de Jaguar Cars, le consommateur affiche sa richesse et son statut, ainsi que son souci de la conception et du rendement. La Jaguar E, qui a vu le jour dans les années 60, a été décrite comme la plus belle voiture au monde, et elle est exposée au Museum of Modern Art. [traduction] « C'était tout simplement une merveille[16]. »

[188]        Remo a produit des éléments de preuve relatifs à des problèmes de qualité observés à la fin des années 70 et au début des années 80, mais rien n'a permis de conclure que cela a nui à l'image de richesse et de qualité qu'évoque la marque Jaguar pour les consommateurs.

[189]        C'est plutôt le contraire que l'on constate en lisant quelques-uns des articles de journaux et de magazines parus au cours des années 80, dont l'exactitude a été confirmée par MM. Mackie et Robertson. Par exemple[17] :

(1)         [traduction] « Ils construisent d'excellentes voitures, mais, vous savez, il est évident qu'en achetant une Jaguar, vous n'achetez pas seulement une voiture, mais aussi l'image qui y est associée. Vous achetez un mode de vie, vous achetez une image de vous-mêmes[18]. »

(2)         [traduction] « Peu de véhicules évoquent le prestige autant que Jaguar. Le nom et la voiture évoquent la douce volupté féline et ont une telle marque de pouvoir qu'à leur simple mention, on s'imagine roulant le long de la Côte d'Azur, un soir de pleine lune, ou parcourant Rodeo Drive, à Beverly Hills. Oui, le nom a quelque chose de magique, et la voiture Jaguar aux courbes les plus séduisantes était le modèle E, aussi connu sous le nom de XKE, offert à partir de 1961. » [traduction] « Le rendement du modèle E était, bien sûr, aussi élevé que ce à quoi on pouvait s'attendre d'une Jaguar. Dans son numéro de septembre 1961, Road & Track présente les résultats d'un essai routier du modèle E et, à titre de comparaison, du modèle XK[19]. »

(3)         [traduction] « Avis aux passionnés qui participeront à la rencontre au Guild Inn : la Jaguar n'est pas seulement une machine, c'est une légende. Avec ses courbes semblant sortir de l'espace, le dernier grand modèle de Jaguar, le modèle E, a créé tout un émoi dans l'industrie de l'automobile lorsqu'il a été présenté en 1961. Lorsque Jaguar a construit la dernière Jaguar E, en 1974, ce modèle était déjà considéré comme un classique. » [traduction] « Dans les années 60 et 70, la pose à côté d'une Jaguar était le passage obligé des starlettes. Dans la littérature populaire, au cinéma et à la télévision, les héros machos draguaient à bord de leur Jaguar E, une voiture synonyme de pouvoir, symbole de leur virilité et de leur vie trépidante. De grands coureurs. La légende de Jaguar a été nourrie dans les années 50 et 60, période grisante au cours de laquelle la marque a été associée à des grands de la course automobile tels Stirling Moss, Phil Hill et Jackie Stewart[20]. »

Les voitures JAGUAR étaient célèbres en 1980 et en 1991, et elles le sont toujours

[190]        Selon les éléments de preuve, les voitures JAGUAR étaient déjà célèbres au Canada en 1980 et en 1991, elles le sont toujours. Mentionnons les faits convenus, les témoignages ainsi que la preuve des activités de promotion et de la renommée.

Les faits convenus

[191]        Les parties ont convenu que Jaguar Cars possédait tous les droits sur une famille de marques de commerce déposées distinctes comprenant le mot JAGUAR ou le dessin d'un jaguar, notamment le droit d'autoriser d'autres entités à vendre des marchandises portant ces marques[21]. Ces marques sont reproduites aux annexes A et B de la défense et demande reconventionnelle modifiée. D'autres faits convenus sont mentionnés ci-après.

activités de promotion à l'échelle mondiale

[192]        Jaguar Cars fait de la publicité et organise des activités de promotion des voitures JAGUAR depuis plus de 60 ans, sur le marché international[22].

[193]        Jaguar Cars possède des enregistrements de la marque de commerce JAGUAR pour des voitures dans environ 95 pays, outre le Canada. Ces enregistrements ont été respectés dans des pays comme les États-Unis, Singapour, la Suède, l'Arabie saoudite et la Chine, généralement au motif que la marque est très bien connue[23].

[194]        Sur le marché mondial, divers outils de promotion ont été utilisés pour les voitures Jaguar, notamment les suivants : salons de l'automobile, courses automobiles, brochures, segments de presse, publicités par la presse, activités spéciales, radio, télévision et cinéma, réimpressions de publicité, manuels de ventes et manuels automobiles[24].

Promotion AU Canada

[195]        Les faits convenus ci-dessous constituent à eux seuls une preuve claire d'importantes activités de promotion de Jaguar Cars au Canada, avant et après 1980.

(1)         Jaguar Cars fait de la publicité et de la promotion de voitures portant la marque de commerce JAGUAR depuis plus de 60 ans au Canada[25].

(2)         Jaguar Cars fait la promotion de voitures et/ou d'accessoires et de pièces d'automobiles en liaison avec la marque de commerce JAGUAR depuis au moins 1970 au Canada, par les moyens suivants. Les pièces et les présentations mentionnées ci-dessous en font état.

a)          Messages publicitaires et/ou émissions dans les stations de radio et de télévision, notamment : The Sports Network (TSN); CBC Newsworld; journaux télévisés de stations locales de Toronto (Ontario); TVO; Bravo; CFTO; CBLT; CBMT; CFCF; BCTV; CBUT (VSA4.90).

b)          Publicités imprimées

(i)          dépliants publicitaires (VSA4.1);

(ii)         publicités dans les pages jaunes (VSA4.14);

(iii)        circulaires de ventes (VSA4.1); tapis promotionnels (VSA4.8);

(iv)        communiqués de presse (VSA4.10); encarts pour magazines (VSA4.100);

(v)         publicités dans des journaux : Financial Post Marketplace; Financial Times; Financial Post (édition hebdomadaire); Financial Post (édition quotidienne); Financial Times; Toronto Star; Calgary Herald; Ottawa Citizen; Le Soleil (Québec); Les Affaires; Record (Kitchener/Waterloo); London Free Press; Sarnia Observer; Winnipeg Free Press; Edmonton Journal; Victoria Times Colonist; Western Living; Les Affaires; Globe & Mail; Canadian Jewish News; Montreal Gazette; La Presse (Montréal); Vancouver Province; Vancouver Sun; Vancouver Courier; Halifax Mail Star; Windsor Star; Saskatoon Star Phoenix; Kelowna Daily Courier; North Shore News; Richmond Review (VSA4.9);

(vi)        publicités dans des magazines : Macleans; Time; Canadian Business; ROB Magazine; Inside Guide; Canadian; Privilege; Travel on Business; Saturday Night; L'Actualité; Revenue Commerce; Inter Canadian; EnRoute; Financial Post Magazine; Financial Post Special; Financial Post 500; Financial Commerce; Le Magazine Affaires; Financial Post Marketplace; Financial Post Moneywise; Financial Times; Equinox; Revenue Commerce; Altitude; Vista; City & Country Home; MTL Magazine; Elegant Life; Toronto Life; Punch Doctor; Score; magazine de Tennis Canada; magazine de la Royal Winter Fair; Domino; Point of View; Point de View; programme du Canadian Geographic Royal Horse Show; Western Living; Commerce; Le Magazine Affaires; Canadian Lawyer; Business Quarterly; Revue Commerce; Decormag; Mississauga Business Report Magazine; Car Guide/Buyer's Guide (en français et en anglais); West Van Lifestyles; Canadian Art; Performance; B.C.C.T.C.; World of Wheels; Luxury Car Guide; Autovision; Cinema Guide; Canadian Inflight Magazine; Car Guide; Tennis; programme vidéo du Club Empress; World Economic Affairs; Road & Track; Car & Driver; Motor Trend; USA Today (VSA4.12);

(vii)       calendriers (VSA4.12);

(viii)       bannières (VSA4.25);

(ix)        brochures pour salons de l'automobile et présentoirs d'accessoires (VSA7.4);

(x)         encarts pour relieurs et imprimés de petit format (J28);

(xi)        panneaux d'affichage.

c)          Drapeaux (VSA4.19).

d)          Vidéos distribués par publipostage (VSA4.99).

e)          Films et vidéos prêtées aux clubs Jaguar.

f)           Salons de l'automobile annuels des principales villes et des principaux centres régionaux (VSA4.5).

g)          Salon Canadian National Sportsman (VSA4.6).

h)          Présentoirs pour salles d'exposition (VSA4.25).

i)           Activités de bienfaisance, notamment des défilés (VSA4.12; affidavit de M. Manuel, paragraphe 8).

j)           Courses (VSA4.40).

k)          Internet (BM1.1).

l)           Manuels comme ceux mentionnés à la pièce BM10[26].

3)          Entre 1970 et 1997, Jaguar Cars et Jaguar Canada ou ses prédécesseurs ont fait publier plus de 270 publicités de voitures Jaguar en liaison avec la marque de commerce JAGUAR dans le Montreal Gazette[27].

4)          Les voitures de Jaguar Cars portant la marque de commerce JAGUAR ont remporté la victoire au Mans, célèbre course d'endurance ayant lieu chaque année en France, en 1951, 1953, 1955, 1956, 1957, 1988 et 1990, ainsi qu'au Championnat du monde des voitures de sport en 1988 et en 1991[28].

5)          Jaguar Canada ou ses prédécesseurs ont offert en vente leurs automobiles portant la marque de commerce JAGUAR lors de salons annuels de l'automobile ouverts au public, et ce, dans les principales villes et les principaux centres régionaux du Canada, notamment le Toronto Sportsmen's Show dans le cadre de la Canadian National Exhibition, entre 1960 et 1972, le Toronto International Automobile Show depuis 1972 et le Salon international de l'automobile de Montréal depuis ses débuts, en 1969[29].

6)          Les voitures Jaguar sont mentionnées dans des magazines d'automobiles publiés au Canada depuis au moins les années 50[30].

7)          Depuis au moins 1967, Jaguar Canada Inc. et ses prédécesseurs et successeurs ont recours aux services d'agences de publicité pour faire la promotion au Canada de voitures portant la marque de commerce JAGUAR, notamment par la voie de journaux, de magazines et de la radio[31].

[196]        Selon les éléments de preuve présentés par MM. Mackie, Green, Robertson, Cox et Maries et à la lumière d'autres faits convenus, la promotion des voitures Jaguar a été faite avant et après 1980, notamment : promotion en général[32]; journaux[33]; magazines[34]; sites Web[35]; activités promotionnelles[36]; courses[37]; salons de l'automobile et autres salons[38]; brochures[39]; agences de publicité[40]; dépliants[41]; promotions faites par les concessionnaires[42]; publipostage[43]; bulletins de ventes[44]; pages jaunes[45]; communiqués de presse[46]; manuels[47].

La preuve de la réputation

[197]        D'autres solides éléments de preuve de source indépendante indiquent que la marque de commerce JAGUAR de Jaguar Cars était bien connue, voire célèbre, en 1980 et en 1991, et qu'elle l'est encore aujourd'hui.

[198]        Les faits convenus et le témoignage de MM. Mackie, Robertson, Maries et Clausager indiquent qu'une grande quantité de documents faisant référence au passé et au présent de Jaguar Cars ont circulé dans le grand public au Canada, notamment : articles de journaux depuis les années 40[48]; livres, dont certains ont été publiés avant 1980[49]; magazines[50]; films où figurent des voitures Jaguar, dont nombreux ont été présentés avant 1980[51]; vidéos[52]; documents de clubs automobiles créés en 1959 ou après[53]; sites Web[54], CD-ROM[55], brevet de fournisseur de la cour[56]; cartes postales[57]; cartes d'anniversaire[58].

[199]        Même des articles de journaux publiés dans les années 80 et 90 font état de la notoriété de la marque avant 1980, par exemple :

(1)         [traduction] « Jaguar, un nom célèbre sur le marché des voitures de luxe [...] » (Globe & Mail, 1984][59]

(2)         [traduction] « L'illustre constructeur britannique s'est dissocié de British Leyland en 1984 [...] » (Toronto Star, 1988)[60]

(3)         [traduction] « Auto/Jaguar, depuis longtemps une marque prestigieuse de voitures de luxe » [Globe & Mail, 1992][61]

[200]        Bien au-delà d'une centaine de livres ont été publiés au sujet de Jaguar Cars[62]. Au nombre des livres publiés avant 1980 figurent les suivants : Kenneth Ullyett, The Jaguar Companion, Stanley Paul Publishing, Londres, 1959[63]; Lord Montagu of Beaulieu, Jaguar: A Biography by Lord Montagu of Beaulieu, 3e édition, Cassell & Company, Londres, 1967[64]; Joseph Wherry, The Jaguar Story, Chilton Book Company, Philadelphie, 1967[65]; The Complete Official Jaguar "E", Robert Bentley Publishing, Cambridge (Massachusetts), 1970[66]; Chris Harvey, The Jaguar XK, Oxford Illustrated Press, Oxford (Angleterre), 1978[67]; Chris Harvey, E-Type: End of an Era, St. Martin's Press, New York, 1977[68].

[201]        Même des livres publiés après 1980 font clairement état de la réputation dont jouissait la marque JAGUAR avant 1980, notamment : Jonathan Wood, Jaguar, the Legend, Paragon Books, Bristol (Angleterre), 1997[69]; Philip Porter, Jaguar History of a Classic Marque, Quintet Publishing, 1988[70]; Andrew Whyte, Jaguar, The Definitive History of a Great British Car, Patrick Stephen Limited, 1980[71]; Jaguar, Lord Montagu of Beaulieu, préface du Prince Michael of Kent, 6e édition,Quiller Press, Londres, 1986.[72].

[202]        M. Craig Manuel a vu des voitures Jaguar dans différents films. Il s'est fondé sur un guide cinématographique reconnu pour déterminer les dates de distribution de ces films. Sept ont été distribués avant 1980[73]. Il est admis d'office que ces films ont également été distribués vers ces dates au Canada.

Jaguar Cars a des activités LIÉES À des accessoires personnels, y compris des articles de bagage, depuis au moins les années 50

[203]        Jaguar Cars a depuis longtemps des activités liées à des accessoires personnels. Des valises sont offertes dans les catalogues et les manuels de pièces de Jaguar Cars depuis au moins les années 30, et elles sont envoyées aux concessionnaires du Canada depuis au moins les années 50. Par exemple, le Canada est mentionné dans la pièce VS101, un catalogue de pièces de rechange de 1949 réimprimé en 1958, ainsi que dans la pièce J110, un catalogue de pièces de rechange de 1950 réimprimé en 1958. Selon M. Green, Jaguar Canada avait ce genre de document en sa possession en 1968[74]. Les parties ont convenu du fait que des documents ayant circulé au Canada dans les années 50 font mention de valises de Jaguar Cars[75].

[204]        Des pochettes pour documents de voiture portant la marque JAGUAR, comprenant les manuels d'utilisation et d'autres documents du même type, sont fournis avec les voitures Jaguar depuis les années 50[76]. Des modèles réduits de voitures sont vendus depuis les années 50. Le coffre de certains de ces modèles réduits est muni de valises amovibles[77]. Des chaînettes pour porte-clés en cuir portant la marque de commerce JAGUAR sont offertes depuis les années 60[78]. Parmi les autres accessoires personnels vendus par Jaguar Cars au Canada depuis au moins les années 70 figurent les suivants : sacs de voyage, briquets, stylos, vêtements, polos, tee-shirts, chapeaux, vestes, allume-cigarettes, pinces à billets, cravates, ceintures, épingles à cravate et boutons de manchettes[79].

Jaguar Cars a étendu sa gamme D'ACCESSOIRES au début des années 80

[205]        Parmi ces nouveaux produits mentionnons des articles associés à un certain mode de vie, des articles de luxe, des articles allant de pair avec l'image cultivée par Jaguar Cars - des articles qui figureraient plus tard dans la brochure argent (J16) - le genre de produits reflétant le mode de vie que voudrait avoir un conducteur de Jaguar selon la promotion faite de ces voitures. C'est l'une des premières choses que Jaguar a faites lorsqu'elle s'est dissociée de British Leyland, en 1980. M. Maries s'est installé dans les bureaux de Jaguar en mars 1981. Jaguar a établi un partenariat avec Sotheby Handbags, une société qui achetaient les chutes de cuir de Jaguar pour en faire des sacs à main. M. Gucci a été embauché aux États-Unis en vue de la sélection des fournisseurs. C'est ensuite qu'est née la brochure argent (pièce J16)[80].

[206]        La brochure argent, créée en Angleterre en 1981, a été la première mesure prise par Jaguar Cars pour faire la promotion de la collection Jaguar. Elle a été mise en circulation dans le monde entier. Elle a été utilisée au Canada en 1982. En 1984, une gamme d'accessoires Jaguar destinée au marché canadien a été lancée. La brochure contenait une gamme complète de produits sensés refléter [traduction] « le mode de vie allant de pair avec les articles de luxe, le genre de vie qu'un conducteur de Jaguar devrait avoir[81] » . La brochure a été envoyée aux concessionnaires du Canada afin qu'ils offrent les marchandises. Tous les accessoires figurant dans la brochure n'étaient pas nécessairement vendus, mais tous étaient offerts aux concessionnaires. Après avoir reçu la brochure, Jaguar Canada commandait au moins une certaine quantité de chacun des articles. Selon la quantité ensuite achetée par les concessionnaires, Jaguar Canada procédait à de nouvelles commandes[82]. Les articles suivants étaient présentés dans la brochure argent :

Mallettes à documents, porte-documents, sacs à main; étuis pour permis, portefeuilles, porte-cartes, anneaux porte-clés, étuis porte-clés; housses à vêtements, valises, sacoches de vol et autres articles de bagage; ceintures, cravates, mouchoirs; écharpes, montres, parapluies; carnets d'adresse, carnets de notes; vestes de cuir, peignoirs.

[207]        Lorsqu'elle a été adoptée par Jaguar Canada, la collection d'articles Jaguar comprenait des accessoires déjà offerts sur le marché. M. Mackie, de Jaguar Canada, s'est entretenu avec Jaguar Cars avant le lancement de la collection Jaguar, en 1981 et 1982, au sujet du risque que des entreprises présentes sur le marché national poursuivent leurs activités de façon parallèle sur le marché mondial. Jaguar Cars était d'avis qu'il serait préférable de lancer la collection à partir du siège social, en Angleterre, et de l'étendre ensuite à d'autres marchés dans le monde, et c'est ce qui s'est produit[83].

[208]        Les ventes d'accessoires personnels de la collection JAGUAR par l'entremise des concessionnaires ont eu lieu sans interruption de 1982 à aujourd'hui, et elles se sont accrues d'année en année[84].

[209]        Outre les accessoires personnels figurant dans les brochures, un programme de licences a été mis sur pied, dans le cadre duquel les parties autorisées achetaient et vendaient d'autres produits de spécialité. À la fin des années 80, le programme de licences de Jaguar générait à lui seul un bénéfice net de 2,5 millions de dollars canadiens. Au nombre des produits vendus sous licence figuraient les suivants : montres, au début des années 80 (présentées dans certaines brochures de Jaguar); montures et lunettes de soleil, en 1984 (présentées dans certaines brochures de Jaguar); parfums, en 1988; vêtements habillés, en 1994; différents modèles réduits, dans les années 80 (certains présentés dans des brochures de Jaguar). Des licences de moindre importance ont également été accordées pour d'autres produits. Sauf exception selon les régions, les produits faisant l'objet d'une licence ont généralement été vendus dans le monde entier, y compris au Canada. L'entreprise Jaguar, ses licenciés et leurs distributeurs font la publicité et la promotion des produits vendus sous licence depuis 1981. Les activités de promotion ont entre autres été faites aux points de vente, chez les concessionnaires, lors de salons de l'automobile et, à un certain moment, à la télévision et à la radio.[85]

[210]        Avant 1985, les ventes d'accessoires personnels totalisaient environ 50 000 $ par année. En 1990, elles étaient passées à environ 500 000 $ par année[86].

[211]        Au Canada, les accessoires personnels de JAGUAR Cars ont été vendus principalement par l'entremise des concessionnaires[87]. Jaguar Canada a également effectué des ventes directes d'accessoires personnels[88].

[212]        Au Canada, la promotion des accessoires personnels de JAGUAR Cars a été faite par Jaguar Canada et ses concessionnaires par la voie de brochures, de catalogues, de publipostage, de vitrines et de programmes de commercialisation[89]. Les témoins de Jaguar ont fourni des renseignements plus détaillés au sujet de la promotion d'accessoires personnels dans des brochures et des catalogues[90], des documents utilisés par les concessionnaires[91] et des vitrines[92]. Les licenciés de Jaguar Cars ont également fait la promotion d'autres accessoires portant la marque de commerce JAGUAR, entre autres des modèles réduits, des horloges, des montres, des parfums, des vêtements et des lunettes[93].

Au début des années 80 et par la suite, l'extension de la marque de Jaguar Cars à une plus vaste gamme d'accessoires personnels, dont des articles de bagage, était une évolution naturelle, et l'association faite entre ces accessoires et la célèbre marque de voitures Jaguar avait une valeur commerciale auprès des consommateurs

[213]        Les témoins de Jaguar Cars ont montré qu'il y a eu une extension naturelle de la marque de voitures de luxe pour y inclure des articles de bagage, et ce, depuis 1980 au moins. Voici une liste de ces articles :

[traduction] Bagages, sacs, mallettes, poches, fourre-tout et autres marchandises servant à ranger ou à transporter de petits objets; mallettes à documents, porte-documents, sacs à main; sacs d'école; étuis pour permis, portefeuilles, porte-cartes; anneaux porte-clés, porte-clés; housses à vêtements, valises, sacoches de vol, serviettes, chaînettes pour porte-clés, sacs de sport; étuis pour permis de conduire, étuis pour portefeuille, étuis pour cartes d'affaires, ceintures, étuis pour cartes de crédit, étuis pour passeports, étuis de beauté; étuis à documents, portefeuilles de poche; carnets d'adresses, carnets de notes, sacs à appareil-photo; sacs à dos, bagages de cabine, sacs de voyage, sacs de sport, sacs de tennis, sacs et pochettes à maquillage, ceintures porte-billets, sacoches de ceinture, sacs-repas et sacs pour ordinateur.

L'emploi d'articles de bagage par d'autres constructeurs d'automobiles

[214]        Selon les faits convenus, il est courant que des constructeurs d'automobiles bien connus vendent des articles de bagage, et ce, depuis bien avant 1980, et il était naturel que Jaguar Cars fasse de même en 1980.

[215]        Selon les faits convenus concernant l'enregistrement et l'usage sur le marché mondial[94], depuis avant 1980, il est courant que des constructeurs d'automobiles étendent leur marque à des accessoires personnels, y compris des articles de bagage. À cet égard, on compte au moins 10 exemples parmi les enregistrements faits par des constructeurs d'automobiles aux États-Unis avant 1980[95]. Ces constructeurs sont tous des concurrents de Jaguar. Ils vendent tous des voitures de luxe. Tous vendent des accessoires personnels, parmi lesquels figurent la plupart du temps des bagages, des portefeuilles, des sacs à main et des porte-documents. Certains constructeurs de voitures de luxe conçoivent des articles de bagage pour leurs voitures depuis au moins les années 30. Par exemple, au Canada :

(1)         à partir de 1933, la marque MERCEDES-BENZ enregistrée en 1969 a été utilisée pour des anneaux porte-clés, des étuis porte-clés, des mallettes à documents et à cartes, des sacs, des mallettes et des malles vendues au Canada;

(2)         en 1958, la marque VOLVO a été enregistrée au Canada pour des boîtes en simili cuir pour le rangement et le transport de petits articles personnels et pour un usage mécanique, des bagages, des malles et des valises;

(3)         à partir de 1973, la marque de commerce JEEP enregistrée en 1980 a été utilisée pour des polochons, des sacs à main, des sacs de tennis, des sacs de passagers, des fourre-tout, des portefeuilles, des étuis porte-clés et des sacs à dos vendus au Canada.

[216]        Les témoins de Jaguar Cars étaient parfaitement au courant de la vente d'accessoires personnels par des constructeurs concurrents avant 1980[96].

Les faits reconnus par Remo

[217]        Remo reconnaît que Jaguar Cars est le propriétaire d'une famille de marques de commerce déposées JAGUAR (annexes A et B de la défense)[97].

[218]        Remo a reconnu que JAGUAR Cars a droit à l'enregistrement et à l'emploi au Canada de la marque de commerce JAGUAR pour les accessoires personnels suivants :

[traduction] Lunettes, lunettes de soleil, montures de lunettes et pièces connexes, étuis à lunettes, préparations de nettoyage et de polissage pour véhicules terrestres motorisés, outils à main, bijoux et leurs pièces et accessoires, livres, périodiques, magazines et journaux, cartes à jouer, parasols, parapluies, raquettes de tennis, raquettes de badminton, raquettes de squash, balles de golf, tees, cendriers; articles de toilette et parfums pour hommes, nommément eau de toilette, lotion après-rasage, savon, déodorant en bâton, déodorant aérosol, gel douche, shampooing, crème à raser, hydratant après rasage, montres, horloges, bijoux et leurs pièces et accessoires, articles en métal précieux ou semi-précieux pour fumeurs, nommément étuis à cigarettes, cendriers, allume-cigarettes et leurs pièces et accessoires, papier à écrire, stylos, crayons, ornements de bureau, cartes à jouer, bonnets de bain, maillots de bain, caleçon de bain, caleçon de bain, cache-maillots, dossards de ski, chaussures de ski, vestes de ski, gants de ski, pantalons de ski, costumes de ski, vestes, polos, shorts de gymnastique, bandeaux, tenues de jogging, pulls d'entraînement, pantalons de survêtement, survêtements, chaussures de golf, pantalons de golf, gants de golf, tee-shirts, vêtements de tennis, survêtements, chapeaux, tenues d'équitation[98].

L'enregistrement de certains accessoires personnels de Jaguar Cars

[219]        Le 1er avril 1987,Jaguar Cars a produit au Canada les demandes d'enregistrement de la marque de commerce JAGUAR DESIGN nos 581,257 et 581,258 pour les accessoires personnels suivants :

[traduction]

Préparations de nettoyage et de polissage pour véhicules terrestres motorisés, outils à main, bijoux (sauf les montres) et leurs pièces et accessoires, livres, périodiques, magazines et journaux, publications imprimées traitant d'automobiles, nommément listes de pièces de rechange et manuels d'entretien, cartes à jouer, parasols, parapluies, raquettes de tennis, raquettes de badminton, raquettes de squash, balles de golf, tees, cendriers; étuis pour permis de conduire, étuis pour portefeuilles, étuis pour cartes d'affaires, ceintures, étuis pour cartes de crédit, étuis à clés, carnets d'adresses, carnets de notes, étuis pour passeports, étuis de beauté, étuis à documents, portefeuilles de poche (les marchandises faisant l'objet de l'opposition de Remo sont en caractère gras).

[220]        Ces demandes ont donné lieu aux enregistrements nos 378,643 et 378,644[99].

DEPUIS 1973, Remo vend des accessoires personnels au Canada sous les marques de commerce remo, beau sac et sacsibo

[221]        Entre 1973 et 1980, la demanderesse a utilisé les marques de commerce REMO (pour laquelle elle a obtenu un enregistrement), BEAU SAC et SACSIBO. Au cours de cette période, elle a produit une demande pour la marque VOLARE, mais celle-ci a été abandonnée par REMO à la suite d'une opposition. Aucune raison précise n'a été donnée pour expliquer la décision de Remo de cesser d'utiliser ces marques de commerce au profit de la marque JAGUAR en 1980.

[222]        Dans sa déclaration, Remo a affirmé que ses marchandises constituaient un ensemble bien défini. Une définition du terme maroquinerie est donnée au paragraphe 5 :

[traduction] Fourre-tout, sacs à main, sacs d'école, bagages, bagages, pochettes, sacs à dos, mallettes, porte-documents, porte-clés, porte-monnaie, portefeuilles, porte-chèques, porte-cartes de crédit et étuis à lunettes

[223]        Dans les faits convenus, Remo définit maintenant le terme maroquinerie ainsi :

[traduction]D356 Selon la définition de la demanderesse, la « maroquinerie » comprend les articles suivants : sacs fourre-tout, sacs à main, sacs d'école, bagages, pochettes, sacs à dos, porte-documents, mallettes, porte-clés, portefeuilles, porte-chèques, porte-cartes de crédit, étuis à lunettes, housses à vêtements, valises, sacs à appareil-photo, sacs de voyage, sacs de tennis, fourre-tout de voyage, sacs à provisions munis de roues, sacs de plage, sacoches de vol, sacs de sport, sacs pour la fin de semaine, sacs à maquillage, mallettes de pilote, sacs en cuir, bourses à monnaie, fourre-tout de sport, ceintures bananes, mallettes pour ordinateur, bagages de cabine, cartables, ceintures porte-billets, sacs-repas, boîtes-repas, porte-bagages munis de roues.

[traduction]D314 La demanderesse n'a jamais vendu de porte-clés, ni de porte-chèques.

[224]        Remo n'est pas disposée à restreindre ses produits dans l'avenir. La demanderesse n'hésitera pas à étendre sa gamme de produits pour y inclure d'autres produits du secteur de la mode[100].

Remo a adopté la marque de commerce JAGUAR en 1980, affirmant qu'elle ignorait alors l'existence de la marque de Jaguar Cars

[225]        M. Bassal a affirmé qu'il n'était pas au courant de l'existence des voitures Jaguar en 1980 et après 1980, jusqu'en 1990.

[226]        M. Bassal a adopté la marque JAGUAR SPORT en 1987, renforçant ainsi le lien possible de ses produits avec les voitures JAGUAR et, après l'introduction de l'action, il a adopté les marques JAGUAR TOURING, JAGUAR OLD SCOTLAND, JAGUAR LONDON et JAGUAR CLUB. Après que les défenderesses lui eurent envoyé des documents parmi lesquels figuraient des brochures de leur gamme de produits de marque JAGUAR COLLECTION, il a adopté la marque de commerce JAGUAR COLLECTION. Toutes ces marques pourraient donner aux consommateurs l'impression qu'il existe un lien entre les produits de Remo et les voitures JAGUAR.

Les enregistrements de Remo

[227]        Le 10 octobre 1980, Remo a produit la demande no 460,209 pour l'enregistrement au Canada de la marque de commerce JAGUAR fondé sur l'emploi projeté pour des fourre-tout et des bagages. La demande no 460,209 a été approuvée le 17 septembre 1981 et a donné lieu à l'enregistrement no 263,924 le 30 octobre 1981[101].

[228]        Le 3 mars 1982, Remo a produit une demande d'extension de la liste des marchandises de l'enregistrement pour y inclure des sacs à main et des sacs d'écoles, fondé sur un emploi projeté. Cette modification a été approuvée le 10 septembre 1982. Le 11 janvier 1984, un certificat de modification été délivré visant les sacs à main et les sacs d'école[102].

Les ventes de Remo

[229]        Les marchandises vendues par Remo au fil des ans depuis 1981 sont mentionnées dans les faits reconnus[103]. Qu'il suffise de dire que Remo a considérablement étendu sa liste de marchandises au-delà des quatre produits mentionnés dans l'enregistrement et qu'elle n'a aucunement l'intention de restreindre à certains accessoires personnels dans l'avenir. Entre 1983 et 1987 et par la suite, les recettes annuelles tirées par Remo de la vente d'articles de bagage portant la marque de commerce JAGUAR se sont considérablement accrues. Avant 1999, Remo a fait peu de publicité et de promotion, participant à des foires commerciales à Toronto et à Montréal après 1986 et faisant de la publicité collective dans des documents promotionnels distribués par Zellers et K-Mart et dans des catalogues de produits distribués par Bentley[104].

La demande d'extension de Remo

[230]        Le 1er mars 1990, Remo a produit une autre demande (460,209-2), signée par M. Bassal, en vue de l'extension de l'enregistrement no 263,924 fondé sur l'emploi allégué depuis octobre 1981 des marchandises suivantes : bagages, pochettes, sacs à dos, mallettes, porte-documents, porte-clés, porte-monnaie, portefeuilles, porte-chèques, porte-cartes de crédit, étuis à lunettes et ceintures[105]. En fait, aucune des marchandises mentionnées dans la demande n'a été vendue avant octobre 1981, sauf les mallettes[106]. Cette demande d'extension à de nombreux autres produits pour lesquels la marque JAGUAR n'avait jamais été employée avant la date alléguée a été produite peu de temps avant que Remo n'envoie une lettre mise en demeure à Jaguar, le 12 mai 1990. Des droits sur toutes ces marchandises ont été allégués dans la déclaration.

[231]        La demande d'extension a été publiée le 12 février 1992 et a fait l'objet d'une opposition de la part de Jaguar Cars auprès du Bureau des marques de commerce[107]. Dans le cadre de l'appel devant la Section de première instance de la Cour fédérale, de nombreux autres éléments de preuve ont été déposés[108]. À l'audience devant le Bureau des marques de commerce, Remo a abandonné volontairement la demande pour tous les produits sauf les mallettes[109].

La vaste campagne publicitaire menée par Remo en 1999

[232]        En août 1999, Remo a lancé dans l'ensemble du Canada une vaste campagne publicitaire dans les journaux, sur des panneaux d'affichage et dans les abribus, afin de faire la promotion des marchandises de Remo portant la marque de commerce JAGUAR[110].

[233]        La demanderesse a refusé de demander à ses représentants publicitaires de retirer les publicités situées près des concessionnaires de voitures Jaguar, en dépit d'une demande de Jaguar Cars en ce sens[111].

[234]        La campagne a été amorcée des mois après le règlement à l'amiable intervenu entre Remo et Jaguar Cars concernant l'opposition du 12 mai 1999. Dans la proposition de règlement envoyée selon les instructions de M. Bassal, Remo proposait une entente selon laquelle Jaguar Cars ne demanderait pas une injonction avant le procès et, en retour, Remo retirerait sa demande d'enregistrement de la marque de commerce. M. Bassal a reconnu que les publicités faites sur les panneaux d'affichage étaient les premières publicités non collectives de l'entreprise et que la planification de la campagne avait commencé en avril 1999 ou avant[112].

Parmi les marchandises vendues par Remo, certaines étaient des produits bas de gamme vendus à des chaînes de magasins bas de gamme

[235]        Remo a vendu et vend toujours des articles de bagage en liaison avec la marque JAGUAR à des grands magasins, des réseaux de magasins de détail et des magasins spécialisés situés un peu partout au Canada, notamment Bentley, Zellers, K-Mart, Sears, Wal-Mart, Agnew, Globo, Tigre Géant et Bi Way.[113] Il s'agit de magasins relativement bas de gamme dont on ne dirait pas qu'ils sont, par eux-mêmes, associés avec des produits de luxe alliant qualité et richesse[114].

[236]        M. Bassal a affirmé que lorsque Remo a adopté la marque de commerce JAGUAR, il n'avait pas l'intention de vendre des sacs de grande qualité. En fait, il n'avait pas d'intention en ce qui concerne la qualité[115]. En 1990, Remo vendait ses mallettes bas de gamme et haut de gamme aux points de vente au détail de Bentley et seulement ses mallettes bas de gamme à K-Mart[116]. M. Bassal a reconnu que le sac à dos, pièce MB16, était un produit de Remo. Au départ, il a dit que les faits remontaient à de nombreuses années, mais il a ensuite reconnu qu'ils remontaient à 1996 environ. Il a reconnu que, selon les normes actuelles, le sac à dos n'était pas de grande qualité[117]. Au cours des premières années, Remo vendait ses mallettes à un prix se situant entre 30 et 100 $ environ, alors que d'autres entreprises pouvaient demander jusqu'à 250 $. Remo vend ses mallettes à un prix moyen[118].

DATES IMPORTANTES

[237]        Voici les principaux faits et les grandes dates :

(1)         1925 - Premier emploi d'articles de bagage par Mercedes. De célèbres constructeurs d'automobiles offrent encore aujourd'hui des articles de bagage.

(2)         1936 - Jaguar Cars emploie pour la première fois le nom JAGUAR pour des voitures. Aujourd'hui, ce nom est utilisé dans le monde entier, y compris au Canada.

(3)         1945 - Enregistrement canadien no UCA21,618 de la marque JAGUAR pour des voitures.

(4)         De 1945 à 1960 - Les accessoires personnels offerts par Jaguar Cars comprennent des valises, des pochettes pour documents de voiture, des chaînes porte-clés, des chaînettes pour porte-clés, des modèles réduits et des vêtements.

(5)         Le 10 octobre 1980 - Remo produit la demande no 460,209 pour l'enregistrement de la marque JAGUAR fondé sur l'emploi projeté pour des fourre-tout et des bagages.

(6)         Mars 1981 - On confie à M. Maries la tâche de mettre sur pied la gamme d'accessoires personnels de Jaguar Cars, appelée JAGUAR COLLECTION.

(7)         Le 30 octobre 1981 - La demande no 460,209 produite par Remo donne lieu à l'enregistrement no 263,924.

(8)         1982 - Jaguar Cars distribue la brochure argent (J16) aux concessionnaires du monde entier.

(9)         Le 3 mars 1982 - Remo demande l'extension de l'enregistrement no 263,924 pour des sacs à main et des sacs à dos, fondé sur un emploi projeté.

(10)       Le 11 janvier 1984 -L'enregistrement no 263,924 de Remo est étendu aux sacs à main et aux sacs d'école.

(11)       Le 1er avril 1987 - Jaguar Cars produit les demandes nos 581,257 et 581,258 pour l'enregistrement de la marque JAGUAR pour un certain nombre de marchandises, y compris différents articles de bagagerie (marchandises faisant l'objet de l'opposition).

(12)       1988 - Selon les résultats du sondage de Landor, les voitures JAGUAR figurent au 17e rang mondial des marques pour ce qui est de la notoriété et du prestige.

(13)       Le 1er mars 1990 - Remo demande l'extension de l'enregistrement no 263,924 pour les marchandises suivantes : bagages, pochettes, sacs à dos, mallettes porte-documents, porte-clés, porte-monnaie, portefeuilles, porte-chèques, porte-cartes de crédit, étuis à lunettes, ceintures, fondé sur un emploi allégué depuis 1981 -elle a admis que ce renseignement est inexact.

(14)       Le 29 mai 1990 - Remo fait parvenir une lettre de mise en demeure à un concessionnaire de Jaguar Canada.

(15)       Le 24 août 1990 - Jaguar menace de faire radier l'enregistrement de Remo.

(16)       Le 25 janvier 1991 - Les demandes nos 581,257 et 581,258 de Jaguar Cars donnent lieu aux enregistrements nos 378,643 et 378,644 pour la marque JAGUAR [...]

(17)       Le 5 juin 1991 - Remo intente la présente action alléguant la validité de la marque de Remo et demande, entre autres réparations, une ordonnance modifiant les enregistrements nos 378,643 et 378,644 de Jaguar Cars pour qu'en soit exclu tout article de bagage.

(18)       Le 6 mars 1992 - Jaguar Cars présente une demande reconventionnelle et une demande de radiation de l'enregistrement de Remo.

(19)       Le 19 octobre 1992 - Jaguar Cars produit une déclaration d'opposition.

(20)       Le 27 janvier 1998 - Retrait de marchandises, par Remo, à l'audience devant le Bureau des marques de commerce.

(21)       Le 12 mai 1999 - Règlement à l'amiable selon lequel Jaguar ne demandera pas une injonction et Remo retirera sa demande.

(22)       Août 1999 - Remo entame une campagne publicitaire, recourant notamment à des panneaux d'affichage.

QUESTIONS EN LITIGE

[238]        Par suite de l'analyse préalable indispensable de la preuve concernant la célébrité au Canada de la marque de commerce de Jaguar Cars et, par conséquent, de la liaison - le cas échéant - entre sa marque et ses marchandises constituées d'accessoires, ainsi que de la preuve produite par Remo de la marque JAGUAR à l'égard de ses marchandises constituées d'accessoires, il est nécessaire de trancher les questions en litige suivantes au regard de la validité des marques de commerce spécifiques liées aux marchandises de chacune des parties.

[239]        Remo a-t-elle :

(1)         employé la marque de commerce JAGUAR d'une manière susceptible d'entraîner la diminution de la valeur de l'achalandage attaché aux marques de commerce déposées de Jaguar Cars, en contravention au paragraphe 22(1)?

(2)         porté atteinte au droit exclusif de Jaguar Cars d'employer la marque de commerce déposée JAGUAR, en contravention aux articles 19 et 20?

(3)         attiré l'attention du public sur ses marchandises de manière à causer vraisemblablement de la confusion au Canada entre les marchandises de Remo et les marchandises de Jaguar, en contravention à l'alinéa 7b)?

(4)         commercialisé ses marchandises de manière trompeuse, en contravention à l'alinéa 7c)?

(5)         dans l'affirmative, à quelles mesures de réparation Jaguar Cars a-t-elle droit?

[240]        Jaguar Cars a-t-elle :

(1)         employé la marque de commerce JAGUAR sur les marchandises faisant l'objet de l'opposition et avait-elle le droit de le faire?

(2)         porte atteinte au droit exclusif de Remo d'employer la marque déposée JAGUAR, en application des articles 19 ou 20?

(3)         appelé l'attention du public sur ses marchandises de manière à causer vraisemblablement de la confusion au Canada entre les marchandises de Jaguar Cars faisant l'objet de l'opposition et les marchandises de Remo, en contravention à l'alinéa 7b)?

(3)         commercialisé ses marchandises de manière trompeuse, en contravention à l'alinéa 7c)?

(4)         dans l'affirmative, à quelles mesures de réparation Remo a-t-elle droit?

ANALYSE

La validité de l'enregistrement de la marque de commerce de Remo

[241]        Le 10 octobre 1980 et le 3 mars 1982 lorsque la marque JAGUAR appartenant à Remo a été adoptée (produite), en 1991 lors de l'introduction de l'action et à l'heure actuelle, l'emploi de la marque de commerce JAGUAR par Remo en liaison avec des articles de bagage était-elle susceptible d'entraîner la diminution de la valeur de l'achalandage attaché à la célèbre marque de commerce déposée JAGUAR, de Jaguar Cars, pour des automobiles, en contravention à l'article 22 de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13?

[242]        La disposition pertinente de la Loi sur les marques de commerce est l'article 22, dont voici le libellé :

22.      (1) Nul ne peut employer une marque de commerce déposée par une autre personne d'une manière susceptible d'entraîner la diminution de la valeur de l'achalandage attaché à cette marque de commerce

22.      (1) No person shall use a trade-mark registered by another person in a manner that is likely to have the effect of depreciating the value of the goodwill attaching thereto.

[243]        Jaguar Cars possède et a possédé l'enregistrement no UCA021618, délivré le 7 mars 1945, à l'égard de la marque de commerce JAGUAR en liaison avec des véhicules terrestres motorisés, fondé sur son emploi depuis 1936 jusqu'à maintenant. En conséquence, Jaguar Cars jouit des droits exclusifs suivants notamment :

(1)         empêcher autrui d'employer la marque JAGUAR appartenant à Jaguar Cars d'une manière susceptible d'entraîner la diminution de la valeur de l'achalandage qui s'y rattache;

(2)         autoriser autrui à reproduire, à distribuer, à promouvoir, à offrir en vente et à vendre des marchandises dont chacune porte la marque JAGUAR de Jaguar Cars[119].

La portée de la protection

[244]        Il est noté que les tribunaux ont déclaré que les marques de commerce bien connues jouissent d'une protection très étendue[120].

[245]        Voici des exemples de la façon dont certaines marques de commerce sont devenues bien connues :

(1)         Après 65 années d'emploi au Canada et des enregistrements dans 60 pays, la marque de commerce CARTIER est bien connue au Canada en liaison avec la joaillerie. En conséquence, la protection accordée à la marque s'est étendue au-delà de la joaillerie pour viser lunetterie[121].

(2)         À l'origine il n'y avait peut-être rien de bien distinctif à propos des mots « Miss » et « Universe » ou de l'expression « Miss Universe » . Toutefois, le passage du temps ainsi que l'emploi et la promotion des deux mots liés ensemble comme une seule et même expression à l'échelle globale ont conféré à cette expression un caractère distinctif considérable. Parce que cette marque est devenue bien connue et réputée, elle a reçu une protection particulièrement étendue[122].

(3)         En raison de l'emploi [traduction] « prolongé et à grande échelle » de la marque SUN LIFE en liaison avec des services d'assurance, (y compris la santé), cette marque était devenue tellement [traduction] « établie et généralisée » que sa protection s'étendait [traduction] « au-delà du champ d'exploitation du propriétaire » pour viser les jus de fruits[123].

(4)         Il était [traduction] « évident » que l'emploi prolongé et à grande échelle de la marque de commerce CUTTY SARK en liaison avec le whisky écossais donnait à cette marque droit à une protection étendue[124].

(5)         Pour la raison suivante, la marque de commerce JOHNNIE WALKER a eu droit à une protection plus étendue que celle s'appliquant au domaine particulier dans lequel elle avait été employée jusqu'alors (c'est-à-dire le whisky) :

[traduction] Par suite de ventes et d'une publicité importantes au Canada et dans le monde entier, la [...] marque de commerce JOHNNIE WALKER a atteint une notoriété internationale, non seulement auprès des consommateurs de whisky, mais également parmi les membres du grand public. Elle est devenue tellement célèbre que, même lorsqu'elle est employée ou vue isolément sans égard au whisky, elle est comprise et reconnue d'une manière générale comme indiquant un lien avec l'[ancien utilisateur]. La marque de commerce JOHNNIE WALKER a été employée et annoncée à si grande échelle au cours des années qu'elle a acquis le statut d'une marque de commerce célèbre[125].

(6)         En 1989, la marque MISS CANADA était célèbre pour les concours de beauté et, par conséquent, elle avait droit à une protection étendue[126].

(7)         Dans l'arrêt Clicquot, la Cour d'appel fédérale ne s'est pas opposée à la conclusion du tribunal d'instance inférieure selon laquelle « une marque qui est employée depuis longtemps est présumée avoir fait une certaine impression parmi les consommateurs » et la « marque « Clicquot » est célèbre et unique méritant une portée de protection étendue[127] » .

[246]        Pour décider si une marque de commerce est célèbre ou bien connue, les tribunaux ont étudié un certain nombre de facteurs objectifs dont la durée d'emploi, le volume des ventes, les dépenses de publicité et de promotion, les moyens de publicité et de promotion ainsi que d'autres méthodes utilisées pour informer le public de la marque.

[247]        Cette approche est conforme au libellé du paragraphe 6 (2) :

6.      (2) L'emploi d'une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l'emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques de commerce sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.

6.      (2) The use of a trade-mark causes confusion with another trade-mark if the use of both trade-marks in the same area would be likely to lead to the inference that the wares or services associated with those trade-marks are manufactured, sold, leased, hired or performed by the same person, whether or not the wares or services are of the same general class.

[248]        Les facteurs objectifs tirés de la jurisprudence précitée s'appliquent en l'espèce. Par exemple, en 1980, la marque JAGUAR était utilisée depuis 44 ans, avait été employée et enregistrée dans 95 pays; elle rapportait des millions de dollars en ventes au Canada, elle faisait l'objet d'une promotion étendue, d'articles indépendants et de livres. La marque de commerce JAGUAR de Jaguar Cars en liaison avec des automobiles était en 1980 et en 1991 et est aujourd'hui encore une marque célèbre; elle était et demeure donc digne de la protection étendue qui est accordée aux marques les plus connues.

L'achalandage

[249]        L'achalandage rattaché à une marque de commerce est la totalité de l'avantage, quel qu'il puisse être, constitué par la réputation des marchandises vendues sous la marque et par le lien avec celles-ci - qui est le résultat d'années de travail honnête ou de dépenses considérables - y compris la capacité de la marque de persuader le public d'acquérir les marchandises du propriétaire et d'attirer de nouveaux clients (Clairol)[128]. L'achalandage est la réputation construite par un bon produit et par la dépense d'argent, ce qui permet d'identifier la marchandise à la marque (S.C. Johnson)[129].

L'expansion naturelle de l'achalandage

[250]        Si la marque de l'ancien utilisateur est tellement bien connue que le public associe ce dernier à des activités étrangères à ses activités habituelles, (par exemple, de nouvelles catégories de marchandises dans la zone d'expansion de l'ancien utilisateur), l'achalandage de la marque vise la possibilité d'utiliser cette dernière dans la zone d'expansion de l'ancien utilisateur (Orkin, Disney précités, Dunhill)[130].

[251]        La Cour d'appel a affirmé ce qui suit dans Orkin :

[Traduction] Pour autant que les principes fondamentaux soient concernés, je commencerai par une étude du droit d'Orkin qui est lésé par la conduite de Pestco. Si Orkin avait exploité son entreprise en Ontario avant Pestco, bien entendu, les parties seraient directement en concurrence et la nature du préjudice causé à Orkin serait la perte immédiate de clients ne faveur de Pestco et, en conséquence, la perte de ventes et de la clientèle..

Cependant, il n'est pas nécessaire que le demandeur soit directement en concurrence avec le défendeur pour être lésé par l'emploi de son nom commercial par le défendeur. Si le nom commercial du demandeur a acquis dans le ressort du défendeur une réputation telle que le public l'associe aux services fournis par le demandeur, l'emploi qu'en fait le défendeur équivaut à une perte de contrôle du demandeur sur l'impact de son nom commercial dans le ressort du défendeur. La conséquence pratique de cette situation est la vulnérabilité du demandeur à l'égard de la perte de ses clients actuels en Ontario, et de ses clients possibles dans cette province, pour ce qui est des services fournis aux États-Unis. Cette situation peut également avoir pour résultat d'empêcher Orkin d'utiliser son nom commercial en Ontario lorsqu'elle y étendra ses activités commerciales[131].

[...] convient-il de présumer un préjudice à la propriété de l'achalandage, le cas échéant, au détriment d'Orkin et, dans l'affirmative, cette présomption a-t-elle été réfutée? Pestco prétend, fort simplement, que l'achalandage d'Orkin au Canada n'a subi aucun préjudice du fait que Pestco et Orkin ne sont pas en concurrence. En l'absence de préjudice, il ne saurait y avoir de commercialisation trompeuse. Cet argument est totalement réfuté par la prétention selon laquelle Orkin a subi un préjudice suffisant pour justifier une cause d'action contre Pestco en raison de sa perte de contrôle sur l'impact de son nom commercial en Ontario, et de la création d'un obstacle potentiel à l'emploi de sa marque de commerce lors de son entrée sur le marché ontarien, dans les deux cas en raison de l'emploi par Pestco du nom « Orkin » en Ontario[132]. [Non souligné dans l'original.]

[252]        L'article 22 s'applique lorsqu'un nouveau venu emploie une marque de commerce bien connue soit dans un domaine commercial où il n'y a pas de concurrence soit en liaison avec des marchandises à l'égard desquelles la marque bien connue n'est pas enregistrée[133]. L'article 22 n'exige pas la confusion, mais un lien entre les marchandises ou les services liés aux marques des parties, soit dans l'esprit des consommateurs soit dans une perspective commerciale, à la condition que cette extension ne soit pas de nature spéculative[134]. En raison de la rareté de la jurisprudence concernant la signification du « lien » dans le cadre de l'article 22, j'examinerai quelques jugements concernant la confusion.

[253]        Dans Pink Panther[135], la Cour d'appel fédérale a déclaré que la protection accrue que confère la célébrité de la marque de l'ancien utilisateur est pertinente lorsqu'on l'applique à un lien entre les marchandises ou les commerces respectifs des parties. Le juge Linden a poursuivi ainsi :

Quelle que soit la notoriété de la marque, elle ne peut servir à créer un lien qui n'existe pas.

Il convient de noter que l'article 22 n'était pas en litige dans cette affaire. Dans l'arrêt Clicquot, la Cour d'appel fédérale a clarifié cet énoncé[136] :

[...] le lien recherché par le juge Linden dans cette affaire n'est pas un quelconque lien mais bien un lien à partir duquel l'on peut fonder une conclusion de risque de confusion.

Autrement dit, Pink Panther n'a pas énoncé un principe de droit nouveau, la Cour d'appel ayant plutôt simplement répété qu'il n'y a presque jamais de probabilité de confusion si les marchandises des parties sont totalement différentes. Il doit exister un lien ou une relation.

[254]        Étant donné que l'article 22 exige la preuve qu'une diminution de valeur est susceptible de se produire, mais pas la preuve de confusion, il s'ensuit que la preuve du « lien » à faire est moins exigeante.

[255]        Dans la jurisprudence suivante, les tribunaux canadiens ont conclu à l'existence d'un lien ou d'une association, dans l'esprit des consommateurs, entre des marchandises et des services manifestement disparates, ce qui leur a permis de conclure que les marques des parties étaient semblables au point de créer de la confusion. Si l'article 22 avait été pris en considération, ces anciens utilisateurs auraient nécessairement satisfait au seuil moins élevé établi par l'article 22 quant au lien évoqué précédemment, du fait qu'ils ont satisfait au critère plus exigeant relatif au lien applicable dans les affaires concernant la confusion.

(1)         Magazines etserrures de porte Des serrures haut de gamme de bon goût du genre de ceux sur lesquels on a des chances de trouver des chroniques, de la publicité ou des articles dans les magazines de mode de l'ancien utilisateur. (VOGUE) La Cour a jugé ce qui suit :

En l'espèce, certains éléments de preuve établissaient un rapport entre les marchandises de l'intimée (serrures de porte) et les chroniques, les articles et la publicité trouvés dans les magazines de l'appelante VOGUE et VOGUE DECORATION au sujet de la décoration intérieure.

En l'absence de toute preuve de la part de l'intimée au sujet du genre de ses marchandises et du monopole revendiqué par elle, il faut présumer que tous les genres de serrures de porte et de ferrures de porte sont couverts par le monopole recherché par elle, y compris les produits de décoration haut de gamme et de bon goût du genre de ceux sur lesquels on a des chances de trouver des chroniques, de la publicité ou des articles dans les magazines de l'appelante.

Il ne s'agit pas d'un cas du genre de celui traité dans l'affaire Pink Panther [...] où les produits en question étaient les films et les produits de beauté et où il y avait une énorme différence dans le genre de marchandises.

[...]

Ainsi que l'a écrit le juge Décary dans l'affaire Miss Universe à la page 626 : L'intimé était tenu de choisir un nom avec soin, de façon à éviter toute confusion « comme l'exige la définition de l'expression " marque de commerce projetée " à l'article 2 de la Loi » et de façon à ne pas donner l'impression qu'il avait l'intention de tirer profit d'une marque déjà célèbre.

Dans le présent appel, le président de la Commission d'opposition a souligné la non-ressemblance des marchandises, même face à une marque célèbre. On trouve une abondante jurisprudence qui donne gain de cause à une marque célèbre à l'égard de marchandises non concurrentes.

[...]

J'estime qu'il y a, en l'espèce, un lien entre les marchandises, particulièrement lorsque les marques sont identiques et que la marque enregistrée est une marque notoire. La requérante n'a pas limité son emploi de la marque aux produits qui ne tomberaient pas dans le domaine de protection que possède maintenant la marque VOGUE[137]. [Non souligné dans l'original.]

(2)         Concours de beauté et bonneterie Plusieurs associations commerciales étaient mêlées ou le concours, à la marque de commerce MISS CANADA et aux entreprises canadiennes, y compris des contrats de promotion de produits, des apparitions individuelles, des dons au fonds de bourse d'études de Miss Canada et la participation au segment « Regal Awards » de la télédiffusion du concours de beauté. La valeur commerciale de l'achalandage résidait dans l'élaboration de nouveaux moyens de faire participer les entreprises et les produits au concours, y compris des contrats de promotion et de commandite relatifs à des services de transport aérien, à des produits de viande, à la production de défilés de mode, à des maillots de bain, à des cosmétiques, à des clubs de mise en forme, à des magasins de vêtements, à de la joaillerie, à des chaussures et à de l'équipement de ski[138]. Tout ce qui précède indiquait un lien avec la bonneterie.

(3)         Joaillerie, autres articles de luxe et lunetterie De nombreux noms célèbres dans le monde de la mode, comme Christian Dior, Pierre Cardin, Calvin Klein et Polo-Ralph Lauren, sont entrés au cours des dernières années, sur le marché de la lunetterie. Les lunettes sont devenues un accessoire de mode qui a attiré l'attention des designers et de la haute couture. L'ancien utilisateur (CARTIER) a adopté cette nouvelle tendance de la mode et a percé le marché canadien dans les années 80. Le nouvel utilisateur était déjà un gros vendeur partout au Canada et faisait aussi concurrence aux créateurs de mode. La Cour a jugé ce qui suit :

Le critère du caractère distinctif ne sera pas retenu s'il est possible de conclure que les marchandises proviennent de la même source. Ainsi, dans la décision Alfred Dunhill Limited. c. Sunoptic S.A., [1979] F.S.R. 337, la société demanderesse exerçait ses activités partout dans le monde et vendait des produits du tabac et un large éventail d'articles de luxe. L'entreprise en entier exerçait ses activités sous le nom et la marque de commerce « DUNHILL » . Depuis quelques années, elle avait diversifié ses activités, délaissant le tabac pour les articles de luxe pour hommes. Le fils du président de Dunhill, Christopher Dunhill, a eu l'idée d'employer le nom Dunhill avec son prénom dans le but de commercialiser des montures et des lunettes de soleil. Le tribunal a signalé en l'occurrence que d'autres sociétés célèbres avaient également percé ce marché, y compris Christian Dior, Yves St-Laurent, etc. La demanderesse Dunhill a accusé Christopher Dunhill de profiter délibérément de la réputation de Dunhill en créant de la confusion. Le juge de première instance a longuement insisté sur le fait que les activités de Dunhill ne concernaient pas le commerce des montures et des lunettes de soleil. Le lord juge Roskill de la cour d'appel a dit ce qui suit (à la page 362):


[TRADUCTION] . . . Avec tout le respect que je dois au savant juge de première instance, la question en litige sur laquelle le jugement ne semble pas s'arrêter porte sur le préjudice occasionné à la réputation générale de Dunhill et non à des catégories particulières de marchandises mises actuellement en vente par Dunhill.

Le savant juge a conclu que dans le monde du commerce la réputation de Dunhill s'étendait [TRADUCTION] « bien au-delà de ses activités premières dans l'industrie du tabac et de la cigarette » (à la page 362).

[...]

Comme je l'ai déjà mentionné, les lunettes sont maintenant devenues des accessoires de mode. La défenderesse Lunettes Cartier vend ses produits aux opticiens et aux optométristes alors que la demanderesse Cartier vend ses articles de luxe surtout dans des boutiques de mode. Toutefois, si les marchandises sont de la même catégorie générale, il n'est pas nécessaire de prouver qu'elles sont vendues aux mêmes endroits pour établir le risque de confusion; il suffit d'établir qu'elles le pourraient et que les parties ont le droit de le faire (voir la décision Eminence SA. c. Registraire des marques de commerce, 39 C.P.R. (2d) 40.

[...]

En l'espèce, la preuve révèle que les articles de luxe Cartier créés au siècle dernier pour les monarques et l'élite opulente ont été adaptés aux demandes d'une société différente. Ralph Destino, président du conseil d'administration de Cartier, décrit le consommateur moderne de produits Cartier comme faisant partie d'une nouvelle génération opulente, en pleine ascension; il est marié, a entre 35 et 45 ans, est attaché aux symboles de statut social et s'intéresse aux articles qui ont du style, sont de qualité et de bon goût.


D'autre part, Lunettes Cartier a relevé le niveau de sa publicité pour conserver la solide place qu'elle s'est acquise à titre de principal distributeur de lunettes au Canada contre l'arrivée de concurrents plus sophistiqués.


Par conséquent, les articles vendus par les deux parties appartiennent maintenant à la même catégorie de montures de luxe et attirent la même clientèle, bien que la demanderesse Cartier offre une gamme de produits plus dispendieux.

d) La nature du commerce
La demanderesse détient un enregistrement sur les étuis à lunettes, mais elle prétend que les montures représentent le prolongement de sa gamme d'articles de luxe. D'autre part, la défenderesse Lunettes Cartier prétend qu'elle ne vend pas d'étuis à lunettes: elle les donne avec les lunettes. C'est d'ailleurs la pratique commerciale de remettre gratuitement les étuis avec les lunettes. Les prix de vente sont évidemment fixés en fonction des deux articles. La demanderesse vend ses produits dans des boutiques et certains grands magasins intéressés à la mode alors que la défenderesse vend les siens aux opticiens et aux optométristes par l'intermédiaire de vendeurs. Les consommateurs intéressés peuvent y trouver les montures qui leur plaisent[139].

(4)         Assurances et jus de fruits L'emploi prolongé, par l'ancien utilisateur (assureur), de la marque de commerce SUN LIFE en liaison avec la promotion de la santé physique et d'activités culturelles était généralisé et avait été prouvé. Le nouvel utilisateur avait fait des efforts extraordinaires pour encourager la santé physique en commanditant des activités sportives et des épreuves athlétiques. Le choix du nom d'une marque pour ses jus, lui avait été inspiré par l'intérêt du public pour les questions de santé. Il n'était pas inconcevable d'imaginer qu'une bouteille du jus du nouvel utilisateur puisse se trouver à côté d'une brochure de l'ancien utilisateur à l'une de ces activités sportives[140].

(5)         Équipe sportive et gomme à mâcher Les anciens utilisateurs avaient mis à la disposition des personnes qui assistaient à des matches à domicile du club de hockey des Toronto Maple Leafs divers souvenirs, confiseries et autres articles comme des tee-shirts, des porte-clés, des rondelles de hockey, des affichettes de pare-chocs, des tasses à café, des chapeaux, des calendriers, des écussons et des bâtons de hockey, ainsi que des produits alimentaires comme des hot-dogs, du pop-corn, des chips et des boissons gazeuses, portant tous la marque TORONTO MAPLE LEAFS. Les marchandises des parties étaient liées mêmes si les produits alimentaires de l'ancien utilisateur étaient vendus uniquement à l'intérieur du Maple Leaf Garden et non dans les magasins de vente au détail habituels, comme c'était le cas de la gomme à mâcher du nouvel utilisateur[141].

(6)         Magazine, patrons de robes et joaillerie L'ancien utilisateur publiait un magazine de mode haute couture, VOGUE, il était familier avec la mode, il fabriquait et vendait des patrons de robes et était familier avec les accessoires de mode. Son magazine contenait des articles écrits par des experts en la matière sur ce qui était « in » et de bon goût. Il n'était pas difficile pour l'ancien utilisateur d'entrer dans le domaine de la fabrication et de la vente de joaillerie[142].

(7)         Whisky et tabac à pipe (CUTTY SARK) La consommation de tabac et de boissons alcooliques allait de concert; l'une encourageait l'autre. À l'époque victorienne et à certains moments à notre époque, les dames se retiraient dans le vivoir de manière à laisser les hommes à la salle à manger, qui partageaient des cigares et brandy. Rothmans exerçait le commerce des produits du tabac et des boissons alcooliques. Une pratique populaire consistait à aromatiser le tabac à pipe avec n'importe quelle boisson alcoolique imaginable, y compris le whisky écossais[143].

(8)         Boissons gazeuses et verres L'ancien utilisateur (Coke) avait distribué au Canada, à des embouteilleurs qu'il employait, des verres portant la cursive-marque COCA-COLA. Quatre années auparavant, l'ancien utilisateur avait décidé de lancer un programme d'attribution de licences à l'égard de marchandises afin d'améliorer sa capacité de protéger ses marques de commerce en renforçant et en améliorant l'achalandage, d'accroître la visibilité de la marque fondée sur la qualité et de produire des bénéfices. Une de ces licences s'appliquait aux verres, dont la vente avait commencé quelques mois seulement avant l'instruction[144].

(9)         Whisky et équipement sportif L'ancien utilisateur (JOHNNIE WALKER) affichait diverses activités sportives dans la publicité du whisky. Il était devenu courant pour les fabricants de boissons alcooliques célèbres, au Canada et dans d'autres pays, de financer des activités sportives et la télédiffusion d'activités sportives, et d'utiliser ces activités comme moyen de publicité[145].

(10)       Whisky et bière (HAIG & HAIG) Des sociétés commerciales en Érythrée, au Pakistan, en Inde et au Japon fabriquaient et vendaient de la bière et du whisky sous la même marque de fabrique. Les brasseurs en Grande-Bretagne exerçaient les fonctions de distributeur de scotch, soit directement par l'intermédiaire de la brasserie, soit par l'intermédiaire de filiales possédées ou contrôlées par les brasseries (mais le scotch et la bière étaient vendus sous des marques différentes). Il n'y avait pas de preuve que les brasseurs canadiens avaient fabriqué ou vendu des boissons alcooliques distillées ou que les distillateurs canadiens avaient fabriqué ou vendu des boissons alcooliques fermentées[146].

[256]        Les motifs énoncés par ces tribunaux pour conclure à l'existence d'une probabilité de confusion peuvent être répartis dans les catégories suivantes de facteurs pertinents pour décider si le lien entre les marchandises des parties est suffisamment étroit pour soutenir une conclusion de confusion (les facteurs de liaison) :

(1)         Les marchandises des parties remplissaient des fonctions semblables ou connexes, ou les marchandises d'une des parties étaient utilisées conjointement avec celles de l'autre partie.

(2)         Des tiers actifs dans le secteur économique de l'ancien utilisateur avaient déjà étendu l'emploi de leurs marques bien connues à des marchandises du même genre que celles du nouvel utilisateur. Dans bien des cas, les activités de ces tiers avaient eu lieu en dehors du Canada.

(3)         L'ancien utilisateur avait déjà fait le commerce de marchandises semblables à celles du nouvel utilisateur. Dans bien des cas, ce commerce était de nature promotionnelle ou s'effectuait par des réseaux commerciaux inhabituels pour les marchandises du nouvel utilisateur.

(4)         Les tribunaux ont examiné la possibilité que les attributs et les caractéristiques de la marque de fabrique de l'ancien utilisateur permettent l'application de la marque à la catégorie de marchandises à laquelle appartiennent celles du nouvel utilisateur.

(5)         L'ancien utilisateur a produit une preuve par sondage indiquant que les membres du public tendraient à percevoir un lien entre les marchandises du nouvel utilisateur et celles de l'ancien utilisateur.

[257]        Remo se fonde sur la jurisprudence suivante (la jurisprudence de Remo concernant le lien) dans laquelle les tribunaux ont conclu que les marchandises et services suivants n'étaient pas liés d'une manière suffisamment significative. Sauf les arrêts Clicquot et I.T.V., qui mettaient en jeu l'article 22 d'une manière minimale, dans chacun de ces jugements la décision se limitait à la possibilité de confusion : productions cinématographiques et produits de beauté [Pink Panther]; champagne et magasin de vente de vêtements au détail [Clicquot]; automobiles et fruits en conserve [Lexus][147]; poupées et restaurants [Barbie Doll][148]; spiritueux et services de courtage immobilier [Seagram] [149]; magazines, clubs sociaux et pneus d'automobiles [Playboy][150].

[258]        La jurisprudence de Remo concernant le lien peut être distinguée :

(1)         Dans aucun des jugements de Remo concernant le lien, les marchandises des parties n'étaient liées d'une manière fonctionnelle. Les marchandises et services (énumérés ci-dessus) n'étaient utilisés ensemble que d'une manière secondaire.

(2)         Aucun des jugements de Remo concernant le lien n'indiquait d'une quelconque façon une pratique étendue à l'ensemble du secteur selon laquelle les anciens utilisateurs avaient effectivement pénétré le marché des marchandises ou services des nouveaux utilisateurs.

(3)         Dans aucun des jugements de Remo concernant le lien, les anciens utilisateurs n'avaient effectivement pénétré le marché des produits d'un nouvel utilisateur, avant ou après le commencement des activités de ce dernier. Dans Clicquot, le tribunal a noté l'absence de preuve de l'intention du nouvel utilisateur d'exploiter un autre domaine que le champagne. « Si la demanderesse voulait vraiment extensionner ses marques à l'univers de la mode, ses plans de stratégie l'auraient réflété[151]. » Par contraste, Jaguar Cars a prouvé clairement l'intention d'entrer de plain-pied dans le domaine des articles de bagage dès 1980 et 1991. Jaguar Cars fait le commerce de ce genre de marchandises depuis les années 40. Depuis les années 70, cet emploi s'est accru d'une manière considérable. Cette expansion complète dans le domaine des articles de bagage au cours des années 80 suivait l'évolution naturelle d'un processus qui avait débuté de nombreuses décennies auparavant. L'arrêt Clicquot peut être distingué dans la mesure où les plans stratégiques de Jaguar Cars avant 1980 reflétaient clairement l'intention véritable d'entrer sur le marché des articles de bagage, laquelle intention s'est en fait réalisée.

(4)         Dans Clicquot, la vente par l'ancien utilisateur d'articles promotionnels dans la région du nouvel utilisateur n'a pas établi un lien entre les activités des parties. « Ces articles demeurent des articles promotionnels, rien de plus[152] » . Des réserves doivent être apportées.

a)          Il est impossible d'interpréter cette situation comme une exclusion générale de toutes les activités promotionnelles dans l'évaluation du lien, en raison de la pléthore de jugements dans lesquels de telles activités ont joué un rôle fondamental, comme Glen-Warren (commandites croisées, attribution de licences), Maple Leaf (promotion non traditionnelle de nourriture à des matches de hockey), Sun Life (brochure d'assurance encourageant la santé, commandite de manifestations sportives); Johnnie Walker (commandite de manifestations sportives, annonces publicitaires montrant des activités sportives) et Coca-Cola (cadeaux promotionnels à des fournisseurs). En fait, dans Coca-Cola, la conclusion de la Cour quant au lien était fondée sur la campagne de l'ancien utilisateur pour l'attribution de licences, dont l'un des objectifs explicites était l'accroissement de la capacité de l'ancien utilisateur de protéger ses marques de commerce et l'amélioration de la visibilité de la marque fondée sur la qualité (par opposition à la production de bénéfices par des moyens traditionnels).

b)          Cette situation ne peut justifier le principe général selon lequel les plans d'expansion future des anciens utilisateurs ne sont jamais pertinents. En réalité, dans un certain nombre d'affaires, de tels plans ont joué un rôle fondamental dans la détermination de la portée des droits de ces utilisateurs et de l'existence d'un lien entre les marchandises des parties : Orkin (expansion des États-Unis vers l'Ontario), Disney (expansion des États-Unis vers l'Alberta), Cartier (expansion de la joaillerie à la lunetterie) et Coca-Cola (expansion des boissons gazeuses aux verres).

c)          Par conséquent, même si les ventes d'articles de bagage par Jaguar Cars avant 1980 visaient principalement la promotion ou la planification d'une expansion future (ce qui n'était pas le cas), ces activités constituent néanmoins des indicateurs importants d'un lien entre les automobiles et les articles de bagage, ainsi que de l'intention de Jaguar Cars de s'étendre à la totalité du secteur des articles de bagage, ce qui s'est effectivement passé au cours des années 1980.

(5)         Selon le juge de première instance dans Clicquot[153], l'étude des événements futurs et des possibilités de diversification ne devrait viser que la possibilité d'expansion des activités existantes. Il ne faudrait pas se livrer à des spéculations à l'égard de la diversification dans des activités entièrement nouvelles, concernant de nouveaux genres de marchandises, de services ou d'activités commerciales. Il s'agit là d'une reformulation de l'exigence selon laquelle les marchandises des parties doivent être liées. Si les marchandises des parties sont liées, les plans de diversification future seront qualifiés d' « expansion possible des activités courantes » . Et si les marchandises ne sont pas liées, ces plans seront une « diversification de l'entreprise dans des secteurs tout à fait nouveaux » . Autrement dit, l'arrêt Clicquot n'a pas justifié de manière distincte l'exclusion des plans d'expansion future de l'ancien utilisateur.

(6)         De toute manière, l'espèce peut être distingué de l'arrêt Clicquot en raison des faits. La vente d'articles de bagage (y compris des étuis pour portefeuilles, des valises et des attaches en cuir pour des porte-clés) par Jaguar Cars depuis les années 40 a précédé l'expansion entière vers les articles de bagage de marque JAGUAR qui s'est produite effectivement dans les années 80. Ce fait essentiel - soit que l'ancien utilisateur a effectivement réalisé toute l'expansion qu'il avait, prétend-il, projetée - est absent de l'arrêt Clicquot. Quelle meilleure preuve de l'intention de l'ancien utilisateur d'étendre ses activités au domaine du nouvel utilisateur? Dans Clicquot, les plans stratégiques de l'ancien utilisateur ne faisaient pas mention d'une expansion à l'égard des accessoires de mode. Non seulement les plans stratégiques de Jaguar Cars d'avant 1980 faisaient spécifiquement état du projet d'introduction d'une gamme complète d'accessoires personnels portant la marque JAGUAR (y compris les articles de bagage) mais ils ont été effectivement mis en oeuvre. Dans Clicquot, les plans stratégiques pertinents de l'ancien utilisateur ne mentionnaient aucune expansion de cette nature et, au moment de l'instruction, aucune mesure n'avait été prise en ce sens. L'allégation, par Jaguar Cars, d'une intention antérieure à 1980 de se diversifier dans le domaine des articles de bagage est beaucoup plus crédible. En outre, Jaguar Cars a prouvé que les autres constructeurs d'automobiles avaient effectivement étendu leurs activités aux articles de bagage bien avant 1980. La preuve d'une pratique, dans le secteur, d'une diversification allant du champagne aux accessoires de mode était totalement absente dans l'arrêt Clicquot. En conséquence, les faits sont différents.

(7)         Toyota c. Lexus Foods Inc. peut être distingué de l'espèce sous plusieurs rapports importants, outre ceux qui ont été énumérés ci-dessus :

a)          Dans cette affaire, les automobiles et les fruits en conserve sont des produits beaucoup plus différents que les automobiles et les articles de bagage.

b)          La nourriture en conserve n'a pas les attributs de marque haut de gamme des bagages.

c)          La preuve par sondage de Toyota se limitait à l'évaluation de la réputation de la marque Lexus, laquelle preuve bien entendu « n'établit pas qu'il y a eu la moindre confusion entre les deux produits. Elle établit simplement que de nombreuses personnes connaissent l'automobile de luxe fabriquée par [Toyota] » .

d)          La marque LEXUS de Toyota était seulement en train de jouir « d'un début de célébrité » par opposition à la célébrité bien établie de la marque d'automobile JAGUAR en 1980. Les automobiles de marque LEXUS étaient en vente au Canada depuis moins de 10 ans, par rapport aux décennies de ventes d'automobiles JAGUAR. L'emploi de la marque LEXUS par Toyota n'avait commencé que deux années avant l'emploi de sa marque par le nouvel utilisateur.

e)          La Cour d'appel a souligné la preuve du nouvel utilisateur concernant l'emploi du nom Lexus par de nombreux commerces sans aucun lien avec l'automobile.

f)           L'arrêt Lexus portait sur une opposition à une demande pour un emploi projeté. Les dates pertinentes et les fardeaux de preuve dans une situation comme celle-là diffèrent largement de ceux des causes d'action et des motifs de radiation en cause en l'espèce.

g)          En raison de l'absence de prétention concernant la diminution de valeur de l'achalandage dans l'arrêt Lexus, l'étude faite par le tribunal de l'existence d'un lien entre les marchandises des parties était fondée uniquement sur le seuil de preuve d'un lien plus strict qui était nécessaire pour prouver la probabilité de confusion.

h)          Par conséquent, l'arrêt Lexus a une faible pertinence. En fin de compte, la Cour saisie de cette affaire a répété[154] le principe bien connu selon lequel « [i]l faut évaluer tous les facteurs pertinents énumérés au paragraphe 6(5) dans chaque cas et rendre une décision qui tient compte de façon appropriée de chacun d'eux » . Le commentaire suivant fait par la Cour d'appel dans Pink Panther [page 264] est particulièrement pertinent pour l'arrêt Lexus :

La plupart des décisions concernant des marques célèbres et similaires ont une faible valeur jurisprudentielle. Ces affaires reposent sur des faits particuliers, souvent uniques. Il est rare que deux marques se ressemblent ou se distinguent de la même manière. Il est peu fréquent que deux affaires concernent des entreprises du même type ou des clients du même genre. Par conséquent, les décisions rendues antérieurement peuvent s'avérer intéressantes, mais, en règle générale, elles ne sont guère utiles dans cette sorte de décision.

Les facteurs de liaison entre les automobiles et les articles de bagage

[259]        Les articles de bagage et les automobiles - notamment les automobiles JAGUAR - sont liées sous de nombreux rapports, tant dans l'esprit des consommateurs que dans une perspective commerciale concrète :

(1)         La fonction et l'emploi concurrent Si les marchandises des parties remplissent des fonctions semblables ou sont employées conjointement, les tribunaux ont tendance à conclure qu'elles sont liées. Dans Maple Leaf, des produits alimentaires étaient consommés pendant des matches de hockey. Dans Sun Life, des brochures d'assurance pouvaient se trouver à côté de jus de fruits, à des activités sportives. Dans Advance et Conde Nast, des articles et des annonces traitaient de décoration intérieure (serrures) et d'accessoires de mode (joaillerie). Dans Berry Bros, le whisky et le tabac étaient consommés de concert; en fait, « l'un encourage l'utilisation de l'autre » . Il existe un rapport analogue entre les automobiles et les articles de bagage. La fonction essentielle des deux est le transport des personnes et de leurs effets. Le coffre de l'automobile est conçu pour contenir des bagages. Les bagages sont utilisés pendant les voyages en automobile. Tous les conducteurs utilisent des sacs à main, des portefeuilles ou des porte-clés

(2)         La pratique mondiale de ce secteur Pour juger si les marchandises des parties sont liées, les tribunaux ont examiné les activités des concurrents, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur du Canada. Dans Cartier, d'autres noms célèbres de l'univers de la mode avaient pénétré le marché de la lunetterie. Dans Berry Bros, un concurrent faisait le commerce de produits du tabac et de boissons alcooliques, et une pratique courante consistait à aromatiser le tabac avec de d'alcool. Dans Johnnie Walker, selon une pratique courante dans le monde entier, les fabricants de boissons alcooliques commanditaient des activités sportives. Dans Haig, des sociétés commerciales de divers pays produisaient et vendaient de la bière et du whisky sous la même marque de fabrique. Les brasseurs de Grande-Bretagne distribuaient du scotch. Le fait que des concurrents ont fait le commerce des marchandises des deux parties a incité les tribunaux à conclure que les marchandises sont liées. Tel est le cas en ce qui concerne les automobiles et les articles de bagage. Dès les années 30 et à tout le moins à partir de la fin des années 70, de nombreuses marques d'automobiles avaient été étendues (par l'emploi ou par l'enregistrement, ou par les deux) aux articles de bagage, tant au Canada qu'à l'étranger. En outre, les fabricants de bagages comme Louis Vuitton vendent des produits sur mesure pour les automobiles.

(3)         L'expansion par l'ancien utilisateur Un lien entre les marchandises des parties a été souligné dans les cas où d'anciens utilisateurs ont fait effectivement et directement le commerce des marchandises du nouvel utilisateur, soit en application d'accords de licence, soit selon d'autres méthodes non traditionnelles. Dans Cartier, l'ancien utilisateur (joaillier) vendait de la lunetterie, quoique plusieurs années après le nouvel utilisateur. Dans Coca-Cola, la vente de verres agréés par l'ancien utilisateur avait commencé quelques mois seulement avant l'instruction. Dans Glen-Warren, la marque du concours de beauté avait été attribuée sous licence pour de la bonneterie. Dans Maple Leaf, l'ancien utilisateur avait vendu des produits alimentaires à ses matches de hockey, mais non par les réseaux habituels de vente au détail. La marque de commerce JAGUAR de Jaguar Cars est utilisée sur des valises, des pochettes pour documents de voiture et des modèles réduits depuis les années 50, et depuis les années 60, notamment sur des chaînes porte-clés, des porte-clés, des vêtements et divers accessoires personnels. Jaguar Cars a décidé d'étendre sa marque JAGUAR à une gamme complète d'articles de bagage dans le monde entier, et mis ce plan en oeuvre dès le début des années 80. Dans Cartier et Coca-Cola, les premières activités de l'ancien utilisateur dans les mêmes régions que le nouvel utilisateur ont permis de conclure que les marchandises des parties étaient liées, même si les activités du premier étaient assez récentes, et, dans Cartier, suivaient la vente de ses marchandises par le deuxième. La distribution d'articles de bagage par Jaguar Cars depuis les années 50 est un indice solide du lien réel entre ces marchandises, lequel est renforcé par l'expansion complète de Jaguar Cars dans les années 80. Sous cette rubrique, la question litigieuse n'est pas l'ordre chronologique, c'est-à-dire que ce n'est pas le premier qui vend des articles de bagage qui l'emporte. Elle concerne plutôt l'existence, aux yeux du public, d'un lien entre les automobiles et les articles de bagage. La vente d'articles de bagage par Jaguar Cars à n'importe quelle époque est un indice important d'un tel lien.

(4)         Les attributs de la marque - L'évaluation Lorsque les attributs de la marque perçus par les consommateurs sont fortement liés, les tribunaux en prennent note judiciairement. Dans Cartier, l'ancien utilisateur a plaidé que les montures de lunettes (les marchandises du nouvel utilisateur) constituaient une extension de la gamme de produits de luxe de l'ancien utilisateur. Avant d'interdire la vente des lunettes portant la marque Cartier du nouvel utilisateur, le juge Dubé a identifié certains attributs de la marque Cartier qui renforçaient la probabilité que les consommateurs perçoivent un lien entre la joaillerie de l'ancien utilisateur et les lunettes du nouvel utilisateur à titre d'accessoires de mode pour les nouveaux riches, les personnes en pleine ascension sociale, mariées, d'un certain âge, sensibles aux symboles de statut social et intéressées au style, à la qualité et au bon goût[155].

[260]        En conclusion, il existe une extension naturelle de la marque entre les automobiles et les articles de bagage de Jaguar en 1980, en 1991 et à l'heure actuelle.

Les facteurs de diminution de la valeur - Généralités

[261]        La « diminution de la valeur de l'achalandage » est la réduction, d'une manière ou d'une autre, de l'avantage constitué par la réputation et par le lien, la suppression de la totalité ou d'une partie de la clientèle à laquelle on devrait normalement s'attendre et sa diminution et, par conséquent, le fait qu'elle est moins avantageuse. L'achalandage n'a de valeur qu'en raison de la réputation et du lien dont bénéficie son propriétaire, et tout ce qui réduit cet avantage réduit la valeur de l'achalandage. Cette diminution de valeur peut découler de la réduction de l'estime dans laquelle la marque elle-même est tenue ou de la persuasion directe et du détournement de consommateurs desquels on pourrait autrement s'attendre à ce qu'ils achètent ou continuent d'acheter des marchandises qui portent la marque de commerce (Clairol)[156].

[262]        Lorsque la réputation de l'ancien utilisateur dépasse les marchandises principales de ce dernier et qu'un nouveau venu utilise la marque de l'ancien utilisateur pour d'autres marchandises, le tribunal doit déterminer la possibilité que les activités du nouveau venu lèsent la réputation générale de l'ancien utilisateur, plutôt que se limiter à la catégorie des marchandises qui fait actuellement l'objet du commerce de l'ancien utilisateur (Dunhill)[157]. Le préjudice porté au caractère distinctif d'une marque de commerce réduit nécessairement la valeur de l'achalandage lié à la marque. L'objectif visé par l'article 22 consiste à protéger cet achalandage (Sony)[158].

[263]        La société commerciale qui adopte une marque célèbre en liaison avec des marchandises dans sa zone d'expansion naturelle réussira probablement à commercialiser ses marchandises avec un minimum de publicité ou de promotion[159].

[264]        Le critère prescrit par l'article 22 n'est pas la tromperie, mais la probabilité de la diminution de valeur de l'achalandage lié à la marque de l'ancien utilisateur, laquelle peut se produire sans même qu'il y ait tromperie (Clairol)[160]. L'article 22 peut être violé même si l'origine véritable des produits du nouvel utilisateur est révélée par un examen, par le consommateur, de l'étiquette du nouvel utilisateur (Perrier)[161]. La diminution de valeur de l'achalandage que vise l'article 22 n'exige ni une confusion donnant lieu à une perte immédiate de ventes ni une concurrence commerciale entre les parties (Gucci)[162].

[265]        Dans le cadre d'un recours en commercialisation trompeuse, comme on l'a noté précédemment, le tribunal a jugé, dans Orkin, que le demandeur n'a pas à être à être en concurrence directe avec le défendeur pour être lésé. Les activités de la défenderesse pouvaient avoir pour résultat d'empêcher Orkin d'utiliser son nom commercial en Ontario lorsqu'elle y étendrait ses activités commerciales[163].

[266]        Dans Hilton Hotels v. Belkin, la cour a interdit au nouvel utilisateur d'utiliser les marques HILTON et HILTON HOTEL en liaison avec l'exploitation d'un hôtel. Elle a conclu que l'ancien utilisateur était [traduction] « renommé sur le plan international à titre de premier exploitant mondial d'hôtels [...] exploitant 28 hôtels de première catégorie [...] aux États-Unis et dans d'autres pays » à l'exception du Canada. Elle cité un ouvrage de doctrine connu sur le droit de la responsabilité délictuelle et appliqué le principe de la manière suivante:

[traduction] Dans Winfield on Tort (6e éd., p. 739), l'auteur écrit ce qui suit :

[traduction] A commet un délit civil contre B s'il commercialise frauduleusement ses marchandises ou son commerce comme étant ceux de B.

Il n'est pas nécessaire que B prouve que A a agi sciemment ou dans l'intention de tromper, ou même que quiconque ait été trompé - il suffit que la tromperie ait été probable; il n'est pas nécessaire non plus qu'il ait subi un préjudice. [Non souligné dans l'original.]

Il est impossible de prétendre, en l'espèce, que la tromperie est improbable, en fait, c'est l'inverse qui me semble, presque à l'évidence, vrai. Les sociétés demanderesses étant une organisation internationale particulièrement active sur le continent nord-américain, il est plus que probable que, pour un grand nombre de voyageurs habitués à séjourner dans des hôtels exploités par cette chaîne, la consultation d'un répertoire d'hôtels de la ville de Vancouver indiquerait un hôtel Hilton à Vancouver, et ce voyageur serait fort probablement induit en erreur et porté à croire que l'hôtel des défenderesses à Vancouver faisait partie de cette chaîne[164].

[267]        En l'espèce, la preuve est beaucoup plus convaincante, en ce sens que les marchandises de cette partie pourraient faire jouer la concurrence, et la tromperie est une possibilité. Les deux parties vendent des articles de bagage. Bien qu'à l'heure actuelle les réseaux commerciaux soient différents, en l'absence d'une injonction rien n'interdit à l'une ou l'autre partie d'emprunter des réseaux plus semblables à ceux de son concurrent.

[268]        Il y a plusieurs moyens de diminuer la valeur.

La prise d'un élément d'actif de valeur

[269]        Un ancien utilisateur est lésé par la perte de contrôle sur l'impact de sa marque de commerce dans une nouvelle région et par la possibilité de création d'un obstacle à l'emploi de sa marque à son arrivée dans cette nouvelle région, en raison de l'emploi - dans les deux cas - de la marque dans la nouvelle région par le nouvel utilisateur (Orkin)[165].

[270]        Si le nouvel utilisateur s'approprie irrégulièrement la marque de l'ancien utilisateur d'un autre champ d'activité, le préjudice est constitué par les dommages qui en résultent ou peuvent en résulter pour l'achalandage ou la réputation que s'est construit l'ancien utilisateur. Le préjudice peut aussi englober la perte du droit de l'ancien utilisateur d'exploiter sa réputation dans un champ d'activité qui n'a aucun lien avec celui-là, que l'ancien utilisateur ait ou non l'intention présente de s'engager dans ce domaine (Disney)[166].

[271]        Un tiers qui vendrait des articles de bagage liée à la marque Jaguar pourrait utiliser un achalandage d'une valeur importante pour Jaguar Cars, c'est-à-dire un élément d'actif que cette dernière pourrait donner sous licence ou vendre.

[272]        Toutefois, les mêmes liens n'auraient aucune influence sur l'achat de gomme de guar, de papier, de machines à coudre, de câbles métalliques, de caisses enregistreuses, de lacets de chaussures, d'alcool, d'équipement de télécommunication, d'instruments de manucure ou de produits de beauté. À l'égard de ceux-ci, ce sont d'autres liens qui justifient l'achat. Par conséquent, l'on ne s'attendrait pas au même lien entre Jaguar Cars et de tels produits qu'entre celle-ci et des bagages. L'emploi de la marque JAGUAR à l'égard de tels produits n'aurait donc pas d'effet sur l'achalandage de la marque de commerce JAGUAR pour les automobiles[167]. Ces produits se trouvent en dehors de la zone d'expansion naturelle de la marque de Jaguar Cars.

La perte d'exclusivité (dilution)

[273]        L'article 22 vise la réduction du caractère unique de la marque de commerce qui aura finalement un effet négatif pour l'ancien utilisateur. La valeur publicitaire et de vente d'une marque de commerce dépend souvent de son caractère unique, et la dilution porte atteinte à l'efficacité de la marque de commerce comme moyen de publicité ou de vente, ce qui peut léser le droit de propriété sur la marque de commerce au détriment du propriétaire.

[274]        Lorsque la marque de l'ancien utilisateur jouit d'une réputation suffisante pour que le public associe la marque avec les marchandises de l'ancien utilisateur, l'emploi de la marque par le nouvel utilisateur dans une région d'expansion naturelle de l'ancien utilisateur peut faire perdre à ce dernier le contrôle sur l'impact de la marque et le rendre vulnérable à l'égard de la perte de clients possibles tout en l'empêchant d'utiliser sa marque lorsqu'il connaît de l'expansion (Orkin)[168].

[275]        Lorsque le nouvel utilisateur emploie la marque de l'ancien utilisateur dans un domaine lié à ce dernier, le premier emprunte la réputation du second, et la qualité des marchandises du nouvel utilisateur n'est pas sous le contrôle de l'ancien utilisateur. Il s'agit là d'un préjudice même si, par son emploi, le nouvel utilisateur ne porte pas atteinte à la réputation ou ne détourne aucune vente. Comme le visage, la réputation est le symbole de l'ancien utilisateur, et un nouvel utilisateur ne peut utiliser celle-ci que comme un masque. L'emploi fait par le nouvel utilisateur est illicite à moins d'être tellement différent de celui de l'ancien utilisateur qu'il est impossible de les confondre (Yale)[169].

[276]        Pour conclure que la vente de meubles portant la marque GUCCI par le nouvel utilisateur avait comme effet probable de diminuer « la valeur de l'achalandage attaché à ces marques de commerce [celle de GUCCI, l'ancien utilisateur], laquelle est substantielle » - marque qui avait été enregistrée pour une vaste gamme de marchandises à l'exception de meubles - la Cour d'appel fédérale a déclaré que la diminution de valeur de l'achalandage visée par l'article 22 ne nécessitait pas une concurrence donnant lieu à une perte immédiate de vente :

[traduction] Dans le type d'action prévu par l'article [22], il y a, non pas nécessairement une confusion entre les marchandises, et donc pas de perte immédiate de ventes, mais une diminution du caractère unique de la marque de commerce qui porterait en fin de compte atteinte au droit du propriétaire de celle-ci. La valeur d'une marque de commerce quant à la publicité et aux ventes dépend dans beaucoup de cas de son caractère unique, et la dilution diminue l'efficacité de la marque de commerce en tant qu'organe de publicité ou de vente. De cette façon, le droit de propriété sur la marque de commerce subit un préjudice au détriment du propriétaire[170]. [Non souligné dans l'original.]

[277]        L'article 22 s'applique si la marque très bien connue et respectée de l'ancien utilisateur est prise par le nouvel utilisateur et appliquée à des marchandises d'une catégorie entièrement différente. L'ancien utilisateur ne perd aucune vente, mais cette situation porte atteinte au caractère unique et distinctif de la marque de commerce (S.C. Johnson)[171].

[278]        L'emploi d'une marque de commerce bien connue par un nouvel utilisateur dans un domaine commercial sans concurrence ou en liaison avec des marchandises ou des services à l'égard desquels la marque n'est pas enregistrée, serait visé par l'article 22 (Clairol)[172].

[279]        En employant les marques de l'ancien utilisateur à l'égard de marchandises non concurrentes, le nouvel utilisateur pourrait tirer profit de la réputation bien établie de l'ancien utilisateur. Une tromperie pourrait avoir tendance à réduire la qualité des marques de l'ancien utilisateur, léser l'intégrité commerciale de ce dernier et porter atteinte à son achalandage (Perrier)[173].

[280]        L'ancien utilisateur a le droit de conserver la possibilité d'exploiter son propre achalandage en étendant ses activités présentes, et cette possibilité ne devrait pas être réduite par ce que pourrait faire le nouvel utilisateur avant que l'ancien utilisateur n'entreprenne cette expansion (Sheraton)[174].

L'atteinte à la réputation

[281]        La réduction de l'estime portée aux marchandises constitue une diminution de l'achalandage. L'article 22 offre prévoit réparation pour les anciens utilisateurs à l'encontre de l'emploi de leur marque de commerce par un nouvel utilisateur qui a eu pour effet de discréditer la marque de l'ancien utilisateur (S.C. Johnson)[175].

[282]        Si on sait qu'un nombre appréciable de personnes pensent qu'il existe une relation commerciale entre l'ancien utilisateur et le nouvel utilisateur, ou s'ils en doutent, il existe un risque réel d'atteinte à la réputation ou à l'image que l'ancien utilisateur s'est soigneusement constituées. Toute absence de qualité des marchandises ou toute faiblesse dans la qualité des marchandises du nouvel utilisateur pourrait, dans l'esprit du public, se refléter sur la réputation de l'ancien utilisateur et de ses marchandises (Disney)[176].

[283]        Il existe un risque réel d'atteinte à la réputation de l'ancien utilisateur quant à sa marque dans une nouvelle région - et par conséquent à son achalandage - lorsque celui-ci est incapable de contrôler la qualité des produits ou des méthodes de mise en marché du nouvel utilisateur et, par conséquent, les effets de l'emploi de la marque, par le nouvel utilisateur, sur la réputation de la marque dans la nouvelle région (Lego)[177].

[284]        En termes généraux, si l'ancien utilisateur a acquis auprès du public une réputation relativement à une marque de commerce particulière, l'emploi de cette marque par le nouvel utilisateur, soit dans un domaine connexe soit même dans un domaine différent, peut être interdit s'il y a possibilité de confusion du public qui serait porté à croire que le produit du nouvel utilisateur possède le cachet de la marque réputée de l'ancien utilisateur. Cette confusion commerciale peut être distincte de la confusion relative au produit lorsque les marchandises du nouvel utilisateur sont achetées comme ou pour celles de l'ancien utilisateur (John Walker & Sons Ltd. v. Rothmans Int'l)[178].

La possibilité de tromperie

[285]        Outre les motifs prévus par la loi, les tribunaux ont reconnu l'existence d'autres motifs de radiation, y compris dans les cas où l'enregistrement pourrait tromper le public et l'induire en erreur[179].

[286]        Dans Williamson Candy Co. v. W.J. Crothers Co., le nouvel utilisateur avait appris l'existence de la barre de chocolat OH HENRY! de l'ancien utilisateur alors qu'il voyageait aux États-Unis. De retour au Canada, il a enregistré la marque à son propre nom, dont l'ancien utilisateur a réussi à faire radier l'enregistrement même s'il n'avait pas employé la marque au Canada. L'extrait suivant des motifs du président Maclean, dans l'arrêt, résume les objectifs de la Loi sur les marques de commerce dans le cas où un nouvel utilisateur a adopté la marque de l'ancien utilisateur qui était connue au Canada par l'intermédiaire d'imprimés publicitaires provenant des États-Unis et distribués ici. Ces principes s'appliquent également au nouvel utilisateur qui adopte la marque célèbre d'un ancien utilisateur pour des marchandises comprises dans la zone d'expansion de ce dernier :

[Traduction] L'emploi de marques de commerce a été adopté afin de distinguer, sur le marché, les marchandises d'une personne de celles d'une autre personne et d'empêcher une personne de vendre ses marchandises comme étant celles d'une autre. Le système a été conçu pour encourager le commerce honnête et pour protéger le public consommateur. On peut dire sans craindre de se tromper que notre Loi sur les marques de commerce n'a pas été adoptée pour encourager au Canada l'adoption de marques de commerces étrangères, même si l'inscrivant étranger n'a pas employé la marque ici. Une telle situation causerait de la confusion et de la tromperie, c'est-à-dire les problèmes précis que les marques de commerce étaient censées éviter, et susciterait un obstacle au commerce, un autre facteur tout à fait étranger aux objectifs visés par les marques de commerce. La loi sur les marques de commerce a été conçue autant pour l'avantage du public que pour celui des utilisateurs des marques de commerce.

Si une telle pratique était sciemment autorisée par tous les pays, l'emploi des marques de commerce donnerait lieu à la confusion la plus totale et à un résultat que les marques de commerce étaient, à l'origine, censées permettre d'éviter[180]. [Non souligné dans l'original.]

[287]        Le principe énoncé dans Williamson a été adopté par la Cour d'appel fédérale dans son arrêt rendu en 1975 dans Re Andres Wines, même si la Loi sur les marques de commerce avait fait l'objet de modifications importantes, notamment la suppression de l'expression « induire en erreur » :

La Loi a été modifiée depuis [l'arrêt Williamson], mais les observations du savant juge sont aussi valables aujourd'hui qu'en 1924 [...] le savant juge a décidé qu'étant donné la publicité faite par [l'ancien utilisateur] et la connaissance de sa marque ainsi répandue au Canada, l'enregistrement de la marque au Canada fait par [le nouvel utilisateur] « visait B tromper le public ou B l'induire en erreur » et que, pour ce motif, il y avait lieu de le radier[181].

[288]        Si l'ancien utilisateur a prouvé que sa marque de commerce distingue ses marchandises de celles de tiers, la Loi sur les marques de commerce empêche un nouveau venu de vendre ses marchandises comme étant celles de l'ancien utilisateur. L'arrêt Williamson ne portait que sur un cas dans lequel cela peut se produire. L'arrêt Clairol indique clairement que la réputation attachée à la marque d'un ancien utilisateur est protégée contre la tentative d'un nouvel utilisateur d'exploiter tout avantage conféré par l'achalandage de l'ancien utilisateur, par exemple l'exploitation de cet achalandage pour attirer des clients desquels on pourrait autrement s'attendre à ce qu'ils achètent ou continuent d'acheter des marchandises qui portent la marque de l'ancien utilisateur. Ce principe est souligné par le raisonnement des tribunaux dans Orkin et Disney, lequel ne se limite certainement pas aux nouveaux utilisateurs canadiens qui s'approprient à mauvais escient la réputation dont jouissent au Canada d'anciens utilisateurs étrangers.

[289]        Si un nouvel utilisateur emploie une marque célèbre pour des marchandises qui se trouvent dans la zone d'expansion de l'ancien utilisateur, la possibilité de tromperie qui en découle à l'égard du public canadien n'est pas moins inacceptable que l'adoption par un nouvel utilisateur de la marque d'un ancien utilisateur étranger. Dans un cas comme dans l'autre, l'adoption de la marque par le nouvel utilisateur pourrait tromper et ne saurait être tolérée.

[290]        Quelle que soit la manière dont le nouvel utilisateur s'y prend pour détourner les avantages attachés à la réputation de l'ancien utilisateur à l'égard de sa marque célèbre, l'enregistrement par le nouvel utilisateur de la marque de l'ancien utilisateur doit être radié s'il est prouvé que le nouvel utilisateur a adopté la marque célèbre pour des marchandises qui se trouvent dans la zone d'expansion de l'ancien utilisateur. Comme l'ont établi Williamson, Andres Wines, Orkin et Disney, il n'est pas nécessaire que la marque de l'ancien utilisateur ait jamais été utilisée ou qu'elle en soit venue à distinguer l'ancien utilisateur au Canada. Il suffit à l'ancien utilisateur de prouver que sa marque a dû venir à la connaissance du public canadien (y compris à l'égard de marchandises que, aux yeux du public, l'ancien utilisateur est susceptible de vendre).

[291]        Lorsqu'il a accueilli la demande de radiation de l'ancien utilisateur dans Williamson, le président Maclean a précisé ce qui suit :

[Traduction] [...] l'enregistrement litigieux [du nouvel utilisateur] a été effectué d'une manière irrégulière. [Le nouvel utilisateur] n'était pas le propriétaire de la marque et n'avait pas droit à son enregistrement, qui devrait être radiée. [Le nouvel utilisateur] n'était pas non plus le premier à employer la marque à sa propre connaissance [...] L'enregistrement [du nouvel utilisateur] vise à tromper le public à l'induire en erreur et, pour ce motif également, la marque déposée [du nouvel utilisateur] doit être radiée[182].

[292]        Dans Re Andres Wines, lorsque le nouvel utilisateur a demandé l'enregistrement de la marque SPANADA pour des vins, cette marque était devenue largement (sinon bien) connue au Canada comme la marque de l'ancien utilisateur, à la suite de la télédiffusion aux États-Unis d'annonces publicitaires reçues au Canada. Selon la Cour d'appel fédérale, « cette conclusion s'impose B la lumière de la preuve, ce qui n'enlève rien B la très grande pertinence de l'observation du savant juge de première instance sur l'absence du moindre affidavit d'un téléspectateur au Canada qui déclarerait avoir vu cette publicité sur une des stations américaines[183] » .

[293]        Après avoir noté que l'ancien utilisateur n'avait pas employé auparavant sa marque au Canada (de sorte que la marque n'était pas devenue distinctive de l'ancien utilisateur), le juge de première instance dans Re Andres Wines a refusé de conclure que la marque n'était pas distinctive du nouvel utilisateur. La Cour d'appel a marqué son désaccord avec le juge de première instance :

[...] l'enregistrement de la marque « SPANADA » par [le nouvel utilisateur] et son emploi par [le nouvel utilisateur] en liaison avec ses vins viserait à tromper le public ou à l'induire en erreur et [...] il s'ensuit que la marque n'est pas adaptée à distinguer les marchandises [du nouvel utilisateur]. L'opposition de [l'ancien utilisateur] en vertu de l'article 37(2)d) de la Loi sur les marques de commerce doit donc être accueillie[184]. [Non souligné dans l'original.]

[294]        La conclusion suivante tirée par la Cour d'appel dans Re Andres Wines s'applique directement en l'espèce :

[...] il ne me semble pas, je l'ai déjà dit, que si la marque n'était pas distinctive [de l'ancien utilisateur], elle était de ce fait "adaptée B distinguer" les marchandises [du nouvel utilisateur] et, par conséquent, distinctive [du nouvel utilisateur] ou de ses marchandises[185]. [Non souligné dans l'original.]

[295]        Les principes énoncés dans Williamson sont solidement implantés dans le droit canadien des marques de commerce. De nombreuses décisions de la Cour fédérale (outre Re Andres Wines) interdisent à un nouvel utilisateur d'adopter la marque d'un ancien utilisateur lorsque le premier avait employé cette marque antérieurement au Canada[186].

[296]        Même si M. Bassal, de Remo, ne connaissait pas la marque Jaguar, lorsque Remo a adopté pour la première fois la marque JAGUAR en 1980, cette marque était célèbre au Canada et dans le monde entier en ce qui concerne les automobiles. Et les articles de bagage fait partie de la zone d'expansion naturelle de Jaguar Cars, compte tenu de la tendance à l'expansion des marques qui était bien engagée dans le secteur de l'industrie automobile.

[297]        En conclusion, l'enregistrement de Remo est invalide et susceptible de radiation.

La probabilité de confusion

[298]        Deux moyens distincts sont fondés sur la confusion. L'on prétend que l'emploi de la marque de commerce JAGUAR par Remo en liaison avec des articles de bagage était susceptible de créer de la confusion avec la marque de commerce célèbre JAGUAR de Jaguar Cars, pour les automobiles et/ou sa marque de commerce pour les articles de bagage :

[traduction]

(1)         Le 30 octobre 1981 (lorsque l'enregistrement no 263,924 de Remo a été délivré) et le 11 janvier 1984 (lorsque cet enregistrement a été étendu), compte tenu des enregistrements antérieurs de la marque JAGUAR pour des automobiles par Jaguar Cars, la marque JAGUAR n'était pas enregistrable par Remo.

(2)         Le 10 octobre 1980 (lorsque Remo a demandé l'enregistrement de la marque JAGUAR) et le 3 mars 1982 (lorsque Remo a demandé l'extension de l'enregistrement no 263,924), compte tenu de l'emploi antérieur de la marque JAGUAR par Jaguar Cars pour des automobiles et/ou l'emploi antérieur de cette marque à l'égard d'articles de bagage, Remo n'avait pas droit à un tel enregistrement.

[299]        Bien que la plupart des questions de droit concernant ces deux motifs leur soient communes, il y a quelques différences.

[300]        Le fondement législatif de la confusion est la disposition suivante de la Loi sur les marques de commerce :

12. (1) [...] une marque de commerce est enregistrable sauf dans l'un ou l'autre des cas suivants :

[...]

d) elle crée de la confusion avec une marque de commerce déposée;

12. (1) ... a trade-mark is registrable if it is not

...

(d) confusing with a registered trade-mark;

[301]        En ce qui concerne ce motif, la connaissance que le nouvel utilisateur a de l'ancien utilisateur n'est pas pertinente, dans la mesure où il y a confusion avec un ancien enregistrement créant de la confusion, en l'espèce l'enregistrement de Jaguar Cars pour des automobiles.

[302]        Le fondement législatif de la méthode utilisée pour conclure à l'existence de la confusion est la disposition suivante de la Loi sur les marques de commerce :

6.[ ...]

(2) L'emploi d'une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l'emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques de commerce sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.

(3) L'emploi d'une marque de commerce crée de la confusion avec un nom commercial, lorsque l'emploi des deux dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à cette marque et les marchandises liées à l'entreprise poursuivie sous ce nom sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à cette marque et les services liés à l'entreprise poursuivie sous ce nom sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou services soient ou non de la même catégorie générale.

(4) L'emploi d'un nom commercial crée de la confusion avec une marque de commerce, lorsque l'emploi des deux dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à l'entreprise poursuivie sous ce nom et les marchandises liées à cette marque sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à l'entreprise poursuivie sous ce nom et les services liés à cette marque sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou services soient ou non de la même catégorie générale.

(5) En décidant si des marques de commerce ou des noms commerciaux créent de la confusion, le tribunal ou le registraire, selon le cas, tient compte de toutes les circonstances de l'espèce, y compris :                                    

a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce ou noms commerciaux, et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus;

b) la période pendant laquelle les marques de commerce ou noms commerciaux ont été en usage;

c) le genre de marchandises, services ou entreprises;

d) la nature du commerce;

e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu'ils suggèrent.

6. ...

(2) The use of a trade-mark causes confusion with another trade-mark if the use of both trade-marks in the same area would be likely to lead to the inference that the wares or services associated with those trade-marks are manufactured, sold, leased, hired or performed by the same person, whether or not the wares or services are of the same general class.

(3) The use of a trade-mark causes confusion with a trade-name if the use of both the trade-mark and trade-name in the same area would be likely to lead to the inference that the wares or services associated with the trade-mark and those associated with the business carried on under the trade-name are manufactured, sold, leased, hired or performed by the same person, whether or not the wares or services are of the same general class.

(4) The use of a trade-name causes confusion with a trade-mark if the use of both the trade-name and trade-mark in the same area would be likely to lead to the inference that the wares or services associated with the business carried on under the trade-name and those associated with the trade-mark are manufactured, sold, leased, hired or performed by the same person, whether or not the wares or services are of the same general class.

(5) In determining whether trade-marks or trade-names are confusing, the court or the Registrar, as the case may be, shall have regard to all the surrounding circumstances including

(a) the inherent distinctiveness of the trade-marks or trade-names and the extent to which they have become known;

(b) the length of time the trade-marks or trade-names have been in use;

(c) the nature of the wares, services or business;

(d) the nature of the trade; and

(e) the degree of resemblance between the trade-marks or trade-names in appearance or sound or in the ideas suggested by them.

[303]        Un principe fondamental de common law en matière de confusion :

(1)         L'emploi de la marque du nouvel utilisateur dans un domaine lié à celui ou même différent de celui dans lequel la marque de l'ancien utilisateur a acquis une réputation sera interdit si le public peut être porté, à cause de la confusion, à croire que les marchandises du nouvel utilisateur possèdent le cachet de la marque de l'ancien utilisateur. Cette « confusion commerciale » doit être distinguée de la « confusion de produits » dans le cadre de laquelle les marchandises du nouvel utilisateur sont achetées comme et à la place de celles de l'ancien utilisateur. Dans le cas de la confusion commerciale, l'ancien utilisateur ne perd pas nécessairement des ventes, mais s'il est erronément perçu comme la source des marchandises du nouvel utilisateur, il subira un préjudice considérable. Selon ce principe, la concurrence n'est pas un facteur essentiel avant la preuve du préjudice. (Cartier)[187]. Par conséquent, le fait que les produits de Remo ne font pas concurrence à ceux de Jaguar Cars n'a pas d'importance.

(2)         La probabilité de confusion est établie selon la « prépondérance de la preuve » [188]. La probabilité de confusion a été établie même si elle n'existait pas réellement.

(3)         La confusion fait appel à une décision fondée sur les faits, à l'égard de laquelle les décisions antérieures ont peu d'importance à titre de précédents (Pink Panther)[189].

(4)         Dans Cartier, il a été jugé que même si la confusion était peu probable lorsque le nouvel utilisateur a commencé à fonctionner en 1977 (ce qui n'était pas le cas), en commençant sa campagne en 1983-1984 il est entré sur le marché plus raffiné occupé par l'ancien utilisateur, ce qui a accru la probabilité de confusion[190]. Jaguar Cars a distribué effectivement des articles de bagage avant l'adoption et l'emploi de la marque par Remo, en 1980 et en 1981. Cependant, même si la vente par Remo d'un petit nombre de gammes d'articles de bagage a précédé la brochure argent en 1982 et la vaste collection Jaguar dans les années ultérieures, le principe de l'arrêt Cartier le lui interdisait.

(5)         Il n'est pas nécessaire d'interpréter le paragraphe 6(5) de manière à accorder la même important à chacun des critères qui y sont énumérés. Les circonstances particulières à une espèce peuvent justifier qu'on accorde plus d'importance à l'un des critères qu'aux autres. Par exemple pour les marques fortes qui sont bien connues partout au Canada, la distinction entre les marchandises et la nature du commerce perd de l'importance. Ces critères ne sont certainement pas décisifs pour la question de la confusion; ils ne sont que secondaires pour évaluer la probabilité de confusion[191]. En espèce, compte tenu de la célébrité de la marque d'automobile JAGUAR, il convient d'accorder une importance plus élevée aux facteurs énoncés aux alinéas 6(5)a) (la mesure dans laquelle les marques sont devenues connues), 6(5)b) (la période pendant laquelle la marque de commerce a été en usage) et 6(5)e) (le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux). Il convient d'attribuer une importance moindre aux facteurs énoncés aux alinéas 6(5)b) (le genre de marchandises) et 6(5)c) (la nature du commerce).

            Les alinéas 6(5)a) et 6(5)b)

[304]        « [L]a mesure dans laquelle ils sont devenus connus » (alinéa 6(5)a)) et « la période pendant laquelle les marques de commerce ou noms commerciaux ont été en usage » (alinéa 6(5)b)) soulèvent plusieurs questions :

(1)         Pour ce qui est de l'enregistrabilité en 1980, cette question favorise Jaguar Cars parce que sa marque est employée depuis 1936 et qu'elle était et demeure célèbre, alors que Remo n'a commencé à l'employeur qu'en 1980.

(2)         Pour ce qui est du titulaire du droit en 1980 par suite de l'emploi antérieur par Jaguar Cars à l'égard des automobiles OU des accessoires personnels, cette question favorise encore Jaguar Cars parce que l'emploi qu'elle a fait de la marque à l'égard des automobiles est célèbre par suite de son emploi depuis 1936 et que l'emploi à l'égard des accessoires personnels était à tout le moins connu au Canada en 1980 par suite de son emploi depuis les années 50 sur certains articles de bagage et accessoires personnels.

(3)         Les marques de commerce célèbres ou connues ont droit à une protection plus étendue, comme on l'a indiqué précédemment[192].

(4)         La première partie de l'alinéa 6(5)a) ne soulève aucun litige. La marque JAGUAR possède un caractère distinctif inhérent pour toutes les marchandises en cause, car elle n'est pas descriptive à leur égard. Le caractère distinctif inhérent ne se limite pas aux mots inventés. Par exemple, JAGUAR possède un caractère distinctif inhérent en ce qui concerne les automobiles. Comme nom d'un animal, JAGUAR n'a, à première vue, aucun rapport avec un véhicule motorisé.

(5)         Selon la preuve, Jaguar Cars a employé ou a fait connaître sa marque en liaison avec, à tout le moins, des valises, des pochettes pour documents de voiture et des chaînettes pour porte-clés (tous des formes d'articles de bagage) depuis bien longtemps avant 1980, et il était naturel d'étendre la marque des voitures de luxe à d'autres formes d'articles de bagage.

            Les alinéas 6(5)c) et 6(5)d)

[305]        Lorsqu'une marque forte est comparée à une marque projetée, les alinéas 6(5)c) et d), concernant « le genre de marchandises » et « la nature du commerce » , ne sont pas particulièrement déterminants[193]. La demande présentée par Remo en 1980 était fondée sur l'emploi projeté.

[306]        Lorsque la marque d'un ancien utilisateur est devenue très bien connue partout au Canada et/ou à l'étranger, elle a droit à une protection générale beaucoup plus étendue que celle accordée aux marchandises à l'égard desquelles la marque a été employée. Dans de tels cas, le fardeau qui incombe au nouvel utilisateur pour réfuter toute probabilité de confusion est particulièrement difficile[194]. Remo ne s'est pas acquittée du lourd fardeau qui lui incombait [195] de réfuter la probabilité de confusion au moment où la marque d'automobile JAGUAR était célèbre aux dates pertinentes.

[307]        Aucune affinité ou analogie stricte n'est nécessaire entre les marchandises des parties pour que le tribunal conclue que les marques prêtent à confusion. Celles-ci peuvent effectivement prêter à la confusion, que les marchandises en liaison avec lesquelles elles sont employées fassent ou non partie de la même catégorie générale[196].

[308]        Pour que la confusion soit probable, les marchandises des parties doivent être liées[197] et il faut prouver, par exemple, que des tiers ont fait le commerce des marchandises des deux parties[198], que l'ancien utilisateur a fait le commerce des marchandises du nouvel utilisateur, même en dehors des réseaux commerciaux habituels[199], ou que l'ancien utilisateur s'est livré à des activités de promotion en liaison avec des marchandises du même genre que celles du nouvel utilisateur[200]. Chacun de ces facteurs s'applique à l'espèce, tout comme les autres facteurs de liaison mentionnés dans la section sur la diminution de la valeur. Le même raisonnement s'applique.

[309]        Il suffirait que la preuve démontre que l'ancien utilisateur avait l'intention d'étendre sa marque au domaine du nouvel utilisateur[201]. En 1979 du moins, Jaguar Cars avait vendu certains accessoires personnels au Canada et avait l'intention d'étendre son marché aux accessoires personnels, à une gamme complète JAGUAR COLLECTION[202]. Les faits de l'espèce diffèrent totalement de ceux de l'arrêt Clicquot, car Jaguar Cars était très déterminée, en 1979, relativement à sa diversification et avait en fait vendu certains articles de bagage dans le passé.

[310]        Pour établir la probabilité de confusion, il n'est pas nécessaire de prouver que les marchandises sont vendues effectivement au même endroit, dans la mesure où les parties en ont le droit[203]. En 1980, Jaguar Cars avait le droit de vendre l'extension de ses articles de bagage dans n'importe quel magasin de détail de son choix. Remo a annoncé ses marchandises sur des panneaux d'affichage voisins des concessionnaires Jaguar et a refusé de les enlever[204]. Remo reconnaît, dans les faits convenus[205], que les marques de commerce qui font l'objet des enregistrements de Jaguar Cars pour la marque de commerce JAGUAR sont distinctives de Jaguar Cars au Canada en liaison avec les marchandises visées dans ces enregistrements, à l'exception des marchandises faisant l'objet de l'opposition.[206]

            L'alinéa 6(5)e)

[311]        En l'espèce, les mots servant de marque de chacune des parties sont identiques. Les dessins-marques des parties suggèrent l'un et l'autre le concept d'un Jaguar.

Les circonstances de l'espèce

[312]        Le paragraphe 6(5) oblige la Cour à tenir compte de toutes les circonstances de l'espèce.

[313]        La preuve de confusion réelle n'est pas nécessaire, car la question en litige n'est pas la confusion réelle mais la probabilité de confusion (Cartier Men's Shops)[207]. Remo soutient qu'elle n'avait pas connaissance de la confusion que pouvaient causer ses marchandises[208].

[314]        Une lecture attentive permet de constater que Remo affirme que c'est plutôt Jaguar Cars qui cause la confusion:

[Traduction] L'emploi, par la demanderesse, de la marque de commerce JAGUAR en liaison avec les marchandises de la demanderesse crée de la confusion avec la marque de commerce JAGUAR de Jaguar Cars employée en liaison avec des étuis pour permis de conduire, des étuis pour portefeuilles, des étuis pour cartes d'affaires, des ceintures, des étuis pour cartes de crédit, des étuis à clés, des carnets d'adresses, des carnets de notes, des étuis pour passeports, des étuis de beauté, des étuis à documents et des portefeuilles de poche à la date de l'introduction de l'action et à l'heure actuelle[209].

[315]        Même si la marque de l'ancien utilisateur est enregistrée par plus de 30 entités différentes (allant d'immeubles résidentiels aux entreprises de construction), cela ne signifie pas que la marque est devenue tellement répandue qu'elle a perdu son caractère distinctif et que l'ancien utilisateur est fondé à ne donner suite qu'à certains emplois, c'est-à-dire dans les domaines où la confusion était susceptible de se produire et de léser la réputation de sa marque (Cartier)[210]. Jaguar Cars n'essaye pas d'interdire l'emploi, par des tiers, de la marque JAGUAR au Canada en liaison avec des marchandises et/ou des services qui ne sont pas associés habituellement aux automobiles ou aux accessoires personnels. Jaguar Cars a pris des mesures pour interdire l'emploi non autorisé au Canada de la marque JAGUAR en liaison avec les marchandises et les services liés aux marchandises enregistrées de Jaguar Cars. Par exemple, Jaguar Cars s'est opposée à la demande canadienne no 693,313 produite le 7 novembre 1991, en application de laquelle Manufacture des Montres Jaguar S.A. a demandé l'enregistrement de la marque JAGUAR pour des montres. La demande a été rejetée[211].

[316]        Un nouvel utilisateur ne doit pas être autorisé à renforcer sa cause en produisant des preuves établissant que sa revendication était plus forte en raison de l'emploi de sa marque, après avoir pris connaissance de la revendication antérieure de l'ancien utilisateur relativement à la marque[212].

Conclusion relative à la confusion

[317]        Compte tenu de ce qui précède, la marque de commerce JAGUAR de Remo créait de la confusion, aux dates pertinentes en 1981 et en 1984, avec l'enregistrement antérieur de Jaguar Cars no UCA21,618 en ce qui concerne la marque de commerce JAGUAR pour les automobiles (alinéa 12 (1)d)).

[318]        En outre, aux dates pertinentes en 1980 et en 1982, la marque de commerce JAGUAR de Remo :

(1)         créait de la confusion avec l'emploi antérieur de Jaguar Cars pour des automobiles;

(2)         créait de la confusion avec l'emploi antérieur de Jaguar Cars pour des articles de bagage.

[319]        L'enregistrement de Remo est donc invalide pour ces motifs supplémentaires.

L'absence de caractère distinctif

[320]        Sur ce point, la question en litige est l'absence de caractère distinctif de la marque JAGUAR à l'égard des articles de bagage de Remo le 5 juin 1991 (date d'introduction de l'action), le 6 mars 1992 (date du dépôt de la demande reconventionnelle de Jaguar Cars) et à l'heure actuelle, en raison de l'emploi de la marque de commerce JAGUAR, par Jaguar Cars, en liaison avec des automobiles et/ou des articles de bagage.

[321]        Remo a intenté l'action le 5 juin 1991. Dans sa déclaration, Remo a affirmé que son enregistrement était valide, ce qui met en litige la validité de l'enregistrement. Par conséquent, selon la règle habituelle, le caractère distinctif de l'enregistrement de Remo doit être évalué en fonction des faits existant le 5 juin 1991.

[322]        Le caractère distinctif est évalué en fonction de trois éléments : 1) la marque et les marchandises ou les services doivent être liés; 2) le propriétaire de la marque emploie ce lien et vend les marchandises ou les services; 3) le lien permet au propriétaire de distinguer ses marchandises ou ses services de ceux de tiers[213].

[323]        La conformité d'une marque de commerce à ces trois critères est une question de fait à trancher par suite de l'examen de l'ensemble des circonstances. La Cour doit commencer son analyse par une étude du libellé précis de l'enregistrement contesté. Elle doit décider si le propriétaire de la marque et/ou toute autre personne utilisait ou produisait un achalandage en liaison avec la marque de commerce en litige, en liaison avec les marchandises énumérées dans l'enregistrement pendant la période pertinente. Ce ne sera qu'après avoir terminé cette analyse que la Cour sera en mesure de juger si la marque de commerce distingue effectivement les marchandises ou services de son propriétaire de ceux d'autres producteurs ou fournisseurs de telles marchandises ou de tels services[214].

[324]        La marque de commerce qui n'a pas un caractère distinctif inhérent peut acquérir un caractère distinctif par son emploi continu sur le marché. Cependant, lorsqu'un nouvel utilisateur adopte la marque d'un ancien utilisateur - qui est connue au Canada (sans égard à l'utilisation de la marque au Canada par l'ancien utilisateur de manière à rendre celle-ci distinctive de l'ancien utilisateur) - les tribunaux ne tiennent pas compte du caractère distinctif inhérent découlant de l'emploi de la marque de l'ancien utilisateur par le nouvel utilisateur, et ce parce que l'adoption originale de la marque de l'ancien utilisateur par le nouvel utilisateur ne visait pas à distinguer les marchandises du nouvel utilisateur par rapport à l'ancien utilisateur ou par rapport aux marchandises de ce dernier (Motel 6)[215].

[325]        Dans Motel 6, la marque de l'ancien utilisateur était employée aux États-Unis depuis 1961, mais elle ne l'avait jamais été au Canada avant le procès. En 1979, l'ancien utilisateur a demandé la radiation de l'enregistrement canadien du nouvel utilisateur pour essentiellement la même marque, lequel enregistrement avait été délivré en 1974 sur la base d'une demande produite en 1972. L'ancien utilisateur prétendait notamment que la marque n'était pas distinctive du nouvel utilisateur. Pour justifier la radiation de l'enregistrement, le juge Addy a écrit:

Une marque de commerce ne peut distinguer ni être propre à distinguer les services d'une personne si une autre personne a employé cette marque dans un pays étranger et que celle-ci soit devenue connue au Canada comme la marque de cette dernière personne en liaison avec des services similaires. Quant à la question de l'absence de caractère distinctif d'une marque, bien qu'il doive être établi que la marque rivale ou adverse est connue au moins jusqu'à un certain point, il n'est pas nécessaire de prouver qu'elle est bien connue ou qu'elle a été révélée uniquement par les moyens limités prévus à l'article 5 cité plus haut. Il suffit d'établir que l'autre marque est devenue suffisamment connue pour annuler le caractère distinctif de la marque attaquée.

[...]

Le moyen tiré du caractère non distinctif n'est pas limité à l'exécution réelle des services au Canada comme le cas d'une revendication en emploi antérieur sous le régime de l'article 4. Il peut être aussi fondé sur la preuve d'une connaissance ou notoriété de la marque rivale acquise par le bouche à oreille et sur la preuve d'une notoriété et d'une renommée obtenues par voie d'articles de journaux ou de magazines plutôt que par de la publicité. Peuvent être pris en compte tous les éléments de preuve pertinents tendant à établir le caractère non distinctif[216]. [Non souligné dans l'original.]

[326]        Autrement dit, en raison de l'adoption par le nouvel utilisateur de la marque de l'ancien utilisateur, laquelle jouissait au Canada d'une réputation et d'un achalandage importants avant cette adoption jusqu'au procès, la marque était incapable de distinguer les services du nouvel utilisateur peu importe la mesure dans laquelle ce dernier avait utilisé la marque. La marque JAGUAR avait déjà distingué les automobiles de Jaguar Cars et s'était étendue à des marchandises comme les articles de bagage.

[327]        Le principe selon lequel le nouvel utilisateur qui adopte la marque bien connue de l'ancien utilisateur ne devrait pas bénéficier du caractère acquis découlant de l'emploi qu'il fait de cette marque détournée a été appliqué dans d'autres cas que la radiation. Voici des exemples :

(1)         Dans Orkin (affaire de commercialisation trompeuse), la Cour d'appel de l'Ontario a rejeté la prétention du nouvel utilisateur selon laquelle l'achalandage en Ontario des marques de l'ancien utilisateur appartenait au nouvel utilisateur, étant donné qu'il avait utilisé celles-ci pendant plus de 10 ans avant que l'ancien utilisateur ne s'y oppose, et que l'ancien utilisateur n'avait exercé aucun commerce au Canada :

[Traduction] [...] à compter du commencement de l' « emploi » du [mot servant de marque de l'ancien utilisateur] en 1967, [le nouvel utilisateur] n'a acquis aucun droit à l'encontre [de l'ancien utilisateur] et si, en 1967, [l'ancien utilisateur] avait eu connaissance de ce détournement, il aurait pu obtenir une injonction contre [le nouvel utilisateur] afin de protéger ses droits en Ontario. Les droits [de l'ancien utilisateur] étaient étayés plus solidement encore en 1976, en raison de l'accroissement régulier de sa réputation en Ontario, lorsque [l'ancien utilisateur] a commencé à employer [le logo de l'ancien utilisateur] [...]

En 1967 la réputation de [l'ancien utilisateur] en Ontario, fondée sur sa clientèle dans cette province et divers moyens de publicité, était, dans les circonstances, suffisamment solide pour rendre les droits de [l'ancien utilisateur] supérieurs à ceux [du nouvel utilisateur]. Sa réputation s'est accrue régulièrement depuis 1967 [lorsque le nouvel utilisateur a commencé à employer la marque de l'ancien utilisateur] [...]

Quelles sont les circonstances ? Une circonstance très significative est la décision [du nouvel utilisateur], en 1967, d'employer le nom de [l'ancien utilisateur] en Ontario. Il s'agit là d'un élément de preuve duquel il peut être déduit que le nom [de l'ancien utilisateur] jouissait d'une valeur commerciale à l'époque en Ontario, ainsi que d'une circonstance qui a été interprétée dans plusieurs affaires comme un indice important de l'achalandage sur un territoire « étranger » : [jurisprudence omise][217].

(2)         Dans Cartier, la demanderesse avait employé, pendant de nombreuses décennies, sa fameuse marque CARTIER dans le monde entier en liaison avec de la joaillerie et d'autres articles personnels (à l'exception de la lunetterie). Lorsqu'une action en contrefaçon de marque de commerce a été intentée, la défenderesse vendait déjà au Canada, depuis six ans, des lunettes portant la marque CARTIER. La demanderesse avait commencé à vendre des lunettes portant la marque CARTIER à l'extérieur du Canada un an avant d'intenter l'action. La Cour a rejeté les prétentions de la défenderesse selon lesquelles cette série d'événements plaidait en sa faveur et cette arrivée tardive de la demanderesse et les présentes instances « constitu[aient] une véritable expropriation » . En ce qui concerne le caractère distinctif, la Cour a déclaré ce qui suit :

[...] Il existe une preuve concluante selon laquelle le nom Cartier en liaison avec des articles de bijouterie et des articles de luxe dispendieux était connu au Canada bien avant que la défenderesse commence ses activités en 1977. Celle-ci n'a commencé à faire de la publicité de façon sérieuse qu'en 1983-1984 afin de faire face à la concurrence des dessinateurs qui avaient pénétré le marché des lunettes[218].

(3)         Dans Humpty Dumpty, le juge Martin a conclu que la Commission des oppositions des marques de commerce n'aurait pas dû tenir compte de l'emploi que la demanderesse (le nouvel utilisateur) avait fait de sa marque après que la demande pendante de l'opposante (ancien utilisateur) concernant la même marque avait été invoquée à l'encontre de la demande d'emploi projeté du nouvel utilisateur, y compris l'emploi fait par ce dernier avant la date pertinente pour l'examen du motif d'opposition fondé sur l'absence de caractère distinctif (c'est-à-dire la date de production de l'opposition) :

[...] je tiens à ajouter que j'accueillerais aussi l'appel pour le motif que le président n'aurait pas dû accepter la preuve [du nouvel utilisateur] relativement à l'utilisation de la marque de commerce projetée après que [le nouvel utilisateur] eut reçu l'avis que lui a fait parvenir le Bureau des marques de commerce le 10 mai 1985. On précisait dans cet avis que la marque de commerce de l'intimée ne pourrait vraisemblablement être enregistrée vu l'antériorité de la demande de [l'ancien utilisateur] et la possibilité de confusion avec la marque de [ce dernier].

                                    Dans Molnlycke[219] [la Cour a décidé ce qui suit] :

L'erreur évidente qui consiste à considérer la date pertinente de l'examen des droits entre les parties comme la date de la procédure d'opposition plutôt que la date du dépôt de l'opposition modifierait les circonstances dans l'intervalle et renforcerait la position de l'une des parties. [Non souligné dans l'original.]

En l'espèce, [le nouvel utilisateur] a appris que sa demande ne serait vraisemblablement pas acceptée vu la confusion apparente avec la marque de commerce que [l'ancien utilisateur] souhaitait faire enregistrer. [Le nouvel utilisateur] a alors voulu raffermir sa position en soumettant des éléments de preuve visant à fonder sur l'usage le caractère prépondérant de sa demande. Compte tenu de la décision de la Cour dans l'arrêt Molnlycke, il s'agit là de circonstances qui n'auraient pas dû être prises en considération. Pour cette même raison, j'estime que la preuve des activités qu'a poursuivies [le nouvel utilisateur] après le 10 mai 1985 n'aurait pas dû être prise en considération par le président[220].

[328]        Ces principes s'appliquent à l'adoption par Remo de la marque JAGUAR, en 1980. Même si l'on avait conclu que Jaguar Cars n'avait pas « employé » , au Canada, la marque JAGUAR en liaison avec des articles de bagage avant 1980, ce qui a été le cas, la zone d'expansion de Jaguar Cars comprenait les articles de bagage en 1980. En particulier, la marque JAGUAR n'était pas distinctive des articles de bagage de Remo en 1980 ou en 1991 et n'a jamais été adaptée de manière à distinguer les articles de bagage de Remo, compte tenu du fait que la marque d'automobile JAGUAR était bien connue dans le monde entier, y compris au Canada, en 1980, et que la tendance mondiale à l'extension des marques concernant des automobiles bien connues dans le domaine des accessoires personnels, y compris les articles de bagage, était déjà bien engagée en 1980. La célébrité de la marque d'automobile JAGUAR et de l'emploi fait par Jaguar Cars de la marque à l'égard d'articles de bagage n'a fait que s'accroître entre 1980 et 1991. Compte tenu de la possibilité de confusion entre la marque de Remo et la marque de Jaguar Cars, tant pour les automobiles que les articles de bagage, la marque de Remo n'a jamais été distinctive.

[329]        Jusqu'en 1999, Remo n'a pas fait beaucoup de publicité. Puis, en 1999, bien après l'introduction de la présente action et l'obtention de la promesse de Jaguar Cars de ne pas demander une injonction interlocutoire en échange de l'abandon de la demande de marque de commerce par Remo, cette dernière a entrepris une grande campagne de publicité par panneaux d'affichage et dans les médias.

Conclusion concernant le caractère distinctif

[330]        Comme dans Motel 6, la vente par Remo d'articles de bagage portant la marque JAGUAR ne peut donner lieu d'un caractère distinctif acquis entre 1980 et 1991. En conclusion, la marque de commerce JAGUAR de Remo est invalide.

L'invalidité de l'enregistrement de Remo

[331]        L'enregistrement de Remo est invalide pour chacun des quatre motifs susmentionnés.

[332]        Voici le libellé du paragraphe 57(1) :

La Cour fédérale a une compétence initiale exclusive, sur demande du registraire ou de toute personne intéressée, pour ordonner qu'une inscription dans le registre soit biffée ou modifiée, parce que, à la date de cette demande, l'inscription figurant au registre n'exprime ou ne définit pas exactement les droits existants de la personne paraissant être le propriétaire inscrit de la marque.

The Federal Court has exclusive original jurisdiction, on the application of the Registrar or of any person interested, to order that any entry in the register be struck out or amended on the ground that at the date of the application the entry as it appears on the register does not accurately express or define the existing rights of the person appearing to be the registered owner of the mark.

[333]        En conclusion, l'enregistrement de Remo doit être radié du registre.

La validité des enregistrements de la marque de commerce de Jaguar Cars à l'égard des marchandises faisant l'objet de l'opposition

[334]        Remo demande la modification des enregistrements nos 378,643 et 378,644 de Jaguar Cars concernant la marque JAGUAR de manière à supprimer les marchandises faisant l'objet de l'opposition : les étuis pour permis de conduire, les étuis pour portefeuilles, les étuis pour cartes d'affaires, les ceintures, les étuis pour cartes de crédit, les étuis à clés, les carnets d'adresses, les carnets de notes, les étuis pour passeports, les étuis de beauté, les étuis à documents et les portefeuilles de poche.

[335]        Remo prétend qu'aux dates suivantes, l'emploi allégué ou proposé de la marque de commerce JAGUAR par Jaguar Cars en liaison avec les marchandises faisant l'objet de l'opposition était susceptible de créer de la confusion avec la marque déposée JAGUAR de Remo à l'égard des articles de bagage :

[traduction]

(1)         Le 1er avril 1987 (date de la demande des enregistrements nos 378,643 et 378,644) et compte tenu de l'emploi antérieur, par Remo, de la marque JAGUAR pour des articles de bagage; et/ou

2)          le 25 janvier 1991 (date de délivrance des enregistrements nos 378,643 et 378,644 de Jaguar Cars) et compte tenu de l'enregistrement antérieur, par Remo, de la marque JAGUAR pour des articles de bagage.

[336]        Remo prétend également que, le 9 juillet 1991 (lorsqu'elle a déposé sa déclaration), la marque de commerce Jaguar n'était pas distinctive des marchandises de Jaguar Cars faisant l'objet de l'opposition, en raison de l'emploi de la marque de commerce JAGUAR par Remo en liaison avec des articles de bagage.

[337]        La contrefaçon ainsi que l'emploi et l'enregistrement donnant lieu à une diminution de valeur de la marque de commerce JAGUAR par Remo ne sauraient rendre invalide la marque JAGUAR et les enregistrements de Jaguar Cars concernant les marchandises faisant l'objet de l'opposition. L'enregistrement de Remo est invalide et susceptible de radiation parce que l'adoption initiale de la marque JAGUAR par Remo n'a pas a été adaptée de manière à distinguer les articles de bagage de Remo des marchandises de Jaguar Cars. Depuis sa naissance, l'enregistrement de Remo était susceptible de diminuer l'achalandage de la marque de commerce de Jaguar Cars.

[338]        En equity, le nouvel utilisateur ne doit pas être en mesure d'usurper les droits afférents à la marque de commerce de l'ancien utilisateur pour la simple raison que ce dernier n'avait pas connaissance des activités de contrefaçon et de diminution de valeur commises par le nouvel utilisateur[221], même si ce dernier ne connaissait pas l'existence de l'ancien utilisateur. Pendant 10 ans, Remo a effectué des ventes avec très peu de promotions, puis elle a poursuivi Jaguar Cars. Jaguar Cars a menacé d'intenter une poursuite contre Remo en 1990, lorsqu'elle a appris l'existence de Remo, et a finalement présenté sa demande reconventionnelle contre Remo en 1992, dans un délai raisonnable après avoir appris l'emploi fait par Remo. Par la suite, huit ans après l'introduction de la présente action, Remo a entrepris, au beau milieu du procès, une importante campagne nationale de publicité par panneaux d'affichage qui pouvait modifier le caractère distinctif de la marque de Remo aux yeux du public canadien. En equity, un tel comportement de la part d'un nouvel utilisateur ne devrait pas être autorisé[222].

[339]        De toute manière, l'emploi fait par Remo ne cause pas une perte du caractère distinctif de l'enregistrement de Jaguar Cars à l'égard des marchandises faisant l'objet de l'opposition, non seulement parce que Jaguar Cars possédait un certain achalandage pour des articles de bagage avant 1980, mais aussi parce que les marchandises faisant l'objet de l'opposition constituent une extension naturelle de la célèbre marque de commerce JAGUAR de Jaguar Cars. Les consommateurs qui voient les marchandises faisant l'objet de l'opposition de Jaguar Cars relient celles-ci à la marque célèbre, et non pas à Remo.

[340]        En conclusion, les enregistrements de Jaguar Cars demeurent valides.

La diminution de valeur, la contrefaçon et la commercialisation trompeuse de la part de Remo

[341]        Les questions en litige sont les suivantes :

(1)         Remo a-t-elle employé la marque de commerce Jaguar d'une manière susceptible d'entraîner la diminution de la valeur de l'achalandage attaché aux marques déposées de Jaguar Cars, en contravention au paragraphe 22(1)?

(2)         Remo a-t-elle porté atteinte au droit exclusif de Jaguar Cars d'employer la marque de commerce déposée JAGUAR, en contravention aux articles 19 et 20?

(3)         Remo a-t-elle attiré l'attention du public sur ses marchandises de manière à causer vraisemblablement de la confusion au Canada entre les marchandises de Remo et les marchandises de Jaguar, en contravention à l'alinéa 7b)?

(4)         Remo a-t-elle commercialisé ses marchandises de manière trompeuse, en contravention à l'alinéa 7c)?

[342]        La date pertinente en ce qui concerne ces questions est celle de la décision.

[343]        La possibilité de diminution de valeur causée par Remo a été démontrée ci-dessus.

[344]        La contrefaçon et la commercialisation trompeuse sont régies par les dispositions suivantes de la Loi sur les marques de commerce :

19 ... [...] l'enregistrement d'une marque de commerce à l'égard de marchandises ou services, sauf si son invalidité est démontrée, donne au propriétaire le droit exclusif à l'emploi de celle-ci, dans tout le Canada, en ce qui concerne ces marchandises ou services.

[...]

20.      (1) Le droit du propriétaire d'une marque de commerce déposée à l'emploi exclusif de cette dernière est réputé être violé par une personne non admise à l'employer selon la présente loi et qui vend, distribue ou annonce des marchandises ou services en liaison avec une marque de commerce ou un nom commercial créant de la confusion.

* * *

7. Nul ne peut :

[...]

b) appeler l'attention du public sur ses marchandises, ses services ou son entreprise de manière à causer ou à vraisemblablement causer de la confusion au Canada, lorsqu'il a commencé à y appeler ainsi l'attention, entre ses marchandises, ses services ou son entreprise et ceux d'un autre;

c) faire passer d'autres marchandises ou services pour ceux qui sont commandés ou demandés.

19 ...The registration of a trade-mark in respect of any wares or services, unless shown to be invalid, gives to the owner of the trade-mark the exclusive right to the use throughout Canada of the trade-mark in respect of those wares or services.

...

20.      (1) The right of the owner of a registered trade-mark to its exclusive use shall be deemed to be infringed by a person not entitled to its use under this Act who sells, distributes or advertises wares or services in association with a confusing trade-mark....

* * *

7. No person shall

...

(b) direct public attention to his wares, services or business in such a way as to cause or be likely to cause confusion in Canada, at the time he commenced so to direct attention to them, between his wares, services or business and the wares, services or business of another.

(c) pass off other wares or services as and for those ordered or requested.

[345]        Chaque fois, le problème de la confusion est soulevé, cette fois-ci entre la marque de Remo concernant des articles de bagage et les enregistrements valides de Jaguar Cars pour des automobiles et des marchandises faisant l'objet de l'opposition. Selon les principes susmentionnés concernant la confusion, il est conclu que la confusion est possible.

[346]        Pour prouver la commercialisation trompeuse, l'ancien utilisateur doit démontrer que : a) la marque de commerce de l'ancien utilisateur possède une réputation (achalandage) sur le marché; b) le nouvel utilisateur a présenté de manière inexacte ses marchandises comme étant celles de l'ancien utilisateur (sciemment ou non); c) cette présentation inexacte était susceptible de tromper le public consommateur, ou visait à le tromper, de manière à lui faire penser que les marchandises du nouvel utilisateur provenaient de l'ancien utilisateur; d) cette conduite est susceptible de porter préjudice à l'achalandage de l'ancien utilisateur (Institut National)[223].

[347]        La loi présume que si la commercialisation trompeuse de marchandises empiète sur l'achalandage du commerce d'une personne, il en résultera un préjudice. Cette personne n'a pas à attendre pour prouver qu'un préjudice a été causé Sun Life)[224].

[348]        Il est conclu que Remo a enfreint les marques de commerce déposées par Jaguar Cars et a commercialisé de manière trompeuse ses marchandises en contravention aux articles 19 et 20 et aux alinéas 7)b) et 7 c) de la Loi sur les marques de commerce.

[349]        Par conséquent, Jaguar Cars a droit aux réparations suivantes : une déclaration selon laquelle l'enregistrement de Remo est invalide et les marques de commerce de Jaguar Cars sont susceptibles de subir une diminution de valeur, une contrefaçon et une commercialisation trompeuse; ainsi qu'une injonction (Whiten, Apotex)[225].

L'absence de contrefaçon ou de commercialisation trompeuse de la part de Jaguar Cars

[350]        L'enregistrement de Remo est invalide pour les motifs énoncés ci-dessus. Par conséquent, Jaguar Cars a eu le droit de vendre ses produits d'accessoires personnels en liaison avec la marque de commerce JAGUAR et, en raison de la célébrité de la marque, a eu droit aux extensions naturelles de la marque. Il est conclu qu'il n'y a pas eu de contrefaçon ni de commercialisation trompeuse de la part de Jaguar Cars.

Les dépens

[351]        Les parties ont convenu que les dépens seront traités par la voie d'observations déposées après le jugement.

CONCLUSION

[352]        L'action de Remo est rejetée et la demande reconventionnelle de Jaguar Cars est accueillie.

JUGEMENT

LA COUR ORDONNE ET DÉCLARE QUE :

1.          L'action de la demanderesse est rejetée et la demande reconventionnelle de la défenderesse est accueillie.

2.          L'enregistrement no 263,924 de la demanderesse a toujours été et demeure invalide, et est radié pour les motifs suivants, qui s'appliquent pendant toute la période pertinente :

(1)         L'emploi de la marque JAGUAR de la demanderesse en liaison avec des articles de bagage est susceptible de diminuer de la valeur de l'achalandage attaché aux enregistrements de Jaguar Cars Limited concernant les marques JAGUAR pour des automobiles, en contravention à l'article 22 de la Loi sur les marques de commerce.

(2)         L'emploi de la marque JAGUAR de la demanderesse en liaison avec des articles de bagage pourrait tromper le public et l'induire en erreur.

(3)         L'emploi de la marque JAGUAR de la demanderesse en liaison avec des articles de bagage est susceptible de créer de la confusion avec la marque de commerce JAGUAR de la défenderesse pour des automobiles et des articles de bagage; par conséquent :

a)     la marque JAGUAR de la demanderesse n'a jamais été enregistrable,

b)     la demanderesse n'a jamais eu le droit d'enregistrer la marque JAGUAR.

(4)         La marque JAGUAR de la demanderesse n'a jamais été distinctive de Remo.

3.          Les enregistrements nos 378,643 et 378,644 de la marque JAGUAR de Jaguar Cars Limited sont valides, y compris les marchandises faisant l'objet de l'opposition : les étuis pour permis de conduire, les étuis pour portefeuilles, les étuis pour cartes d'affaires, les ceintures, les étuis pour cartes de crédit, les étuis à clés, les carnets d'adresses, les carnets de notes, les étuis pour passeports, les étuis de beauté, les étuis à documents et les portefeuilles de poche.

4.          Il est interdit en permanence à la demanderesse, par ses administrateurs, dirigeants, employés et ses mandataires ou par l'intermédiaire de n'importe quelle entité qu'elle possède ou contrôle directement ou indirectement :

1)          de vendre, d'annoncer ou d'utiliser autrement au Canada, en liaison avec des produits de consommation, toute marque de commerce comprenant le mot JAGUAR ou le dessin d'un jaguar bondissant, ou toute marque de commerce et tout nom commercial qui diminue la valeur de l'achalandage attaché à la famille de marques de commerce JAGUAR possédée par les défenderesses selon la définition qui figure dans la défense modifiée et la demande reconventionnelle;

2)          d'employer la marque de commerce JAGUAR ou le dessin d'un jaguar bondissant de manière à tromper le public et l'induire en erreur;

3)          de vendre, d'annoncer ou d'utiliser autrement au Canada, en liaison avec des produits de consommation, toute marque de commerce comprenant le mot JAGUAR ou le dessin d'un jaguar bondissant, ou toute marque de commerce ou nom commercial semblables au point de créer de la confusion avec la famille de marques de commerce JAGUAR possédée par les défenderesses;

4)          d'enfreindre les droits exclusifs de la défenderesse, Jaguar Cars Limited, à l'emploi de sa famille de marques de commerce JAGUAR;

5)          d'attirer l'attention du public sur ses marchandises en employant, en liaison avec celles-ci, les marques de commerce JAGUAR ou le dessin d'un jaguar bondissant, ou toute marque de commerce, nom commercial ou raison sociale semblables au point de créer de la confusion avec la famille de marques de commerce JAGUAR;

6)         de commercialiser de manière trompeuse ou d'aider autrui à commercialiser de manière trompeuse ses marchandises comme et à la place de celles des défenderesses.

5.          La demanderesse est tenue de détruire ou de remettre sous serment aux défenderesses, en vue de leur destruction, tous les produits, emballages, matériels publicitaires, brochures publicitaires, imprimés, étiquettes, textes des annonces, bandes vidéo, films, illustrations et autres matériaux pouvant être en possession, sous le pouvoir, sous la garde ou le contrôle de la demanderesse et qui portent une marque de commerce, un nom commercial ou une raison sociale en contravention à la présente injonction.

6.          La demanderesse ne verse aux défenderesses aucuns dommages-intérêts pécuniaires -exemplaires, punitifs ou autres - parce qu'aucun dommage de nature financière n'a été prouvé jusqu'à présent. La clientèle et le marché respectifs de chaque partie sont demeurés distincts jusqu'à présent, mais ce pourrait ne pas être le cas plus tard.

7.          Dans les deux mois suivant la date du présent jugement, les parties déposeront devant la Cour des observations écrites sur les dépens. La réponse écrite, le cas échéant, sera déposée dans les deux semaines suivant la réception des premières observations.

« Michel M.J. Shore »

Juge

Traduction certifiée conforme

Michèle Ali


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                     T-1473-91

INTITULÉ :                                                    REMO IMPORTS LTD.

                                                                        c.

                                                                        JAGUAR CARS LIMITED et

                                                                        FORD MOTOR COMPANY OF CANADA,

                                                                        LIMITED/FORD DU CANADA LIMITEE,

                                                                        exploitant une entreprise sous la raison sociale

                                                                        JAGUAR CANADA

LIEU DES AUDIENCES :                             MONTRÉAL (QUÉBEC)

DATE DES AUDIENCES :                           DU 18 OCTOBRE 2004 AU 27 OCTOBRE 2004

                                                                        DU 20 JUIN 2005 AU 21 JUILLET 2005

                                                                        DU 31 OCTOBRE 2005 AU 4 NOVEMBRE 2005

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE                                      LE JUGE SHORE

DATE DES MOTIFS :                                   LE 16 JANVIER 2006

COMPARUTIONS :

Arthur Garvis                                                     POUR LA DEMANDERESSE/

Richard Uditsky                                                 DÉFENDERESSE RECONVENTIONNELLE

Douglas Wilson                                                 POUR LES DÉFENDERESSES/

Pauline Bosman                                                 DEMANDERESSES

                                                                        RECONVENTIONNELLES

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

McMILLAN BINCH MENDELSOHN           POUR LA DEMANDERESSE/

MONTRÉAL (QUÉBEC)                                 DÉFENDERESSE RECONVENTIONNELLE

RIDOUT & MAYBEE                                     POUR LES DÉFENDERESSES/

TORONTO (ONTARIO)                                 DEMANDERESSES

                                                                        RECONVENTIONNELLES


notes



[1] Rapport de M. Bergesen, paragraphe 10, voir également p. 16, pièce 13, 15; contre-interrogatoire de M. Bergesen, le 12 juillet 2005, p. 20-22.

[2] Affidavit de M. Joachimsthaler, paragraphe 1-5; pièce 1.

[3] Walt Disney Productions c Triple Five Corp. et al.(1992), 43 C.P.R. (3d) 321; conf. par (1994), 53 C.P.R. (3d) 129; autorisation d'appel refusée (1994), 55 C.P.R. (3d) vi (note) (C.S.C.).

[4] McDonald's Corp. et al. c. Coffee Hut Stores Ltd. (1994), 55 C.P.R. (3d) 463.

[5] Joseph E. Seagram & Sons Ltd. et al. c. Registraire des marques de commerce et al. (1990), 33 C.P.R. (3d) 454. (C.F. 1re inst, le juge Mackay); conf. par (1984), 3 C.P.R. (3d) 325 (C.O.M.C.).

[6] Salada Foods Ltd. c. W.K. Buckley Ltd. (1973), 9 C.P.R. (2d) 3 (C.F. 1re inst.).

[7] Mattel, Inc. c. 3894207 Canada Inc. et al. (2004), 30 C.P.R. (4th) 456., conf. (2002), 23 C.P.R. (4th) 395 (C.O.M.C.)

[8] Faits convenus D64, D65; VSA 19.

[9] Pièce VSA19; fait convenu D64.

[10] Faits convenus D38, D75, D76, D77 et D105, et témoignage de MM. Clausager, Maries, Robertson et Mackie (mémoire des défenderesses, partie 1).

[11] Faits convenus D55, 57, 58, 241, 242, 245, témoignage de M. Robertson, le 22 juin : 175.17 à 180.04; le 23 juin : 200:20 à 26:8; témoignage de M. Mackie, le 30 juin : 51.07 à 55.13; le 28 juin : 140.08 à 143.18.

[12] Fait convenu D87; mémoire des défenderesses, volume 1, partie 2.

[13] VSA 13.1, J104.63.

[14] VSA 13.1, J104.63; convertisseur de devises historique.

[15] Fait convenu D93.

[16] Mémoire des défenderesses, volume 1, partie 4.

[17] Mémoire des défenderesses, partie 4.

[18] Pièce MH 5.338, Toronto Star, 1988.

[19] Pièce MH 5.345, Toronto Star, 1988.

[20] Pièce MH 5.394, Toronto Star, 1987.

[21] Faits convenus D34-D38.

[22] Fait convenu D220A.

[23] Faits convenus 75-77, 81, 82-86; liste des documents clés des défenderesses, p. 2-4.

[24] Témoignage de M. Maries, le 27 juin :14.11 à 14.23; témoignage de M. Clausager, le 28 juin: 58.10 à 59.16.

[25] Fait convenu D220A.

[26] Fait convenu D221A.

[27] Faits convenus D222, 223.

[28] Fait convenu D241.

[29] Fait convenu D246A.

[30] Fait convenu D254(4)-(7).

[31] Fait convenu D260.

[32] Mémoire des défenderesses, p. 71-72.

[33] Mémoire des défenderesses, p. 72; faits convenus D224A, B, D225, D226, D227.

[34] Mémoire des défenderesses p. 72-73; fait convenu D255.

[35] Faits convenus D230-D234.

[36] Faits convenus D238-D239.

[37] Mémoire des défenderesses, p. 79; fait convenu D261.

[38] Mémoire des défenderesses, p. 75-76; faits convenus D246A, B.

[39] Mémoire des défenderesses, p. 76-79; voir aussi annexe I.1; faits convenus D221B, C, D254, D258.

[40] Mémoire des défenderesses, p. 79; fait convenu D261.

[41] Fait convenu D266.

[42] Mémoire des défenderesses, p. 80-81; faits convenus D91, D227, D276, D280-282, D285, D287.

[43] Faits convenus D266, D268, D269, D270.

[44] Mémoire des défenderesses, p. 73-75.

[45] Mémoire des défenderesses, p. 79-80.

[46] Mémoire des défenderesses, p.81-82.

[47] Mémoire des défenderesses, p. 82.

[48] Mémoire des défenderesses, p. 89; faits convenus D182, 183, 185-192, 194, 223, 224A, 225, 245; documents clés des défenderesses, p. 6, 6A, 11.

[49] Mémoire des défenderesses, p. 89-91; faits convenus D195A, B, C.

[50] Mémoire des défenderesses, p. 89; faits convenus D183, 192, 213-218, 224A, 225.

[51] Mémoire des défenderesses, p. 91-93; fait convenu D200.

[52] Faits convenus D199, 200.

[53] Mémoire des défenderesses, p. 93; faits convenuss D202-207.

[54] Faits convenus D208, 236.

[55] Fait convenu D209.

[56] Mémoire des défenderesses, p. 61; fait convenu D181.

[57] Fait convenu D201.

[58] Fait convenu D211.

[59] MH2.120.

[60] MH5.304.

[61] MH2.28.

[62] Témoignage de M. Causager, le 28 juin : 59.17 à 60.15.

[63] Fait convenu D195B4.

[64] Fait convenu D195B(5).

[65] Fait convenu D195B(6).

[66] Fait convenu D195B(11).

[67] Fait convenu D195B(12).

[68] Fait convenu D195B(13).

[69] Fait convenu D195A(1), voir aussi le témoignage de M. Clausager, le 28 juin : 67.10 à 69.21; 103.07 à 104.16.

[70] Fait convenu D195A(5), voir aussi le témoignage de M. Clausager, le 28 juin : 71.01 à 73.08; 104.17 à 105.15.

[71] Fait convenu D195A(8).

[72] Fait convenu D195A(9), voir aussi le témoignage de M. Clausager, le 28 juin : 69:22 à 70:14; 62.20 à 64.10; 100.16 à 102.07.

[73] Témoignage de M. Manuel, le 23 juin 2005.

[74] Mémoire des défenderesses, p. 97-102.

[75] Fait convenu 254(4).

[76] Mémoire des défenderesses, p. 96-97.

[77] Mémoire des défenderesses, p. 102-103.

[78] Mémoire des défenderesses, p. 103.

[79] Mémoire des défenderesses, p. 94-96.

[80] Témoignage de M. Maries, le 27 juin : 191.01 à 197.02.

[81] Témoignage de M. Maries, le 27 juin : 191.01 à 197.01; 197.03 à 203.13; le 29 juin : 106.15 à 108.24; 179.06 à 181.20; 186.20 à 190.04.

[82] Témoignage de M. Green, le 30 juin : 124.03 à 125 :20.

[83] Témoignage de M. Mackie, le 30 juin : 17.03 à 21.21.

[84] Témoignage de M. Maries, le 27 juin : 203.14 à 206.19,

[85] Témoignage de M. Maries, le 27 juin : 206.20 à 209.03; le 29 juin : 23.07 à 25.17.

[86] Témoignage de M. Mackie, le 30 juin : 85.01 à 86.18, 95.21 à 97.12; pièce J105.16.

[87] Faits convenus D87, 108, 122-129, 131, 133, 134-136, 140, 141.

[88] Faits convenus D92, 147, 230, 232-235, 266, 267, 272, 273.

[89] Faits convenus D112, 113, 114, 128, 137A, 137B, 139, 220B, 221A,(2)(i), 221B(1), 221C(1), 246B, 249-253, 257, 258, 276, 277, 278, 280, 285, 288.

[90] Mémoire des défenderesses, p. 129-9.

[91] Mémoire des défenderesses, p. 129-130.

[92] Mémoire des défenderesses, p. 131-132.

[93] Faits convenus D50, 113, 114, 150-153, 156-158, 161-164, 166, 167, 171, 210, 259, 289-292, 294, 296-302; témoignage de Mme Shortt, le 21 juin : 258.03 à 268.15; le 22 juin : 146.19 à 147-13.

[94] Faits convenus D370-505.

[95] Faits convenus D375, 376, 391, 404, 405, 411B, 425, 426, 427.

[96] Témoignage de M. Maries, le 27 juin : 167.15 à 190.23; témoignage de M. Green, le 30 juin : 122.16 à 124.02,

[97] Faits convenus D33, D82.

[98] Faits convenus D33-35.

[99] Faits convenus D347, 348.

[100] Contre-interrogatoire de M. Bassal, le 20 octobre 2004, 164.5 à 166.15, 170.19 à 173.3.

[101] Faits convenus D306, 307, 310; P4, 25; contre-interrogatoire de M. Bassal, le 20 octobre 2004, 207.7 à 212.23.

[102] Faits convenus P5, 6; D309.

[103] Faits convenus P10, 888, 889; D305, 311, 314, 321, 322, 324-326, 328, 329, 358, 359.

[104] Faits convenus P890; D364, D361, D362, P808.

[105] Faits convenus D9, P7.

[106] Fait convenu D22.

[107] Faits convenus P8, D10-12, 14, 18.

[108] Faits convenus D15, 16, 18.

[109] Fait convenu P9.

[110] Faits convenus D365-367, P836, P847, P849, P881.

[111] Fait convenu D368.

[112] Faits convenus D20, D21; contre-interrogatoire de M. Bassal, le 20 octobre 2004, 190.12 à 202.22.

[113] Faits convenus P10, 11-13; D319, 355.

[114] Témoignage de M. Joachimsthaler.

[115] Contre-interrogatoire, le 20 juin 2005, 42.05 à 43.25.

[116] Contre-interrogatoire de M. Bassal, le 20 juin 2005, 57.22 à 58.16.

[117] Contre-interrogatoire de M. Bassal, le 21 juillet 2005, 156.12 à 164.14.

[118] Contre-interrogatoire de M. Bassal, le 20 juin 2005, 48.01 à 48.13.

[119] Faits convenus D33, D34, D35.

[120] John Haig & Co. Ltd. c. Haig Beverages Ltd. (1975), 24 C.P.R. (2d) 66 à la page 71, (QL) à la page 4 (C.F. 1re inst., le juge Addy); inf. (1974) 21 C.P.R. (2d) 271 (C.O.M.C.); Leaf Confections Ltd. c. Maple Leaf Gardens Ltd. (1986), 12 C.P.R. (3d) 511 à la page 520, (QL) à la page 3 (C.F. 1re inst., le juge Rouleau); conf. (1984), 3 C.P.R. (3d) 93 (C.O.M.C.); conf. par (1988), 19 C.P.R. (3d) 331 (C.A.F., les juges Heald, Mahoney, Hugessen); Advance Magazine Publishers Inc. c. Masco Building Products Corp. (1999), 86 C.P.R. (3d) 207 au paragraphe 33 (C.F. 1re inst., le juge en chef adjoint Richard); inf. (1996), 73 C.P.R. (3d) 311 (C.O.M.C.); Danjaq Inc. c. Zervas (1997), 75 C.P.R. (3d) 295 à la page 303, (QL) à la page 7 (C.F. 1re inst., le juge Lutfy); inf. (1996), 67 C.P.R. (3d) 247 (C.O.M.C.); United Artists Corp. c. Pink Panther Beauty Corp. (1998), 80 C.P.R. (3d) 247 aux paragraphes 40, 41, 43 (C.A.F., le juge en chef Isaac, les juges Linden et McDonald); inf. (1996), 67 C.P.R. (3d) 216 (C.F. 1re inst., le juge Mackay); conf. (1990), 34 C.P.R. (3d) 135 (C.O.M.C.).

[121] Cartier Inc. c. Cartier Optical Ltd. (1988), 20 C.P.R. (3d) 68 aux pages 70-71, (QL) à la page 3 (C.F. 1re inst., le juge Dubé).

[122] Miss Universe, Inc. c. Bohna (1994), 58 C.P.R. (3d) 381 aux pages 388-390, (QL) à la page 7 (C.A.F. les juges Hugessen, Décary, Létourneau); inf. (1992), 43 C.P.R. 3(d) 462 (C.F. 1re inst., le juge Strayer); conf. (1991), 36 C.P.R. (3d) 76 (C.O.M.C.).

[123] Sun Life Assurance Co. of Canada v. Sunlife Juice Ltd. (1988), 22 C.P.R. (3d) 244 (QL) aux pages 5-6 (H.C. Ont., le juge MacFarland).

[124] Berry Bros. & Rudd Ltd. c. Planta Tabak-Manufactur Dr. Manfred Oberman (1980), 53 C.P.R. (2d) 130 à la page 134, (QL) à la page 4 (C.F. 1re inst., le juge Cattanach); inf. (1979), 47 C.P.R. (2d) 205 (C.O.M.C.).

[125] John Walker & Sons Ltd. v. Steinman (1965), 44 C.P.R. 58 aux pages 60-62, (QL) à la page 2 (MCEnr).

[126] Glen-Warren Productions Ltd. c. Gertex Hosiery Ltd. (1990), 29 C.P.R. (3d) 7 à la page 13, (QL) à la page 5 (C.F. 1re inst., le juge Dubé); inf. (1989), 25 C.P.R. (3d) 309 (C.O.M.C.).

[127] Veuve Clicquot Ponsardin v. Boutiques Cliquot Ltée. (2003), 28 C.P.R. (4th) 520 aux paragraphes 59, 75 (C.F. 1re inst., la juge Tremblay-Lamer); conf. par (2004), 35 C.P.R. (4th) 1 (C.A.F., les juges Desjardins, Noël, Nadon); autorisation d'appel devant la C.S.C. accordée.

[128] Clairol International Corp. and Clairol Inc. of Canada c. Thomas Supply & Equipment Co. Ltd. et al. (1968), 55 C.P.R. 176 (C. de l'É.).

[129] S.C. Johnson & Son, Ltd. c. Marketing International Ltd. (1977), 32 C.P.R. (2d) 15 à la page 29 (QL) à la page 10 (C.F. 1re inst., le juge Cattanach); inf. (1978), 41 C.P.R. (2d) 35 (C.A.F., le juge en chef Jackett, les juges Urie, Ryan); conf. par (1979), 44 C.P.R. (2d) 16 (C.S.C., les juges Martland, Pigeon, Dickson, Estey, McIntyre).

[130]Orkin Exterminating Co. Inc. v. Pestco Co. of Canada Ltd. (1985), 5 C.P.R. (3d) 433 à la page 444, (QL) aux pages 8-9 (C.A. Ont.): les juges Zuber, Morden et Robins); conf. (1984), 80 C.P.R. (2d) 153 (H.C.J. Ont.); Disney précité,; Alfred Dunhill Ltd. c. Sunoptic S.A., [1979] F.S.R. 337 à la page 362 (C.A. du R.-U., les juges Megaw, Roskill et Brone) invoqué dans Cartier à la page 73, (QL) à la page 4.

[131] Orkin, précité, à la page 444, (QL) aux pages 8-9.

[132] Orkin , précité, à la page 454, (QL) à la page 15.

[133] Clairol, précité, à la page 195, (QL) à la page 12.

[134] Clicquot, précité, à la page 541, (QL) au paragraphe 94; ITV Technologies, Inc. c. WIC Television Ltd. (2003), 29 C.P.R. (4th) 182 aux paragraphes 195-196 (C.F. 1re inst., la juge Tremblay-Lamer); conf. par (2005), 38 C.P.R. (4th) 481 (C.A.F., les juges Noël, Evans, Pelletier).

[135] Pink Panther, précité, au paragraphe 43.

[136] Clicquot, précité, au paragraphe 5.

[137] Advance, précité, aux paragraphes 39-53.

[138] Glen-Warren, précité, aux pages 11-12, (QL) à la page 4.

[139] Cartier, précité, aux paragraphes 3-5 (QL).

[140] Sun Life, précité, aux pages 251-52, (QL) à la page 6.

[141] Maple Leaf, précité, à la page 519, (QL) à la page 4.

[142] Conde Nast Publications Inc. c. Gozlan Brothers Ltd. (1980), 49 C.P.R. (2d) 250 à la page 255, (QL) à la page 4: (C.F. 1re inst., le juge Cattanach); inf. (1978), 43 C.P.R. (2d) 234 (C.O.M.C.).

[143] Berry Bros, précité, à la page 142, (QL) à la page 9.

[144] Coca-Cola Ltd. c. Fisher Trading Co. (1988), 25 C.P.R. (3d) 200 aux pages 202-203 (QL) à la page 3 (C.F. 1re inst., le juge Teitelbaum).

[145] John Walker, précité, aux pages 60-61, (QL) à la page 2.

[146] Haig, précité, à la page 274, (QL) à la page 3.

[147] Toyota Jidosha Kabushiki Kaisha c. Lexus Foods Inc. (2000), 9 C.P.R. (4th) 297 (C.A.F., les juges Strayer, Linden, Malone); inf. (1999), 2 C.P.R. (4th) 62 (C.F. 1re inst., le juge Blais); inf. (1997), 79 C.P.R. (3d) 131 (C.O.M.C.).

[148] Mattel, Inc. c. 3894207 Canada Inc. (2004), 30 C.P.R. (4th) 456 (C.F. 1re inst.); conf. (2002), 23 C.P.R. (4th) 395 (C.O.M.C.).

[149] Seagram, précité.

[150] Playboy Enterprises, Inc. c. Astro Tire & Rubbert Co. of Canada Ltd. (1978), 46 C.P.R. (2d) 87 (C.O.M.C.).

[151] Clicquot, précité, à la page 535.

[152] Clicquot, précité, à la page 535.

[153] Clicquot, précité, à la page 535.

[154] Toyota c. Lexus Foods, précité, à la page 300.

[155] Cartier, précité, à la page 74, (QL) aux pages 4-5.

[156]Clairol, précité, aux pages 199-200, (QL) à la page 15.

[157] Dunhill, précité.

[158] 826129 Ontario Inc. c. Sony Kabushiki Kaisha (1995), 65 C.P.R. (3d) 171 à la page 183, (QL) à la page 8 (C.F. 1re inst., le juge McKeown ).

[159] Affidavit de M. Joachimsthaler; affidavit de M. Moorthy.

[160] Clairol, précité, à la page 195, (QL) à la page 12.

[161] Source Perrier (Société Anonyme) c. Fira-Less Marketing Co. Ltd. (1983), 70 C.P.R. (2d) 61 à la page 65, (QL) à la page 3 (C.F. 1re inst., le juge Dubé).

[162] Meubles Domani's c. Guccio Gucci S.P.A. (1992), 43 C.P.R. (3d) 372 aux pages 380-381, (QL) à la page 7 (C.A.F.); Cie Générale des Établissements Michelin-Michelin & Cie c. C.A.W.-Canada (1996), 71 C.P.R.(3d) 348 à la page 363, (QL) à la page 15 (C.F. 1re inst., le juge Teitelbaum); Clicquot, à la page 540, (QL) à la page 14; ITV, précité, à la page 230.

[163] Orkin, précité, aux pages 43-34.

[164] Hilton Hotels Corp. et al. c. Belkin and Kalensky (1955), 24 C.P.R. 100 à la page 102 (C.S. C.-B, le juge McInnes).

[165] Orkin, précité,à la page 454, (QL) à la page 15; adopté dans Disney à la page 153, (QL) à la page 18.

[166] Disney, précité, à la page 153, (QL) à la page 18.

[167] Affidavit de M. Joachimsthaler, aux pages 39, 60.

[168] Orkin, précité, à la page 444, (QL) à la page 8; adopté dans Disney, précité, à la page 147, (QL) à la page 14.

[169] Yale Electric Corp v. Robertson, 26 F. 2d 972 aux pages 973-974 (1928, 2nd Cir. C.A.); adopté dans Orkin, précité, à la page 445, (QL) à la page 9; adopté dans Disney, précité, aux pages 147-148, (QL) à la page 14.

[170] Meubles Domani's c. Guccio Gucci S.P.A. (1992), 43 C.P.R. (3d) 372 aux pages 380-381, (QL) à la page 7 (C.A.F., les juges Marceau, MacGuigan et Décary); conf. (1991), 39 C.P.R. (3d) 119 (C.F. 1re inst., le juge en chef adjoint Jerome).

[171] S.C. Johnson, précité,, C.F. 1re inst., à la page 29, (QL) à la page 11.

[172] Clairol, précité, à la page 12.

[173] Perrier, précité, à la page 65, (QL) à la page 3.

[174] Sheraton Corp. of America v. Sheraton Motels Ltd., [1964] R.P.C. 202 à la page 204 (H.C. Angl.); adopté dans Orkin, aux pages 444-445, (QL) à la page 9; adopté dans Disney, précité, à la page 147, (QL) à la page 14.

[175] S.C. Johnson, précité, à la page 29, (QL) aux pages 10-11.

[176] Disney, précité, à la page 154, (QL) à la page 19.

[177] Lego System Aktieselskab v. Lego Motels Ltd., [1983] F.S.R. 155 à la page 195 (C. Ch.); adopté dans Disney, précité, à la page 154, (QL) aux pages 18-19.

[178] John Walker & Sons Ltd. v. Rothmans Int'l, [1978] F.S.R. 357 à la page 360 (H.C.J); adopté dans Cartier, précité, à la page 76, (QL) à la page 6.

[179] Gill, Kelly et R. Scott Jolliffe, Fox on Canadian Law of Trade-marks and Unfair Competition, 4e éd.., Thomson Carswell, 2002, aux pages 11-24. Williamson Candy Co. v. Crothers Co., [1925] R.C.S. 377 à la page 3. Re Andres Wines Ltd. c E. & J. Gallo Winery (1975), 25 C.P.R. (2d) 126 à la page 10 (C.A.F., les juges Thurlow, Ryan et LeDain, JJ.); inf. (1974), 14 C.P.R. (2d) 204 (C.F. 1re inst.); conf. (1973), 9 C.P.R. (2d) 154 (C.O.M.C.).

[180] Williamson Candy Co. v. W.J. Crothers Co., [1924] R.C. de l'É. 183 aux paragraphes 14-15 (P. Maclean); conf. par [1925] R.C.S. 377 (le juge en chef Anglin).

[181] Re Andres Wines, précité, à la page 10.

[182] Williamson, précité, au paragraphe 16.

[183] Re Andres Wines, précité, aux pages 136-37, (QL) à la page 8.

[184] Re Andres Wines, précité, à la page 140, (QL) à la page 10.

[185] Re Andres Wines, précité, à la page 138, (QL) à la page 8.

[186] Wilhelm Layher GmbH c. Anthes Industries Inc. (1986), 8 C.P.R. (3d) 187 aux pages 194-195, (QL) à la page 7 (C.F. 1re inst., le juge McNair); Anheuser-Busch, Inc. c. Carling O'Keefe Breweries of Canada Ltd. (1986), 10 C.P.R. (3d) 433 aux pages 444-447, (QL) aux pages 11-12 (C.A.F., les juges Heald, Mahoney et Stone); Moore Dry Kiln Co. Of Canada Ltd. c. U.S. Natural Resources Inc. (1976), 30 C.P.R. (2d) 40 aux pages 45-46, (QL) à la page 8 (C.F. 1re inst., le juge Mahoney); Valle's Steak House c. Tessier et al. (1980), 49 C.P.R. (2d) 218 à la page 227, (QL) à la page 7 (C.F. 1re inst., le juge Marceau).

[187] Cartier, précité, à la page 6 (QL).]

[188] Dion Neckware Ltd. c. Christian Dior, S.A. (2002), 20 C.P.R. (4th) 155 (C.A.F.) aux paragraphes 10-12.

[189] Pink Panther, précité, au paragraphe 39.

[190] Cartier, précité, aux pages 80-81, (QL) à la page 9.

[191] Advance, précité, au paragraphe 31; Maple Leaf, précité, aux pages 519-520.

[192] Cartier, Advance, Pink Panther,Glen-Warren, Maple Leaf, Berry Bros, Sun Life, précités.

[193] Miss Universe, précité, à la page 388, (QL) à la page 6.

[194] Advance, précité, aux paragraphes 34 et 37.

[195] Advance, précité.

[196] Maple Leaf, précité, à la page 519.

[197] Clicquot, Pink Panther, précités.

[198] Berrry Bros, précité.

[199] Maple Leaf, précité.

[200] Sun Life, Glen-Warren, précités.

[201] Cartier, Orkin, Pink Panther, Maple Leaf, Sun Life, précités.

[202] Clicquot, précité,.

[203] Cartier Men's Shops Ltd. c. Cartier Inc. (1981), 58 C.P.R. (2d) 68 à la page 74, (QL) à la page 3 (C.F. 1re inst.).

[204] Faits convenus D368.]

[205] D33-D35.

[206] Faits convenus D34, 35.

[207] Cartier Men's Shops, précité, à la page 73.

[208] DT31 - Onglet 13, contre-interrogatoire de M. Bassal, le 20 juin 2005, aux pages 58.14 à 59.05.

[209] Fait convenu D509.

[210] Cartier, précité.

[211] Jaguar Cars Ltd. c. Manufacture des Montres Jaguar S.A. (1997), 78 C.P.R. (3d) 548 (C.O.M.C.); fait convenu D532; voir aussi le fait convenu D304 VS104.

[212] Humpty Dumpty Foods Ltd. v. George Weston Ltd. (1989), 24 C.P.R. (3d) 454.

[213] Alibi Roadhouse Inc. c. Grandma Lee's International Holdings Ltd. (1997), 76 C.P.R. (3d) 327 à la page 333, (QL) à la page 6 (C.F. 1re inst., le juge Teitelbaum); Labatt Brewing Co. c. Molson Breweries, A Partnership (1992), 42 C.P.R. (3d) 481 à la page 494, (QL) à la page 9 (C.F.1re inst., le juge Dubé).

[214] Alibi, à la page 333, (QL) à la page 6; Steinberg Inc. c. J.L. Duval Ltée, (1993), 44 C.P.R. (3d) 417 à la page 420, (QL) à la page 3 (C.F. 1re inst., le juge Denault); White Consolidated Industries, Inc. c. Beam of Canada Inc. (1991), 39 C.P.R. (3d) 94 aux pages 109-111, (QL) à la page 12 (C.F. 1re inst., le juge Teitelbaum); Orkin, précité.

[215] Motel 6, Inc. c. No. 6 Motel Ltd. (1981), 56 C.P.R. (2d) 44 à la page 58, (QL) à la page 10 (C.F. 1re inst., le juge Addy).

[216] Motel 6, précité, aux pages 58-59, 60-61, (QL) aux pages 10-12.

[217] Orkin, précité, aux pages 452, 454, (QL) aux pages 15, 13.

[218] Cartier, précité, aux pages 72-74, (QL) aux pages 4-5.

[219] Aktiebolag v. Kimberly-Clark of Canada Ltd. (1982), 61 C.P.R. (2d) 42.

[220] Humpty Dumpty aux pages 461-462, (QL) aux pages 5-6 (C.F. 1re inst., le juge Martin).

[221] Témoignage de M. Maries, le 29 juin:111.20 à 116.20; témoignage de M. Mackie le 30 juin: 90.11 à 92.02; témoignage de Mme Shortt, le 21 juin : 271.02 à 271.08.

[222] Humpty Dumpty, précité, à la page 2.

[223] Institut National des Appellations d'Origine des Vins et Eaux-de-Vie et al. v. Andres Wines Ltd. et al., [1987] O.J. no 644, (QL) aux pages 18-20 (H.C.), conf. par [1990] O.J. no 1005.

[224] Sun Life, précité, à la page 252, (QL) à la page 7.

[225] Whiten c. Pilot Insurance Co., [2002] 1 R.C.S. 595 au paragraphe 112. (C.S.C.); Apotex Inc. c. Merck & Co., [2003] A.C.F. no 1034, (QL) au paragraphe 34 (C.A.F.).

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