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Date : 20060216

Dossier : T-694-03

Référence : 2006 CF 206

Vancouver (Colombie-Britannique), le 16 février 2006

EN PRÉSENCE DE MADAME LA JUGE HENEGHAN

ENTRE :

BIOSIG INSTRUMENTS INC.

demanderesse

et

SEARS CANADA INC. et

ICON DU CANADA, INC.

défenderesses

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

INTRODUCTION

[1]                Biosig Instruments Inc. (la demanderesse) interjette appel de l'ordonnance en date du 23 mars 2005 par laquelle la protonotaire Milczynski a accueilli la requête de Sears Canada Inc. et d'Icon du Canada, Inc. (les défenderesses) en vue de radier la déclaration modifiée de nouveau du 25 mars 2004.

[2]                Voici l'extrait pertinent de l'ordonnance de la protonotaire :

[traduction] [...]

2.    La déclaration modifiée de nouveau qui comporte les précisions en date du 25 mars 2004 est radiée et l'action intentée devant la Cour fédérale dans le dossier numéro T-694-03 est rejetée.

[3]                Dans l'inscription jointe à son ordonnance, la protonotaire a justifié sa décision en ces termes :

[traduction] Malgré les tentatives répétées en vue d'étoffer son allégation de contrefaçon, la demanderesse n'a pas invoqué les faits pertinents à l'appui de celle-ci. Je conviens avec les défenderesses qu'elles ne peuvent savoir, à la lumière de l'acte de procédure de la demanderesse, quels sont les éléments de chacune des revendications du brevet 014 qui sont contrefaits par les produits d'Icon. La demanderesse n'a pas expliqué en quoi les produits d'Icon sont visés par la portée de chaque élément de la revendication 1 du brevet 014 et a simplement formulé la conclusion de droit. De plus, par suite des efforts visant à répondre à la demande de précisions et de certaines révisions apportées à l'acte de procédure, les allégations de la déclaration sont dispersées un peu partout dans le document et celui-ci est difficile à suivre.

Il appert clairement de la jurisprudence que le critère à établir pour radier une déclaration et rejeter une action plutôt que d'ordonner à la partie concernée de fournir des précisions ou de modifier son acte de procédure est un critère élevé. Cependant, il est également évident dans la présente affaire que de simples assertions qui ne sont pas appuyées par des faits pertinents ne mèneraient qu'à une recherche à l'aveuglette dans l'espoir de trouver un fondement au soutien d'une allégation. La déclaration en entier ne peut être acceptée et doit être radiée. [...]


LES FAITS À L'ORIGINE DU LITIGE

[4]                La demanderesse a engagé la présente action en contrefaçon de son brevet canadien n ° 2,033,014 (le brevet 014). Il s'agit d'un brevet de modèle d'utilité qui concerne l'utilisation de circuits électroniques dans un moniteur de fréquence cardiaque. Le brevet comporte quatorze (14) revendications, y compris un certain nombre de revendications dépendantes.

[5]                Le 26 septembre 2003, Icon a déposé un avis de requête en vue d'être constituée partie défenderesse. Le 16 octobre 2003, une ordonnance faisant droit à cette requête a été rendue. Le 23 octobre 2003, la demanderesse a signifié une déclaration modifiée à Sears et à Icon.

[6]                Le 27 octobre 2003, Icon a signifié à la demanderesse une requête qui comprenait une demande de précisions, une demande de documents et une demande visant à radier certains paragraphes de la déclaration modifiée. Par la suite, le 31 octobre 2003, Icon a sollicité et obtenu sur consentement une ordonnance prorogeant le délai relatif au dépôt de sa défense.

[7]                Dans une ordonnance datée du 10 novembre 2003, le protonotaire Lafrenière a rendu la décision suivante au sujet de la demande de production de documents présentée contre la demanderesse :

[traduction]

LA COUR ORDONNE :

1.          Le paragraphe 3 de l'ordonnance du 16 octobre 2003 dans laquelle le protonotaire Lafrenière a exigé la signification et le dépôt de la défense ou de la défense et demande reconventionnelle de la défenderesse Icon est modifié.

2.          La défenderesse Icon doit déposer et signifier sa défense ou sa défense et demande reconventionnelle au plus tard deux semaines suivant la date de réception de la déclaration modifiée finale de la demanderesse ou des précisions conformément au texte final de la demande de précisions dont les parties auront convenu, le cas échéant, ou suivant la date de l'ordonnance exigeant des précisions ou radiant certaines parties de la déclaration, dans l'éventualité où les parties ne peuvent s'entendre sur le texte final de la demande de précisions, si cette date est postérieure.

[8]                Entre le 17 décembre 2003 et le 16 mars 2004, les avocats de la demanderesse et d'Icon se sont échangé de la correspondance concernant le contenu du projet de réponse aux précisions.

[9]                Le 25 mars 2004, la déclaration modifiée de nouveau a été signifiée aux deux défenderesses. À la même date, la demanderesse a fourni des copies des documents qui étaient sollicités dans la demande de précisions.

[10]            Le 7 avril 2004, Icon a déposé un avis de requête visant à faire radier la déclaration modifiée de nouveau, sans autorisation de modification, ainsi qu'une ordonnance portant rejet de l'action sans autorisation de déposer une nouvelle déclaration et, subsidiairement, une ordonnance portant radiation ou modification des erreurs typographiques et corrections de certains paragraphes et exigeant la production d'une déclaration « claire » qui ne comporterait aucun renvoi à des mots ou expressions « supprimés » ou biffés. Au soutien de sa requête, Icon a fait valoir que la déclaration modifiée de nouveau ne révèle aucune cause d'action raisonnable, qu'elle n'est pas pertinente, qu'elle est scandaleuse, frivole ou vexatoire et qu'elle constitue autrement un abus de procédure.

[11]            La défenderesse Icon a déposé deux affidavits au soutien de sa requête, soit l'affidavit de Karen Larocque signé le 7 avril 2004 et l'affidavit de Richard Hébert signé le 7 avril 2004. Mme Larocque, qui est secrétaire pour le contentieux d'Icon, a déclaré qu'elle était au courant, que ce soit personnellement ou d'après ce qu'elle croyait, de la déclaration originale, de la déclaration modifiée, de la demande de précisions et de documents ainsi que de la déclaration modifiée de nouveau. Des copies des documents étaient jointes à son affidavit.

[12]            M. Hébert est le président d'Icon. Il a déclaré que les défenderesses ne pouvaient savoir quels étaient les arguments invoqués contre elles, parce que la déclaration déposée par la demanderesse ne comportait pas la moindre précision au sujet des faits pertinents qu'elles se devaient de connaître. Selon M. Hébert, la déclaration modifiée de nouveau de la demanderesse équivalait à une recherche à l'aveuglette visant à utiliser la procédure de la communication de la preuve pour trouver suffisamment de faits au soutien de son action. Il a ajouté que des précisions étaient demandées au sujet des paragraphes 18 et 28 de la déclaration modifiée de nouveau, notamment en ce qui a trait aux allégations selon lesquelles chaque aspect des produits des défenderesses constitue une contrefaçon de chacun des éléments des revendications du brevet 014.

[13]            Lorsqu'il a été contre-interrogé au sujet de son affidavit, M. Hébert a admis qu'il n'avait pas lu les actes de procédure de la demanderesse ni la correspondance qui avait été échangée entre les avocats au sujet des précisions relatives à la déclaration. La protonotaire avait devant elle la transcription du contre-interrogatoire lorsqu'elle a entendu la requête en radiation.

[14]            Pour sa part, la demanderesse a déposé deux affidavits en réponse à la requête en radiation d'Icon, soit les affidavits de MM. David Ironside et Gregory Lekhman. Dans un affidavit qu'il a signé le 10 juin 2004, M. Ironside a résumé l'évolution de l'action de la demanderesse et a joint à son affidavit des copies de certains actes de procédure et ordonnances ainsi que certaines lettres.

[15]            M. Lekhtman est le président de la demanderesse et l'auteur de l'invention visée par le brevet 014. Dans sa réponse à l'affidavit de M. Hébert, il a déclaré qu'il avait personnellement examiné et vérifié tous les produits mentionnés aux paragraphes 20 et 30 de la déclaration modifiée de nouveau. Selon lui, la demanderesse avait exposé de façon suffisamment détaillée les motifs au soutien de son allégation selon laquelle les défenderesses Sears et Icon contreviennent au brevet 014.

[16]            La protonotaire a rejeté les arguments de la demanderesse et accueilli la requête d'Icon. Elle a radié la déclaration modifiée de nouveau et rejeté l'action. Cependant, elle a autorisé la demanderesse à déposer une nouvelle déclaration.

LES ARGUMENTS

[17]            En appel, la demanderesse soutient que la décision de la protonotaire comporte des erreurs de fait et de droit et que celle-ci n'a pas compris les allégations énoncées dans la déclaration modifiée de nouveau. Selon la demanderesse, à ce stade de l'instance, soit au début d'une action engagée au moyen d'une déclaration, elle n'est pas tenue de présenter des éléments de preuve, mais uniquement d'énoncer les allégations de contrefaçon qu'elle formule contre les défenderesses. À cet égard, invoque l'article 174 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106 (les Règles).

[18]            La demanderesse ajoute qu'elle n'a pas formulé de « simples assertions » de contrefaçon contre les défenderesses, mais qu'elle a utilisé les mots « balanced EMG electrodes » (électrodes EMG équilibrées) à titre d'expression abrégée pour décrire l'ensemble des éléments de la revendication 1 du brevet 014, ce qui suffit à établir les faits essentiels au soutien de l'allégation de contrefaçon de brevet, étant donné que le texte de la revendication 1 est reproduit intégralement au paragraphe 11 de la déclaration modifiée de nouveau. La demanderesse soutient qu'elle a fourni un fondement suffisant au soutien de son action contre les défenderesses.

[19]            La demanderesse ajoute que les arguments des défenderesses portaient essentiellement sur les précisions relatives à la déclaration modifiée de nouveau et que, par conséquent, celles-ci auraient dû demander de nouvelles directives à la Cour, conformément à l'ordonnance du 10 novembre 2003.

[20]            En dernier lieu, la demanderesse fait valoir que la protonotaire a commis une erreur en tenant compte de l'affidavit de M. Hébert, étant donné que les Règles prévoient qu'aucun élément de preuve n'est admissible au soutien d'une requête en radiation conformément à l'alinéa 221(1)a) des Règles. La demanderesse ajoute que la preuve de M. Hébert est fausse et n'est pas fiable, car celui-ci n'a pas lu les actes de procédure ou la correspondance connexe et n'est donc pas en mesure d'affirmer que la défenderesse Icon n'est pas au courant des arguments invoqués contre elle.

[21]            C'est la défenderesse Icon qui a pris l'initiative tant en ce qui a trait à la requête en radiation qu'au présent appel. Elle soutient que la protonotaire n'a pas commis d'erreur susceptible de révision en rejetant l'action et qu'il y a lieu de modifier l'ordonnance de façon à interdire à la demanderesse de déposer une nouvelle déclaration, parce qu'il est évident que celle-ci n'a aucune cause d'action raisonnable contre l'une ou l'autre des défenderesses.

[22]            Dans ses observations écrites, la défenderesse Sears appuie les arguments invoqués par Icon et ajoute que, malgré l'application de la norme de contrôle de novo, la Cour ne devrait pas modifier une décision discrétionnaire de la protonotaire lorsque celle-ci n'a commis aucune erreur de principe et qu'elle a compris et appliqué les règles de droit pertinentes. À cet égard, Sears invoque la décision Lavigne c. Canada (Commissaire aux langues officielles) (2004), 261 F.T.R. 126 (1re inst.); conf. (2005), 339 N.R. 239 (C.A.F.).

COMMENTAIRES ET DÉCISION

[23]            L'ordonnance de la protonotaire ayant eu pour effet de rejeter l'action, la norme de contrôle applicable est la norme de novo. À cet égard, j'invoque les jugements Canada c. Aqua-Gem Investments Ltd., [1993] 2 C.F. 425 (C.A.F.), et Z.I. Pompey Industrie c. ECU-Line N.V., [2003] 1 R.C.S. 450. Compte tenu de l'application de la norme de novo en l'espèce, la question à trancher est de savoir si la protonotaire a commis une erreur susceptible de révision lorsqu'elle a fait droit à la requête des défenderesses en vue de radier la déclaration modifiée de nouveau de la demanderesse sans autoriser celle-ci à déposer une nouvelle déclaration, en plus de rejeter la présente action et de permettre l'introduction d'une nouvelle action.

[24]            À mon avis, la protonotaire n'a pas commis d'erreur susceptible de révision. La demanderesse a engagé une action en contrefaçon de brevet. Selon la décision rendue dans Merck & Co. et al. c. Nu-Pharm Inc. (1999), 4 C.P.R. (4th) 522 (protonotaire), la partie qui sollicite une réparation à l'égard de la contrefaçon d'un brevet doit invoquer suffisamment de faits à l'appui de son recours. Cela signifie qu'une partie demanderesse doit donner des détails au sujet des activités qui constitueraient de la contrefaçon. Cette position est articulée clairement dans Dow Chemical Co. c. Kayson Plastics & Chemicals Ltd. (1966), 47 C.P.R. 1 (C. Éch.), à la page 11, où le président Jackett a formulé les remarques suivantes :

[Traduction] En règle générale, dans notre régime de procédure, la déclaration dans laquelle le demandeur affirme qu'on a porté atteinte à ses droits doit établir clairement :

a) les faits en vertu desquels le droit reconnaît au demandeur un droit déterminé;

b) les faits qui constituent une atteinte portée par le défendeur à ce droit déterminé du demandeur.

Si la déclaration ne contient pas ces deux éléments de la cause d'action du demandeur, elle ne révèle aucune cause d'action et peut être rejetée sommairement.


[25]            Dans la présente affaire, je suis convaincue que la demanderesse a établi le premier volet de ce critère, soit l'allégation selon laquelle un droit déterminé lui est reconnu en droit. La demanderesse a satisfait à cette exigence en alléguant qu'elle est propriétaire du brevet 014. Jusqu'à maintenant, ce fait n'a pas été contesté, puisque les défenderesses n'ont pas encore déposé de défense. Cependant, la simple détention d'un brevet ne constitue pas inévitablement un fondement suffisant au soutien d'une action en contrefaçon lorsque les faits qui constituent la contrefaçon ne sont pas précisés.

[26]            La demanderesse soutient que sa déclaration modifiée de nouveau comporte les précisions exigées, étant donné que les mots « quatre électrodes EMG équilibrées » constituent une expression abrégée qui décrit l'ensemble des éléments de la revendication 1 du brevet 014. Selon la demanderesse, ces mots constituent un énoncé suffisant des faits à l'appui de son allégation de contrefaçon contre les défenderesses, étant donné que les autres revendications du brevet sont des revendications dépendantes et que l'équipement fabriqué par Icon et vendu par Sears utilise la technologie des « quatre électrodes EMG équilibrées » .

[27]            À première vue, cet argument de la demanderesse semble logique. Cependant, après avoir analysé plus à fond la déclaration modifiée de nouveau, je conclus que celle-ci ne comporte pas d'allégations précises de contrefaçon à l'endroit des défenderesses, contrairement aux exigences des règles de droit. Une description « abrégée » ne suffit pas. Je reconnais avec les défenderesses qu'elles ne peuvent pas connaître le fondement de l'allégation formulée contre elles en l'absence de précisions concernant les activités de contrefaçon reprochées.

[28]            La demanderesse soutient que la protonotaire n'aurait pas dû tenir compte de l'affidavit de M. Hébert, étant donné que la requête des défenderesses était fondée sur l'alinéa 221(1)a) des Règles, dont voici le libellé :

221. (1) À tout moment, la Cour peut, sur requête, ordonner la radiation de tout ou partie d'un acte de procédure, avec ou sans autorisation de le modifier, au motif, selon le cas :

a) qu'il ne révèle aucune cause d'action ou de défense valable;

[...]

221. (1) On motion, the Court may, at any time, order that a pleading, or anything contained therein, be struck out, with or without leave to amend, on the ground that it

(a) discloses no reasonable cause of action or defence, as the case may be,

...

[29]            Selon la demanderesse, il appert du contre-interrogatoire de M. Hébert que celui-ci n'a jamais lu les actes de procédure ni la correspondance échangée entre les avocats des parties. En conséquence, la Cour devrait conclure à l'impossibilité pour la défenderesse Icon d'affirmer qu'elle ne connaît pas les arguments qu'elle doit réfuter.

[30]            Dans la mesure où les défenderesses invoquent cette Règle, je reconnais que l'affidavit de M. Hébert ne devrait pas être pris en compte. Cependant, la requête en radiation comporte d'autres motifs de rejet, soit le fait que la déclaration n'est pas pertinente ou qu'elle est scandaleuse, frivole ou vexatoire et qu'elle constitue autrement un abus de procédure. Ces motifs sont énoncés comme suit au paragraphe 221(1) des Règles :

221. (1) À tout moment, la Cour peut, sur requête, ordonner la radiation de tout ou partie d'un acte de procédure, avec ou sans autorisation de le modifier, au motif, selon le cas :

a) qu'il ne révèle aucune cause d'action ou de défense valable;

b) qu'il n'est pas pertinent ou qu'il est redondant;

c) qu'il est scandaleux, frivole ou vexatoire;

d) qu'il risque de nuire à l'instruction équitable de l'action ou de la retarder;

e) qu'il diverge d'un acte de procédure antérieur;

f) qu'il constitue autrement un abus de procédure.

Elle peut aussi ordonner que l'action soit rejetée ou qu'un jugement soit enregistré en conséquence.

221. (1) On motion, the Court may, at any time, order that a pleading, or anything contained therein, be struck out, with or without leave to amend, on the ground that it

(a) discloses no reasonable cause of action or defence, as the case may be,

(b) is immaterial or redundant,

(c) is scandalous, frivolous or vexatious,

(d) may prejudice or delay the fair trial of the action,

(e) constitutes a departure from a previous pleading, or

(f) is otherwise an abuse of the process of the Court,

and may order the action be dismissed or judgment entered accordingly.

[31]            M. Hébert ne commente pas de façon précise ces motifs dans son affidavit; cependant, en tout état de cause, il n'est pas certain que la protonotaire se soit fondée sur l'affidavit ou sur la transcription du contre-interrogatoire de M. Hébert pour en arriver à ses conclusions en ce qui a trait aux alinéas 221(1)b), c) et f) des Règles. Quoi qu'il en soit, étant donné qu'il s'agit d'un appel de novo en l'espèce, je peux examiner ces motifs à nouveau.

[32]            Dans Sweet c. Canada (1999), 249 N.R. 17 (C.A.F.), la Cour était saisie d'une requête visant à radier un acte de procédure qui était fondée sur les anciennes Règles de la Cour fédérale et dans le cadre de laquelle des arguments similaires ont été invoqués au sujet de l'absence de pertinence et du caractère vexatoire. Au paragraphe 21, la Cour s'est exprimée comme suit :

Un juge n'a pas pour fonction de remanier les actes de procédure. Toutefois, il lui incombe de procéder à un examen approfondi d'un acte de procédure avant de déterminer qu'il ne peut être sauvegardé par des modifications appropriées. Pour paraphraser mon confrère le juge Stone dans la décision Krause [...], un juge saisi d'une requête en vertu des alinéas 419(1)b ) et c) doit décider si un document est « si vicié qu'il défie toute correction par simple modification » . Une telle décision requiert que l'on procède à un dosage délicat des différents aspects de la question, procédé qui ne répond à aucune norme définie. Chaque acte de procédure doit être évalué individuellement, compte tenu, notamment, de la situation dans laquelle se trouve la partie, des questions et des arguments soulevés, de la manière et du ton avec lesquels ils ont été soulevés, du nombre et de la proportion des allégations viciées et de la facilité avec laquelle les modifications nécessaires peuvent être apportées. [...] [références omises]



[33]            Dans la présente affaire, je suis convaincue que la déclaration modifiée de nouveau comporte des éléments non pertinents, étant donné qu'elle ne renferme pas suffisamment d'allégations de fait claires à l'appui de l'action. Bien que cette lacune suffise en soi pour radier l'acte de procédure conformément à l'alinéa 221(1)a) des Règles, elle appuie également une ordonnance portant radiation en application des alinéas 221(1)b) et c) des Règles.

[34]            Le dernier motif invoqué au soutien de la contestation de la déclaration modifiée de nouveau est le fait que celle-ci constitue un abus de procédure. Les défenderesses citent l'arrêt Kastner c. Painblanc (1994), 58 C.P.R. (3d) 502 (C.A.F.), où la Cour d'appel fédérale a conclu qu'une partie demanderesse qui intente une action en se fondant sur le simple espoir que « quelque chose se produise » commet un abus de procédure. Dans la présente affaire, les défenderesses font valoir que les lacunes de la déclaration modifiée de nouveau mènent à la conclusion que la demanderesse n'a aucune cause d'action et veut utiliser la procédure préalable à l'instruction, y compris la communication de la preuve, pour trouver un fondement d'action contre elles.

[35]            Je ne suis pas disposée à en arriver à cette conclusion, compte tenu des documents déposés. Pour les motifs exposés plus haut, les actes de procédure que la demanderesse a déposés ne sont pas suffisants, mais il n'est pas nécessaire que j'en arrive à la conclusion, à ce stade-ci, qu'ils constituent un abus de procédure.

[36]            En conséquence, l'appel de la demanderesse est rejeté. Je refuse de modifier l'ordonnance de la protonotaire en ce qui concerne l'autorisation relative au dépôt d'une nouvelle action par la demanderesse. Les défenderesses ont droit à leurs dépens taxés.

ORDONNANCE

            L'appel est rejeté. Les défenderesses ont droit à leurs dépens taxés.

                                                                                                            « E. Heneghan »

Juge

Traduction certifiée conforme

Thanh-Tram Dang, B.C.L., LL.B.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                     T-694-03

INTITULÉ :                                                    BIOSIG INSTRUMENTS INC.

                                                                        c.

                                                                        SEARS CANADA INC. et ICON DU CANADA INC.

LIEU DE L'AUDIENCE :                              MONTRÉAL (QUÉBEC)

DATE DE L'AUDIENCE :                            LE 17 AOÛT 2005

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :             MADAME LA JUGE HENEGHAN

DATE DES MOTIFS :                                   LE 16 FÉVRIER 2006

COMPARUTIONS:

Leon Maliniak

POUR LA DEMANDERESSE

Adam Bobker

Kenneth D. Hanna

POUR LA DÉFENDERESSE SEARS CANADA INC.

POUR LA DÉFENDERESSE ICON DU CANADA INC.

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

Maliniak & Ironside

Montréal (Québec)

POUR LA DEMANDERESSE

Bereskin & Parr

Toronto (Ontario)

Ridout & Maybee LLP

Toronto (Ontario)

POUR LA DÉFENDERESSE SEARS CANADA INC.

POUR LA DÉFENDERESSE ICON DU CANADA, INC.

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